ESPAGNE
Les
polices municipales sont régies par
la loi organique n° 2
du 13 mars 1986 sur les "
forces et corps de
sécurité "
.
|
I. L'ORGANISATION DE LA SECURITE INTERIEURE
La loi organique de 1986 distingue trois catégories de " forces et corps de sécurité " : ceux de l'Etat, composés de la police nationale et de la garde civile, ceux des communautés autonomes et ceux des collectivités locales.
1) La police nationale
Elle est
chargée de la police administrative et de la police judiciaire en
milieu urbain
. Elle se déploie en effet dans les capitales de
province
(
2(
*
)
)
et dans certaines
agglomérations, déterminées par un texte
réglementaire.
Placée sous l'autorité du ministère de l'Intérieur,
elle compte environ 50.000 agents. C'est une force
civile
.
2) La garde civile
Forte d'environ 75.000 hommes, elle exerce les mêmes compétences que la police nationale , mais seulement dans les parties du territoire où la police n'est pas compétente, c'est-à-dire en milieu rural , ainsi que sur les eaux territoriales. La garde civile est un corps militaire, mais il est placé sous la double autorité du ministère de l'Intérieur et de celui de la Défense.
3) Les polices des communautés autonomes
Les
communautés autonomes ont, en vertu de l'article 149-1-29 de la
constitution
(3(
*
))
, la
possibilité de créer leur propre force de police. Trois d'entre
elles, la Catalogne, le Pays basque et la Navarre l'ont fait. Les polices des
communautés autonomes comptent environ 11.000 personnes.
Trois autres communautés autonomes, la Galice, l'Andalousie et Valence,
n'ont pas créé leur propre force de police mais ont
sollicité de l'Etat la mise à disposition
d'éléments de la police nationale (environ 600 pour les trois
communautés) pour exercer les pouvoirs de police qui appartiennent aux
communautés autonomes (veiller à l'application de leurs textes,
protéger leurs organes, leurs édifices...).
Indépendamment de ces compétences qui leur sont
réservées, les polices des communautés autonomes
collaborent avec la police nationale. En pratique, de nombreux problèmes
de coordination se posent, notamment en matière de police
judiciaire.
4) Les polices municipales
Le
décret législatif du 18 avril 1986 approuvant le texte
refondu des dispositions législatives en vigueur en matière de
régime local prévoit, dans sa disposition transitoire
n° 4, que seules les
communes comptant plus de 5.000 habitants
peuvent décider la création d'une police municipale. Dans les
communes plus petites, la création d'une police municipale suppose
l'autorisation du ministère chargé de l'administration
territoriale. Cette autorisation est accordée de façon
discrétionnaire. De plus, la loi organique de 1986 prévoit
que, dans les communes qui ne disposent pas d'une police municipale, ses
missions sont exercées par le personnel municipal chargé de la
surveillance (vigiles, appariteurs, veilleurs de nuit...).
Les polices municipales sont placées sous l'autorité du maire,
mais elles peuvent être soumises au
contrôle des
communautés autonomes
, en vertu de l'article 148 de la constitution
qui énonce que : "
Les communautés autonomes
pourront assumer des compétences dans les matières
suivantes : (...) la coordination et d'autres fonctions en rapport avec
les polices locales (...)
".
Indépendamment de leurs attributions de police administrative, la loi de
1986 sur les "
forces et corps de sécurité
"
reconnaît aux polices municipales la compétence pour
collaborer
avec les forces de police de l'Etat dans les domaines de la police judiciaire
et de la sécurité publique.
Les polices municipales connaissent un grand essor : leurs effectifs ont
doublé entre 1975 et 1995. Elles comptent actuellement environ
48.000 agents, répartis en environ 1.700 corps qui sont de
taille très variable. En effet, plus de 200 d'entre eux ne comportent
qu'un seul agent, tandis que la ville de Madrid dispose de 6.000 policiers
municipaux.
Les communes dotées d'un corps de policiers municipaux
représentent 21 % de toutes les communes et presque 90 % de
l'ensemble de la population.
Le tableau suivant met en évidence l'importance croissante de la police
municipale avec la taille de la commune.
Taille de la commune |
Pourcentage des communes possédant un corps de police municipale |
Effectif moyen du corps de police municipale |
de 5.000 à 10.000 habitants |
92,1 |
9 |
de 10.000 à 20.000 habitants |
97,3 |
19,3 |
de 20.000 à 100.000 habitants |
98,5 |
53,6 |
plus de 100.000 habitants |
100 |
424,9 |
II. LE STATUT DES POLICIERS MUNICIPAUX
En vertu du principe d'autonomie communale, chaque commune jouit d'une pleine liberté pour organiser sa police. Ce principe se trouve toutefois limité : d'une part, par les dispositions nationales applicables aux policiers municipaux et, d'autre part, par les fonctions de coordination dévolues par la même loi aux communautés autonomes.
1) Les dispositions nationales applicables aux policiers municipaux
Elles se
subdivisent en deux catégories : les dispositions communes
applicables à toutes les forces de police, nationales ou non, et celles
qui concernent spécifiquement les policiers municipaux.
a) Les dispositions communes à toutes les forces de police
On les trouve essentiellement dans la loi organique de 1986 dont
l'article 5 constitue en quelque sorte un
code de
déontologie
qui s'applique à toutes les forces de police, y
compris aux forces municipales. Ces dernières sont donc soumises aux
principes de légalité, de neutralité, de secret
professionnel, de responsabilité...
Les articles 6 à 8 comportent les
dispositions statutaires communes
à tous les membres des forces de police
. Ils insistent sur le
caractère professionnel et permanent de la formation des policiers et
prévoient que l'exercice de cette activité professionnelle est
incompatible avec toute autre activité, publique ou privée. Ils
prévoient aussi que tous les membres des forces de police prêtent
serment à la constitution et qu'ils sont " agents de
l'autorité ". Ceci signifie que les membres de la police municipale
jouissent d'une protection juridique spéciale (contre les injures et les
menaces par exemple).
b) Les dispositions spécifiques aux policiers municipaux
Elles sont contenues dans le titre V de la loi organique de 1986 et dans la
législation sur les collectivités locales.
La loi de 1986
Les dispositions spécifiques aux policiers municipaux figurent dans le
titre V intitulé " Des polices locales ". Cet intitulé
pourrait laisser croire à l'existence d'autres polices
locales
(
4(
*
)
)
que les
polices municipales. Il n'en est rien, car la loi de 1986, ainsi que la
législation sur les collectivités locales, réservent aux
communes la possibilité de créer des corps de police.
Le titre V de la loi de 1986 précise que les corps de police municipale
sont des
forces armées civiles
dont le rayon d'action est
limité au territoire communal, sauf dans les situations d'urgence. Il
prévoit le
port obligatoire de l'uniforme
, sauf autorisation
exceptionnelle donnée par le gouverneur de la province. En pratique, des
textes réglementaires pris au niveau national déterminent les
principales caractéristiques des uniformes. Le port d'un écusson
placé sur la manche et comportant les armes et le nom de la commune est
la seule marque distinctive autorisée.
La législation sur les collectivités locales
Le décret-loi du 18 avril 1986 approuvant le texte refondu des
dispositions législatives en vigueur en matière de régime
local prévoit l'existence d'un seul corps de policiers municipaux dans
les communes où il existe une police municipale.
Ce corps, commandé par un chef, est placé sous
l'autorité directe du maire
. Il se compose d'un
cadre
opérationnel
comportant quatre grades (sous-officier, sergent,
caporal et agent) et d'un
cadre technique
. Le cadre technique est
constitué par des officiers, des sous-inspecteurs et des inspecteurs.
Seules les polices municipales des villes de plus de 100.000 habitants
sont autorisées à créer des emplois de sous-inspecteur et
d'inspecteur.
L'entrée dans la police municipale se fait par
concours
. Il faut
être âgé
d'au plus trente ans
et répondre
aux conditions physiques exigées pour être admis à
concourir. En pratique, le concours, qui comporte des épreuves
théoriques et pratiques, permet d'entrer dans
un centre de
formation
. A court terme, toutes les communautés autonomes devraient
se doter d'un tel centre. Bien que chaque centre soit indépendant et que
la durée de formation varie (de quatre à neuf mois), les
communautés autonomes ont entrepris un effort d'uniformisation.
2) La coordination des polices municipales par les communautés autonomes
Elle est
prévue par la constitution et par la loi de 1986 dont l'article 39
énonce qu'elle peut porter sur les points suivants :
- établir des normes générales auxquelles les
règlements de polices municipales doivent s'adapter ;
- favoriser l'homogénéisation des différentes polices
locales pour ce qui concerne les moyens techniques, les uniformes et les
rémunérations ;
- fixer les critères de sélection, de formation, de promotion et
de mobilité des polices locales ;
- coordonner la formation professionnelle des polices locales.
Toutes les communautés autonomes, à l'exception de celle des
îles Canaries, ont adopté des lois de coordination des polices
municipales
. Plusieurs d'entre elles ont fait l'objet de recours pour
inconstitutionnalité. Dans plusieurs décisions, rendues en 1993,
le Tribunal constitutionnel a fait le point sur les limites des missions de
coordination accordées aux communautés autonomes. Il a en
particulier estimé que la loi de coordination des polices locales
adoptée par la communauté autonome de Valence n'était pas
constitutionnelle parce qu'elle subordonnait la création de postes de
policiers municipaux à l'autorisation de la communauté autonome.
Les fonctions de coordination des communautés autonomes ne peuvent donc
pas s'opposer au principe d'autonomie communale.
III. LES COMPETENCES DE LA POLICE MUNICIPALE
1) Les missions de la police municipale
La loi
de 1986 dispose que "
les corps de police locale doivent exercer les
fonctions suivantes :
" a) protéger les autorités des collectivités
locales, surveiller et garder leurs édifices et installations ;
" b) régler et diriger le trafic dans le périmètre
urbain et procéder à la signalisation, en accord avec les
règles de circulation ;
" c) établir les constats d'accidents de la circulation à
l'intérieur de la ville ;
" d) police administrative, pour tout ce qui concerne les
arrêtés municipaux et les autres dispositions dans les limites de
sa compétence ;
" e) participer aux fonctions de police judiciaire (
5(
*
)
), conformément à ce
qu'établit l'article 29-2 (
6(
*
)
)
de la présente loi ;
" f) prêter secours en cas d'accident, de catastrophe ou de
calamité publique, en participant, comme le prévoient les lois,
à l'exécution des plans de protection civile ;
" g) effectuer les démarches préventives et tout mettre en
oeuvre pour empêcher la réalisation d'actes délictueux,
dans le cadre de la collaboration établi par les assemblées de
sécurité (
7(
*
)
) ;
" h) surveiller les espaces publics et collaborer avec les forces et corps
de sécurité de l'Etat et des communautés autonomes, pour
la protection lors des manifestations et le maintien de l'ordre dans les grands
rassemblements humains, lorsqu'ils sont requis ;
" i) coopérer pour la résolution des conflits privés,
lorsqu'ils sont requis ".
La loi précise que les activités correspondant aux points c) et
g) doivent faire l'objet d'un rapport aux forces nationales compétentes.
Comme, par ailleurs, la participation aux fonctions de police judiciaire
prévue par le point e) consiste en une simple collaboration avec les
autres forces de police, cette énumération met en évidence
la grande autonomie de la police municipale en matière de police
administrative et son rôle secondaire en matière de police
judiciaire.
2) L'armement
La
décision d'armer la police municipale est prise par le maire. Le
régime de la production, du commerce, de la détention et de
l'usage des armes et des explosifs relevant de la compétence exclusive
de l'Etat, un décret précise de quelles armes les polices
municipales peuvent être équipées. Ce texte prévoit
que les membres des polices municipales peuvent posséder les armes
nécessaires pour le service et pour l'entraînement, après
autorisation de la Direction générale de la garde civile.
En pratique, la plupart des policiers municipaux sont armés. Ils ont le
plus souvent un pistolet de calibre 9 mm.