N° 13

SENAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 2 octobre 1997.

PROPOSITION DE LOI

tendant à compléter l'article L. 30 du code électoral relatif à l'inscription sur les listes électorales en dehors des périodes de révision,

PRESENTEE

Par M. Michel DREYFUS-SCHMIDT et les membres du groupe socialiste (1) et apparentés (2),

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

(1) Ce groupe est composé de : MM. Guy Allouche, Bernard Angels, François Autain, Germain Authié, Robert Badinter, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Jean Besson, Pierre Biamès, Marcel Bony, Jean-Louis Carrère, Robert Castaing, Francis Cavalier-Bénezet, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Gilbert Chabroux, Michel Charasse, Marcel Charmant, Michel Charzat, William Chervy, Raymond Courrière, Roland Courteau, Marcel Debarge, Bertrand Delanoë, Gérard Delfau, Jean-Pierre Demerliat, Mmes Dinah Derycke, Marie-Madeleine Dieulangard, M. Michel Dreyfus-Schmidt, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut, Claude Estier, Léon Fatous, Aubert Garcia, Claude Haut, Roger Hesling, Roland Huguet, Philippe Labeyrie, Guy Lèguevaques, Philippe Madrelle, Jacques Mahéas, Michel Manet, Marc Massion, Pierre Mauroy, Georges Mazars, Jean-Luc Mélenchon, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Jean-Baptiste Motroni, Jean-Marc Pastor, Guy Penne, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Jean-Claude Peyronnet, Louis Philibert, Bernard Piras, Mmes Danièle Pourtaud, Gisèle Printz, MM. Roger Quilliot, Paul Raoult, René Régnault, Roger Rinchet, Michel Rocard, Gérard Roujas, René Rouquet, André Rouvière, Claude Saunier, Michel Sergent, Franck Sérusclat, René-Pierre Signé, Fernand Tardy, André Vézinhet, Marcel Vidai, Henri Weber.

(2) Apparentés : MM. Rodolphe Désiré, Dominique Larifla, Claude Lise. Elections et référendums. - Listes électorales - Radiation.

EXPOSE DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

Le code électoral prévoit deux catégories de radiation d'un électeur de la liste électorale : la radiation hors délai (c'est-à-dire hors de la période de révision de la liste) et la radiation au moment de la révision de la liste.

1. La radiation hors délai peut être effectuée, selon le cas, sans formalité ou après notification.

- La radiation hors délai et sans formalité ne concerne qu'un nombre limité de cas :

- les électeurs décédés dans la commune ;

- les électeurs décédés hors de la commune, sur avis de l'INSEE ;

-les électeurs dont la radiation résulte d'une décision du juge d'instance ou d'un arrêt de la Cour de cassation rendu sur pourvoi contre cette décision ;

-les électeurs faisant l'objet d'un avis aux fins de radiation émis par l'INSEE (électeurs ayant demandé et obtenu leur inscription dans une autre commune, électeurs déchus de la capacité électorale, électeurs inscrits sous un faux état-civil, électeurs inscrits à tort en dehors de la période de révision).

Ces radiations sont effectuées sans formalité particulière de notification.

- La radiation hors délai mais après notification.

Ces radiations interviennent lorsqu'à la suite d'un contrôle, l'INSEE détecte qu'un électeur est en situation d'inscriptions multiples.

L'INSEE avise dans ce cas le préfet du département où se situe la commune de la dernière inscription, qui saisit à son tour le maire.

Celui-ci doit aussitôt notifier à l'électeur que sauf opposition de sa part, il sera maintenu sur la liste de cette commune et rayé d'office de toutes les autres listes sur lesquelles il figure (la notification s'effectue par remise directe par un agent municipal ou par courrier recommandé avec accusé de réception).

L'électeur dispose de huit jours pour répondre.

S'il désire être maintenu sur la liste de la commune, ou s'il n'a pas répondu dans ce délai de huit jours, le maire avise aussitôt le ou les autres maires des radiations à effectuer.

Si l'électeur a au contraire fait connaître son souhait de figurer sur une autre liste, la commission administrative procède à la radiation et avise, le cas échéant, le ou les maires de toutes les autres communes où des radiations restent à opérer (à l'exception, bien sûr, du maire de la commune où l'électeur a demandé à demeurer inscrit).

2. Les autres radiations sont effectuées lors de la révision annuelle de la liste électorale.


• Entre le 1 er et le 9 janvier, la commission administrative dresse les tableaux rectificatifs tenant compte :


• des radiations sans examen au fond des personnes qui auraient dû être radiées hors délai mais qui ne l'ont pas été pour une raison ou pour une autre (c'est-à-dire des personnes entrant dans l'une des catégories énumérées ci avant) ;


• des radiation d'office des personnes pour lesquelles il est apporté la preuve qu'elles n'entraient plus au 31 décembre dans aucune des situations permettant leur maintien sur la liste électorale (les personnes inscrites par erreur lors de la précédente révision - même si leur inscription n'a pas fait l'objet d'un recours - et les personnes qui ne remplissent plus les conditions pour être inscrites dans\ la commune).


•Avant toute radiation d'office, la décision est notifiée dans les deux jours à l'intéressé par écrit et à domicile, l'avis précisant les motifs de la décision et informant l'électeur que dans les dix jours de publication des tableaux rectificatifs, il pourra contester la décision devant le juge d'instance. L'avis informe en outre l'électeur qu'il peut présenter ses observations dans les vingt-quatre heures. Au vu de ces observations, la commission administrative prend une nouvelle décision, notifiée à son tour dans les mêmes délais et les mêmes formes.


• Le 10 janvier, les tableaux rectificatifs sont affichés aux lieux accoutumés, les tableaux originaux étant en outre tenus en mairie à la disposition de tout requérant.

L'affichage, qui dure dix jours, informe les électeurs qu'ils ont la possibilité de saisir le juge d'instance entre le 11 et le 20 janvier.

Si le préfet estime que les formalités et les délais prescrits n'ont pas été respectés, il défère les opérations au tribunal administratif qui statue dans les trois jours et fixe, s'il y a lieu, un nouveau délai dans lequel les opérations annulées devront être refaites.


• Les recours contre les décisions mentionnées au tableau rectificatif sont formés dans les dix jours (c'est-à-dire entre le 11 et le 20janvier) auprès du tribunal d'instance, par écrit ou par oral (le ministère d'avocat n'étant pas obligatoire).

Le tribunal statue sans frais ni formes de procédure et sur avertissement donné aux parties au moins trois jours à l'avance.

La décision du tribunal est notifiée dans les trois jours à l'électeur (ou au tiers requérant) et au préfet, le maire étant avisé dans le même délai.

L'électeur, le cas échéant le tiers requérant et le préfet (mais pas le maire) peuvent se pourvoir en cassation dans les dix jours de la ratification, ce pourvoi n'étant cependant pas suspensif (les électeurs radiés ayant formé un pourvoi ne pourront donc pas voter d'ici à ce qu'il soit statué définitivement).


• Le dernier jour du mois de février, la commission administrative consigne les dernières rectifications résultant des jugements du tribunal d'instance, des arrêts de la Cour de cassation et des avis aux fins de radiation émis dans l'intervalle par l'INSEE (et, le cas échéant, des décès survenus depuis la publication du tableau rectificatif).

La nouvelle liste après révision résulte :

- de la liste de l'année précédente, d'où ont été retranchées les personnes rayées jusqu'au dernier jour de février ;

- de la liste des nouveaux inscrits au titre du tableau rectificatif.

* *

*


• Les personnes radiées hors délai par suite de la perte du droit électoral ne peuvent ignorer leur situation et ont déjà pu exercer les recours prévus contre les décisions ayant entraîné leur privation des droits civiques.

Hors ce cas, on constate que la procédure se déroule de telle sorte qu'aucun électeur ne peut être radié d'une liste électorale à son insu et qu'il dispose toujours de voies de recours pour lui permettre de faire valoir à temps son droit au maintien sur la liste.

L'article L. 34 du code électoral permet de surcroît de régler le problème des personnes qui auraient été omises sur la liste par suite d'une erreur purement matérielle ou en reconnaissance des formalités prévues (radiation d'office ou sur décision de la commission administrative).

En pareil cas, l'électeur peut directement saisir le juge du tribunal d'instance, compétent pour statuer jusqu'au jour du scrutin.

S'il est fait droit à sa réclamation, l'électeur sera porté provisoirement sur la liste nonobstant la clôture des opérations de révision, de façon à ce qu'il puisse voter au plus prochain scrutin. Il pourra ensuite être inscrit ou radié dans les formes légales lors de la révision suivante.


• Pour autant, ce dispositif ne règle pas de manière pleinement satisfaisante le problème des personnes dûment informées de leur radiation au moment des opérations de révision et qui ont renoncé à exercer les voies de recours ou dont les recours ont été rejetés. En effet, ces électeurs se verront radiés au dernier jour du mois de février, c'est-à-dire après l'expiration du délai pendant lequel ils auraient pu demander leur inscription dans une autre commune (jusqu'au 31 décembre de l'année précédente).

Ces électeurs n'entrant pas dans les quelques cas d'inscription hors délai limitativement énumérés par l'article L. 30 du code électoral (les personnes atteignant leur majorité après la clôture des délais d'inscription, les personnes ayant recouvré la capacité électorale dont elles étaient privées par suite d'une décision de justice et les personnes acquérant la nationalité française, notamment), ils seront ainsi privés de toute possibilité de voter avant la clôture des opérations de révision de l'année suivante.

Les services du ministère de l'intérieur objectent que cette sanction est entièrement imputable à la négligence de l'électeur, dès lors qu'il ne pouvait ignorer la situation devant conduire à sa radiation au moment de la révision (un changement de domicile réel en cours d'année, par exemple, ou la perte de la qualité de contribuable local).

Il est vrai que d'un point de vue purement juridique, il appartient à tout électeur de faire diligence pour demander dans les délais requis son inscription dans sa nouvelle commune.


• Ce raisonnement se heurte cependant à plusieurs objections.

Ainsi, un électeur peut fort bien, en toute bonne foi, être persuadé qu'il remplit encore les conditions pour demeurer inscrit sur la liste où il figurait jusqu'à présent. Faute d'avoir convenablement apprécié sa situation, il se verra rayé sans avoir pris soin de demander son inscription dans une autre commune.

D'autre part, les voies de recours offrent des garanties suffisantes contre les radiations non fondées mais ne permettent pas de remédier immédiatement aux conséquences d'une radiation fondée.

* *

*

Cette situation est généralement ressentie comme une grave injustice par les personnes radiées sans s'y attendre.

Pour y remédier sans remettre trop radicalement en cause le principe de l'inscription uniquement pendant la période de révision, une solution pourrait consister à ouvrir à tout électeur radié une possibilité d'inscription hors période de révision à condition d'en présenter la demande pendant un bref délai - quinze jours, par exemple - à compter du jour de sa radiation.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

L'article L. 30 du code électoral est complété par un nouvel alinéa ainsi rédigé :

« Peuvent également être inscrites sur les listes électorales en dehors des périodes de révision, les personnes rayées des listes dans une autre commune, à condition d'en formuler la demande dans les quinze jours à compter du jour où leur radiation a pris effet. »

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