Avis n° 72 (2002-2003) de M. Paul BLANC , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 21 novembre 2002

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N° 72

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 2002

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2003 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME I

SOLIDARITÉ

Par M. Paul BLANC,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Christian Bergelin, Joël Billard, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, André Geoffroy, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mmes Valérie Létard, Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 230 , 256 à 261 et T.A. 37

Sénat : 67 (2002-2003)

Lois de finances .

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Les crédits consacrés à la solidarité s'élèvent à 13 milliards d'euros dans le projet de budget pour 2003, ce qui représente une augmentation de 5,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002.

Votre rapporteur tient à saluer l'effort de clarification budgétaire effectué au sein des ministères sociaux, à travers la constitution de nouveaux agrégats, qui constitue un premier pas, certes encore perfectible, dans la mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

Comme il le soulignait l'an passé, votre rapporteur rappelle que la question qui doit se poser lors de l'examen de ces crédits est celle de savoir si le budget permet, non pas de « dépenser plus », mais de « dépenser mieux ». Cette année, la réponse est incontestablement positive.

Dans un contexte de croissance ralentie et de dégradation du marché de l'emploi, les dépenses relatives aux minima sociaux repartent à la hausse. Le projet de budget pour 2003 fait le pari, légitime et nécessaire, d'une redynamisation de la démarche d'insertion. Votre rapporteur l'approuve, en soulignant toutefois que cet objectif est indissociable de la réforme du revenu minimum d'insertion (RMI) qui doit aboutir au cours de l'année 2003, à l'instauration d'un véritable revenu minimum d'activité (RMA).

La progression des dépenses afférentes aux minima sociaux, qui représentent plus des trois quarts du budget, n'empêche pas la mise en oeuvre d'un programme important de lutte contre les exclusions. Celui-ci s'appuie sur le développement du réseau des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), une meilleure prise en compte des besoins liés à l'accueil des étrangers en situation précaire et un effort envers les établissements de formation des travailleurs sociaux poursuivi et amplifié.

Concernant les personnes handicapées, votre rapporteur est heureux de constater que le présent projet de budget a pris acte de la priorité donnée, le 14 juillet dernier par le Président de la République, à leur intégration dans notre société.

Les mesures nouvelles inscrites au présent projet de budget répondent à un certain nombre des attentes des personnes handicapées et de leurs familles : le développement de places nouvelles en centres d'aide par le travail (CAT), un effort important en faveur des services d'auxiliaires de vie, et notamment des services dédiés aux personnes les plus lourdement handicapées, la généralisation tant attendue des « sites pour la vie autonome » , qui préfigurent le guichet unique de la compensation du handicap et l'orientation prise en faveur de l'intégration des enfants handicapés en milieu scolaire constituent des avancées incontestables, et l'effort en faveur du handicap doit être apprécié à sa juste valeur, dans un contexte budgétaire contraint.

Les personnes handicapées attendent cependant aujourd'hui une révision de la loi d'orientation du 30 juin 1975, et le rapport de votre commission des affaires sociales sur la compensation du handicap du 24 juillet 2002 montre à quel point des progrès sont indispensables pour améliorer l'intégration des personnes handicapées.

Emblématiques de notre système de prise en charge du handicap, les Commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) doivent, tout d'abord, achever au plus vite leur réforme. Votre commission a rappelé à cet égard trois priorités : l'amélioration de l'accueil et de la participation des personnes handicapées et de leurs familles au sein des commissions, un nécessaire changement de la logique d'évaluation des COTOREP, pour placer les potentialités de la personne au coeur de leur appréciation et la nécessité de favoriser la mobilité entre les différents types de prise en charge, afin non plus de procéder à des orientations, mais de construire des parcours.

Il est, par ailleurs, nécessaire de donner aux personnes handicapées les moyens d'un véritable choix de vie, à travers une allocation compensatrice profondément rénovée prenant en compte les besoins de la personne et non ses ressources, et financée par l'Etat au titre de la solidarité nationale.

Votre commission a également rappelé ses propositions en matière d'accessibilité du cadre de vie, car celle-ci conditionne l'intégration sous toutes ses formes, qu'elle soit scolaire, professionnelle ou sociale.

Le système de prise en charge du handicap doit enfin accompagner l'évolution des besoins de la population handicapée et de leurs familles : un accent doit être mis sur le développement de structures d'accueil de jour et d'accueil temporaire, ainsi que sur la définition des structures adaptées aux personnes handicapées vieillissantes.

Sur toutes ces questions, votre commission est consciente que le projet de budget pour 2003 est un budget de transition, dans l'attente de la révision de la loi d'orientation du 30 juin 1975, et elle ne doute pas que le Gouvernement saura répondre aux attentes des personnes handicapées sur ce point.

Concernant l'action sociale et médico-sociale, votre commission a constaté que la dépense sociale départementale était entrée dans un nouveau cycle de hausse, du fait de deux facteurs, le passage aux 35 heures et la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie .

L'année 2002 correspond également à la levée de deux incertitudes, concernant d'une part les heures d'équivalence en chambre de veille et d'autre part la question du maintien du niveau des rémunérations pendant la période transitoire de passage aux 35 heures, qui pesaient sur l'évolution des charges des établissements médico-sociaux, et donc indirectement sur l'aide sociale départementale.

La levée de ces incertitudes n'écarte toutefois pas la possibilité de nouveaux conflits et c'est la raison pour laquelle votre commission demande une modernisation de la gestion budgétaire et comptable des établissements sociaux et médico-sociaux, de manière à donner aux associations gestionnaires les moyens d'une planification budgétaire à plus long terme. La clarification des relations financières permettrait à ces mêmes établissements de responsabiliser les partenaires sociaux concernant les conséquences financières des accords collectifs.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission vous proposera d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à la solidarité pour 2002.

I. LA PROGRESSION DES DÉPENSES AFFÉRENTES AUX MINIMA SOCIAUX N'EMPÊCHE PAS LA MISE EN oeUVRE D'UN PROGRAMME IMPORTANT DE LUTTE CONTRE LES EXCLUSIONS

Les crédits de la solidarité relèvent dorénavant de deux ministères : le ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité et le ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Ils s'élèvent à 13 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2003, soit une progression de 5,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002 1 ( * ) .

Il faut souligner que la structure du budget dans ses agrégats connaît une évolution significative « qui tient compte de la nouvelle structure gouvernementale et des travaux d'ores et déjà menés pour réfléchir à la future structure de programme qui sera nécessaire dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances » 2 ( * ) .

Modifications de la nomenclature budgétaire intervenues
dans le projet de loi de finances pour 2003

La décomposition en agrégats du fascicule « Santé, famille, personnes handicapées et solidarité » a été modifiée à l'occasion du projet de budget pour 2003. Les crédits se décomposent désormais en six agrégats (au lieu de cinq) :

- deux agrégats placés sous la responsabilité du ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité :

l'agrégat 23 « Développement social » ne regroupe plus que les crédits relatifs à la formation en travail social, aux droits des femmes, aux personnes âgées et aux rapatriés ;

l'agrégat 24 « Intégration et lutte contre les exclusions » se limite pour l'essentiel aux crédits « RMI », puisque les deux autres principaux postes (CMU et API) ont été transférés respectivement aux agrégats 22 (« Offre de soins et accès aux soins ») et 25 (« Famille et personnes handicapées ») ;

- trois agrégats placés sous la responsabilité du ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées :

l'agrégat 21 « Santé publique et sécurité sanitaire » , pour l'essentiel inchangé ;

l'agrégat 22 « Offre de soins et accès aux soins » , augmenté des crédits CMU ;

un nouvel agrégat 25 « Famille et personnes handicapées » qui regroupe des crédits relatifs à l'AAH et à l'API, auparavant placés dans l'agrégat 24 et l'ensemble des crédits relatifs à la famille et aux personnes handicapées ;

- un agrégat placé sous la responsabilité conjointe des deux ministres :

l'agrégat 31 « Gestion des politiques de santé et de solidarité » , inchangé, qui regroupe les crédits de fonctionnement des deux ministères.

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des crédits de la solidarité, selon cette nouvelle nomenclature budgétaire.

LFI 2002

PLF 2003

Évolution (en %)

Crédits de la responsabilité du ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité

Intégration et lutte contre l'exclusion

5.473

5.750

5,0

Développement social

309

310

0,3

Total

5.782

6.060

4,8

Crédits de la responsabilité du ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées

Famille et personnes handicapées

6548

6936

5,9

TOTAL

12.325

12.991

5,4

Les crédits plus spécialement consacrés à la lutte contre l'exclusion représentent donc 5,7 milliards d'euros , soit 37 % des crédits de la solidarité, en augmentation de 5 % par rapport à 2002.

Pour une présentation exhaustive des crédits consacrés à la solidarité, votre rapporteur rappelle que les crédits de la couverture maladie universelle, qui figurent désormais dans l'agrégat « Offre de soins et accès aux soins » , s'élèvent à 970 millions d'euros et augmentent ainsi de 4,3 %.

D'autre part, même si les autres minima sociaux (allocation de parent isolé [API] et allocation aux adultes handicapés [AAH]) relèvent, eux aussi, désormais d'autres agrégats, votre rapporteur tient à en faire une présentation globale, dans la mesure où leur évolution éclaire la conjoncture économique et budgétaire et permet d'apprécier l'effort du Gouvernement en dépit de la pression à la hausse qu'ils exercent.

A. LE RALENTISSEMENT DE LA CROISSANCE ENTRAÎNE À LA HAUSSE LES DÉPENSES OBLIGATOIRES DE SOLIDARITÉ

1. Des prévisions fragiles concernant le RMI

Le retour à la croissance entre 1997 et 2001 aurait pu laisser espérer une baisse plus rapide des effectifs du RMI. A l'inverse, la dégradation de la conjoncture en 2002 et les incertitudes pesant encore sur la reprise de la croissance en 2003 fait craindre une nouvelle reprise à la hausse du nombre d'allocataires : en effet, si le dispositif du RMI met du temps à bénéficier du retour à la croissance, il enregistre tout de suite les effets d'une dégradation de la conjoncture .

Peuvent bénéficier du RMI tous les résidents en France, sans condition de nationalité -une condition de résidence de trois ans étant toutefois requise pour les ressortissants de pays étrangers- à condition qu'ils soient âgés de plus de 25 ans et qu'ils ne soient pas étudiants, ou s'ils ont moins de 25 ans, qu'ils aient un enfant à charge. L'allocation versée complète les ressources des intéressés de façon à leur garantir un revenu minimum fixé à 405,62 euros par mois au 1 er janvier 2002 pour une personne isolée sans enfant à charge et à 608,43 euros par mois pour un couple (ce montant étant majoré de 121,69 euros par mois pour les deux premiers enfants à charge et de 162,25 euros pour les suivants). L'allocation est conditionnée à un engagement du bénéficiaire à participer aux actions ou activités définies avec lui et nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle. Cet engagement doit normalement être formalisé dans un contrat d'insertion.

a) Des crédits qui correspondent à une fourchette basse de dépenses

Les crédits consacrés au RMI s'élèvent à 4,46 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2003, soit une hausse de 0,9 % par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2002. A titre de comparaison, ces mêmes crédits diminuaient de 2,1 % dans la loi de finances pour 2002.

Cependant, affichés en baisse dans la loi de finances initiale, ils ont dû faire l'objet d'une ouverture de crédits supplémentaires de 700 millions d'euros dans la loi de finances rectificative de juillet 2002.

Cette ouverture de crédits visait certes, à hauteur de 400 millions d'euros, à rembourser la dette de l'Etat à l'égard de la CNAF, au titre des exercices précédents, constituant par là un effort appréciable de sincérité budgétaire. Mais elle visait également à faire face à une sous-estimation initiale des besoins pour 2002 de l'ordre de 300 millions d'euros.

Ainsi, si l'on tient compte de ces crédits supplémentaires, la dotation prévue pour 2003 est en diminution de 5,4 %.

Compte tenu du ralentissement de la croissance en 2002, et à la lumière des abondements nécessaires l'an passé, l'évaluation des besoins apparaît très optimiste .

Trois éléments ont en effet été pris en compte pour la fixation de la dotation pour 2003 :

- une revalorisation du montant de l'allocation, à hauteur de 1,5 %, sur la base de l'inflation constatée en 2002 ;

- une stabilité des effectifs en métropole (+ 0,14 %) et une progression plus vive dans les DOM (+ 4,5 %) au titre de l'année 2002 ;

- une baisse des effectifs en 2003, atteignant 4,27 % en métropole, grâce à une croissance plus soutenue, à la mise en oeuvre du plan de redynamisation de la démarche d'emploi et à l'amélioration des contrôles, la progression des effectifs dans les DOM continuant à se situer autour de 4,5 %.

A l'aune des incertitudes concernant la croissance en 2003 et des dysfonctionnements actuels du dispositif d'insertion des allocataires du RMI, la dotation prévue ne sera suffisante qu'à la condition d'une rénovation en profondeur du dispositif du RMI.

b) L'impact d'une conjoncture économique dégradée

La diminution des effectifs du RMI, enregistrée depuis deux ans, connaît aujourd'hui un fort ralentissement : alors qu'elle était de - 5 % en 2000 et encore de - 2,8 % en 2001, les prévisions pour 2002 font état d'une stabilisation du nombre d'allocataires en métropole (+ 0,14 %), alors que la progression des effectifs dans les DOM reste vive, avec 4,5 %.

Outre la reprise de croissance entre 1997 et 2001, deux facteurs permettent plus particulièrement d'expliquer les bons résultats des années 2000 et 2001 :

- la baisse du chômage non indemnisé s'est poursuivie : l'évolution du RMI est en effet largement conditionnée par le nombre de chômeurs non couverts par des régimes d'assurance chômage et solidarité, pour lesquels cette prestation offre une couverture financière minimum ;

- la réforme des modalités d'indemnisation du chômage au 1 er juillet 2001 a permis une amélioration de quatre points du taux de couverture de l'indemnisation du chômage, permettant aux demandeurs d'emploi touchant de faibles indemnités de sortir du dispositif du RMI.

Cependant, s'il a fallu près de trois ans pour enregistrer les effets du retour à la croissance sur les bénéficiaires du RMI, le ralentissement de la croissance se traduit au contraire par un coup d'arrêt brutal dans la réduction du nombre de bénéficiaires , ainsi que le notait l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale dans son rapport 2001-2002 : « La détérioration du marché du travail aura donc des conséquences sur la pauvreté qui se sont déjà manifestées par un arrêt de la diminution du nombre de bénéficiaires du RMI. »

Évolution des effectifs et des crédits afférents au RMI

Métropole

Évolution

DOM

Évolution

France

Évolution

Crédits budgétaires en millions d'euros (1)

Évolution

Décembre 1989

335.514

71.567

407.081

914,7

Décembre 1990

422.101

25,8 %

88.044

23,0 %

510.145

+ 25,3 %

1.321,4

+ 45 %

Décembre 1991

488.422

15,7 %

93.939

6,7 %

582.361

+ 14,2 %

2.183,8

+ 65 %

Décembre 1992

575.034

17,7 %

96.208

2,4 %

671.242

+ 15,3 %

2.007,4

- 8 %

Décembre 1993

696.589

21,1 %

96.355

0,2 %

792.944

+ 18,1 %

2.535,4

+ 26 %

Décembre 1994

803.303

15,3 %

105.033

9,0 %

908.336

+ 14,6 %

2.929,6

+ 16 %

Décembre 1995

840.839

4,7 %

105.171

0,1 %

946.010

+ 4,1 %

3.357,2

+ 15 %

Décembre 1996

903.804

7,5 %

106.668

1,4 %

1.010.472

+ 6,8 %

3.533,6

+ 5 %

Décembre 1997

956.596

5,8 %

111.305

4,3 %

1.067.901

+ 5,7 %

3.693,8

+ 4,5 %

Décembre 1998

993.286

3,8 %

118.822

6,8 %

1.112.108

+ 4.1 %

3.998,3

+ 8,24 %

Décembre 1999

1.017.847

2,5 %

127.176

7 %

1.145.023

+ 3 %

4.863,1

+ 21,63 %

Décembre 2000

965.000

- 5,1 %

131.000

3 %

1.096.000

- 4,3 %

4.608,3

- 5,2 %

Décembre 2001

938.459

- 2,8 %

134.987

3 %

1.073.446

- 2,0 %

4.513,2

- 2,1 %

(1) Compte tenu des lois de finances rectificatives.

(2) Dont 277,4 millions d'euros pour couvrir les insuffisances de la dotation 1998 (l'augmentation budgétaire nette de 1999 sur 1998 s'élèverait donc à 7,25 %).

Les sorties du dispositif ont, en particulier, chuté de 15 % en un an. Certes, cette diminution est pour partie mécanique, du fait d'un nombre d'entrées moins élevé 3 ( * ) , mais elle est surtout causée par la dégradation de l'emploi, depuis septembre 2001, qui n'a pas permis de « mordre » sur le stock des bénéficiaires.

La baisse des effectifs a, en effet, concerné principalement les jeunes de moins de 30 ans, dont le nombre a diminué de 8,5 % entre 2000 et 2001, y compris pour ceux, parmi eux, qui se trouvaient dans le dispositif depuis plus d'un an et pour qui la baisse atteint 13 %. D'une manière plus générale, cette baisse a surtout profité aux allocataires récents.

A l'inverse, le nombre de bénéficiaires âgés de 55 à 59 ans a augmenté de 8,4 % et le rythme de progression des personnes présentes depuis plus de deux ans dans le dispositif continue à se situer autour de 2 % par an.

C'est également le constat dressé par l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale : « Le conseil avait déjà noté dans son rapport de 2000 qu'avec l'amélioration de la conjoncture et la sélectivité des sorties du RMI (...), on constatait un « recentrage » du RMI. Le nombre de jeunes allocataires et d'allocataires récents a diminué très fortement, cependant que restaient dans le dispositif des personnes trouvant plus difficilement les chemins de l'emploi. » 4 ( * )

c) La redynamisation de la démarche d'insertion en question

Quinze ans après la mise en place du RMI, force est de constater que la mise en oeuvre du « I » reste insatisfaisante :

- la part des allocataires ayant signé un contrat d'insertion reste stable (49 %), mais on constate des disparités importantes selon les départements : le taux de contractualisation reste en particulier insuffisant dans les départements où le nombre d'allocataires (et leur concentration géographique) est élevé ;

- le taux de consommation des crédits départementaux d'insertion a chuté et les reports de crédits non consommés de 2000 sur 2001 représentent 66 % de l'obligation légale au titre de 2001. Cette baisse s'explique certes par les reports cumulés très importants résultant des débuts difficiles de la mise en place de l'allocation, mais également un manque de souplesse dans les possibilités d'utilisation de ces crédits, notamment en matière de suivi ou de prévention ;

Taux de consommation des crédits départementaux d'insertion

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

97 %

101 %

96 %

94 %

94 %

98 %

98 %

92 %

- la mobilisation des mesures ciblées de la politique de l'emploi en faveur des bénéficiaires du RMI s'essouffle : le nombre d'allocataires ayant bénéficié d'une telle mesure a diminué de 19 % en 2001 et, si le taux d'accès des allocataires reste stable, autour de 30 %, le taux de couverture, c'est-à-dire la proportion d'allocataires ayant eu recours à ces mesures, s'établit à 13,1 % en 2001, alors qu'il était encore de 17 % en 1999.

Au total, même si cette baisse est en partie due à la diminution de l'offre de contrats aidés elle-même, elle atteste d'un recentrage de l'offre d'insertion autour du public RMI qui ne s'est pas poursuivi .

Au demeurant, un tel essoufflement était en partie prévisible, en particulier concernant les contrats emploi-solidarité (CES) et les contrats emploi consolidé (CEC), pour lesquels les titulaires du RMI constituent déjà le premier public (37 %).

Malgré ce constat, le projet de loi de finances pour 2003 prévoit une mesure d'économie, au titre du RMI, justifiée par la « redynamisation de la démarche d'insertion » , à hauteur de 150 millions d'euros.

Un plan de redynamisation du volet insertion du RMI a effectivement été engagé en 2002 . Il repose sur la diffusion d'indicateurs de résultats, notamment en matière de taux de contractualisation et de taux de sortie vers l'emploi, sur la comparaison de ces résultats, avec des objectifs précis et sur le recensement et la diffusion des bonnes pratiques. Il semble cependant que cette méthode connaisse aujourd'hui des limites .

C'est pourquoi votre rapporteur estime que le projet de décentralisation du RMI, envisagé par le Gouvernement, et dont les modalités restent toutefois à définir, peut donner aux départements davantage de souplesse dans la mise en oeuvre d'une véritable politique d'insertion pour les publics les plus éloignés de l'emploi.

De la même manière, dans la perspective de la création d'un « revenu minimum d'activité » (RMA), votre rapporteur rappelle les propositions faites par le Sénat en 2001 : le dispositif proposé par M. Alain Lambert, alors président de la commission des Finances et par M. Philippe Marini, rapporteur général du budget 5 ( * ) , permettrait au titulaire d'un minimum social (RMI par exemple), de convertir son allocation en un salaire qui lui serait versé directement par l'entreprise.

Ce dispositif, dégressif sur trois ans, serait neutre pour les finances publiques et constituerait une incitation à l'embauche dans le cadre de contrats à durée indéterminée.

Votre commission des affaires sociales avait approuvé la démarche, et souhaité que, dans ce cadre, un plan de formation et un tutorat soient proposés aux bénéficiaires. Votre rapporteur estime que cette proposition constitue toujours une base de travail pertinente, dans le cadre de la réforme du RMI , prévue pour 2003 par le Gouvernement.

2. Un rythme de croissance des titulaires de l'API qui s'accélère

L'allocation de parent isolé (API) est tout à la fois une prestation à vocation familiale et un minimum social : allocation différentielle servie par les CAF ou la mutualité sociale agricole, elle est versée à toute personne assumant seule la charge d'un ou plusieurs enfants, pendant une période d'un an ou jusqu'au troisième anniversaire du plus jeune enfant. Au 1 er janvier 2001, l'API s'élevait à 501,81 euros par mois pour une femme enceinte sans enfant à charge, plus 170,94 euros par enfant à charge.

Les revenus pris en compte pour calculer l'allocation différentielle comprennent l'ensemble des revenus du trimestre précédent, prestations familiales comprises, à l'exclusion de l'allocation logement et de l'allocation pour jeune enfant (APJE).

Évolution de l'API

Année

Nombre de bénéficiaires

Évolution (en %)

Crédits consommés (en millions d'euros)

1989

156.000

-

601,4

1990

157.000

+ 0,6

625,7

1991

157.000

0,0

638,6

1992

160.000

+ 1,9

657,2

1993

164.000

+ 2,5

688,6

1994

169.000

+ 3

719,7

1995

164.000

- 3

724,2

1996

163.000

- 0,6

759,9

1997

164.000

+ 0,6

708,7

1998

165.000

+ 0,6

700,0

1999

168.000

+ 3,2

706,7

2000

170.000

+ 1,2

721,2

2001

175.000

+ 3,9

751,8

La dotation budgétaire progresse en 2003 de 8,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002.

Cette progression importante appelle deux remarques :

- plus encore que le RMI, le rythme de progression de l'API semble s'être déconnecté de la croissance : l'augmentation du nombre de familles monoparentales depuis 1996 a ainsi contribué à l'entrée de 11.000 bénéficiaires dans le dispositif entre 1997 et 2000, alors même que la croissance redémarrait ;

- les dotations des années passées étaient très largement sous-estimées : la dette cumulée de l'Etat envers la CNAF au titre de l'API atteignait plus de 75 millions d'euros.

La loi de finances rectificative pour 2002 a permis de régulariser une grande partie des comptes entre l'Etat et la CNAF : 65 millions d'euros de crédits supplémentaires ont été ouverts au titre de l'API, permettant de rembourser la dette de l'exercice 2001, soit 34,7 millions d'euros, et de couvrir l'insuffisance prévisionnelle pour 2002 à hauteur de 30 millions d'euros. La dette de l'Etat serait ainsi ramenée à 11,5 millions d'euros.

La dotation pour 2003, qui prend en compte une évolution tendancielle des effectifs de 0,7 %, une revalorisation de 1,5 % du montant de l'allocation et la poursuite de la majoration du barème dans les départements d'outre-mer 6 ( * ) , est donc stable par rapport au niveau atteint en loi de finances rectificative.

D'autre part, la question de l'accès à l'emploi de parents isolés ayant des jeunes enfants à charge est également liée à la question du développement des modes de garde.

Le projet de « prestation d'accueil du jeune enfant » qui devrait se concrétiser à l'occasion de la Conférence de la famille au printemps 2003, devrait permettre d'améliorer l'accès à l'emploi de parents isolés, empêchés de travailler par l'insuffisance et le coût des modes de garde.

3. Des crédits consacrés à l'AAH en progression constante

L' allocation aux adultes handicapés (AAH), prestation non contributive et soumise à condition de ressources, est un minimum social garanti par la collectivité nationale à toute personne reconnue handicapée par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP).

L'allocataire doit justifier d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 %. Son versement a cependant été élargi, par l'article 95 de la loi de finances pour 1994, aux personnes titulaires d'un taux d'incapacité compris entre 50 et 80 % et qui sont, en raison de leur handicap, dans l'impossibilité, reconnue par la COTOREP, de se procurer un emploi.

Il existe également une allocation dite « complément d'AAH » versée aux personnes handicapées à plus de 80 % et vivant à leur domicile, afin de couvrir les dépenses supplémentaires liées à la vie autonome. Ce complément représente 16 % du montant de l'AAH à taux plein.

a) Les facteurs de progression des crédits consacrés à l'AAH

Les crédits consacrés au financement de l'AAH et de son complément augmentent de 5,8 % par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2002, alors qu'ils ne progressaient que de 4,5 % en 2002.

Deux facteurs expliquent cette progression :

- la revalorisation du montant de l'AAH : le montant de l'allocation est passé de 523,36 euros au 1 er janvier 1997 à 569,38 euros au 1 er janvier 2002. Votre rapporteur rappelle que l'AAH n'est pas encadrée par des critères de revalorisation propres, mais évolue normalement, aux termes de l'article D. 821-3 du code de la sécurité sociale, comme le minimum vieillesse. Cependant, une revalorisation de 2,2 % a été retenue en 2002, incluant un effort particulier de préservation du pouvoir d'achat des allocataires (le minimum vieillesse n'augmentant quant à lui que de 1,2 %) ;

- l'accroissement du nombre de bénéficiaires : une meilleure connaissance des droits a pu engendrer une augmentation du nombre d'entrées dans le dispositif, comme l'atteste la vive progression (+ 4,2 % par an) des demandes adressées aux COTOREP depuis 1996.

On constate surtout une durée très longue de présence des bénéficiaires au sein de ce dispositif : 40 % des allocataires ont aujourd'hui moins de 40 ans et la plupart ont vocation à rester dans le dispositif jusqu'à 60 ans. Les entrées ne sont donc que très faiblement compensées par les sorties. L'hypothèse de croissance du nombre de bénéficiaires, pour 2003, est égale à 2,5 %.

Année

Nombre de bénéficiaires

Évolution
(en %)

Dotation budgétaire
(en millions d'euros)

Évolution
(en %)

1998

668.000

+ 2,9

3565,63

+ 5,1

1999

694.000

+ 3,8

3776,01

+ 5,9

2000

712.000

+ 2,6

3895,07

+ 3,2

2001

732.000

+ 2,8

4046,00

+ 3,9

2002 (prévision)

749.000

+ 2,3

4277,72

+ 5,7

2003 (prévision)

767.000

+ 2,5

4526,34

+ 5,8

Votre rapporteur note cependant une tendance à la sous-estimation chronique des besoins de crédits , concernant l'AAH : ce chapitre a, en effet, été l'objet d'abondements récurrents en lois de finances rectificatives (129 millions en 2000, 51 millions en 2001, 150 millions en 2002).

Cette dernière ouverture de crédit correspondait certes pour 54,2 millions au remboursement de la dette contractée par l'Etat auprès de la CNAF, au titre d'exercices antérieurs. Il reste que le solde (soit près de 100 millions d'euros) résulte d'une sous-estimation de la croissance du nombre de bénéficiaires.

b) Une nécessité : l'accès au travail des personnes handicapées

On constate une évolution contrastée des bénéficiaires de l'AAH : si le nombre d'allocataires titulaires d'un taux d'invalidité supérieur à 80 % reste stable, le nombre des bénéficiaires dont le taux d'invalidité est compris entre 50 et 80 % et qui sont dans l'impossibilité de trouver un emploi 7 ( * ) augmente à un rythme soutenu de 6,7 % en moyenne par an. Les attributions à ce titre représentaient 40 % de l'ensemble des nouvelles attributions en 2001, contre 33 % en 1996.

La situation de l'emploi influe de manière notable sur les décisions des COTOREP : dans une conjoncture dégradée, les commissions ont tendance à attribuer l'AAH à des personnes qui ne sont pas dans l'incapacité physique de se procurer un emploi, mais qui n'en trouvent pas, du fait d'une marginalisation qui devient un handicap social.

Comme le rappelle le ministère, « après l'instauration du RMI en 1988, la situation du marché de l'emploi a pu faire obstacle au basculement de certains bénéficiaires de l'AAH dans le champ du RMI, et à l'inverse, favoriser l'orientation vers la COTOREP et donc l'attribution de l'AAH, notamment au titre de l'article L. 821-2 du code de la sécurité sociale » 8 ( * ) .

C'est à la lumière de cette analyse que votre rapporteur émet une réserve quant à la mesure d'ajustement de 20 millions d'euros, justifiée par l' « amélioration des procédures d'attribution » , prévue au projet de loi de finances pour 2003.

L'amélioration de l'insertion professionnelle des personnes handicapées et l'incitation au retour à l'emploi de titulaires de l'AAH au titre de l'article L. 821-2, en particulier des plus jeunes d'entre eux, doivent certes être poursuivies et il est vrai que les créations de places en CAT programmées par le présent budget devraient améliorer les débouchés pour les plus fragiles parmi cette population.

Mais votre rapporteur estime que l'économie prévue n'est réalisable que si, dans le même temps, une réforme en profondeur des COTOREP est entreprise. En l'absence d'une telle réforme, un abondement des crédits sera à nouveau nécessaire en loi de finances rectificative pour 2003.

B. LE PROJET DE BUDGET POUR 2003 PARVIENT CEPENDANT À METTRE EN oeUVRE DE NOUVELLES PRIORITÉS

Malgré le poids et la rigidité des crédits affectés au financement des minima sociaux, le présent projet de budget parvient à financer de nouvelles priorités : ainsi, les dépenses de lutte contre les exclusions hors RMI progressent de 25,4 % et leur part, au sein de l'agrégat « Intégration et lutte contre les exclusions » passe de 18,5 % à 21,7 %.

1. La redynamisation des centres d'hébergement et de réinsertion sociale

Destinés à l'accueil, au soutien ou à l'accompagnement social des personnes ou des familles en grande difficulté économique, sociale, de logement ou d'insertion, les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) sont régis par les articles L. 345-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles . Ils relèvent du financement de l'Etat, au titre de l'aide sociale obligatoire.

a) Un dispositif conforté et renforcé

Selon les derniers résultats statistiques connus au 1 er janvier 1998, les 806 CHRS existants accueillaient 22.938 personnes parmi lesquelles plus de 6.500 enfants, auxquelles il faut ajouter 3.083 personnes au titre de l'hébergement d'urgence, soit un total de 26.021 personnes accueillies au titre de l'aide sociale.

Votre rapporteur regrette, une fois de plus, l'ancienneté des données statistiques disponibles , qui ne reflètent ni la progression de la population prise en charge ou en attente de l'être, ni l'effort de création de places entamé par l'Etat depuis quelques années.

La dotation aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale s'élève à 428,4 millions d'euros en 2003, en augmentation de 2,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002. Une mesure nouvelle de 6,4 millions d'euros est notamment prévue pour financer la création de 500 places supplémentaires en CHRS.

Centres d'hébergement et de réinsertion sociale (1997-2003)

Dépenses ordinaires et crédits de paiement

(en millions d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

Fonctionnement (46-81-30)

357,95

367,86

379,60

390,73

403,08

417,56

428,39

Investissement (66-20-40)

2,13

3,20

6,56

8,23

4,55

2,10

4,57

Total

360,08

370,91

386,15

398,81

407,63

419,46

432,96

Source : ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Le projet de budget prend également en compte deux problèmes spécifiques, sur lesquels votre rapporteur avait largement attiré l'attention du Gouvernement : celui de l'accueil des familles, conformément à l'article 135 de la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre l'exclusion qui posait le principe du droit à la vie familiale normale des personnes accueillies en CHRS, et celui des mineurs isolés.

Une dotation budgétaire de 5 millions d'euros est ainsi inscrite au présent projet de budget, pour le développement d'un programme de pensions de famille et la création de structures spécifiques pour les enfants des rues , conformément au plan d'action présenté par la secrétaire d'Etat à la lutte contre l'exclusion.

b) Des interrogations qui demeurent

Trois ans après l'adoption de la loi d'orientation du 29 juillet 1998, le décret d'application relatif aux règles budgétaires et comptables applicables aux CHRS 9 ( * ) est venu préciser les conditions d'exercice de cette activité.

Ce décret a permis de véritables avancées pour les associations gestionnaires, en assouplissant les procédures d'admission à l'aide sociale des personnes hébergées et en clarifiant les conditions de participation des personnes accueillies à leurs frais d'hébergement et d'entretien, ainsi que les modalités de rémunération des personnes qui prennent part aux activités d'adaptation à la vie active.

Il clarifie, en outre, les dispositions financières applicables aux différentes activités des CHRS :

- un budget principal retrace les actions prévues par l'habilitation ou par la convention d'aide sociale ;

- un budget annexe regroupe les activités de production et de commercialisation liées aux actions d'adaptation à la vie active. Elles peuvent être financées en tout ou partie par l'aide sociale de l'Etat ;

- un ou plusieurs budgets spécifiques sont nécessaires pour les actions relatives à l'insertion par l'activité économique ou pour celles mises en oeuvre dans un cadre autre que celui du CHRS. Ces activités n'ouvrent pas droit à l'aide sociale de l'Etat.

Les associations gestionnaires souhaitent attirer l'attention sur le fait que ces dispositions comptables, notamment celles relatives aux budgets spécifiques , fragilisent leurs activités complémentaires, comme l'insertion par l'économique ou la pratique de la sous-location, par ailleurs reconnues comme très positives.

Votre rapporteur tient également à souligner la nécessité de la mise en place rapide des dispositifs de veille sociale, nécessaire à une meilleure connaissance de l'offre de places disponibles, dans un contexte général de saturation des structures situées dans les grands centres urbains.

2. Une meilleure prise en compte des besoins liés à l'accueil des étrangers en situation précaire

Une grande partie du réseau des CHRS est confrontée, depuis plusieurs années, à l'arrivée massive de personnes étrangères en situation précaire : pour certains établissements, situés sur un arc nord-est/sud-est, la proportion de personnes étrangères, souvent des familles avec de nombreux jeunes enfants, dépasse 50 % de la capacité d'accueil .

Or, face à ces populations, les CHRS sont démunis car ils sont dans l'impossibilité de leur proposer quelque parcours d'insertion que ce soit, tant que leur situation juridique n'est pas tranchée.

C'est pourquoi la mise en place et l'accroissement de la capacité d'accueil d'un réseau de CHRS spécifiques est nécessaire : le projet de budget pour 2003 conforte cette orientation, ce dont votre rapporteur se félicite.

a) L'accroissement du nombre de réfugiés

En trois ans, le nombre de dossiers de demandes d'asile déposés a été multiplié par 2,1. Mais ce chiffre ne comprend pas les mineurs, rattachés au dossier de leurs parents, évalués entre 12 et 15 % du nombre de majeurs, ni celui des demandeurs d'asile territorial, qui s'élève à 31.206 en 2001 (contre 11,8 % seulement en 2000).

Evolution des demandes d'asile et des certificats de réfugiés accordés

1998

1999

2000

2001

Origine

Demandes

Certificats

Demandes

Certificats

Demandes

Certificats

Demandes

Certificats

Europe

7.997

1.056

8.450

1.469

13.224

2.107

14.378

2.041

Amérique/Afrique

6.753

1.076

11.192

1.338

15.776

1.494

24.185

2.789

Asie

7.501

2.185

11.158

1.817

9.658

1.516

8.622

2.431

Apatrides

126

25

107

35

89

68

106

62

Total

22.377

4.342

30.907

4.659

38.747

5.185

47.291

7.323

Source : OFPRA.

Au total, au 31 décembre 2001, le nombre de réfugiés statutaires adultes s'élève à 101.601 , dont 58 % d'hommes et 42 % de femmes.

b) L'amélioration du dispositif national d'accueil

Le « dispositif national d'accueil » a pour mission d'assurer un hébergement et la préparation à l'insertion des demandeurs d'asile dont la demande est en cours d'instruction à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Il s'appuie essentiellement sur deux types de structures : les centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA) et les centres provisoires d'hébergement (CPH).

Evolution du dispositif national d'accueil (places permanentes)

CADA

CADA

CPH

CPH

Années

Nombre de places

Nombre de personnes accueillies

Nombre de places

Nombre de personnes accueillies

1999

3.781

6.274

1.018

2.204

2000

4.756

5.794

1.028

1.885

2001

5.282

8.610

1.028

2.274

2002 ( prévision)

9.782

15.000

1.028

2.200

Source : Fascicule « Travail, santé et solidarité - Tome II - Santé, famille, personnes handicapées et solidarité ».

Le projet de loi de finances pour 2003 prend acte de l'explosion de la demande d'asile : 26 millions d'euros sont consacrés à la consolidation en année pleine des 3.000 places de CADA créées en 2002 et 1.718 places supplémentaires sont programmées pour 2003, pour un montant de 15 millions d'euros. Le nombre total de places devrait ainsi atteindre 11.500 en 2003.

Cependant, la prise en charge de l'hébergement des demandeurs d'asile n'est qu'une des facettes de la politique d'action sociale en faveur des migrants. A ce titre, votre rapporteur se félicite du fait que le nouveau gouvernement dépasse la simple problématique de l'hébergement et se donne les moyens d'aller plus loin :

- les crédits consacrés à l'aide médicale de l'Etat , dorénavant réservée aux étrangers en attente de régularisation de leur demande d'asile, s'élèvent à 233,5 millions d'euros, soit près de 4 fois le montant inscrit en 2002 ;

- l'Office des migrations internationales (OMI) reçoit les moyens de développer ses plate-formes d'accueil et de conseil pour les primo-arrivants, grâce à la création d'une taxe à son profit 10 ( * ) dont le produit devrait s'élever à 13 millions d'euros en année pleine. Cette taxe permettra notamment à l'Office de prendre en charge la mise en place du « contrat d'intégration » annoncé par le Président de la République, dispositif qui devrait être opérationnel en juin 2003.

Votre rapporteur rappelle enfin que cette politique d'accueil est indissociable de l'amélioration de la procédure de traitement des demandes d'asile, dont le Président de la République a demandé qu'elle soit ramenée à moins de deux mois.

3. La poursuite de l'effort envers les établissements de formation en travail social

Les crédits relatifs à la formation des travailleurs sociaux représentent désormais près de 50 % des crédits de l'agrégat « Développement social », du fait du changement de la nomenclature budgétaire. Il reste que le travail social est un instrument essentiel de la politique de lutte contre les exclusions et que l'effort consenti en leur faveur participe de la volonté du Gouvernement d'accompagner les publics les plus fragiles.

Il existe actuellement 304 établissements de formation en travail social (EFTS), parmi lesquels seuls 130 préparent aux formations dites initiales (assistant de service, éducateur spécialisé, éducateur de jeunes enfants, éducateur technique spécialisé, conseiller en économie sociale et familiale, moniteur-éducateur). Parmi ces 130 établissements, 102 reçoivent un financement de l'Etat, au titre des formations initiales : 28 établissements publics et 102 établissements privés, ayant statut d'association régie par la loi de 1901 ou 1908, subventionnés.

On comptait au 1 er janvier 1998, 805.788 travailleurs sociaux, parmi lesquels, notamment, 380.000 assistantes maternelles agréées et 177.000 professionnels de l'aide à domicile.

a) Une augmentation importante des crédits de fonctionnement des EFTS

2003 constitue la deuxième année de mise en oeuvre du plan pluriannuel (2002-2005) de formation des étudiants en travail social, qui vise à répondre au constat du Schéma national des formations sociales arrêté par le décret du 28 mai 2001, qui fait apparaître une pénurie de travailleurs sociaux dès 2003-2004.

Les crédits inscrits au projet de loi de finances pour 2003 s'élèvent ainsi à 121,6 millions d'euros, en progression de 11,7 % par rapport à 2002 . Ils doivent permettre de faire face à la montée en charge des 3.000 places de formation créées à la rentrée 2002, à hauteur de 8,5 millions d'euros, ainsi qu'à la création de 3.000 places supplémentaires à la rentrée 2003, pour un montant de 4,25 millions d'euros. Ces établissements font également l'objet d'un effort en termes d'investissement, dans la mesure où les crédits de paiement à ce titre augmentent de 28 % en 2003.

Ces moyens nouveaux doivent permettre de faire face aux nombreux départs en retraite prévisibles dans le champ du travail social, ainsi qu'à l'accompagnement des nouveaux besoins, liés notamment à la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et au plan triennal en faveur des enfants, adolescents et adultes handicapés , qui entraîne une forte progression de la demande d'aide à domicile.

b) L'amélioration de la situation financière des étudiants en travail social

Une circulaire conjointe du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'emploi et de la solidarité du 11 septembre 2001 a rénové le système des bourses en travail social, dans l'objectif d'un alignement à terme avec celui des bourses de l'enseignement supérieur, avec l'adoption de critères sociaux d'attribution.

Cette réforme a, d'ores et déjà, permis une augmentation du nombre de boursiers en travail social : 5.078 étudiants (contre 4.131 pour l'année scolaire 2001-2002) ont obtenu une bourse en 2002-2003. Celle-ci pouvait atteindre à taux plein 3.262,71 euros, par référence au 5 e échelon des bourses de l'enseignement supérieur.

Évolution du nombre de boursiers par type de formation

Filière de formation

Nombre de boursiers 2000-2001

Nombre de boursiers 2001-2002

Évolution en %

Assistant de service social

1.458

1.818

+ 24,7

Éducateur spécialisé

1.365

1.630

+ 19,4

Éducateur de jeunes enfants

569

744

+ 30,8

Conseiller en économie sociale et familiale

125

162

+ 29,6

Technicien de l'intervention sociale et familiale

78

128

+ 64,1

Moniteur-éducateur

536

598

+ 11,6

TOTAL

4.131

5.078

+ 22,9

L'impact de ces changements de critères avait été sous-évalué en loi de finances initiale pour 2002 : des crédits supplémentaires, à hauteur de 1,77 million d'euros en loi de finances rectificative, ont dû venir abonder les 15,11 millions d'euros prévus initialement.

Le projet de loi de finances pour 2003 prend acte de cette accélération du nombre de bourses attribuées, au demeurant justifiée par la faiblesse du taux de boursiers en travail social par rapport au reste de l'enseignement supérieur (20,3 % contre 26 % ailleurs). Les crédits affectés au financement des bourses en travail social augmentent ainsi de 20 % pour atteindre 18,15 millions d'euros.

Il prévoit également une revalorisation du montant des bourses, à hauteur de 2 % pour amener leur montant au niveau de celui des bourses de l'enseignement supérieur.

c) Une nécessité : clarifier les conditions de financement des EFTS

L'article 51 de la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions clarifie et consolide les fondements juridiques, administratifs et financiers des centres de formation en travail social.

L'établissement du contrat pluriannuel de financement prévu par cet article nécessite un décret, dont une première version a été soumise au Conseil d'Etat dès le 23 mai 2000. Le ministère prévoit sa mise en oeuvre pour 2003 mais conditionne toujours sa parution à une négociation entre les différents acteurs et à la mise en oeuvre d'une simulation, de façon à répartir au mieux l'enveloppe de financement prévue.

Le précédent gouvernement envisageait déjà sa parution pour la fin de l'année 2001. Plus de quatre ans après l'adoption de la loi de lutte contre les exclusions, votre rapporteur estime qu'il est temps de donner aux établissements les moyens de fonctionner avec des perspectives budgétaires claires. C'est pourquoi il encourage le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires dans les plus brefs délais.

4. Des efforts permis par une certaine modération des autres interventions du ministère

a) Le ralentissement des dépenses de tutelles et curatelles

Les crédits consacrés à la tutelle et à la curatelle d'Etat au titre du projet de loi de finances pour 2003 s'élèvent à 128,1 millions d'euros, soit 6,2 millions supplémentaires par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2002.


Les mesures de protection des majeurs incapables

La loi n° 68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs a prévu trois régimes de protection :

- La sauvegarde de justice : il s'agit d'une mesure temporaire, médicale ou judiciaire, dont l'objectif est préventif. Elle permet à la personne de conserver l'exercice de ses droits, mais les actes qu'elle passe sont susceptibles de révision a posteriori ;

- la curatelle : elle concerne les personnes qui, sans être hors d'état d'agir par elles-mêmes, ont besoin d'être conseillées ou contrôlées dans les actes de la vie civile . La personne sous curatelle peut accomplir seule les actes d'administration, mais ne pourra effectuer d'acte qui engage son patrimoine sans l'assistance de son curateur. La curatelle peut, sur décision du juge des tutelles, être allégée ou aggravée ;

- la tutelle : elle est ouverte lorsque la personne a besoin d'être représentée de manière continue dans les actes de la vie civile . La personne sous tutelle est déchargée de l'exercice de ses droits (y compris le droit de vote) et ne peut plus passer aucun acte seule.

Ces mesures reposent sur quatre principes :

- une altération des facultés personnelles (mettant la personne dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts) doit être constatée par un médecin ;

- la mesure doit être nécessaire et subsidiaire compte tenu de l'incapacité civile qu'elle entraîne et de sa légitimité au regard des libertés individuelles ;

- un rôle central est dévolu à la famille et la priorité doit lui être conférée dans l'attribution de la tutelle ;

- l'objet de la mesure doit être la protection de la personne et des biens de l'incapable.

Deux systèmes de tutelle coexistent en droit :

-  la tutelle familiale , qui fait reposer la charge tutélaire sur la famille (parents, enfants, collatéraux) ;

- la tutelle publique , qui consiste à confier à un organisme public ou privé la charge de la tutelle sous le contrôle de l'Etat. La tutelle d'Etat, la curatelle d'Etat ou la tutelle en gérance font partie de cette catégorie.

Cette progression de 5 % doit cependant être rapprochée de l'augmentation très sensible (17 %) observée en 2002, et qui s'était traduite par un abondement significatif de 13,7 millions d'euros en loi de finances rectificative.

Au titre de 2003, il est prévu un ralentissement de l'augmentation du nombre de mesures déférées à l'Etat, en raison notamment de l'anticipation par les juges de la réforme annoncée dans les conclusions du rapport Favard de mai 2001, relatif au dispositif de protection juridique des majeurs.

En janvier 2002, le projet de réforme a, en effet, fait l'objet d'une communication en Conseil des ministres par le Garde des Sceaux, ministre de la justice.

Quatre axes sont envisagés :

- renforcer la prise en compte des principes de nécessité et de subsidiarité dans la mise en oeuvre de la protection : à ce titre, la mise en place d'une évaluation médico-sociale préalable à la saisine est envisagée ;

- mieux organiser le recrutement et la formation des délégués à la tutelle ;

- renforcer le dispositif de contrôle des comptes de gestion ;

- remettre à plat le système de financement : un financement par dotation globale, rémunérant un service et non plus les mesures, et la signature de conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens sont, entre autres, les instruments envisagés.

Votre rapporteur salue la prise en compte des propositions du rapport Favard, qu'il a souvent appelée de ses voeux. Il regrette cependant, à cette occasion, qu'aucune amélioration du système statistique ne soit prévue, permettant de suivre le nombre de mesures édictées par les juges et leur répartition entre tutelle familiale et tutelle d'Etat, car ces informations sont essentielles pour évaluer l'évolution de la qualité du dispositif.

b) Le recentrage des fonds d'aide aux jeunes

La loi du 29 juillet 1992 réformant le RMI a généralisé à l'ensemble du territoire les fonds d'aide aux jeunes (FAJ) créés par la loi du 19 décembre 1989.

Ce dispositif prévoit la possibilité de verser aux jeunes en difficulté d'insertion sociale et professionnelle, âgés de 18 à 25 ans, des secours temporaires d'urgence des aides financières destinées à soutenir un projet d'insertion. Depuis la loi du 29 juillet 1998, les FAJ interviennent également dans le cadre du programme TRACE.

Environ 120.000 jeunes ont bénéficié d'une intervention d'un FAJ en 2001, pour un montant compris entre 61 et 91 euros selon les départements. Parmi les bénéficiaires, 13.000 étaient inscrits dans un parcours TRACE. Ce chiffre devrait diminuer en raison de la mise en place de la bourse d'accès à l'emploi.

Le financement de ces fonds est paritaire entre l'Etat et les conseils généraux. Une convention permet à d'autres acteurs (communes et caisses d'allocations familiales notamment) de participer volontairement aux FAJ.

Les crédits relatifs aux FAJ, inscrits au chapitre 46-81 (article 20) ne sont pas individualisés en loi de finances. Les crédits délégués à ce titre aux DDASS en 2002 s'élevaient à 44,5 millions d'euros.

Cependant, les masses effectivement consacrées par l'Etat aux FAJ ont été bien inférieures, du fait des redéploiements (au profit notamment de la bourse d'accès à l'emploi) intervenus sur cette ligne budgétaire : 17,9 millions d'euros ont effectivement été consommés sur les crédits budgétaires et 38,3 millions d'euros ont été versés aux jeunes, tous contributeurs confondus.

Votre rapporteur constate que la fin de l'expérimentation de la « bourse d'accès à l'emploi » n'a pas conduit à transférer les crédits correspondants sur les FAJ. De fait, compte tenu de la sous-consommation chronique des crédits prévus à ce titre, les crédits disponibles doivent permettre de faire face au retour des bénéficiaires dans le dispositif de droit commun géré par les FAJ.

Il apparaît en effet inutile de majorer encore des crédits budgétaires, à titre d'affichage, alors qu'une telle majoration entraîne l'obligation pour les départements d'inscrire la même somme, immobilisant ainsi des crédits finalement inutilisés.

c) La question des rapatriés toujours en suspens

Les crédits en faveur des rapatriés inscrits au budget de la solidarité s'élèvent à 14 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2003, en diminution de 5,4 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2002.

Cette somme ne représente qu'une fraction des crédits, gérés par la mission interministérielle aux rapatriés et inscrits sur les budgets des différents ministères. Votre rapporteur n'a pas pu obtenir d'information sur l'effort consenti en 2003, ni sur sa répartition entre les ministères. En 2002, ces crédits s'élevaient à 168 millions d'euros.

La diminution de ces crédits est en grande partie mécanique : le dispositif de contribution de l'Etat à la garantie des retraites constituées par les rapatriés dans le pays où ils résidaient connaît une extinction progressive, du fait de la démographie de ses bénéficiaires.

On constate cependant un effort accru, financé par redéploiement de crédits, en faveur de la rente viagère versée aux harkis : les crédits augmentent de 37,7 %. Cet effort induit également la reprise intégrale du financement des rentes par l'Etat, en raison de la fin du financement extra-budgétaire assuré par Groupama.

Votre rapporteur regrette que le présent projet de loi de finances ne permette pas de régler certains litiges en suspens, comme celui de la déduction du remboursement des prêts de réinstallation de l'indemnisation des rapatriés au titre de l'article 46 de la loi du 15 juillet 1970 ou celui de la réparation due aux agents publics écartés de leur emploi au cours de la guerre d'Algérie.

Votre rapporteur a toutefois été informé que le projet de loi de finances rectificative pour 2002 11 ( * ) de fin d'année met en oeuvre plusieurs mesures en faveur des rapatriés :

- l'inscription de crédits supplémentaires pour financer le désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ;

- la généralisation du versement de rente viagère pour les anciens supplétifs, grâce à la suppression de la condition de ressources ;

- la prorogation des dispositifs d'aide à l'acquisition d'une résidence principale et de désendettement immobilière.

Votre rapporteur se félicite de ces mesures positives, qui auraient toutefois gagné à être inscrites au projet de loi de finances initiale pour 2003.

II. LA POLITIQUE EN FAVEUR DES PERSONNES HANDICAPÉES ÉRIGÉE EN « GRAND CHANTIER DU QUINQUENNAT »

« La personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap, quels que soient l'origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie, et à la garantie d'un minimum de ressources lui permettant de couvrir la totalité des besoins de la vie courante » 12 ( * ) .

L'article 53 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 , dite de « modernisation sociale », a, pour la première fois, employé le terme de « compensation » du handicap, explicitant ainsi la finalité des actions développées depuis la loi d'orientation du 30 juin 1975 à l'égard des personnes handicapées.

Pourtant, force est de constater aujourd'hui que, malgré l'ampleur des moyens, notamment financiers, mis en oeuvre, ces actions ne sont pas toujours à la hauteur des principes ainsi affirmés.

Le présent projet de budget prend cependant déjà acte de la priorité donnée par le Président de la République, le 14 juillet dernier, à l'intégration des personnes handicapées . Il s'agit certes d'un budget de transition, dans l'attente de la réforme annoncée et attendue de la loi d'orientation du 30 juin 1975 ; mais il tire déjà les conséquences des principales attentes des personnes handicapées, attentes dont votre commission se faisait l'écho, le 24 juillet dernier 13 ( * ) .

A. QUEL BILAN DE LA POLITIQUE EN FAVEUR DES PERSONNES HANDICAPÉES ?

1. La mise en oeuvre des différents plans : une prise en compte tardive et inaboutie d'une demande de maintien à domicile

Depuis de nombreuses années, les associations représentatives des personnes handicapées tiraient la sonnette d'alarme, devant le manque de places en établissement spécialisé. Cette demande, justifiée par des listes d'attente toujours croissantes, l'était aussi par l'absence de solutions alternatives et en particulier par la faiblesse des structures permettant le maintien à domicile.

Face à cette demande, le précédent gouvernement avait lancé, coup sur coup, deux plans pluriannuels, principalement axés sur le développement de l'accueil institutionnel, alors que le dispositif d'aide à domicile restait encore au stade expérimental.

a) Le plan pluriannuel de création de places pour adultes lourdement handicapés (1999-2003)

Ce plan, adopté en 1999, se fixait un triple objectif :

- mettre un terme à la situation des jeunes adultes maintenus, faute de place, dans les établissements d'éducation spéciale ;

- absorber le flux de sortie des établissements pour enfants vers les établissements pour adultes ;

- faire bénéficier les personnes inscrites sur les listes d'attente des places nouvelles et des places libérées.

Il prévoyait ainsi en cinq ans la création de 5.500 places en maisons d'accueil spécialisées (MAS) ou foyers à double tarification (FDT), devenus « foyers d'accueil médicalisés » (FAM) depuis la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, financées sur des crédits d'assurance maladie, ainsi que la création de 8.500 places supplémentaires en centres d'aide par le travail (CAT).

Au 31 décembre 2001, 3.408 places supplémentaires en MAS ou en FAM avaient été programmées par les directions départementales de l'action sanitaire et sociale et 97.311 places de CAT étaient financées (soit 3.500 places supplémentaires par rapport à 1999) ; la loi de finances pour 2002 avait ouvert les crédits nécessaires à l'ouverture de 1.500 places supplémentaires en CAT, ce qui équivaut à un taux de réalisation de 60 % en trois ans .

Le projet de loi de finances pour 2003 prévoit une accélération de ce plan , en doublant le nombre de places supplémentaires créées (3.000 au lieu de 1.500 les années précédentes) et porte ainsi à 101.811 les places de CAT financées par l'Etat.

Votre rapporteur approuve bien entendu l'effort réalisé par ce plan mais il regrette qu'aucune donnée ne permette de connaître le nombre de places réellement ouvertes et le nombre de personnes accueillies, nécessaires pour apprécier les besoins restant à couvrir.

b) Le plan triennal en faveur des enfants, adolescents et adultes handicapés (2001-2003)

Annoncé par le Premier ministre le 25 janvier 2001 lors de la réunion du Conseil national des personnes handicapées (CNCPH), ce plan amplifie le programme quinquennal de création de places en établissements.

Concernant les créations de places, une enveloppe de 18,3 millions d'euros sur trois ans est prévue, au titre de l'assurance maladie, pour financer des places supplémentaires en établissements d'éducation spéciale. Deux enveloppes de 22,8 millions d'euros sur trois ans sont également inscrites pour développer plus spécialement les structures d'accueil pour enfants et adultes autistes, d'une part, et traumatisés crâniens, d'autre part. Enfin, le développement de structures expérimentales pour la prise en charge des personnes handicapées vieillissantes est financé à hauteur de 6,8 millions d'euros.

L'effort ainsi prévu est supporté à titre principal par l'assurance maladie , puisque l'Etat ne s'engage, en termes de création de places, qu'au financement de la modernisation des ateliers protégés, à hauteur de 15,2 millions d'euros sur trois ans.

Votre rapporteur souligne cependant que ce plan est, pour la première fois, assorti de mesures visant à favoriser le maintien ou le retour à domicile des personnes handicapées , mesures auxquelles l'Etat apporte la plus grande partie de son soutien financier : 67 millions d'euros en crédits budgétaires sont prévus pour développer, sur trois ans, les services d'auxiliaires de vie , les auxiliaires d'intégration scolaire et les sites pour la vie autonome , tandis que 45,7 millions d'euros de crédits « assurance maladie » doivent permettre le développement des services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) et des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD).

Le bilan de ce plan, alors que l'année 2003 était conçue comme une année d'« ajustement », est difficile à établir : le nombre de places créées en établissement d'éducation spéciale est à ce jour indisponible car les résultats de la dernière enquête « établissements et services » effectuée par la DREES remontent à 1998, c'est-à-dire avant le début du plan. Une autre enquête, en cours, ne donnera pas ses résultats avant début 2003. Seul est connu le nombre d'établissements et de services en fonctionnement en 2002, sans précision sur le nombre de personnes accueillies.

Nombre d'établissements et services

(série chronologique de 1999 à 2002)


Catégories d'établissements et de services

Nombre d'établissements et de services au 01/01

Evolution
2002/1999

1999

2000

2001

2002 au 01/07

En unités

en %

ETABLISSEMENTS ET SERVICES POUR ENFANTS HANDICAPES

Établissements d'éducation spéciale pour enfants déficients intellectuels

1 183

1.175

1.175

1.189

6

0,5

Instituts de rééducation

340

341

343

348

8

2,4

Établissements pour enfants polyhandicapés

139

147

152

154

15

10,8

Établissements d'éducation spéciale pour enfants déficients moteurs

122

121

122

121

- 1

- 0,8

Instituts d'éducation sensorielle pour enfants déficients visuels

34

35

37

35

1

2,9

Instituts d'éducation sensorielle pour enfants déficients auditifs

89

95

94

108

19

21,3

Instituts d'éducation sensorielle pour sourds-aveugles

17

17

14

13

- 4

- 23,5

Centres de placement familial spécialisé

57

56

79

78

21

36,8

Foyers d'hébergement pour enfants et adolescents handicapés

26

27

27

25

- 1

- 3,8

Services autonomes d'éducation spéciale et de soins à domicile

580

607

656

922

342

59,0

ETABLISSEMENTS POUR ADULTES HANDICAPES

Centre d'aide par le travail

1.294

1.319

1.332

1.360

66

5,1

Centres de rééducation, réadaptation et formation professionnelle

87

89

88

87

0

0,0

Foyers d'hébergement pour adultes handicapés

1.229

1.243

1.269

1.292

63

5,1

Foyers de vie pour adultes handicapés (foyers occupationnels)

911

953

993

1.075

164

18,0

Maisons d'accueil spécialisé

306

316

330

362

56

18,3

Foyers à double tarification

202

220

234

294

92

45,5

Centres de placement familial pour adultes handicapés

14

116

20

19

5

35,7

Source FINESS

Ces éléments montrent une forte progression du nombre de SESSAD (+ 59 %), en particulier depuis 2001, qui traduit bien l'orientation prise pour le maintien à domicile.

Même si, en l'absence de chiffres sur le nombre de personnes accueillies, les comparaisons sont difficiles, votre rapporteur tient à souligner l'importance des efforts des départements à travers les créations de FDT (+ 45,5 %) et de foyers occupationnels (+ 18 %).

Les crédits mobilisés en faveur de l'autisme ont permis de créer 852 places en trois ans. Malgré cet effort important, votre rapporteur ne peut qu'encourager le Gouvernement à poursuivre ces créations de places, qui restent insuffisantes par rapport au nombre de personnes autistes, sans solution de prise en charge.

c) La prise en compte tardive de la demande de maintien à domicile

Votre rapporteur tient à souligner le caractère extrêmement récent des dispositifs d'aide au maintien à domicile : c'est uniquement la loi de finances pour 2001 qui a donné son essor au dispositif des auxiliaires de vie qui était assoupi depuis 20 ans 14 ( * ) et c'est également à la rentrée 2001 que les premiers postes d'auxiliaires d'intégration scolaire sont créés, alors que jusque-là les associations devaient trouver, au cas par cas, les financements nécessaires aux 1.300 auxiliaires de vie scolaire mises en place de façon autonome.

Au-delà de la méconnaissance des attentes des personnes handicapées et de leurs familles que traduit ce retard , votre rapporteur tient à rappeler le coût pour la collectivité d'une prise en charge uniquement institutionnelle .

Comparaison des coûts de prise en charge par type d'établissement

Type d'établissement

Coût annuel moyen de la place

Établissements pour enfants handicapés

- établissements pour déficients intellectuels

27.989

- établissements pour polyhandicapés

50.136

- instituts de rééducation

33.397

- établissements pour déficients moteurs

35.937

- établissements pour déficients visuels

26.570

- établissements pour déficients auditifs

27.970

Établissements pour adultes handicapés

Foyers d'accueil médicalisé

48.147

Maisons d'accueil spécialisé

49.246

CAT

10.634

Services de prise en charge à domicile

SESSAD

13.409

Services d'auxiliaires de vie

9.650

Services d'auxiliaires de vie spécialisés*

28.950

* handicap lourd

2. L'évolution des crédits budgétaires consacrés au handicap : un effort en ralentissement depuis 15 ans

Les crédits budgétaires consacrés aux personnes handicapées sont principalement situés dans le fascicule consacré à la santé, à la famille, aux personnes handicapées et à la solidarité 15 ( * ) .

Votre rapporteur tient à souligner l'effort entrepris cette année par le Gouvernement pour améliorer la lisibilité des crédits consacrés au handicap : un nouvel agrégat (l'agrégat 25) « Famille et personnes handicapées » permet le regroupement de l'ensemble des crédits consacrés à ces deux missions, selon trois chapitres :

- le chapitre 46-34 - Interventions en faveur de la famille et de l'enfance ;

- le chapitre 46-35 - Interventions en faveur des personnes handicapées ;

- le chapitre 46-83 - Prestations de solidarité.

Cette nouvelle présentation, qui préfigure la présentation des crédits par programme, demandée par la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, permet d'appréhender plus facilement les crédits consacrés par le ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées, à la politique de compensation du handicap.

Votre rapporteur regrette cependant qu'à l'occasion de ce changement de nomenclature, le Gouvernement ne soit allé jusqu'au bout de cette clarification : ainsi, au sein même du budget de la solidarité, les crédits consacrés aux tutelles et curatelles sont rattachés, sans justification compte tenu des actions financées, à la famille.

Évolution des crédits budgétaires consacrés au handicap depuis 1998

(en millions d'euros)

Dépenses

1998

1999

2000

2001

2002

PLF 2003

Budget de la santé, de la famille et des personnes handicapées

4851,4

5103,7

5259,0

5479,5

5785,4

6108,5

- Chapitre 36-81, article 91 Etablissements nationaux pour jeunes sourds et aveugles

10,8

11,5

11,6

11,5

11,8

11,8

- Chapitre 46-31, article 30 Personnes handicapées : dépenses non déconcentrées

2,7

2,6

2,6

2,6

2,8

2,8

- Chapitre 46-31, article 40 Centres d'aide par le travail

920,7

954,9

987,4

1018,3

1051,0

1096

- Chapitre 46-31, article 50 Personnes handicapées : dépenses déconcentrées

19,9

19,7

22,0

49,6

55,4

74,8

- Chapitre 46-33, article 10 Contribution de l'Etat au financement de l'AAH

3565,6

3776,0

3895,1

4046,0

4277,7

4526,3

- Chapitre 46-33, article 20 Tutelles et curatelles d'Etat

78,5

87,1

91,5

103,7

122

128,1

- Chapitre 46-33, article 60 Fonds spécial d'invalidité

242,7

242,7

242,7

242,7

259,2

263,6

- Chapitre 66-20, article 10 Subvention d'équipements des établissements pour enfants et adultes handicapés

9,1

6,0

3,4

3,2

5,2

4,2

- Chapitre 66-20, article 60 Subvention d'équipement des Instituts nationaux

1,4

3,1

2,8

1,9

0,3

0,9

Budget des affaires sociales, du travail et de la solidarité

797,2

832,2

853,2

891,9

1037,2

1002,3

- Chapitre 44-71, article 10
Mesures en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés

7,5

7,5

7,8

7,3

7,4

7,3

- Chapitre 44-71, article 30
Financement des ateliers protégés

22,2

23,6

24,4

31,4

38,7

42,9

- Chapitre 44-71, article 40
Garantie de ressource

759,4

792,7

821,0

853,2

991,1

952,1

- Chapitre 44-71, article 50
Equipes de préparation et de suite du reclassement professionnel

8,1

8,4

0 *

0

0

0

TOTAL

5648,6

5935,9

6112,2

6371,4

6822,6

7110,8

* Financement transféré à l'AGEFIPH

Les crédits inscrits au budget au titre de 2003 s'élèvent à 7,1 milliards d'euros, soit une progression de 4,2 % par rapport à 2002.

Votre rapporteur rappelle cependant que l'effort national en faveur des personnes handicapées dépasse de beaucoup les crédits inscrits au budget de la solidarité :

- l'Etat intervient, en faveur des personnes handicapées, à travers de nombreux ministères : on peut notamment citer les crédits consacrés par l'Éducation nationale à l'intégration des élèves handicapés, ceux du budget du travail en faveur de l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés ou encore les crédits du fonds interministériel pour l'accessibilité des personnes handicapées (FIAH) ;

- la sécurité sociale consacre en 2001, 16,5 milliards d'euros au handicap : ces dépenses regroupent les prestations au titre de l'assurance invalidité du régime général et le financement des établissements médico-sociaux sous sa responsabilité ;

- les départements financent à hauteur de 2,5 milliards d'euros la politique du handicap, au titre de l'hébergement et de l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) ;

- les financements de l'Association nationale de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés (AGEFIPH) atteignent 412 millions d'euros en 2001 ;

- les dépenses fiscales en faveur des personnes handicapées (demi-part supplémentaire, TVA à taux réduit sur l'appareillage, exonération de l'impôt sur le revenu des prestations sociales versées au titre du handicap) atteignent sans doute en 2001 près de 1,5 milliard d'euros.

Au total, on peut supposer que le « budget social du handicap » en 2001 était de l'ordre de 35 à 40 milliards d'euros .

Malgré l'importance des sommes en jeu, votre rapporteur tient cependant à faire deux observations :

- si les prestations sociales consacrées au handicap ont augmenté de plus de 20 % en francs courants depuis 1995, elles diminuent sur longue période au regard de la richesse nationale, passant de 2 ,1 % du PIB en 1985 à 1,7 % en 2001 ;

- la part de l'Etat dans ce financement a tendance à diminuer : elle est passée de 26,3 % en 1995 à 25 % en 2001.

Votre rapporteur estime donc que, compte tenu de l'enjeu que représente l'intégration des personnes handicapées dans notre société, un réengagement de l'Etat en faveur des personnes handicapées est possible et nécessaire. A ce titre, il ne doute pas que le chantier ouvert par le Président de la République le 14 juillet dernier se traduise par un effort accrû de l'Etat.

B. UN BUDGET QUI CHERCHE À OPTIMISER LES DISPOSITIFS EN FAVEUR DES PERSONNES HANDICAPÉES

L'analyse des dispositifs en faveur des personnes handicapées se porte toujours en premier lieu sur l'offre de places en établissements spécialisés et il est vrai que les besoins restent très importants dans ce domaine.

Cependant, cette approche « institutionnelle » a pu, trop longtemps, occulter les attentes légitimes des personnes handicapées en matière d'intégration dans la société et, en particulier, leur désir de maintien à domicile.

Même si le chemin restant à parcourir est long, votre rapporteur estime que le présent projet de budget tend à assurer un juste équilibre entre prise en charge spécifique et intégration en milieu ordinaire , de façon à donner leur place, de façon convenable et digne, selon les mots du Président de la République, aux personnes handicapées.

1. L'accélération du développement de l'offre de places en établissements

Le financement des établissements a une structure complexe, due à une répartition entre les différents acteurs (Etat, assurance maladie et départements), à la fois en fonction du public accueilli et du type d'établissement.

a) Les structures d'hébergement pour adultes handicapés

Les établissements d'hébergement

Le financement de ces établissements est partagé selon la vocation de la structure concernée :

- les structures d'hébergement sont prises en charge par les départements ;

- les structures comportant une part importante de soins, à l'image des maisons d'accueil spécialisées (MAS), sont financées par l'assurance maladie ;

- les structures d'aide par le travail relèvent du budget de l'Etat.

Mais cette répartition des compétences connaît des frontières variables, dont la création des foyers d'accueil médicalisés (FAM) est le meilleur témoignage : ces établissements, dont la vocation est très proche des MAS et qui accueillent le même type de public, voient leur financement partagé entre l'assurance maladie et les départements, selon une répartition soins-hébergement.

L'accueil en établissement des adultes handicapés

Les foyers d'hébergement pour travailleurs handicapés assurent l'hébergement et l'entretien des travailleurs handicapés exerçant une activité pendant la journée en centres d'aide par le travail, en ateliers protégés ou en milieu ordinaire. Ils peuvent être publics ou privés.

Une équipe, composée de travailleurs sociaux, assure l'encadrement du soir et du week-end des travailleurs hébergés au foyer. Les prestations médicales sont assurées par des médecins libéraux rémunérés à l'acte.

Les dépenses d'exploitation du foyer d'hébergement sont prises en charge par l'aide sociale départementale sous forme de prix de journée. Les travailleurs handicapés sont appelés à contribuer à leurs frais d'hébergement et d'entretien.

Les foyers occupationnels ou foyers de vie pour personnes handicapées sont des établissements médico-sociaux accueillant toute la journée des personnes qui ne sont pas en mesure de travailler mais qui, disposant d'une certaine autonomie physique ou intellectuelle, ne relèvent pas des maisons d'accueil spécialisées (MAS). En général, les foyers de « vie » sont ouverts toute l'année et peuvent offrir un accueil à la journée ou à temps complet.

Une équipe, composée en majorité de travailleurs sociaux et éventuellement de personnel médical et paramédical, assure le fonctionnement de la structure.

Les dépenses d'exploitation des foyers de vie sont prises en charge par l'aide sociale départementale sous forme de prix de journée.

Les foyers d'accueil médicalisés (FAM) , créés par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, pérennisent les structures expérimentales qu'étaient les foyers à double tarification. Ces établissements sont destinés à accueillir des personnes lourdement handicapées dont la dépendance totale ou partielle, constatée par la COTOREP, les rend inaptes à toute activité à caractère professionnel, leur fait obligation de recourir à l'aide d'une tierce personne pour la plupart des actes essentiels de l'existence, et nécessite une surveillance médicale et des soins constants.

Les FAM sont financés par :

- les régimes d'assurance maladie, qui prennent en charge, de manière forfaitaire, l'ensemble des dépenses afférentes aux soins, personnels et matériels médicaux et paramédicaux ;

- l'aide sociale départementale, qui assume le coût de l'hébergement et l'animation des établissements.

Les maisons d'accueil spécialisées (MAS) sont des établissements médico-sociaux recevant des adultes handicapés qui ne peuvent effectuer seuls les actes essentiels de la vie, et dont l'état nécessite une surveillance médicale et des soins constants.

Les soins constants, dont la personne admise dans une maison d'accueil spécialisée a besoin, ne sont pas des thérapeutiques actives ni des soins intensifs qui ne pourraient être dispensés que dans un établissement de soins.

Il s'agit essentiellement d'une surveillance médicale régulière avec recours au médecin, en cas d'urgence, et de la poursuite des traitements et des rééducations d'entretien, des soins de maternage et de nursing requis par l'état des personnes accueillies.

Compte tenu de la lourdeur du handicap, le taux d'encadrement dans ce type d'établissement est de un pour un. Il comprend du personnel médical et paramédical permettant d'assurer la surveillance médicale, du personnel nécessaire pour les aides et les soins quotidiens d'entretien et de rééducation, ainsi que du personnel d'animation pour les activités occupationnelles et d'éveil.

Les MAS sont financées à 100 % par les organismes de sécurité sociale, par le biais d'un prix de journée.

L'effort de création de places, entrepris depuis plusieurs années, est imputable, à titre principal, aux départements, à travers la mise en place de foyers de vie et l'expérience des foyers à double tarification, qui ont pallié la carence de l'Etat en matière de création de places en MAS.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 prévoit, en conséquence, le doublement de l'effort de création de places en MAS , ainsi qu'une amélioration de l'accès aux SSIAD , nécessaire pour le maintien à domicile des personnes les plus lourdement handicapées.

Les données les plus récentes, permettant de faire le point sur le dispositif d'accueil en établissement, datent aujourd'hui de l'enquête « Etablissements et services » de 2000 et concernent la situation en 1998, c'est-à-dire avant le lancement des différents plans, pluriannuel et triennal, de création de places en établissements.

Nombre de structures (au 1 er janvier)

1990

1992

1994

1996

1998

Foyers d'hébergement

1.019

1.096

1.152

1.210

1.236

Foyers occupationnels

472

606

718

831

892

Foyers à double tarification

-

61

102

149

191

Maisons d'accueil spécialisées

164

190

208

249

297

Nombre de places installées (au 1 er janvier)

1990

1992

1994

1996

1998

Foyers d'hébergement

32.816

35.005

36.589

38.607

39.497

Foyers occupationnels

17.428

20.752

24.422

27.500

30.022

Foyers à double tarification

-

1.701

3.212

4.860

6.427

Maisons d'accueil spécialisées

6.322

7.534

8.469

10.193

11.774

Nombre de personnes accueillies (au 1 er janvier)

1990

1992

1994

1996

1998

Foyers d'hébergement

31.941

33.698

35.678.

37.451

38.589

Foyers occupationnels

17.073

20.464

23.939

27.024

29.533

Foyers à double tarification

-

1.653

3.219

4.740

6.325

Maisons d'accueil spécialisées

6.205

7.529

8.346

10.093

11.618

Source : Enquêtes ES 1996 - Ministère de l'emploi et de la solidarité - SESI - ST7 - Février 1997, actualisé au 1 er janvier 1998
Champ : France entière

C'est pourquoi votre rapporteur insiste encore une fois sur la nécessité d'un suivi statistique plus régulier de l'offre de places en établissements , nécessaire tant pour la planification du développement de nouveaux établissements que pour la qualité de l'orientation effectuée par les COROREP, qui dirigent encore trop souvent les personnes handicapées vers des établissements où aucune place n'est en réalité disponible.

Une alternative possible : le placement familial

La loi n° 89-475 du 10  juillet 1989 relative à l'accueil par des particuliers, à leur domicile, à titre onéreux, de personnes âgées ou handicapées adultes , a instauré une forme d'accueil alternative à l'hébergement en institution.

Ce dispositif, qui concerne aujourd'hui près de 6.000 personnes, a été amélioré par l'article 51 de la loi du 17 janvier 2002 , dite de modernisation sociale 16 ( * ) : la procédure d'agrément des particuliers accueillants a été renforcée et une exigence de formation continue a été insérée dans le dispositif. En contrepartie, le contrat d'accueil est devenu un véritable contrat de travail, permettant une meilleure couverture sociale des accueillants.

b) Les établissements pour enfants handicapés

Le financement de ces établissements est apparemment plus simple, dans la mesure où ils sont entièrement financés par l'assurance maladie. En 1998, on comptabilisait environ 2.500 établissements d'éducation spéciale, accueillant 125.500 enfants et adolescents, pour une capacité de 130.000 places installées environ.

Nombre de structures, places installées et personnes accueillies au sein des établissements pour enfants handicapés (au 1 er janvier 1998) (1)

Etablissements pour enfants handicapés

Nombre d'établissements
(au 1 er janvier 1998 - Enquête ES août 2000)

Nombre de place installées
(au 1 er janvier 1998 - Enquête ES août 2000)

Nombre de personnes accueillies
(au 1 er janvier 1998 - Enquête ES août 2000)

Etablissements d'éducation spéciale pour déficients intellectuels

1.194

73.518

73.090

Etablissements d'éducation spéciale pour enfants polyhandicapés

132

4.057

3.937

Instituts de rééducation

345

16.880

16.657

Etablissements d'éducation spéciale pour enfants déficients moteurs

125

7.767

7.745

Instituts d'éducation sensorielle pour enfants déficients visuels

33

2.235

2.065

Instituts d'éducation sensorielle pour enfants déficients auditifs

87

7.606

6.479

Instituts d'éducation sensorielle pour sourds-aveugles

18

1.936

1.723

Services autonomes d'éducation spéciale et de soins à domicile

563

13.466

13.804

TOTAL

2.497

127.465

125.500

(1) Les services d'éducation spéciale et de soins à domicile rattachés à un établissement d'éducation spéciale ne sont pas comptabilisés ici.

Source : Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées, DREES.

On note une évolution dans le mode de prise en charge des enfants handicapés : si la prise en charge en établissement reste prépondérante (85,8 %), l'internat complet a cessé d'occuper la première place dans les formes d'accueil, au profit du semi-internat et de l'externat. A l'inverse, la place des SESSAD ne cesse d'augmenter, passant de 10,6 % en 1994 à 14,2 % en 1998.

Lors de la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées a annoncé une augmentation de 6 % de l'enveloppe « adultes handicapés et enfance inadaptée » des crédits d'assurance maladie , soit 338 millions d'euros, portant les crédits à 6,1 milliards d'euros pour 2003. Ces crédits doivent notamment permettre une amélioration du financement des SESSAD, passés en dotation globale au 1 er janvier 2002.

Votre rapporteur ne peut qu'approuver cet effort, à même de réduire les listes d'attente, encore trop importantes, d'enfants sans solution de scolarisation.

c) La réduction des effets pervers de l'amendement Creton

Introduit par la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses dispositions d'ordre social , l'amendement Creton prévoit la possibilité de maintenir un jeune adulte dans l'établissement d'éducation spéciale qui l'accueillait, au-delà de l'âge réglementaire lorsqu'aucune place n'est disponible dans l'établissement pour adultes désigné par la COTOREP.

Il prévoit également que, dans ce cas, « cette décision s'impose à l'organisme ou à la collectivité compétente pour prendre en charge les frais d'hébergement et de soins dans l'établissement pour adulte désigné par la COTOREP » 17 ( * ) .

Cette disposition, qui partait de l'intention généreuse de limiter les ruptures de prise en charge des jeunes adultes, comporte cependant plusieurs effets pervers :

- le maintien de jeunes adultes au sein des établissements d'éducation spéciale, outre le fait qu'il entraîne des perturbations dans le fonctionnement des établissements inadaptés à l'âge de ce public, a contribué à l'allongement des listes d'attentes à l'entrée de ces établissements, au détriment des enfants et adolescents ;

- ce maintien a également introduit, au sein des établissements pour enfants, des mécanismes de financement qui leur étaient étrangers . Les deux circulaires du 18 mai 1989 et du 27 janvier 1995, qui avaient fixé les compétences respectives en matière de financement, ont été tour à tour annulées, sur recours de plusieurs départements, pour défaut de base légale de la procédure forfaitaire de tarification retenue.

L'accélération des créations de places en CAT (3.000 places supplémentaires contre 1.500 les années passées), prévue dans le projet de loi de finances pour 2003, devrait contribuer à résorber les effets de cette disposition, qui bénéficiait, au 31 décembre 1998, à 3.920 jeunes adultes (soit 3,1 % de l'effectif total des établissements pour enfants ou adolescents handicapés). 30 millions d'euros seront consacrés à ces créations de places.

Votre rapporteur approuve cet effort, qui va incontestablement dans le bon sens, mais il voudrait également attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité de réviser au plus vite le décret du 24 mars 1988 relatif à la gestion budgétaire et comptable et aux modalités de financement de certains établissements sociaux ou médico-sociaux à la charge de l'Etat ou de l'assurance maladie , afin de fixer définitivement les règles de financement des maintiens qui demeureront nécessaires.

2. L'amélioration de la prise en compte de la volonté des personnes handicapées de vivre à domicile

a) Des difficultés qui restent nombreuses

91,8 % des personnes handicapées 18 ( * ) vivent aujourd'hui à domicile, soit près de 2 millions de personnes. Même si ce chiffre ne traduit pas uniquement un choix, mais également la conséquence du manque de places ou de moyens financiers, force est de constater que le dispositif existant pour prendre en charge ces personnes reste largement insuffisant.

Les personnes handicapées rencontrent principalement deux types de difficultés dans l'accès aux aides au maintien à domicile : l'insuffisance de l'offre de services liée au maintien à domicile (qu'il s'agisse de l'accès à une auxiliaire de vie ou de la prise en charge des aménagements de leur logement) et le caractère restrictif des aides auxquelles elles peuvent avoir accès pour les financer.

Le financement des aides à domicile

L'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) est une prestation d'aide sociale servie par le département aux personnes atteintes d'une incapacité d'au moins 80 % et qui ne bénéficient pas d'avantages analogues au titre d'un régime de sécurité sociale. Son montant varie, en fonction des ressources de la personne handicapée, de 366,53 à 733,02 euros par mois.

Au 31 décembre 2001, 95.407 personnes de moins de 60 ans bénéficiaient de cette prestation.

Évolution du nombre de bénéficiaires de moins de 60 ans

1999

2000

2001

Nombre de bénéficiaires vivant à domicile

n. d.

77.366

80.729

Nombre de bénéficiaires vivant en établissement

n. d.

14.438

14.318

TOTAL

88.204

91.804

95.407

Source : Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

L'accès à cette prestation reste difficile, même si la mise en place de la prestation spécifique dépendance (PSD), puis de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ont permis de dégager des crédits, au profit des personnes handicapées : en effet, si les plus de 60 ans représentaient, jusqu'en 1998, 70 % des titulaires de l'ACTP, ils n'en représentent plus aujourd'hui que 45 % et cette tendance à la baisse devrait se confirmer en 2003.

Mais l'ACTP ne permet de financer, dans le meilleur des cas, qu'une présence de 2 à 3 heures par jour, ce qui reste largement insuffisant pour des personnes qui ont besoin d'une assistance continue pour les gestes essentiels de la vie quotidienne.

L'offre de service d'aide à domicile

Le tableau ci-dessous expose les différents services d'aide à domicile auxquels peuvent avoir accès les personnes handicapées.

Type

Financeur

Bénéficiaires

Services d'aide ménagère

Département
Aide sociale facultative

Tout public,
sans condition de ressources

SSIAD 1

Assurance maladie

Tout public,
sur prescription du médecin

Services d'auxiliaires de vie

Dotation forfaitaire de l'Etat
Aide sociale départementale

Bénéficiaires de l'ACTP

1 Service de soins infirmiers à domicile.

Les services d'auxiliaires de vie , destinés aux seuls bénéficiaires de l'ACTP, employaient, au 1 er janvier 2000, 1.862 personnes. Ces postes, qui avaient été créés par l'Etat par une circulaire du 29 juin 1981, sont longtemps restés le seul dispositif d'aide à domicile accessible aux personnes handicapées.

Le plan triennal 2001-2003 a cependant permis de créer 963 postes supplémentaires en 2001 (pour un montant de 9,3 millions d'euros) et 900 autres postes étaient prévus en 2002, mais ces crédits ont été partiellement gelés.

Votre rapporteur regrette également que l'extension aux personnes handicapées de l'accès aux SSIAD reste en pratique lettre morte dans la mesure où le décret d'application, prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, n'a pas encore été pris.

Au total, et compte tenu de l'ampleur des besoins, l'offre de services reste insuffisante.

Ainsi, « l'aide exclusivement familiale concerne 71,4 % des jeunes de 0-19 ans. Elle se situe autour de 60 % pour les adultes dans les tranches 20-39, 40-59 et 60-79 ans, puis chute à 32 % dans la tranche des 80 ans et plus (...). Au sein des aidants professionnels, le personnel domestique (femme de ménage, aide ménagère) concerne deux fois plus de personnes (1.452.800) que le personnel paramédical (auxiliaire de vie, garde à domicile) (723.300) et près de quatre fois plus que le personnel social et éducatif (396.600) » . 19 ( * )

b) Le développement des outils du maintien à domicile

L'accroissement du nombre d'auxiliaires de vie

Le projet de loi de finances pour 2003 prévoit la création de 400 nouveaux postes d'auxiliaires de vie, pour un montant de 3,86 millions d'euros, poursuivant l'effort de mise à niveau de la participation de l'Etat au financement de ces services.

Votre rapporteur accorde un intérêt tout particulier au dispositif expérimental, conforté par le présent projet de loi de finances, d'aide renforcée au financement de postes d'auxiliaires de vie dédiés à la prise en charge des handicaps les plus lourds .

Ce dispositif, financé en 2002 par un redéploiement d'une partie des crédits gelés (et initialement destinés à la création de postes d'auxiliaires de vie ordinaires) à hauteur de 0,5 million d'euros, doit permettre de majorer l'aide forfaitaire accordée par l'Etat au financement de chaque poste d'auxiliaire de vie, cette aide s'élevant alors à 28.950 euros par poste et par an, contre 9.650 dans le cas normal.

6,8 millions d'euros seront consacrés à ce dispositif en 2003, correspondant à 309 postes permettant l'accompagnement à temps plein de 103 personnes lourdement handicapées.

Cette mesure devrait permettre une meilleure prise en charge des handicaps les plus lourds et pour lesquels le maintien à domicile était jusqu'à présent le plus difficile à envisager. L'adossement prévu aux MAS ou aux FAM devrait également garantir la qualité du suivi médical.

Votre rapporteur ne peut qu'encourager le Gouvernement à développer ce type de prise en charge.

La professionnalisation de l'aide à domicile

Le champ de l'aide à domicile souffre d'un important déficit en qualification puisque l'on compte près de 80 % de personnes non qualifiées intervenant auprès des personnes handicapées. Il a donc été souhaité la mise en place d'une véritable politique de professionnalisation avec la création du diplôme d'Etat d'auxiliaire de vie sociale (DEAVS), rénovant le certificat d'aptitude aux fonctions d'aide à domicile (CAFAD) et répondant aux nouvelles compétences attendues des aides à domicile.

Créé par le décret n° 2002-410 du 26 mars 2002 , le DEAVS répond à plusieurs objectifs :

- offrir des possibilités de promotion sociale et de mobilité professionnelle à ces personnels ;

- répondre aux besoins de qualification et renforcer l'attractivité de la profession en élargissant et en simplifiant l'accès à la formation, notamment en utilisant la procédure de validation des acquis de l'expérience ;

- construire une véritable identité professionnelle en établissant un référentiel de compétences du métier et en clarifiant ses frontières avec le champ de la prise en charge sanitaire à domicile.

Le dispositif de validation des acquis de l'expérience a bénéficié à 130 candidats en 2002, dans le cadre d'une expérimentation limitée, et son évaluation doit permettre la généralisation du dispositif pour l'année scolaire 2002-2003.

Votre rapporteur se félicite de la modernisation ainsi engagée de l'aide à domicile, qui constitue une garantie supplémentaire pour les personnes handicapées. Il rappelle cependant que « cette qualification ne devra, en aucun cas, devenir une contrainte administrative supplémentaire dont le respect serait, par exemple, exigé pour l'attribution de la nouvelle « allocation compensatrice individualisée » 20 ( * ) .

La généralisation des sites pour la vie autonome

Votre rapporteur tient à saluer la généralisation des sites pour la vie autonome, attendue depuis 1997 par les personnes handicapées.

Instaurés en 1997 à titre expérimental, ces sites permettent de regrouper, en un lieu unique, les compétences requises pour évaluer tous les besoins d'aides, techniques ou d'aménagement du logement.

S'ajoutant aux 4 sites expérimentaux de 1997, 20 sites supplémentaires sont créés par la loi de finances pour 2000, 28 par la loi de finances pour 2001 et 27 par la loi de finances pour 2002. 30 nouveaux sites sont prévus en 2003, portant à 104 le nombre de sites, soit un nombre supérieur au nombre de départements, pour un montant de 8,4 millions d'euros .

Le ministère précise que les sites « bénéficient de 228.000 à 350.000 euros par site en année pleine, selon le poids démographique du département, afin d'accompagner la mise en place du dispositif, de soutenir les équipes techniques et les aménagements de lieux ordinaires de vie prescrits par ces équipes » 21 ( * ) .

Votre rapporteur insiste cependant sur la nécessité de doter le plus rapidement possible les sites pour la vie autonome d'un véritable statut législatif et de solvabiliser plus largement les fonds départementaux de compensation, afin de leur donner les moyens d'une véritable prise en charge complémentaire des aides techniques et des aménagements du cadre de vie des personnes handicapées.

L'évaluation des sites, menée au cours du dernier trimestre 2002, devrait fournir les outils pour élaborer ce cadre législatif.

3. L'intégration scolaire des enfants et adolescents handicapés : la politique des petits pas

a) Un dispositif qui reste insuffisant

La loi d'orientation du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées fixe comme objectif prioritaire l'intégration des enfants et adolescents handicapés en milieu scolaire ordinaire. Ce principe a d'ailleurs été réaffirmé par la loi n° 89-486 d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 et rappelé aux recteurs d'académie par la circulaire du 19 novembre 1999 dans le cadre du plan Handiscol.

Les différentes modalités de scolarisation des enfants handicapés

La mise en oeuvre de l'obligation éducative, dont les conditions sont définies par les commissions départementales d'éducation spéciale (CDES), peut prendre des formes variées :

- une intégration individuelle en milieu ordinaire , avec le cas échéant, un accompagnement spécifique dispensé par les réseaux d'aide spécialisée aux élèves en difficulté (RASED), les services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) ou encore par des auxiliaires d'intégration scolaire ou des enseignants spécialisés itinérants ;

- une intégration collective dans une classe « spéciale » située dans un établissement « ordinaire » : les classes d'intégration scolaire (CLIS) à l'école primaire et les unités pédagogiques d'intégration (UPI) au collège dispensent un enseignement adapté, tout en permettant aux élèves handicapés de participer aux activités des autres élèves de l'établissement. Un soutien peut être organisé dans les mêmes conditions que pour l'intégration individuelle ;

- une scolarisation dans un établissement spécialisé de l'Éducation nationale : il s'agit notamment des établissements régionaux d'enseignement adapté (EREA) ou encore des centres de formation d'apprentis spécialisés (CFAS) ;

- l'accueil dans un établissement médico-social d'éducation spéciale : spécialisés par type de handicap, ces établissements ont pour vocation d'assurer une prise en charge globale de l'enfant. Il convient notamment de rappeler le rôle des instituts médico-éducatifs (IME) qui sont de deux sortes : les instituts médico-pédagogiques (IMP) qui assurent l'éducation générale et pratique des enfants et les instituts médico-professionnels (IMPro) qui dispensent, en complément de l'éducation générale, une formation professionnelle adaptée au handicap à partir de 14 ans.

La scolarisation des enfants handicapés en 2000

(effectifs en unités)

Intégration individuelle en milieu ordinaire

- dans le premier degré

26.541

- dans le second degré

17.060

TOTAL

43.601

Intégration collective en milieu ordinaire

- en CLIS

28.459

- en UPI

1.735

TOTAL

30.194

TOTAL milieu ordinaire

73.795

Scolarisation dans un établissement spécialisé de l'Éducation nationale

18.000

Scolarisation dans un établissement médico-social d'éducation spéciale

- en permanence

69.473

- temporairement

901

- scolarisés hors de l'établissement

6.914

TOTAL

77.288

N.B. effectif accueilli

101.565

Scolarisation par un SESSAD

17.347

TOTAL Education spéciale

112.635

TOTAL

186.430

Source : Ministère de l'Éducation nationale et ministère de la Santé, de la Famille et des Personnes handicapées.

Des insuffisances quantitatives et qualitatives

La scolarisation d'un enfant, et plus encore d'un adolescent handicapé, reste aujourd'hui un parcours du combattant :

- l'absence de toute scolarisation reste encore trop fréquente : une enquête conjointe des inspecteurs d'académie et des DDASS conduit à un manque de 6.636 places d'intégration collective dans les écoles et dans les établissements médico-éducatifs à la rentrée 2001. La mission d'étude en vue de la révision de la loi d'orientation du 30 juin 1975 montrait quant à elle que 22 % des enfants accueillis dans les établissements d'éducation spéciale n'étaient pas scolarisés ;

- l'intégration en milieu scolaire ordinaire reste toujours l'exception : lorsqu'elle a lieu, il s'agit de préférence d'une intégration collective et encore faut-il souligner la faiblesse de ce dispositif dans le second degré ;

- l'intégration individuelle rencontre toujours de nombreux obstacles. La mise à disposition d'un auxiliaire d'intégration scolaire demeure un véritable casse-tête administratif : jusqu'en 2001, l'unique dispositif existant était associatif et son financement relevait de conventions tripartites entre l'établissement, les parents et l'association.

Le plan Handiscol, lancé en 1999, a apporté de premières réponses, mais il mérite à l'évidence d'être amplifié et approfondi. Comme il l'observait dans son rapport d'information précité, votre rapporteur rappelle surtout que sa mise en oeuvre est encore très inégale et connaît d'importants retards.

ÉTAT D'APPLICATION DU PLAN « HANDISCOL »

Principes

Mesures

Etat d'application

I - RÉAFFIRMER LE DROIT A LA SCOLARISATION DES ENFANTS ET ADOLESCENTS HANDICAPES ET FAVORISER SON EXERCICE

1. Publier un texte d'orientation générale

Réalisé

2. Revoir et unifier la réglementation

En attente

3. Diffuser un guide pratique à destination des familles

Réalisé

4. Développer la cellule d'écoute « Handiscol »

Réalisé

II - CONSTITUER DES OUTILS D'OBSERVATION

5. Rapprocher les outils statistiques des deux ministères

En attente

6. Achever et optimiser l'informatisation des commissions départementales de l'éducation spéciale

En cours

III - AMÉLIORER L'ORIENTATION ET RENFORCER LE PILOTAGE

7. Améliorer le fonctionnement des CDES

En attente

8. Installer, dans le cadre des Comités Départementaux Consultatifs des Personnes Handicapées, les groupes départementaux « Handiscol »

En cours

9. Tenir annuellement au plan national une réunion du CNCPH et au plan régional une réunion des CROSS consacrées à la scolarisation des enfants et adolescents handicapés

En attente

IV - DÉVELOPPER LES DISPOSITIFS ET LES OUTILS DE L'INTÉGRATION

10. Développer les dispositifs collectifs d'intégration

En cours

11. Développer les dispositifs médico-sociaux d'accompagnement

En cours

12. Développer et rationaliser les dispositifs d'auxiliaires d'intégration scolaire

En attente

13. Promouvoir le pôle handicap du Centre national d'enseignement à distance (CNED)

En cours

14. Renforcer le rôle du centre de formation des enseignants spécialisés de l'Education nationale (CNEFEI) et produire des guides pédagogiques pour les enseignants

En cours

15. Rechercher des modes de financement pour les matériels pédagogiques spécialisés

En cours

16. Rechercher les moyens d'aider les collectivités locales à mettre en accessibilité les établissements

En attente

17. Améliorer l'accès à la formation professionnelle et la qualification professionnelle

En attente

V - AMÉLIORER LA FORMATION DES PERSONNELS DE L'ÉDUCATION NATIONALE

18. Développer la formation initiale et continue des personnels enseignants et des personnels de direction du premier et du second degré

En cours

19. Sensibiliser les personnels d'inspection aux enjeux et dispositifs de l'intégration scolaire

En cours

20. Rapprocher les certifications des enseignants pour déficients sensoriels des deux ministères

En attente

Source : rapport d'information de M. Paul Blanc, n° 369 (2001-2002) « Compensation du handicap : le temps de la solidarité »

b) Le projet de budget pour 2003 : une priorité affichée pour le milieu ordinaire

Le projet de budget pour 2003 s'attache à conforter un outil essentiel pour l'intégration scolaire des enfants et adolescents handicapés : les auxiliaires d'intégration scolaire.

Il s'inscrit ainsi dans le prolongement de la loi n° 2002-1095 du 29 août 2002 portant création d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise , qui a prolongé jusqu'en juin 2003 les emplois-jeunes occupant des fonctions d'auxiliaires d'intégration scolaire et dont le contrat aurait dû prendre fin au cours de l'année scolaire.

Sont ainsi prévues l'extension en année pleine des 583 postes auxiliaires d'intégration scolaire créés à la rentrée 2001, la consolidation de 500 autres postes créés à la rentrée 2002 et la création à la rentrée 2003 de 500 postes supplémentaires. A ce titre, 3,3 millions d'euros sont inscrits au budget du ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées, correspondant à une dotation de 3.917 euros par poste et par an en année pleine .

Cet effort devrait permettre à l'Etat de revenir à une parité avec le monde associatif qui employait, en 2001, 1.300 auxiliaires d'intégration scolaire et ainsi de compléter l'action des SESSAD.

4. L'accès à l'emploi des personnes handicapées : un effort à poursuivre

La politique en faveur de l'emploi des personnes handicapées repose sur trois dispositifs complémentaires : l'obligation d'emploi imposée aux employeurs publics et privés, le concours de l'AGEFIPH aux dispositifs d'insertion en milieu ordinaire et le financement par l'Etat de places en milieu protégé.

a) Un bilan mitigé de l'obligation d'emploi issue de la loi de 1987

La loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 dispose que « tout employeur occupant au moins 20 salariés est tenu d'employer, à temps plein ou à temps partiel, des travailleurs handicapés dans la proportion de 6 % de l'effectif total de ses salariés. Pour les entreprises à établissements multiples, cette obligation d'emploi s'applique établissement par établissement ».

La loi permet à l'employeur de satisfaire à l'obligation d'emploi selon cinq modalités :

- l'emploi direct ;

- la conclusion de contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestations de service avec des établissements de travail protégé ;

- l'accueil, sous certaines conditions, de personnes handicapées bénéficiaires d'un stage au titre de la formation professionnelle ;

- la conclusion d'accord d'établissement, d'entreprise ou de branche en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés ;

- le versement d'une contribution à l'AGEFIPH.

En 2000, 219.000 bénéficiaires de la loi de 1987 étaient employés dans 54.882 établissements, le nombre total des établissements assujettis étant de 92.187.

L'obligation d'emploi dans le secteur privé

Depuis 1993, le taux d'emploi direct de travailleurs handicapés est marqué par une forte stabilité, fluctuant autour de 4 %. Il s'établit pour 2000 à 4,1 %.

Compte tenu de la règle de l'arrondi à l'entier inférieur, le taux d'emploi exigé est en réalité en moyenne de 5,4 %. Par conséquent, l'objectif est atteint à 74 %, le quart restant représentant la sous-traitance et les contributions à l'AGEFIPH.

Cependant, ce taux moyen recouvre des réalités très différentes :

- 36,7 % des entreprises n'emploient aucun travailleur handicapé et 30,2 % ne remplissent l'obligation d'emploi qu'en payant la contribution maximum à l'AGEFIPH ;

- 32,1 % utilisent une combinaison des différentes solutions ;

- à l'inverse, 33,9 % remplissent leur obligation uniquement par l'emploi direct.

On note que, dorénavant, les travailleurs handicapés reconnus par la COTOREP représentent la catégorie de bénéficiaires la plus importante (59 % de l'ensemble), devant les accidentés du travail (30 %).

Au total, l'emploi des travailleurs handicapés reste insuffisant : le nombre de demandeurs d'emploi handicapés est ainsi passé de 135.000 en 2000 à 142.821 en 2001, soit 5,8 % du total des demandeurs d'emploi . Or, les travailleurs handicapés constituent une des catégories les plus vulnérables sur le marché de l'emploi. La dégradation de la conjoncture en 2002 et les incertitudes concernant la croissance en 2003 laissent craindre une détérioration plus que proportionnelle de la situation de l'emploi des personnes handicapées.

Votre rapporteur note cependant avec satisfaction les résultats encourageants de l'action du réseau Cap-Emploi , spécialisé dans le placement des personnes handicapées : en 2001, 42.000 placements ont été réalisés par Cap-Emploi, dont 46,5 % en contrat à durée indéterminée et 72 % avec des contrats supérieurs à 12 mois, contribuant à la baisse de la part des emplois aidés dans les postes occupés par des travailleurs handicapés.

L'obligation d'emploi dans le secteur public

S'agissant des différentes fonctions publiques, soumises dans la même mesure à l'obligation d'emploi , les derniers chiffres connus datent de 1999 et font apparaître une situation moins exemplaire que celle à laquelle on pourrait s'attendre de la part des pouvoirs publics.

Taux d'emploi des travailleurs handicapés
dans le secteur public

1998

1999

Fonction publique de l'Etat

4,09 %

4,18 %

Fonction publique territoriale

5,12 %

n.d.

Fonction publique hospitalière

5,73 %

5,68 %

Concernant la fonction publique d'Etat, qui fait encore figure de mauvais élève, un protocole d'accord intervenu le 8 octobre 2001 met en place des outils qui devraient permettre une amélioration de l'emploi des personnes handicapées :

- des plans triennaux d'insertion des travailleurs handicapés prévoient pour chaque ministère un objectif de 6 % de recrutement de personnes handicapées chaque année, assorti d'une sanction en cas de non-respect dans un délai de 3 ans . Cette sanction prendrait la forme d'un gel des emplois proportionnel au nombre de personnes handicapées non recrutées et d'un versement des sommes concernées au fonds interministériel pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique ;

- la suppression de la section « secteur public » des COTOREP , qui oblige actuellement les candidats à l'entrée dans la fonction publique à une procédure particulière de reconnaissance, est programmée. Elle sera remplacée par une visite médicale d'aptitude approfondie, qui nécessite toutefois au préalable la constitution d'un réseau de médecins agréés spécialisés ;

- la procédure des emplois réservés qui créait un phénomène de liste d'attente, dû à l'absence de recrutement tant qu'un emploi réservé ne devenait pas vacant, est supprimée ;

- les moyens du fonds interministériel d'insertion des travailleurs handicapés dans la fonction publique sont renforcés : sa dotation, inscrite au chapitre 34-94 (article 50) du budget des services généraux du Premier ministre, passe ainsi de 3,96 à 5,1 millions d'euros, soit une augmentation de 28,7 %. Le protocole prévoit à terme de confier à ce fonds des missions comparables à celles de l'AGEFIPH, notamment en ce qui concerne l'aménagement des postes de travail.

Votre rapporteur salue cet effort qui témoigne d'une prise de conscience du retard pris par la fonction publique en matière d'insertion des travailleurs handicapés.

Il constate cependant, qu'eu égard à la proportion de la population active employée par le secteur public, les moyens du fonds interministériel restent très largement insuffisants. A titre de comparaison, on rappellera que les montants collectés par l'AGEFIPH en 2001 s'élevaient à 349 millions d'euros.

L'adoption de dispositions analogues par les autres fonctions publiques, même si celles-ci remplissent mieux leurs obligations, doit également être recherchée.

b) Un risque d'essoufflement de l'AGEFIPH

Les ressources : une progression des montants collectés

Les données disponibles dans le dernier rapport d'activité de l'AGEFIPH pour l'exercice 2001 montrent une progression de 11,5 % des montants collectés par rapport à l'exercice 2000 .

Cette hausse correspond tout d'abord à une augmentation du nombre d'établissements contributeurs (+ 3,5 %) qui traduit une baisse de la proportion d'entreprises employant des personnes handicapées. Elle s'explique également par la progression du nombre d'entreprises nouvellement assujetties, du fait de l'augmentation de leurs effectifs, et qui n'ont pas eu le temps de se mettre en conformité avec l'obligation d'emploi.

On assiste également à une augmentation de la contribution moyenne par entreprise qui résulte essentiellement d'un effectif de travailleurs handicapés, dans les entreprises recourant à l'emploi direct, qui reste constant malgré l'augmentation de la taille de l'entreprise. Ce ralentissement du recrutement des personnes handicapées, que traduit l'évolution des chiffres du chômage, pourrait s'accentuer si la dégradation de la conjoncture économique se confirmait.

Évolution de la collecte de l'AGEFIPH depuis 1995

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Montants collectés
(en millions d'euros)

242

253

260

278

300

313

349

Évolution (en %)

+1,7

+ 4,5

+ 2,8

+ 6,9

+ 7,9

+ 4,3

+ 11,5

Nombre d'établissements contributeurs

41.812

43.712

44.916

45.550

47.080

47.277

48.933

Évolution (en %)

+ 0,7

+ 4,5

+ 2,8

+ 1,4

+3,4

+ 0,4

+ 3,5

Contribution moyenne (en milliers d'euros par entreprise)

5,8

5,8

5,8

6,1

6,3

6,7

7,1

Évolution (en %)

+ 1,8

0,0

0,0

+ 5,2

+ 3,3

+ 6,3

+ 6,0

Source : Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

Le « programme exceptionnel » : l'épuisement des réserves

L'AGEFIPH a lancé en 1999 un programme exceptionnel sur la période 1999-2001, qui s'articulait autour de quatre axes :

- préparation et accompagnement de l'insertion des personnes handicapées ;

- développement et modernisation des dispositifs d'orientation et de formation professionnelle ;

- valorisation de l'action des entreprises ;

- développement de l'alternative au secteur spécialisé et expérimentation de dispositifs d'observation des besoins.

A ce titre, les financements de l'AGEFIPH ont augmenté de 10,1 % en 2000, puis de 23,3 % en 2001. En 2002, en revanche, les financements ne progressent plus que de 0,2 %, témoignant de l'épuisement des réserves de l'AGEFIPH.

Dans ces conditions, l'action de l'AGEFIPH ne peut gagner en efficacité qu'en procédant à une réallocation des moyens entre les différentes actions financées.

Évolution de la répartition des financements de l'AGEFIPH

(en %)

1999

2000

2001

2002

Information, diagnostic, conseil

4,1

3,3

3,7

4,1

Formation

12,8

12,5

24,5

25,0

Placement

15,5

17,0

17,3

18,6

Accès, maintien dans l'emploi et accompagnement au travail

26,6

26,5

23,6

25,8

Primes

30,2

30,6

22,5

17,8

Garantie de ressources en milieu ordinaire

10,8

10,1

8,4

8,7

TOTAL

100

100

100

100

Votre rapporteur estime notamment que le financement de la garantie de ressources en milieu ordinaire, qui représente 35,8 millions d'euros en 2002, et celui du réseau Cap Emploi, mis à la charge de l'AGEFIPH en 2000, pourraient légitimement être repris par l'Etat. Une telle mesure, qui dégagerait près de 85 millions d'euros, permettrait de redonner des marges de manoeuvre à l'AGEFIPH pour financer de nouvelles actions, notamment dans le domaine de la formation ou dans le développement de passerelles entre secteur protégé et milieu ordinaire.

c) L'emploi protégé : l'instrument toujours privilégié de la politique d'emploi en faveur des personnes handicapées

Le secteur protégé regroupe principalement deux types de structures : les centres d'aide par le travail, financés par les crédits de la solidarité et les ateliers protégés, financés par le budget de l'emploi.

Les centres d'aide par le travail

Il s'agit d'établissements médico-sociaux qui permettent à des personnes handicapées dont la capacité de travail, évaluée par la COTOREP, est inférieure au tiers de la normale, de participer à des activités diverses à caractère professionnel, tout en bénéficiant d'un soutien médico-social et éducatif.

Ces centres, créés sur autorisation du préfet, après avis du Comité régional de l'organisation sanitaire et sociale (CROSS), font partie, avec les CHRS, des établissements sociaux et médico-sociaux financés par l'aide sociale obligatoire de l'Etat.

Le projet de loi de finances pour 2003 accentue encore l'effort de création de places en CAT lancé par le plan pluriannuel 1999-2003, en doublant le rythme de création de places prévu initialement : à ce titre, 30 millions d'euros sont inscrits au projet de budget pour le financement de 3.000 places supplémentaires, portant ainsi le nombre de places financées à 101.811, ces crédits s'ajoutant à une mesure nouvelle de 15 millions d'euros inscrite pour faire face à l'augmentation de la masse salariale de ces centres.

Les ateliers protégés

Les ateliers protégés et les centres de distribution de travail à domicile qui accueillent des travailleurs handicapés dont la capacité de travail est égale au moins au tiers de la capacité de travail d'un travailleur valide, sont, contrairement aux CAT, des unités économiques de production. Les personnes handicapées employées dans ces structures sont donc des salariés. Les ateliers protégés doivent, en outre, favoriser la promotion des travailleurs handicapés et leur accession au milieu ordinaire de travail.

C'est à ce titre qu'ils reçoivent de l'Etat une subvention de fonctionnement, inscrite au chapitre 44-71 (article 30) du budget du travail.

Au 31 décembre 2001, 18.760 travailleurs handicapés (effectif réel) sont employés dans 577 ateliers protégés répartis sur l'ensemble de la France.

Dans le cadre du plan triennal 2001-2003, les ateliers protégés bénéficient d'une subvention d'accompagnement et de développement, dont le solde, versé cette année, s'élève à 3 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2003. Une mesure nouvelle de 1,6 million d'euros est également prévue, pour la création de 500 places supplémentaires. Au total, les crédits consacrés aux ateliers protégés progressent de 10,8 % par rapport à 2002.

S'agissant de la modernisation des ateliers protégés, votre rapporteur estime qu'il est nécessaire de résoudre les difficultés que rencontrent ces établissements du fait de la délicate combinaison entre dispositions particulières liées à leur mission spécifique d'insertion et règles générales du droit du travail.

Une proposition de loi a été déposée en ce sens 22 ( * ) sur le bureau de l'Assemblée nationale, s'inspirant largement des propositions du GAP-UNETA 23 ( * ) : elle constitue un support intéressant qui pourrait servir de base aux évolutions qui seront mises en oeuvre dans le cadre de la révision de la loi du 30 juin 1975.

Votre rapporteur tient également à faire part de son inquiétude face à la dérive « concurrentielle » des structures de travail protégé : le soutien, souvent insuffisant, de l'Etat conduit ces structures à garder leurs éléments les plus productifs au détriment de leur évolution vers le travail en milieu ordinaire. Dès lors, il lui semble important de donner au secteur protégé les moyens d'exercer sa mission d'insertion.

La garantie de ressources

La garantie de ressources, complément de rémunération versé au travailleur handicapé pour lui assurer une rémunération globale équivalente à celle d'un travailleur valide, est financée, depuis 1997, par deux acteurs différents, selon qu'il s'agit du secteur protégé ou du milieu ouvert :

- l'AGEFIPH prend en charge la garantie de ressources en milieu ordinaire : elle y a consacré 35,8 millions d'euros en 2002 ;

- l'Etat finance uniquement la garantie de ressources en secteur protégé, soit 952,1 millions d'euros en 2003, pour 111.550 bénéficiaires (effectifs budgétaires).

La progression du financement de l'Etat s'explique par l'incidence de la création des 3.000 places supplémentaires en CAT (26,4 millions d'euros) et de 500 places en ateliers protégés (4 millions d'euros). Au total, les crédits augmentent de 4,5 % par rapport à 2002.

Les équipes de préparation et de suite du reclassement

Les équipes de préparation et de suite du reclassement (EPSR) relèvent de deux catégories juridiques mentionnées à l'article R. 323-33-13 du code du travail :

- les EPSR publiques constituent un service administratif interne des directions départementales du travail. Elles ne disposent pas de financements particuliers autres que ceux dévolus par le ministère du travail à l'ensemble de ses services déconcentrés ;

- les EPSR privées, regroupées sous le label « Cap Emploi » avec les organismes d'insertion et de placement (OIP), sont financées depuis 2000 par l'AGEFIPH et concluent avec l'Etat, l'AGEFIPH et l'ANPE une convention portant cahier des charges dont les clauses déterminent les missions particulières qui leur incombent.

En 2001, l'AGEFIPH a consacré 50,7 millions d'euros au financement du réseau Cap Emploi.

Votre rapporteur concède que le financement du placement des personnes handicapées peut entrer dans les missions de l'AGEFIPH et que l'expertise du réseau Cap Emploi n'a pas son équivalent dans le service public de l'emploi. Il regrette cependant que l'Etat, même s'il conserve la possibilité de déterminer les objectifs des EPSR, se soit déchargé du financement d'une mission qu'il continue pourtant à financer concernant les travailleurs valides.

C. LE CHEMIN À PARCOURIR : VERS UNE RÉVISION DE LA LOI D'ORIENTATION DU 30 JUIN 1975

Tout en reconnaissant les acquis de la loi d'orientation du 30 juin 1975, les personnes handicapées demandent aujourd'hui une modernisation des dispositifs qui constituent la politique de compensation du handicap.

Partant de ce constat, votre commission a adopté, le 24 juillet dernier, 75 propositions 24 ( * ) qui semblent à votre rapporteur être un bon étalon pour mesurer le chemin à parcourir.

Des attentes et des espoirs nombreux sont nés à la suite de ce rapport : il convient de ne pas les décevoir.

1. Connaître la population handicapée pour mieux agir

Combien y a-t-il de personnes handicapées en France ? Telle est la question à laquelle, paradoxalement, les dispositifs de la politique en faveur des personnes handicapées restent incapables de répondre.

Les résultats de l'enquête « Handicap-Incapacité-Dépendance » , attendus depuis cinq ans sont enfin parus ; ils ne permettent toutefois pas de déterminer avec précision une population « cible » pour la politique du handicap.

Selon cette enquête, 22,5 millions de Français souffriraient d'une « gêne dans la vie quotidienne ». Parmi eux, 3,5 millions bénéficient d'une reconnaissance administrative de leur handicap.

L'approche en termes de dépendance permet de déterminer une population de 675.000 personnes totalement dépendantes .

Cette enquête confirme également la place prépondérante des accidents (29 % des personnes bénéficiant d'une reconnaissance administrative de leur handicap) et de la maladie parmi les causes de handicap.

Origine de la déficience

Population vivant à domicile

Population vivant en établissement

Population bénéficiant d'une reconnaissance administrative de son handicap

Accidentelle

11,9

9,0

29,0

Cause anténatale ou périnatale