Avis n° 100 (2005-2006) de MM. Philippe NACHBAR et Serge LAGAUCHE , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 24 novembre 2005

Disponible au format Acrobat (273 Koctets)

N° 100

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 24 novembre 2005

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2006 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME III

CULTURE

Par MM. Philippe NACHBAR et Serge LAGAUCHE

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Jacques Legendre, Serge Lagauche, Jean-Léonce Dupont, Ivan Renar, Michel Thiollière, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Pierre Martin, David Assouline, Jean-Marc Todeschini, secrétaires ; M. Jean Besson, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jean-Marie Bockel, Yannick Bodin, Pierre Bordier, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Christian Demuynck, Denis Detcheverry, Mme Muguette Dini, MM. Louis Duvernois, Jean-Paul Émin, Mme Françoise Férat, MM. François Fillon, Bernard Fournier, Hubert Haenel, Jean-François Humbert, Mme Christiane Hummel, MM. Soibahaddine Ibrahim, Alain Journet, André Labarrère, Philippe Labeyrie, Pierre Laffitte, Simon Loueckhote, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Jean-Luc Mélenchon, Mme Colette Mélot, M. Jean-Luc Miraux, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jean-François Picheral, Jack Ralite, Philippe Richert, René-Pierre Signé, André Vallet, Marcel Vidal, Jean-François Voguet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 2540 , 2568 à 2573 et T.A. 500

Sénat : 98 et 99 (annexe n° 7 ) (2005-2006)

Lois de finances .

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La présentation des crédits que le ministre de la culture et de la communication consacrera en 2006 à l'action culturelle s'inscrit dorénavant dans le nouveau cadre budgétaire mis en place par la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

Même si le périmètre financier de la mission ministérielle « Culture » reprend à quelques aménagements près celui de l'ancien budget du ministère chargé de la culture, cette nouvelle présentation n'en constitue pas moins un changement total de perspective dans l'analyse des moyens que le Gouvernement consacre à la politique culturelle.

La nouvelle architecture du projet de budget qui distingue trois grands programmes, articulés chacun sur un nombre d'actions compris entre quatre et huit, et assortis chacun d'objectifs et d'indicateurs chiffrés, doit permettre au Parlement de mieux mesurer à terme les réussites et les obstacles que rencontreront les politiques menées.

Si les documents budgétaires sont riches de la promesse d'un meilleur contrôle parlementaire sur le projet de loi de finances, leur première édition témoigne encore d'un certain nombre d'approximations et de lacunes inévitables dans la mise en place d'une réforme aussi vaste. Il faut espérer que, dès le prochain budget, il y sera porté remède. Il en va de la crédibilité de la discussion budgétaire.

L'examen des trois programmes de la mission « Culture » a été partagé entre deux rapporteurs.

M. Philippe Nachbar, ancien rapporteur des crédits de la culture, s'est particulièrement attaché à l'analyse des programmes n° 175 « Patrimoines » et n° 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».

M. Serge Lagauche, ancien rapporteur des crédits du théâtre, a centré son examen sur le programme n° 131 « Création ».

Ils sont les deux co-signataires d'un rapport pour avis dont la commission des affaires culturelles a approuvé les conclusions.

I. DU BUDGET « CULTURE » À LA MISSION « CULTURE »

L'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 impose un nouveau cadre budgétaire à la discussion du projet de loi de finances pour 2006.

A. LES MOYENS FINANCIERS DE LA MISSION « CULTURE »

Le nouveau cadre rend hypothétiques cette année les comparaisons avec l'exercice précédent. Il présente cependant l'avantage de ne pas se limiter à la présentation des seules dotations budgétaires, mais d'évaluer globalement l'apport des fonds de concours et le coût des dépenses fiscales en faveur de la culture.

1. Les dotations budgétaires

Certes, les crédits correspondant à l'ancien « bleu culture » sont, pour l'essentiel repris dans le bleu de la « mission culture », à l'exception toutefois de certains crédits qui sont dorénavant rattachés à la mission « Recherche et enseignement supérieur 1 ( * ) ».

Cette refonte de la nomenclature s'accompagne cependant de nombreux réaménagements qui rendent très hypothétiques et hasardeuses les comparaisons entre les dotations de l'exercice 2005 et celles proposées pour l'exercice 2006, tant au niveau global de la mission, qu'à l'échelon des programmes et des actions qui la composent.

Ainsi, à s'en tenir à la présentation générale des crédits qui introduit le nouveau document budgétaire, les dotations de la mission culture passent, en crédits de paiement, de 2 670 millions d'euros en 2005 à 2 802,7 millions d'euros en 2006, tandis que les autorisations d'engagement atteignent 2 816 millions d'euros contre 2 687 millions d'euros en 2005.

Mais ces progressions, respectivement de 5 % et de 7,4 %, n'ont en réalité pas grand sens, dans la mesure où elles résultent en grande partie de l'introduction de charges nouvelles, et en particulier de la réintégration dans la mission culture de cotisations sociales qui étaient auparavant imputées sur le budget des charges communes.

C'est d'ailleurs ce changement de périmètre qui permet au budget de la culture d'atteindre la proportion de 1,11 % du budget de l'Etat, dépassant ainsi le seuil symbolique et un peu vain de 1 % qui lui avait été assigné dans le passé.

A s'en tenir aux évaluations réalisées par le ministère, et que les documents ne permettent pas cette année de vérifier, la progression, hors pensions, des crédits de paiement s'établirait autour de 1 %, et celle des autorisations d'engagement serait de 3,6 %.

2. L'apport des fonds de concours

Ces crédits sont complétés par des fonds de concours, à hauteur de 41,8 millions d'euros en autorisations d'engagement, et de 30,3 millions d'euros en crédit de paiement.

3. Une évaluation des dépenses fiscales

Le document budgétaire évalue également le coût des dépenses fiscales dont l'objet contribue à la mission culture. Il en recense 19 pour une dépense globale de 165 millions d'euros .

4. L'anticipation d'un apport exceptionnel

Le ministre de la culture et de la communication a annoncé qu'une centaine de millions d'euros provenant de la cession de participations financières de l'Etat viendraient abonder les ressources du ministère de la culture en 2006.

Cette dotation ne figure pas en tant que telle dans le projet de budget pour 2006 de la mission culture. Elle y apparaît cependant « en creux », dans la mesure où le bleu indique à plusieurs reprises que le niveau des dotations de plusieurs actions a été déterminé en tenant compte de l'apport de ces ressources exceptionnelles, qui doivent abonder le budget de l'Etablissement public de maîtrise d'ouvrage.

En millions d'euros

PROGRAMMES

CRÉDITS DE PAIEMENT

175 - PATRIMOINE

Action 1 : Patrimoine monumental et archéologique

28,90

Action 3 : Patrimoine des musées de France

• Dépenses de fonctionnement

10,70

• Dépenses d'investissement

22,90

Action 5 : Patrimoine écrit et documentaire

0,60

Action 6 : Patrimoine cinématographique

12,60

SOUS-TOTAL PATRIMOINE

75,70

131 - CRÉATION

Action 1 : Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant

5,10

SOUS-TOTAL CRÉATION

5,10

224 - TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE

Action 1 : Soutien aux établissements d'enseignement supérieur et insertion professionnelle

15,00

Action 4 : Actions spécifiques en faveur des publics

1

Action 7 : Fonction soutien

3,30

SOUS-TOTAL TRANSMISSION

19,30

TOTAL

100,10

Ces ressources devraient donc porter à 4,9 % la progression des crédits de paiement du ministère.

B. LES INDICATEURS DE PERFORMANCE : UNE CONSTRUCTION DÉLICATE DANS LE SECTEUR DE LA CULTURE

Votre commission se réjouit que, mise en oeuvre de la LOLF oblige, le ministère de la culture et de la communication soit amené à développer des outils de connaissance et de suivi qui faisaient jusqu'ici défaut. Elle a toutefois conscience des difficultés méthodologiques auxquelles il est confronté , dans un domaine qui se prête sans doute moins que d'autres à une approche par la performance et l'évaluation. S'il ne faut pas s'enfermer dans une approche exclusivement financière, cette nouvelle démarche doit être mise au service de la création -et de la démocratisation de cette dernière- et le ministère devra donc progresser dans cette voie.

Vos rapporteurs retracent dans l'encadré ci-dessous l'essentiel des difficultés ainsi mentionnées par le ministère.

DIFFICULTÉS MÉTHODOLOGIQUES RENCONTRÉES PAR LE MINISTÈRE
POUR CONSTRUIRE OU RENSEIGNER CERTAINS INDICATEURS DE PERFORMANCE

Des difficultés méthodologiques dans la construction ou le renseignement des indicateurs ont été relevées, qui s'expliquent d'une part, par la complexité de l'évaluation et de la mesure des politiques culturelles par essence, d'autre part, par l'absence de culture de gestion au ministère de la culture et enfin par le fait que le ministère de la culture n'est jamais un opérateur direct pour la plupart de ses actions.

Plusieurs objectifs stratégiques du ministère de la culture et de la communication portent sur des champs d'intervention difficilement mesurables . Ainsi comment mesurer la qualité de la création artistique ? Le champ culturel est un champ en perpétuelle évolution dans le domaine de la création et ce contexte s'accommode difficilement d'une logique de la mesure. Par conséquent, il a été d'autant plus complexe de définir des indicateurs de performance portant sur l'efficience et la qualité du service rendu ; le ministère de la culture devra progresser dans ce domaine sur les prochaines années.

Par ailleurs, dans la sphère culturelle, l'action de l'Etat est majoritairement indirecte , l'Etat intervenant en soutien de projets mis en oeuvre par des opérations des collectivités territoriales ou des structures subventionnées. L'absence d'études statistiques et prospectives sur l'effet de levier de l'action de l'Etat dans le champ culturel (notamment sur les questions de fréquentation des structures subventionnées) constitue un réel handicap dans la construction d'indicateurs de performance pertinents (l'identification des leviers d'action du ministère de la culture étant parfois très complexe).

La majorité des indicateurs des projets annuels de performance (PAP) de la mission culture sont nouveaux, expressément créés dans le but de répondre aux exigences de la LOLF dans une logique de mesure de résultats et de la performance. Le ministère de la culture ne dispose donc pas d'historiques chiffrés , rendant toute prévision ou fixation de cible complexe voire, dans certains cas, hasardeuse. Par ailleurs la majorité des indicateurs sont de nature déclarative (enquêtes auprès des structures...) ce qui pose des difficultés en termes de fiabilité de certaines données . Le ministère de la culture s'emploie donc à la réalisation d'outils (bases de données par exemple) qui permettront à terme le renseignement fiable et plus automatisé de ces indicateurs.

Afin de faciliter la remontée d'information, le ministère a mis en oeuvre une application OPUS (Outil de Pilotage à l'Usage des Services), déjà déployée dans les services centraux et déconcentrés et qui a vocation à couvrir l'ensemble des entités du ministère y compris les établissements publics, voire les structures subventionnées. D'ici fin 2005, pour permettre le pilotage des programmes et des actions d'un programme, OPUS accueillera l'ensemble des indicateurs des PAP, les indicateurs des Budgets opérationnels de programme (BOP) centraux et locaux, les indicateurs de suivi des politiques culturelles, les autres indicateurs permettant le pilotage par action par les directions. Chaque indicateur a fait l'objet d'une définition précise de toutes les données le composant afin de garantir des modes de collecte homogènes.

La principale difficulté de construction des indicateurs du programme « Patrimoines » réside dans l' agrégation de données disparates . En effet, il pourrait sembler souhaitable à terme de ne plus faire mention des secteurs d'activité du ministère de la culture pour des indicateurs tels que le coût moyen des m² mis aux normes de conservation, l'amélioration des procédures de protection, la mise à disposition d'outils de connaissance, l'accessibilité physique des collections au public, le taux de satisfaction des publics des institutions patrimoniales ou encore la fréquentation par le public jeune des sites patrimoniaux.

A ce jour, les modes de calcul des indicateurs par secteur rendent impossible toute tentative d'agrégation pertinente. En outre, la déclinaison dans la gestion interne nécessite une précision dans la formulation des indicateurs. Néanmoins, d'ici le projet de loi de finances pour 2007, le ministère de la culture essayera de construire, dans la mesure où cela reste pertinent pour la gestion, des indicateurs agrégés par programme.

Dans le programme « Création » , la principale difficulté méthodologique réside dans l'exercice de définition de certains concepts artistiques ou culturels . Ainsi l'indicateur sur la résidence artistique nécessite de formaliser des critères objectifs relatifs à la nature de la résidence artistique ; une circulaire sur ce sujet est en cours d'élaboration et devrait faciliter la construction de cet indicateur dans la perspective du PAP annexé au projet de lois de finances pour 2007. De même l'indicateur sur le taux de la création par rapport au nombre de fauteuils mis en vente implique une définition objective de ce qu'est une création, ce qui reste un exercice délicat et a d'ores et déjà fait l'objet de nombreuses réunions de mise eu point.

Enfin, pour le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » , une difficulté majeure réside dans la collecte des données en vue de la construction et du renseignement des indicateurs de ce programme. L'indicateur relatif au taux d'insertion en fournit un exemple éloquent. Son renseignement suppose que les structures d'enseignement sous tutelle du ministère de la culture soient en mesure de suivre leurs étudiants trois ans après l'obtention du diplôme et disposent pour ce faire d'un fichier actualisé des coordonnées de chacun d'eux. L'absence quasi systématique d'associations d'anciens élèves dans ce type de structures renforce la difficulté de suivre les diplômés après l'obtention de leur diplôme. Le taux de retour au questionnaire est souvent faible et la fiabilité d'un tel indicateur s'en ressent.

II. LE PROGRAMME « PATRIMOINES »

Le projet de budget rappelle les trois finalités principales que l'Etat se donne dans la conduite de sa politique patrimoniale : rendre accessibles au plus grand nombre les oeuvres capitales de l'humanité et de la France ; sauvegarder, protéger et mettre en valeur le patrimoine culturel, tout en protégeant la qualité architecturale et paysagère ; encourager les politiques culturelles locales.

A. LES OBJECTIFS ET LES INDICATEURS

Conformément aux recommandations formulées par la Cour des Comptes dans son rapport provisoire sur les résultats de l'exécution des lois de finances pour 2004, les objectifs du programme patrimoine ont été ramenés, dans la présentation du projet de budget pour 2006, de dix à trois :

- améliorer la connaissance et la conservation du patrimoine ;

- accroître l'accès du public au patrimoine national ;

- élargir les sources d'enrichissement des patrimoines publics.

Ces objectifs sont assortis d'un certain nombre d'indicateurs qui doivent permettre de mesurer l'efficacité avec laquelle le ministère s'acquitte de sa mission.

Les indicateurs relatifs à la conservation du patrimoine s'attachent à mesurer la rapidité de traitement des procédures de protection, le coût moyen des m 2 mis aux normes de conservation, la part respective des crédits alloués à la conservation préventive par rapport aux crédits alloués à la conservation, la qualité de la maîtrise d'ouvrage de l'Etat à travers le respect des délais et des coûts prévisionnels, et le nombre de mots nouveaux publiés au Journal officiel.

Les paramètres retenus dans la construction de ces indicateurs sont dans l'ensemble pertinents, mais votre commission souligne qu'ils relèvent tous d'une approche quantitative . Elle souhaite que la volonté dont fera preuve le ministère de mieux satisfaire les paramètres quantitatifs qu'il s'est fixés ne le conduise pas à faire passer au second plan une recherche de qualité , qui doit rester essentielle, s'agissant de la restauration de monuments par nature uniques, exceptionnels et d'une grande beauté architecturale.

Les indicateurs relatifs à l' accès du public prennent pour critères de mesure le nombre d'inventaires et de catalogues publiés, l'ouverture des salles de musées, l'accessibilité des fonds, la fréquentation payante ou gratuite des institutions culturelles, avec un indicateur particulier pour le jeune public, la fréquentation des sites Internet, et le taux de satisfaction du public encore très partiellement renseigné par des enquêtes de satisfaction ponctuelles.

Tout en saluant l'intérêt de ces paramètres de gestion, votre commission souhaite qu'ils ne dispensent pas le ministère d'une réflexion plus large sur la nature et la variété des publics touchés, une approche trop globalisante, risquant de s'avérer extrêmement réductrice.

Les indicateurs relatifs à l' enrichissement du patrimoine mesurent respectivement l'effet de levier de la participation financière de l'Etat dans la restauration des monuments historiques, et dans l'acquisition de trésors nationaux, ainsi que la part des ressources propres des institutions patrimoniales dans leur budget global. Il est significatif que les trois indicateurs de cet objectif s'expriment tous en ratios et non en valeur absolue.

B. LES MOYENS FINANCIERS

Les moyens financiers consacrés à cette politique sont regroupés dans le programme « Patrimoine » dont la responsabilité est confiée au directeur de la Direction de l'architecture et du patrimoine (DAPA). Les dotations demandées pour 2006 s'élèvent à 976 millions d'euros en crédits de paiement et à 1 082 millions d'euros en autorisations d'engagement.

Le programme patrimoine représente près de 35 % des crédits de paiement de la mission culture.

1. L'évolution des crédits de la politique du patrimoine

La comparaison des enveloppes globales consacrées à la politique du patrimoine en 2005 et en 2006 n'est, en soi, pas pertinente du fait, dans la présentation des crédits de 2006, du regroupement sur un autre programme d'une partie des dépenses de personnels mutualisées. Il faut donc insister sur le fait que la diminution apparente de 9,4 % des crédits de paiement, et de 3,5 % des autorisations d'engagement n'est pas significative.

Pour disposer d'une base de comparaison pertinente, votre rapporteur vous proposera de retrancher les dépenses de personnels inscrites au titre 2 et de ne prendre en compte que les enveloppes financières qui concourent au financement direct de la politique du patrimoine : les dépenses de fonctionnement du titre 3, les dépenses d'investissement du titre 5 et les dépenses d'intervention du titre 6.

Les crédits de paiement afférents à ces dépenses s'élèvent à 798 millions d'euros dans le projet de budget pour 2006 contre 785,8 millions d'euros en 2005, soit une augmentation de 1,5 % en volume, équivalent en valeur à une quasi-reconduction. Les autorisations d'engagement passent en revanche de 830 à 904 millions d'euros, soit une hausse de 8,9 %.

2. L'apport attendu du produit des privatisations

Ce déséquilibre entre la stabilité des crédits de paiement et l'augmentation des autorisations d'engagement doit être compensé par les ressources complémentaires attendues du produit des privatisations.

Il est en effet significatif que, plus qu'aucun autre, le financement du programme « Patrimoine » est tributaire du rattachement de cette dotation exceptionnelle, puisque, avec 75,7 millions d'euros, ce sont plus des trois quarts de ces 100 millions d'euros qui devraient lui être attribués en complément de ses crédits de paiement budgétaires proprement dits.

Si l'on prend en compte cet apport complémentaire, les moyens de paiement de la politique du patrimoine ne progressent plus de 1,5 % mais de plus de 11 %, comme le montre le tableau suivant :

ÉVOLUTION DES MOYENS FINANCIERS DU PROGRAMME « PATRIMOINES »
HORS DÉPENSES DE PERSONNEL

(En millions d'euros)

Crédits de paiement

Autorisations d'engagement

LFI
2005

PLF
2006

Evolution
en  %

LFI
2005

PLF
2006

Evolution en  %

Titre 3 - Dépenses de fonctionnement

454,6

460,8

+ 1,4

453,4

501,0

+ 10

Titre 5 - Dépenses d'investissement

143,9

141,5

- 1,6

180,7

210,9

+ 16,7

Titre 6 - Dépenses d'intervention

187,4

195,7

+ 4,4

196,1

192,1

- 2

TOTAL

785,9

798

+ 1,5

830,2

904

+ 8,9

Dotation exceptionnelle

75,7

TOTAL global

873,7

11,2

Votre rapporteur tient à rappeler ici la situation paradoxale de ces ressources exceptionnelles au regard du projet de budget pour 2006 :

- elles ne figurent pas, en tant que telles au projet de budget pour 2006, et leur réalisation comme leur affectation devront donc être confirmées par un texte financier ultérieur ;

- et cependant la construction du budget repose sur l'hypothèse de leur concrétisation.

Toute remise en cause partielle ou totale de ces ressources attendues fragiliserait donc la réalisation des objectifs de la mission culture, et plus particulièrement de son programme « Patrimoines » dans la mesure où celui-ci doit en être le principal bénéficiaire.

3. Un programme réparti en 8 actions sectorielles

Le programme « Patrimoines » s'articule en 8 actions sectorielles très inégales par leur poids financier : à elles seules les actions 3 (patrimoine des musées) et 1 (patrimoine monumental et archéologique) représentent près des deux tiers des autorisations de programme, le poids relatif des 6 autres actions s'échelonnant de 19 % pour l'action 5 (patrimoine écrit et documentaire) à 0,32 % (patrimoine linguistique) .

PRÉSENTATION PAR ACTION DES CRÉDITS DEMANDÉS POUR 2006 ET DES RESSOURCES ATTENDUES DES PRIVATISATIONS

(En millions d'euros)

Numéro et intitulé de l'action

Crédits de paiement

Produits attendus de cessions

Autorisations d'engagement

AE en  %
du total

01 Patrimoine monumental et archéologique

262,92

28,90

287,58

26,57

02 Architecture

30,55

-

30,25

2,80

03 Patrimoine des musées de France

371,07

33,60

402,92

37,23

04 Patrimoine archivistique et célébrations nationales

58,63

100,52

9,29

05 Patrimoine écrit et documentaire

198,42

0,60

208,22

19,24

06 Patrimoine cinématographique

28,01

12,60

26,06

2,41

07 Patrimoine linguistique

3,42

3,41

0,32

08 Acquisition et enrichissement des collections publiques

23,19

23,19

2,14

TOTAUX

976,20

75,70

1 082,16

100

C. UN EFFORT À CONFIRMER EN FAVEUR DU PATRIMOINE MONUMENTAL ET ARCHÉOLOGIQUE

L'état sanitaire préoccupant des monuments historiques appelle un effort soutenu auquel l'Etat doit prendre toute sa part, même si celui-ci repose également sur les propriétaires des monuments historiques, et en particulier sur les collectivités territoriales.

Le Gouvernement en a pris toute la mesure et a présenté en septembre 2003 un plan national pour le patrimoine, dont les recommandations ont inspiré de nombreuses dispositions législatives récentes.

Plus récemment, une communication en conseil des ministres du 13 septembre 2005 a tracé le bilan des premières réformes et défini un certain nombre de nouvelles orientations, au nombre desquelles figure une relance significative des travaux sur les monuments historiques, financée par un effort budgétaire auquel doit contribuer une partie des ressources dégagées par les privatisations.

Votre commission souhaite que les moyens financiers consacrés à cette politique en 2006 soient à la hauteur des engagements pris, et permettent aux chantiers de restauration et d'entretien des monuments historiques de retrouver une régularité et une visibilité qui leur a fait défaut dans la période récente.

1. Splendeurs et misères des monuments historiques

La France peut s'enorgueillir de posséder un patrimoine monumental exceptionnel, largement réparti sur l'ensemble de son territoire et qui témoigne des différentes étapes de sa longue histoire.

Ce patrimoine exceptionnel auquel nos concitoyens sont très attachés, comme en ont témoigné les douze millions de visiteurs qu'ont attirés cette année encore les Journées du patrimoine, contribue à façonner l'identité de notre pays.

Il constitue également un outil essentiel de développement économique ne serait-ce que par sa contribution à l'activité touristique de la France, qui, avec 75 millions de visiteurs annuels, est la première destination mondiale d'accueil.

Comme l'ont montré des études récentes, il fournit de l'activité à près de 600 entreprises qualifiées en restauration et produit un important effet de levier sur l'emploi, puisque, par delà les 10 000 emplois directs du secteur de la restauration, et les près de 44 000 emplois liés à son exploitation, la filière patrimoine s'élèverait à 346 000 emplois, soit 1,5 % de la population active occupée 2 ( * ) .

Mais ce patrimoine d'une extrême diversité est souvent dans un état sanitaire extrêmement préoccupant comme l'ont souligné de nombreux rapports, et notamment celui de la commission « patrimoine et décentralisation » présidée par M. Jean-Pierre Bady. Un document récent, élaboré en janvier 2003 par la Direction de l'architecture et du patrimoine estimait que sur les 15 000 monuments classés, 2 800, soit environ 20 %, seraient en péril. Les édifices en grande difficulté appartiennent pour leur majorité à des communes de moins de 2 000 habitants qui, à de rares exceptions près, ne disposent pas de ressources suffisantes pour financer, sans l'aide de l'Etat ou d'autres collectivités publiques, les investissements nécessaires. S'agissant des monuments appartenant à l'Etat, qui ne représentaient que 9 % du parc classé, moins de 10 % d'entre eux seraient en difficulté.

2. Une réforme largement engagée de l'encadrement législatif

Dans le prolongement des réflexions de la commission Bady et du plan pour le patrimoine de septembre 2003, le Gouvernement a engagé une réforme importante du cadre législatif et réglementaire de la politique du patrimoine.

Cette réforme a été marquée par la double volonté de mieux associer les collectivités territoriales à la conduite de la politique du patrimoine, et de moderniser le régime juridique des monuments historiques.

• Les mesures de décentralisation

La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales a prévu quatre mesures importantes en matière de patrimoine, qui vont prendre leur pleine portée dans les mois qui viennent grâce à la publication d'une série de décrets d'application en date du 20 juillet 2005 :

- elle a confié aux régions la responsabilité de l'inventaire général du patrimoine culturel : la mise à disposition des services des directions régionales des affaires culturelles qui exercent ces missions est en bonne voie ; six conventions sont signées avec les régions Alsace, Centre, Ile-de-France, Limousin, Lorraine et Haute-Normandie, et les transferts des services devraient être agréés conformément au calendrier prévu par la loi ;

- elle a offert aux collectivités territoriales la possibilité d'obtenir le transfert de la propriété de plus de 150 monuments historiques appartenant à l'Etat, monuments dont la liste a été publiée par le décret n° 205-836 du 20 juillet 2005 ; les collectivités intéressées disposent désormais d'un délai de 12 mois pour déposer leur candidature ;

- elle a offert aux régions, ou aux départements, la possibilité de se porter candidats pour gérer à titre expérimental, les crédits de restauration et d'entretien des monuments historiques ; les régions disposent ainsi d'un délai de six mois, depuis la publication du décret d'application n° 205-837 du 20 juillet 2005, pour déposer leur candidature ; à défaut, les départements pourront, dans les six mois suivants, se porter à leur tour candidats ; la région Alsace et le département d'Eure-et-Loir ont déjà exprimé leur intérêt ;

- elle a transféré aux départements les crédits que l'Etat consacrait au patrimoine rural non protégé ; ce transfert a été effectué par le projet de loi de finances pour 2005, à hauteur de 5,42 millions d'euros.

• La modernisation du régime des monuments historiques et des espaces protégés

La loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit a amorcé un important effort de modernisation du régime juridique des monuments historiques :

- elle a procédé à la ratification de la partie législative du code du patrimoine , publiée le 24 février 2004, qui permettra d'avoir une vue globale de l'ensemble des dispositions législatives concourant à la protection du patrimoine culturel, et notamment aux monuments historiques, sites et espaces protégés ;

- elle a autorisé le Gouvernement a prendre par ordonnances toute une série de dispositions relatives aux monuments historiques et aux espaces protégés ; ces deux textes - l'ordonnance n° 2005-864 du 28 juillet 2005 relative aux secteurs sauvegardés, et l'ordonnance n° 2005-1128 du 8 septembre 2005 relative aux monuments historiques et aux espaces protégés - devraient être prochainement soumis au Parlement pour ratification.

3. La nécessité d'un effort budgétaire durable

Le plan national pour le patrimoine de septembre 2003 comportait, en outre, l'engagement d'un effort budgétaire en faveur du patrimoine historique.

• Le retour à la vérité des comptes opéré en 2003

La réalisation de cet effort financier s'est trouvé contrariée par la nécessité de réduire l'écart qui s'était créé, au cours des années précédentes, entre le niveau des dépenses effectivement engagées, et celui des crédits ouverts au sein d'un même exercice.

Cette politique de vérité des comptes était particulièrement indispensable dans la perspective de la prochaine entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances - LOLF - qui encadre très strictement les possibilités de reports des crédits d'une année sur l'autre et le limite à 3 %.

Elle s'est traduite, dès 2004 par le retour à un taux de consommation des crédits très satisfaisant - plus de 90 % - et par une résorption des reports excédentaires.

• Un exercice 2004 très contraint

Mais faute de pouvoir continuer à puiser, comme les années précédentes dans ces réserves confortables, le ministère de la culture s'est retrouvé dans une situation délicate pour honorer ses engagements.

Il n'a pu solder la quasi-totalité de ses engagements que grâce à des redéploiements opérés en cours d'année à hauteur de 22 millions d'euros, et grâce à l'ouverture de crédits supplémentaires votés en loi de finances rectificative. Si la continuité des chantiers en cours a pu être globalement assurée, il n'en demeure pas moins que la mise en oeuvre de la programmation de l'exercice 2004 a été fortement perturbée et que cette insuffisance des crédits de paiement a fortement entravé l'engagement de nouvelles opérations, malgré la disponibilité des autorisations de programme.

• Les difficultés rencontrées en 2005

Ces difficultés se sont aggravées au cours de l'exercice 2005, malgré une augmentation des crédits d'investissement, portés à 220,5 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2005. Ces dotations ont été complétées par 59 millions d'euros issus en partie de la loi de finances rectificative pour 2004, et du rattachement de 26 millions des fonds de concours, portant l'ensemble des crédits ouverts en 2005 à 305 millions d'euros.

Le ministère indique cependant que ces crédits de paiement n'ont permis de couvrir qu'environ 55 % des besoins des directions régionales des affaires culturelles (DRAC) .

Il estime à 80 le nombre des chantiers qui ont dû être interrompus du fait de l'insuffisance de ces crédits . 17 de ces chantiers concernent des monuments appartenant à l'Etat comme les cathédrales d'Agen, de Bayonne, de Nevers, de Quimper, d'Auch, de Perpignan, de Rouen, de Saint-Claude, de Langres, de Lyon et de Saint-Dié, ou comme les châteaux d'Oiron, de Chaumont-sur-Loire, ou encore comme le monastère de la Grande Chartreuse ou la Villa Cavrois.

Parmi les chantiers sur des monuments n'appartenant pas à l'Etat, ont également dû être interrompus ceux qui concernent l'ancienne cathédrale de Toul, l'ancien prieuré de la Charité-sur-Loire, l'église de Saint-Amand-en-Puisaye, l'abbatiale de Pontigny, l'église Saint-Savinien de Sens, l'église de Tannay, l'église de Perros-Guirec, le château de Tonquedec, la citadelle de Besançon, l'église Saint-Just à Arbois, l'église Saint-Pierre à Luxeuil, l'église Saint-Etienne à Lille, le beffroi de l'hôtel de ville de Douai, l'église Saint-Pierre à Aires-sur-la-Lys, l'église Saint-Eloi de Dunkerque, l'abbatiale Saint-Ouen et l'église Saint-Maclou à Rouen, l'abbatiale de Fécamp, l'église Notre-Dame de Louviers, les thermes de Sanxay, le château de Montmoreau, l'église de Parthenay, l'église de Thouars, l'église de Clermont ou l'abbatiale d'Abondance.

Au-delà de ces interruptions de chantiers, les lancements d'opérations nouvelles ont été très affectés par cette situation de pénurie : le ministère évaluait en juillet à plus de 170 le nombre de chantiers importants qui ont dû être différés faute de crédits de paiement suffisants, et ce, alors même que les autorisations de programme avaient été affectées, et, dans certains cas, les marchés attribués.

Nombre d'entreprises spécialisées se sont trouvé fragilisées, ce qui est d'autant plus grave qu'elles ont un personnel hautement qualifié et qu'elles ne peuvent pas compenser la perte des chantiers sur des monuments historiques par des chantiers classiques.

Cette situation a amené le ministre à décider des mesures de redéploiement à hauteur de 10 millions d'euros en fin d'année, de façon à alléger le poids des impayés et à relancer les chantiers les plus urgents.

Ces mesures devraient permettre de limiter à 38 millions d'euros les reports de charges en fin d'exercice 2005.

• Le projet de budget pour 2006 : une reprise subordonnée au rattachement du produit des privatisations

Les moyens financiers consacrés par le projet de budget pour 2006 à l'action « Patrimoine monumental et archéologique » s'élèvent à 287,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 262,9 millions d'euros en crédits de paiement. Ces derniers atteignent 415,8 millions d'euros si l'on y réintègre les crédits de personnels regroupés dans le troisième programme en vue de la mutualisation de leur gestion.

Comme il l'a fait précédemment pour les dotations de programme patrimoine, votre rapporteur vous proposera, pour disposer d'une base de comparaison pertinente des moyens financiers consacrés à l'action « patrimoine archéologique et monumental », de retrancher les crédits du titre 2 affectés par des changements de périmètre, et de se concentrer sur les dépenses de fonctionnement, d'investissement et d'intervention.

Les crédits de paiement afférents à ces dépenses s'élèvent à 245 millions d'euros dans le projet de budget pour 2006, contre plus de 241 millions d'euros en 2005, soit une progression de 1,4 % et les autorisations d'engagement sont ramenées de 273 millions d'euros à 270 millions d'euros , soit une contraction de 1 % .

La quasi-reconduction des crédits de paiement consacrés à cette action devrait, avec l'apport complémentaire de près de 29 millions d'euros attendus des privatisations , se transformer en une hausse de 13,4 % des moyens de paiement.

ÉVOLUTION DES MOYENS FINANCIERS DE LA POLITIQUE DU PATRIMOINE MONUMENTAL, HORS DÉPENSES DE PERSONNEL

(En millions d'euros)

Crédits de paiement

Autorisations d'engagement

LFI
2005

PLF
2006

Evolution
en  %

LFI
2005

PLF
2006

Evolution en  %

Titre 3 - Dépenses de fonctionnement

27,8

29,6

+ 6,1

27,9

29,6

+ 6,1

Titre 5 - Dépenses d'investissement

88,4

88,0

- 0,4

115,9

113,4

- 2,15

Titre 6 - Dépenses d'intervention

125,4

127,6

+ 1,75

129

126,9

- 1,6

TOTAL

241,6

245,2

+ 1,4

272,8

269,9

- 1

Dotation exceptionnelle

28,9

TOTAL GLOBAL

274,0

+ 13,4

Une appréciation juste des moyens dont disposera le ministère pour lancer de nouvelles opérations suppose toutefois de prendre en compte l'impasse de paiement en fin de gestion 2005, aggravée par un gel de 23,67 millions d'euros et que le ministère évalue à 38 millions d'euros .

Dans ces conditions, et même si, comme il le souhaite, le produit des privatisations vient compléter le montant des crédits budgétaires, les conditions dans lesquelles sera réalisé l'exercice 2006 risquent d'être tout juste satisfaisantes.

Le ministère note qu'en 2003 et 2004, les aléas de gestion liés au contexte budgétaire ont contraint le ministère à privilégier les travaux de restauration pour faire face aux situations prioritaires. Ainsi, alors que les crédits consacrés à la restauration passaient de 230 millions d'euros en exécution 2003 à 274 millions d'euros en 2005, les crédits consacrés à la conservation préventive ne progressaient que de 27,3 à 31 millions d'euros. Le ministère souhaite à l'avenir mieux définir la ligne de partage entre dépenses de restauration et dépenses strictement « préventives » au bénéfice de ces dernières. Il se fixe pour objectif, avec l'indicateur n° 3 de faire passer la proportion de celles-ci de 11,3 % en 2004 et 2005 à 12 % en 2006 et 13,5 % en 2007. Votre rapporteur ne peut que souhaiter la réalisation de cet objectif qui témoignerait de l'amélioration de la visibilité en matière de programmation des travaux.

4. Les opérations envisagées pour 2006

• Les monuments appartenant à l'Etat

La poursuite de la restauration des 86 cathédrales de France demeure une des grandes priorités du ministère.

Celui-ci envisage pour l'année prochaine l'achèvement de la restauration de l'élévation nord de la cathédrale de Strasbourg , et la poursuite des travaux portant sur sa flèche. Il devrait également lancer la première tranche de la restauration du portail nord de la cathédrale de Reims , et poursuivre la consolidation de la cathédrale de Beauvais . Parmi les autres chantiers projetés figurent : la restauration de la face nord et de la tour nord-ouest de la cathédrale Notre-Dame de Paris , la troisième et dernière tranche de la restauration du choeur et des terrasses de la cathédrale de Limoges et la poursuite des programmes généraux de restauration des cathédrales d'Amiens et de Marseille.

Parmi les autres programmes envisagés figurent la restauration du clos et du couvent de la villa Cavrois , oeuvre de Mallet-Stevens, à Croix dans le Nord, acquise par l'Etat en 2001 ; l'achèvement de la restauration des casemates entourant le donjon de Vincennes , la poursuite de la restauration générale du domaine de Versailles et de celle des remparts du Mont-Saint-Michel , accompagnant le grand projet de rétablissement du caractère maritime de la baie. Des travaux sont également envisagés sur le Panthéon à Paris.

• Les monuments n'appartenant pas à l'Etat

Les crédits destinés à la restauration des monuments historiques n'appartenant pas à l'Etat continueront en 2006 à être consacrés en priorité au traitement des urgences sanitaires, et à la poursuite des opérations déjà engagées, au nombre desquelles figurent la reconstruction du rempart effondré du château de Saumur , la restauration du grand théâtre de Bordeaux , ou celle du château de Lunéville ou encore les opérations réalisées sur le théâtre du Puy-en-Velay , l'ancien collège des Bernardins à Paris, le parc de Méréville , la tour abbatiale de Saint-Amand-les-Eaux dans le Nord-Pas-de-Calais, la flèche de l'église Saint-Maclou à Rouen , l'église Saint-Jacques de Dieppe , le château neuf de Laval , le château des Ducs à Nantes , le château de Dampierre-sur-Boutonne , l'enceinte castrale du château de Falaise , l'ancienne cathédrale de Laon , le Palais des Papes d' Avignon , ainsi que le programme relatif au patrimoine de la ville de Nancy , et le plan pour le patrimoine antique de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur avec notamment la restauration de l' amphithéâtre d'Arles .

Un effort exceptionnel sera en outre consacré à deux opérations d'envergure, débutées en 2005, et qui intéressent le patrimoine de la ville de Paris : la restauration de la tour nord de l'église Saint-Sulpice et celle de la Tour Saint-Jacques .

D. PATRIMOINE DES MUSÉES DE FRANCE

Les dotations financières consacrées à l'action n° 3 « Patrimoine des musées de France » s'élèvent à 371 millions d'euros en crédits de paiement et 403 millions d'euros en autorisations d'engagement dans le projet de budget pour 2006.

Cette action constitue le premier poste de dépenses du programme « Patrimoine » dont elle représente plus de 37 % des autorisations d'engagement globales.

Comte tenu des transferts de charges opérés sur le programme 224 en vue d'une mutualisation de la gestion de certains crédits de personnels, votre rapporteur vous proposera de cerner l'évolution des crédits consacrés au patrimoine des musées en se concentrant sur les seules dépenses de fonctionnement, d'investissement, et d'intervention des titres 3, 5 et 6.

ÉVOLUTION DES MOYENS FINANCIERS DE LA POLITIQUE EN FAVEUR DU PATRIMOINE DES MUSÉES, HORS DÉPENSES DE PERSONNEL

(en millions d'euros)

Crédits de paiement

Autorisations d'engagement

LFI
2005

PLF
2006

Evolution
en  %

LFI
2005

PLF
2006

Evolution en  %

Titre 3 - Dépenses de fonctionnement

282,9

283,1

0,07

281,9

316,7

12,3

Titre 5 - Dépenses d'investissement

3,0

5,9

97

7,3

7,3

0

Titre 6 - Dépenses d'intervention

21,2

27,8

31

24,8

24,6

- 0,8

TOTAL hors titre 2

307,1

316,8

3,1

314

348,6

11

Dotation en capital

33,6

Ø Dont dépenses de fonctionnement

10,7

Ø Dont Dépenses d'investissement

22,9

TOTAL global

350,4

+ 14

Comme le montre le tableau ci-dessus, les autorisations d'engagement consacrées au patrimoine des musées croissent à un rythme de 11 %, plus important que celui des crédits de paiement, limité à 3,1 %.

Cet écart doit cependant être compensé par le versement d'une partie du produit des privatisations, qui devrait abonder à hauteur de 33,6 millions d'euros les moyens financiers consacrés à cette action. Ces ressources exceptionnelles qu'il est prévu d'apporter à l'établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels (EMOC) doivent venir compléter les crédits de fonctionnement, à hauteur de 10,7 millions d'euros et les crédits d'investissement à hauteur de 22,9 millions d'euros.

1. L'analyse des dépenses

• Le poids prépondérant des dépenses de fonctionnement

Les crédits de fonctionnement s'élèvent dans le projet de budget à 316,8 millions d'euros pour 2006 et représentent plus de 89 % de l'ensemble des crédits consacrés au patrimoine des musées. Ils sont reconduits, en volume, au même niveau qu'en 2005.

Ils sont constitués de deux mesures d'importance très inégale :

- 14,2 millions d'euros , soit 5 % de cette enveloppe sont consacrés au fonctionnement des services à compétence nationale ;

- 268,9 millions d'euros , soit 95 % de ces crédits sont attribués aux établissements publics , sous forme de subventions de service public.

* La dotation de fonctionnement des services à compétence nationale (SCN) reste inchangée par rapport à 2005, le transfert de gestion des Galeries nationales du Grand Palais à la Réunion des musées nationaux étant compensé par la réouverture du musée de l'Orangerie.

Les 22 musées nationaux ayant le statut de service à compétence nationale ne disposent pas à proprement parler de ressources propres, car c'est la Réunion des musées nationaux (RMN) qui encaisse le produit des activités commerciales, celui des droits d'entrée et des visites accompagnées, et les recettes diverses. C'est également la RMN qui est chargée en contrepartie de contribuer à l'enrichissement de leurs collections et de promouvoir leur fréquentation et la vente de leurs produits dérivés.

Le 1 er janvier 2004, quatre musées ont changé de statut pour rejoindre les rangs des établissements publics : le musée d'Orsay, le musée Henner qui lui est adjoint, le musée Guimet, et le musée Delacroix, dorénavant rattaché au musée du Louvre.

* Les subventions pour charge de services publics attribuées aux musées ayant le statut d'établissement public d'un montant de 269 millions d'euros devraient être complétées en cours d'exercice par le rattachement de 10,7 millions d'euros tirés du produit des privatisations.

(En millions d'euros)

AE

CP

Musée du Louvre

126,7

111,9

Centre Pompidou

82,0

79,9

Musée du quai Branly

26,1

27,6

Musée et domaine national de Versailles

18,0

0,0

Réunion des musées nationaux

16,3

16,3

Musée d'Orsay

13,2

12,7

Union centrale des arts décoratifs

12,8

12,8

Autres opérateurs (Institut national d'histoire de l'art INHA, musées Guimet, Henner et Moreau, ...)

7,3

7,7

Total des subventions pour charge de service public

302,4

268,9

Les mesures nouvelles envisagées pour 2006 devraient bénéficier à quelques établissements et notamment :

- au musée du Louvre, à hauteur de 2,4 millions d'euros , pour la montée en charge du département des « Arts de l'Islam » ;

- au musée du Quai Branly , à hauteur de 13,15 millions d'euros pour accompagner son ouverture ;

- au musée des arts décoratifs , à hauteur de 2 millions d'euros dans la perspective de sa réouverture en 2006.

• La forte progression des dépenses d'investissement

D'un montant de 5,86 millions d'euros en 2006, les crédits d'investissement ne représentent qu'à peine 2 % des dotations consacrées aux musées, hors dépenses de personnel.

Ces enveloppes connaissent cependant une forte progression par rapport à 2005, où elles ne s'élevaient qu'à 3 millions d'euros, progression d'autant plus forte qu'elles devraient être complétées par le renfort, à hauteur de 22,9 millions d'euros, d'une partie du produit des privatisations.

Le projet de budget précise que ces crédits sont « notamment destinés à la restauration des collections et aux travaux des musées nationaux », mais ne nous fournit pas davantage de précisions, ce que l'on peut regretter, en souhaitant que cette lacune soit à l'avenir comblée.

• Les dépenses d'intervention : des transferts qui intéressent l'ensemble du territoire

Les crédits consacrés aux dépenses d'intervention s'élèvent à près de 28 millions d'euros dans le projet de budget pour 2006, en hausse de 31 % par rapport à 2005.

Votre rapporteur s'en réjouit, car ces crédits qui ne représentent qu'un peu plus de 11 % des moyens consacrés au patrimoine des musées, hors dépenses de personnel, ont vocation à irriguer l'ensemble du territoire , contrairement aux subventions versées aux grands établissements publics, qui, pour l'essentiel, sont concentrées sur Paris et la région parisienne.

Ces crédits se répartissent entre :

- 17 millions d'euros de crédits de paiement transférés aux collectivités territoriales, notamment pour la rénovation et l'extension du musée de Blérancourt, les travaux de conservation des musées de Pau et de Limoges, et le lancement des schémas directeur des châteaux de Compiègne et de Fontainebleau ;

- 10,7 millions d'euros principalement transférés aux directions régionales des affaires culturelles pour leur politique des musées (7,3 millions d'euros), mais aussi au musée d'art et d'histoire du judaïsme (2 millions d'euros) ainsi qu'à 38 associations (1,5 million d'euros).

2. L'actualité des grands projets en 2006

• L'ouverture du musée du Quai Branly

Le musée du Quai Branly, dont la création avait été annoncée en conseil des ministres le 29 juillet 1998, ouvrira ses portes en 2006. Placé sous la double tutelle du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, d'une part, et du ministère de la culture et de la communication, de l'autre, ce musée, doit, conformément à la volonté exprimée par le Président de la République, « donner aux arts d'Afrique, des Amériques, d'Océanie et d'Asie leur juste place dans les institutions muséologiques de la France ».

Le nouveau musée, implanté sur un des derniers terrains disponibles au coeur de Paris, au pied de la tour Eiffel, regroupera les collections du musée national des arts d'Afrique et d'Océanie, et celui du laboratoire d'ethnologie du musée de l'Homme.

La maîtrise d'oeuvre du projet a été confiée à l'établissement public du musée du Quai Branly créé par un décret du 23 décembre 1998, auquel a depuis succédé un nouveau décret statutaire en date du 9 décembre 2004, dans la perspective de la prochaine ouverture du musée.

Le montant global du projet , d'abord fixé en 1998 à 167,7 millions d'euros a dû être actualisé à deux reprises en 2001 et en 2004 pour s'établir à 232,5 millions d'euros , dont la moitié, soit 116,24 millions d'euros est à la charge du ministère de la culture.

Le budget de la mission culture pour 2006 prévoit l'ouverture de 27,6 millions d'euros en crédits de paiement, et de 26,1 millions d'euros en autorisations d'engagement au titre des subventions versées à l'établissement public.

Le montant de la subvention de fonctionnement inscrite au budget de la culture passera de 13 millions d'euros en 2005 à 26 millions d'euros en 2006, soit un doublement.

En revanche, du fait de l'achèvement des travaux, le montant de la subvention d'investissement sera ramené en revanche de 21,62 millions d'euros en 2005 à 1,43 million d'euros en 2006 en crédits de paiement, alors que, en autorisations d'engagement, le montant de la dotation, de 8 millions d'euros en 2005, sera nul en 2006.

Le musée ouvrira ses portes à l'automne 2006 avec une première exposition temporaire intitulée « D'un regard l'autre » , présentée sur l'ensemble de la surface, petite et grande salle. A cette exposition, qui constitue en quelque sorte l'exposition manifeste du musée, s'ajouteront une exposition thématique intitulée « Qu'est-ce qu'un corps ? » et deux expositions dossiers consacrées respectivement à Georges Condominas et aux cimiers africains. 5,65 millions d'euros seront consacrés en 2006 à ces productions. Un certain nombre de concerts et de manifestations seront également programmés dans l'auditorium.

• Le déploiement des Arts de l'Islam au musée du Louvre

Le projet de création d'un département des Arts de l'Islam au musée du Louvre a été annoncé en 2003 et entériné par un décret en date du 1 er août 2003. Son ouverture est prévue pour le mois de janvier 2009. Il aura vocation, comme le souhaitait le président de la République, à « conforter la vocation universelle de cette prestigieuse institution » et à « rappeler aux Français et au monde l'apport essentiel des civilisations de l'Islam à notre culture ».

Le musée du Louvre possède actuellement l'une des collections les plus riches et les plus belles du monde dans le domaine des Arts de l'Islam. Mais cette collection est actuellement très à l'étroit et les 1 100 m² qui lui sont consacrés ne permettent de présenter qu'approximativement 1 300 oeuvres alors que la collection est riche de 10 000 objets. Complétée par le dépôt d'environ 3 000 pièces appartenant au musée des Arts décoratifs, cette collection sera installée dans la cour Visconti située au coeur de l'aile Sud du Palais, qui permettra de multiplier par trois les espaces consacrés aux Arts de l'Islam, puisqu'il est prévu d'aménager 3 500 m².

Le projet de budget évalue le coût global des travaux à 50 millions d'euros auxquels s'ajoutent 6 millions d'euros pour la restauration des façades. Son coût doit être financé, à hauteur de 30 millions d'euros par le musée du Louvre, grâce au mécénat, et à hauteur de 26 millions d'euros par le budget de l'Etat, au titre de la mission culture.

Le projet de budget prévoit l'ouverture en 2006 de 21,1 millions d'euros d'autorisations d'engagement, et de 5,7 millions d'euros de crédits de paiement.

• La rénovation du Grand Palais

Les travaux de réparation de la toiture et le changement de la totalité de la verrière commencés au début de l'année 2003, ont pu être achevés en temps utile pour permettre l'ouverture ponctuelle au public du Grand Palais, à l'occasion des Journées du Patrimoine, avec un succès remarquable.

L'enveloppe totale prévue pour l'ensemble des opérations de consolidation des fondations, de restauration des charpentes et des couvertures avait été évaluée en 2002 à 125 millions d'euros, mais les économies réalisées sur les travaux permettent d'envisager la réduction de cette enveloppe à 101,36 millions d'euros, ce qui constitue un fait suffisamment rare pour être salué. L'enveloppe complémentaire consacrée aux travaux nécessaires à la réouverture ponctuelle de la grande nef, d'un montant de 4,7 millions d'euros, porte le coût total du projet à 106 millions d'euros .

Le montant des autorisations d'engagement restant à financer est actuellement évalué à 17,2 millions d'euros. Le projet de loi de finances pour 2006 prévoit une dotation de 7,8 millions d'euros, et le solde devrait être réparti à hauteur respectivement de 8 et 1,4 million d'euros entre les exercices 2007 et 2008.

• Les actions en faveur des musées territoriaux

Les collectivités territoriales assurent le fonctionnement courant des musées dont elles ont la charge, mais l'Etat participe ponctuellement, à certaines actions de soutien, au moyen de crédits déconcentrés.

Les crédits consacrés à l'enrichissement des collections des musées de France proviennent, soit des fonds régionaux d'acquisition des musées (FRAM), soit des crédits du fonds du patrimoine. En 2006, les crédits destinés aux FRAM seront reconduits à hauteur de 1,6 million d'euros et le Fonds du patrimoine sera doté de 5 millions d'euros.

Ces musées bénéficieront en outre d'une politique de dépôt d'oeuvres appartenant aux musées nationaux, qui peut prendre diverses formes :

- l'ouverture d'antennes des musées nationaux en région est la forme la plus ambitieuse ; l'ouverture, en 2009, du musée du Louvre à Lens fournit une illustration de cette politique de décentralisation culturelle ; elle permettra de présenter sur une surface de 5 000 m² des oeuvres importantes du musée du Louvre, dans le cadre d'expositions semi-permanentes ou temporaires ; d'autres projets sont en cours d'étude pour la réalisation d'antennes en région du musée national d'art moderne ;

- l'organisation de manifestations plus courtes se poursuit ; après le musée du Louvre qui a entrepris depuis 2001 l'opération « 22 chefs-d'oeuvre du Louvre dans 22 régions », le musée d'Orsay va entreprendre à son tour des opérations de mise en dépôt en liaison avec les grands musées territoriaux.

- des dépôts à moyen terme d'une durée de 5 ans renouvelable, sont destinés à compléter les collections existantes.

E. LES AUTRES ACTIONS DU PROGRAMME « PATRIMOINES »

1. Action n° 5 : « Patrimoine écrit et documentaire » : le poids de la Bibliothèque nationale de France

L'action n° 5 « Patrimoine écrit et documentaire » représente la troisième action du programme « Patrimoine » en termes de poids financier relatif. Ses crédits de paiement pour 2006 dépassent les 198 millions d'euros , et, avec 208 millions d'euros d'autorisations d'engagement , elle représente plus de 19 % de l'ensemble des autorisations d'engagement du programme.

L'évolution des dotations entre 2005 et 2006 hors dépenses de personnel est retracée dans le tableau ci-après.

TITRES - INTITULÉS

CRÉDITS DE PAIEMENT

AUTORISATIONS D'ENGAGEMENT

LFI 2005

PLF 2006

Evolutions en  %

LFI 2005

PLF 2006

Evolutions en  %

Titre 3 - Dépenses de fonctionnement

113,5

115,2

+ 1,5

113,4

121,7

+ 7,2

Titre 5 - Dépenses d'investissement

0,2

0,0

-

0,2

3,3

1 550,0

Titre 6 - Dépenses d'intervention

2,4

2,7

12,5

2,4

2,7

12,5

TOTAL

116,0

117,9

+ 1,5

116,0

127,7

10,0

Dotation exceptionnelle

-

0,6

-

-

-

-

TOTAL GLOBAL

-

118,4

+ 2,0

-

-

-

• Le poids prépondérant des dépenses de fonctionnement

Avec 115 millions d'euros de crédits de paiement et 122 millions d'euros d'autorisations d'engagement en 2006, les dépenses de fonctionnement représentent plus de 95 % des dotations de l'action, hors dépenses de personnel.

Ces crédits sont intégralement et exclusivement consacrés au financement de la subvention pour charge de service public versée à la Bibliothèque nationale de France , dont ils représentent plus de 87 % des recettes totales. Les ressources propres, d'un montant de 14,6 millions d'euros, correspondent aux recettes de ventes et de prestations de services, ainsi qu'à des produits exceptionnels.

Votre commission souhaite que le montant de la subvention versée par l'Etat à la BnF prenne en compte le niveau réel des ressources propres de l'établissement, qui se révèle, en pratique, inférieur à des estimations initiales trop optimistes, de façon à garantir à ce grand établissement la stabilité de moyens dont il a besoin.

• Les dépenses d'investissement : une enveloppe gagée sur le produit des privatisations

Les dépenses d'investissement sont intégralement destinées au chantier Richelieu de la Bibliothèque nationale de France.

Elles s'élèvent en 2006 à 3,3 millions d'euros en autorisations d'engagement , et sont nulles en crédits de paiement , le ministère semblant compter exclusivement sur les 600 000 euros attendus des privatisations pour financer les opérations envisagées l'année prochaine.

• Les dépenses d'intervention

Les crédits d'intervention en faveur de la politique de la conservation du livre s'élèvent à 2,7 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisations d'engagement, soit un peu plus de 2 % des dotations consacrées au patrimoine écrit hors titre 2.

2. Action n° 4 : « Patrimoine archivistique et célébrations nationales »

Les crédits consacrés à cette action représentent en 2006 58,6 millions d'euros en crédits de paiement, et 100,5 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit 9,3 % de l'enveloppe globale du programme « Patrimoine ».

La construction d'un nouveau centre des archives nationales pour accueillir les archives centrales de l'Etat postérieures à 1790, dont les travaux s'échelonneront entre 2007 et 2010 pour un coût total de 119 millions d'euros. La majeure partie de cette dépense - 83,3 millions d'euros à la charge du ministère de la culture - sera à la charge des archives nationales et nécessite en 2006 l'ouverture de 57 millions d'euros d'autorisations d'engagement et d'une première enveloppe de 13 millions de crédits de paiement.

3. Action n° 2 : « Architecture »

Les dotations consacrées à l'action « architecture » s'élèvent en 2006 à une trentaine de millions d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement.

Près de la moitié de cette dotation est consacrée au financement de la subvention versée à la Cité de l'architecture et du patrimoine , d'un montant d'un peu plus de 14 millions d'euros .

Les subventions versées aux associations et aux opérateurs de l'Etat qui agissent en faveur de la promotion du patrimoine architectural représentent, avec un peu plus de 10 millions d'euros, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement un autre poste de dépense significatif.

Par comparaison, les crédits d'investissement et les crédits d'intervention consacrés aux secteurs sauvegardés paraissent bien modestes : 3,4 millions d'euros de crédits de paiement pour les investissements en régions, 0,8 million d'euros de crédits de paiement pour subventionner les travaux opérés par les propriétaires privés pour des travaux opérés dans ces secteurs, 1,3 million d'euros pour les subventions accordées aux collectivités territoriales pour les travaux en abords des monuments historiques.

Comme en témoigne la modicité de ces sommes, la politique en faveur des secteurs sauvegardés repose davantage sur des mécanismes d'incitation fiscale liés à la loi dite « Malraux » , que sur les subventions publiques. Aussi, votre rapporteur invite-t-il l'Etat à bien peser les conséquences qu'auraient pour les secteurs sauvegardés un plafonnement des avantages fiscaux dont ils ont jusqu'à présent bénéficié .

4. Action n° 8 : « Acquisition et enrichissement des collections publiques »

Les dotations consacrées à cette action s'élèvent à 23 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisations d'engagement dans le projet de budget pour 2006, en réduction de près de 26 % par rapport à leur montant de 31 millions d'euros atteints en 2005.

Cette baisse est imputable aux crédits d'investissement , qui sont ramenés de 22,6 millions d'euros en 2005 à 14,5 millions d'euros dans le projet de budget pour 2006.

Les crédits d'intervention sont en revanche reconduits au même niveau qu'en 2005 soit : 8,5 millions d'euros.

Ces crédits ont vocation à permettre à l'Etat de poursuivre un programme d'acquisition de trésors nationaux dans le domaine des musées mais aussi dans celui de l'architecture, des archives, du livre et du cinéma.

Il est à noter que depuis le 1 er janvier 2004, le financement des acquisitions d'oeuvres d'art pour les musées nationaux a été profondément modifié par suite de l'autonomie accrue des quatre grands musées nationaux érigés en établissements publics : le Louvre, le musée d'Orsay, le musée Guimet, et Versailles disposent dorénavant de leurs propres commissions locales d'acquisitions et de ressources propres. Pour les musées du Louvre et d'Orsay, celles-ci correspondent à 20 % du produit annuel des droits d'entrée perçus pour la visite de leurs collections permanentes. Le musée du Quai Branly, le musée Rodin et celui de la musique fonctionnent également de façon autonome.

En 2004, les musées nationaux ayant le statut d' établissement public ont ainsi dépensé 10,7 millions d'euros sur leurs ressources propres en vue d'acquisitions.

Les autres musées nationaux, ayant le statut de « services à compétence nationale SCN », ont bénéficié en revanche en 2004, d'une subvention annuelle de 2,4 millions d'euros , qui a été intégralement consommée.

A ces ressources se sont ajoutées en 2004, les subventions du fonds du patrimoine qui ont bénéficié :

- à hauteur de 2,8 millions d'euros aux établissements publics du Louvre et de Versailles ;

- à hauteur de 3,5 millions d'euros à divers musées ayant le statut de SCN.

Enfin, les crédits provenant du mécénat ont bénéficié aux musées établissements publics pour 1,9 million d'euros, et aux SCN pour 0,07 million d'euros. Les dons et legs ont également davantage bénéficié aux établissements publics (3,6 millions d'euros) qu'aux SCN (0,05 million d'euros).

L'accroissement le plus significatif des financements au profit des établissements publics est à attribuer au nouveau mécanisme introduit par la loi n° 2002-5 du 4 janvier 2002 à l'article 238 bis OA du code général des impôts : le mécénat culturel d'entreprise représente en 2004 21,24 millions d'euros .

5. Action n° 6 : « Patrimoine cinématographique »

Les crédits destinés au patrimoine cinématographique représentent dans le projet de budget pour 2006, 28 millions d'euros de crédits de paiement et 26 millions d'euros d'autorisations d'engagement contre respectivement 39 et 28,5 millions d'euros en 2005.

Ces crédits devraient toutefois être complétés à hauteur de 12,6 millions d'euros par le rattachement d'une partie du produit de privatisation.

6. Action n° 7 : « Patrimoine linguistique »

Avec 3,4 millions d'euros de crédits de paiement et d'autorisations d'engagement, les dotations de l'action 7 ne représentent que 0,3 % des moyens financiers du programme patrimoine.

Ils sont destinés à financer les actions conduites par la Délégation générale à la langue française et aux langues de France.

F. LES DISPOSITIFS FISCAUX EN FAVEUR DU PATRIMOINE

Le système fiscal français comporte un certain nombre de dispositions favorables au patrimoine.

Or le projet de loi de finances pour 2006 prévoit d'opérer une réforme significative de l'impôt sur le revenu de 2006 (exigible en 2007) qui, dans sa formulation actuelle, risque d'avoir des conséquences importantes sur la portée de certaines de ces dispositions.

Dans le cadre de cette réforme, qui doit se traduire par la diminution du nombre de tranches d'imposition et par l'abaissement des taux qui leur sont associés, il est envisagé de plafonner globalement certains des avantages fiscaux dont les contribuables sont susceptibles de cumuler les bénéfices. Ainsi, les dispositifs entrant dans le champ de ce plafond ne pourraient excéder, pour un même foyer fiscal, 8 000 euros majorés de 750 euros par enfant à charge, et de 5 000 euros lorsque le foyer comprend au moins une personne handicapée. Ces mécanismes de plafonnement s'appliqueraient à compter des revenus de 2006.

Notre commission se réjouit que le Gouvernement ait fait le choix d' exclure de ce plafond global un certain nombre de déductions et d'exonérations intéressant la politique du patrimoine , et qui, dans le cas contraire, auraient été vidées d'une grande partie de leur contenu, qu'il s'agisse :

- des dispositions qui, sous certaines conditions d'ouverture à la visite, permettent au propriétaire d'un monument historique classé ou inscrit, de déduire de son revenu son apport financier pour des travaux de restauration ainsi que certaines charges d'entretien ;

- des dispositions en faveur du mécénat et des fondations qui prévoient que les dons et versements effectués au profit de fondations et d'associations reconnues d'utilité publique ouvrent droit à une réduction d'impôt égale à 66 % de leur montant dans la limite de 20 % du revenu imposable (article 200 du code général des impôts).

Elle relève en revanche avec une certaine préoccupation que les dispositions de l'article 156-I-3° du code général des impôts relatif aux secteurs sauvegardés et aux zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) ne sont exclues du plafond qu'à titre transitoire pour les seules opérations de travaux autorisées avant le 1 er janvier 2006. Les déductions fiscales auxquelles pourront donner lieu les travaux autorisés après cette date seront en revanche soumises à ce plafond global.

Ce dispositif fiscal est strictement encadré puisqu'il ne concerne que les déficits provenant de dépenses autres que les intérêts d'emprunt effectués sur des locaux d'habitation, en vue de la restauration complète d'un immeuble bâti, situé dans un secteur sauvegardé ou dans une ZPPAUP et sous réserve que le propriétaire prenne l'engagement de les louer nus pendant une durée de six ans.

Votre commission redoute que, compte tenu de l'importance du montant de ces travaux de restauration, le plafonnement envisagé ne vide de sa portée un dispositif qui joue un rôle important dans la restauration des centre-villes historiques, en incitant des investisseurs à s'intéresser à des immeubles dont la remise en état est généralement coûteuse, compte tenu des contraintes particulières qu'ils doivent respecter.

Elle invite les pouvoirs publics à bien mesurer les conséquences d'une mesure qui risque d'affaiblir des pans significatifs de notre politique en faveur des secteurs protégés.

III. LE PROGRAMME « CRÉATION »

A. LE BUDGET POUR 2006 ET LA MISE EN oeUVRE DE LA LOLF

1. La présentation du budget

Le décret du 15 mai 2002 relatif aux attributions du ministère de la culture et de la communication présente ainsi ses missions dans le domaine de la création : « rendre accessibles au plus grand nombre les oeuvres capitales de l'humanité et d'abord de la France (...), favoriser la création des oeuvres d'art et de l'esprit et développer les pratiques artistiques. »

Cette mission s'articule autour de trois grandes orientations stratégiques : assurer la diversité et le renouvellement de la création, rapprocher l'oeuvre du public et favoriser l'économie des professions et des industries culturelles.

L'action du ministère en matière de soutien à la création s'exerce d'une part par le biais d'une offre publique et, d'autre part, à travers les missions de régulation des activités culturelles et des professions.

La commission des finances procédant à une présentation et à une analyse détaillées du programme, des actions, des objectifs, des indicateurs ainsi que des crédits et dépenses fiscales consacrés à ce programme, votre commission ne fera qu'une présentation succincte de cette nouvelle architecture budgétaire.

Le programme « création » de la mission « culture » vise à assurer la diversité et le renouvellement de l'offre culturelle, à tous les stades de la vie d'une oeuvre : création, production et diffusion. Il est structuré autour des métiers de la création et comporte quatre actions :

- action 1 : soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant ;

- action 2 : soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts plastiques ;

- action 3 : soutien à la création, à la production et à la diffusion et à la valorisation du livre et de la lecture ;

- action 4 : économie des professions des industries culturelles.

Sont inscrits au projet de loi de finances pour 2006 : 939,3 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 949,5 millions d'euros en crédits de paiement (CP) au titre du programme « création » 3 ( * ) .

a) Action n° 1 : « Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant »

Cette action recouvre quatre activités :

- les aides à la création et aux nouvelles écritures ;

- le soutien aux institutions et aux équipes artistiques et au spectacle vivant ;

- le soutien aux lieux de résidence, aux réseaux de diffusion et festivals du spectacle vivant ;

- la connaissance, la valorisation et la promotion du spectacle vivant.

Cette action devrait bénéficier pour 2006 de 599,42 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) (soit 63,8 % des AE du programme) et 608,74 millions d'euros en crédits de paiement (CP) (soit 64,1 % des CP du programme).

Ces sommes seront consacrées à trois types de dépenses :

- les dépenses de fonctionnement, qui représentent environ 50 % de ces sommes et sont destinées aux opérateurs du programme ;

- les dépenses d'investissement, qui s'élèvent à 8,6 millions d'euros en AE et 6,1 millions d'euros en CP et bénéficieront d'une dotation complémentaire en capital de 5,1 millions d'euros. Celle-ci concerne le patrimoine appartenant à l'Etat ou à ses établissements publics. Ainsi, 3,1 millions d'euros en AE seront consacrés à la rénovation du Théâtre national de l'Odéon, dont le coût total devrait s'élever à 34,9 millions d'euros sur 4 ans ;

- les dépenses d'intervention qui s'élèvent à 304,4 millions d'euros en AE et 314,5 millions d'euros en CP. Elles sont, pour l'essentiel, consacrées aux établissements de création, de production ou de diffusion situés sur l'ensemble du territoire et destinés au théâtre, aux arts du cirque, de la rue, à la musique, à la danse ainsi qu'aux programmations pluridisciplinaires. Elles sont également destinées aux équipes artistiques (compagnies dramatiques, chorégraphiques et ensembles musicaux professionnels). 16 % de cette enveloppe est constituée de crédits centraux, l'essentiel étant des crédits déconcentrés.

En 2006, des moyens nouveaux seront consacrés aux équipes artistiques indépendantes (à hauteur de 2,5 millions d'euros en AE/CP).

En outre, des crédits d'investissement, d'un montant de 19,3 millions d'euros en AE et 29,4 millions d'euros en CP, seront consacrés :

- d'une part, à des opérations poursuivant l'aménagement culturel du territoire (notamment, le programme des salles Zénith, l'auditorium d'Aix-en-Provence, Sextius Mirabeau et l'établissement public de coopération culturelle Le Quai à Angers) ;

- d'autre part, des opérations de réhabilitation et de restructuration des équipements existants (tels que le théâtre national populaire de Lyon, par exemple).

b) Action n° 2 : « Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts plastiques »

Cette action recouvre cinq activités :

- le soutien à la création par l'acquisition et la commande d'oeuvres d'art ;

- l'amélioration des conditions de création des artistes et la structuration des professions ;

- le soutien aux divers projets et lieux de création, médiation et diffusion ;

- le soutien au fonctionnement des institutions de production et de diffusion ;

- le soutien en faveur des manufactures nationales et des métiers d'art.

Cette action devrait bénéficier pour 2006 de 103,58 millions d'euros en AE et de 103,95 millions d'euros en CP, dont :

- environ 11 % au titre des dépenses de fonctionnement (notamment au profit de la manufacture de Sèvres, de la manufacture des Gobelins et du mobilier national, mais aussi du Centre national des arts plastiques et des galeries du jeu de Paume) ;

- environ 11 % en AE et plus de 13 % en CP pour les dépenses d'investissement, qui se répartissent entre les grands projets d'investissement et les crédits d'acquisition. Il faut signaler, à cet égard, le lancement des études pour la rénovation du Palais de Tokyo ;

- et le solde au titre des dépenses d'intervention destinées à la fois à soutenir la création et la diffusion des oeuvres et à encourager la structuration des professions.

c) Action n° 3 : « Soutien à la création, à la production, à la diffusion et à la valorisation du livre et de la lecture »

Cette action recouvre deux activités :

- le soutien au développement de la lecture ;

- l'aide à la diffusion par les bibliothèques.

Elle devrait bénéficier pour 2006 de 193,72 millions d'euros en AE et de 194,18 millions d'euros en CP.

Près de 90 % de ces sommes seront consacrées aux dépenses d'intervention, qui sont pour l'essentiel du ressort des collectivités territoriales.

d) Action n° 4 : « Economie des professions et des industries culturelles »

Cette action concerne essentiellement la politique en faveur de l'économie du spectacle vivant et des arts visuels, des industries musicales, des industries du livre et du multimédia. Elle recouvre trois activités :

- le soutien en faveur du développement et de la diffusion du livre ;

- le soutien en faveur de l'économie des industries musicales et du spectacle vivant ;

- le soutien en faveur de l'économie du cinéma et de l'image en termes de création et de diffusion.

En 2006, 42,57 millions d'euros en AE et 42,62 millions d'euros en CP seront consacrés à cette action, dont l'essentiel concerne des dépenses d'intervention (à titre principal pour la gestion du droit de prêt aux bibliothèques, aide aux structures dans le secteur du multimédia et de l'édition, fonds de soutien du théâtre privé...).

2. La mise en oeuvre de la LOLF

Le programme « Création » comporte 6 objectifs et 11 indicateurs.

Vos rapporteurs ne présenteront pas le détail de ces indicateurs, la commission des finances ayant procédé à leur analyse. Ils préciseront toutefois les objectifs au regard desquels sera évaluée la performance du ministère :

- dans le domaine de la création : inciter à l'innovation et à la diversité de la création française ; donner des bases économiques et financières solides à la création française ;

- dans le domaine de la diffusion : augmenter la fréquentation du public dans les lieux culturels sur l'ensemble du territoire ; diffuser davantage les oeuvres et les productions culturelles en France et à l'étranger ;

- dans le secteur de l'économie des professions et des industries culturelles : soutenir l'emploi culturel et la professionnalisation des secteurs ; conforter la diversité de l'offre dans le domaine des industries culturelles.

Ces objectifs vont dans le sens souhaité par votre commission, tel qu'elle l'avait exprimé dans le rapport précité de son groupe de réflexion sur la création culturelle en France.

Votre commission relève toutefois la modestie de certaines valeurs cibles retenues pour les différents indicateurs à l'horizon 2010. S'il convient de fixer des objectifs réalistes, elle s'interroge cependant sur ce qui pourrait parfois apparaître comme un manque d'ambition.

B. L'ANNONCE D'UN VÉRITABLE PROJET POLITIQUE EN FAVEUR DU THÉÂTRE

Le 5 octobre dernier, le ministre de la culture et de la communication, M. Renaud Donnedieu de Vabres, a annoncé un plan de grande ampleur en faveur du théâtre, véritable projet politique qu'il entend mettre en oeuvre dès l'année 2006. Celui-ci comprend trois axes majeurs : l'ouverture, le rayonnement et la lisibilité.

1. Les trois axes du « plan théâtre »

a) Le pari de l'ouverture
(1) Renforcer la découverte du théâtre et la formation des jeunes

Il s'agit de proposer aux jeunes, sur l'ensemble du territoire national, une offre de découverte et d'enseignement du théâtre, au même titre que pour la musique et la danse. Les « schémas départementaux des enseignements artistiques » comporteront désormais un volet « théâtre ».

Par ailleurs, ainsi qu'il sera précisé ci-après, la formation théâtrale est en cours de réforme.

(2) Mieux accompagner les compagnies indépendantes

Sur 630 compagnies de théâtre aidées par l'Etat en 2005, 321 bénéficient d'un conventionnement et 309 ont reçu une aide à la production.

Le ministre envisage cinq mesures en leur faveur pour 2006, afin de favoriser l'accompagnement des premiers pas d'un artiste isolé, de mieux prendre en compte la réalité du travail des compagnies non subventionnées et de resserrer les liens entre compagnies et théâtres autour de projets expérimentaux. Ces mesures consistent à :

- renforcer les moyens alloués aux compagnies par le biais, d'une part, d'un relèvement du plancher de l'aide à la production dramatique à 10 000 € (pouvant être porté à 20 000 € pour les projets les plus ambitieux) et, d'autre part, de l'encouragement à la reprise des oeuvres afin de permettre aux compagnies d'organiser plus facilement des tournées ;

- instaurer une aide à la maquette : cette nouvelle aide pour les compagnies ou les artistes indépendants est fixée à 5 000 €, auxquels devront impérativement s'ajouter au moins 5 000 € supplémentaires provenant d'un théâtre ou d'un lieu partenaire ;

- valoriser les projets individuels, afin qu'un artiste puisse, sans avoir à créer sa propre compagnie, bénéficier d'une aide par le biais de l'« accompagnateur » de son projet ;

- proposer un compagnonnage aux jeunes artistes au sein d'une compagnie conventionnée ;

- valoriser les résidences d'artistes ou de compagnies au sein du théâtre. La « résidence-association » entre une compagnie et un territoire sera encouragée et fera l'objet d'un contrat sur deux ou trois années associant le ou les artistes, le lieu d'accueil, l'Etat et une ou plusieurs collectivités territoriales.

b) L'enjeu du rayonnement

Selon les termes mêmes du ministre, il s'agit de faire en sorte qu'il y ait du « théâtre partout et pour tous ». Plusieurs mesures devraient y contribuer :

- le renforcement de la présence du théâtre dans les établissements scolaires, dans le respect de l'esprit de partenariat entre artistes et enseignants ;

- la reconnaissance du théâtre amateur et la clarification du cadre juridique régissant la présence des amateurs sur scène ;

- la représentation de tous les genres de théâtre, qu'il soit classique ou contemporain, avec un soutien spécifique en faveur de l'écriture et du montage des oeuvres d'auteurs vivants ;

- l'engagement de construire en trois ans une politique de soutien aux arts de la rue, des mesures nouvelles en leur faveur étant programmées dès 2006 ;

- une réflexion spécifique sur le théâtre destiné au jeune public ;

- la poursuite des réflexions sur la complémentarité et les relations entre théâtre public et théâtre privé ;

- le renforcement de la place du spectacle vivant, et notamment celle du théâtre, à la télévision.

c) L'impératif de la lisibilité de l'action de l'Etat

Il s'agit de rendre l'action de l'Etat « plus lisible en précisant pourquoi il s'engage dans des conventions avec des compagnies et pourquoi il se lie par des contrats avec des lieux du réseau théâtral ».

(1) L'action en faveur des compagnies dramatiques indépendantes

A partir de 2006, chaque direction régionale de l'action culturelle devra, à l'occasion du réexamen d'une convention en vue de son éventuel renouvellement, réexaminer le lien qui l'unit à chaque compagnie au regard de sa qualité artistique ainsi que de son volume d'activité, de son rayonnement territorial, du dynamisme en faveur de l'emploi et du « compagnonnage ».

Outre l'évaluation de la qualité artistique, les prochaines conventions conclues avec les compagnies intégreront donc des objectifs évaluables dans ces quatre domaines.

(2) L'action en faveur des lieux de théâtre

Fruit de l'histoire de notre pays, le réseau des lieux de théâtre comprend différents types de structures, avec lesquelles l'Etat a noué des liens particuliers sur des modes variés, qu'il s'agisse des cinq théâtres nationaux, des 30 centres dramatiques nationaux, des six centres dramatiques régionaux, des 76 scènes conventionnées, sans compter de nombreux théâtres sans label (le théâtre du Rond Point à Paris, par exemple) ou quelques autres centres dramatiques.

• Clarification des fonctions

La clarification devrait porter sur les deux fonctions essentielles que les théâtres remplissent ensemble ou séparément : la production et la diffusion d'une part, la programmation et l'action culturelle, d'autre part.

Par ailleurs, il est prévu de renforcer la permanence artistique au sein des établissements.

Enfin, le ministère encouragera la structuration de véritables « pôles de diffusion », dont la constitution pourra être proposée à l'occasion de la signature ou de la prolongation du contrat liant un théâtre à l'Etat.

S'agissant de la programmation théâtrale, il faut souligner que la politique de conventionnement sera menée en priorité avec les lieux animés d'un véritable souci d'élargissement des publics, de mise en oeuvre de projets artistiques dans les lieux dits de l'exclusion, d'ouverture aux formes esthétiques les moins représentées sur les scènes françaises, ou d'accueil d'artistes européens ou venus des pays francophones.

• Réévaluation du réseau

Le ministre a annoncé que, dans une seconde étape, il serait procédé à la réévaluation du réseau théâtral, notamment à travers la vérification de la pertinence de chaque label. Ceci passera par :

- une refonte du contrat de décentralisation dramatique , intégrant notamment la rédaction d'un projet d'établissement, un appel à candidatures public de nature à rendre les renouvellements de direction plus transparents et une durée du mandat plus clairement établie ;

- la précision des labels « scène nationale » ou « scène conventionnée », au regard de leurs missions respectives, mais aussi en fonction de la capacité des lieux dotés d'un cahier des charges de le respecter au mieux ;

- la réforme de la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS). Une mission d'analyse a été confiée à cette fin à l'inspection générale de l'administration de la culture, dont le rapport et les propositions seront présentés d'ici la fin de l'année.

2. La position de votre commission

Votre commission ne peut que soutenir l'ensemble de ces propositions. Elle se réjouit de la cohérence du plan dans lequel celles-ci s'inscrivent et du fait qu'elles concernent l'ensemble des acteurs.

• Elle attache une importance particulière à la sensibilisation des jeunes d'âge scolaire aux oeuvres culturelles et artistiques . Dans sa « C ontribution au débat sur la création culturelle en France » 4 ( * ) , le groupe de réflexion créé par votre commission avait d'ailleurs appelé de ses voeux « un travail important de réflexion et d'action en matière d'animation et d'éducation artistique, notamment en lien avec les ministères de l'éducation nationale, de l'emploi, et du travail et de la cohésion sociale. »

Il estimait que « à l'école, la formation artistique doit être mise en avant de façon décisive, puisqu'il s'agit non seulement d'initier de futurs talents, mais aussi de former le public de demain ». Il ajoutait que « en outre, nos concitoyens étant soumis à la prolifération d'images -qui participent à la construction d'un espace public démocratique, mais peuvent aussi être utilisées à mauvais escient- il est essentiel qu'ils soient capables de porter sur ces images et ces représentations un regard critique de sujets pensants. Il faut, à cette fin, développer l'éducation à l'image à l'école . »

Notre collègue Jean-Claude Carle, dans son rapport présenté au nom de votre commission sur le projet de loi sur l'avenir de l'école 5 ( * ) avait également insisté « sur le rôle majeur de la sensibilisation des élèves aux différentes formes artistiques et culturelles, sur la contribution de cette éducation à l'épanouissement personnel, à la formation de l'esprit critique et à l'égalité des chances ». Il ajoutait que cette éducation doit notamment « prendre en compte la diversité des champs reconnus dans le monde des arts et de la culture et tendre à développer des partenariats impliquant les structures artistiques et culturelles en liaison avec les collectivités territoriales » .

Votre rapporteur tient à souligner, pour le regretter, que des élus constatent un certain désengagement de l'Etat dans ce domaine. Il espère que la récente mise en place du Haut conseil pour l'éducation artistique et culturelle et l'ambition régulièrement réaffirmée tant par le ministre chargé de la culture que par le ministre de l'éducation nationale, permettront de donner à l'enseignement artistique la place qui doit lui revenir. Il gage que l'augmentation de 1 million d'euros programmée dans le PLF 2006 en faveur de l'enseignement artistique ne sera pas un nouveau « coup d'épée dans l'eau »...

• S'agissant du soutien aux compagnies , votre commission soutient toutes les propositions de nature à favoriser l'association des artistes, des compagnies, des lieux et des territoires. L'enjeu concerne également l'amélioration de la circulation des personnes et des oeuvres et leur rencontre avec le public.

Ce dernier point est bien entendu essentiel. Votre commission, dans le rapport précité, avait évoqué la « crise démocratique » du secteur. En effet, l'augmentation de l'activité artistique n'a pas été accompagnée de la démocratisation souhaitée, les créateurs peinant parfois à trouver un public. Se pose donc le problème d'un éloignement entre le public et la création, la diffusion des oeuvres et la recherche du public ayant été trop délaissées. Il convient par conséquent d'y remédier et de remettre la population au centre des préoccupations du spectacle vivant .

Outre l'inscription de cette priorité dans les contrats avec les scènes du réseau, ce rapprochement et cette sensibilisation passent par une plus grande ouverture du secteur audiovisuel - public notamment - au spectacle vivant . Le nouveau président de France Télévisions, M. Patrick de Carolis, en a pris l'engagement. Votre commission veillera à ce que ce dernier soit respecté afin que le service public de l'audiovisuel remplisse pleinement sa mission et soit un vecteur privilégié de la transmission de valeurs culturelles et de l'expression de la diversité de la création française et européenne.

• Par ailleurs, votre commission se réjouit des engagements pris en faveur de la création contemporaine. A cet égard, votre rapporteur demandera au ministre de préciser les proportions respectives des oeuvres dites de répertoire et des oeuvres contemporaines d'expression française dans la programmation des théâtres publics .

On constate que les spectacles contemporains font appel à des disciplines diverses. Ceci permet incontestablement un renouvellement de la création ; il ne faudrait pas cependant que ces évolutions s'effectuent trop au détriment des textes eux-mêmes. On se souvient, à cet égard, des débats qui ont accompagné le festival d'Avignon l'été dernier.

Dans ce contexte, votre commission se félicite de l'annonce d'un soutien spécifique en faveur de l'écriture et du montage des oeuvres d'auteurs vivants . L'effort méritera sans doute d'être coordonné avec le Fonds d'aide à la production récemment créé par la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) pour soutenir des projets issus du théâtre privé et du théâtre public, qui récompensera chaque année 18 productions d'oeuvres théâtrales d'expression française.

• S'agissant de la réflexion sur les lieux du réseau théâtral, votre rapporteur demandera au ministre de préciser la place qui lui semble être celle de l'Etat dans les établissements constitués sous forme d'établissement public de coopération culturelle (EPCC).

Il rappelle que dans son rapport d'information établissant, au nom de votre commission des affaires culturelles, le bilan d'application de la loi du 4 janvier 2002 créant les EPCC, notre collègue Ivan Renar a insisté sur la nécessité pour l'Etat d'être présent au sein du conseil d'administration des EPCC, même quand il n'y participe pas financièrement.

• Enfin, votre rapporteur demandera au ministre de préciser les principaux axes du projet de loi en cours d'élaboration sur le théâtre amateur .

C. LA NÉCESSITÉ DE CONFORTER L'EMPLOI ARTISTIQUE ET DE PÉRENNISER LE RÉGIME DE L'INTERMITTENCE

Dans sa « Contribution au débat sur la création culturelle en France » 6 ( * ) , le groupe de réflexion créé par votre commission, en 2004, avait insisté sur la nécessité de conforter l'emploi artistique et de pérenniser le régime de l'intermittence, les objectifs avancés étant de :

- maintenir le régime d'assurance chômage des artistes et techniciens dans le cadre de la solidarité interprofessionnelle du régime général tout en lui apportant d'importants correctifs afin que son application soit plus conforme à son objectif initial ;

- inventer de nouveaux moyens institutionnels visant à structurer l'emploi artistique.

Dans cette perspective, votre commission avait notamment avancé les propositions suivantes :

- requalifier le champ des professions relevant de l'intermittence à partir des résultats de l'expertise ;

- professionnaliser les carrières artistiques et réfléchir à l'accès aux professions concernées ;

- remettre à plat les formations et mettre en place une meilleure orientation et information des jeunes sur les débouchés professionnels ;

- réaliser des études régulières sur l'évolution de l'emploi artistique, en lien avec une évaluation rigoureuse et transparente des politiques publiques de la culture, mission pouvant être confiée à un observatoire spécifique.

Les conclusions et propositions de ce rapport, publié en juillet 2004, ont été pour partie relayées par l'action du Gouvernement. Votre commission se réjouit que la concertation entre les pouvoirs publics et les professionnels ait permis de continuer d'avancer sur ces différents points cette année.

1. L'information et l'orientation des jeunes

D'après une enquête publiée en février 2005 7 ( * ) par la Chambre de commerce et d'industrie de Paris, plus de 70 % des jeunes, parents et enseignants déclarent être mal ou très mal informés sur les métiers et leurs débouchés professionnels. Les défauts de notre système d'orientation sont à l'origine d'un gaspillage individuel et collectif auquel il est urgent de remédier.

Afin de mieux appréhender les débouchés professionnels des jeunes comédiens , la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS) a confié au Jeune Théâtre National la réalisation d'une étude portant sur l'insertion professionnelle des étudiants de l'ensemble des neuf écoles signataires de la plate-forme de l'enseignement supérieur pour la formation du comédien. Les conclusions de cette étude seront rendues publiques d'ici la fin de l'année 2005. Un premier rapport d'étape permet cependant d'établir qu'environ 70% des jeunes comédiens sortant des écoles supérieures exercent un emploi dans la durée au sein des institutions du secteur concerné (théâtres nationaux, centres dramatiques, scènes nationales, théâtres privés...).

2. La formation des comédiens

Deux évolutions positives ont été enregistrées ces deux dernières années dans le domaine de l'enseignement supérieur du théâtre :

- la signature de la plate-forme de l'enseignement supérieur pour la formation du comédien ;

- la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, qui prévoit que les établissements d'enseignement supérieur des disciplines du spectacle vivant peuvent être habilités par le ministère chargé de la culture à délivrer des diplômes nationaux.

Ces orientations ouvrent la voie à la mise en oeuvre de mesures permettant d'assurer la reconnaissance d'un enseignement supérieur de qualité de l'art dramatique et de structurer l'offre d'enseignement supérieur sur l'ensemble du territoire .

La création, dans un avenir proche, de diplômes nationaux, notamment d'interprètes, dans le domaine du spectacle vivant s'inscrit dans le contexte général des transformations de l'ensemble de l'offre d'enseignement supérieur liée aux évolutions européennes, de la mise en oeuvre de la validation de l'expérience professionnelle et de la loi sur la formation tout au long de la vie.

La DMDTS mène, depuis quelques années, une politique visant à renforcer, à mieux structurer et à harmoniser l'offre publique de formation supérieure à finalité professionnelle dans ce domaine.

Il s'agit de mieux préparer les jeunes à l'entrée dans les métiers du spectacle et de leur ménager des conditions d'insertion moins précaires, de favoriser les évolutions de carrière et l'accès aux nouveaux dispositifs de la formation tout au long de la vie, de faciliter la mobilité européenne et de permettre les reconversions éventuelles et les deuxièmes carrières.

La politique ainsi menée va dans le sens souhaité par votre commission d'une professionnalisation des carrières artistiques.

3. La priorité donnée à l'emploi culturel en 2005

a) Les mesures de soutien à l'emploi dans le spectacle vivant

Le secteur du spectacle vivant a vu ses crédits augmenter de 27 % entre 1999 et 2004 , contre une hausse de 10 % pour l'ensemble du budget de la culture. Cette évolution s'est poursuivie en 2005 , de sorte que sa part dans le budget du ministère chargé de la culture est passée de 24 à 31 %, pour s'élever à 753 millions d'euros .

En 2005, il a bénéficié, de 20,5 millions d'euros supplémentaires dont 18 millions d'euros de mesures nouvelles (dont 9 millions sur crédits déconcentrés), auxquels il faut ajouter 2,5 millions d'euros de redéploiement de crédits.

Les mesures nouvelles ont porté en priorité sur les actions susceptibles de bénéficier directement à l'emploi, qu'il s'agisse d'emplois à durée indéterminée (relèvement de la part des emplois permanents et des structures pérennes) ou déterminée (allongement de la durée des contrats, prise en compte des heures supplémentaires, meilleure déclaration des heures réellement travaillées).

D'après une enquête réalisée par le ministère chargé de la culture, au minimum 15 millions d'euros ont ainsi été affectés à la politique de soutien direct à l'emploi . Ceci s'est concrétisé par la création de 306 contrats à durée indéterminée, de plus de 280 000 heures de travail sous contrat à durée déterminée et d'un allongement de la durée moyenne des contrats.

b) La réflexion sur le financement public et l'emploi dans le spectacle

Le ministre de la culture et de la communication, M. Renaud Donnedieu de Vabres, a confié à M. Alain Auclaire, chargé de mission à l'inspection générale de l'administration des affaires culturelles, un rapport sur le thème suivant : « Le financement public et le financement dans le spectacle ». Celui-ci a été présenté lors du Conseil national des professions du spectacle (CNPS) du 29 mars 2005 - auquel a participé le président de votre commission - et la réflexion a été poursuivie dans un second rapport présenté en septembre dernier.

Ce dernier prend en compte :

- l'examen des questions d'emploi par les services de l'Etat et des collectivités territoriales ;

- l'adaptation des procédures d'instruction, de paiement et d'évaluation des subventions ;

- l'amélioration des outils de gestion ;

- l'information et la formation des partenaires sur la gestion des emplois et sur l'utilisation des formules d'aide à l'emploi.

Il s'agit de faire en sorte que les financements publics s'inscrivent dans une politique de soutien à l'emploi , afin à la fois de favoriser le recours aux emplois permanents lorsque cela s'avère possible, de consolider la situation des personnes régulièrement employées sous contrat à durée déterminée et de réserver l'intermittence aux activités et aux fonctions qui le justifient pleinement.

M. Alain Auclaire suggère, notamment, que la priorité accordée à l'emploi par le ministère chargé de la culture et les collectivités publiques s'exprime à travers des objectifs précis, « tels que par exemple, la maîtrise de l'entrée dans les métiers, la consolidation des emplois permanents ou de saison, la prise en compte des profils de métiers dans la composition des équipes, un meilleur accompagnement des parcours professionnels de formation continue ».

Votre rapporteur demandera au ministre de préciser les suites qu'il envisage de donner aux propositions de ce rapport ainsi que les réactions des collectivités territoriales.

La commission soutient cette démarche, qui s'inscrit dans les propositions avancées dans son rapport précité. Elle avait, en effet, suggéré « de lier les subventions publiques au respect des dispositions légales (conditions d'emploi en particulier) et à la transparence des contrats ».

c) La redéfinition du champ des conventions collectives et du périmètre des professions relevant de l'intermittence

Il existe à l'heure actuelle une vingtaine de conventions collectives dans le champ culturel. Ce nombre important, outre qu'il ne facilite pas les négociations dans les secteurs concernés, n'empêche pas l'absence de couverture de certains domaines ou les chevauchements, dans d'autres.

Un travail approfondi permet désormais d'envisager l'élaboration de six conventions collectives nationales , destinées à se substituer à celles existantes et à couvrir l'ensemble du champ (spectacle vivant, production audiovisuelle et cinématographique, édition phonographique, entreprises de prestations techniques) ainsi que deux accords professionnels spécifiques concernant les personnels non permanents des radios d'une part, et de la télédiffusion d'autre part.

Le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, M. Gérard Larcher, s'est engagé à favoriser l'accélération et le bon déroulement des négociations menées par les professionnels, afin de garantir une couverture conventionnelle exhaustive, sans vide ni chevauchement , du champ du spectacle vivant et enregistré.

Au cours de la réunion du CNPS du 29 septembre dernier, il a précisé que ces conventions devraient comporter un certain nombre de « stipulations incontournables » avec pour « éléments prioritaires » : les conditions de recours aux contrats à durée déterminée d'usage, les modalités de transformation de ces derniers en contrats à durée indéterminée, les salaires minima, les conditions de rémunération et le temps de travail. Il a indiqué que le périmètre du contrat à durée déterminée d'usage devra être défini de façon précise et maîtrisée, la liste des cas de recours devant être réduite et justifiée.

Cette réforme devra aboutir avant la fin de l'année 2006 . Après cette date, seules des conventions collectives étendues devraient permettre de recourir à de tels contrats.

4. Le recours au fonds transitoire

Rappelons que le Gouvernement a institué en 2004 un fonds spécifique provisoire, remplacé à compter du 1 er janvier 2005 par un fonds transitoire, dont l'objectif est de remédier aux situations difficiles des artistes et techniciens que les dispositions adoptées en 2003 excluaient du bénéfice du régime de l'assurance chômage.

En dépit des difficultés rencontrées - que votre rapporteur avait dénoncées dans son rapport l'an dernier - ce fonds semble avoir bien joué son rôle « d'amortisseur de crise ».

La plupart des difficultés signalées semblent avoir été résolues et des efforts ont été accomplis pour améliorer l'information des intéressés. C'est ainsi notamment qu'une brochure actualisée a été diffusée en juin dernier.

Au 23 septembre 2005, 11 783 dossiers avaient été pris en compte (en cumulé) pour 19 239 dossiers déposés.

5. Le régime d'assurance chômage : quid à partir du 1er janvier 2006 ?

a) Un rappel des étapes de la réflexion et des négociations

Rappelons qu'en décembre 2004, M. Jacques Charpillon, chef de l'inspection générale des affaires culturelles, a présenté devant le CNPS un rapport ayant pour sujet « l'indemnisation du chômage des intermittents du spectacle : -- Propositions de nouvelle définition du champ des annexes VIII et X », qui a été débattu dans ce cadre.

Par ailleurs, M. Jean-Paul Guillot, président du Bureau d'information et de prévisions économiques (BIPE), a été chargé d'une mission d'expertise destinée à aider l'ensemble des acteurs concernés à construire un système pérenne de financement de l'emploi dans les secteurs du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel.

Le rapport conclut que l'amélioration du régime d'assurance chômage ne produira d'effets que si elle s'inscrit dans une politique ambitieuse de l'emploi culturel au service de la création et de la diffusion, politique qui doit mobiliser l'Etat, les collectivités territoriales, les partenaires sociaux du secteur et les partenaires interprofessionnels.

C'est dans cette optique qu'un projet de « charte sur l'emploi dans le spectacle » est soumis à la concertation de tous les partenaires concernés depuis le début du mois de mars dernier. Ce document a pour but de :

- clarifier les responsabilités respectives de l'Etat, des collectivités territoriales, des partenaires sociaux du secteur et des confédérations, en matière de soutien à l'emploi dans le spectacle ;

- définir la place que doit y prendre l'assurance chômage.

En 2005, l'action de l'Etat au regard de ces objectifs s'organise autour de quatre axes : renforcer l'efficacité des contrôles, orienter les financements publics vers l'emploi, aider à la conclusion de conventions collectives et accompagner les efforts de professionnalisation des employeurs et des salariés. Ces actions sont débattues au sein du CNPS, qui tient des réunions régulières depuis le printemps 2004 et auxquelles participe le président de votre commission, M. Jacques Valade.

Le Gouvernement souhaite ainsi créer les conditions permettant aux partenaires sociaux interprofessionnels de définir, d'ici le 1 er janvier 2006 au plus tard, les nouvelles dispositions d'un accord qu'il appelle de ses voeux.

Le 16 juin dernier, à l'invitation du ministre de la culture et de la communication et du ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, en présence des présidents des commissions des affaires culturelles du Sénat et de l'Assemblée Nationale, les confédérations syndicales et patronales, membres de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC), ont été réunies. Cette réunion était destinée à ouvrir les discussions sur la politique de l'emploi dans le spectacle dans toutes ses dimensions.

L'attachement au maintien dans la solidarité interprofessionnelle du régime d'assurance chômage des artistes et techniciens a été réaffirmé, comme la nécessité de prendre en compte les spécificités des métiers et des pratiques d'emploi dans le secteur du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel.

Les ministres et les présidents des commissions parlementaires compétentes ont rappelé que l'Etat était particulièrement attentif à ce que les règles régissant les conditions de l'emploi comme de l'assurance chômage soient le fruit de la négociation et que l'Etat était prêt, si nécessaire, à aider à la recherche des accords à venir.

Il a été également convenu que M. Jean-Paul Guillot animerait durant l'été une phase de travail au niveau professionnel, pour éclairer et nourrir, dans le respect des compétences des confédérations syndicales et patronales, la négociation interprofessionnelle en vue de définir le nouveau régime d'assurance chômage des artistes et techniciens, qui doit être opérationnel au 1er janvier 2006.

Les propositions issues de cette phase de travail ont été présentées le 29 septembre dernier aux partenaires de l'UNEDIC lors d'une réunion qui s'est tenue dans la même configuration que le 16 juin.

b) Les pistes ouvertes par le rapport Guillot

Ce travail a fait l'objet d'un rapport sur l'emploi dans le spectacle que M. Jean-Paul Guillot a présenté, le 21 octobre dernier, et dans lequel il avance des pistes pour un nouveau système d'indemnisation du chômage des intermittents (artistes et techniciens) au 1 er janvier 2006.

Pour M. Jean-Paul Guillot, les partenaires sociaux sont d'accord pour faire en sorte que l'indemnisation chômage redevienne un revenu de remplacement en cas de chômage et non un « revenu de complément ». En effet, pour plus d'un indemnisé sur deux (51 %), le poids des indemnités dans le revenu annuel est aujourd'hui supérieur à 50 %. Par ailleurs, la variation de l'allocation journalière n'incite pas à dépasser 620 heures de travail déclaré pour un salaire annuel de 16 250 euros. La grande majorité des partenaires sociaux souhaitent donc que les négociateurs de l'assurance chômage retiennent une formule « simple » valorisant clairement, dans le calcul de l'allocation journalière, à la fois toute la rémunération annuelle perçue et la totalité du temps de travail effectué sur une période de référence de douze mois.

Le rapport suggère que :

- le seuil d'affiliation à l'assurance chômage soit progressivement relevé au fur et à mesure de l'impact positif des conventions collectives et de la politique de l'emploi sur la durée effectivement travaillée et déclarée ;

- un « contrat d'objectif incitatif » permette d'articuler les effets positifs pour l'Unedic des actions engagées sur la politique de l'emploi avec le niveau des cotisations d'assurance chômage ;

- la faisabilité d'une modulation de la cotisation employeur soit étudiée en fonction de la durée des contrats, en liaison avec les incitations définies dans les différentes conventions collectives.

Le rapport prend acte de l'intention des partenaires sociaux d'aboutir, dans le courant de l'année 2006, à huit conventions collectives, couvrant l'ensemble du champ et définissant précisément certains « points critiques », évoqués précédemment, pour la détermination du périmètre de l'intermittence et de la politique de l'emploi. En contrepartie, l'Etat et les collectivités territoriales feraient montre d'une grande vigilance quant au respect des normes sociales et des bonnes pratiques de l'emploi, quitte à exiger dans certains cas le remboursement des aides allouées et/ou à retirer les licences.

Tous les outils étant aujourd'hui en place, votre commission se montre optimiste quant à la conclusion de la nouvelle convention qui doit prendre effet à compter du 1er janvier 2006.

IV. LE PROGRAMME « TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE »

Le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » regroupe les moyens consacrés par le ministère de la culture et de la communication à la mission qui lui est impartie de rendre accessibles au plus grand nombre les oeuvres de l'esprit, de développer les pratiques et les enseignements artistiques, d'encourager les politiques locales, et enfin, de contribuer à l'action culturelle extérieure de la France. C'est également à ce programme que sont rattachés les crédits destinés aux fonctions de soutien communes aux trois programmes.

La coordination du programme 224 est confiée à la Délégation au développement et aux affaires internationales, qui assure en outre le pilotage des actions 1 ( soutien aux établissements d'enseignement supérieur ), 2 ( soutien à l'éducation artistique ), 4 ( actions en faveur des publics spécifiques ), et 6 ( action culturelle internationale ), alors que les actions 5 ( actions spécifiques en faveur de l'aménagement du territoire ) et 7 ( fonctions de soutiens ) relèvent de la responsabilité de la Direction de l'administration générale, et l'action 3 ( soutien aux établissements d'enseignement spécialisé ) à la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles.

A. LES OBJECTIFS ET INDICATEURS

Le projet de budget pour 2006 donne six objectifs au programme :

- améliorer l'insertion professionnelle des diplômés de l'enseignement supérieur ;

- favoriser l'accès des enfants et des jeunes d'âge scolaire à l'éducation artistique et culturelle ;

- favoriser les pratiques amateurs ;

- favoriser les publics spécifiques ;

- orienter les actions menées par les structures artistiques et culturelles subventionnées par le ministère en direction de territoires où la population est éloignée de l'offre culturelle ;

- promouvoir les échanges au sein de l'espace culturel européen dans un contexte de diversité culturelle ;

- maîtriser le coût des fonctions de soutien.

Votre commission relève que seuls trois des dix indicateurs liés à ces objectifs ont pu être détaillés dans le projet de budget pour 2006, ce qui souligne l'ampleur de la tâche restant à accomplir.

Ces indicateurs sont-ils à même de fournir une indication pertinente sur les politiques conduites par le ministère ?

Leur approche quantitative et globalisante ne risquerait-elle pas de s'avérer réductrice et insuffisante si elle devait prévaloir, aux dépens d'une approche qualitative beaucoup plus difficile à assurer par des indicateurs chiffrés ?

Votre commission juge tout à fait souhaitable de suivre le parcours des étudiants des conservatoires et des écoles d'architecture pour apprécier l'adéquation de l'enseignement dispensé aux exigences de la vie professionnelle. Mais la notion très large « d'emploi en rapport avec la formation reçue » ne risque-t-elle pas de compromettre toute perception un peu fine des débouchés ? Des emplois très inégaux par leur intérêt, leur stabilité et leur rémunération sont, pour de jeunes artistes ou de jeunes architectes, susceptibles « d'être en rapport avec la formation reçue ». Est-il pertinent de les agréger sans distinction ?

De la même façon, est-il approprié de mesurer le nombre d'enfants et de jeunes d'âge scolaire ayant bénéficié d'une action éducative subventionnée par le ministère, sans opérer de distinction entre les différents dispositifs concernés, dont les uns correspondent à des actions lourdes (options, classes culturelles, ateliers) et les autres à de simples actions de sensibilisation (écoles, collèges et lycées au cinéma) ?

Par ces exemples, votre commission ne souhaite pas remettre en questions la mise au point d'objectifs chiffrés qui peuvent constituer de bons guides de gestion, mais mettre en garde le ministère contre les risques d'une utilisation exclusive.

B. LES MOYENS FINANCIERS

Les dotations demandées pour 2006 s'élèvent à 877 millions d'euros de crédits de paiement et 865 millions d'euros en autorisations d'engagement.

Le programme 224 « Transmission » représente un peu plus de 31 % des crédits de paiement de la mission « Culture », mais cette proportion tombe à 19 % si l'on procède à la redistribution entre les deux autres programmes des crédits qui, pour répondre aux exigences d'une gestion mutualisée, ont été regroupés sur le présent programme.

1. L'évolution des crédits de la mission

Ces regroupements faussant toute analyse de l'évolution globale des crédits de la mission entre les exercices 2005 et 2006, votre rapporteur privilégiera l'analyse des dépenses inscrites aux titres 3, 5 et 6.

ÉVOLUTION DES MOYENS FINANCIERS DU PROGRAMME 224
TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE
HORS DÉPENSES DE PERSONNEL

(En millions d'euros)

Crédits de paiement

Autorisations d'engagement

LFI
2005

PLF
2006

Evolution
en  %

LFI
2005

PLF
2006

Evolution en  %

Titre 3 - Dépenses de fonctionnement

201,8

208,9

+ 3,5

203,0

207,4

+ 2,1

Titre 5 - Dépenses d'investissement

69,5

32,9

- 52,6

33,0

26,7

- 19

Titre 6 - Dépenses d'intervention

208,5

219,1

+ 5

209,8

214,6

+ 2,3

TOTAL

479,8

460,9

- 3,9

445,8

448,7

+ 0,65

Dotation exceptionnelle

19,3

TOTAL global

480,2

+ 0,1

Les crédits de paiement afférents à ces dépenses représentent près de 461 millions d'euros dans le projet de budget pour 2006, soit une contraction de 3,9 % en volume. Dans le même temps, les autorisations d'engagement passent de 446 à un peu moins de 449 millions d'euros, soit une hausse de 0,65 %.

Ce déséquilibre relatif entre la diminution des crédits de paiement et la stabilité des autorisations d'engagement devrait être compensé par les ressources complémentaires attendues du produit des privatisations, à hauteur d'un peu plus de 19 millions d'euros.

2. Un programme réparti en sept actions sectorielles

Le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » s'articule en 7 actions sectorielles très inégales par leur poids financier : à elles seules les actions 1 ( Soutien aux établissements d'enseignement supérieur ) et 7 ( Fonction soutien communes aux trois programmes ) représentent près de 83 % de l'ensemble des autorisations de programme, le poids relatif des autres actions variant entre 2,3 et 4 %.

PRÉSENTATION PAR ACTION DES CRÉDITS DEMANDÉS POUR 2006
ET DES RESSOURCES ATTENDUES DES PRIVATISATIONS

(En millions d'euros)

Numéro et intitulé de l'action

Crédits de paiement

Produit attendu des privatisations

Autorisations d'engagement en  %

Autorisations d'engagement

01 Soutien aux établissements d'enseignement supérieur et insertion professionnelle

338,67

15,00

38,37

331,83

02 Soutien à l'éducation artistique

31,34

3,62

31,34

03 Soutien aux établissements d'enseignement spécialisé

34,70

4,05

35,05

04 Actions spécifiques en faveur des publics

23,78

3,19

27,62

05 Actions spécifiques en faveur de l'aménagement du territoire

37,82

3,95

34,20

06 Action culturelle internationale

19,92

2,30

19,92

07 Fonctions soutien communes aux trois programmes

390,80

3,30

44,51

384,95

TOTAUX

877,03

18,30

100

864,91

C. LE SOUTIEN AUX ÉTABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET L'INSERTION PROFESSIONNELLE

Les dotations financières consacrées à l'action n° 1 « Soutien aux établissements d'enseignement supérieur et insertion professionnelle » dépassent les 338 millions d'euros en crédits de paiement et approchent les 332 millions d'euros en autorisations d'engagement.

Si l'on excepte les fonctions de soutien, cette action constitue de très loin le premier poste de dépenses du programme dont elle représente plus de 38 % de l'ensemble des crédits de paiement et des autorisations de programme.

ÉVOLUTION DES MOYENS FINANCIERS DE LA POLITIQUE DE SOUTIEN AUX ÉTABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET INSERTION PROFESSIONNELLE, HORS DÉPENSES DE PERSONNEL

(En millions d'euros)

Crédits de paiement

Autorisations d'engagement

LFI
2005

PLF
2006

Evolution
en  %

LFI
2005

PLF
2006

Evolution en  %

Titre 3 - Dépenses de fonctionnement

125,4

130,5

+ 4

126,6

129,1

2

Titre 5 - Dépenses d'investissement

36,9

19,4

- 47

24,5

13,7

- 44

Titre 6 - Dépenses d'intervention

70,1

66,8

- 4,7

70,3

67,1

- 4,5

TOTAL

232,4

216,7

- 6,7

221,4

209,9

- 5,2

Dotation exceptionnelle

15

TOTAL GLOBAL

231,7

- 0,3

• Le poids déterminant des subventions de fonctionnement versées aux établissements d'enseignement supérieur

Les subventions de fonctionnement versées aux établissements d'enseignement supérieur représentent un peu plus de 60 % des crédits de l'action 1, hors titre 2.

Ces crédits de paiement sont destinés :

- aux conservatoires nationaux supérieurs de musique et de danse de Paris et de Lyon, à hauteur de 34,2 millions d'euros ;

- aux écoles nationales supérieures d'art et de design, à hauteur de près de 31 millions d'euros ;

- aux écoles d'architecture, à hauteur de 38 millions d'euros ;

- à d'autres établissements d'enseignement supérieur, à hauteur de près de 28 millions d'euros.

• Les dépenses d'investissement : des actions subordonnées au rattachement de la dotation exceptionnelle

Les crédits d'investissement destinés à financer les dépenses d'équipement des établissements d'enseignement supérieur s'élèvent à 13,7 millions d'euros dans le projet de budget pour 2006 en autorisations d'engagement, et à 19,4 millions d'euros en crédits de paiement. Le ministère indique que ce niveau qui accuse une baisse de plus de 40 % par rapport à l'an dernier, devrait être compensé par le rattachement, à hauteur de 15 millions d'euros d'une partie de produit des privatisations .

Ces crédits sont destinés principalement à la construction de nouveaux locaux pour l'école d'architecture de Paris Val-de-Seine, à la relocalisation dans les anciens locaux du lycée Diderot de l'école d'architecture Paris-Belleville, à la reconstruction de l'école d'architecture de Nantes, ainsi qu'à plusieurs opérations de travaux dans l'école d'architecture de Versailles.

• Les dépenses d'intervention

Les crédits d'intervention d'un montant d'environ 67 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisations de programme sont destinés à financer :

- les bourses versées aux étudiants à hauteur de 13 millions d'euros ;

- le soutien aux structures d'enseignement et d'insertion pour 52,6 millions d'euros ;

- les investissements des écoles nationales supérieures d'art en région, à hauteur d'un peu plus de 1 million d'euros.

D. LA NÉCESSAIRE RELANCE DE L'ÉDUCATION ARTISTIQUE

1. Les crédits inscrits au projet de budget

Le projet de budget pour 2006 consacre 31 millions d'euros , en crédits de paiement comme en autorisations d'engagement, à l'action 2 « soutien à l'éducation artistique » .

La subvention de 0,65 million d'euros versée au Centre national de la cinématographie figure au titre des dépenses de fonctionnement du titre 3.

Mais l'essentiel de l'enveloppe budgétaire de cette action est consacré aux subventions versées par le ministère aux associations oeuvrant dans le domaine de l'éducation artistique . Ces dépenses d'intervention dépassent les 28 millions d'euros dans le projet de budget pour 2006.

Ces 28 millions d'euros permettent principalement le financement :

- des actions intégrées dans les dispositifs partenariaux (classes en projet artistique et culturel, ateliers artistiques, classes culturelles) pour 8,8 millions d'euros ;

- des projets fédérateurs réalisés par les services éducatifs de structures artistiques et culturelles pour 7,3 millions d'euros ;

- des actions prévues dans des conventions avec les collectivités territoriales pour 2,5 millions d'euros ;

- de la formation des enseignants et des intervenants, à hauteur de 4,1 millions d'euros ;

- de divers programmes de sensibilisation pour 2,8 millions d'euros, dont « école, collège et lycéens au cinéma ».

En 2006, un million d'euros supplémentaires 8 ( * ) sera alloué à cette action pour la poursuite du plan de relance pour l'éducation artistique et culturelle , en partenariat avec le ministère de l'éducation nationale, plan qui a été annoncé en conseil des ministres le 3 janvier 2005.

2. Les actions conduites par le ministère

Le ministère de la culture s'était fixé quatre séries d'objectifs pour 2004 en matière de politique d'éducation culturelle et artistique.

• La mobilisation des structures artistiques et culturelles

La directive nationale d'orientation pour 2004 avait pour objectif de mobiliser les structures artistiques et culturelles bénéficiant du soutien de l'Etat, en intégrant systématiquement l'éducation artistique dans les missions que leur assignent leurs contrats d'objectifs.

Le ministère indique cependant que cet objectif est encore loi d'être atteint : seules trois directions régionales des affaires culturelles (DRAC) - celles du Nord-Pas-de-Calais, du Languedoc-Roussillon et de Poitou-Charentes - sont en mesure d'affirmer que l'ensemble des structures qu'elles subventionnent consacrent une part de leur budget à l'éducation artistique et culturelle, grâce à une politique systématique de conventionnement avec les collectivités territoriales. Dans les autres régions, l'objectif n'est que partiellement atteint.

La place de l'éducation artistique dans les missions assignées aux institutions culturelles reste donc, dans la plupart des cas, périphérique et le ministère reconnaît que les actions de sensibilisation s'avèrent, dans ce domaine, difficiles.

Les rapports d'inspection des deux ministères en charge de la culture et de l'éducation nationale, rendus en 2003, ont constaté la faible implication des établissements d'enseignement spécialisé dans le partenariat avec les établissements scolaires . Pour contrecarrer cette désaffection, la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales a explicitement assigné à ces établissements d'enseignement spécialisé une mission de participation à l'éducation artistique et culturelle des enfants d'âge scolaire. Une évolution sensible a pu être déjà observée dans certaines régions, et notamment en Bourgogne, en Lorraine, dans le Nord-Pas-de-Calais et en Picardie. Mais dans la majorité des cas, l'implication de ces établissements se limite à l'organisation de classes à horaires aménagés.

Les « projets fédérateurs » qui ont pour objet d'intégrer dans des ensembles plus vastes des dispositifs partenariaux, tels les ateliers, les classes culturelles ou les classes à projet artistique et culturel, reposent sur des jumelages entre institutions culturelles et établissements scolaires, et sur des conventions passées avec des collectivités territoriales , dès lors que ces initiatives ont des prolongements en dehors du temps scolaire. La présence d'artistes dans les établissements scolaires et leur implication personnelle dans les projets s'avèrent en pratique déterminantes, et invitent le ministère à porter une attention particulière aux actions éducatives prenant appui sur des résidences d'artistes , à l'image de ce que pratique le Nord-Pas-de-Calais avec le programme « Artiste rencontre territoire » .

Dans ce domaine, le bilan reste cependant très en deçà des objectifs affichés.

• La formation des intervenants et des enseignants

Le succès de ces opérations suppose au préalable une formation des artistes intervenant en milieu scolaire, ainsi que des enseignants et des personnels de l'éducation nationale chargés d'une mission éducative.

En matière de formation des intervenants , l'effort reste très concentré sur la formation des musiciens intervenants, dispensée par le Centre de formation des musiciens intervenants et dans une moindre mesure sur la formation des artistes plasticiens dispensée par les trois centres de formation de Strasbourg, Bourges et Amiens. Certaines écoles d'architecture conduisent également des actions.

La formation continue des enseignants relève en principe de l'éducation nationale , mais la réduction des moyens financiers que celle-ci leur consacre a incité certaines DRAC à chercher à pallier ce désengagement relatif par le biais de contrats locaux d'éducation artistique, comme dans le Nord-Pas-de-Calais, ou par des jumelages, comme dans les régions Rhône-Alpes ou Pays de Loire, ou encore en prenant appui sur les pôles nationaux ou régionaux de ressources.

• Le partenariat avec les collectivités territoriales

Malgré l'invitation pressante adressée par le ministère aux DRAC de privilégier les projets donnant lieu à des conventions passées avec des collectivités territoriales, la part des financements consacrés à l'éducation artistique et culturelle dans les conventions passées avec ces dernières n'approche ou ne dépasse les 20 % que dans six DRAC sur un total de vingt-cinq.

• Les priorités définies en 2004

Deux priorités ont été définies en 2004 :

- l'une en faveur du patrimoine architectural et urbain, s'appuyant sur les chartes « adopter son patrimoine » ;

- l'autre en faveur de la culture scientifique et technique ; toutefois, les crédits consacrés par l'ensemble des DRAC à cette orientation n'ont représenté en 2004 que 320 000 euros.

3. Les orientations définies par le plan de relance

Le plan de relance pour l'éducation artistique et culturelle, présenté par le ministre chargé de l'éducation nationale et le ministre chargé de la culture, le 3 janvier 2005, comporte quatre orientations principales.

• Le rôle de pilotage et d'impulsion dévolu à l'Etat

Le plan prévoit la mise en place d'un Haut conseil de l'Education artistique et culturelle investi d'une triple mission d'analyse prospective, de préparation et d'évaluation. Il encourage une relance du partenariat entre les services déconcentrés de l'Etat et les collectivités territoriales, à travers la mise en place dans chaque région et chaque académie d'un groupe de pilotage réunissant tous les partenaires concernés. Il privilégie la création de groupements d'intérêt public ou, à l'initiative des collectivités territoriales, celle d'établissements publics de coopération culturelle pour mener à bien ce type de projets.

Il se fixe également pour objectif de faire passer de 74 à 100 le nombre de chartes départementales de pratique chorale et de 20 à 50 celui des chartes « adopter son patrimoine ».

• La formation

Le plan prévoit la mise en place d'accords de coopération entre les DRAC et les instituts universitaires de formation des maîtres.

• La mobilisation des établissements culturels

Le plan vise à renforcer la mobilisation des établissements culturels dans le champ éducatif en subordonnant l'attribution à ceux-ci de subventions de fonctionnement à la production d'une action éducative.

Une aide spécifique sera accordée aux services éducatifs des nouveaux établissements : musée du Quai Branly, Cité nationale de l'histoire et de l'immigration, Cité de l'architecture et du patrimoine.

• La prise en compte des enjeux de société

Le plan prévoit de dispenser aux jeunes une éducation aux oeuvres produites par les industries culturelles.

Les ministres ont également adopté une déclaration commune pour une éducation au respect de la propriété intellectuelle.

4. Les objectifs assignés par les indicateurs du projet de budget

Le projet de budget fixe au programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » un objectif n° 2 de « favoriser l'accès des enfants et des jeunes d'âge scolaire à l'éducation artistique et culturelle en augmentant l'implication des structures artistiques et culturelles subventionnées par le ministère » qu'il assortit de deux indicateurs :

- le premier de ces indicateurs mesure la part des enfants et des jeunes d'âge scolaire ayant bénéficié d'une action éducative d'une structure subventionnée par le ministère. Il se fixe pour objectif de faire passer cette proportion de 10 % en 2004 à 13 % en 2006 et 13,5 % en 2007 ;

- le second mesure le montant moyen investi pour les actions d'éducation artistique par rapport au nombre d'enfants touchés ; il se fixe pour objectif de la maintenir en 2006 et 2007 au niveau actuel de 15,5 euros.

Votre rapporteur se montrera attentif aux résultats de cette politique qui doit augmenter le nombre des enfants bénéficiaires de ces actions tout en maintenant leur coût moyen.

E. LES AUTRES ACTIONS

• Les crédits consacrés à l'action 3 « Soutien aux établissements d'enseignement spécialisé » s'élèvent à 35 millions d'euros en autorisations de programme et 34,7 millions d'euros en crédits de paiement. Destinés à financer les subventions des 36 conservatoires nationaux de région, et des 104 écoles nationales de musique, ils ont vocation à être décentralisés aux départements et aux régions en gestion 2006.

Vos rapporteurs insistent sur la très grande utilité de ces crédits permettant l'activité d'un réseau qui ne se limite pas aux métropoles mais couvre l'ensemble du territoire, et a contribué à la formation, en 2002, de plus de 140 000 élèves.

• Les crédits de l'action 4 « Actions en faveur des publics » s'élèvent à 27,6 millions d'euros en autorisation d'engagement, et 23,8 millions d'euros en crédits de paiement.

Au sein de cette action, les 2,2 millions d'euros d'investissement, qui doivent être complétés à hauteur de 1 million d'euros par le produit des privatisations doivent permettre la réalisation de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration à la Porte Dorée, et du plan de modernisation des données patrimoniales.

Ø Le Premier ministre a annoncé, le 8 juillet 2004 l'ouverture en avril 2007, au Palais de la Porte dorée, de la « Cité nationale de l'histoire de l'immigration » .

La préfiguration de ce musée a été confiée, à compter du 1 er janvier 2005, à un groupement d'intérêt public à caractère culturel, qui dispose de quatre fonctionnaires respectivement responsables de la gestion administrative et financière, des aspects scientifiques, de la politique de diffusion et du développement des publics.

Le projet de budget rappelle que la Cité aura « pour ambition de mettre en avant la diversité et la richesse de la population française en l'abordant sous l'angle de l'Histoire et de l'histoire personnelle des Français venus d'ailleurs » et qu'elle doit en outre rendre accessible à chacun la documentation et les archives disponibles.

Telles sont sans doute les considérations qui ont inspiré son rattachement au programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » plutôt qu'au programme « Patrimoines » et, en particulier, au « Patrimoine des musées de France », auquel elle aurait sans doute pu également être rattachée.

Ø Les 21,3 millions d'euros de dépenses d'intervention sont destinés pour l'essentiel à des associations, pour des actions déconcentrées.

• Les crédits de l'action 5 « Actions spécifiques en faveur de l'aménagement du territoire », d'un montant de 34,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 37,8 millions d'euros de crédits de paiement sont destinés à rééquilibrer l'action du ministère vers des territoires culturellement déficitaires :

- 9,7 millions d'euros sont consacrés à la dotation globale de décentralisation pour la Corse ;

- 28 millions d'euros sont transférés aux autres collectivités.

• Avec une vingtaine de millions d'euros de crédits de paiement et d'autorisations d'engagement, l'action 6 « Action internationale » représente l'enveloppe la plus réduite du programme.

Constitués pour l'essentiel de dépenses d'intervention, ils financent les aides versées à des structures chargées de la promotion et de la diffusion de la culture française dans le monde, et notamment de l'Association française d'action artistique (AFAA), ou à des structures chargées de la diffusion de cultures étrangères en France. C'est également à cette action que sont rattachés les programmes du Conseil de l'Europe ou de l'Union européenne comme MEDIA ou Eurimages.

La modestie relative de ces crédits ne doit pas conduire à sous-estimer l'importance que revêt cette action internationale, et dont a témoigné l'adoption, le 20 octobre dernier par l'UNESCO de la convention sur la protection et la promotion de la diversité culturelle.

• L'action 7 « Fonctions soutien communes aux trois programmes » est dotée de 385 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 390 millions d'euros de crédits de paiement.

Les dépenses en personnel , largement mutualisées entre les programmes, représentent les trois quarts de ses dotations, soit 290 millions d'euros.

Les dépenses de fonctionnement s'élèvent à 77,6 millions d'euros en crédits de paiement et autorisations d'engagement.

Les dépenses d'investissement représentent près de 8 millions d'euros en autorisations d'engagement, et les 11,2 millions d'euros de crédits de paiement doivent être complétés à hauteur de 3,3 millions d'euros par le rattachement d'une partie du produit des privatisations.

Les crédits d'investissement destinés aux DRAC, au titre de leurs dépenses d'intervention , s'élèvent à près de 12 millions d'euros en crédits de paiement et 9,3 millions d'euros en autorisations d'engagement.

* 1 Ces crédits sont regroupés dans le programme 186 « Recherche culturelle et culture scientifique », doté de près de 148 millions d'euros de CP en 2006, dont la subvention de 90 millions d'euros attribué à la Cité des sciences et de l'industrie.

* 2 X. Greffe « La valorisation économique du patrimoine » - La documentation française - Août 2003.

* 3 Les autorisations d'engagement déterminent la limite des engagements de tout ordre (achats, marchés, subventions, interventions) que le ministère pourra prendre au cours de l'année. Alors que les autorisations de programme (AP) ne s'appliquaient qu'aux dépenses en capital, les AE concernent tous les types de dépenses. Les crédits de paiement (CP) représentent le niveau des dépenses annuelles correspondant aux autorisations d'engagement.

* 4 Rapport d'information présenté par M. Jacques Valade, président, au nom de la commission des Affaires culturelles du Sénat à la suite des travaux du groupe de réflexion sur la création culturelle : « Contribution au débat sur la création culturelle en France » - n° 414 (2003-2004).

* 5 Cf. rapport n° 234 de M. Jean-Claude Carle au nom de la commission des affaires culturelles.

* 6 Cf rapport précité.

* 7 « L'orientation tout au long de la vie : qu'en pensent les Franciliens ? », Observatoire de la Formation, de l'Emploi et des Métiers de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris.

* 8 Le fascicule budgétaire (p. 42 et 113) fait apparaître un écart de près de 10 millions d'euros entre les crédits de 2005 (19 millions d'euros) et ceux de 2006 (28 millions d'euros). Cet écart, imputable à des changements de base n'est pas significatif, et les mesures nouvelles inscrites au projet de budget pour 2006 ne s'élèvent en réalité qu'à un million d'euros.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page