III. ASSURER LA RÉALITÉ DE L'ACTIVITÉ DES FONDS DE DOTATION (ARTICLE 48)
A. DES DÉBUTS ENCOURAGEANTS MAIS UN TROP GRAND NOMBRE DE FONDS INACTIFS
1. Des outils récents et d'une grande souplesse
a) Définition des fonds de dotation
(1) Définition générale
Enfin, l'article 48 du présent projet de loi concerne plus particulièrement les fonds de dotation.
Il s'agit de structures relativement récentes, dont le régime est défini par l'article 140 de la loi de modernisation de l'économie (LME) du 4 août 2008 précitée. Selon ces dispositions, les fonds de dotation sont des personnes morales de droit privé à but non lucratif qui reçoivent et gèrent, en les capitalisant, des biens et droits de toute nature qui leur sont apportés à titre gratuit et irrévocable ; ils utilisent les revenus de la capitalisation en vue de la réalisation d'une oeuvre ou d'une mission d'intérêt général ou les redistribuent pour assister une personne morale à but non lucratif dans l'accomplissement de ses oeuvres et de ses missions d'intérêt général.
Le ou les fondateurs peuvent apporter une dotation initiale au fonds.
(2) Leurs ressources et leur utilisation
Aux termes du III de l'article 140 la LME, les ressources d'un fonds de dotation sont constituées des revenus de ses dotations , des produits des activités autorisées par les statuts et des produits des rétributions pour service rendu.
Le fonds peut faire appel à la générosité publique après autorisation administrative . Les dons issus de la générosité publique peuvent être joints à la dotation en capital du fonds de dotation.
En revanche, aucun fonds public ne peut normalement être versé à un fonds de dotation . Cependant, il peut être dérogé à cette interdiction , à titre exceptionnel, pour une oeuvre ou un programme d'actions déterminé, au regard de son importance ou de sa particularité . Ces dérogations sont accordées par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et du budget.
Le fonds de dotation dispose librement de ses ressources dans la limite de son objet social. De plus, ses statuts peuvent fixer les conditions dans lesquelles la dotation en capital peut être consommée .
b) Un régime fiscal avantageux
Les fonds de dotation bénéficient de plusieurs types d'avantages fiscaux.
Pour eux-mêmes, ces fonds sont exonérés d'impôt sur les sociétés (article 206 du code général des impôts).
De plus, aux termes des articles 200 et 238 bis du même code, leurs donateurs (personnes physiques ou entreprises) bénéficient d'une réduction d'impôt 8 ( * ) , soumise à deux conditions non cumulatives relatives au fonds de dotation concerné. Celui-ci doit :
- avoir un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique , notamment à travers les souscriptions ouvertes pour financer l'achat d'objets ou d'oeuvres d'art destinés à rejoindre les collections d'un musée de France accessibles au public, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ;
- ou être fondé sur une gestion désintéressée, et reverser les revenus tirés des dons et versements à des organismes tels que les fondations, les associations reconnues d'utilité publique, les fondations universitaires, les fondations partenariales, les oeuvres ou organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, les établissements d'enseignement supérieur ou d'enseignement artistique publics ou privés, d'intérêt général, à but non lucratif, les organismes agréés dont l'objet est de verser des aides financières en faveur des petites et moyennes entreprises, les associations culturelles et de bienfaisance, ainsi que des établissements publics des cultes reconnus d'Alsace-Moselle, les organismes publics ou privés dont la gestion est désintéressée et qui ont pour activité principale la présentation au public d'oeuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques, cinématographiques et de cirque ou l'organisation d'expositions d'art contemporain, ou à la Fondation du Patrimoine.
c) Les principales différences entre les fondations et les fonds de dotation
Les principales différences entre les « classiques » fondations reconnues d'utilité publique (FRUP) et les fonds de dotation sont les suivantes :
- la création d'un fonds de dotation par une ou plusieurs personnes physique ou morales s'effectue au moyen d'une simple déclaration en préfecture, sans obligation de dotation initiale, pour une durée déterminée ou indéterminée . A l'inverse, le Conseil d'Etat exige des FRUP une dotation minimale. D'autre part, les ressources d'une dotation ne doivent pas être constituées d'actifs à risque, ni même d'actions ou d'autres parts sociales ;
- la capacité des personnes morales de droit public à créer une FRUP, en dehors d'une autorisation législative, est incertaine, ce qui n'est pas le cas pour un fonds de dotation ;
- les FRUP doivent obtenir la reconnaissance d'utilité publique (par décret) à l'issue d'une procédure longue et complexe. Une telle obligation n'incombe pas aux fonds de dotation ;
- les statuts d'un fonds de dotation déterminent librement la composition de son conseil d'administration ; ses fondateurs peuvent donc le contrôler . En revanche, les statuts d'une FRUP doivent suivre un modèle contraint et son conseil d'administration doit garantir son indépendance à l'égard des fondateurs ; trois collèges de membres sont obligatoires : fondateurs, membres de droit (à défaut de commissaire du Gouvernement) et personnalités qualifiées ;
- un commissaire aux comptes certifie les comptes annuels de toutes les FRUP alors que seul un contrôle d'un commissaire aux comptes serait imposé aux fonds de dotation dont les ressources annuelles dépassent 10 000 euros ;
- la FRUP est soumise à une tutelle administrative stricte , du fait de sa personnalité juridique liée à un décret lui accordant la RUP, de la soumission de ses statuts à l'approbation du gouvernement et de la soumission à approbation administrative de son droit à recevoir des legs ou des libéralités (article 910 du code civil). De plus, elle est soumise à une surveillance administrative de la part du ministère de l'intérieur et à un contrôle de la Cour des comptes si elle fait appel à la générosité publique. Le fonds de dotation est soumis à un contrôle plus léger puisqu'il doit remettre à l'autorité administrative un rapport d'activité annuel (auquel sont joints le rapport du commissaire aux comptes et les comptes annuels), ainsi que « tous documents utiles » (à la demande de l'autorité administrative, dans le cadre du contrôle de la régularité du fonctionnement du fonds de dotation). Cependant, il est également soumis à un contrôle de la Cour des comptes s'il fait appel à la générosité publique.
* 8 De 66 % du montant des dons dans la limite de 20 % du revenu imposable pour les personnes physiques et de 60 % du montant des versements, dans la limite de 5 pour mille du chiffre d'affaires pour les entreprises.