II. LA NÉCESSAIRE POURSUITE DU MOUVEMENT DE MUTUALISATION

A. LE RATTACHEMENT DE LA MISSION « SÉCURITÉ CIVILE » À LA MISSION BUDGÉTAIRE « SÉCURITÉS » JUSTIFIÉ PAR UN OBJECTIF DE MUTUALISATION DES MOYENS ENTRE LES SERVICES DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR

Après le rattachement du programme 207 « sécurité et éducation routières », pour le projet de loi de finances pour l'année 2013, le projet de loi de finances pour l'année 2014 agrandit le périmètre de la mission « sécurité », rebaptisée « sécurités ».

Ce rapprochement au sein d'une même mission de l'ensemble des politiques du ministère de l'intérieur consacrées à la protection des populations et à la gestion des crises est justifié par la nécessité de rénover les coopérations entre les différents partenaires afin de permettre une action plus efficace, passant notamment par des mutualisations entre des services dépendant tous du ministère de l'intérieur.

En outre, la mission « sécurité civile » représentait une des trois plus petites missions du budget. Elle était composée de deux programmes : les programmes 161 « intervention des services opérationnels » et 128 « coordination des moyens de secours ».

Cette mission devient donc le programme 161 au sein de la mission « sécurités » . Il retrace l'action et les moyens mis en oeuvre en matière de sécurité civile .

Votre rapporteur renvoie au rapport de Mme Catherine Troendlé pour la présentation de ce programme.

B. LA MUTUALISATION RÉUSSIE DE PLUSIEURS SERVICES

1. Des mutualisations réussies

- La coopération internationale

C'est en matière de coopération internationale que les services de police et de gendarmerie ont fait l'objet d'un premier rapprochement, au sein de la direction de la coopération internationale (DCI). En effet, cette direction, créée le 1 er septembre 2010 et opérationnelle depuis le 1 er janvier 2011, remplace le service de coopération technique internationale de la police et la sous-direction de la coopération internationale de la gendarmerie nationale.

La DCI est une direction de la DGPN mais elle est placée sous l'autorité conjointe des deux directeurs généraux pour l'exercice de ses missions.

Cette direction s'appuie sur un réseau d'attachés de sécurité intérieure implantés dans les ambassades de 96 pays et couvrant au total 158 pays 17 ( * ) .

La DCI a un rôle d'information et de coopération , pour lutter contre les différentes formes de criminalité internationale pouvant affecter la sécurité de la France.

- La mutualisation de marchés nationaux

Votre rapporteur observe que la mutualisation des marchés nationaux entre police nationale et gendarmerie nationale s'est fortement accentuée.

Comme le constate notre collègue Jean-Vincent Placé, dans son rapport précité, « aujourd'hui, la mutualisation systématique des achats pour tous les nouveaux marchés nationaux est la règle, sauf lorsque le matériel répond à un besoin opérationnel non partagé (comme par exemple s'agissant des matériels militaires pour les opérations extérieures (OPEX) de la gendarmerie). » 18 ( * )

Actuellement, 67 marchés sont en cours d'exécution, concernant les domaines de l'habillement, du soutien logistique mais aussi la police technique et scientifique, comme les kits de prélèvements buccaux, l'analyse des prélèvements biologiques, les systèmes d'information et de communication, l'équipement photo et vidéo, l'armement et les moyens techniques.

2. Le bilan positif de l'expérimentation de la mutualisation de la police technique et scientifique dans les départements

Une expérimentation de mutualisation des services de la police technique et scientifiques des forces de la police nationale et de la gendarmerie nationale est menée dans le département de la Creuse depuis le 1 er janvier 2013.

Une « convention d'assistance mutuelle » a été signée par le directeur départemental de la sécurité publique, le commandant du groupement de gendarmerie départementale, le préfet et le procureur de la République.

Le principe de la convention est le suivant : la gendarmerie prend en charge tous les actes de police technique et scientifique, pour le compte des deux forces, sur son plateau technique. Ce plateau technique répond aux normes imposées par la décision-cadre du conseil de l'Union européenne en date du 30 novembre 2009.

Les personnels effectuant les constatations techniques et les opérations de recherche et de recueil des traces et indices sur les scènes d'infraction sont indifféremment des policiers et des gendarmes, sans conséquence sur le service qui sera ensuite chargé de l'enquête.

En contrepartie, les gendarmes peuvent désormais alimenter le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) 19 ( * ) en utilisant la borne du commissariat central.

En effet, si le FAED est un fichier commun à la police et à la gendarmerie, les bornes permettant d'alimenter la base commune sont distinctes et ne peuvent être utilisées par l'autre force pour transmettre les traces vers leurs sites centraux respectifs, comme l'a souligné la Cour des comptes dans son rapport précité consacré à la mutualisation entre la police et la gendarmerie nationales d'octobre 2011.

En utilisant la borne du commissariat central, les gendarmes peuvent obtenir beaucoup plus rapidement du FAED d'éventuels rapprochements.

Les résultats disponibles montrent, d'une part, que le taux d'activité du plateau de police technique et scientifique a été supérieur aux moyennes nationales et que près de 428 fiches ont été insérées par les gendarmes dans le fichier FAED.

Cette mutualisation a permis une utilisation plus rationnelle des moyens, à coût constant : la gendarmerie utilise une borne « police » d'un coût de 15 000 euros, qui est désormais mieux rentabilisée, et la police recourt à un plateau technique « gendarmerie » dont l'équipement est évalué à 50 000 euros.

Au regard des résultats très positifs de cette expérience, elle a été étendue au cours du second semestre 2013 à trois autres départements , le Gers, le Lot et la Lozère. Enfin, six autres département seront concernés, à compter du 1 er janvier 2014 .

Comme votre rapporteur le rappelait dans son avis budgétaire pour l'année 2013, il est de bonne gestion que les gendarmes aient accès aux bornes de prise d'empreinte digitales de la police nationale, en raison du nombre beaucoup plus important de bornes « police ». Cette opération de mutualisation est donc à l'évidence une mesure utile.

3. L'exemple du ST(SI)², une expérience de rapprochement réussie

Dans le cadre de l'avis budgétaire pour l'année 2014, votre rapporteur a visité le service des technologies et des systèmes d'information de la sécurité intérieure ST(SI)².

Le service des technologies et des systèmes d'information de la sécurité intérieure - ST(SI)² - a été mis en place le 1 er septembre 2010 pour contribuer à la définition de l'action et de la stratégie du ministère de l'intérieur en matière de systèmes d'information et de télécommunications et mettre en oeuvre ces derniers dans le domaine de la sécurité intérieure.

Le ST(SI)² a été formé en regroupant des services des deux forces : du côté de la DGPN, le service des technologies de la sécurité intérieure (STSI), à l'exception de certaines entités, et du côté de la DGGN, la sous-direction des télécommunications et de l'informatique (SDTI). D'autres services de la DGGN traitant des systèmes d'information et de communication ne sont pas intégrés au sein du ST(SI)² mais lui sont reliés fonctionnellement.

Source : Cour des comptes,
rapport consacré à la mutualisation entre la police et la gendarmerie nationales d'octobre 2011, p. 22.

Ce service est sous l'autorité conjointe du directeur général de la police nationale et du directeur général de la gendarmerie nationale. Le directeur du ST(SI) 2 a souligné l'efficacité et la souplesse de cette co-tutelle.

Le principe du ST(SI) 2 est de rassembler au sein d'un service unique les structures de conception des systèmes d'information et de communication de la gendarmerie et de la police nationales. Ce rapprochement doit permettre d'accentuer la convergence des systèmes des deux forces .

Le ST(SI) 2 est notamment chargé de conduire des projets en matière de systèmes d'information et de communication pour les deux forces et de coordonner les services de police et de gendarmerie intervenant en matière de systèmes d'information et de communication.

Le ST(SI)² assure enfin une fonction d'innovation pour l'ensemble des services de sécurité intérieure.

Ainsi, depuis avril 2013 , une base de données unique, le fichier traitement d'antécédents judiciaires (TAJ) , rassemble les éléments des deux fichiers JUDEX (gendarmerie nationale) et STIC (Police nationale).

Le ST(SI) 2 a assuré la direction de ce projet et a permis l'intégration dans le fichier traitement d'antécédents judiciaires (TAJ) des 60 millions de procédures et des 4 millions de photographies contenus dans les deux fichiers initiaux. Votre rapporteur observe que ce fichier sera alimenté par les deux logiciels de rédaction de procédure de la gendarmerie nationale et de la police nationale - par ailleurs incompatibles entre eux - et qu'un lien sera créé avec le logiciel CASSIOPEE du ministère de la justice, permettant de mettre à jour les données d'antécédents par effacement ou ajout d'une mention selon la suite judiciaire décidée . Ce lien devrait être actif en 2014 .

Votre rapporteur remarque que la CNIL a considéré que cette interconnexion répondait aux inquiétudes qu'elle a pu exprimer à propos de ce fichier 20 ( * ) .

Au-delà du développement de ce programme ambitieux, qui contribue aussi à rapprocher police nationale et gendarmerie nationale, votre rapporteur observe que le ST(SI) 2 a été l'interface pour mener d'autres projets informatiques, participant ainsi au mouvement de mutualisation des moyens entre les deux forces.

À cet égard, lors de son déplacement au siège du ST(SI) 2 , un logiciel commun aux deux forces, entièrement développé par les services, le Fichier des Objets et véhicules signalés (FOVeS), ainsi qu'un logiciel de cartographie - développé en interne en seulement 4 mois -, ont été présentés à votre rapporteur, qui observe qu'à terme, les services de la sécurité civile devraient pouvoir également utiliser ce dernier logiciel.


* 17 Source : Cour des comptes, rapport consacré à la mutualisation entre la police et la gendarmerie nationales d'octobre 2011, p. 141.

* 18 http://www.senat.fr/rap/r13-091/r13-0911.pdf p. 124.

* 19 Ce fichier, créé en 1987, a pour objet de répertorier les empreintes digitales des individus mis en cause lors d'enquêtes judiciaires ainsi que les empreintes prélevées mais non encore identifiées.

* 20 Conclusions du contrôle des fichiers d'antécédents du ministère de l'intérieur, 13 juin 2013.

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