B. LA CRÉATION BIENVENUE DE L'AGENCE NATIONALE DE SANTE PUBLIQUE
A son article 42, le projet de loi relatif à la santé, dont l'adoption définitive devrait intervenir avant la fin de l'année, prévoit la création d'une agence nationale de santé publique résultant de la fusion de trois des huit opérateurs relevant du programme 204. Cet établissement a en effet vocation à reprendre l'ensemble des compétences et des pouvoirs exercés par l'InVs, l'Inpes et l'Eprus, ainsi que leurs biens, personnels, droits et obligations.
Figure n° 5 : Les trois opérateurs réunis au sein de l'agence nationale de santé publique
Opérateur |
Missions |
Budget |
Institut national
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Créé par la loi du 1 er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et au contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme , il a pour mission la surveillance et l'observation permanentes de l'état de santé de la population, la veille et la vigilance sanitaires, l'alerte sanitaire et la contribution à la gestion des situations de crise sanitaire. Son siège est à Saint-Maurice (94). |
Son budget (environ 60 M €) est issu essentiellement de la subvention de l'État inscrite à l'action 11 du programme 204. |
Institut national
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Institué par la loi relative à la politique de santé publique de 2004 , il met en oeuvre des programmes de santé publique et d'éducation à la santé. Il peut participer à la gestion des situations urgentes ou exception-nelles ayant des conséquences sanitaires collectives, notamment par la diffusion de messages sanitaires. Son siège est à Saint-Denis (93). |
Son budget (environ 76 M €) est constitué à hauteur de 25 % d'une subvention de l'État qui relève de l'action 12 du programme 204 et à hauteur de 63 % d'une dotation de l'assurance maladie. Ses autres produits sont issus de recettes fiscales, d'une subvention de la Cnav et de ressources propres. |
Etablissement
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Créé par la loi de 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur , il assure la gestion des moyens de lutte contre les menaces graves, tant du point de vue humain (réserve sanitaire) qu'au plan matériel (produits de santé). Son siège est à La Plaine-Saint-Denis (93) |
Son budget est d'environ 42 M €. La constitution des stocks stratégiques est financée à parts égales par la subvention de l'État et par la dotation de l'assurance maladie. La réserve sanitaire est financée intégralement par l'État. La subvention relève de l'action 16 du programme 204. |
La nouvelle agence se verra également transférer l'activité et les personnels du groupement d'intérêt public (Gip) « Adalis » , qui assure le service national d'information et de prévention à distance sur les drogues et les dépendances (Drogue info service, Alcool info service). Son budget, qui s'élève à 3,2 millions d'euros, est aujourd'hui intégralement couvert par une subvention versée par l'Inpes. Il compte 36 ETPT.
Les travaux préparatoires à l'installation du nouvel établissement ont été menés à compter de septembre 2014 par François Bourdillon, directeur général de l'InVS et directeur par intérim de l'Inpes. Le rapport de préfiguration, qui rappelle le contexte institutionnel, présente les modalités d'organisation du futur opérateur et identifie les objectifs et les enjeux liés à ce projet, a été rendu à la ministre le 22 avril et rendu public le 2 juin 2015 suivant 1 ( * ) . Il définit trois phases successives dans le déroulement du regroupement : le diagnostic de l'existant d'octobre à décembre 2014, la définition des principes organisationnels de janvier à mars 2015, et la mise en oeuvre de la convergence d'avril à décembre 2015 pour une création effective au 1 er janvier 2016.
Il est proposé de faire reposer l'agence nationale de santé publique sur quatre conseils :
- le conseil d'administration, qui rassemblerait les représentants institutionnels et associatifs, avec un partage de voix équilibré entre l'État, l'assurance maladie et la société civile ;
- le conseil scientifique, qui aurait pour mission d'assurer la cohérence de la politique scientifique ;
- le comité d'éthique et de déontologie, chargé de veiller à ce que les missions de la nouvelle agence soient exercées dans le respect des principes déontologiques et éthiques applicables au domaine de la santé ;
- et le comité d'orientation et de dialogue, qui devrait permettre d'éclairer la nouvelle agence sur les attentes et les propositions de la société civile.
Le schéma ci-après décrit de manière synthétique l'organisation fonctionnelle de la nouvelle agence.
Figure n° 6 : Projet de schéma fonctionnel de la nouvelle agence
Source : Rapport de préfiguration de l'agence nationale de santé publique, page 173
Le futur établissement assurera ainsi une triple mission de surveillance, de prévention et d'alerte et de réponse aux urgences sanitaires. Votre rapporteure est convaincue que ce regroupement très attendu permettra de bénéficier d'une plus grande efficience et d'une meilleure visibilité nationale et internationale.
Dans un premier temps, le regroupement des 585 agents et l'harmonisation des systèmes d'information induiront des surcoûts inévitables. Selon les informations transmises par le ministère de la santé, des affaires sociales et des droits des femmes, les gains d'efficience à attendre du regroupement, du fait notamment de la mutualisation des fonctions support, se produiront ensuite progressivement à partir de l'exercice 2017.
L'agence nationale de santé publique sera implantée sur un site unique, à Saint Maurice dans le Val de Marne, où siège actuellement l'InVS. Les aménagements immobiliers rendus nécessaires par le regroupement avec l'Inpes et l'Eprus devraient pouvoir être amortis en l'espace de cinq ou six ans.
Dans ce contexte, le projet de loi de finances pour 2016 exonère l'ensemble des agences fusionnées de la contraction des plafonds d'emploi prévus pour les autres opérateurs. La participation à l'effort de maîtrise des dépenses publiques est quant à elle limitée à 0,6 % du montant total des subventions accordées en 2015. Au total, les trois agences bénéficieront d'une subvention pour charges de service public de 88 millions d'euros et d'un effectif sous plafond de 585 ETPT.
Figure n° 7 : Niveaux des subventions et des effectifs des agences fusionnées au sein de la nouvelle agence en 2015 et 2016
Subventions (en M €) |
LFI 2015 |
PLF 2016 |
Effectifs
|
LFI 2015 |
PLF 2016 |
InVS |
54,3 |
54,1 |
InVS |
392 |
392 |
Inpes + Adalis |
24,0 |
23,8 |
Inpes |
127 |
127 |
Adalis |
36 |
36 |
|||
Eprus |
10,7 |
10,6 |
Eprus |
30 |
30 |
Total |
89,0 |
88,4 |
Total |
585 |
585 |
Source : réponses au questionnaire budgétaire de la commission des affaires sociales.
Dans l'exercice de ses missions, l'établissement devra respecter un principe de subsidiarité par rapport aux missions dévolues aux agences régionales de santé (ARS). Pour la bonne articulation de ces acteurs, votre rapporteure estime que la clarification du statut des personnels des cellules d'intervention en région (Cire), dont certains dépendaient de l'InVS et d'autres des ARS, est bienvenue. Ces effectifs relevaient jusqu'à présent du programme 123 « Conduite et soutien des politiques sanitaires » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Ils seront désormais rattachés dans leur intégralité à l'agence nationale de santé publique. Cette opération se traduit par un transfert de 21 ETPT à l'InVS en 2016.
Votre rapporteure se félicite des conditions de mise en place de la nouvelle agence, une fusion à moyens constants étant la seule raisonnablement envisageable pour ne pas fragiliser la mise en oeuvre du projet dans un contexte où d'importants efforts ont déjà réalisés par les trois opérateurs lors des derniers exercices budgétaires. Le rapport de préfiguration indique que les sensibles réductions d'emplois intervenues au cours des cinq dernières années ont nécessité « des retraits d'activités scientifiques en plus des gains réels opérés sur les fonctions support. Le nouvel établissement porte donc des ambitions et des espoirs pour les personnes, mais également, de fait, des doutes et des interrogations » 2 ( * ) .
Entre 2010 et 2015, le montant total des subventions allouées aux trois opérateurs a en effet diminué de 80,2 millions d'euros au total, soit une réduction de 23 %, tandis que leurs plafonds d'emplois étaient réduits de 65 ETP. La contraction des moyens a tout particulièrement affecté l'Eprus. Au cours des cinq dernières années :
- l'Inpes a connu une baisse d'un tiers de son budget (de 119 à 77,5 millions d'euros) et de 14 % de ses effectifs autorisés (de 147 à 127 ETP) ;
- l'InVS une baisse de 10 % de son budget (ramené de 64,5 à 57,5 millions d'euros) et de 9 % de ses effectifs autorisés (passés de 432 à 392 ETP) ;
- et l'Eprus une baisse de plus de 40 % (ramené de 73,6 à 41,7 millions d'euros) et de 14 % des effectifs autorisés (de 35 à 30 ETP).
De fait, les budgets de l'Inpes et de l'InVS n'ont pu être présentés en équilibre ni en 2014, ni en 2015, ce qui a conduit à des prélèvements sur les fonds de roulement des deux opérateurs.
La stabilisation des moyens est par ailleurs rendue nécessaire par les adaptations de l'organisation interne qu'appellera à compter du 1 er janvier la mise en oeuvre des nouvelles règles de gestion financière liées à la gestion budgétaire et comptable publique (GBCP).
Enfin, compte tenu de la spécificité de ses missions, la préservation des moyens de l'Eprus paraît aujourd'hui essentielle afin de permettre une mobilisation rapide et à la hauteur des enjeux en cas d'alerte.
* 1 Rapport de préfiguration, Agence nationale de santé publique, à l'attention de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, par François Bourdillon, directeur général de l'InVS et de l'Inpes, remis le 22 avril 2015.
* 2 Rapport de préfiguration de l'agence nationale de santé publique, page 160.