B. DE LA DÉFINITION DES OBJECTIFS À LEUR RÉALISATION : ANALYSE ET ÉVALUATION DES ACTIONS ENTREPRISES
1. Concernant le pilier « développement de l'offre technologique »
(1) Les outils mis en place
Le soutien aux projets d'innovation ou de développement industriel des projets portés individuels ou collaboratifs dans les sept domaines identifiés comme prioritaires passe en grande partie par la mobilisation des dispositifs généralistes de soutien à l'innovation, comme le crédit d'impôt recherche ou les aides directes à l'innovation distribuées par Bpifrance.
Cependant, par rapport à ces outils généralistes, des dispositifs spécifiquement fléchés vers les domaines prioritaires du projet industrie du futur ont également été mis en place en mobilisant des crédits du Fonds unique interministériel (FUI) ou du programme des investissements d'avenir (PIA), notamment sur la ligne « Projets industriels d'avenir » (PIAVE) du PIA. Un appel à projets sur le thème « Industrie du Futur » a été lancé entre octobre 2015 et juin 2016, avec une dotation de 100 M€ (sur les 305 M€ dont est dotée au total l'action PIAVE).
Selon les chiffres de la DGE, plus de 240 projets de R&D ont été soutenus en mobilisant le FUI et le PIA sur les thématiques liées au développement de l'offre technologique pour l'industrie du futur.
L'exemple du FactoryLab Parmi les projets retenus, on peut citer la plateforme FACTORYLAB sur le campus Paris Saclay, portée par le CEA List, CETIM, Arts et Métiers, PSA, Dassault Systèmes, Naval Group, Safran. Conçu comme une sorte d' « usine à projets », le FactoryLab accueille des projets de courte durée (6 mois à 18 mois) qui font intervenir trois catégories d'acteurs : - des industriels utilisateurs finaux, qui précisent leurs besoins dans une feuille de route partagée au sein de la plateforme FactoryLab ; - des industriels intégrateurs et fournisseurs technologiques mettant à disposition les briques matérielles et logicielles matures, nécessaires à la mise en oeuvre des projets ; - des laboratoires de recherche technologique, apportant des briques technologiques innovantes pour soutenir l'évolution technologique chez les fournisseurs et intégrateurs. |
(2) Évaluation
Il semble à votre rapporteur pour avis que les outils de soutien au développement de solutions technologiques pour l'industrie du futur sont adaptés à leur objet et que le volume des enveloppes financières est satisfaisant. Les outils ciblés « industrie du futur » s'insèrent en effet dans un dispositif plus général de soutien public à l'innovation industrielle qui mobilise des sommes considérables. Pour mémoire, selon les estimations de la Commission nationale d'évaluation des politiques d'innovation, l'État dépense déjà 8,5 Md€ pour financer l'innovation, dont 2,2 Md€ hors dépenses fiscales 20 ( * ) .
Votre rapporteur estime que l'amélioration du soutien public aux solutions technologiques pour l'industrie du futur passe maintenant par une meilleure articulation entre deux aspects de la politique industrielle qui ont tendance à s'ignorer : le soutien à l'innovation et la commande publique. Les pouvoirs publics, et l'État en particulier, devraient davantage mobiliser le levier de la commande publique pour pousser l'offre de solutions pour l'industrie 4.0 proposées par les PME installées en France. Il y a en effet une schizophrénie de l'État, qui d'un côté finance de développement de PME technologiques françaises et, de l'autre, achète trop souvent des solutions vendues par des grands groupes internationaux. Comment nos PME technologiques peuvent-elles prospérer si elles ne remportent pas les marchés publics ? Le droit de la commande publique permet d'utiliser des critères comme l'empreinte CO 2 . Il faut y recourir !
La fabrication additive : état des lieux La fabrication additive désigne l'ensemble de procédés de fabrication d'un objet à partir d'un fichier informatique, qui permet de passer directement de la pièce virtuelle à la pièce fabriquée par ajout de couches successives de matériaux. Les avantages de ce procédé sont multiples : allègement des pièces, grande liberté dans le design, niveau de complexité géométrique supérieur, personnalisation des produits, réduction des stocks par la fabrication à la demande et raccourcissement des cycles de développement de produits. La fabrication additive représente un marché mondial (équipements, consommables et services associés) de 4,7 Md€ en 2015 en croissance de 20 % par an. Ce marché est dominé par deux sociétés américaines, 3D Systems et Stratasys, et une société allemande, EOS. En Europe, des sociétés importantes se sont diversifiées sur cette activité et occupent certains segments d'applications : le Suédois Arcam, le Britannique Renishaw et les Allemands Trumpf et Voxeljet. S'agissant de la diffusion et de l'utilisation d'équipements de fabrication additive, les États-Unis représentent 40 % du parc de machines industrielles installées contre 29 % en Europe et 26 % en Asie-pacifique. La France ne dispose que de 3 % du parc (vs 9 % du parc pour l'Allemagne, le Japon et la Chine). La France dispose de fabricants d'équipements d'impression 3D, mais aussi de sociétés d'ingénierie qui réalisent des prestations de prototypage rapide ou accompagnent les entreprises utilisatrices pour la mise au point de leurs procédés de production. On compte ainsi parmi les fabricants français de machines d'impression 3D : - le Groupe Gorgé, qui s'est lancé en 2013 dans le domaine de la fabrication additive en faisant l'acquisition de la société Phidias Technologies, rebaptisée Prodways ; - les groupes Michelin et Fives, qui ont créé une coentreprise, Fives Michelin Additive Solutions, pour développer et commercialiser à l'échelle mondiale des machines et des ateliers de production industriels utilisant la fabrication additive métallique ; - la PME BeAM, qui est un constructeur de machines de fabrication additive par dépôt de poudres métalliques ; - la PME Pollen AM qui propose une machine innovante capable d'imprimer plusieurs matériaux en même temps. Dans la catégorie des sociétés qui réalisent des prestations de prototypage rapide ou qui accompagnent les entreprises industrielles, on peut citer : - la société « Volum-e » qui a conclu un partenariat avec le groupe Safran ; - la société Poly-Shape, leader sur le marché des implants dentaires, qui a créé récemment une filiale commune avec Lisi Aérospace dans la conception et la réalisation de pièces mécaniques aéronautiques et spatiales en 3D ; - une myriade de petites sociétés telles qu'Erpro, Cresilas, 3D Prod, 3A, Audeve 3D, CADindus, Exceltec, dont le savoir-faire peut intéresser les grands acteurs industriels. |
Les pouvoirs publics accompagnent l'émergence d'une filière française à travers les dispositifs d'aide du PIA, qui ont d'ores et déjà soutenu à hauteur de 52 M€ au total des plusieurs projets de R&D (FAIR, AMANDE, SOFIA). Ils cherchent également à encourager l'utilisation de l'impression 3D. Pour ce faire, les entreprises peuvent utiliser les outils financiers génériques destinés à favoriser le déploiement de l'industrie du futur (prêts robotiques, prêts « industrie du futur », dispositifs temporaires de suramortissement (voir infra pour ces divers dispositifs). Par ailleurs, la DGE a lancé le programme 3D Start PME qui prend en charge la sensibilisation, l'identification des besoins propres à l'entreprise et va jusqu'à la rédaction d'un cahier des charges pour une consultation et au dépouillement des offres reçues. Cette action devrait être opérationnelle en 2018. |
2. Concernant le pilier « accompagnement des entreprises » dans le déploiement de l'industrie du futur
a) Un volet « sensibilisation et aide au diagnostic et à la conduite du changement »
(1) Les outils de l'accompagnement
Avant d'investir dans des technologies, les PME et les ETI doivent se familiariser avec les possibilités et les outils de l'industrie 4.0. Pour les y aider, l'Alliance Industrie du futur dispose de deux grands types d'outils :
- des outils « promotionnels » , comme la labellisation de plus de 30 vitrines industrielles, les « Caravanes de l'industrie du futur » et un grand salon Industrie du Futur prévu pour mars 2018. Il est à noter que, la marque « French Fab », lancée par le Gouvernement, offrira bientôt une bannière commune à l'offre industrielle française qui, à la fois, mobilisera plus efficacement les industriels opérant en France et leur donnera une meilleure visibilité à l'international en exploitant les atouts de la marque « France » ;
- des outils de diagnostic . Des programmes d'accompagnement ont été mis en place depuis mai 2015 dans la totalité des régions. Les chefs d'entreprise qui le souhaitent peuvent bénéficier d'un audit de leur entreprise et mieux cerner les transformations à opérer sur leur outil de production et sur leur organisation (diagnostic généralement cofinancé par les régions à hauteur de 50 %). Il permet aux chefs d'entreprise de mieux connaître les technologies disponibles, d'identifier les verrous (humain, organisationnel) limitant l'accès à ces innovations, d'intégrer les nouveaux concepts dans une vision « chaîne de valeur » et de réinventer leur modèle économique. Sur la base de ces diagnostics, l'Alliance réalise un accompagnement personnalisé dans la conduite du changement en mobilisant les 500 experts de son réseau d'adhérents. À la fin de l'année 2017, c'est plus de 5 000 entreprises qui se seront engagées dans ces actions d'accompagnement vers l'industrie du futur.
(2) Évaluation
Sur le volet « aide au diagnostic et à la conduite du changement », votre rapporteur pour avis souhaite faire plusieurs remarques :
- d'abord, il faut saluer le travail considérable accompli en moins de trois ans avec des moyens limités. L'alliance industrie du futur fonctionne en effet avec 350 000 euros de dotations publiques annuelles ;
- ensuite, il est nécessaire d' élargir ce travail d'accompagnement . Fonctionnant sur une logique d'appels à projet, les outils de diagnostic et d'accompagnement des PME touchent en effet seulement les entreprises déjà conscientes de la nécessité de moderniser leur outil. Le défi est donc de créer des structures capables d'aller chercher les entreprises les plus éloignées de l'industrie du futur. L'adhésion récente de CCI France à l'Alliance industrie du futur pourrait permettre d'utiliser le réseau des chambres pour toucher aussi ce public d'entreprises ;
- toutefois, il faut éviter de multiplier les opérateurs et les points d'entrée dans le dispositif. On a réussi à créer un outil relativement simple et lisible. L'intervention des chambres de commerce doit apporter un plus et non constituer un facteur de complexité ;
- toutes les filières industrielles ne sont pas également mobilisées sur les enjeux d'industrie du futur. La filière agroalimentaire commence à accumuler du retard. L'adhésion prochaine de l'ANIA à l'Alliance industrie du futur marque sans doute une prise de conscience ;
- toutes les régions ne sont pas non plus également mobilisées. L'Aquitaine et le Grand Est sont en pointe. Mais il est important que la mobilisation soit générale ;
- enfin, il faut qu'on puisse disposer d'une évaluation de l'efficacité de ces actions d'accompagnement. Les entreprises auditées et accompagnées réalisent-elles ensuite les investissements et les changements organisationnels leur permettant de passer à l'industrie du futur ? On n'a pas de réponse claire à cette question.
b) Un volet « soutien financier »
(1) L'utilisation de deux types d'outils : les prêts et la dépense fiscale
(a) Des prêts spécifiques financés à partir du PIA
• Dès 2015, des
prêts
à la robotisation
ont été proposés par
BpiFrance avec l'objectif de distribuer jusqu'à 300 M€ de
prêts. Au 30 septembre 2017, le dispositif a permis d'accompagner
l'investissement de 435 entreprises (dont 386 PME) pour environ 274 M€ de
prêts accordés.
Le coût total pour l'État (imputé sur les crédits du PIA) se décompose en trois enveloppes :
- une dotation de 25, M € versée à Bpifrance pour bonifier les prêts ;
- une dotation de 34,3 M€ versée à Bpifrance en vue d'un abondement du fonds de garantie « prêt robotique » ;
- une dotation de 300 M€ sous forme d'un prêt octroyé à Bpifrance pour assurer la liquidité du dispositif.
• Le nouveau
prêt
« industrie du futur »
, également
opéré par BpiFrance et financé à partir du PIA,
prend le relais de ce dispositif depuis la fin 2016. Il permettra de distribuer
jusqu'à 1 Md€ de prêts pour un coût de 100 M€ par
abondement au fonds de garantie des prêts de Bpifrance. D'une
durée de 7 ans, y compris un différé d'amortissement du
capital de 2 ans, ce prêt ne requiert aucune sûreté sur les
actifs de l'entreprise, ni sur le patrimoine du dirigeant.
(b) Des dispositifs de suramortissement
• Entre avril 2015 et avril 2017, la
déduction exceptionnelle en faveur de l'investissement
productif
a permis de déduire du résultat imposable,
linéairement sur la durée d'amortissement, 40 % du prix de
revient de ce bien. Ce « suramortissement », qui
techniquement n'a rien d'un amortissement, était mobilisable en
même temps que l'amortissement pratiqué par ailleurs dans les
conditions de droit commun.
•
L'amortissement exceptionnel des
robots industriels des PME
a rendu possible un amortissement
accéléré sur 24 mois pour les achats de robots
industriels. Le dispositif était mobilisable pour les robots acquis ou
créés par les PME entre le 1er octobre 2013 et le
31 décembre 2016, dans le respect du régime européen
d'exemption par catégorie « de minimis ».
(2) Évaluation
Les outils d'accompagnement financier au déploiement de l'industrie du futur ont manifestement joué un rôle positif dans la modernisation de l'outil industriel. En 3 ans, on observe par exemple une multiplication par deux du nombre annuel de robots achetés en France. Cette forte progression a permis notamment au secteur automobile français de passer devant l'Allemagne en termes d'équipements (1 150 robots pour 10 000 salariés dans le secteur automobile pour la France contre 1 131 pour l'Allemagne en 2016, alors qu'en 2015 le rapport était inversé (940 et 1 147 respectivement pour la France et l'Allemagne). La robotisation n'est certes pas l'alpha et l'oméga de la conversion à l'industrie du futur, mais elle est un indicateur qui témoigne que les politiques publiques menées ont eu un effet positif.
Les achats industriels de robots en France
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
|
Nombre de robots achetés par an |
2161 |
2944 |
3045 |
4200 |
Progression par rapport à N-1 |
+36 % |
+3,4 % |
+37,9 |
Source : DGE
Au-delà de ce constat global, distinguer l'apport et l'efficacité propres de chaque dispositif est plus compliqué.
S'agissant des dispositifs de prêts opérés par BpiFrance, leur financement par le PIA incluait des enveloppes destinées à en évaluer l'efficacité (0,25 M€ pour les prêts à la robotisation et 0,1 M€ pour les prêts « industries du futur »). Il faudra attendre la publication de ces évaluations pour porter un jugement.
S'agissant des dispositifs fiscaux de suramortissement, il s'agit de deux outils extrêmement différents :
- la mesure d'amortissement exceptionnel des robots industriels des PME était doublement ciblée : sur un type d'entreprises (les PME et les ETI) et sur un type d'investissement (les robots). C'est un dispositif peu coûteux (2 à 3 millions d'euros par an). la DGE a mené en 2016 une enquête afin d'en étudier l'impact. Sur un échantillon de 300 entreprises ayant acheté au moins un robot depuis 2011 jusqu'à 2015 inclus, 157 entreprises (73 % de PME et 24 % d'ETI) ont répondu. Près de la moitié des entreprises qui ont utilisé l'amortissement accéléré estiment qu'il les a incitées à l'achat d'un robot. Compte tenu l'exiguïté de la base industrielle française après trente ans de désindustrialisation, le fait que ce dispositif ait pu inciter plusieurs dizaines d'entreprises industrielles de taille moyenne ou intermédiaire à se lancer dans un investissement ambitieux doit être mis à son actif, surtout au regard de son coût réduit ;
- la mesure de suramortissement de 40 % mise en place entre avril 2015 et avril 2017 s'adressait quant à elle à tous les types d'entreprises et concernait tous les types d'investissement. Elle était davantage une mesure générale de relance de l'investissement qu'une mesure de soutien au déploiement de l'industrie du futur. Toutefois, l'ensemble des investissements matériels s'inscrivant dans le projet d'industrie du futur étant éligibles, l'amortissement exceptionnel a forcément contribué à accompagner financièrement les entreprises industrielles dans leur virage vers l'industrie du futur. Reste qu'il n'est pas possible d'estimer quelle est la part du montant total de cette dépense fiscale (évaluée à 5 Mds € sur 6 ans ), qui est effectivement allée vers le financement de l'industrie du futur. 21 ( * )
Votre rapporteur pour avis estime qu'il n'y a pas lieu de maintenir dans sa généralité cette coûteuse mesure de stimulation de l'investissement dans une période de haut de cycle conjoncturel, surtout si l'on tient compte du fait que le contexte réglementaire et fiscal (CICE et baisse prochaine de l'impôt sur les sociétés) est propice à l'investissement.
En revanche, votre rapporteur estime opportun de créer un dispositif de suramortissement clairement recentré sur les investissements dans les équipements de l'industrie du futur . En effet, selon les experts du domaine, la France dispose de 5 ans, tout au plus 10, pour prendre le virage de l'industrie du futur et exploiter ses opportunités en termes de montée en gamme et de relocalisation de la production. Or, le gros de l'effort d'investissement à accomplir reste devant nous. Il convient de souligner par exemple que, malgré les progrès constatés ces trois dernières années, la France achète toujours 7 fois moins de robots que l'Allemagne et 2 fois moins de robots que l'Italie . Si les grands groupes accompliront leur mue vers l'industrie du futur, la mutation des PME et des ETI industrielles est loin d'être gagnée. C'est la raison pour laquelle votre rapporteur estime que l'effort consenti en faveur des investissements pour le déploiement des technologies du futur doit être prolongé.
Un tel mécanisme de suramortissement ciblé constituerait un mécanisme vertueux dans la mesure où il conditionne l'avantage fiscal octroyé aux entreprises à la réalisation effective des investissements investissement. Si l'entreprise investit, elle a la réduction, sinon elle ne l'a pas. Cela crée une incitation forte à investir, que ne permet pas une réduction d'impôt accordée a priori sans contrepartie.
La robotisation en France : état des lieux Malgré les évolutions positives récentes concernant le nombre d'achats annuel de robots, les entreprises françaises accusent encore un retard notable en matière de robotisation par rapport aux grands pays industriels. Pour 10 000 salariés dans l'industrie, la France (en 2015) ne compte que 127 robots, là où l'Espagne et l'Italie comptent respectivement 150 et 160 robots, les États-Unis 176, Taiwan et la Suède 212, l'Allemagne 301 robots, le Japon 305 et la Corée du Sud 531 robots. La France est principalement acheteuse de robots importés. Cependant elle compte encore un fabriquant important de robots sur son territoire : la société Staubli, une ETI de 1200 personnes, réalisant 484 M€ de CA (dont 408 M€ à l'export) dans les machines à tisser et des robots industriels. Si la France compte peu de fabricants de robots industriels, elle dispose en revanche d'un tissu riche de sociétés d'ingénierie, des « intégrateurs » (par exemple Actenium, Clemessy, Fives Cinetic, Spie, Staubli,..) dont la mission est d'intégrer le robot dans le processus de production de l'entreprise pour en tirer le bénéfice maximal. Le robot en lui-même ne représente généralement que 20 % du cout total du projet tandis que l'ingénierie (pour l'intégration du robot) représente jusqu'à 80 % de ce coût total. À noter enfin qu'à côté de la robotique industrielle, se développe la robotique dite « de service » (par exemple le nettoyage industriel, la surveillance, l'assistance médicale, l'assistance domestique, l'aide à l'autonomie de personnes, l'accueil des clients, robots chirurgicaux) où la France compte de nombreuses startups et entreprises innovantes (BA Systems, Medtech...). La robotique dite « de service » va trouver aussi des applications dans l'industrie (robotique collaborative) : le robot ne sera plus enfermé dans une cage (cellule) pour éviter les accidents mais dans les espaces ouverts où il va collaborer avec le personnel. la France est l'un des pays en pointe dans ce domaine. |
3. Concernant le pilier « formation des salariés »
Bien que ce volet du projet industrie du futur soit crucial pour le succès de cette politique, il en est aujourd'hui le parent pauvre. Alors que les autres volets ont déjà donné lieu à des actions concrètes et commencent à produire des résultats, le volet « formation du personnel » en est encore au stade de la préfiguration. Des études ont été lancées au sein des comités stratégiques de filière (CSF) afin d'anticiper les évolutions de chaque secteur et de développer une vision prospective partagée entre partenaires sociaux. Par ailleurs, l'action « Adaptation et qualification de la main d'oeuvre » du PIA 3 (100 M€) devrait permettre de soutenir les projets d'ingénierie de formation.
Votre rapporteur pour avis s'inquiète du peu de progrès réalisés dans ce domaine .
Il est urgent d'accélérer le rythme et de changer d'échelle. Le 20 novembre 2017, dans son discours sur la relance de la politique industrielle, le Premier ministre a inscrit les compétences et la rénovation de la formation professionnelle parmi les priorités de la politique industrielle. Il a indiqué que le volet « compétences » du Grand Plan d'Investissement prévoit un volet d'accompagnement des filières s'appuyant sur les travaux du CNI. Ces derniers doivent permettre d'élaborer :
- une cartographie fine de l'offre de formation, toutes voies de formation confondues ;
- une vision prospective en fonction des métiers actuels, des tendances constatées et des scenarii identifiés ;
- la construction d'outils de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences au niveau de la branche, y compris au niveau local, sur l'évolution des référentiels métiers et de l'offre de formation.
On ne peut que partager ces objectifs, tout en se souvenant qu'ils sont périodiquement réaffirmés, dans leur généralité, par les gouvernements successifs. Il est temps désormais de passer à des réalisations concrètes. La réforme de la formation professionnelle, dans les mois à venir, devra intégrer pleinement l'enjeu des compétences nécessaires au déploiement de l'industrie du futur et le grand plan d'investissement devra fournir les moyens financiers nécessaires à la montée en gamme des compétences de la main-d'oeuvre industrielle et à la reconversion des salariés qui devront être reclassés.
* 20 Commission nationale d'évaluation des politiques d'innovation, Quinze ans de politiques d'innovation en France, janvier 2016
* 21 Les éléments qui permettraient de mesurer cette part ne peuvent être extraits des déclarations d'impôt des sociétés.