C. UNE MARGE D'INCERTITUDE INÉVITABLE
Ces projections à moyen terme sont d'un grand intérêt. Elles montrent qu'un redressement des comptes sociaux pourrait résulter spontanément d'une croissance des recettes plus forte que celle des dépenses, à législation inchangée. La question du financement des déficits accumulés entre 1996 et 1998 restera néanmoins à résoudre. Pour le seul régime général, la dette serait de 85,8 milliards de francs à la fin de 1999.
Toutefois, les conclusions à tirer d'un tel exercice de prévision doivent être nuancées par la marge d'incertitude qui lui est inhérente.
Dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 1996, la Cour des comptes s'est attachée à évaluer rétrospectivement la fiabilité des prévisions relatives aux évolutions du régime général de sécurité sociale.
Assises essentiellement sur la masse salariale, les recettes dépendent étroitement des grandes variables macro-économiques. La Cour relève toutefois une forte réactivité des cotisations sociales : elles progressent plus rapidement que la masse salariale en période de croissance et, symétriquement, ralentissent plus nettement en période de récession. Ce Phénomène explique les écarts régulièrement constatés entre les prévisions et les réalisations : en moyenne, sur la période 1987-1994, cet écart a été de 2,4 % pour la prévision à l'été n-1.
Les évolutions des dépenses de retraite et de prestations familiales, qui dépendent de variables démographiques à forte inertie, sont prévisibles avec une faible marge d'erreur : l'écart n'est que de 0,7 % en moyenne pour la prévision à l'été n-1.
A l'inverse, l'évolution des dépenses d'assurance maladie, qui est anticipée par extrapolation de tendances antérieures, apparaît beaucoup plus erratique : l'écart est de 1,9 % en moyenne pour la prévision à l'été n-1. La Cour préconise d'ailleurs que la fiabilité de leur prévision soit améliorée en utilisant également des variables externes de nature démographique ou macro-économique. Désormais, la fixation d'un objectif national de dépenses d'assurance maladie devrait contribuer à rendre la progression de celles-ci bien plus prévisible.
Au total, sur la période 1987-1994, l'écart moyen entre les prévisions et les réalisations à l'été n-1 est de 25,4 milliards de francs. Il est moitié moindre pour les prévisions à l'automne n-1 : 11,7 milliards de francs.
Cette marge d'incertitude moyenne de 11,7 milliards de francs peut paraître importante au regard d'une prévision de déficit du régime général de -29,7 milliards de francs en 1997.
Elle reste négligeable rapportée à la masse des dépenses, qui est proche de 1.200 milliards de francs : 0,9 %.
Cependant, l'analyse de la Cour des comptes porte sur les prévisions à court terme, faites en année n-1. Pour des projections à moyen terme, faites en année n-2 ou n-3, le risque d'erreur est forcément plus grand car les écarts constatés chaque année entre les prévisions et les réalisations sont cumulatifs.