Projet de loi de finances pour 1999
NACHBAR (Philippe)
AVIS 67 (98-99), Tome I - COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES
Table des matières
-
INTRODUCTION
-
I. LA POURSUITE DE L'EFFORT BUDGÉTAIRE EN FAVEUR DE LA CULTURE
- A. UNE NOUVELLE ÉTAPE VERS LE 1 %
- B. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS ÉQUITABLEMENT RÉPARTIE
-
II. RENFORCER LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE
- A. LA POURSUITE DE L'AMÉNAGEMENT CULTUREL DU TERRITOIRE
- B. L'ÉDUCATION ARTISTIQUE ET CULTURELLE, CONDITION DE LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE
-
III. ASSURER LA PÉRENNITÉ DE LA POLITIQUE PATRIMONIALE
- A. QUEL AVENIR POUR LA POLITIQUE DU PATRIMOINE ?
- B. ASSURER LA PROTECTION ET L'ENRICHISSEMENT DES COLLECTIONS NATIONALES
-
I. LA POURSUITE DE L'EFFORT BUDGÉTAIRE EN FAVEUR DE LA CULTURE
- EXAMEN EN COMMISSION
- CONCLUSION
N° 67
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 19 novembre 1998.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 1999 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME I
CULTURE
Par M. Philippe NACHBAR,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Adrien Gouteyron,
président
; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis
Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar,
vice-présidents
; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André
Maman, Mme Danièle Pourtaud,
secrétaires
;
MM. François Abadie, Jean Arthuis, Jean-Paul Bataille, Jean
Bernard, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Michel
Charzat, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Michel
Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre
Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger
Hesling, Pierre Jeambrun, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre,
Serge Lepeltier, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc,
MM. Pierre Martin
,
Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar,
Jean-François Picheral, Guy Poirieux, Jack Ralite, Victor Reux,
Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, Franck Sérusclat,
René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1078
,
1111
à
1116
et T.A.
193
.
Sénat
:
65
et
66
(annexe n°
7
)
(1998-1999).
Lois de finances
.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le budget du ministère de la culture s'élèvera en 1999
à 15 669,78 millions de francs en dépenses ordinaires
et crédits de paiement, soit une progression de 3,5 % par rapport
à la loi de finances pour 1998.
Cette augmentation qui doit être mesurée à l'aune de celle
du budget de l'Etat, limitée à 2,3 %, poursuit l'effort
engagé en faveur de la culture par la loi de finances pour 1998, sans
permettre cependant d'atteindre le seuil symbolique du 1 %. En effet, le
budget du ministère de la culture ne représentera en 1999 que
0,967 % des dépenses du budget général.
Cependant, la politique culturelle ne peut se réduire au respect d'une
norme comptable et la progression des crédits qui lui sont
consacrés ne dispense pas d'une réflexion sur ses objectifs.
Nul ne songera à remettre en cause la volonté du gouvernement de
mettre ces moyens nouveaux au service de la démocratisation culturelle.
Cette priorité correspond aux attributions du ministère de la
culture telles qu'elles ont été définies par André
Malraux en 1959 : "
rendre accessibles les oeuvres capitales de
l'humanité, et d'abord de la France, au plus grand nombre possible de
Français, assurer la plus vaste audience à notre patrimoine
culturel
". Votre rapporteur a souligné à de nombreuses
reprises que l'aménagement culturel du territoire et le
développement de l'éducation artistique devaient constituer le
socle de cette politique. A ce titre, il se félicite que le projet de
loi de finances pour 1999 consolide les efforts en ce domaine, bien que
beaucoup reste encore à faire, notamment en ce qui concerne les
enseignements artistiques, le patrimoine et les musées.
Le Sénat a souvent souligné qu'une des missions de la politique
culturelle était d'assurer la pérennité de la politique
patrimoniale de l'Etat. A ce titre, votre rapporteur s'était
réjoui l'an dernier de l'abandon de la rigueur imposée au
ministère de la culture et du retour à des dotations comparables
à celles de la loi de programme de 1993. Aujourd'hui, si le projet de
loi de finances pour 1999 prévoit une progression globale des
crédits du patrimoine, l'abandon du principe de la programmation
pluriannuelle de l'effort consenti par l'Etat en ce domaine suscite une
légitime inquiétude. Par ailleurs, la politique du patrimoine ne
saurait être réduite à la seule conservation des monuments
historiques et concerne également la protection et l'enrichissement des
collections nationales. Sur ce point également, le projet de loi de
finances ne répond que partiellement aux interrogations de votre
rapporteur. Dans notre pays qui compte peu de collectionneurs privés, la
responsabilité de l'Etat est grande et l'enrichissement de nos
collections, comme le maintien sur notre territoire des trésors
nationaux, dépend essentiellement des dotations qu'il sera susceptible
de leur consacrer.
I. LA POURSUITE DE L'EFFORT BUDGÉTAIRE EN FAVEUR DE LA CULTURE
A. UNE NOUVELLE ÉTAPE VERS LE 1 %
1. Une augmentation significative des crédits
a) Une croissance de 3,5 % du budget de la culture
En
1999, le budget de la culture s'élèvera en dépenses
ordinaires et crédits de paiement à 15 669,78 millions
de francs, en augmentation de 3,5 % par rapport à la loi de
finances pour 1998
(15 145,57 millions de francs), soit une
variation de 524,21 millions de francs.
Le projet de loi de finances pour 1999 traduit donc la poursuite de l'effort
engagé en 1998 en faveur d'un renforcement des moyens du
ministère de la culture.
Comme en 1998, les crédits de la culture bénéficient d'une
progression supérieure à celle des dépenses de l'Etat qui
augmenteront en 1999 de 2,2 % en dépenses ordinaires et
crédits de paiement.
Néanmoins, si l'on raisonne en termes de moyens d'engagement,
c'est-à-dire en tenant compte des autorisations de programme, et non
plus des crédits de paiement, la progression du budget de la culture est
ramenée à 1,55 %, soit un niveau beaucoup plus modeste. En
effet, après une augmentation significative en 1998 (+ 20 %), les
autorisations de programme diminuent de 4,99 % en 1999.
Votre rapporteur relèvera pour s'en féliciter que comme en 1998
la progression des crédits de la culture s'effectue à
structure budgétaire constante
. Cette stabilisation du
périmètre des compétences du ministère de la
culture est la bienvenue.
b) Une amélioration des conditions d'exécution de la loi de finances
Au 2
novembre 1998, les mesures d'annulation dont le ministère de la culture
a fait l'objet ne s'élèvent qu'à 60 millions de
francs, soit 0,49 % des crédits inscrits en loi de finances
initiale.
Intervenues le 16 janvier et le 18 novembre 1998, ces annulations ont
contribué pour les premières et les plus importantes au
financement du plan d'aide d'urgence aux chômeurs. Pour les
dépenses ordinaires, les annulations ont porté sur les
crédits du titre III et du titre IV à hauteur respectivement de
2,5 et 58,65 millions de francs ; en ce qui concerne les
dépenses en capital, 17,2 millions de francs ont été
annulés dont près de 6 millions de francs sur les
crédits de paiement consacrés à la restauration du
patrimoine monumental.
Si l'on prend en considération les crédits effectivement
disponibles en 1998, la progression des crédits du ministère de
la culture pour 1999 atteint
3,99 %.
Après des années d'exécution défavorable,
l'année 1998 semble donc amorcer une inversion de tendance que votre
rapporteur espère durable.
(en millions de francs)
|
Annulations
|
%
LFI
|
Annulations
|
%
LFI
|
Titre III |
278,9 |
7,2 |
2,5 |
0,03 |
Titre IV |
219,5 |
4,3 |
58,65 |
1,2 |
Total dépenses ordinaires |
498,5 |
4,2 |
61,15 |
0,52 |
Titre V |
176,8 |
13 |
4,2 |
0,3 |
Titre VI |
78,2 |
4,3 |
13 |
0,6 |
Total dépenses en capital (CP) |
255 |
8 |
17,2 |
0,68 |
TOTAL DO + CP |
756 |
5,2 |
78,35 |
0,51 |
* Au 25
novembre 1998, arrêtés d'annulation du 16 janvier et du 18
novembre 1998
Votre rapporteur rappelle que la progression des dotations inscrites en loi de
finances ne constitue pas à elle seule un gage suffisant de l'effort
accompli en faveur des crédits de la culture. Ce dernier ne peut
être définitivement mesuré qu'à l'aune des
crédits effectivement disponibles au cours de l'année
d'exécution.
Au cours des dernières années -et l'année 1997 en avait
fourni à nouveau l'illustration-, les crédits de la culture ont
été trop souvent victimes de mesures de régulation
budgétaire. Ces dernières sont particulièrement lourdes de
conséquences dans le domaine du spectacle vivant, les institutions
culturelles et les équipes artistiques déterminant leur
programmation en fonction d'un équilibre financier défini en
début d'année au regard des crédits votés par le
Parlement.
Rappelons à ce titre qu'en 1997 les mesures d'annulation qui
s'élevaient au total à 756 millions de francs en
dépenses ordinaires et crédits de paiement avaient abouti
à réduire les crédits effectivement disponibles de
5 % par rapport aux dotations inscrites en loi de finances.
c) L'achèvement des grands travaux
Comme
l'an dernier,
la diminution des crédits consacrés aux grands
travaux accroît la marge de manoeuvre budgétaire du
ministère de la culture
.
En effet, à l'instar de 1998, le projet de loi de finances ne
prévoit aucune ouverture de crédits au titre des grands travaux,
hormis pour le Grand Louvre, dont l'achèvement est programmé pour
1999.
La loi de finances pour 1998 consacrait à l'opération du Grand
Louvre des crédits d'investissement à hauteur de
220,6 millions de francs en autorisations de programme et de
246,95 millions de francs en crédits de paiement. Ces
crédits étaient destinés à permettre la poursuite
des travaux correspondant à la deuxième tranche (ailes Denon, de
Rohan, Marson, aménagement des espaces situés sous la cour du
Carrousel principalement).
Afin de permettre l'achèvement de cette opération, le projet de
loi de finances ouvre 35,92 millions de francs en autorisations de
programme et 146,2 millions de francs en crédits de paiement. Ces
crédits permettront de terminer les travaux d'aménagement de la
nouvelle entrée du musée située à l'est de la porte
des Lions, du département des arts graphiques et de l'antenne du
musée des Arts premiers située dans le pavillon des Sessions.
Au total, hors la passerelle Solferino et les travaux d'aménagement du
jardin des Tuileries, plus de 6 190 millions de francs
d'autorisations de programme auront été ouverts au titre de
l'opération du Grand Louvre, année budgétaire 1999
comprise.
La maîtrise d'ouvrage pour l'achèvement du Grand Louvre est
confiée à l'établissement public de maîtrise
d'ouvrage des travaux culturels (EPMOTC).
En 1999, à l'exception du Grand Louvre, toutes les opérations
liées aux grands travaux sont achevées. Rappelons qu'en 1998
l'enveloppe des autorisations de programme de la Villette a été
soldée pour un total de 6 595,7 millions de francs.
Si l'achèvement de ces opérations permet au ministère de
la culture de retrouver une marge de manoeuvre appréciable pour les
dépenses d'investissement, les dépenses de fonctionnement et
d'entretien qu'elles supposent constituent une charge significative qui devra
être assumée, année après année, faute de
quoi les institutions concernées ne pourront remplir leurs missions dans
des conditions satisfaisantes.
Depuis 1995,
les budgets de fonctionnement des établissements publics
issus des grands travaux représentent, en effet, environ 15 % du
budget du ministère de la culture
, sachant que chaque
établissement est financé sur des recettes propres par une part
de son budget total variant entre 12 et 20 %. Quant aux dépenses
d'entretien, elles représentent environ 10 % des dépenses de
fonctionnement et 1 % du budget total du ministère de la
culture.
2. Le seuil du 1 %
a) Le seuil du " 1 % " n'est pas atteint
Réclamée il y a plus de trente ans par Jean
Vilar,
reprise en 1981 par M. Jack Lang, alors ministre de la culture,
l'affectation de 1 % des dépenses de l'Etat à la culture
demeure un objectif gouvernemental.
M. Lionel Jospin, dans sa déclaration de politique
générale, affirmait, en effet, que
" l'objectif du
gouvernement est (...) de parvenir progressivement à consacrer
effectivement 1 % du budget de l'Etat à la culture "
avant
la fin de la onzième législature.
Le projet de loi de finances pour 1999 poursuit l'effort engagé en ce
sens en 1998 sans permettre néanmoins d'atteindre encore le seuil
symbolique du 1 %. A structure budgétaire constante, le budget de
la culture représentera, grâce à une augmentation de ses
dotations de 524,21 millions de francs, près de 0,967 % des
dépenses du budget général.
b) Un effort budgétaire qui ne peut être réduit au respect d'une norme comptable
•
Une valeur comptable relative
Le seuil du 1 %, qui a connu des sorts variés au cours des
exercices budgétaires successifs, revêt une valeur essentiellement
symbolique. En effet, les modifications intervenues dans les compétences
du ministère de la culture ont contribué à priver de
signification réelle cette référence comptable, les
comparaisons d'une année sur l'autre étant très difficiles
compte tenu des nombreux transferts de crédits sur lesquels n'est pas
revenu, au demeurant, le nouveau gouvernement.
Par ailleurs, le budget du ministère de la culture n'est pas le seul
à supporter le poids de la dépense culturelle de l'Etat. L'annexe
jaune consacrée à l'effort financier de l'Etat dans le domaine
culturel fait apparaître que le total des dépenses civiles
concernées inscrites au budget général
s'élève pour 1999 à 34 459,44 millions de
francs, soit plus du double des crédits inscrits au budget du
ministère de la culture.
•
Une valeur comptable qui ne reflète qu'en partie la
dépense publique consacrée à la culture
Par ailleurs, lorsque l'objectif du 1 % a été
érigé en 1981 en priorité gouvernementale, le contexte de
la politique culturelle était sensiblement différent.
Depuis, parallèlement à la décentralisation
administrative, les collectivités territoriales, encouragées
d'ailleurs en ce domaine par l'Etat, sont devenues des partenaires actifs de la
politique culturelle. Leurs interventions représentaient en 1993
-dernière année connue- 36,9 milliards de francs contre
36,4 milliards de francs pour celles de l'Etat. Les crédits du
ministère de la culture ne représentent donc qu'un peu moins de
20 % du financement public de la culture.
Cette participation accrue des collectivités territoriales -et en
particulier des communes- a modifié profondément le rôle et
les modalités d'intervention du ministère de la culture. Dans ce
contexte, la valeur du 1 % demeure très relative, une large part
des crédits de l'Etat contribuant au cofinancement de
réalisations conduites en partenariat avec les collectivités
locales.
B. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS ÉQUITABLEMENT RÉPARTIE
Alors
que l'augmentation des crédits de la culture profitait essentiellement
en 1998 aux dépenses d'investissement, la progression proposée
pour 1999 est équitablement répartie entre les dépenses
ordinaires et les dépenses d'investissement.
Les dépenses ordinaires
inscrites au titre III (moyens des
services) et au titre IV (interventions publiques) s'établissent pour
1999 à 12,126 milliards de francs, en progression de
3,4 %.
Les dépenses d'investissement
qui avaient été les
principales bénéficiaires de l'effort budgétaire consenti
en 1998 avec une progression de 20 %
s'élèvent en 1999 en
crédits de paiement à 3,543 milliards de francs, soit une
augmentation de 3,5 % et en autorisations de programme à
3,522 milliards de francs, soit une diminution de 4,9%.
1. Une progression des moyens d'action du ministère qui s'accompagne d'une réforme de ses structures administratives
a) La progression des dépenses ordinaires
•
Les moyens du ministère
Les crédits du titre III
(moyens des services)
progressent en
1999 de 2,5 %
pour s'établir à 7 342 millions
de francs.
Les dépenses de personnel : un effort de résorption de la
précarité
Les crédits correspondant aux rémunérations et aux charges
salariales liées à l'activité des personnels du
ministère de la culture s'élèveront à
3 178,5 millions de francs, soit une hausse de
4,8 %
par
rapport à 1998.
Cette augmentation des crédits de personnel résulte
essentiellement de l'application des accords sur la revalorisation des
rémunérations publiques et les bas salaires, de mesures de
repyramidage et
d'un effort de résorption de l'emploi
précaire
, effort que votre rapporteur ne peut que soutenir.
Cet effort de résorption de l'emploi précaire s'inscrit dans la
continuité du plan de stabilisation des vacataires de la surveillance et
du magasinage, lancé en 1995 pour une durée de quatre ans et qui
a d'ores et déjà bénéficié à 450
agents. En 1999, ce plan sera poursuivi par la création de
30 emplois supplémentaires par redéploiement interne au sein
du ministère. Par ailleurs, s'y ajoute l'application de la loi dite
" Perben " relative à la résorption des
catégories de vacataires de catégorie C autres que ceux de la
filière de surveillance et de magasinage et étendue aux
vacataires de la catégorie B. Pour les personnels vacataires
exerçant des fonctions pour lesquelles il existe des corps de
fonctionnaires, la résorption de l'emploi précaire se poursuivra
par un effort de recrutement sur les emplois vacants. En ce qui concerne les
autres catégories de personnels vacataires, en particulier ceux en poste
dans les établissements publics administratifs, une mesure de
création de contrats sur le budget des établissements permettra
une stabilisation de 379 agents.
S'agissant de l'emploi à venir des personnels vacataires, un abondement
de 8 millions de francs des crédits de vacations permettra de
mettre un terme au recrutement de vacataires sur des contrats de moins de trois
mois n'ouvrant pas droit à l'indemnisation du chômage lorsque le
besoin dépasse cette durée, en plaçant les institutions
concernées en position de supporter le paiement d'indemnités de
pertes d'emploi ouvertes au-delà de trois mois d'activité.
Au-delà de cet effort de résorption de l'emploi précaire,
dont votre rapporteur espère qu'il sera poursuivi dans les années
à venir, force est de constater que
le nombre global d'emplois du
ministère de la culture n'augmentera pas en 1999
.
Cette absence de création d'emplois constitue à l'évidence
pour le ministère de la culture un défi alors qu'il est
confronté à la nécessité de renforcer les moyens en
personnels des directions régionales des affaires culturelles (DRAC)
afin de leur permettre d'assurer correctement les nouvelles
responsabilités qui résultent de la poursuite du processus de
déconcentration. Le ministre a indiqué, lors de son audition
devant votre commission, qu'un plan pluriannuel de redéploiement des
effectifs des administrations centrales vers les DRAC permettrait de
remédier à cette difficulté. Elle n'en a cependant
précisé ni les moyens ni l'ampleur.
Cela apparaît d'autant plus inquiétant que le
rééquilibrage entre l'administration centrale et les DRAC ne
s'effectuait déjà que très progressivement ; par
rapport à 1996, on compte, en effet, seulement 28 agents
supplémentaires dans les DRAC.
Les autres dépenses de fonctionnement : une progression
modeste.
Les crédits consacrés aux dépenses de fonctionnement
courant, qui regroupent les moyens de l'administration centrale, des DRAC, des
services départementaux de l'architecture et du patrimoine, des
musées et des centres départementaux d'archives
s'élèveront à 603,3 millions de francs, soit
une
très faible augmentation de 0,7 %.
Les mesures nouvelles (soit 28,5 millions de francs) sont principalement
destinées à l'amélioration de l'équipement
informatique et télématique des services centraux
(+ 17,4 millions de francs) et au renforcement des moyens de
fonctionnement des DRAC (+ 4 millions de francs).
Les subventions de fonctionnement aux établissements publics
Les subventions de fonctionnement versées aux établissements
publics sous tutelle du ministère de la culture s'élèvent
en 1999 à 3 481,83 millions de francs, en progression de
2,4 %
par rapport à 1998.
A structure constante
, c'est-à-dire compte non tenu du transfert
des crédits relatifs au Musée des Arts premiers et au Centre
national de la danse, cette augmentation n'est que
de 1,7 %.
La volonté de rationalisation de la maîtrise d'ouvrage culturelle,
qui s'est traduite en 1998 par la création d'un établissement
public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels, se poursuit en 1999
par la majoration des crédits de fonctionnement et de personnel de cet
établissement (+ 12 millions de francs).
L'effort engagé en 1998 en faveur des établissements d'art
dramatique et chorégraphique est poursuivi en 1998. Les
théâtres nationaux bénéficient ainsi de mesures
nouvelles à hauteur de 7,2 millions de francs qui sont
essentiellement destinées à la Comédie française
(2,337 millions de francs) et au théâtre de la Colline
(2,27 millions de francs). Par ailleurs, le Centre national de la danse se
voit doté du statut d'établissement public et
bénéficie, à ce titre, d'une subvention de
26,45 millions de francs, dont 3 millions de francs de mesures
nouvelles destinées au développement de ses missions. Ayant
vocation à regrouper plusieurs organismes de droit privé, les
crédits qui lui sont consacrés proviennent en grande partie du
titre IV (Interventions publiques).
Le Centre national des arts plastiques bénéficie d'une
augmentation de sa subvention de fonctionnement de 13,1 %.
Le chantier du musée des arts et des civilisations, dont la
création a été souhaitée par le Président de
la République, sera lancé en 1999 sur les terrains actuellement
vacants du quai Branly. L'établissement public, dont le financement doit
être assuré à parité par le ministère de la
culture et par le ministère de l'éducation nationale, de la
recherche et de la technologie, bénéficie en 1999 d'une
subvention de fonctionnement de 7,5 millions de francs
transférée du titre IV.
Dans le prolongement de l'effort engagé en 1998 en faveur des
écoles d'architecture, une mesure nouvelle de près de
5 millions de francs leur est consacrée en 1999 afin de poursuivre
la mise en oeuvre de la réforme des études d'architecture dans de
bonnes conditions.
Les subventions de fonctionnement aux établissements publics qui sont
passées en francs courants entre 1985 et 1999 de
1 262 millions de francs à 3 482 millions de francs,
soit une progression plus rapide que celle de la totalité du budget du
ministère de la culture, représentent, en 1999, 22 % de ses
dotations. Cette évolution résulte, pour l'essentiel, de la
montée en puissance des coûts de fonctionnement des
établissements publics issus des grands travaux dont les charges de
fonctionnement s'élèvent à 1 867,1 millions de
francs, soit 12 % du budget du ministère.
SUBVENTION DE FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS ISSUES DES
GRANDS
TRAVAUX
(en millions de francs)
Chapitre 36-60 |
Article |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
1999/
|
BNF (1) |
15 |
228 |
549 |
576,9 |
568,2 |
600,30 |
602,2 |
1,9 |
Opéra national de Paris |
51 |
539,9 |
581,4 |
615 |
611,7 |
635,1 |
639,9 |
0,7 |
Musée du Louvre |
82 |
298,6 |
289,3 |
277,2 |
274,1 |
279,2 |
281,1 |
1,9 |
Cité de la Musique |
56 |
46,3 |
113,6 |
145,1 |
141 |
142,3 |
141,7 |
-0,6 |
EPPGHV (2) |
92 |
122,4 |
126,1 |
122,6 |
121 |
125,7 |
128,1 |
2,4 |
CNSM Paris (3) |
52 |
71,3 |
72,3 |
73,3 |
73,3 |
73,7 |
74,1 |
0,4 |
TOTAL |
- |
1 306,5 |
1 731,7 |
1 810,1 |
1 789,3 |
1 856,2 |
1 867,1 |
0,58 |
Budget du ministère |
- |
13 505 |
13 555 |
15 532 |
15 126,3 |
15 145,6 |
15 669,8 |
- |
% des établissements publics issus des grands travaux |
- |
9,6 |
12,7 |
11,6 |
11,8 |
12,2 |
11,9 |
- |
(1)
Bibliothèque nationale de France
(2) Établissement public du parc et de la grande halle de la Villette
(3) Conservatoire national supérieur de musique de Paris
Source : ministère de la culture.
•
Les crédits d'intervention
Les crédits du titre IV, considérés traditionnellement
comme le reflet des choix arrêtés par le ministère pour
l'orientation de la politique culturelle, s'élèvent en 1999
à
4 783,8 millions de francs,
en progression de
3,6 %
par rapport à 1998 (soit une augmentation de
374 millions de francs).
Les crédits d'intervention proprement dits, c'est-à-dire hors
dotation générale de décentralisation destinée
à compenser le transfert des charges de fonctionnement des
bibliothèques supportées par les collectivités locales et
hors crédits de commandes artistiques et achats d'oeuvres d'art
s'établissent à 3 585,84 millions de francs, soit une hausse
de près de 138,2 millions de francs (+ 4 %).
Il est à noter que les interventions culturelles
déconcentrées regroupées depuis la loi de finances pour
1998 au sein du chapitre 43-30 s'élèvent à
2 112,53 millions de francs et représentent près de
60 % du montant total des dépenses d'intervention, contre 52 %
l'an dernier. Ce nouvel équilibre entre interventions
d'intérêt national et interventions déconcentrées
traduit l'accroissement des compétences des DRAC résultant du
mouvement de déconcentration.
Les modifications de nomenclature intervenues depuis 1997 ont eu pour effet
de confondre dans de vastes entités des actions autrefois
financées sur des lignes distinctes
permettant d'identifier les
crédits qui y étaient affectés. Cette année, on
relèvera la fusion des articles relatifs au développement
culturel (soit l'article 43-20-30 pour les interventions d'intérêt
national et l'article 43-30-30 pour les interventions
déconcentrées) et des articles relatifs aux spectacles (soit les
articles 43-20-20 et 43-30-20) sur deux lignes, l'une relative aux
crédits déconcentrés et l'autre relative aux interventions
d'intérêt national. Ces dernières regroupent des
crédits s'élevant à 855 millions de francs pour les
interventions d'intérêt national et à
1 332 millions de francs pour les interventions
déconcentrées et correspondent à des actions aussi
diverses que les subventions de fonctionnement aux théâtres
lyriques et aux scènes nationales, les actions en direction des publics
scolaires ou encore les politiques de lutte contre l'exclusion.
C'est donc essentiellement sur le fondement des indications fournies par le
ministère que peut être appréciée l'évolution
des crédits d'intervention.
Le tableau ci-après rend compte de la progression des crédits
d'intervention du titre IV pour chaque direction ou délégation du
ministère :
(par direction et délégation)
(en millions de francs)
|
LF1 1998 |
PLF 1999 |
99/98 |
Patrimoine et architecture |
223,62 |
244,92 |
9,5 % |
Spectacle vivant |
2 000,67 |
2 091,96 |
4,5 % |
Musées |
252,01 |
277,76 |
10,2 % |
Arts plastiques |
315,29 |
336,67 |
6,8 % |
Livre et lecture |
1 052,07 |
1 084,59 |
3,1 % |
Archives |
15,09 |
16,24 |
7,6 % |
Développement et aménagement du territoire |
440,92 |
430,71 |
-2,3 % |
Langue française |
7,54 |
9,54 |
26,5 % |
Affaires internationales |
45,67 |
47,61 |
4,2 % |
Centre national de la cinématographie (CNC) |
209,66 |
214,16 |
2,1 % |
Les
principales actions retenues au titre des mesures nouvelles
qui
s'élèvent globalement à 193,95 millions de francs
concernent notamment :
- pour 103,5 millions de francs les interventions dans le domaine du
spectacle vivant et du cinéma ;
- pour 16 millions de francs les moyens de diffusion et de formation dans
les domaines de l'architecture et du patrimoine ;
- pour 27 millions de francs les enseignements artistiques.
L'évolution des crédits du titre IV reflète
une
politique volontariste de soutien à la création et à la
démocratisation des pratiques culturelles
. A ce titre, on
relèvera -sans toutefois pouvoir le vérifier du fait de
l'opacité de la nomenclature budgétaire et des processus de
décision liés à la déconcentration- que les moyens
supplémentaires dégagés en faveur du spectacle vivant
seront notamment consacrés à des disciplines permettant un
accès plus large du public à la culture, à l'image des
compagnies chorégraphiques et dramatiques, des arts de la rue et des
musiques actuelles. Ce souci de démocratisation de l'intervention
culturelle de l'Etat se traduira par la mise en oeuvre le 1er janvier 1999 de
la " charte du service public " qui formalisera, en ce domaine, les
obligations des institutions ou équipes subventionnées.
Le renforcement des moyens d'action du ministère s'accompagne d'une
réorganisation de ses structures administratives.
b) La réforme de l'administration du ministère de la culture
•
Une réorganisation nécessaire
L'administration centrale du ministère de la culture, historiquement
constituée de services anciens oeuvrant selon des traditions et des
modes de gestion spécifiques, ne favorisait guère la conception
et la conduite de politiques transversales, la création d'une
délégation au développement et aux formations
destinées à coordonner les politiques d'action culturelle n'ayant
pas permis de remédier à cette difficulté.
Par ailleurs, l'octroi du statut d'établissement public à de
grandes institutions culturelles, à l'image du Louvre, comme les mesures
de déconcentration avaient permis de dégager les services
centraux du ministère des pesanteurs inhérentes à une
administration centralisée, en allégeant leurs tâches de
gestion.
La commission de refondation de la politique culturelle présidée
par M. Jacques Rigaud avait souligné que la modernisation de la
politique culturelle impliquait une réforme de l'organisation du
ministère.
A la suite des conclusions de cette commission, le gouvernement
précédent avait formulé des propositions dans la
perspective desquelles s'inscrivent les mesures prises en 1998.
Ces mesures, limitées pour l'heure au regroupement des directions du
théâtre, de la musique et de la danse, d'une part, et de
l'architecture et du patrimoine d'autre part, ne peuvent être
considérées comme une réforme de l'administration de la
culture. En effet, au-delà de ces mesures de rationalisation qui
s'imposaient, le mouvement plus vaste souhaité par votre rapporteur
n'est pas achevé. Par ailleurs, la modernisation des modes de gestion se
heurte aux difficultés rencontrées par les DRAC pour assurer
leurs nouvelles missions.
•
La fusion de la direction du patrimoine et de la direction de
l'architecture
Placées sous l'autorité d'un même directeur depuis l'an
dernier, la direction du patrimoine et la direction de l'architecture ont
été regroupées en une direction unique par le
décret n° 98-840 du 21 septembre 1998.
Préconisée par la commission Rigaud, cette mesure s'inscrit donc
dans la continuité de la réflexion engagée depuis 1995,
année où fut prise la décision de rattacher à
nouveau l'architecture au ministère de la culture. La fusion de ces deux
directions reproduit l'organisation administrative antérieure à
1978, date à laquelle furent transférés au
ministère de l'équipement les services de l'architecture.
Traduisant la volonté du ministre de créer une "
grande
direction
au service du cadre de vie
", cette nouvelle
entité sera organisée, autour de l'inspection
générale de l'architecture, en trois services distincts :
- le service de la connaissance, de la conservation et de la
création qui comprend notamment les sous-directions des monuments
historiques et de l'archéologie ;
- le service des enseignements, des ressources, des publics et des
réseaux qui regroupe, outre la sous-direction des ressources humaines et
des affaires générales, la sous-direction des formations, des
métiers et de la recherche architecturale et urbaine et la
sous-direction des territoires, de la diffusion et de l'action
internationale ;
- et la mission de la communication.
•
La création de la direction de la musique, de la danse,
des théâtres et des spectacles
Cette réforme pouvait être considérée comme la plus
évidente en termes de bonne administration. En effet, en dépit
des particularismes des professions concernées, la direction de la
musique et de la danse et celle du théâtre et des spectacles
devaient de plus en plus traiter de difficultés analogues liées
notamment au partenariat avec les collectivités locales ou au
financement des équipes artistiques.
La création d'une direction unique de la musique, de la danse, du
théâtre et des spectacles résulte du décret
n° 98-841 du 21 septembre 1998, qui lui assigne comme mission
"
dans toutes les disciplines de la vie musicale,
théâtrale, chorégraphique, et, plus
généralement, des arts liés au spectacle vivant, de
favoriser la création et la diffusion, de développer
l'enseignement et les formations, d'encourager l'accès le plus large
possible aux oeuvres et aux pratiques, de protéger et de mettre en
valeur le patrimoine
".
Si l'organisation administrative de la nouvelle direction n'est pas
fondée sur des critères sectoriels, on relèvera que sont
placés auprès du directeur trois comités respectivement
chargés de la musique, de la danse, du théâtre et des
spectacles ayant pour mission de suivre l'activité artistique et de
veiller à la cohérence des actions du ministère pour
chacune de ces disciplines. A cet égard, on rappellera que le projet de
création d'une direction unique dans le domaine du spectacle vivant
avait suscité des craintes fondées sur le risque d'une perte
d'identité artistique des secteurs concernés.
•
Une inquiétude : des services
déconcentrés aux moyens encore trop limités
Le mouvement de déconcentration des décisions administratives
qu'est venu parachever le décret n° 97-34 du 15 janvier 1997
relatif à la déconcentration des décisions individuelles a
eu pour conséquence mécanique d'accroître les
responsabilités des services déconcentrés du
ministère de la culture, et en particulier des directions
régionales des affaires culturelles (DRAC).
Entre 1990 et 1998, le taux de déconcentration des
crédits
1(
*
)
est passé de 28 %
à 81 %, se traduisant donc par un alourdissement des tâches
de gestion des DRAC. Or, il semble que les DRAC, en dépit d'une
maturité dont attestent le dynamisme avec lequel elles sont
animées et la reconnaissance que leur accordent les partenaires du
ministère, n'aient pas acquis une dimension conforme à leur
charge d'activité, qui augmentera encore en 1999.
Or, comme votre rapporteur l'a souligné plus haut, si le renforcement de
leurs moyens constitue un objectif, l'ampleur et le rythme des
redéploiements de personnel envisagés ne lui ont pas
été communiqués. Par ailleurs, il relève que les
dotations de fonctionnement ne progressent que de 3,7 % et que les
crédits d'informatique dont elles bénéficieront sont
reconduits en francs courants, ce qui peut laisser perplexe compte tenu des
besoins existants en ce domaine. Dans ces conditions, il y a fort à
craindre que la déconcentration ne se traduise par des
difficultés administratives et notamment par un allongement des
délais de versement des subventions, déjà fort longs, ce
qui ne peut que nuire aux institutions ou troupes subventionnées.
A ce titre, votre rapporteur souligne que le succès de la
déconcentration tiendra non seulement dans le renforcement des moyens
des DRAC mais également à un
effort de simplification et
d'allégement des procédures
.
•
Le regroupement des services centraux du ministère de
la culture
Confirmée le 23 janvier 1998, la décision de regrouper les
services centraux du ministère de la culture au sein de l'immeuble
" Saint-Honoré Bons Enfants " permettra de réduire les
dysfonctionnements liés à l'éparpillement des
implantations du ministère et de diminuer les frais de gestion
actuellement très élevés (soit 30 millions de francs).
L'ensemble des directions du ministère sont concernées, à
l'exception de la direction des archives de France qui doit rester dans le
quadrilatère Rohan-Soubise.
Le coût global prévisionnel s'élève à
394,45 millions de francs. Le montant des autorisations de programme
ouvertes par cette opération jusqu'à la loi de finances pour 1998
s'élève à 215,35 millions de francs auxquels
s'ajoutent les autorisations de programme inscrites dans le projet de loi de
finances pour 1999, soit 84,6 millions de francs.
2. Un accroissement des dépenses en capital
Après une progression de 20 % en 1998, les autorisations de programme , comme nous le soulignions plus haut, diminuent de 4,9 % pour s'établir à 3 522,36 millions de francs tandis que les crédits de paiement s'élèvent à 3 543,32 millions de francs en progression de 3,5 %.
a) Les crédits du patrimoine
Après l'effort consenti en 1998 destiné à restaurer les dotations comparables à celles prévues par la loi de programme de 1993, le projet de loi de finances pour 1999 propose une augmentation de 3,4 % des crédits de paiement (1 443,35 millions de francs) et de 2,2 % des autorisations de programme (1 655,27 millions de francs) .
ÉVOLUTION DES CRÉDITS D'INVESTISSEMENTS
CONSACRÉS AUX MONUMENTS HISTORIQUES
(en millions de francs)
Chapitre |
Interventions |
|
LFI 1998 |
PLF 1999 |
1999/1998 (en %) |
Titre V |
Maîtrise d'ouvrage par l'État |
|
|
|
|
56-20/50 |
Monuments historiques appartenant à l'État |
CP |
574,9 |
707,35 |
+ 23 |
|
|
AP |
645 |
877 |
+ 36 |
56-20/60 |
Monuments historiques n'appartenant pas à l'État |
CP |
346,5 |
350,46 |
+ 1,1 |
|
|
AP |
377 |
380 |
+ 0,7 |
56-20/70 |
Archéologie |
CP |
17,34 |
18,24 |
+ 5,1 |
|
|
AP |
20 |
21 |
+ 5 |
56-20/90 |
Etudes |
CP |
7,1 |
6,7 |
- 5,6 |
|
|
AP |
7,52 |
5,87 |
- 21,9 |
Titre VI |
Maîtrise d'ouvrage propriétaires |
|
|
|
|
66-20/90 et |
Monuments historiques non État |
CP |
365,96 |
276,1 |
- 24,5 |
66-20/60 |
|
AP |
481,7 |
274,4 |
- 43 |
66-20/20 |
Travaux sur monuments non protégés |
CP |
34,3 |
34,1 |
- 0,5 |
|
|
AP |
35 |
35 |
- |
66-20/50 |
Archéologie |
CP |
49,8 |
50,4 |
+ 1,2 |
|
|
AP |
53,1 |
62 |
+ 16 |
Total CP |
|
|
1 395,9 |
1 443,35 |
+ 3,4 |
Total AP |
|
|
1 619,32 |
1 655,27 |
+ 2,2 |
L'analyse des crédits du patrimoine figurant au projet
de loi
de finances pour 1999 fait apparaître des
évolutions
contrastées
.
Si l'augmentation des crédits de paiement et des autorisations de
programme permet de consolider les dotations prévues par la loi de
finances pour 1998, votre rapporteur relève que
la progression
globale bénéficie essentiellement aux travaux effectués
par l'État sur ses monuments
, les crédits finançant
les travaux sur des monuments historiques n'appartenant pas à
l'État ne bénéficiant que d'une progression modeste en
crédits de paiement (1,1 %) pour ceux exécutés sous
maîtrise d'ouvrage de l'État et diminuant pour ceux
exécutés sous la maîtrise d'ouvrage des
propriétaires (-24,5 %). Cette évolution s'explique
essentiellement par le fait que les crédits concernant les travaux
effectués sur le Palais de Chaillot et le Grand Palais (soit
212 millions de francs d'autorisations de programme) ont été
transférés du chapitre 66-20 (subventions d'investissement
accordées par l'Etat) au chapitre 56-20 (investissements
exécutés par l'Etat).
Parmi les actions annoncées comme prioritaires dans l'affectation des
crédits du patrimoine, on retiendra les travaux de restauration des
cathédrales (Amiens, Chartres, Rouen, Strasbourg, Paris et Saint-Denis
de La Réunion), la poursuite des travaux sur les bâtiments du
Parlement de Bretagne,
l'accent mis sur la préservation et la
valorisation du patrimoine du XXe siècle
(restauration de la
villa Noailles de Mallet-Stevens par exemple),
le renforcement de la
politique d'inventaire et de protection du patrimoine industriel
ainsi que
l'ouverture des tranches de travaux pour la consolidation des fondations et des
structures du Grand Palais et la restauration de la façade et de la
statuaire de l'Opéra Garnier.
b) Les dépenses d'investissement hors patrimoine
Les
dépenses d'investissement hors crédits du patrimoine progressent
de 3,7 % en crédits de paiement (2 099,97 millions de francs)
et diminuent de 10,44 % en autorisations de programme (1
867,09 millions de francs).
Cette évolution contrastée résulte, d'une part, de la
volonté d'apurer la dette de l'Etat vis-à-vis des
collectivités locales grâce à un rattrapage en
crédits de paiement et, d'autre part, de la nécessité de
dégager les moyens nécessaires à la maintenance et
à la rénovation des grandes institutions culturelles.
• Depuis 1993, les délais de versement des subventions
d'investissement de l'Etat aux maîtres d'ouvrages locaux n'ont
cessé de s'allonger, conduisant en pratique les collectivités
locales à consentir à l'Etat des avances de trésorerie.
Ces difficultés ont par ailleurs été accrues du fait des
annulations de crédits de paiement intervenant en cours d'exercice
budgétaire.
A la fin 1997, la dette de l'Etat était estimée en crédits
de paiement à 267 millions de francs. Cette situation, qui avait
conduit les services du ministère des finances à bloquer les
nouveaux engagements dans l'attente du règlement des engagements plus
anciens, avait eu pour conséquence de retarder la réalisation de
nombreuses opérations de construction et de rénovation.
L'augmentation pour 1999 des crédits de paiement doit permettre de
contribuer à
apurer la dette de l'Etat vis-à-vis des
collectivités locales
et permettre, pour l'avenir, un flux plus
régulier d'engagements.
• Par ailleurs, l'accroissement des crédits de paiement
correspond à
la poursuite de l'effort engagé en faveur de la
remise en état du patrimoine des grandes institutions culturelles
.
Le programme de réaménagement des espaces intérieurs du
centre Georges Pompidou, rendu nécessaire pour des raisons tenant
à la fois à l'usure du bâtiment et au souci
d'améliorer le fonctionnement du centre, sera poursuivi. Le projet de
loi de finances pour 1999 prévoit de consacrer à ces travaux
139,5 millions de francs en crédits de paiement (soit +31 %
par rapport à 1998) et 75,5 millions de francs en autorisations de
programme.
Le domaine national de Versailles bénéficiera de mesures
nouvelles à hauteur de 34 millions de francs en crédits de
paiement afin d'entamer la mise en oeuvre d'un plan pluriannuel de
sécurité et d'accueil du public.
L'établissement public du Grand Louvre dont l'achèvement est
prévu pour l'année prochaine bénéficiera d'une
dotation, désormais affectée à l'établissement
public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels, s'élevant
à 35,92 millions de francs en crédits de paiement et
à 146,2 millions de francs en autorisations de programme. Par
ailleurs, il bénéficiera de 25,4 millions de francs en
autorisations de programme au titre de l'équipement
muséographique.
En ce qui concerne la Bibliothèque nationale de France, qui
connaîtra en 1999 sa première année de pleine
activité, elle bénéficiera de crédits
d'équipements s'élevant à 62 millions de francs (+
32 %) destinés notamment au catalogue collectif et à la mise
en place des pôles associés.
Par ailleurs, le chantier du musée des arts et des civilisations, dont
le coût est estimé à 1 milliard de francs, sera
entamé en 1999 ; 15,5 millions de francs en crédits de
paiement et 62 millions de francs en autorisations de programme lui seront
consacrés.
Cette politique d'investissement est en grande partie conduite par
l'établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux
culturels
(EPMOTC) créé par le décret n° 98-387
du 19 mai 1998. Ce nouvel établissement public, issu de la fusion de la
mission interministérielle des grands travaux et de
l'établissement public du Grand Louvre, a pour mission d'assurer
à la demande et pour le compte de l'Etat, "
la maîtrise
d'ouvrage des opérations de construction, d'aménagement, de
réhabilitation, de restauration, de gros entretien ou de
réutilisation d'immeubles appartenant à l'Etat et
présentant un intérêt culturel
". En outre, il
peut également assurer des missions identiques auprès des
collectivités locales et de leurs établissements publics.
En 1999, le montant des crédits consacrés à des
opérations susceptibles de lui être confiées
s'élève à 456,52 millions de francs en autorisations
de programme et sont retracés dans le tableau suivant :
DE MAÎTRISE D'OUVRAGE DES TRAVAUX CULTURELS (1998-1999)
Opérations |
Chapitre
|
LFI
|
Chapitre
|
PLF
|
Restructuration du Grand Palais |
66-20-90 |
150 |
56-20-50 |
217 |
Centre de la mémoire contemporaine à Reims |
66-91-69 |
144 |
|
- |
Grand Louvre |
66-91-69 |
200 |
66-91-69 |
35,92 |
Conventions Établissement public du Grand Louvre |
66-91-69 |
13,6 |
66-91-69 |
- |
Restauration de l'Orangerie |
66-91-69 |
7 |
66-91-69 |
28 |
Restructuration du Musée d'Orsay |
66-91-69 |
0 |
56-91-30 |
19 |
Travaux dans les autres musées nationaux |
66-91-69 |
10 |
56-91-30 |
4 |
Installation d'un accès-décors dans le Théâtre national de Chaillot |
|
|
56-91-40 |
11 |
Restructuration de l'Odéon |
66-91-69 |
121 |
|
|
Regroupement des services centraux |
66-91-69 |
167,7 |
56-91-60 |
84,6 |
Construction du centre national de la danse |
66-91-69 |
20 |
56-91-60 |
17 |
Institut national d'histoire et de l'art |
66-91-69 |
20 |
56-91-60 |
40 |
TOTAL |
|
853,3 |
|
456,52 |
Source : ministère de la culture
La seule lecture du " bleu " ne permet pas l'identification des
opérations relevant de l'EPMOTC. En effet, les opérations qu'il
conduit sont de trois ordres : d'une part, des opérations faisant
l'objet d'une convention entre l'Etat et l'EPMOTC financées sur les
chapitres 56-20 ou 56-91, des opérations encadrées par une
convention entre l'EPMOTC et un autre établissement public et des
opérations dont l'EPMOTC assure seul la maîtrise d'ouvrage
financées sur les crédits du chapitre 66-91, article 68. Pour ces
derniers, la globalisation au sein de cet article ne permet guère de
suivre les sommes consacrées aux différentes opérations
dont l'EPMOTC assure la maîtrise d'ouvrage.
L'augmentation des dotations en capital profite également à
des projets en région
. Les crédits destinés à
des opérations d'intérêt régional dont la
maîtrise d'ouvrage est confiée à des collectivités
locales s'élèveront en 1999 à 359,35 millions de
francs, en progression de 41 % par rapport à 1998. Les principales
augmentations concerneront les musées des collectivités locales
(+ 26,35 millions de francs), la restructuration du Cargo à
Grenoble (+ 45 millions de francs) et l'aménagement des
centres dramatiques nationaux et régionaux, des scènes nationales
et des salles municipales (+ 8,2 millions de francs).
II. RENFORCER LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE
Votre rapporteur a souligné à de nombreuses reprises que l'aménagement culturel du territoire et le développement de l'éducation artistique devaient constituer le socle d'une politique bien comprise de démocratisation culturelle. Il constate avec satisfaction que le projet de budget pour 1999 consolide les efforts engagés en ce sens. Néanmoins, et notamment en ce qui concerne l'éducation artistique, ils devront s'inscrire dans la durée afin de répondre aux besoins qui existent en ce domaine.
A. LA POURSUITE DE L'AMÉNAGEMENT CULTUREL DU TERRITOIRE
1. Le rééquilibrage en faveur de la province des interventions culturelles de l'Etat est confirmé
La
multiplication des chantiers portant sur la construction de grandes
institutions culturelles implantées dans la capitale, conjuguée
à la volonté croissante des collectivités locales
d'intervenir dans le domaine culturel, a fait naître une revendication
légitime en faveur d'un redéploiement de l'effort culturel de
l'Etat vers la province.
Ce rééquilibrage qui a été amorcé dès
les années 1980 et qui se poursuit en 1999 a notamment été
permis par la décroissance des crédits affectés aux grands
travaux. En effet, ces derniers avaient contribué à la croissance
du budget du ministère et, une fois leur réalisation
achevée, les crédits ont pu être redéployés
vers des équipements situés en province.
Au cours des dernières années, le rééquilibrage des
dépenses en faveur de la province a plutôt joué au
détriment de l'Ile-de-France, la part des crédits
consacrés à la capitale n'évoluant que dans des
proportions modestes.
Depuis 1989, le ministère s'est doté d'un instrument fiable lui
permettant de quantifier la répartition de ses dotations
budgétaires entre la capitale, la région Ile-de-France et la
province.
Les tableaux ci-dessous permettent d'évaluer la répartition entre
Paris et la province des crédits du ministère de la culture en
dépenses ordinaires et crédits de paiement :
BUDGET
GLOBAL DU MINISTÈRE DE LA CULTURE EN DÉPENSES ORDINAIRES
ET
AUTORISATIONS DE PROGRAMME
|
1998 |
1999 |
||||
|
Paris |
Ile-de-France |
Province |
Paris |
Ile-de-France |
Province |
Titre III |
77,8 |
3,3 |
18,5 |
77 |
3,6 |
19,2 |
Titre IV |
23,1 |
5,5 |
71,4 |
21,1 |
5,6 |
73,3 |
Titre V |
20,8 |
12,4 |
66,9 |
40,8 |
10,4 |
48,8 |
Titre VI |
60,2 |
6 |
33,8 |
44,4 |
8,7 |
46,9 |
TOTAL |
53,5 |
5,2 |
41,2 |
52,1 |
5,3 |
42,2 |
(en
pourcentage)
L'examen des chiffres du tableau appelle les analyses suivantes :
en ce qui concerne les crédits du titre IV, la part allouée
à la province passe de 71,4 % en 1998 à 73 % en 1999,
confirmant la part croissante prise par la province dans l'affectation des
crédits d'intervention depuis plusieurs années. Rappelons qu'en
1987, 54 % seulement des crédits du titre IV étaient
destinés à la province ;
la part des autorisations de programme affectées à la
province passe de 46,6 % en 1998 à 48 % en 1999
et celle
consacrée à Paris, de 42,4% à 44,9 %.
Cette progression globale recouvre néanmoins des évolutions
contrastées. Sur le titre V, on assiste en 1999 à un
rééquilibrage en faveur de Paris. En 1999, 48,8 % des
autorisations de programme bénéficieront à la province et
40,8 % à Paris, contre respectivement en 1998, 66,9 % et
20,8 %. Cette évolution s'explique en grande partie par le
transfert sur le titre V des crédits consacrés à des
opérations réalisées à Paris et dont l'EPMOTC
assure la réalisation et dont l'Etat est maître d'oeuvre. En ce
qui concerne le titre VI, le projet de loi de finances pour 1999
rétablit un équilibre favorable à la province qui
bénéficiera de 46,9 % des crédits contre 33,8 %
en 1998, les crédits affectés à Paris passant de
60,2 % à 44 %.
2. Pour un bon usage de la déconcentration
Le
mouvement de déconcentration a été initié au sein
du ministère de la culture dans les années 1980, lorsque la
croissance de ses moyens l'a amené à s'adapter à une
dimension qu'il n'avait pas jusque là, et s'est traduite par un
accroissement du rôle des directions régionales des affaires
culturelles qui constituent, avec les services départementaux des
archives et du patrimoine, les échelons déconcentrés du
ministère.
Parallèlement à cette évolution propre au ministère
de la culture, la déconcentration est devenue un principe fondamental de
l'organisation administrative de l'Etat. Conçue par la loi
n° 92-125 du 6 février 1992 relative à
l'administration territoriale de la République comme le corollaire
nécessaire de la décentralisation, elle a redonné vie
à l'adage selon lequel " on peut gouverner de loin, mais on
n'administre bien que de près ".
Plus qu'à tout autre domaine d'intervention de l'Etat, ce principe
administratif a vocation à s'appliquer à l'action conduite par le
ministère de la culture dont le rôle en matière de soutien
à la création et de diffusion culturelle se traduit de plus en
plus par un partenariat avec les collectivités locales et un dialogue
direct avec les artistes. Par ailleurs, il apparaît comme un moyen
privilégié de développer l'offre culturelle dans les
régions.
Le décret n° 97-1200 du 19 décembre 1997 a
précisé les conditions d'application de la règle
générale posée par le décret n°97-34 du
15 janvier 1997 selon laquelle les décisions individuelles entrant
dans le champ de compétences de l'Etat, à l'exception de celles
concernant les agents publics, sont prises par le préfet. Il s'est
traduit en 1998 par un accroissement du montant des crédits
déconcentrés, évolution qui devrait arriver à son
terme en 1999.
Si l'on tient compte des seuls crédits déconcentrables
2(
*
)
, les crédits déconcentrés
représentaient, en 1998, 81 % des dotations du ministère
contre 28 % en 1990.
Comme nous l'avons souligné plus haut, la déconcentration
entraîne en premier lieu un accroissement de la charge de travail des
directions régionales des affaires culturelles. Nous ne reviendrons pas
ici sur les inconvénients qui risquent de résulter d'une
insuffisance de leurs moyens.
Au-delà de ces difficultés liées à la gestion de la
politique culturelle, la déconcentration aura pour conséquence de
modifier les relations entre l'administration et les professionnels de la
culture
. Dans cette perspective, des inquiétudes se sont
manifestées face aux risques d'une politique culturelle, à
géométrie variable : l'administration centrale
dépourvue de moyens de contrôle ne serait plus capable de
coordonner la politique culturelle qui serait réduite à
l'addition de 23 politiques régionales. En ce domaine, votre rapporteur
considère que les outils statistiques et informatiques ne pourront se
substituer à la volonté politique.
Dans le souci de parer à ces critiques, la ministre a souhaité
relancer la politique contractuelle en la dotant d'un cadre
général précisant les droits et les obligations
respectives de l'Etat et des structures culturelles. Ce cadre
général est défini par
la charte du service public,
qui entrera en vigueur le 1er janvier 1999. Ce document qui avait vocation
à l'origine à s'appliquer au seul secteur du spectacle vivant
devrait concerner l'ensemble des domaines d'intervention du ministère, y
compris les musées. Destinée à clarifier les conditions de
l'intervention de l'Etat, elle fixe les principes généraux
définissant les responsabilités des équipes et des
structures subventionnées, les principales règles relatives
à la direction et à la gestion des établissements assurant
des missions de service public ainsi que les règles et les obligations
qui s'imposent à l'Etat.
Cette relance de la contractualisation correspond à une
nécessité. En effet, les structures culturelles doivent
évoluer dans le sens d'une responsabilisation accrue de façon
à mieux satisfaire les attentes du public et à mieux remplir leur
mission de service public. Cette dernière doit être fondée
sur la définition de priorités précises et la mise en
place d'instruments de contrôle et d'évaluation.
Cette exigence concerne non seulement les interventions
déconcentrées de l'Etat auxquelles devraient s'appliquer en
premier lieu la charte de service public, mais également les grandes
institutions culturelles situées à Paris,
qu'il s'agisse de
la Bibliothèque nationale de France ou du Grand Louvre. Ces
établissements doivent, en effet, participer activement à la
diffusion culturelle, notamment en prenant en compte, plus largement qu'elles
ne le font aujourd'hui, le rôle de têtes de réseau qui leur
incombe à l'égard des institutions situées en province.
Votre rapporteur souhaite que la contractualisation puisse constituer un moyen
d'évoluer en ce domaine.
Si votre rapporteur approuve les finalités de cette charte comme les
principes qu'elle réaffirme (répartition équilibrée
de l'offre culturelle, liberté des créateurs,
démocratisation de l'accès à la culture), il souligne que,
sous bien des aspects, ses dispositions demeurent très
générales et leurs conditions de mise en oeuvre très
floues, laissant à l'administration et à ses partenaires une
large marge d'appréciation. La valeur de ce document dépendra
donc des suites qu'entendra lui donner le ministère dans ses relations
avec les structures subventionnées.
3. Le bilan nuancé de la politique d'implantation d'équipements culturels en province
a) Les grands projets en régions
Le
programme des grands projets en régions décidé lors du
Comité interministériel d'aménagement du territoire de
Troyes en 1994 symbolisait la volonté politique de veiller à une
répartition plus équilibrée de l'action culturelle.
Couvrant la période 1995-2000 et bénéficiant d'une
enveloppe globale de 800 millions de francs, il visait à favoriser la
constitution d'un réseau de " pôles d'excellence "
susceptibles d'avoir une action " structurante " sur le tissu
culturel local.
Près d'un an avant la date fixée pour l'achèvement de ce
programme, le bilan des opérations réalisées dans ce cadre
est mitigé.
Le montant total des autorisations de programme inscrites entre 1995 et 1999 au
titre des grands projets en région ne s'élève qu'à
410 millions de francs, dont 70,9 millions de francs dans le projet de loi
de finances pour 1999.
Les crédits dégagés pour 1999 permettront de
financer :
- les aménagements intérieurs du centre des costumes de
scène à Moulins (16 millions de francs) ;
- le démarrage du projet de la Villa Arson à Nice, destiné
à abriter une école nationale supérieure d'art, un centre
d'art et une résidence pour artistes (5 millions de francs) ;
- la première tranche de restructuration du théâtre du
Cargo à Grenoble (45 millions de francs) ;
- et la réhabilitation de l'architecture coloniale de Saint-Laurent du
Maroni (3,9 millions de francs).
Il apparaît donc que ce programme, qui devait initialement porter sur une
enveloppe de 800 millions de francs, aura subi un singulier retard
puisqu'
un
peu plus de la moitié seulement de l'enveloppe
initialement prévue aura été dégagée
. On
relèvera qu'en dépit de la volonté affichée du
gouvernement de renforcer l'offre culturelle en province, les dotations
consacrées à ces projets diminuent en 1999 de près d'un
tiers par rapport à 1998, passant de 165,5 millions de francs
à 75,9 millions de francs et que le projet de centre de la
mémoire contemporaine à Reims a été
abandonné.
Le retard pris dans la mise en oeuvre de ce programme peut s'expliquer par les
modalités mêmes de réalisation des opérations,
entamées trop récemment ou programmées sur une
période supérieure à cinq ans, ou encore par le
caractère encore trop flou de certains des projets
sélectionnés en 1994. On regrettera aussi que les annulations
intervenues en cours d'exécution budgétaire aient frappé
si souvent les grands projets en région.
b) Les contrats de plan Etat-régions
Les
constats faits à propos de la réalisation du programme des grands
projets en région rejoignent ceux tirés du bilan du volet
culturel des contrats de plan Etat-régions qui s'achèveront en
1999.
En effet, dans le domaine culturel, le taux d'exécution des contrats de
plan Etat-régions sera de 83 % en 1999. Si l'on peut se
féliciter de l'effort accompli depuis 1997, année où le
taux d'exécution n'était que de 51 %, on notera que le
domaine culturel est celui où l'on constate les taux de
réalisation les plus faibles.
On rappellera que le budget des volets culturels des contrats de plan
s'élevait au total à 1 505,32 millions de francs (soit
1 411,55 millions de francs pour la métropole ;
53,30 millions de francs pour les départements d'outre-mer et
40,47 millions de francs pour les territoires d'outre-mer), soit plus du
double par rapport au Xe plan où la part de la culture s'élevait
à 612 millions de francs.
La répartition de ce budget privilégiait les actions relatives au
patrimoine et aux musées, qui représentent 54 % des
crédits, par rapport à celles relatives au spectacle vivant et
à la création, auxquelles sont destinés 46 % des
crédits. On relèvera que cette situation a traduit une
évolution par rapport au Xe plan où les parts respectives de ces
actions étaient de 80 % et 20 %.
4. Une décentralisation culturelle inachevée
Bien que
les lois de décentralisation n'aient que très ponctuellement
abordé l'action culturelle, les collectivités locales sont
devenues des partenaires actifs de la politique culturelle, représentant
à elles seules plus de la moitié des dépenses publiques
consacrées à la culture. Les considérables investissements
réalisés en ce domaine constituent à l'évidence le
facteur le plus décisif de la démocratisation de l'accès
à la culture. Néanmoins, on constate que le cadre juridique de
leurs interventions culturelles demeure encore imparfait.
Le choix que les collectivités locales font bien souvent de confier
à des associations de la loi de 1901 la gestion de certains services
publics montre bien qu'ils ne disposent pas à l'heure actuelle
d'instruments juridiques adaptés.
En effet, le droit actuel des services publics locaux se caractérise par
une multiplicité de statuts, chacun d'entre eux étant
destiné à servir de cadre à la gestion d'un service public
donné. Néanmoins, il comporte des lacunes et ne prévoit
pas de dispositions spécifiques pour nombre de nouveaux services pris en
charge par les collectivités locales, ce qui est notamment le cas dans
le domaine culturel.
En l'absence de dispositions spécifiques, il n'existe guère que
le statut des régies municipales qui puisse s'appliquer. Or, en
dépit d'une relative souplesse, les règles relatives aux
régies présentent de nombreux inconvénients et ne peuvent
être considérées comme un cadre satisfaisant pour les
interventions culturelles. En effet, il ne permet pas aux régions et aux
groupements de communes autres que les syndicats d'y avoir recours, ni
d'associer les efforts de plusieurs catégories de collectivités
publiques.
Faute d'un tel cadre, le recours aux associations pour gérer ce qui est
en fait un service public est de plus en plus fréquent. Or, ce cadre
juridique, bien qu'il présente d'incontestables avantages, comme la
soumission de leur activité au droit privé, n'est pas exempt de
danger.
Le premier écueil désormais bien connu pour avoir
été souvent condamné par la Cour des comptes est la
requalification de l'association en
association para-administrative
.
En effet, le recours excessif aux associations pour la gestion des services
publics locaux fait courir un triple risque aux collectivités et
à leurs responsables : un risque financier pour la
collectivité en raison de l'insuffisance des contrôles de l'usage
des fonds publics, un risque pour les élus et les fonctionnaires
impliqués dans la création et la gestion d'une association et
exposés à être déclarés comptables de fait
des deniers publics et, enfin, un risque de mise en jeu de la
responsabilité des dirigeants de l'association qui, au titre des fautes
de gestion, peuvent être condamnés à participer au
remboursement des dettes.
Par ailleurs, le statut associatif présente un second
inconvénient qui réside dans les incertitudes liées au
régime d'imposition des associations. Ce risque concerne bien entendu
toutes les associations oeuvrant dans le domaine culturel -et non pas seulement
celles créées à l'initiative d'une collectivité
locale.
En effet, bien que la loi dispose que les associations à but lucratif ne
sont pas assujetties aux impôts commerciaux, celles-ci ont
été de plus en plus nombreuses à faire l'objet de
redressements dont les conséquences, dans de nombreux cas, ont
menacé leur existence même. Afin de remédier à ces
difficultés, une instruction fiscale du 15 septembre 1998, prise
à la suite du rapport remis par M. Goulard au Premier ministre a
précisé les critères d'application du caractère
" non lucratif " des associations.
L'instruction réaffirme le principe selon lequel les associations
à but non lucratif ne sont pas assujetties aux impôts commerciaux
et précise les méthodes d'analyse et les conditions dans
lesquelles sera apprécié le caractère non lucratif de leur
activité.
On relèvera que les critères sont définis de
manière assez stricte par la circulaire, en particulier en ce qui
concerne les moyens de publicité utilisés lorsque l'association
intervient dans un domaine où existent des entreprises commerciales.
Dans bien des cas, ils entraîneront l'assujettissement des associations
aux impôts commerciaux.
En dépit des mesures d'accompagnement prises en faveur des associations
de bonne foi et de la possibilité ouverte aux collectivités
locales par l'article 73 du projet de loi de finances pour 1999 de porter
de 50 à 100 % l'exonération de la taxe professionnelle pour
les associations du secteur culturel, il n'est pas exclu que cette
clarification se traduise par un accroissement des charges fiscales des
associations, ce qui posera à terme, pour celles qui sont liées
à des collectivités locales, la question d'une éventuelle
augmentation de leurs subventions. Pour ces dernières, l'instruction
fiscale apparaît comme un motif supplémentaire plaidant en faveur
de la création d'un statut juridique plus adapté et plus clair.
Préconisée par la commission Rigaud, la création
d'un
nouveau type d'établissement public local, l'établissement public
culturel, permettrait sans doute d'offrir un cadre plus adapté aux
interventions culturelles des collectivités locales
.
Votre rapporteur souhaite donc que la réflexion engagée sur ce
sujet par les ministères de la culture et de l'intérieur à
partir de la proposition de loi adoptée sur ce sujet en 1997 par
l'Assemblée nationale puisse aboutir rapidement.
B. L'ÉDUCATION ARTISTIQUE ET CULTURELLE, CONDITION DE LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE
L'éducation artistique et culturelle constitue l'un des
enjeux majeurs de la politique culturelle.
Au delà du rôle qu'elle est appelée à jouer dans
l'éveil des sensibilités et dans la formation du goût et du
sens critique, elle constitue un instrument primordial au service de l'objectif
de démocratisation culturelle.
Or, la France enregistre en ce domaine un retard par rapport aux pays
européens qu'il s'agisse de l'Italie, pour l'enseignement de l'histoire
de l'art, ou des pays scandinaves, en matière d'initiation à la
pratique artistique à l'école.
Les conclusions de la commission Rigaud qui invitaient à affirmer un
" droit permanent du citoyen " à l'éducation artistique
et culturelle conservent aujourd'hui toute leur pertinence.
En ce domaine, l'école a, d'évidence, un rôle
déterminant à jouer. En effet, l'éducation artistique et
culturelle constitue, à l'égal de la lecture, de
l'écriture et du calcul, un enseignement fondamental. Le rapport remis
au printemps dernier au ministre de l'éducation nationale par
M. Philippe Méirieu, président du comité
d'organisation de la consultation nationale sur l'avenir des lycées, a
souligné à cet égard que les jeunes lycéens
aspiraient à acquérir dans le cadre des établissements
scolaires une culture commune.
Au delà de l'école et en exceptant l'enseignement
supérieur des arts qui constitue l'un des moyens de la politique d'aide
à la création, l'éducation artistique et culturelle doit
s'adresser à tous, y compris aux plus démunis pour lesquelles
elle constitue un instrument de lutte contre l'exclusion et un moyen d'assurer
l'égalité des chances. Cela justifie donc que toutes les
autorités publiques, qu'il s'agisse de l'Etat et des
établissements publics placés sous sa tutelle ou des
collectivités locales, y prennent une part active.
1. Les crédits consacrés aux enseignements artistiques
La
volonté exprimée par Mme Catherine Trautmann de dégager
des moyens nouveaux en faveur des enseignements artistiques va
incontestablement dans le bon sens. Néanmoins, l'effort consenti en ce
domaine mérite d'être accru afin de doter la France, comme le
proposait la commission Rigaud, au cours des vingt prochaines années
d'un " système cohérent et efficace d'éducation
culturelle du citoyen ".
Les crédits consacrés aux enseignements artistiques
(hors
dépenses de personnel et de fonctionnement des services du
ministère y afférent) qui connaissent une progression moindre
qu'en 1998 s'élèvent en 1999 à 1,33 milliard de francs en
dépenses ordinaires,
en progression de 2,4 % par rapport
à 1998,
et à 178,2 millions de francs en autorisations de
programme, en progression de 15,7 % par rapport à 1998.
Le tableau ci-dessus indique la ventilation des crédits consacrés
aux enseignements artistiques inscrits dans le projet de loi de finances pour
1999.
Crédits 1998 et 1999
en millions de francs
Chapitre et article |
LFI 1998 |
PLF 99 |
1999/1998
|
36-60 Subventions aux établissements publics |
505,7 |
512,3 |
+ 1,3 |
43-20 Interventions d'intérêt national |
236,7 |
263 |
+ 11 |
- 40: Enseignements et formations |
228,56 |
200,25 |
- 12,4 |
- 50 : Bourses d'études |
8,18 |
6,8 |
- 16,9 |
- 60 : Bourses d'enseignement supérieur |
|
55,9* |
|
43-30 Interventions déconcentrées |
541,7 |
524,1 |
- 3,2 |
Total interventions Titre IV |
778,4 |
787,1 |
+ 1,1 |
Total dépenses ordinaires |
1 284,1 |
1 299,4 |
+ 1,2 |
56-91 Investissement (AP) |
137,6 |
146,8 |
+ 6,6 |
66-91 Subvention d'équipement |
16,4 |
31,4 |
+ 91,4 |
Total dépenses en capital |
154,0 |
178,2 |
+ 15,7 |
Total (DO + AP) |
1 438,1 |
1 477,6 |
+ 2,7 |
*
Transfert du chapitre 36-60 pour 3,4 millions de francs et du chapitre 43-30
pour 45 millions de francs
Ce tableau fait apparaître les évolutions suivantes :
- une progression de 2,7 % des subventions aux établissements
publics qui profite essentiellement aux écoles d'architecture, au
réseau des écoles d'art du centre national des arts plastique et
à l'ENSMIS
3(
*
)
;
- une faible progression des crédits d'intervention (+1,1 %) qui,
à structure constante c'est-à-dire en ne tenant pas compte du
transfert des crédits de bourse sur le titre IV, diminuent de
6 % ;
- une progression de 15,7 % des dépenses en capital, qui
bénéficie pour une large part aux écoles municipales et
régionales d'art.
Afin de tenter d'apprécier la situation des enseignements artistiques en
France, il convient de distinguer entre la pratique de ces enseignements
à l'école, d'une part, et l'offre d'enseignements artistiques
spécialisés, d'autre part.
2. Les enseignements et pratiques artistiques en milieu scolaire
Les crédits destinés à financer ces actions sont extrêmement difficiles à identifier à la seule lecture du " bleu " en raison notamment des modifications de nomenclature budgétaire. On relèvera que la diminution de 2,3% des crédits d'intervention de la délégation au développement culturel et à l'aménagement du territoire sur lesquels sont financées ces actions ne rend guère possible leur développement, ce qui est regrettable compte tenu de leur incontestable intérêt.
a) Les enseignements obligatoires : une application encore imparfaite de la loi
La loi
du 6 janvier 1988 précitée rend obligatoire dans l'enseignement
primaire et le premier cycle du secondaire, l'enseignement d'au moins deux
disciplines artistiques, la musique et les arts plastiques. Sur ce point, son
application relève du ministère de l'éducation nationale.
A l'école primaire
, le respect de l'obligation posée par
la loi est difficile à contrôler. En effet, si les programmes
posent le principe d'un enseignement de la musique et des arts plastiques
à raison d'une heure hebdomadaire, cet enseignement est en
général assuré non par des professeurs
spécialisés comme dans le secondaire mais par des instituteurs et
des professeurs des écoles.
On constate dans les faits qu'encore bien souvent ces enseignements ne sont pas
assurés, ceci pouvant s'expliquer par le sentiment d'incompétence
que peuvent ressentir certains enseignants face à des disciplines pour
lesquelles ils ne disposent pas d'une formation pédagogique suffisante
et par la lourdeur des programmes liés aux apprentissages fondamentaux.
Face à ce constat, apparaît la nécessité de
renforcer la formation des enseignants aux disciplines artistiques
dispensée dans les Instituts universitaires de formation des
maîtres (IUFM), qui apparaît pour l'heure encore insuffisante. A
cet égard, la pratique des conventions passées entre des IUFM et
des DRAC afin d'améliorer la formation initiale et continue des
enseignants devrait être systématisée.
Dans le premier cycle du secondaire,
les difficultés
constatées dans l'application de la loi de 1988 tiennent
désormais essentiellement à la qualité de l'enseignement
dispensé. Là encore, un effort de formation des enseignants
s'impose afin que les enseignements dispensés soient de nature à
permettre un réel accès des élèves à la
culture.
b) Les activités et pratiques culturelles
Dans le
prolongement des enseignements artistiques obligatoires et optionnels, le
ministère de la culture participe à l'application de la loi
n° 88-20 du 6 janvier 1988 relative aux enseignements
artistiques en soutenant les actions engagées à l'école en
partenariat avec les professionnels de la culture dans le cadre de dispositifs
conjoints avec le ministère de l'éducation nationale et des
orientations du protocole sur l'éducation artistique signé en
novembre 1993.
Le tableau ci-dessous récapitule, conformément à l'article
16 de la loi du 6 janvier 1988, les crédits consacrés en
1998 par le ministère de la culture à des actions prenant place
dans des dispositifs d'éducation artistique. Il ne tient pas compte des
projets, qui n'entrent dans le cadre d'aucun dispositif mais peuvent faire
l'objet d'une contractualisation spécifique, ni des contrats de ville
qui représentent une part importante des actions financées par le
ministère au titre de l'éducation culturelle et artistique.
ETAT
RÉCAPITULATIF PRÉVU PAR L'ARTICLE 16
DE LA LOI DU 6 JANVIER
1988 POUR L'ANNÉE 1998
|
Nombre
|
Nombre d'élèves touchés |
Crédits alloués par
le ministère de la
culture
|
Ateliers et classes culturelles en primaire |
1 800 |
45 000 |
8,5 |
Ateliers de pratique artistique en collèges, lycées et lycées professionnels |
2 421 dont 1 650 menés avec des professionnels culturels |
50 200
|
22 |
Enseignements optionnels en lycée, en théâtre, en cinéma |
environ 300 |
environ 25 000 |
22 |
Jumelages entre des établissements et des structures culturelles |
130 |
60 000 |
14,3 |
Sites expérimentaux d'éducation artistique |
21 villes
|
200 000 |
9,195 |
Écoles, collèges, lycées au cinéma |
|
603 000 |
16,4 |
Total |
|
983 200 |
92,4 |
Source : Ministère de la Culture
Les activités culturelles et artistiques mises en place grâce au
ministère de la culture n'apparaissent plus comme des activités
complémentaires ou périphériques mais sont en passe de
devenir des composantes à part entière du projet global
d'éducation.
* Les
classes culturelles
et les
ateliers de pratique
artistique
rencontrent un grand succès
Les premières impliquent le déplacement d'une classe pendant une
semaine et sont axées sur la découverte d'une activité de
création ou du patrimoine.
Les ateliers de pratique artistique concernent les collèges ou les
lycées et sont animés par une équipe regroupant à
la fois des enseignants et des professionnels du secteur culturel. Ils se
déroulent sur trois ou quatre mois à raison de deux à
trois heures hebdomadaires.
Au cours de l'année scolaire 1997-1998, dans les écoles,
1 800 classes culturelles et ateliers de pratique artistique ont permis
à près de 55 000 enfants de découvrir une discipline
artistique ou un élément du patrimoine. Le ministère de la
culture y a consacré 8,2 millions de francs.
La même année, 46 700 élèves du secondaire ont
fréquenté un atelier de pratique artistique. Le budget
consacré à ces actions s'est élevé en 1998 à
22 millions de francs.
* Le ministère de la culture apporte, par ailleurs,
son soutien aux
enseignements artistiques optionnels dans les classes des lycées
, en
prenant à sa charge la rémunération des artistes
professionnels qui collaborent avec les enseignants spécialisés
qui relèvent de l'éducation nationale. Au cours de l'année
1997-1998, 104 lycées ont dispensé un enseignement
spécialisé dans le domaine du cinéma, 110 lycées un
enseignement du théâtre et 78 lycées un enseignement
d'histoire de l'art. Ces enseignements ont été suivis par environ
27 000 lycéens.
La contribution du ministère de la culture à la sensibilisation
artistique des écoliers, des collégiens et des lycéens
prend également des formes variées.
* Lancée à la rentrée 1992, la formule des
"
jumelages
" repose sur le rapprochement d'un
établissement culturel et d'un établissement scolaire.
Au fur et à mesure des années, cette formule s'adresse à
une population de plus en plus large. Les établissements culturels
participant à ces opérations sont dans la plupart des cas des
institutions culturelles placées sous la tutelle de l'Etat ayant une
activité artistique régulière et disposant d'un personnel
permanent.
* De façon plus ponctuelle, le ministère de la culture met en
oeuvre des opérations destinées à sensibiliser les jeunes
à l'image de celles entreprises dans le domaine du cinéma, qui
ont pour objectif de faire découvrir des films en salles avec un
accompagnement pédagogique. Le ministère de la culture a
consacré en 1998 16,4 millions de francs à ces
opérations qui ont concerné près de 600 000
élèves.
* Enfin, dans le cadre du protocole d'accord interministériel
signé le 17 novembre 1993 entre les ministères de la
culture, de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, des
actions expérimentales
ont été lancées.
Ainsi, à la rentrée 1994, a été engagée ce
qu'il est convenu d'appeler la "
politique des sites
". Cette
politique connaît désormais une certaine désaffection qui a
incité le ministère de la culture à procéder
à l'évaluation de ce dispositif auquel il a consacré, en
1998, 3,8 millions de francs.
Par ailleurs, le ministère de la culture a participé à la
mise en place des dispositifs d'aménagement du rythme de vie des
enfants, et en particulier des
ARVEJ
(dispositifs d'aménagement
des rythmes de vie de l'enfant et du jeune). Afin de renforcer la participation
des institutions et des associations culturelles à ces
opérations, il a signé, conjointement avec les ministères
de l'éducation nationale et de la jeunesse et des sports, la circulaire
du 31 octobre 1995 qui fixe les modalités de l'ARVEJ.
Dans ce cadre, une vingtaine de communes ont signé des conventions avec
le ministère de la culture afin de développer l'éducation
artistique des enfants scolarisés à l'école maternelle et
élémentaire.
La multiplication des dispositifs locaux et des sites expérimentaux
mis en place comme dans certains cas l'usure de certaines actions ont rendu
nécessaires une simplification et une clarification des modalités
de l'intervention du ministère de la culture
. La circulaire
n° 98-153 du 22 juillet 1998 signée conjointement avec
les ministres de l'éducation nationale et de l'enseignement scolaire
devrait y contribuer. Ce texte devrait permettre de recentrer l'action du
ministère sur des priorités mieux identifiées et
étendre la portée des dispositifs existants.
Par ailleurs, elle généralise à toutes les régions
l'établissement de conventions entre les DRAC et les rectorats
destinées à préciser les finalités des
opérations engagées et à en fixer les modalités
d'évaluation, ce qui sera -votre rapporteur le souhaite- un moyen de
renforcer le partenariat entre les services de la culture et de
l'éducation nationale, qui pour l'heure est insuffisant.
Dans cette perspective,
il semblerait opportun de compléter les
attributions du ministère de la culture afin de lui reconnaître la
mission de promouvoir et de développer l'éducation artistique et
culturelle et à ce titre celle de coordonner les actions entreprises
dans ce domaine par les différents ministères
. Il faut bien
reconnaître qu'en ce domaine, le chevauchement des attributions
ministérielles aboutit souvent à l'inaction.
Par ailleurs, il est essentiel de rappeler que cette mission doit inspirer
l'action de tous les établissements culturels subventionnés par
le ministère de la culture. A ce titre, votre rapporteur souhaite que la
charte du service public constitue un moyen pour le ministère de faire
participer plus activement les structures qu'il subventionne à cette
mission.
3. Les enseignements spécialisés
L'action menée par le ministère de la culture, en vue de promouvoir les enseignements spécialisés des différentes disciplines artistiques est prise en charge, pour partie, par des établissements publics, sous tutelle du ministère, pour partie, par des institutions agréées, sous tutelle des collectivités locales, et par des associations qui reçoivent des subventions.
a) Les établissements publics délivrant un enseignement supérieur
Le
ministère de la culture participe au financement des
établissements publics délivrant une formation supérieure
placés sous sa tutelle. Souvent héritiers d'une tradition
prestigieuse, ces établissements, en permettant le renouvellement de la
création, contribuent de manière déterminante à la
politique artistique du ministère de la culture.
Ce réseau a été complété par les
écoles d'architecture, placées sous la tutelle du
ministère de la culture depuis 1997. Bien que constituant une charge
budgétaire supplémentaire, puisqu'elles représentent
31 % des subventions de fonctionnement accordées aux
établissements nationaux d'enseignement artistique, elles lui permettent
de renforcer la cohérence de sa politique de soutien à la
création artistique.
Le tableau ci-après retrace les subventions de fonctionnement des
établissements nationaux d'enseignement artistique
supérieur.
D'ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE SUPÉRIEUR
(en millions de francs)
|
Chapitres |
LFI 1998 |
PLF 99 |
1999/1998
|
Arts plastiques |
|
|
|
|
36-60-37 |
École nationale supérieure des Beaux-Arts |
14,97 |
15,09 |
0,8 |
36-60-38 |
École nationale supérieure des arts décoratifs |
21,58 |
22,65 |
4,96 |
36-60-72 |
École nationale supérieure de création industrielle |
17,57 |
17,68 |
0,63 |
36-60-39 |
Académie de France à Rome |
24,25 |
27,16 |
0,54 |
36-60-71 |
Centre
national des arts plastiques
|
25,06 |
27,16 |
- |
Théâtre |
|
|
|
|
36-60-52 |
Conservatoire national supérieur d'art dramatique |
5,41 |
6,18 |
14,23 |
Musique et danse |
|
|
|
|
36-60-52 |
Conservatoire national supérieur de musique de Paris |
73,71 |
74,09 |
0,52 |
36-60-53 |
Conservatoire national supérieur de musique de Lyon |
57,24 |
57,65 |
0,72 |
36-60-55 |
École de danse de Nanterre |
16,8 |
16,96 |
0,95 |
Histoire de l'art |
|
|
|
|
36-60-36 |
École du Louvre |
13,41 |
13,48 |
0,52 |
36-60-34 |
École nationale du patrimoine inclus (IFROA) (2) |
40,57 |
40,74 |
0,42 |
Cinéma-audiovisuel |
|
|
|
|
36-60-57 |
École nationale supérieure des métiers de l'image et du son |
31,5 |
33,84 |
7,43 |
Architecture |
|
|
|
|
36-60-58 |
Écoles d'architecture |
157,16 |
162,15 |
3,18 |
TOTAL |
|
499,23 |
512,05 |
2,57 |
(1) Il
s'agit des services extérieurs du Centre national des arts plastiques
(écoles d'Aubusson, Bourges, Cergy-Pontoise, Dijon, Limoges, Nancy et
Nice) : le montant de l'enveloppe qui leur est affectée a
été fourni par le ministère de la Culture.
(2) Institut français de restauration des oeuvres d'art.
Source : ministère de la Culture.
En 1999,
les subventions de fonctionnement aux établissements
nationaux d'enseignement artistique supérieur s'élèveront
à 512,05 millions de francs, en progression de 2,57 %.
Par ailleurs, il convient de noter que les crédits consacrés aux
bourses désormais transférés du titre III au titre IV en
1999 (chapitre 43-20 article 50) sont majorés de 10,03 % afin
d'aligner les bourses attribuées aux étudiants en arts plastiques
sur les barèmes de l'éducation nationale.
* Dans le domaine des
arts plastiques
, l'enseignement supérieur
est dispensé par trois établissements publics parisiens
(l'école nationale supérieure des Beaux Arts, l'école
nationale supérieure des arts décoratifs et l'école
nationale supérieure de la création industrielle) ainsi que par
sept écoles nationales d'art en région rattachées au
Centre national des arts plastiques.
Ces établissements sont engagés dans des réformes
structurelles destinées à rationaliser leurs statuts et à
développer leurs relations avec les professionnels. L'objectif de
constituer un réseau des écoles d'art ne semble néanmoins
pas encore atteint, les particularismes propres à chaque
établissement ne facilitant guère sa réalisation.
On relèvera qu'en 1999 un effort sera consenti afin de doter les sept
écoles nationales d'art en région de moyens de fonctionnement
conformes à leurs missions et à la qualité des
enseignements qu'elles dispensent, l'objectif étant de parvenir à
ce qu'elles puissent bénéficier de dotations budgétaires
par élèves comparables à celles des écoles
nationales supérieures parisiennes, traditionnellement mieux
dotées. L'augmentation des crédits d'investissement qui leur
seront consacrées en 1999 est essentiellement destinée à
la rénovation de la Villa Arson à Nice.
* L'enseignement supérieur de la
musique et de la danse
est
assuré par deux conservatoires nationaux implantés respectivement
à Paris et à Lyon, ainsi que par l'école de danse de
Nanterre, et celui du théâtre par le conservatoire national
supérieur d'art dramatique et l'école rattachée au
théâtre national de Strasbourg.
* Dans le domaine du
cinéma
, l'enseignement professionnel est
dispensé par l'école nationale supérieure des
métiers de l'image et du son, établissement public à
caractère industriel et commercial qui a succédé en 1998
à la FEMIS. Elle bénéficiera en 1998 d'une augmentation de
ses moyens de fonctionnement (+7,4 %) et d'investissement (+ 50 %)
ainsi que d'une dotation exceptionnelle, destinée à permettre son
installation dans les locaux rénovés des anciens studios
Pathé.
* Le transfert de la direction de l'architecture au ministère de la
culture s'est effectué avec le souci de réaffirmer l'importance
artistique et sociale de cette discipline.
Les
écoles d'architecture
bénéficieront de moyens
de fonctionnement accrus (+3,18 %) afin d'achever dans de bonnes
conditions la réforme des études d'architecture.
* Dans le domaine de l'histoire de l'art, l'enseignement est dispensé,
d'une part, par l'école nationale du patrimoine qui forme les futurs
conservateurs du patrimoine, et d'autre part, par l'école du Louvre,
auparavant rattachée à la Réunion des musées
nationaux et désormais érigée en établissement
public.
Au delà de ces institutions prestigieuses et en dépit de la
richesse du patrimoine français, il n'existait pas jusqu'ici de centre
de recherche et d'enseignement capable de rivaliser avec les instituts
étrangers.
Le projet d'institut national d'histoire de l'art
dont
la réalisation dans les locaux de la rue Vivienne est rendue possible
par le déménagement des départements des imprimés
et des périodiques de la Bibliothèque nationale de France sur le
site de Tolbiac a pour ambition de remédier à cette situation. Le
coût de ce projet s'élève à 362 millions de
francs, financés pour 188,4 millions de francs par le
ministère de l'éducation nationale et pour 173,6 millions de
francs par le ministère de la culture. S'y ajoute le coût de la
mise aux normes des locaux qui lui sont dévolus, estimé à
125 millions de francs, qui sera pris en charge par le ministère de
la culture.
Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit, pour ce projet,
40 millions de francs d'autorisations de programme qui s'ajoutent à
celles ouvertes en 1998 (20 millions de francs). Sa réalisation,
qui se déroulera sur quatre années, devrait permettre :
- de regrouper les équipes d'enseignement de 3e cycle et les
équipes de recherche de différentes universités (Paris I,
Paris III, Paris IV, Paris VII, Paris VIII, Paris X), l'école des hautes
études en sciences sociales, l'école pratique des hautes
études et l'école du patrimoine ;
- de constituer une bibliothèque à partir de fonds documentaires
jusqu'ici épars ;
- et de créer une iconothèque s'adressant à la
communauté scientifique mais également aux enseignants du
primaire et du secondaire ainsi qu'au grand public.
Votre rapporteur souhaite que ce projet contribue à la diffusion des
connaissances scientifiques et permette une meilleure valorisation de la
richesse de notre patrimoine, notamment dans la perspective du
développement de son exploitation multimédia.
b) Le soutien aux écoles municipales et régionales d'art
Le
ministère de la culture verse des subventions aux collectivités
territoriales pour le fonctionnement des écoles de musique et de danse
et des écoles d'art plastique agréées par l'Etat.
En 1999, les crédits correspondants s'élèveront pour
les dotations de fonctionnement à 136,39 millions de francs, en
progression de 9,6 %, et pour les dotations d'équipement, à
29,8 millions de francs, en progression de 115,4 %.
En ce qui concerne le fonctionnement
, les mesures nouvelles permettront :
- d'aligner le barème des bourses sur celui de l'éducation
nationale,
- d'accroître la participation de l'Etat au fonctionnement des
écoles les moins bien dotées,
- et de permettre le développement de l'école supérieure
européenne de l'image d'Angoulême-Poitiers et de l'école du
Fresnoy (Nord).
En matière d'investissement
, les priorités porteront :
- sur l'achèvement des travaux des écoles d'Angoulême et de
Poitiers,
- et sur la poursuite d'opérations concernant onze régions.
Votre rapporteur salue l'effort consenti en 1999 en faveur des écoles
d'art. Néanmoins, il devra être poursuivi dans les années
afin de tenir compte des besoins de ces écoles.
En effet, les subventions accordées par l'Etat ne permettent pas
aujourd'hui de soutenir efficacement les initiatives des collectivités
locales en ce domaine. A titre d'exemple, la contribution du ministère
de la culture plafonnait en 1994 à 8,2 % du budget de
fonctionnement des conservatoires nationaux de région et des
écoles nationales de musique.
Le coût pour les collectivités locales de cette politique de
soutien aux enseignements artistiques se traduit par une forte disparité
de l'offre de formation entre les régions. Par ailleurs, le manque
d'équipements pousse certaines écoles, face à l'afflux des
demandes d'inscription, à opérer une sélection
sévère bien éloignée des principes de
démocratisation justifiant l'intervention des collectivités
publiques en ce domaine.
On relèvera que l'article 157 de la loi n° 98-657 du 29 juillet
1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions a ouvert
aux collectivités locales la possibilité de différencier
les tarifs des services dispensant des enseignements artistiques en fonction du
quotient familial des usagers, faculté légitime qui devrait
favoriser l'accès de tous à ces services publics en permettant,
notamment aux enfants, d'accéder à la culture et à la
pratique artistique.
Il existe en ce domaine une forte demande sociale attestée par
l'engouement des Français pour les
pratiques artistiques amateur
.
La dernière enquête sur les pratiques culturelles des
Français révèle, en effet, que 18 % des
Français ont joué d'un instrument ou fait du chant au cours des
douze derniers mois et que 32 % ont pratiqué en amateur une ou
plusieurs activités non musicales, contre 27 % en 1989. La
volonté exprimée par la ministre de relancer la pratique amateur
correspond donc à une attente des Français, et en particulier des
plus jeunes d'entre eux. Votre rapporteur note, à ce titre, que la
réalisation de cet objectif doit passer essentiellement par un
renforcement du soutien apporté par l'Etat à l'effort
consacré par les collectivités locales à
l'éducation artistique et culturelle. A ce titre, il souligne qu'une
clarification législative des compétences de l'Etat et des
collectivités locales, souvent promise par les ministres de la culture
successifs, serait en ce domaine bienvenue et permettrait sans doute de
relancer la politique en faveur de l'éducation artistique.
III. ASSURER LA PÉRENNITÉ DE LA POLITIQUE PATRIMONIALE
A. QUEL AVENIR POUR LA POLITIQUE DU PATRIMOINE ?
1. Une nécessité : maintenir une capacité d'intervention substantielle de l'Etat
a) Un champ d'action de plus en plus large
•
L'accroissement du champ de l'action patrimoniale de l'Etat...
La loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques a confié
à l'Etat la charge d'assurer la conservation du patrimoine
protégé. Cette responsabilité n'est plus aujourd'hui de la
même nature qu'au début du siècle. En effet, et il s'agit
là d'une des évolutions majeures auxquelles a été
confrontée la politique culturelle au cours des dernières
années, le champ de l'action patrimoniale de l'Etat s'est
considérablement élargi. Limité à l'origine
à quelques grands monuments prestigieux, il s'étend
désormais à des vestiges de plus en plus variées du
passé.
Cette évolution qui s'explique par une modification de la conception de
l'histoire et de l'art s'est reflétée dans la politique de
classement. Aujourd'hui, 39 600 immeubles sont protégés au
titre des monuments historiques, soit 13 830 immeubles classés et
25 770 immeubles inscrits à l'inventaire des monuments historiques.
Bien que depuis 1995 on assiste à un ralentissement du rythme des
classements, ces chiffres témoignent de l'étendue des
responsabilités de l'Etat.
Par ailleurs, notre dispositif de protection du patrimoine révèle
encore des lacunes. Ainsi, le cadre juridique de la loi du 31 décembre
1913 ne permet pas d'assurer dans des conditions satisfaisantes la protection
des objets mobiliers, notamment en ce qui concerne le mobilier ou les
décors intérieurs des châteaux, trop souvent victimes de
l'appétit financier de repreneurs peu sensibles à leur valeur
esthétique et historique et à la nécessité de les
maintenir dans leur cadre d'origine. A ce titre, votre rapporteur se
félicite de l'annonce par la ministre du dépôt d'un projet
de loi sur ce sujet.
•
... répond à une attente des Français
Parallèlement à cette évolution, s'est fait jour chez nos
concitoyens le sentiment que le patrimoine ne devait pas seulement être
l'objet de respect et de soins mais que, trace de l'activité des
générations passées, il était un témoin
vivant et familier de leur histoire, source d'identité face aux
interrogations du présent. Ce sentiment n'a fait que renforcer la
légitimité de l'intervention de l'Etat dans ce domaine.
b) La nécessité de maintenir une capacité d'intervention substantielle de l'Etat
•
Le bilan de la loi-programme n° 93-1437 du 31 décembre 1993
relative au patrimoine monumental
Le vote de lois de programme ne concerne que quelques secteurs de l'action
gouvernementale. Les lois de programme de 1988 et de 1993 dans le domaine du
patrimoine monumental traduisaient la volonté du gouvernement d'accorder
une priorité particulière aux investissements sur les monuments
historiques.
La loi de programme du 31 décembre 1993, qui portait sur les
années 1994 à 1998, prévoyait d'affecter à la
" conservation du patrimoine monumental d'intérêt
public " un montant de 7.849 millions de francs d'autorisations de
programme (soit 8.014 millions de francs si l'on tient compte de
l'actualisation). Prévoyant une progression régulière des
investissements de 2 % par an, la loi avait fixé cinq tranches
annuelles réparties comme suit :
CINQ TRANCHES ANNUELLES RÉPARTIES COMME SUIT :
Années |
Tranches annuelles (1) |
Montant actualisé (1) |
1994 |
1508 |
- |
1995 |
1538 |
1573,37 |
1996 |
1569 |
1611,36 |
1997 |
1601 |
1644,22 |
1998 |
1633 |
1677,09 |
(1)
en millions de francs.
L'exécution de la loi de programme dans le cadre des lois de finances
est retracée dans le tableau suivant :
(en millions de francs)
Années |
Dotations actualisées prévues par la loi de programme |
Dotations résultant
|
1994 |
1508 |
1524,43 |
1995 |
1573,37 |
1584,86 |
1996 |
1611,36 |
1646,77 |
1997 |
1644,22 |
1159,1 |
1998 |
1677,09 |
1616,52 |
Sur les
cinq années d'exécution de la loi de programme, le montant des
autorisations de programme inscrites en lois de finances initiales n'a
représenté que 93 % des dotations actualisées. Si
l'on raisonne par rapport aux crédits disponibles après
annulations, le ratio est ramené à 91,7 %.
Ces résultats de l'exécution de la loi de programme
résultent essentiellement :
- des mesures d'annulation décidées en 1996 qui ont porté
sur 265 millions de francs ;
- et de la décision prise en 1997 d'étaler sur une année
supplémentaire la loi de programme au même titre que tous les
engagements pluriannuels de l'Etat. Les autorisations de programme inscrites en
loi de finances initiale pour 1997 ne s'élevaient en conséquence
qu'à 70 % des dotations prévues par la loi de programme.
Il convient de souligner que les effets de la diminution des crédits en
1996 et 1997 ont pu être atténués par une meilleure
mobilisation des crédits disponibles, qui a permis de maintenir constant
le volume des engagements. Ainsi, le montant des crédits engagés
a pu s'élever en 1997 à 1 990 millions de francs. Bien
que l'inscription en loi de finances initiale pour 1998 de dotations à
peu près comparables à celles prévues par la loi de
programme ait permis de maintenir en 1998 un volume constant d'engagement, les
réductions de crédits opérées en 1996 et 1997 ont
eu des conséquences tant sur les programmes de travaux sur les monuments
historiques que sur l'activité des professionnels de la restauration.
En effet,
les mesures de régulation budgétaire pour 1996 et
1997 ont contraint l'administration à reporter ou à étaler
l'exécution des travaux de restauration
. Les annulations ou les
modifications de programme ont été déterminées en
fonction des priorités et des urgences dictées par l'état
des édifices concernés. Les opérations déjà
entamées, dont la réalisation s'étalait sur plusieurs
années, ont été poursuivies aussi souvent que possible.
Mais un grand nombre d'opérations nouvelles ont dû être
reportées. En ce qui concerne les travaux effectués sur des
monuments historiques n'appartenant pas à l'Etat, dont le financement
repose sur la participation des propriétaires et de l'Etat, la
réduction des crédits inscrits en loi de finances a fait jouer
à rebours le coefficient multiplicateur représentant le rapport
entre les crédits d'Etat et le montant des travaux effectivement
générés, entraînant une diminution de la
dépense globale consacrée au patrimoine. En effet, on estime pour
ces monuments que 1 million de francs du budget de l'Etat est à
l'origine de 2,8 millions de francs de travaux. Afin d'atténuer
l'effet des réductions des crédits d'Etat, les conservations du
patrimoine ont usé de moyens divers : révision à la
baisse du montant des tranches annuelles afin d'éviter des interruptions
de chantier ; développement de l'appel au concours de fonds
structurels européens par exemple.
Le non-respect de la loi de programme a eu par ailleurs
des
répercussions sur l'activité des professionnels de la
restauration
. En effet, les réductions de crédits en 1996 et
1997 les ont contraint à prévoir un plan de charge réduit
pour 1998 même si l'augmentation significative des crédits
prévue par la loi de finances pour 1998 a permis d'éviter un
ralentissement brutal de l'activité.
Or, le marché des travaux pour la restauration des monuments historiques
se caractérise par un taux de main-d'oeuvre particulièrement
élevé. Sur un million de francs investi, 60 à 85 % va
à l'emploi, ce qui correspond à 3 emplois à plein temps
sur une année entière. Les réductions budgétaires
qui ont entraîné des retards, des reports ou des annulations
d'opérations ont entraîné une raréfaction des
marchés contraignant, dans un contexte de concurrence accru, les
entreprises à baisser leur prix. La baisse des prix et les
difficultés de trésorerie qu'ont rencontré les entreprises
les ont conduit dans bon nombre de cas à licencier ou à ne plus
recruter.
Le Groupement national des entreprises de restauration des monuments
historiques estimait fin 1997 que les pertes d'emplois du secteur pourraient
atteindre 20 % de l'effectif total de fin 1994. Cette situation
apparaît inquiétante dans la mesure où les emplois qui ont
disparu sont souvent ceux des ouvriers les plus anciens dans l'entreprise, donc
les plus qualifiés et les plus expérimentés, ou ceux des
apprentis. Or, dans ce secteur, la formation aux métiers se fait
traditionnellement par transmission du savoir-faire des plus âgés
vers les plus jeunes.
2. Pérenniser l'engagement de l'Etat
a) La nécessité de maintenir une politique dynamique d'investissement
L'analyse des crédits inscrits dans le projet de loi de
finances pour 1999 figure dans la première partie du rapport. On se
contentera de rappeler ici que ces crédits augmentent de 2,2 % en
autorisations de programme (soit 1 566,4 millions de francs),
évolution qui dépasse de peu le taux de progression annuel de
2 % prévu pour les années 1994 à 1998 par la loi de
programme.
Votre rapporteur avait souligné dans son précédent rapport
l'importance de maintenir le principe d'une programmation pluriannuelle des
dépenses consacrées au patrimoine, en dépit des limites
que constituent le principe de l'annualité budgétaire et les
mesures de régulation prises en cours d'exécution.
En effet, les lois de programme constituent un gage de la continuité de
l'engagement de l'Etat en faveur du patrimoine, particulièrement aux
yeux des entreprises du secteur de la restauration des monuments historiques.
Par ailleurs, elles accentuent l'effet multiplicateur de la dépense
consacrée au patrimoine, les collectivités locales et les
propriétaires privés, qui disposant de perspectives
chiffrées sur le niveau d'engagement de l'Etat peuvent plus
aisément décider d'opérations de restauration.
Or, Mme Catherine Trautmann, lors de son audition par votre commission le 20
octobre 1998, a indiqué que
la formule d'une nouvelle loi de
programme sur le patrimoine monumental ne serait pas retenue en 1999
, celle
de 1993 étant devenue caduque. En tout état de cause, ce constat
ne peut satisfaire votre rapporteur, cela d'autant plus que la ministre a
souligné que le maintien à un niveau satisfaisait de l'enveloppe
annuelle consacré au patrimoine résultera, d'une part, d'un
effort de progression continue des crédits inscrits au budget, et
d'autre part, d'une amélioration de leur conditions d'engagement
destinée à éviter des retards dans l'exécution des
crédits ouverts en loi de finances.
On peut certes imaginer des moyens d'améliorer la politique conduite en
ce domaine par l'Etat : rationalisation des procédures de travaux,
renforcement des outils de suivi de la consommation de crédits,
meilleure programmation des opérations de restauration.
Néanmoins, les efforts concernant la gestion des crédits avaient
d'ores et déjà imposé une meilleure mobilisation des
crédits qui s'était traduite par une progression des taux
d'engagement, progression qui a néanmoins des limites. Il est donc vain
de penser qu'ils suffiront à eux seuls à maintenir un niveau
satisfaisant d'engagements. Seule une progression continue des dotations
inscrites le permettra et la loi de programme était sans doute le
meilleur moyen pour le gouvernement d'afficher ses intentions sur ce point pour
les années à venir.
Enfin, votre rapporteur relève que le vote d'une loi de programme est
pour le Parlement l'occasion de se prononcer sur les orientations de la
politique du patrimoine, débat qui désormais ne pourra avoir lieu
qu'à l'occasion du vote de la loi de finances. Il prend acte de
l'engagement pris par la ministre devant votre commission de s'attacher
à ce que l'information du Parlement sur l'emploi des crédits
destinés au patrimoine continue à faire l'objet d'un rapport
annuel spécifique retraçant les actions menées dans ce
domaine et leur traduction budgétaire.
b) Encourager l'initiative privée
•
Une nécessité imposée par l'étroitesse de la
marge de manoeuvre budgétaire de l'Etat
Face à l'accroissement du nombre de biens protégés, il est
opportun de s'interroger sur la possibilité pour l'Etat d'assumer
l'ensemble de la responsabilité de la protection et de la mise en valeur
du patrimoine.
La réponse est à l'évidence négative. Un bilan de
l'état du parc immobilier classé dressé par la direction
du patrimoine en 1995 -et qui mériterait au demeurant d'être
actualisé- a souligné le caractère insuffisant des
crédits prévus par la loi de programme de 1993 au regard des
opérations considérées comme les plus urgentes. En effet,
pour faire face aux urgences, il faudrait plus que doubler les dépenses
consacrées au patrimoine. Les crédits consacrés au
patrimoine par l'Etat -même régulièrement augmentés-
ne peuvent donc suffire à l'ampleur de la tâche.
Or, les Français se révèlent de plus en plus
attachés à leur patrimoine et de plus en plus désireux de
le protéger et de le mettre en valeur. Il apparaît donc essentiel
d'encourager leur participation à la politique du patrimoine.
En ce qui concerne les monuments protégés au titre de la loi de
1913, le financement de leur conservation est assurée par l'Etat pour
les monuments qui lui appartiennent et à peu près par
moitié par l'Etat et par les collectivités locales ou les
personnes propriétaires pour le reste.
Il importe d'encourager les
efforts des collectivités locales et des propriétaires
privés pour assurer la protection de leurs monuments
.
A ce titre, votre rapporteur s'interroge sur la cohérence des
dispositifs fiscaux prévus pour les propriétaires privés
de monuments historiques. En contrepartie de leurs obligations, les
propriétaires privés peuvent bénéficier d'avantages
fiscaux concernant les dépenses engagées sur les monuments. Comme
le prévoient les article 41 E et S de l'annexe III du code
général des impôts, les charges foncières (travaux
non subventionnés, frais de gérance, rémunération
de gardien) sont déductibles du revenu imposable en totalité pour
les monuments ouverts au public et à 50 % pour les autres. Mais la
quote-part à la charge du propriétaire des travaux de
restauration ou d'entretien exécutés ou subventionnés par
l'Etat le sont en totalité dans les deux cas. Votre rapporteur
s'interroge sur la pertinence d'une réglementation liant le
bénéfice d'un avantage fiscal à la perception d'une
subvention, alors même que tous les travaux doivent faire l'objet d'une
autorisation.
•
Soutenir l'action de la Fondation du patrimoine
Face à l'accroissement du champ patrimonial et dans un contexte de
réduction des dépenses publiques, est apparue la
possibilité de développer l'initiative privée afin de
transformer l'intérêt nouveau des Français pour leur
patrimoine en engagement actif.
A cette fin, la loi n° 96-590 du 2 juillet 1996 a créé
la " Fondation du patrimoine ".
La " Fondation du patrimoine " est un organisme de droit privé
dont la mission est de " promouvoir la connaissance, la conservation et la
mise en valeur du patrimoine national " afin de combler les lacunes du
dispositif étatique de protection du patrimoine. Elle s'attache en
particulier à " l'identification, à la préservation
et à la mise en valeur du patrimoine non protégé " et
devait avoir pour principale mission de concourir à la sauvegarde du
patrimoine de proximité non protégé.
Depuis la publication du décret du 18 avril 1997 qui a fixé ses
statuts, la Fondation a entamé la mise en place de son organisation
territoriale. Appuyée sur des délégués
régionaux eux-mêmes assistés de
délégués départementaux, elle repose sur un
partenariat actif avec le monde économique et une collaboration
étroite avec les associations. Au niveau local, le rôle de la
Fondation est d'élaborer des programmes d'opérations et
d'apporter aux maîtres d'ouvrage une assistance technique, notamment par
le montage des plans de financement, et d'instruire conjointement avec les
architectes des bâtiments de France les demandes d'octroi de label.
Les capacités d'intervention de la Fondation sont pour l'heure
très modestes. L'objectif final est de pouvoir en rythme de
croisière dégager 2 millions de francs par an et par
département qui permettraient de financer à hauteur de 20 %
des projets qui feraient l'objet de cofinancement entre la Fondation et divers
partenaires : propriétaires, industriels, collectivités
locales.
Par ailleurs, la Fondation se heurte à des difficultés tenant
à l'application de la disposition introduite dans le code
général des impôts, à l'initiative du Sénat
lors du vote de la loi de finances pour 1997, qui prévoit que sont
déductibles du revenu imposable les charges foncières
afférentes aux immeubles labellisés par la Fondation du
patrimoine, si ce label est délivré sur avis favorable du service
départemental de l'architecture. L'application de cette disposition
essentielle pour encourager les initiatives des propriétaires, exige un
décret qui pour l'instant n'a pas été pris. La Fondation
se trouve donc privée de cet instrument d'action déterminant.
Votre rapporteur ne peut que regretter que la non-application de la loi sur ce
point, qui risque de condamner à l'échec l'action de la Fondation.
Compte tenu des faibles moyens d'intervention dont dispose la Fondation du
patrimoine,
votre rapporteur ne peut que regretter une nouvelle fois cette
année que les crédits destinés au patrimoine non
protégé
(chapitre 66-20 article 20, édifices ruraux et
jardins non protégés)
soient maintenus
à
un niveau très faible
. Le projet de loi de finances
prévoit pour 1999 leur reconduction en francs courants en autorisations
de programme (35 millions de francs) et une réduction de
0,55 % en crédits de paiement (34,1 millions de francs).
Cette évolution ne répond pas aux efforts accomplis par les
communes pour protéger, restaurer et mettre en valeur leur patrimoine.
En outre, elle ne permet pas de venir en aide aux communes les plus petites qui
possèdent souvent des monuments remarquables mais dont le coût
d'entretien et de protection est disproportionné à la modestie de
leurs budgets.
B. ASSURER LA PROTECTION ET L'ENRICHISSEMENT DES COLLECTIONS NATIONALES
1. Conduire une politique d'acquisition ambitieuse
La
France a consenti au cours des dernières années un effort
considérable destiné à améliorer les conditions de
présentation de ses collections muséographiques. Cet effort a
été consenti par l'Etat mais également par les
collectivités locales qui ont consacré des budgets importants
-souvent en partenariat avec l'Etat- à la rénovation des
musées de province. Le succès rencontré auprès du
public par des institutions comme le Louvre ou le musée d'Orsay ou par
le musée des beaux-arts de Lille atteste du bien-fondé de cette
politique.
Aujourd'hui, et votre rapporteur l'avait souligné dans son
précédent rapport, le processus de création de nouveaux
musées trouve ses limites tant dans les contraintes budgétaires
qui s'imposent désormais aux collectivités publiques que dans
l'ampleur des opérations déjà réalisées dont
le fonctionnement pèse lourdement sur leurs budgets.
Néanmoins, cela ne signifie pas que la politique muséographique
doit être réduite à la gestion des institutions et
collections existantes. La valorisation de notre patrimoine
muséographique est indissociable d'une politique ambitieuse
d'acquisitions. En ce domaine, la responsabilité de l'Etat est
grande. En effet, il n'existe pas en France, à la différence des
États-Unis, de grands collectionneurs privés. Dans ce contexte,
l'enrichissement de nos collections nationales comme le maintien sur notre
territoire des " trésors nationaux " dépend
principalement des dotations que l'Etat est susceptible de leur consacrer.
En ce domaine, il importe donc, d'une part, de remédier aux lacunes de
notre système de protection du patrimoine national et, d'autre part, de
lui consacrer les dotations nécessaires pour lui assurer son plein
effet.
a) Remédier aux lacunes de notre système de protection du patrimoine national
Au
dispositif douanier hérité du régime de Vichy, la loi
n° 92-1477 du 31 décembre 1992 régissant le
contrôle de la circulation des biens culturels a substitué un
mécanisme de protection fondé sur la délivrance d'un
certificat de libre circulation des biens culturels.
Ce certificat, requis tant pour la circulation d'un bien culturel dans l'Union
européenne que pour son exportation vers un pays tiers, atteste qu'il ne
constitue pas un trésor national et peut dès lors sortir du
territoire. La durée de validité du certificat est de cinq ans.
En cas de refus, l'Etat dispose d'un délai de trois ans soit pour
acheter l'oeuvre soit pour la classer au titre des monuments historiques. Si au
bout de trois ans, l'Etat n'a pas acheté l'oeuvre et si une nouvelle
demande de certificat est déposée et que l'Etat n'a ni
acheté ni classé l'oeuvre avant l'échéance des
quatre mois prévus pour l'instruction du dossier, le certificat ne peut
être refusé.
Cette législation est conforme à nos obligations communautaires
et respectueuse autant qu'il est possible des droits des particuliers. Il en a
été faite une application libérale : sur plus de 13.000
demandes de certificat, on ne compte que 45 refus. Les délais de
délivrance du certificat sont courts, une semaine en moyenne -sauf
à la direction du livre et de la lecture où, pour des raisons
inexpliquées, ils atteignent trois semaines.
Au cours de cette année, un seul trésor national a jusqu'ici
été acquis. Il s'agit du portrait de " Berthe Morisot au
bouquet de violettes " par Edouard Manet dont le refus de certificat
expirait en 1999. Sur les dix trésors nationaux, dont le refus de
certificat expirait en 1998 cinq ont pu être acquis par l'Etat ou des
collections publiques au cours des trois dernières années.
Si votre rapporteur se réjouit de ces acquisitions qui pour celle
réalisée cette année représentait un coût de
80 millions de francs
4(
*
)
, il nourrit de
sérieux doutes sur la possibilité de conserver dans le patrimoine
national l'ensemble des oeuvres de grande valeur dont les refus de certificat
arriveront à échéance dans les années à
venir.
En effet, le dispositif législatif prévu par la loi du 31
décembre 1992, si il n'a pas entravé le bon fonctionnement du
marché de l'art, a révélé ses limites du point de
vue de son efficacité à assurer la protection du patrimoine
national.
Votre rapporteur ne reviendra pas sur l'analyse détaillée des
lacunes de ce dispositif. Il se contentera de rappeler que l'évolution
de la jurisprudence judiciaire (arrêt Walter de la Cour de cassation du
20 février 1996) sur l'indemnisation du classement d'office, et le
coût excessif qui en résulte pour l'Etat, ont eu pour
conséquence de laisser celui-ci désarmé en cas de refus de
vente de l'objet par son propriétaire. Il suffit, en effet, que ce
dernier, spéculant sur le fait qu'on n'osera pas classer l'objet en
raison du coût excessif du classement, refuse de le vendre à
l'Etat et laisse s'écouler le délai de trois ans, pour être
assuré de pouvoir obtenir le certificat. Votre rapporteur avait l'an
dernier souligné l'intérêt de la procédure
britannique qui présentait l'avantage de préciser les
modalités de l'acquisition par les collectivités publiques d'une
oeuvre pour laquelle la licence d'exportation était refusée. Il
souligne, pour s'en féliciter, que le dispositif législatif en
cours d'élaboration au ministère de la culture relève de
la même source d'inspiration. En effet, d'après les indications
fournies par le rapport de l'observatoire des mouvements internationaux
d'oeuvres d'art rendu public en avril dernier, il reposerait sur les deux
principes suivants :
- préciser les modalités d'acquisition par l'Etat des
trésors nationaux : en cas de refus de vente à l'amiable, le
prix est fixé par des experts. Si à ce prix-là, l'Etat
décide d'acheter et si le propriétaire refuse de vendre, le refus
de certificat peut être indéfiniment renouvelé de trois ans
en trois ans ;
- prévoir des exonérations fiscales pour atténuer les
conséquences du classement pour les propriétaires et la rendre
moins coûteuse pour l'Etat.
Si votre rapporteur insiste sur la nécessité de soumettre
rapidement de telles dispositions au Parlement, il rappelle qu'il avait
déjà souligné l'an dernier, au vu de l'analyse des
crédits d'acquisition des musées nationaux, que la modification
de la loi de 1992 ne saurait à elle seule suffire à
protéger notre patrimoine national.
Son analyse se trouve confirmée par les conclusions du rapport
précité qui relève:
" On ne saurait trop insister
(...) sur la nécessité absolue d'assortir l'application de la loi
du 31 décembre 1992 des moyens financiers sans lesquels, modifiée
ou non, elle ne répondra que très imparfaitement à son
objet, le maintien sur notre territoire de nos trésors
nationaux ".
b) Une nécessité : doter l'Etat des moyens d'une politique d'acquisition ambitieuse.
Le tableau ci-dessous retrace l'origine et le montant des crédits d'acquisition des musées nationaux depuis 1995.
EVOLUTION DEPUIS 1990 DES CRÉDITS D'ACQUISITIONS
DESTINÉS
AUX MUSÉES NATIONAUX
(au 1er novembre
1999)
|
SUBVENTIONS ETAT |
CREDITS RMN |
|||||
ANNÉE |
Subvention annuelle
|
Fonds du
patrimoine Chapitre
|
Autres (1) |
Dotation
RMN
|
Dons et
legs affectés
|
" mécénat " chapitre 657.13 |
TOTAL |
1990 |
29,7 |
22,9 |
0,60 |
47,7 |
38,0 |
2,9 |
141,8 |
1991 |
16,5 |
8,40 |
0,50 |
46,4 |
1,6 |
2,6 |
76,0 |
1992 |
32,72 |
11 |
0,61 |
57,64 |
18,47 |
5,33 |
125,77 |
1993 |
16,56 |
1,50 |
0,30 |
40,55 |
3,81 |
7,04 |
69,76 |
1994 |
14,26 |
15 |
0,62 |
77,29 |
20,42 |
11,72 |
139,31 |
1995 |
7,28 |
9,3 |
0,20 |
55,0 |
6,3 |
9,7 |
87,6 |
1996 |
6,05 |
36,20 |
0,00 |
43,62 |
0,95 |
7,79 |
94,61 |
1997 |
7,87 |
55,75 |
0,05 |
26,51 |
37,13 |
14,87 |
142,18 |
1998 |
11,87 |
51,05 |
0,5 |
57,6 |
15,3 |
14,4 |
159,7 |
(1)
Commission nationale de la photographie
A partir de 1995, les difficultés financières de la
Réunion des musées nationaux (RMN) résultant du recul de
la fréquentation des musées nationaux et des mauvais
résultats de ses activités commerciales ont eu pour
conséquence de réduire le montant de sa participation aux
acquisitions des musées nationaux, qui est passée de
77 millions de francs en 1994 à 26 millions de francs en 1997,
soit le niveau le plus bas jamais atteint depuis 1990.
Afin de compenser cette évolution, le ministère de la culture a
accru significativement sa contribution, d'une part, par le biais de la
subvention annuelle inscrite au chapitre 43-92 article 30 (patrimoine
muséographique) et, d'autre part, grâce à une augmentation
des crédits du fonds du patrimoine. L'effort de l'Etat, conjugué
au redressement de la situation financière de la RMN, a permis en 1998
une augmentation du montant des crédits d'acquisition. Sur les dix
premiers mois de l'année, ils se sont élevés à
159,7 millions de francs.
En 1999, les crédits du fonds du patrimoine bénéficieront
d'une augmentation de 8 %, passant de 97,49 millions de francs
à 105,25. Par ailleurs, la subvention annuelle sera reconduite en francs
courants à son niveau de 1998 (soit 11,87 millions de francs).
Il importe de souligner que d'après les indications fournies à
votre rapporteur, les crédits du fonds du patrimoine devront
également, comme en 1998, financer les acquisitions destinées
à enrichir les collections du nouveau musée des arts et des
civilisations, ce qui limitera d'autant les crédits disponibles pour
l'achat des trésors nationaux. En 1998, 30 millions de francs ont
été consacrés à des acquisitions destinées
à cette nouvelle institution, 11millions de francs provenant du budget
du ministère de la culture (fonds du patrimoine) et 19 millions de
francs du budget du ministère de l'éducation nationale. En 1999,
le montant des acquisitions devrait s'élever à 50 millions de
francs, financées pour moitié par les deux ministres de tutelle.
Ce sera donc près d'un quart des crédits du fonds du patrimoine
qui seront affectés à la constitution des collections de ce
musée.
L'étroitesse de la marge de manoeuvre dont disposent les musées
nationaux, en dépit de l'effort consenti au cours des dernières
années, exige que la réflexion sur les moyens de diversifier
leurs sources de financement aboutisse dans les plus brefs délais. Le
rapport précité préconise l'affectation à
l'acquisition de trésors nationaux d'une part préfixée des
recettes de la Française des jeux, ce qui permettrait de réserver
les dotations budgétaires aux acquisitions ordinaires. A ce titre, il
indique que
" faute de disposer rapidement de ces ressources
exceptionnelles, la plupart des trésors nationaux, quitteront notre
territoire national sans espoir de retour ".
2. Assurer la protection des collections nationales
a) Veiller à assurer dans de bonnes conditions le fonctionnement des musées.
L'année 1998 a été à nouveau
l'occasion
de démontrer que les collections publiques n'étaient pas à
l'abri des vols et des dégradations. Ainsi, après la disparition
d'une stèle grecque en janvier, le 3 mai dernier, a été
volé au musée du Louvre un tableau de Jean-Baptiste Camille
Corot : le chemin de Sèvres.
La protection des collections muséographiques exige de disposer, d'une
part, de personnels de surveillance en nombre suffisant, et d'autre part, de
dispositifs de protection efficaces. Ces deux exigences ne semblent pas
aujourd'hui satisfaites.
•
Les musées nationaux confrontés au déficit
endémique de personnels de surveillance
L'augmentation de la fréquentation des musées comme l'ouverture
de nouveaux espaces muséographiques exigent que les effectifs de la
surveillance des collections nationales soient renforcés.
Si les équipements de sécurité (système de
détection électronique, système de comptage de visiteurs,
contrôle d'accès...) font des progrès constants, il
convient néanmoins de garantir une densité minimale d'agents de
surveillance et veiller à ce que leurs qualifications correspondent
à la technicité des équipements installés et que
les agents vacataires ne représentent qu'une faible proportion de
l'effectif présent dans les salles.
Le Louvre est de loin le musée qui a connu au cours de la
dernière décennie les plus profondes évolutions qu'il
s'agisse des surfaces d'exposition ou des modalités de
présentation des collections.
Entre 1990 et 1998, les surfaces muséographiques ouvrables du Louvre ont
été multiplié environ par deux, passant de 38 070
m
2
à 70 000 m2. Durant la même période,
l'effectif total des personnels de surveillance n'a augmenté que de
50 %, passant de 602 à 952. Par ailleurs, il faut relever que la
proportion des vacataires n'a pas été modifiée ; elle
s'élevait en 1998 à 31,3 % contre 38,87 % en 1990.
En conséquence, le souci de garantir un niveau de sécurité
minimum, tant des oeuvres que du public conduit le musée à fermer
des salles lorsque les effectifs d'agents de surveillance sont insuffisants. En
1997, dernière année connue, 6,68 % des salles avaient
été fermées au public. A la suite des vols intervenus au
début de cette année, le programme des expositions temporaires
des mois à venir a été considérablement
allégé. Une seule des quatre expositions temporaires
programmées de juillet 1998 à février 1999 a
été maintenue, afin de réaliser des travaux de
renforcement des protections mécaniques. Par ailleurs, une vingtaine de
salles ont été fermées provisoirement au public afin
d'améliorer les dispositifs techniques de sécurité. Enfin,
une mission d'expertise relative à la sécurité des
oeuvres, dont les résultats devraient être connus d'ici la fin de
l'année, a été confiée à une
société extérieure
Si l'on peut se féliciter des mesures de stabilisation des effectifs de
vacataires décidées pour 1999 (création de 25 emplois
gagés sur les crédits de vacations de l'établissement), on
regrettera qu'un effort de création de postes n'ait pas
été consenti. En effet, le manque de personnels de surveillance
remet en cause la finalité même des opérations de
rénovation qui était de mieux présenter les collections au
public.
Le musée du Louvre n'est pas le seul à connaître des
difficultés de ce genre. Au musée d'Orsay, depuis 1990, les
effectifs de personnels d'accueil et de surveillance ont enregistré une
baisse non négligeable. A la fin de l'année 1997, un
cinquième des postes des effectifs en salle était vacant et
" compensé " par des recrutements ponctuels de vacataires,
solution qui n'est guère satisfaisante.
De même, l'établissement public de Versailles reste en
sous-effectif pour le personnel de surveillance qui, malgré une
augmentation significative, reste en-dessous de l'effectif nécessaire
pour permettre la réouverture complète du musée de
l'histoire de France.
•
Un effort d'équipement
Outre des effectifs suffisants, la protection des collections nationales exige
un effort d'équipement afin de doter les locaux de dispositifs de
surveillance performants mais également de réaliser les travaux
de sécurité nécessaires (dispositifs de lutte contre
l'incendie, installations électriques, ...).
Pour certains musées, cet impératif relève de
l'urgence. C'est le cas en particulier pour l'établissement public de
Versailles
. En effet, la vétusté des locaux, l'étendue
et la complexité des lieux conduisent à un constat alarmant:
insuffisance de la protection contre l'incendie et des installations techniques
relatives à la sûreté du château, des Trianon et de
l'ensemble du domaine ; personnels en nombre insuffisant ; conditions
précaires de conservation des collections. Si un certain nombre
d'actions visant notamment à développer la prévention et
à former les agents ont été menées à bien,
beaucoup reste encore à faire. Le budget d'investissement de
l'établissement public n'avait permis jusqu'ici que d'assurer les
investissements minimaux de sauvegarde du patrimoine qui ne comprenaient pas
les travaux de mise à niveau de la sécurité et de la
sûreté.
Compte tenu de la présentation du " bleu " et du fait que les
musées sont, pour les plus importants d'entre eux, érigés
en établissements publics dotés de ressources propres, il est
très difficile d'avoir une connaissance exacte du montant des
crédits affectés chaque année aux travaux de
sécurité et de sûreté dans les musées
nationaux. On estime qu'au cours des dix dernières années, 50% du
budget d'investissement de la DMF a été consacré à
des dépenses de sécurité et de sûreté.
Pour 1999, 50 millions de francs devraient être consacrés aux
travaux de sécurité et de sûreté pour les
musées nationaux : la moitié de ces crédits seront
prélevés sur le chapitre 56-91 (travaux dans les musées
nationaux) géré par la DMF et permettront de renforcer la
sécurité des musées-châteaux les plus touchés
par les vols (Ecouen, Compiègne, Fontainebleau) ; la seconde
moitié, qui représente environ 25 millions de francs, sera
consacrée par l'établissement public de Versailles à une
importante opération de travaux rendue possible notamment grâce
à un accroissement de 16 millions de francs de la subvention
d'investissement que lui accorde l'Etat.
Par ailleurs, il faut souligner qu'une part, difficilement chiffrable, des
autres dépenses d'investissements de la DMF contribuera également
à renforcer la sécurité et la sûreté des
musées nationaux, qu'il s'agisse par exemple de la restructuration du
musée d'Orsay ou du musée Guimet, ou encore des travaux
d'équipement du Louvre.
Votre rapporteur salue cet effort qui, compte tenu des besoins des
musées nationaux, devra être poursuivi dans des années
à venir. Il constitue une condition nécessaire à la mise
en valeur de nos collections nationales.
b) Vers une meilleure maîtrise de la gestion des collections
•
Un motif de satisfaction : la confirmation du redressement de la situation
financière de la Réunion des musées nationaux
La baisse de la fréquentation des musées nationaux,
conjuguée aux difficultés qu'éprouvait la Réunion
des musées nationaux à concilier une logique commerciale et sa
mission de service public, s'est traduite pour cet établissement par des
résultats déficitaires en 1995 et 1996 qui ont justifié
l'application à partir de 1997 d'un plan de redressement.
Ce plan de redressement, arrêté en novembre 1996, était
fondé sur deux objectifs :
- en premier lieu, reconstituer sur la période 1997-1999 les
réserves de l'établissement et son fonds de roulement à
leur niveau de 1993, ce qui supposait que la RMN dégage sur cette
période, toutes activités confondues, un bénéfice
après acquisitions d'environ 80 millions de francs ;
- et, en second lieu, parvenir à équilibrer, grâce à
des mesures de rationalisation, l'activité commerciale de
l'établissement.
Les résultats d'exploitation de l'année 1997, première
année d'application du plan, ont été
présentés au conseil d'administration le 25 juin dernier et font
apparaître un excédant de 62,2 millions de francs. Pour ce
qui concerne les seules activités commerciales, le déficit est de
17,7 millions de francs, soit une nette amélioration par rapport
aux deux exercices précédents. En effet, on rappellera que ce
déficit s'élevait en 1996 à 144,8 millions de francs.
Ce résultat d'exploitation, qui s'avère bien supérieur aux
estimations, est lié à une augmentation de la
fréquentation des musées nationaux et des expositions temporaires
et à une rationalisation des activités éditoriales et
commerciales ainsi qu'à une meilleure maîtrise des coûts.
Votre rapporteur se félicite du succès de ces mesures qui
constituaient un préalable à l'accroissement de la participation
de la RMN à l'acquisition d'oeuvres d'art. En 1998, la dotation de la
RMN s'est élevée à 50 millions de francs contre
26,51 millions de francs en 1997, ce qui représente 35 % des
crédits d'acquisition des musées nationaux.
•
Des lacunes dans la gestion des collections
Bien que l'essentiel du patrimoine artistique de l'Etat soit confié aux
musées nationaux, le mobilier national et le fonds national d'art
contemporain (FNAC), placés sous tutelle de la délégation
aux arts plastiques du ministère de la culture, ont également
pour mission d'acquérir, de conserver et de mettre en dépôt
des objets et des oeuvres d'art appartenant à l'Etat. Or, leur gestion
révèle de graves lacunes.
En dépit des interventions répétées de la Cour des
comptes qui ont abouti à trois reprises à des insertions au
rapport public,
les conditions dans lesquelles le Mobilier national exerce
ses missions
5(
*
)
n'ont pas été
significativement améliorées
. Héritier du garde-meuble
de la Couronne fondé par Colbert en 1663, le Mobilier national,
désormais service dépendant du Centre national des arts
plastiques, continue à assurer ses missions dans la plus grande
précarité. L'état des réserves et des inventaires
est alarmant : locaux dispersés ; personnels
sous-encadrés ; non-respect des impératifs de
sécurité et de conservation.
Bien qu'une circulaire du Premier ministre en date du 24 juin 1996 ait
précisé et complété les règles applicables
en matière de dépôt de meubles et d'oeuvres d'art des
collections nationales dans les administrations, leur contrôle et leur
gestion n'ont guère pu encore être significativement
améliorés faute de moyens. En effet, la tâche est immense :
les bénéficiaires des dépôts sont désormais
plus de 500, ce qui correspond à plus de 1 000 lieux de
dépôt, et, dans bon nombre de cas, n'acceptent qu'avec
réticence les contrôles auxquels les soumet la
réglementation. Dans ces conditions, on ne peut guère
s'étonner qu'en 1997, à une question de la Cour des comptes,
l'administrateur général du Mobilier national répondait
que "
la réapparition en vente publique d'objets appartenant au
Mobilier national n'est pas exceptionnelle
"!
La gestion des collections du Fonds national d'art contemporain n'est
guère plus satisfaisante
.
Ce fonds, service du CNAP, assure, pour le compte de l'Etat, l'acquisition, la
conservation et la mise en dépôt d'oeuvres d'art dans les domaines
de la peinture, de la sculpture, des arts graphiques, de la photographie et des
arts décoratifs. Rappelons qu'il disposait en 1998 d'une dotation de 21
millions de francs pour l'achat d'oeuvres d'art, qui sera reconduite en 1999.
La gestion des collections du FNAC présente les mêmes lacunes que
celles du Mobilier national : absence de récolement systématique
des 44 000 oeuvres déposées auprès de plus de
2 500 dépositaires ; difficultés pour obtenir le
paiement des frais de restauration des oeuvres endommagées.
Là encore, le diagnostic est le même : le FNAC ne
bénéficie pas plus que le Mobilier national des moyens
adaptés à sa mission. Par ailleurs, il ne dispose pas des bases
réglementaires nécessaires pour fonder son action. En effet, en
dépit des observations réitérées de la Cour des
comptes, le décret d'application relatif au FNAC, prévu par le
décret du 15 octobre 1982 n'est toujours pas paru.
Votre rapporteur souligne donc la nécessité pour le
ministère de la culture d'une part, de dégager les moyens
nécessaires au fonctionnement de ces services dont la gestion lacunaire
met en péril l'intégrité des collections artistiques de
l'Etat et, d'autre part, de sensibiliser l'ensemble des administrations
dépositaires à leurs responsabilités à
l'égard des oeuvres qui leur sont confiées.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
de sa séance du mercredi 18 novembre 1998, la commission a
examiné le
rapport pour avis de M. Philippe Nachbar sur les
crédits de la culture pour 1999.
Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.
M. Ivan Renar
a fait observer que le seuil du 1 % revêtait
une importance essentielle, dans la mesure où il apparaît comme le
garant du rôle qui incombe à l'Etat dans le domaine culturel. Il a
souhaité que la politique d'aménagement culturel du territoire,
plutôt que d'opposer l'Ile-de-France et la province, prenne en compte les
déséquilibres régionaux révélés par
le montant des dépenses culturelles par habitant.
Il a estimé qu'une bonne gestion de la politique du patrimoine ne devait
pas se limiter à parer à l'urgence en recourant à des
expédients budgétaires. Il a appelé à une
réflexion sur les relations qui peuvent exister entre le patrimoine et
les activités de création. Il a fait part de ses
inquiétudes sur les conséquences, pour les associations
culturelles, de la clarification de leur régime fiscal
opérée par la circulaire du 15 septembre 1998. Enfin, il a
considéré que le développement des enseignements
artistiques en milieu scolaire, qui relève en premier lieu de la
responsabilité du ministère de l'éducation, était
lié à leur reconnaissance comme discipline à part
entière.
Mme Danièle Pourtaud
, évoquant le
rééquilibrage des dépenses culturelles de l'Etat en faveur
de la province, a déploré que Paris fasse exception à la
tendance à l'implication croissante des collectivités locales
dans la politique culturelle. Elle a souligné qu'on ne pouvait se
désintéresser du sort du patrimoine parisien dont la protection
nécessite des moyens considérables.
M. André Maman
a souhaité obtenir des précisions
sur les modalités selon lesquelles l'Etat s'acquitterait de sa dette
envers les collectivités locales, ainsi que sur les conditions de mise
en oeuvre de la charte des missions de service public. Enfin, il a
déploré le montant très faible des crédits
consacrés aux interventions culturelles à l'étranger et
s'est interrogé sur leur imputation budgétaire.
M. Jacques Legendre
s'est déclaré inquiet de la
non-reconduction de la loi de programme sur le patrimoine monumental et s'est
interrogé sur le sort réservé aux opérations de
restauration des cathédrales qui n'étaient pas encore
achevées et pour lesquelles l'intervention de l'Etat s'avérait
déjà insuffisante. Il a souhaité que puisse être
déposé un rapport sur les conditions d'exécution de la loi
de programme.
En réponse aux intervenants,
M. Philippe Nachbar, rapporteur pour
avis
, a apporté les éléments d'information suivants :
- en l'absence de loi de programme, il importe de réaffirmer la
nécessité de pérenniser l'engagement de l'Etat en faveur
de la protection du patrimoine. Un rapport consacré à
l'exécution des crédits consacrés au patrimoine monumental
continuera à être déposé chaque année sur le
bureau des assemblées ;
- l'apurement de la dette de l'Etat envers les collectivités locales,
dont le montant et l'ancienneté varient selon les régions, sera
effectué au cas par cas ;
- la charte des missions de service public entrera en vigueur le
1er janvier 1999 et aura vocation à s'appliquer à l'ensemble
des institutions culturelles ;
- la capitale, du fait de la richesse de son patrimoine, ne peut être
considérée comme une région parmi d'autres. Les
crédits d'investissement inscrits au projet de budget de 1998 comme en
1999 en ont tenu compte ;
- les crédits de l'action culturelle à l'étranger sont
gérés par le ministère des affaires
étrangères.
Suivant les propositions de son rapporteur pour avis,
la commission a
ensuite
décidé,
à l'unanimité,
de
donner un avis favorable à l'adoption des crédits pour 1999 de la
culture
.
CONCLUSION
1
Par rapport aux crédits dits
déconcentrables
2
c'est-à-dire hors traitement des personnels, dotation
générale de décentralisation, subventions de
fonctionnement et d'investissement aux établissements publics,
crédits de fonctionnement de l'administration centrale et crédits
d'acquisition du chapitre 43-20.
3
école nationale supérieure des métiers de
l'image et du son
4
Soit l'acquisition la plus coûteuse ayant été
réalisée depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1992.
5
Aux termes du décret du 23 février 1980, le
Mobilier national doit assurer l'ameublement des résidences
présidentielles, pourvoir à l'aménagement des locaux
affectés à l'Assemblée nationale et au Sénat
réunis en congrès, procéder à l'inspection du
mobilier déposé par décision du ministre de la culture
dans les immeubles affectés aux services publics et veiller à
l'entretien des objets inscrits à ses inventaires