II. LES MISSIONS DE LA GENDARMERIE : DE PROFONDES MUTATIONS AUX CONSÉQUENCES ENCORE MAL MESURÉES
La gendarmerie assume un nombre toujours accru de mission dans les zones périurbaines. Cette évolution, observée depuis plusieurs années déjà, a connu une accélération marquée en 1999 à la suite des décisions du Conseil de sécurité intérieure. L'évolution de la criminalité se traduit par un alourdissement indéniable des charges confiées à l'Arme. Or dans le même temps, les créations de postes demeurent en deçà des objectifs fixés au début de la période de programmation. Dès lors se pose de nouveau, avec une particulière acuité, la question des redéploiements.
A. DES CHARGES NOUVELLES
1. Une implication majeure dans la politique de la ville
Aux
termes des décisions arrêtées cette année, la
gendarmerie se trouve désormais impliquée de manière
très significative dans la politique de la ville :
- d'une part,
le conseil de sécurité intérieure du 27
janvier
dernier a décidé l'affectation de 7 000 policiers et
gendarmes supplémentaires, sur trois années, dans les 26
départements les plus touchés par la délinquance et la
criminalité ; pour la gendarmerie, comme votre rapporteur l'a
déjà relevé, cette mesure se traduit par le
redéploiement
chaque année
(1999, 2000, 2001) vers les
brigades concernées, de 700 militaires expérimentés ;
- d'autre part,
le conseil de sécurité intérieure
du 19 avril
a décidé de réorienter l'action d'une
partie des forces mobiles (escadrons de gendarmerie mobile, compagnie
républicaine de sécurité) au profit des zones urbaines et
périurbaines les plus sensibles.
Le renforcement des effectifs, la mise en place des escadrons de gendarmerie
mobile fidélisés dans les zones de plus grande
insécurité et l'adaptation des structures de la gendarmerie aux
problèmes de la délinquance périurbaine avec la
création des brigades de prévention de la délinquance
juvénile constituent les principaux volets d'une action qui rompt avec
l'image d'une force attachée au monde rural.
a) La " fidélisation " des escadrons de gendarmerie mobile
.
Une
mission centrée sur la sécurité publique
L'objectif poursuivi par le gouvernement vise à renforcer la
sécurité des départements les plus touchés par le
développement de la criminalité. Cet objectif commande
l'organisation retenue : un engagement sur une
durée de six mois
d'un escadron, relevé pour la même durée par une
unité de même nature et de même effectif. Cette
présence, prolongée sur six mois, explique le terme de
" fidélisation " choisi pour évoquer une mission
quelque peu inhabituelle pour des unités en principe vouées
à la mobilité.
Les militaires concernés interviendront pour des
missions de
sécurisation
: patrouilles, surveillance, service d'ordre,
prévention de troubles à l'ordre public, lutte contre les
violences urbaines. Les opérations de maintien ou de
rétablissement de l'ordre, comme l'a confirmé le directeur
général de la gendarmerie nationale devant votre commission,
devront, en principe, être prises en charge par d'autres unités
mobiles, à l'initiative de l'autorité préfectorale, sur la
base de la procédure traditionnelle de réquisition.
Entre 1999 et 2001, 3 000 gendarmes mobiles et CRS seront employés dans
des missions de sécurisation. Ce déploiement de force concerne en
1999, 1 000 CRS et 750 gendarmes -soit 6 escadrons.
Ainsi, les forces mobiles se répartissent pour moitié entre la
zone de gendarmerie nationale et la zone de police nationale ; l'objectif,
en 2000 et 2001, reste cependant de concentrer les
deux tiers des
unités au profit de la zone de sécurité publique de la
police nationale.
Au total, 12 escadrons de gendarmerie mobile seront engagés dans les
secteurs périurbains sensibles. Aux 6 escadrons mis en place en 1999
à compter du 1
er
octobre dans les départements de la
Gironde, de l'Isère, de la Loire-Atlantique, de l'Oise, du Pas-de-Calais
et du Bas-Rhin, viendront ainsi s'en ajouter 3 autres en 2000, en
Seine-et-Marne, dans les Yvelines et dans le Val-d'Oise, et 3 en 2001, en
Eure-et-Loir, dans l'Hérault et dans le Var.
.
Une certaine perplexité quant au bon usage de la
" fidélisation "
La fidélisation des escadrons de gendarmerie soulève plusieurs
interrogations.
-
L'articulation des compétences respectives de la gendarmerie et de
la police
En premier lieu, les unités de la gendarmerie seront conduites à
intervenir dans les zones de police. Comment s'articuleront dès lors,
dans ces zones, les responsabilités respectives de la police et de la
gendarmerie ?
Quelques principes ont été posés : les forces mobiles
seront employées en unités constituées et non sous forme
de mise à disposition individuelle de personnels ; elles demeurent
sous le commandement de leurs chefs organiques, conformément à
leurs règles propres de fonctionnement. Par ailleurs, la mixité
des patrouilles avec les personnels de police est exclue sauf circonstances
exceptionnelles.
Cette coordination opérationnelle des forces suppose un partage
précis des rôles. L'autorité préfectorale devra
s'investir fortement dans ce processus afin d'éviter de laisser à
l'une des forces le sentiment de se trouver subordonnée à
l'autre.
-
La possible dérive des missions
Par ailleurs une certaine ambiguïté demeure quant aux missions
assignées aux escadrons de gendarmerie mobile fidélisés.
Ces unités seront-elles chargées d'une mission précise sur
un secteur déterminé ou, au contraire, d'une mission
générale de sécurisation donnant lieu à
évaluation au terme de 6 mois ? Cette formule a incontestablement
la préférence de la gendarmerie car elle lui laisse naturellement
une plus grande liberté de manoeuvre. La question sera tranchée
dans le cadre d'un
protocole relatif aux conditions d'emploi des escadrons
de gendarmerie mobile
en cours d'élaboration entre les directions
générales de la police et de la gendarmerie nationales.
Il faudra éviter toute dérive dans l'emploi des escadrons pour
des tâches extérieures à la sécurisation, telles que
certaines gardes -tâches précédemment assumées en
zone de police par les compagnies départementales d'intervention
aujourd'hui dissoutes- ou les opérations de maintien de l'ordre.
- Les conditions d'exercice de la mission de sécurisation
Chargés d'assurer la sécurisation d'un secteur
déterminé, les escadrons de gendarmerie ne pourront
exécuter utilement leur mission que s'ils connaissant bien leur
" terrain " d'intervention. En auront-ils le temps ?
Certes, les escadrons " fidélisés " seront en
priorité choisis en fonction de la proximité de leur lieu de
résidence et du secteur sécurisé. Cette formule ne pourra
s'appliquer de manière systématique ; en outre elle ne
garantit pas une connaissance assurée des réalités du
" terrain " dans la mesure où la situation de
l'insécurité peut varier considérablement d'un quartier
à l'autre.
En outre, la fidélisation des forces mobiles suppose la mise en place
des moyens financiers nécessaires. D'une part, les militaires
déplacés bénéficieront de l'indemnité
journalière d'absence temporaire (IJAT) -sauf lorsqu'elles
interviendront dans le ressort de leur commune d'implantation. D'autre part,
l'hébergement et la dotation des véhicules adaptés devront
faire l'objet d'un
effort spécifique
.
- Une tension certaine sur la disponibilité des escadrons
Enfin, le nouveau système ne pèsera-t-il pas sur la
disponibilité d'ensemble
des forces mobiles ?
Certes, les unités fidélisées devront pouvoir être
engagées en cas de besoin sur l'ensemble du territoire national. Qu'en
sera-t-il cependant pour les renforts saisonniers pendant la période
estivale ? En outre la pression croissante exercée sur la
gendarmerie mobile ne conduira-t-elle pas à limiter le temps
consacré à la
formation pourtant indispensable.
En effet,
chaque escadron bénéficie en principe de quatre semaines de
neutralisation pour la formation, à la résidence ou en camp entre
mi-septembre et fin mai. En outre, un tiers des unités effectue
annuellement un stage de recyclage " maintien de l'ordre " à
Saint-Astier, d'une durée de 15 jours. Pendant l'année
d'instruction 1998-1999, sur les 124 escadrons de marche, 52 seulement ont
effectué un séjour en camp et 44 ont suivi le stage de recyclage
de maintien de l'ordre à Saint-Astier.
Seule l'expérience permettra sans doute de répondre à ces
différentes interrogations. Un premier bilan pourra, à cet
égard, être dressé à la fin de l'année
prochaine.
b) Un premier bilan positif pour les brigades de prévention de la délinquance juvénile
.
Une
vocation préventive
Les brigades de prévention de la délinquance juvénile
(BPDJ) ont été mises en place dans le cadre du plan pluriannuel
d'action " gendarmerie 2002 ".
Les BPDJ, subordonnées aux commandants de groupement de gendarmerie
départementale, interviennent principalement dans les zones
périurbaines sensibles placées sous la compétence
exclusive de la gendarmerie.
Si elles ont pour vocation première la prévention (en relation
avec les organismes ou les services en charge de l'enfance), elles poursuivent
également une assistance technique aux unités territoriales dans
le cadre des enquêtes qu'elles dirigent.
La brigade comprend 6 militaires : 1 adjudant, 1 maréchal des
logis-chef et 4 gendarmes comprenant au moins un formateur relais antidrogue et
une femme. Ces personnels sont tous volontaires et rigoureusement
sélectionnés.
L'unité dispose d'une dotation comparable à celle d'une brigade
type de 6 militaires, même si les locaux comme les équipements
sont adaptés à l'accueil des enfants et des adolescents.
En 1999, la loi de finances a prévu une enveloppe de 4 millions de
francs, au titre du fonctionnement courant, pour la création de 15
brigades de ce type.
.
Un rôle croissant en matière de police judiciaire
Les actions de prévention organisées par les BPDJ ont
revêtu plusieurs formes :
- l'encadrement par chaque BPDJ d'au moins un stage
" sport-gendarmerie-jeunesse " regroupant en moyenne une vingtaine de
jeunes en difficulté, volontaires et choisis après consultation
des services sociaux et des maisons de jeunes ;
- la formation de 125 000 élèves, collégiens et
lycéens, au domaine pénal (code pénal et
procédure) :
- l'organisation de 4 500 actions d'information auprès des
collèges et des lycées, à la demande des responsables de
ces établissements.
Toutefois,
l'activité des brigades en matière de police
judiciaire s'est nettement accrue.
Cette évolution traduit les
besoins d'une police judiciaire qui soit vraiment adaptée aux formes de
délinquance juvénile. Ainsi les quatre BPDJ comptant dans leur
rang des officiers de police judiciaire habilités, extrêmement
sollicitées par les magistrats, ont consacré l'essentiel de leur
activité à la police judiciaire.
En principe, cependant, en application d'accords locaux, avec le Parquet, les
BPDJ ne sont pas saisies directement par l'autorité judiciaire ;
leur intervention est requise par la brigade territoriale concernée, le
plus souvent avec l'aval du commandant de groupement.
Les BPDJ ont ainsi fourni aux unités de gendarmerie :
- pour les mineurs victimes, 278 assistances au bénéfice des
brigades territoriales et 20 à celui des unités de
recherche ;
- pour les mineurs auteurs d'actes de délinquance, 58 assistances au
bénéfice des brigades territoriales et 1 assistance pour une
unité de recherche.
Trente-neuf brigades
ont été créées entre le
1
er
septembre 1997 et le 1
er
août 1999. Les
directives d'emploi pour chacune des unités ont été
fixées après une période d'observation et
d'expérimentation.
Plusieurs groupements de gendarmerie départementale pourtant
prioritaires -comme la Drôme ou l'Eure-et-Loir- ne disposent pas d'une
BPDJ. La création des brigades pour 2000 s'insérera dans le cadre
des
compensations
éventuellement apportées aux
dissolutions d'unités classiques dans certains départements.
2. L'ouverture de la gendarmerie sur l'extérieur : contrainte et nécessité
La
présence de
1 098 gendarmes hors de nos frontières
représente une indéniable contrainte pour l'Arme, à
l'heure où les priorités de la sécurité
intérieure conduisent à chercher des réserves d'effectifs.
La surveillance de notre ambassade à Alger mobilise à elle seule
139 gendarmes
dont le surcoût est pris en compte par le
ministère des affaires étrangères.
Les opérations extérieures de maintien de la paix mobilisent
quant à elles 372 militaires de la gendarmerie.
Toutefois l'ouverture sur l'extérieur demeure une
nécessité au regard de la coopération policière au
sein de l'Union européenne.
a) Le poids croissant des opérations de maintien de la paix
.
Une
présence pérennisée dans les opérations de maintien
de la paix au titre de l'ONU
Quelque 155 militaires de la gendarmerie participent aux différentes
opérations de maintien de la paix sous l'égide de l'ONU au sein
de trois composantes :
- les
prévôts
attachés aux bataillons
français et chargés de faire respecter les lois et
règlements français au sein de ces unités ;
- les
membres de la police militaire internationale
(UNMP)
intégrés dans les équipes internationales, responsables du
respect des règlements de l'ONU au sein de l'ensemble des forces ;
- les
contrôleurs de police
(CIVPOL) chargés de veiller au
respect des droits de l'homme par les polices locales -en particulier en
matière d'incarcération- et, le cas échéant, de
missions de formation auprès de ces polices.
La gendarmerie compte ainsi :
- en Bosnie-Herzégovine, au sein du groupe international de police
125 CIVPOL
(4 officiers et 121 sous-officiers) ;
- au Liban, dans le cadre de la FINUL, 2 prévôts et 3 membres de
la police militaire internationale ;
- en Haïti, dans le cadre de la formation de la nouvelle police de pays,
24 CIVPOL.
.
L'implication de la gendarmerie dans l'opération du Kosovo
La gendarmerie participait déjà avec 52 militaires (8 officiers,
44 sous-officiers) à la
force de stabilisation
en
Bosnie-Herzégovine. Elle a dû déployer 239 militaires
supplémentaires à la suite de l'intervention de l'OTAN au
Kosovo :
- 161 militaires au titre de l'opération Trident KFOR,
- 78 militaires au titre de la MINUK sous l'égide de l'OTAN.
Le
coût financier
de l'opération pour la gendarmerie
s'élève à
20,3 millions de francs
répartis
de la manière suivante :
- 17,2 millions de francs pour les rémunérations et charges
sociales,
- 1,3 million de francs pour le fonctionnement (0,4 million de francs pour
les frais de déplacement, 0,1 million de francs pour l'alimentation des
personnels, les autres dépenses de fonctionnement liées à
la vie courante sont prises en charge par l'armée de terre au titre du
support logistique des forces) ;
- 1,8 million de francs pour les matériels (principalement les moyens de
transmission et l'informatique).
La gendarmerie au Kosovo, comme en Bosnie, est intégrée
principalement dans la prévôté des bataillons et dans la
chaîne des actions civilo-militaires (ACM).
Outre les brigades prévôtales classiques, deux pelotons de
surveillance et d'investigation (PGSI) en Bosnie et cinq au Kosovo contribuent
à la sécurité publique générale sur la zone
de déploiement de la brigade française et assurent les contacts
nécessaires entre les autorités de police locales et les
unités de police militaire alliées.
b) Les enjeux de la coopération transfrontalière
Même si la gendarmerie s'implique dans les instances de
coopération policière multilatérale, elle doit s'attacher
prioritairement, en concertation avec les autres forces de
sécurité nationales, au développement de la
coopération policière frontalière.
.
Une implication dans la coopération multilatérale à
l'échelle européenne
Depuis 1994, un officier de gendarmerie était affecté à
l'Unité " drogue " Europol. Après l'entrée en
vigueur d'Europol, le 1
er
juillet 1999, il a été
naturellement maintenu au sein d'une structure dont les moyens et les
compétences ont été renforcés. L'Office
européen de police a par ailleurs recruté en 1999 un officier et
un sous-officier de gendarmerie.
Par ailleurs, la gendarmerie intervient sous deux aspects dans le cadre de
Schengen. D'une part, la cellule opérationnelle du système
national d'information Schengen (le SIRENE français) comprend pour plus
du tiers des personnels de la gendarmerie (1 officier et 16 sous-officiers).
D'autre part, sur la base de renseignements fournis par les unités de
gendarmerie ou de signalements étrangers introduits dans le
système d'information Schengen, et exploités par le gendarmerie,
839 personnes ont été interpellées et 1005
véhicules retrouvés en 1998. La gendarmerie a également
participé, l'an passé, à 557 actions de police judiciaire
internationales dans le cadre de la coopération policière
Schengen.
.
Le développement encore trop limité de la coopération
transfrontalière
La gendarmerie se trouve impliquée dans la surveillance des
frontières à plusieurs titres.
D'une part, l'Arme assure la surveillance de 95 % des frontières
placées sous la responsabilité de 23 groupements.
D'autre part, les développements de la coopération
transfrontalière, sur la base de l'article 39 de la convention
d'application des accords de Schengen (possibilité d' " accords
bilatéraux plus complets présents et futurs entre parties
contractantes ayant une frontière commune "), ont conduit à
un renforcement de la présence de la gendarmerie au sein du dispositif
institutionnel de la coopération. Les accords bilatéraux
signés dans la période récente instituent des
centres
de coopération policière et douanière
(CCPD) dont
l'originalité par rapport aux commissariats communs auxquels ils ont
vocation à se substituer progressivement, repose sur l'association, dans
un lieu unique, de l'
ensemble
des forces de sécurité
nationales de chaque coté de la frontière.
Ainsi, alors que les commissariats communs comptaient, côté
français, la seule police aux frontières (PAF), les CCPD
réunissent, maintenant, la PAF mais aussi la gendarmerie et les douanes.
Aux termes des accords signés par la France ou en voie de l'être,
le réseau devrait comprendre sept centres en Allemagne, en Italie, en
Espagne et au Luxembourg. Le CCPD d'Offenbourg en Allemagne (avec, s'agissant
de la seule gendarmerie, quatre sous-officiers et un sous-officier du cadre
administratif) est, seul, aujourd'hui, opérationnel. L'achèvement
des procédures de ratification de l'accord de coopération
franco-italien devrait en principe permettre la mise en place rapide d'un CCPD
à Vintimille et à Modane. Le CCPD de Modane est aujourd'hui en
cours d'aménagement. Au ler septembre, la gendarmerie était
représentée par un capitaine et deux sous-officiers (quatre sont
prévus à terme).
Votre rapporteur a eu l'occasion au cours du mois de septembre de se rendre
à Offenbourg, Modane et Vintimille. Il a pu ainsi prendre la juste
mesure de l'intérêt de cette structure. D'une part, si les CCPD
n'assurent pas de responsabilité de caractère
opérationnel, ils fonctionnent comme des instances permanentes
d'échange d'informations. La réunion de tous les interlocuteurs
dans un même lieu raccourcit beaucoup le circuit de communication au plus
grand bénéfice de la sécurité. En second lieu, les
CCPD permettent aux forces des deux pays de se familiariser avec leur
organisation et leurs pratiques respectives. Enfin -et ce n'est pas le moindre
avantage de ces structures-
les forces de sécurité nationales
apprennent à travailler en commun.
Il apparaît utile que le CCPD de Vintimille puisse rapidement se mettre
en place. La transformation du commissariat commun en CCPD est en suspens en
raison de l'exiguïté des lieux. La gendarmerie, pour sa part, a
d'ores et déjà procédé dans le courant du mois de
février 1999 à la mutation de deux des cinq militaires
prévus pour représenter l'Arme au sein du CCPD de Vintimille. Ces
gendarmes n'ont pas encore la possibilité matérielle d'exercer
leurs fonctions.
Il est donc impératif que les autorités françaises
puissent au plus tôt engager avec leurs homologues italiens les
négociations susceptibles de concrétiser les termes de l'accord
signé le 3 octobre 1997 à Chambéry.
B. L'IMPÉRIEUSE NÉCESSITÉ DE DÉGAGER DES MOYENS HUMAINS SUPPLÉMENTAIRES
1. L'augmentation des effectifs remise en cause ?
L'augmentation des effectifs de la gendarmerie sur la
période
couverte par la loi de programmation 1997-2002 repose exclusivement sur la
création de postes de volontaires
.
Or, depuis 1999, la création des postes budgétaires
apparaît en net retrait par rapport aux objectifs initialement
prévus. Par ailleurs, l'adaptation de cette ressource nouvelle aux
besoins de la gendarmerie soulève encore des interrogations.
a) Un déficit confirmé de créations de postes de volontaires
|
Nombre d'appelés |
Nombre de volontaires |
Effectifs
|
|||
|
Prévisions |
Réalisé |
Prévisions |
Réalisé |
Total prévisions |
Total réalisé |
1996 |
12.017 |
12.017 |
|
|
12.017 |
12.017 |
1997 |
12.093 |
12.211 |
|
|
12.093 |
12.211 |
1998 |
- |
12.644 |
0 |
- |
12.644 |
12.644 |
1999 |
8.521 |
10.476 |
4.935 |
3.000 |
13.456 |
13.476 |
2000 |
4.874 |
7.403 |
9.869 |
7.300 |
14.743 |
14.703 |
2001 |
2.914 |
- |
12.454 |
- |
15.368 |
- |
2002 |
0 |
- |
16.232 |
- |
16.232 |
- |
En 2000,
le nombre des gendarmes adjoints (volontaires) dépassera celui des
gendarmes auxiliaires auxquels ils ont vocation à se substituer.
Les
3 588
volontaires supplémentaires représentent la
seule source supplémentaire d'effectifs pour la gendarmerie d'ici
2002.
Depuis 1999, le nombre de postes budgétaires de volontaires
créés est inférieur au nombre initialement prévu
par le loi de programmation : 3 000 postes créés
en 1999 au lieu des 4 935 attendus, 4 300 au lieu de 4 934 en
2000. Certes, parallèlement, le nombre d'appelés
décroît moins vite que prévu. En outre, la loi de finances
donne à la gendarmerie les moyens de payer le nombre de postes dont elle
autorise la création sur les 12 mois de l'année. Or les
recrutements se font sur toute l'année : la gendarmerie ne recrute
pas en une seule fois, au début de l'année. Dès lors,
l'étalement du recrutement sur toute l'année lui donne une marge
pour recruter au delà du nombre de postes créés par la loi
de finances.
Malgré cette souplesse donnée en gestion à la
gendarmerie, la récurrence des réductions de créations de
postes par rapport aux objectifs envisagés conduit à
s'inquiéter de l'évolution des effectifs réels
cumulés sur trois ans.
Un alignement des effectifs de gendarmes adjoints sur ceux des gendarmes
auxiliaires imposerait de sacrifier certaines des missions aujourd'hui
confiées à la gendarmerie. Cette situation paraît
paradoxale au moment où, dans le cadre de la politique de la ville,
l'Arme est requise de s'impliquer plus fortement dans la sécurité
des zones sensibles.
En effet, les
gendarmes adjoints ont vocation à se substituer au sein
des brigades les moins chargées aux militaires professionnels
appelés quant à eux à renforce les unités des zones
les plus sensibles.
b) Les questions soulevées par l'adaptation de la ressource aux besoins
.
Un niveau scolaire moindre que celui des gendarmes auxiliaires
- le recrutement, depuis le ler mars 1999- date de promulgation de la loi du
15 avril 1999 relative aux polices municipales- est ouvert à tous
les jeunes gens des deux sexes, de nationalité française,
âgés de 18 à 26 ans.
Le nombre des candidatures, selon un premier bilan, dément les
prévisions pessimistes. Depuis le ler août 1998, en effet, date de
l'ouverture du recrutement des gendarmes adjoints,
13 461 candidatures
ont été déposées dans les brigades territoriales et
dans les centres d'information et de recrutement de la gendarmerie
. Sur cet
ensemble, quelque 2 295 candidatures portent également sur
l'accès à un poste de sous-officier (603 candidats ont d'ores et
déjà été agréés pour une
entrée en école de sous-officier de la gendarmerie -les
1 692 autres candidatures font l'objet d'un examen prioritaire pour
l'accès au poste de gendarme adjoint).
11 166 dossiers
de candidature pour le seul poste de gendarme adjoint
ont été enregistrés (dont 1 378 candidatures
féminines). 2 237 gendarmes adjoints ont d'ores et
déjà été affectés en unités (dont 786
dès 1998). 212 sont actuellement en cours de formation. 1 900
candidats ont été agréés et ont rejoint des
écoles de formation. Enfin, 1 450 dossiers sont en cours de constitution
et permettront de réaliser une partie des incorporations des mois
d'octobre et de novembre 1999.
Les effectifs à incorporer mensuellement au cours du second semestre
1999 devraient permettre de réaliser l'effectif budgétaire
fixé à 3 000 gendarmes adjoints sous réserve que le
taux de renouvellement des contrats des 800 premiers incorporés en 1998
soit voisin de 50 %.
Ainsi la moitié des candidats (pour le seul poste de gendarme
adjoint) a été sélectionnée. Seuls 55 % des
gendarmes adjoints sont bacheliers contre 80 % pour les gendarmes
auxiliaires.
Le niveau de recrutement pourrait-il être amélioré ?
Deux éléments pèsent indéniablement sur le
caractère attractif du volontariat au sein de la gendarmerie :
- d'une part la rémunération (4 800 F nets) reste
inférieure à celle accordée aux adjoints de
sécurité (police nationale) et aux agents locaux de
médiation sociale (collectivités territoriales principalement)
même si le gendarme adjoint est hébergé et nourri
gratuitement (avantage estimé à 1 200 F par mois) ;
- d'autre part, l'affectation des gendarmes adjoints (en substitution des
militaires professionnels appelés à renforcer les brigades des
zones périurbaines) privilégie les zones rurales alors même
que les bassins de recrutement présentent un caractère
plutôt urbain.
En outre, la seule possibilité de l'hébergement -et non du
logement comme pour le militaire professionnel- peut constituer un facteur
dissuasif pour les gendarmes adjoints chargés de famille. La direction
générale examine d'ailleurs les conditions de mise à
disposition de logements militaires familiaux aux intéressés en
contrepartie du paiement d'un loyer modeste.
.
La nécessité d'une formation de qualité
Le
niveau scolaire initial
appelle donc une attention
particulière pour la formation. Cette priorité se justifie
d'autant plus que les gendarmes adjoints, à la différence des
gendarmes auxiliaires, disposent de la
qualité d'agent de police
judiciaire adjoint.
La formation des volontaires comprend dix semaines en centre d'instruction
à Montargis, Tulle et Chateaulin (à compter de septembre 1999),
suivies de 6 semaines de formation complémentaire en unités.
Elle permet de dispenser une formation militaire élémentaire
ainsi qu'une instruction dans le domaine de la police judiciaire. Les 800
premiers volontaires ont été formés à la fin de
l'année 1998. En 1999, 3 000 volontaires auront été
formés. L'encadrement réunit 58 cadres permanents chargés
de l'instruction, renforcés de cinq cadres détachés par
compagnie incorporée.
Le volontariat est souscrit au premier grade de militaire du rang. La promotion
dans les grades de militaire du rang et au premier grade de sous-officier
répond par la suite à certaines conditions (obtention de
qualifications professionnelles et militaires, temps de service minimal).
L'effort déployé par la gendarmerie pour la formation des
gendarmes adjoints est important. Pourra-t-il être " amorti "
sur une période d'engagement suffisamment longue ? En principe, le
volontariat est
souscrit pour une durée de 12 mois renouvelable
quatre fois
. Le contrat initial prévoit une période
probatoire de trois mois, renouvelable une seule fois pour raison de
santé ou insuffisance de formation ; pendant cette période,
le gendarme adjoint ou l'autorité militaire peut, unilatéralement
et sans préavis, mettre fin au contrat. Au-delà de cette
période, il peut être mis un terme au volontariat notamment sur
demande du gendarme adjoint dans le cas d'un motif grave d'ordre personnel ou
familial ou, à l'initiative de l'autorité d'emploi en cas de
manquement à la probité, à l'honneur et aux devoirs
généraux du militaire.
Le renouvellement de contrat doit faire l'objet d'une demande écrite
soumise à l'autorité d'emploi un mois avant le terme du contrat
en cours.
La direction générale table aujourd'hui sur une
durée moyenne d'engagement de deux à trois ans.
Un bilan
devra être dressé à la fin de 2000 pour évaluer le
taux de renouvellement des contrats.
2. Les redéploiements : les enseignements tirés de l'échec d'une méthode de décision inadaptée
Le
19 janvier 1999, le premier ministre annonçait la suspension, dans
les faits, du plan de redéploiement des forces de sécurité
sur le territoire national, décidé par le Conseil de
sécurité intérieure 9 mois plus tôt. Pourquoi
revenir aujourd'hui sur un projet mal engagé et mal conduit ?
La réponse tient en trois points. D'une part, il s'agit là d'un
dossier essentiel dont l'enjeu n'est rien moins que l'égalité des
citoyens face au droit à la sécurité. D'autre part, la
nécessité d'un aménagement de notre dispositif de
sécurité reste d'une entière actualité. Elle
découle par ailleurs d'un principe posé par le législateur
dans la loi d'orientation et de programmation relative à la
sécurité de 1995 : au-dessous de 20 000 habitants, la
commune relève de la gendarmerie, au dessus de ce seuil, de la police.
Enfin, les enseignements tirés des erreurs commises l'an passé
doivent permettre de concrétiser cette priorité sur des bases
nouvelles.
a) Une méthode inadaptée
.
L'articulation du plan de redéploiement
.
Le projet de redéploiement des forces de sécurité
adopté à l'issue des décisions du Conseil de
sécurité intérieure s'articulait autour de trois points.
Il avait pour
objectif
de permettre le redéploiement de
3 000 fonctionnaires
de police dans les zones urbaines
réputées les plus sensibles.
Pour dégager les effectifs nécessaires, la police nationale
devait laisser la place à la gendarmerie dans les villes de moins de
20 000 habitants -où l'Arme, du reste, est en principe
compétente aux termes de la loi d'orientation et de programmation
relative à la sécurité du 21 janvier 1995.
Afin de déployer les personnels dans les communes nouvellement
transférées à la gendarmerie, celle-ci devait
elle-même, par ailleurs, procéder à la dissolution de
certaines brigades en zone de police nationale ou à la suppression de
brigades, deuxième ou troisième de canton dans les zones rurales.
Le redéploiement ainsi opéré devait respecter les
références fixées par le ratio de 1 militaire pour
1 000 habitants en zone de gendarmerie nationale et 1 militaire pour
10 000 habitants en zone de police nationale. En outre, de manière
plus limitée, la gendarmerie aurait disposé d'une marge de
manoeuvre complémentaire liée aux personnels
libérés à la suite du transfert de zone de
responsabilité de la gendarmerie nationale vers la police nationale.
Telle était la logique générale du projet envisagé.
En pratique le redéploiement se traduisait par le transfert de 228
communes (soit 89 circonscriptions de police) pour une population de
1,5 million d'habitants de la police à la gendarmerie et un
mouvement inverse portant sur 35 communes -soit une population de
500 000 personnes- de la gendarmerie à la police.
.
Ce transfert avait pour conséquence la suppression de
plusieurs dizaines de commissariats et de plus de deux cents brigades.
Les différentes opérations envisagées par la gendarmerie
permettaient de dégager quelque 1 600 emplois :
- 400 emplois au titre de la suppression de brigades de gendarmerie en zone de
police d'Etat ;
- 1 000 emplois grâce à la dissolution de brigades de
gendarmerie dans les zones rurales les moins peuplées ;
- 200 emplois, enfin, au titre du transfert de zone de gendarmerie vers la zone
relevant de la compétence de la police.
Les emplois ainsi libérés auraient donné les moyens de
renforcer, à hauteur de 1 200 postes nouveaux, les unités
déjà présentes dans les nouvelles zones de
compétence confiées à la gendarmerie et de 400 postes les
unités installées dans les zones périurbaines.
.
L'analyse du processus de décision
Sur les bases des conclusions du rapport de la mission parlementaire de
MM. Carraz et Hyest, le Conseil de sécurité
intérieure du 27 avril 1998 arrêta deux orientations
principales :
- la priorité donnée aux zones urbaines particulièrement
marquées par la délinquance ;
- l'adaptation, en conséquence, des effectifs de policiers et de
gendarmes dans les zones rurales et dans les petites villes.
Le rapport Hyest-Carraz avait précisé les contours de la
procédure à suivre. En effet, dans la proposition n° 8
relative à l'organisation des zones police/gendarmerie, il
préconisait, après l'annonce générale au niveau du
gouvernement, la création d'une mission administrative
spécialisée placée, de préférence,
auprès du Conseil de sécurité intérieure et la
prise en charge par les préfets de l'instruction des dossiers et de la
concertation
avec les élus. Dans cette perspective, la
concertation devait précéder la prise de décision.
C'est l'inverse qui se produisit : le 14 août 1998, les
ministres de l'intérieur et de la défense fixent, par circulaire,
le calendrier de l'opération de transfert et désignent les
préfets comme
responsables
de la phase d'information et de
concertation. Ils joignent à cette circulaire une
liste des
unités
-brigades ou commissariats- dont la suppression est
envisagée. Même si la circulaire évoque les conditions de
la concertation, la liste est si précise, les délais impartis
pour l'information si encadrés que la marge laissée à la
discussion apparaît des plus restreinte et que la concertation
recherchée apparaît comme un
trompe-l'oeil
.
La circulaire relative aux restructurations du dispositif territorial de la
gendarmerie élaborée à la même date au sein de la
direction générale de la gendarmerie, évoquant quant
à elle le principe d'une expertise
"
complémentaire
" confiée aux préfets et
associant les élus, paraît implicitement confirmer que les
décisions ne peuvent être modifiées que dans des bornes
étroites.
.
Un désinvestissement de l'Etat parallèle à la
montée des protestations
Aux termes de la circulaire du 14 août précitée, les
commandants de groupement devaient répondre aux sollicitations de
l'autorité administrative pour constituer les dossiers d'expertise.
Mais, dans le même temps, la protestation, animée par les
élus -et souvent orchestrée par des syndicats de police- freinera
progressivement la détermination du gouvernement. Ainsi,
de
manière paradoxale, dans une opération rendue nécessaire
par le renforcement des effectifs de police dans les zones sensibles, et dont
l'instruction incombait aux préfets, la gendarmerie va apparaître
très vite en première ligne.
Cette situation s'avérera
au fil des mois très inconfortable pour l'Arme.
Dès le 25 septembre 1996, le ministre de la défense et le
ministre de l'intérieur par intérim demandaient que " la
méthode soit améliorée, la concertation renforcée
et l'expertise approfondie ".
Mais le 7 octobre 1998, le président de la commission de la
défense de l'Assemblée nationale demande le retrait pur et simple
du plan de redéploiement. M. Guy Fougier, conseiller d'Etat, est alors
chargé d'engager une mission de consultation afin d'entendre l'avis des
représentants nationaux et locaux dans chaque département. Le
rapport remis le 31 décembre 1998 au Premier ministre n'a pas
été rendu public. Un communiqué officiel constate
toutefois " les objections soulevées " par le projet et
recense " certaines difficultés pouvant résulter des
transferts ou des dévolutions au regard de la politique
d'aménagement du territoire, des problèmes financiers et
immobiliers, et du reclassement des personnels de police ". Enfin, le
19 janvier, le premier ministre déclarait qu'il n'y aurait pas
d' " application générale " du plan de
redéploiement et que s'ouvrirait " une phase d'examen au cas par
cas en concertation avec les élus concernés de ce qui peut
être fait sans que cela suscite des difficultés ".
b) Les redéploiements : une opération à reprendre sur des bases entièrement nouvelles
Si la
nécessité d'un redéploiement ne peut être
contestée dans son principe, ses conditions de mise en oeuvre doivent
être réaménagées de manière substantielle et
obéir à l'impératif de la concertation. C'est
précisément pour amener le gouvernement à préciser
sa méthode et à fixer certaines garanties conformes aux voeux des
élus et de l'opinion que votre rapporteur a présenté le
28 janvier dernier une question orale suivie d'un débat sur le
redéploiement des forces de sécurité. Dans sa
réponse, le ministre de la défense a été ainsi
conduit à poser cinq garde-fous à la mise en place d'une nouvelle
répartition des forces de police et de gendarmerie.
En premier lieu, il a rappelé qu'aux termes des décisions du
comité interministériel d'aménagement et de
développement du territoire du 15 décembre 1998, aucune
réorganisation d'ensemble des services publics ne serait
effectuée sans
concertations locales
dans le cadre de la
commission départementale des services publics. Le ministre a
également envisagé, sur ce chapitre, la consultation des
commissions départementales de sécurité.
Ensuite, le principe général du maintien d'
une brigade par
canton
a été posé. Les effectifs de la brigade unique
de canton pourront certes être réduits à 5 ou 4 militaires
mais dans les seules " situations d'exception " où
l'activité de l'unité apparaît particulièrement
faible et, même dans ce cas, l'évolution doit se faire de
" manière très prudente " selon les termes du ministre.
En troisième lieu, le partage des fonctions entre brigades doit garantir
un
délai d'intervention inférieur à trente minutes.
Par ailleurs, dans les zones de police d'Etat le
ratio d'un gendarme pour
10 000 habitants
sera préservé afin d'assurer avec
efficacité les fonctions d'enquête et de soutien à la
police judiciaire confiées à la gendarmerie.
Enfin, le ministre a apporté d'utiles précisions sur la question
des baux qui lient la gendarmerie aux collectivités locales pour les
infrastructures dont celles-ci sont propriétaires. Dans
l'hypothèse de l'abandon total ou partiel d'un site, une
solution de
reconversion
sera recherchée de manière systématique
avec, pour le financement des travaux d'aménagement dans les locaux, un
appel aux crédits du fonds de restructuration de la défense,
à ceux du fonds national d'aménagement et de développement
du territoire ou encore aux crédits européens. En outre, lorsque
aucune reconversion à court terme n'est possible et quand la situation
financière de la commune peut se trouver sérieusement compromise
par l'arrêt du paiement des loyers par la gendarmerie, une
indemnité
pourrait être versée par le
ministère de la défense.
Tel est désormais le cadre général dans lequel les
redéploiements pourront s'organiser. Deux voies pourraient être
explorées : d'une part, une réorganisation des structures
existantes, d'autre part, la suppression de certaines unités en
contrepartie de certaines compensations.
.
La réorganisation du dispositif existant
Tournant la page d'une refonte de son dispositif décidée
d'autorité et de manière centralisée, la gendarmerie s'est
engagée dans une voie nouvelle :
l'expérimentation
progressive d'une nouvelle organisation
qui aurait dû primer sur
toute autre approche. D'après les informations communiquées
à votre rapporteur, cette nouvelle organisation se fonderait pour les
cantons les moins peuplés sur un système réunissant une
brigade " mère " et des brigades " filles "
-celles-ci assurant des missions plus limitées telles que l'accueil des
usagers. La réorganisation doit en effet tenir compte de trois principes
d'action : d'une part, la nécessité de faire face à
la baisse prévisible des effectifs de certaines brigades, d'autre part,
le souci de préserver la permanence de l'accueil (ce qui exclut en
particulier le renvoi des appels vers le COG le jour), enfin, l'exigence d'une
intervention menée dans un délai inférieur à
30 minutes.
Quant à la méthode, elle repose avant tout sur la prise en compte
des réalités locales. Il revient donc au commandant de
légion, en liaison avec les commandants de groupement, de proposer une
nouvelle organisation des unités au sein du département où
ils exercent leurs responsabilités. Différentes hypothèses
ont été présentées par la direction
générale mais l'initiative appartient aux échelons locaux.
Sur la base des expérimentations conduites dans les différents
départements, un bilan sera établi à la fin de l'an
prochain. Les leçons de l'expérience permettront alors de
définir les principes généraux applicables.
Cette méthode ne prend pas seulement le contrepied de la
procédure engagée l'an passé, elle rompt aussi avec une
certaine tradition jacobine.
.
La recherche de contreparties
La suppression de certaines unités ne peut être exclue mais elle
doit s'inscrire dans une démarche de concertation sur la base de
compensations accordées en contrepartie des dissolutions.
Ainsi
la gendarmerie a pu procéder en 1999 à la dissolution de 18
brigades sans susciter de réactions particulières parce que, dans
la plupart des cas, un dispositif alternatif a pu être mis en place sous
la forme d'un peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie
(PSIG) ou d'une brigade de prévention de la délinquance
juvénile. C'est aussi dans cette voie que les efforts devront être
poursuivis.
Bilan
détaillé des redéploiements d'unités depuis 1995
Bilan des dissolutions de brigades territoriales
entre 1995 et
1997
Année |
Zone de gendarmerie nationale |
Zone de police nationale |
Total |
1995 |
2 |
2 |
4 |
1996 |
0 |
19 |
19 |
1997 |
2 |
12 |
14 |
Bilan des dissolutions de brigades territoriales en 1998
10
brigades territoriales situées en zone de police nationale
. Algrange (Moselle)
. Les Abymes (Guadeloupe)
. Colomiers (Haute-Garonne)
. La Madeleine (Nord)
. Lomme (Nord)
. Hérin (Nord)
. Anzin (Nord)
. Rennes-Nord (Ille-et-Vilaine)
. Gaillard (Haute-Savoie)
. Le Chaudron (La Réunion)
2 brigades territoriales situées en zone de gendarmerie
nationale :
. Lecumberry (Pyrénées-Atlantiques)
. Figari (Corse du Sud)
Bilan
des dissolutions de brigades territoriales
en 1999 (au
1.9.99)
BT dissoute |
Zone |
Unité créée
corrélativement
|
Angers-Centre |
ZPN |
BPDJ Angers |
Anse-Bertrand |
ZGN |
|
Arcachon |
ZPN |
|
Bandol |
ZPN |
BPDJ Bandol |
Bezons |
ZPN |
|
Comines |
ZPN |
|
La Baule-Escoublac |
ZPN |
|
Le Palais-sur-Vienne |
ZPN |
|
Maxéville |
ZPN |
BPDJ Maxéville |
Nice-Ouest |
ZPN |
BPDJ Nice |
Ollioules |
ZPN |
|
Petit-Canal |
ZGN |
|
Saint-Herblain |
ZPN |
BPDJ Saint-Herblain |
Saint-Jean-Cap-Ferrat |
ZPN |
|
Saint-Raphaël-Agay |
ZPN |
|
Saint-Saturnin-lès-Apt |
ZGN |
PSIG Saint-Saturnin-lès-Apt |
Sochaux |
ZPN |
BPDJ Sochaux |
Strasbourg-Neudorf |
ZPN |
BPDJ Strasbourg |
Il n'en reste pas moins que la démarche entreprise par la gendarmerie ne prendra toute sa portée que si la police nationale suit le même mouvement. Le redéploiement des forces de sécurité appelle donc une véritable coordination sous l'autorité de l'Etat des efforts parallèles de la police et de la gendarmerie.