G. PROFESSEUR CLAUDE SUREAU, PRÉSIDENT DE L'ACADÉMIE NATIONALE DE MÉDECINE
M. Jean DELANEAU, président - Monsieur le président, je suis très heureux de vous recevoir. Je vais vous passer la parole tout de suite. Nous souhaiterions avoir l'avis de l'Académie de médecine, qui est souvent très en avance sur certains problèmes.
Professeur Claude SUREAU - Monsieur le président, je vous remercie. Après avoir écouté à la fois M. Glorion et M. Tournaire, je me rends compte que je n'ai pratiquement rien à ajouter, ce qui va libérer du temps pour la discussion. Je tiens à souligner que notre position sur le problème de l'IVG et sur le problème de la stérilisation, à l'Ordre national des médecins et à l'Académie nationale de médecine, est une position convergente. Mon ami Michel Tournaire vient de parler au titre de l'ANAES. Il parlait aussi finalement en tant qu'ancien président du collège national des gynécologues obstétriciens et dans la réflexion que nous avons eue à l'Ordre et à l'Académie de médecine, était associé le président actuel du collège national des gynécologues obstétriciens. Il s'agit de trois formations travaillant ensemble et qui ont établi ce document.
J'avais eu l'occasion également d'être auditionné à la délégation aux droits de la femme et de donner mon point de vue sur ce problème de l'IVG mais aussi sur ce problème, très présent dans notre pays, qui est celui de la stérilisation. Sur le problème de l'IVG, bien entendu, l'Académie nationale de médecine n'a considéré de son devoir que de se prononcer sur les aspects techniques qui ont été très largement évoqués, et il est clair que je n'ai rien à ajouter à ce qu'a dit le professeur Glorion. Notre propos a été élaboré en commun et tout ce qu'il a dit me para»t parfait. Sur le problème de la stérilisation, j'ai apporté le rapport commun Académie-Ordre sur la stérilisation chirurgicale. Je crois pouvoir dire que nous étions assez marris de l'application qui était faite par la Cour de Cassation de l'article 16-3 du code civil. Cet article prévoit, dans la version de la loi de 1994, que l'on ne doit faire d'agression sur le corps humain que s'il y a une nécessité thérapeutique pour la personne. Les gynécologues, de manière générale, ont beaucoup protesté en raison de ce libellé qui, au risque de choquer les législateurs que vous êtes, me para»t assez absurde. Pourquoi absurde ?
Dans la version nouvelle qui résulte de l'intervention du sénateur Autain, reprise dans l'article 70 de la loi du 27 juillet 1999, on a remplacé le terme thérapeutique par médical. Cela a été fait pour améliorer les conditions de la stérilisation, mais le terme reste absurde parce qu'il dit " pour la personne ", intérêt thérapeutique et aujourd'hui médical " pour la personne ". Je pose la question : quelle personne ? Il faut reconna»tre que si on suit cette manière de s'exprimer, on aboutit à une incohérence profonde. Je pense en particulier à une situation très présente dans nos esprits, à nous gynécologues accoucheurs, qui est celle de la césarienne d'indication fÏtale. Une femme a une procidence du cordon, le cordon sort, la dilatation du col est à deux centimètres, l'enfant va mourir. Bien entendu, on va faire une césarienne, mais cette césarienne est d'indication pour qui ? Pas pour la mère, car elle est parfois au détriment de la mère, elle comporte un risque pour la mère. Il s'agit d'une indication pour le fÏtus, mais vous savez qu'il n'est pas, juridiquement parlant, une " personne ".
Vous savez que la Cour de cassation, il y a quelques mois, a cassé un arrêt de la Cour d'appel de Lyon à propos d'une interruption de grossesse involontaire, c'était une confusion de patiente qui avait abouti à la mort d'un enfant au terme de cinq mois. Il y avait une poursuite pénale pour homicide et après les différentes étapes de la réflexion, la chambre criminelle de la Cour de Cassation a cassé sans renvoi la décision de la Cour d'Appel au motif que la loi pénale est d'interprétation stricte et que l'homicide ne pouvait pas être appliqué à un fÏtus de cinq mois. Dans l'arrêt de la chambre criminelle, étaient dits ce fait brutal et un autre élément qui était que, subsidiairement, le problème de la viabilité ne se posait pas parce que l'enfant était de cinq mois. Il y a actuellement une autre affaire qui est pendante, qui doit passer devant la Cour de Cassation et qui va peut-être définitivement régler le problème au regard du concept de viabilité. Toujours est-il qu'en l'occurrence, il est clair que la césarienne d'indication fÏtale ne vise pas la " personne " sur laquelle on la réalise.
Autre exemple, la circoncision qui n'a ni d'intérêt thérapeutique ni d'intérêt médical pour la personne. Ou encore le don d'ovocytes, bien réglé par la loi de 1994, qui n'a pas d'intérêt thérapeutique ni médical, sauf éventuellement psychologique, pour la donneuse. Il n'a d'intérêt que pour la receveuse. Il y a là une situation paradoxale, car pour pouvoir faire prendre en charge par l'assurance maladie les actes que l'on fait, on est obligé de faire une confusion volontaire entre la donneuse et la receveuse. Tout cela pour dire que le terme déjà général d'intérêt thérapeutique ou médical " pour la personne " ne se justifie pas. Indépendamment de cela, il y a un autre aspect de fond qui nous ramène au problème de la stérilisation, qui est que la stérilisation, aux yeux des gynécologues, est un moyen contraceptif.
Ce n'est pas, me semble-t-il, à la Cour de cassation de dire quel moyen contraceptif doit être utilisé par une femme ou par, éventuellement, un homme. Regardez ce qui se passe et qui est très curieux, la Cour de cassation dit : " la stérilisation est un acte illicite donc condamnable ". Je sais qu'il n'y a pas eu de poursuites. Il n'en reste pas moins que si un accident survenait au cours de la réalisation d'un acte illicite, on peut s'attendre à ce que les conséquences soient lourdes pour le praticien qui l'aura réalisé. D'ailleurs, les conséquences de cette position officielle de la Cour de cassation sont très claires, des anesthésistes se sont refusés à participer à cet acte et les compagnies d'assurance se posent beaucoup de problèmes quant à la couverture.
Il y a tout un encha»nement de circonstances qui est particulièrement f%ocheux, et qui conduit à récuser l'éventualité d'une stérilisation pour les cas où l'on peut considérer qu'elle est indiquée. La Cour de cassation se met la main sur le cÏur, si j'ose dire, en faisant une distinction entre les indications médicales et les indications de convenance. Il faut admettre que le problème de la convenance mis dans ces termes n'est pas une attitude justifiée. La Cour de cassation a exprimé à plusieurs reprises la condamnation de la stérilisation contraceptive. C'est une façon de s'exprimer étrange, peut-on imaginer qu'il y ait des stérilisations qui ne soient pas contraceptives ? Il y a donc une contrainte qui conduit à récuser la stérilisation au profit d'autres techniques. La Cour de cassation s'arroge le droit de dire quelle est la contraception utilisable chez une femme donnée ou chez un homme. Je parlais, concernant la Cour de cassation, en mon nom personnel.
La position de l'Académie de médecine est de dire que la stérilisation doit être introduite dans l'application de la loi Neuwirth, avec des modalités et des précautions et en particulier une discussion préalable à sa réalisation. Il est opportun de tenter, du fait de son caractère supposé " définitif ", de dissuader une patiente qui demande une stérilisation. Il s'agit d'un problème médical inscrit dans le problème général de la contraception et non pas d'un problème juridique à régler par les autorités judiciaires françaises.
M. Jean CHÉRIOUX - La première question est celle des risques de dérive eugénique dans la mesure où on dépasse les dix semaines, on parle de douze, certains pensent qu'il faudrait aller plus loin dans le cadre de ce que l'on appelait l'avortement thérapeutique et que l'on appelle pudiquement aujourd'hui l'interruption médicale de grossesse. N'y a-t-il pas des risques de dérives eugéniques ? La deuxième question concerne la stérilisation des jeunes filles ou des jeunes femmes qui sont handicapées mentales, là aussi, n'y a-t-il pas un risque de dérive eugénique ? En annexe, il y a ce concept d'eugénisme, il semblerait aujourd'hui qu'on essaye d'avoir une conception sémantique très limitée sur l'eugénisme, considérant qu'il n'y a un eugénisme que lorsqu'il est organisé par un Etat et qu'il a un caractère obligatoire. Je crois que le mot eugénisme a un sens, c'est un terme grec, vous le savez mieux que moi, et que même des pratiques individuelles ont un caractère eugénique. J'aimerais avoir votre position là-dessus. En ce qui concerne la loi de 1994 et ce que vous avez appelé le don d'ovocytes, je me permettrai de vous faire remarquer, car j'étais le rapporteur, que la loi n'a pas permis le don d'ovocytes. Elle a mis en place justement le système de " l'accueil " d'embryons plus exactement, pour bien faire ressortir que l'embryon était porteur de droits et par conséquent qu'il était déjà une personne humaine en puissance.
Professeur Claude SUREAU - Je réponds tout de suite à ce problème de l'accueil de l'embryon que je connais un peu parce que j'ai fait partie de la commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction. Je suis tout à fait d'accord avec vous pour ce qui est de l'accueil de l'embryon en attirant votre attention sur un point qui m'a toujours choqué, aussi bien dans la loi que dans le décret d'application, c'est que dans cette circonstance la confidentialité de l'accueil de l'embryon n'est pas respectée, du fait même des contraintes que l'on a imposées et en particulier de la responsabilité que l'on a donnée aux juges de faire une enquête socio-psychologique. Mais, comme vous l'avez dit vous-même, il s'agit là de l'accueil de l'embryon et ce à quoi je faisais allusion ce n'est pas l'accueil de l'embryon, c'est le don d'ovocytes qui est tout à fait une autre matière.
Je suis très content que vous me posiez la question de la dérive eugénique. D'abord, la dérive eugénique dans le cadre de l'IVG, argument que Isral Nisand a très vigoureusement défendu. Je dois dire que je ne partage pas l'opinion d'Isral Nisand. Je pense que la crainte qu'il a exprimée d'un chevauchement des deux problèmes de l'IVG et de l'IMG, conduisant éventuellement à des indications d'IVG qui seraient en fait des indications d'IMG déguisées, ne para»t pas convaincante, pour la simple raison que les progrès qui vont être faits, en particulier en matière de diagnostic de sexe, comporteraient la même question beaucoup plus t™t au cours de la grossesse. Si on se met à utiliser ce type d'argument, t™t ou tard on va les retrouver plut™t au cours de la grossesse, à six ou huit semaines. La position d'Isral Nisand à cet égard ne me para»t pas convaincante. Finalement, vous m'avez posé la question de la dérive eugénique de notre société, et bien au risque de vous plaire, je vous répondrais oui. Je suis tout à fait de votre avis, ceux qui restreignent le concept d'eugénisme à l'eugénisme nazi, génocidaire, obligatoire, ne voient qu'une petite partie de la situation.
Nous sommes effectivement dans une société qui devient eugénique. Je vais faire allusion à une situation que vous avez bien connue. Il y a trois ans, on a beaucoup discuté et il y a eu des prises de positions fortes des autorités politiques françaises sur le problème de l'utilisation des marqueurs pour le dépistage du risque de trisomie 21. C'était quand M. Gaymard était ministre de la santé. L'Académie de médecine a pris un parti très fort avec le président de l'époque qui était le président Laroche. Nous avons rencontré le ministre et son conseiller, qui était Jean-François Mattei, qui nous disaient que si on allait dans cette direction, du fait du caractère extensif des examens, on allait déboucher sur un eugénisme. D'un autre c™té, nous étions sensibles au fait qu'à l'époque seules les femmes de plus de trente-huit ans avaient droit au remboursement de l'amniocentèse. Nous étions très motivés par le fait qu'on ne pouvait pas introduire un système différencié, les unes qui avaient droit au remboursement et les autres qui n'y avaient pas droit. Lorsque nous avons été auditionnés par le groupe de travail, nous avions convaincu et c'est ce qui a entra»né par la suite la prise en charge totale de l'ensemble des amniocentèses, quelle que soit la raison pour laquelle elle était indiquée. Mais, je reconnais qu'avec l'évolution des choses, nous aboutissons à une sorte de dérive eugénique.
Je fais partie du Haut Conseil de la population et de la famille. Lors de l'installation du Haut Conseil par le Président Chirac, j'ai eu une divergence d'opinion avec lui sur ce point. C'était au moment où l'affaire Perruche était en discussion. Je soulignais que l'évolution de notre société se faisait dans le sens d'une non-acceptation des individus mal formés. Le Président Chirac m'a dit : " il y a plus de trottoirs pour handicapés, donc ce que vous dites n'est pas tout à fait vrai ". Cela étant dit, monsieur le sénateur, je crois que le fait objectif est que notre société tolère de moins en moins les handicapés. D'un autre c™té quand nous, les médecins en particulier, voyons le drame que représente pour une famille la présence d'un enfant sévèrement handicapé, nous ne pouvons pas ne pas être heureux d'avoir la possibilité d'interrompre la grossesse. Il faut informer la population du risque de dérive et dire qu'il faut peut-être tenter d'avoir une attitude différente vis-à-vis des enfants mal formés. D'un autre c™té il faut reconna»tre que la charge physique, psychique, émotionnelle, financière que représente un enfant handicapé, surtout si ce n'est pas le premier dans une famille, nous conduit à accepter l'interruption de grossesse et surtout dans les situations particulièrement dramatiques où les enfants souffrent, je pense notamment à la myopathie et à la mort pénible d'un myopathe.
M. Jean DELANEAU, président - Vous feriez l'interruption pour cette raison ?
Professeur Claude SUREAU - Je suis catholique pratiquant. A cet égard, il faut bien reconna»tre que j'ai une position différente de celle que les autorités pontificales pr™nent. Ma position vis-à-vis de l'IVG a toujours été une position restrictive. Les IVG que j'ai faites dans ma vie sont au nombre de trois. Cela étant, je n'ai jamais interdit dans mon service que l'on fasse des IVG. En revanche, j'ai participé directement ou indirectement à des IMG. Je suis bien conscient d'un fait, que M. Chérioux va certainement m'objecter, qui est qu'un mongolien ne souffre pas. Cependant, il peut représenter pour les familles une charge insupportable. Je pense surtout que ce n'est, ni à la collectivité, ni aux autorités de l'Etat, ni au corps médical, de dicter à une famille la règle qu'elle doit suivre et de juger de l'acceptabilité d'une situation comme celle-là. Sur la stérilisation des incapables, effectivement, j'ai déjà fait des stérilisations sur des incapables à la demande expresse de la famille, car souvent c'est la grand-mère ou le grand-père qui va élever l'enfant d'une personne qui est dans une institution. J'ai beaucoup moins d'hésitations à faire une stérilisation sur une incapable qu'à faire une interruption de grossesse. Je sais qu'il y a des établissements où l'on impose la stérilisation avant l'acceptation dans l'établissement. Bien entendu, cela est inadmissible. Il faut que les décisions de stérilisation d'un incapable soient múrement pesées avec éventuellement plusieurs consultations.
M. Claude HURIET - Claude Sureau vient d'évoquer la nouvelle rédaction du code civil dans le cadre de la loi créant une couverture maladie universelle et il se trouve que j'étais rapporteur au Sénat pour ce titre III. Je veux apporter une précision. Dans la discussion qui était instaurée suite à l'amendement François Autain, j'avais été amené à évoquer un autre exemple que celui de la stérilisation, je veux parler de la chirurgie esthétique. La chirurgie esthétique, avant cette modification, était condamnable, sauf à prétendre que toute chirurgie esthétique a des vertus thérapeutiques. Ma question est la suivante : quelle est actuellement l'évolution de la démographie des gynécologues obstétriciens ? La discussion passionnée qui est intervenue il y a quelques mois entre les tenants des différentes filières a-t-elle des conséquences en termes de démographie et de réponse aux besoins ? Dans les facteurs de retard de réalisation d'IVG, l'insuffisance des centres d'orthogénie et du nombre de gynécologues obstétriciens est-il un facteur qui va évoluer dans le bon sens ou dans le mauvais ?
M. Jean-Louis LORRAIN - Je me souviens avoir vu des références à l'Académie de médecine. Souvent vos avis peuvent être pris comme alibis, être instrumentalisés. Comment vous positionnez-vous par rapport à la diffusion de l'information et par rapport aux médias, du fait que le niveau de vos interlocuteurs peut être totalement différent ? Comment arrivez-vous à garder votre indépendance, à ne pas être instrumentalisés ? Votre propos pose aussi la question l'indépendance des experts, des politiques, des juges.
M. Lucien NEUWIRTH - Je voulais simplement rappeler que, lorsque la loi sur la contraception a été votée, le problème de la stérilisation avait été soulevé. A ce moment-là, le corps médical interrogé nous avait répondu qu'elle était irréversible, ce qui fait qu'elle n'a pas été inscrite dans la loi. Je crois avoir compris que le corps médical est revenu sur cette définition.
Professeur Claude SUREAU - J'oserai dire qu'en trente-trois ans l'Académie de médecine a aussi évolué. C'était une époque difficile, que l'on a retrouvée en 1975. Nos prédécesseurs avaient une philosophie réticente vis-à-vis de certains contr™les de la procréation humaine.
En 1979, lors de la loi Pelletier, je me souviens m'être fait critiquer à l'Académie à cause des positions que j'avais soutenues, considérées comme révolutionnaires à l'époque. Sur le problème de la réversibilité, en 1967, on ne connaissait pas la fécondation in vitro, c'était le début de la cryoconservation du sperme et c'était avant le développement de la microchirurgie. Il était convenable et réel de considérer la stérilisation comme irréversible.
Aujourd'hui ça n'est plus vrai, en ce qui concerne la stérilisation féminine, elle est réversible à 75 %, au prix d'une intervention chirurgicale et en ce qui concerne la stérilisation masculine, elle est moins réversible mais comme elle est associée à une mise de sperme en banque, on a le moyen de tourner cette infécondité consécutive à la stérilisation. Cet argument de la réversibilité ou de l'irréversibilité d'un point de vue philosophique me para»t important à considérer et je ne suis pas convaincu de la légitimité pour le droit positif de faire le bien des gens malgré eux. Sur certains problèmes qui engagent lourdement l'avenir des individus, il faut les informer des conséquences, mais a-t-on le droit d'enfermer les individus dans les contraintes législatives, je n'en suis pas certain.
Il y a eu une étude faite aux Etats-Unis, le taux de regret des stérilisations faites après trente-trois ans est de 6 %, le taux de regret des stérilisations faites avant trente-trois ans est le d'ordre de 20 %. C'est le r™le des médecins d'expliquer aux patientes que la stérilisation va comporter des aspects importants et il faut être conscient de ces aspects. Ensuite c'est à la femme de décider de son mode de contraception.
Là, on retrouve le problème de la stérilisation des incapables. J'entends dire couramment qu'il est ridicule d'accepter le principe d'une stérilisation sur les incapables puisqu'il y a d'autres moyens de contraception comme le stérilet. Ce à quoi j'objecterais qu'à mes yeux et en fonction de l'article 16-3 du code civil, la mise d'un stérilet sur une incapable, surtout si elle est vierge, est un acte aussi traumatisant, si ce n'est plus, qu'une stérilisation. Pratiquement, pour mettre un stérilet sur une jeune fille de seize ou dix-sept ans il faut une anesthésie générale. Si on dit qu'il suffit de faire une injection d'hormones, on sait que cela peut entra»ner au bout de vingt ou trente ans une ostéoporose considérable. Allons-nous, pour satisfaire à l'article 16-3, faire de telles injections ? Pour ma part la réponse est non.
Sur l'indépendance de l'Académie vis-à-vis des médias. L'Académie de médecine a été fondée en décembre 1820 par le roi Louis XVIII qui était notre protecteur. Nous n'avons pas d'autorité de tutelle, nous avons une gestion par le ministère de l'éducation nationale. Nous sommes indépendants de tout pouvoir et notre protecteur est le Président de la République avec qui nous avons des relations puisqu'il nous commande parfois des rapports. Il nous est arrivé d'avoir des positions qui ne sont pas les mêmes que celles du Gouvernement, comme dans le cas de l'accouchement sous X. Nous avons essayé depuis quelques années de développer la communication. Notre philosophie est de ne nous soucier de rien, d'examiner les problèmes et d'exprimer publiquement notre opinion.
Sur l'évolution géographique gynéco-obstétricale, je ne crois pas que ce soient les problèmes liés à l'IVG qui sont à l'origine de la désaffection des gynécologues accoucheurs pour leur spécialité. Cette désaffection est liée à deux problèmes : les contraintes de l'activité, et en particulier de l'activité obstétricale, et la situation dans laquelle nous sommes où les poursuites sont de plus en plus fréquentes, au civil et au pénal, y compris pour les chefs de service des h™pitaux publics.