ARTICLE 14
Les
décrets d'avances
Commentaire : le présent article tend à encadrer la dérogation au principe de l'autorisation parlementaire de la dépense que constitue la procédure du décret d'avances.
Les décrets d'avances constituent une atteinte radicale au principe de compétence du pouvoir législatif pour déterminer les charges de l'Etat, compétence qui est de valeur constitutionnelle. C'est pourquoi cette procédure appelle un encadrement tout particulier. L'encadrement strict des décrets d'avances que prévoit le texte adopté par l'Assemblée nationale paraît à votre rapporteur aller dans le bon sens. Mais, celui-ci souhaite y ajouter une précision et une condition supplémentaires.
I. LE TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Opérant, par souci de simplification, une unification du régime des décrets d'avances, l'Assemblée nationale a, à très bon droit, souhaité introduire plus de cohérence et plus de contrôle parlementaire dans une procédure au terme de laquelle le législateur organique admet, pour des raisons pratiques, une exception à la règle constitutionnelle de détermination des charges de l'Etat par les lois de finances.
Comme aujourd'hui, les ouvertures de crédits ainsi réalisées sont conditionnées à la constatation de leur urgence, et une demande de ratification devra être formulée dans le plus prochain projet de loi de finances afférent à l'année concernée. Cette demande devra être spécifique et formelle, et ne saurait résulter de la simple mention des crédits en cause dans les tableaux récapitulatifs de l'instrument concerné.
Le durcissement du régime des décrets d'avances dans le texte adopté par l'Assemblée nationale provient :
d'une part, de l'obligation de rendre les commissions des finances du Parlement à même d'émettre un avis sur ces ouvertures de crédits ;
d'autre part, de l'obligation de faire figurer dans les décrets d'avances l'intégralité de l'économie de chaque opération. Les décrets d'avances n'étant pas destinés à modifier l'équilibre budgétaire de la loi de finances tel qu'il a été défini par le Parlement, l'ouverture de crédits nouveaux devra être gagée par la constatation de recettes supplémentaires et (ou) par des annulations de crédits. Ces compensations devront faire partie intégrante du dispositif des décrets d'avances. L'on y gagnera en clarté ;
enfin, le plafond de 1,5 % des crédits ouverts par la loi de finances de l'année applicable aux annulations de crédits prévues à l'article 15 s'entendant, y incluses les annulations gageant les ouvertures de crédits réalisées par décrets d'avances, une contrainte particulière est posée s'agissant des seules avances compensées par des annulations de crédits.
II. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur souhaite apporter quelques précisions au texte adopté par l'Assemblée nationale. Celles-ci ne remettent nullement en cause les intentions qui fondent son économie.
A. LES OUVERTURES DE CRÉDITS DOIVENT POUVOIR PORTER SUR L'ENSEMBLE DU BUDGET DE L'ÉTAT
Dans le texte de l'Assemblée nationale, les seuls crédits pouvant être ouverts par décrets d'avances sont ceux du budget général. Or, des crédits budgétaires sont ouverts sur les budgets annexes et les comptes spéciaux, et il n'est pas impossible que l'urgence puisse commander d'abonder lesdits crédits.
Il est donc souhaitable de lever la restriction posée par le texte de l'Assemblée nationale.
B. IL EST INDISPENSABLE D'INTRODUIRE UN PLAFONNEMENT PROPRE AUX CRÉDITS OUVERTS PAR DÉCRETS D'AVANCES
Comme on l'a indiqué, l'Assemblée nationale a introduit un plafonnement indirect et partiel des ouvertures de crédits réalisées par décrets d'avances, à travers le plafonnement applicable aux annulations de crédits mentionné à l'article 15 de la présente proposition de loi.
Il semble préférable à votre rapporteur de prévoir un plafonnement propre aux ouvertures de crédits, dont le régime est fixé par le présent article. En effet, c'est bien, à titre principal, ces ouvertures qu'il convient d'encadrer, et ce, quelle que soit la forme (constatation de recettes comme annulation de crédits), prise par la compensation financière venant les gager.
Un plafond de 1 % des crédits ouverts dans la loi de finances de l'année paraît constituer un seuil raisonnable. Au-delà, le gouvernement devrait revenir devant le Parlement pour se voir consentir l'ouverture de crédits supplémentaires
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.