D. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION : FRANCHIR ENFIN UNE NOUVELLE ÉTAPE

Votre commission des Lois a pris la mesure du malaise des élus locaux devant l'accroissement de leurs charges du fait de la décentralisation , de la complexité croissante et de l'instabilité des normes juridiques ainsi que de la tendance à la judiciarisation de la société .

Elle a constaté que les moyens dont disposaient les élus pour assumer leurs responsabilités dépendaient largement de leur situation socioprofessionnelle, les personnes ne disposant pas du temps nécessaire, d'une protection sociale suffisante ou de garanties en termes de réinsertion professionnelle étant les moins nombreuses parmi les membres des assemblées locales .

Votre commission des Lois a donc considéré que l'adoption de mesures destinées à renforcer sensiblement les garanties accordées aux élus pour l'exercice de leur mandat, afin de favoriser l'égalité des citoyens devant le mandat et d'assurer une meilleure respiration entre société civile et société publique , constituait une condition indispensable au développement de la démocratie locale .

Pour autant, elle ne s'est pas engagée dans la voie d'une professionnalisation du mandat local , lequel repose sur l'épreuve démocratique périodique de l'élection. Elle a donc refusé de donner aux élus un statut d'agent civique territorial, comme l'a proposé pour les chefs d'exécutifs et leurs « principaux adjoints » la Commission pour l'avenir de la décentralisation présidée par M. Pierre Mauroy.

Votre commission des Lois a pris acte avec satisfaction de ce que plusieurs dispositions adoptées par le Sénat lors de la dernière session avaient été reprises dans le projet de loi et approuvées par les députés.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission des Lois vous propose :

- de créer un congé pour campagne électorale de 10 jours pour les candidats à un mandat local (sauf dans les communes de moins de 3.500 habitants) ou européen ( article 16 ) ;

- de confirmer l'amélioration du barème de crédit d'heures déjà voté par le Sénat ( article 17 ) ;

- d'étendre le champ de la compensation des pertes de revenu prévue pour les élus dépourvus d'indemnités de fonction à la durée d'exercice du crédit d'heures et de tripler son plafond, ces dispositions étant rendues applicables aux non salariés .

De plus, les pertes de revenus résultant de la participation à une réunion à la demande du préfet ou d'une autre collectivité territoriale pourraient également être compensées ( article 18 ) ;

- de s'opposer au financement par les entreprises , dont ce n'est pas le rôle, de dispositions concernant la formation de l'élu en vue de sa réinsertion professionnelle à l'issue de son mandat ( article 19 ) ;

- d'étendre à tous les adjoints et à tous les membres des assemblées départementales et régionales le régime de suspension du contrat de travail , avec la protection sociale qui lui est attachée ( article additionnel après l'article 19 ) ;

- de s'opposer à l'insertion d'une disposition ponctuelle sur les incompatibilités professionnelles , qui ne s'appuie pas sur une réflexion d'ensemble ( article 19 bis ) ;

- de créer une allocation différentielle de fin de mandat en faveur des maires de communes d'au moins 1.000 habitants, des adjoints de celles d'au moins 20.000 habitants, des présidents et vice-présidents d'assemblées départementales et régionales ayant interrompu leur activité professionnelle pour l'exercice de leur mandat. Cette prestation, égale à 80 % de la différence entre les indemnités de fonction précédemment versées, majorations légales comprises, et l'ensemble des ressources perçues, serait servie pendant une durée au plus égale à six mois et financée par les catégories d'élus susceptibles d'en bénéficier ( articles 20 et 21 ) ;

- d'instituer un honorariat pour les anciens membres des assemblées départementales et régionales, dans les conditions non modifiées auxquelles il est attribué aux anciens maires ( article additionnel après l'article 21 ) ;

- de ne pas ajouter, dans le dispositif protégeant les élus contre les mesures discriminatoires, des dispositions risquant de faire de lui un salarié protégé ( article 21 bis ) ;

- de confirmer les dispositions déjà adoptées par le Sénat pour annexer au compte administratif une récapitulation des actions de formation des élus, donnant lieu à un débat , sans reprendre celles proposées pour contraindre les collectivités à délibérer sur les orientations en matière de formation dans les trois mois suivant leur renouvellement ( article 22 ) ;

- de confirmer les dispositions déjà votées par le Sénat pour porter de six à dix-huit jours les droits des élus en matière de formation , mais sans reprendre l'obligation proposée par le texte, pour les responsables de collectivités d'utiliser six de ces jours dans la première année de mandat, non reportables sur les années suivantes ( articles 23 et 24 ) ;

- de fixer, dans les communes de moins de 1.000 habitants, l'indemnité de fonction du maire à son maximum légal, sauf délibération contraire du conseil municipal, et de maintenir pour les autres élus le principe en vigueur de sa libre fixation par l'assemblée concernée, dans la limite d'un plafond légal, une délibération devant être prise à ce sujet dans les trois mois après chaque renouvellement.

En outre, toute délibération sur les indemnités devrait être accompagnée d'un tableau annexe récapitulant l'ensemble des indemnités allouées aux élus de la collectivité concernée ( article 26 ) ;

- de ne pas accepter de règles de non cumul de majoration légale d'indemnités, les dispositions sur leur écrêtement paraissant suffisantes ( article 27 ) ;

- d'approuver l' augmentation proposée des indemnités de fonction des adjoints , en maintenant toutefois la règle selon laquelle la modulation éventuelle des indemnités doit être opérée à l'intérieur de l'enveloppe globale des indemnités prévue par la loi. De plus, l'adjoint ayant cessé d'exercer son activité professionnelle pour l'exercice de son mandat à qui le maire retire ses délégations continuerait de percevoir pendant trois mois ses indemnités de fonction, s'il était démuni de ressources ( articles 28 et 29 ) ;

- de préciser le régime des indemnités des conseillers municipaux, en particulier de prévoir la possibilité d'en allouer aux conseillers des communes de moins de 100.000 habitants , mais à l'intérieur de l'enveloppe globale prévue par la loi ( article 30 ) ;

- de porter l'indemnité de fonction des présidents d' assemblées départementales et régionales au niveau de celui des maires des villes de plus de 100.000 habitants et d'instituer pour les membres et les vice-présidents de ces assemblées un régime de modulation de ces indemnités en fonction de leur participation aux séances plénières, aux réunions de commission ainsi qu'aux réunions des organismes au sein desquels ils représentent le département ou la région ( article additionnel après l'article 30 ) ;

- de renforcer le régime des remboursements de dépenses engagées par les élus locaux pour participer aux réunions de leur assemblée et de ses instances ou pour l'exercice de mandats spéciaux , en prévoyant en particulier la prise en compte, à certaines conditions et dans la limite d'un plafond, non seulement des dépenses de garde d'enfants mais, d'une manière plus générale des frais d'assistance aux personnes ayant besoin d'une aide personnelle à domicile ( articles 31 et 32 ) ;

- d'instituer un régime d'encouragement à l'utilisation de chèques-service par les élus pour la rémunération de salariés à domicile, celui-ci ne pouvant pas se cumuler avec les remboursements de frais prévus aux articles précédents ( article 33 ) ;

- d'instituer une indemnité différentielle pour les élus ayant réduit leur activité professionnelle et dont les droits à l'assurance maladie se trouvent minorés en conséquence et d'ouvrir un droit aux prestations en espèces d'assurance maladie pour les élus ayant cessé leur activité pour l'exercice de leur mandat ( articles 34 à 36 ) ;

- d'étendre le régime de garantie accident à tous les conseillers municipaux ( article 37 ) ;

- d'étendre, avec les adaptations nécessaires, les dispositions proposées à Paris, Marseille et Lyon et aux établissements publics de coopération intercommunale . Le Gouvernement serait habilité à prendre par ordonnances les mesures nécessaires à l'extension et à l'adaptation de ces dispositions dans les collectivités d'outre mer ( articles 38, 39 et 42 ).

Enfin, votre commission des Lois a approuvé les dispositions proposées à l'article 12 concernant l'amélioration des garanties accordées aux membres des conseils économiques et sociaux régionaux, à l'exception de celles établissant à leur bénéfice un droit à la formation, les organismes chargés de nommer ces conseillers pouvant porter leur choix sur des personnes qualifiées.

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