TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE M. JEAN-FRANÇOIS MATTEI, MINISTRE DE LA SANTÉ, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPÉES, M. CHRISTIAN JACOB, MINISTRE DÉLÉGUÉ À LA FAMILLE ET MME MARIE-THÉRÈSE BOISSEAU, SECRÉTAIRE D'ÉTAT AUX PERSONNES HANDICAPÉES

Réunie le mardi 5 novembre 2002, sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'audition de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. Le ministre était accompagné de M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille et de Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées.

M. Jean-François Mattei a tout d'abord constaté que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 constituait, du fait de la grande brièveté des délais dont avait disposé le Gouvernement pour le préparer, un texte de transition. Il a admis que le texte portait, à ce titre, les traces du passé, mais qu'il définissait également les voies du futur. Il a affirmé que la situation laissée par le gouvernement précédent était dégradée ; il a ainsi constaté qu'aucune réforme de structure n'avait été menée en quatre ans, que les professionnels de santé étaient désemparés, et que l'action publique avait été gravement décrédibilisée par le dépassement systématique de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM).

Il a déploré la rupture intervenue dans la gestion paritaire de la sécurité sociale et la dérive très inquiétante présentée par les comptes sociaux, le régime général devant afficher un déficit de l'ordre de 3 à 4 milliards d'euros. Il a d'ailleurs constaté que le départ en retraite des classes creuses de la seconde guerre mondiale minore les dépenses de la branche vieillesse, permettant ainsi de contenir le déficit du régime général.

Concernant l'assurance maladie, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a rappelé que l'ensemble des gouvernements français avaient dû affronter, à l'instar de leurs homologues étrangers, une augmentation tendancielle des dépenses de santé supérieure à 7 % par an. Il a néanmoins regretté que la situation française figure parmi les plus compromises, du fait de la mise en place des 35 heures qui, pour la sécurité sociale, représentaient un surcoût de dépense de 3,4 milliards d'euros. Il a souligné que, si l'on continuait sur la même tendance, le régime général présenterait un déficit de 6 milliards d'euros pour 2003, l'assurance maladie affichant, pour sa part, un déficit de 10 milliards d'euros. Il a, en conséquence, rappelé la nécessité de demeurer modeste face aux difficultés et, afin de résoudre ces dernières, de rétablir le dialogue avec les professionnels de santé.

Il a ensuite déclaré que le projet de loi de financement de la sécurité sociale était fondé sur deux piliers complémentaires, le premier participant d'une démarche de vérité, le second insistant sur le principe de la responsabilité partagée.

Concernant la recherche de la vérité, il a constaté, en premier lieu, que l'affichage d'un ONDAM en progression de 5,3 % pour 2003, ne relevait pas d'un calcul fondé sur des seuls critères budgétaires mais prenait en compte l'évolution tendancielle des dépenses d'assurance maladie constatée, minorée des économies que les propositions du Gouvernement étaient susceptibles de réaliser. Il s'est ainsi félicité de la crédibilité du chiffre proposé par le Gouvernement.

M. Jean-François Mattei a, en deuxième lieu, admis que l'augmentation des dépenses de santé présentait un caractère structurel dû au vieillissement de la population, à l'amélioration des progrès techniques et aux attentes nouvelles des patients, mais a néanmoins insisté sur la nécessité d'accompagner la croissance de ces dépenses pour éviter tout gaspillage.

Constatant l'absence de certitudes sur l'évolution future du contexte économique français, il a, en troisième lieu, réitéré son intention de présenter un collectif sanitaire et social au printemps si la situation des comptes sociaux le justifiait.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a, en dernier lieu, déploré l'« enchevêtrement invraisemblable » des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, résultant des décisions prises par le Gouvernement précédent, notamment afin d'assurer le financement du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC). Il a néanmoins regretté que le niveau de complexité atteint par les flux financiers rende impossible leur simplification immédiate.

Il s'est néanmoins félicité des éléments de changement que présente, à cet égard, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 : la compensation intégrale par l'Etat des allégements de cotisations sociales, qui se traduit par une recette de 1 milliard d'euros pour la sécurité sociale, le remboursement de la moitié de la dette du FOREC par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) sans augmenter la durée de vie de cette dernière ni le taux de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). Il s'est enfin réjoui que le projet de loi restaure en faveur de l'assurance maladie la clé initiale de répartition des droits sur les tabacs qui avait été mise à mal pour assurer le financement des 35 heures. Il a affirmé que ces éléments devraient permettre de contenir le déficit du régime général pour 2003 à 3,9 milliards d'euros et celui de l'assurance maladie à 7 milliards d'euros.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a ensuite déclaré que le principe de responsabilité partagée concernait quatre partenaires, l'Etat, les gestionnaires, les professionnels de santé et les patients. Outre le respect de ses engagements, il a souligné le rôle éminent de l'Etat en matière de santé publique que traduisait le dépôt d'un projet de loi de programmation quinquennale de santé publique visant à améliorer la médecine préventive et le dépistage. Il a ensuite indiqué que les gestionnaires devaient, pour leur part, s'affranchir de la maîtrise comptable des dépenses et modifier la mission des contrôles médicaux des caisses, cette dernière devant s'orienter vers le conseil et l'accompagnement des professionnels de santé. Il a, en outre, déploré le caractère absurde et opaque de l'enveloppe globale des établissements de santé et a annoncé le passage à la tarification à l'activité. Il a précisé que les engagements du Président de la République d'investir 6 milliards d'euros dans le secteur hospitalier seraient tenus et que, dès l'année prochaine, 1 milliard d'euros pourrait être engagé à cette fin. Il a enfin rappelé la création, auprès de lui-même, d'une mission permanente d'audit des établissements, chargée d'établir des « bonnes pratiques de gestion ».

Concernant les médecins de ville, il s'est réjoui que le dialogue ait été restauré par l'accord du 5 juin dernier et a rappelé que ces derniers s'étaient engagés à participer à la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

Il a successivement évoqué l'attente des résultats de la mission conduite par M. Dominique Laurent sur la formation continue, les résultats du rapport sur la démographie médicale et le caractère enfin opérationnel des Unions régionales de médecine libérale (URML).

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a insisté sur la véritable « feuille de route » qui a été adressée par le Gouvernement aux industriels du médicament, donnant une priorité à l'innovation en ouvrant 200 millions d'euros de crédits pour que les hôpitaux puissent s'approvisionner en médicaments innovants, en raccourcissant les délais de mise sur le marché et en améliorant la protection des industriels contre la concurrence déloyale au sein de la communauté européenne. Il a en outre mentionné le travail devant être accompli sur le statut d'entreprise innovante.

Mais il a souligné que la recherche de l'efficacité se traduisait également par la création du forfait de remboursement des médicaments appartenant à des groupes génériques et la poursuite du déremboursement de certains médicaments, décidé par Mme Martine Aubry, dès lors que le service médical rendu par ces médicaments se révélait insuffisant. M. Jean-François Mattei a, enfin, rappelé que le patient, déjà sollicité par l'accord conventionnel sur le bon usage des visites à domicile et le forfait générique, se verrait proposer d'autres mesures de responsabilisation, tel le dossier médical partagé.

M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a souhaité présenter trois mesures relatives à la famille, contenues dans les projets de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances pour 2003. Il a rappelé que le prolongement des allocations familiales, en faveur des familles de trois enfants et plus, pour celui de leurs enfants ayant plus de 20 ans, était très attendu par les mouvements familiaux. Il a indiqué que cette mesure était complétée dans le projet de loi de finances par l'augmentation de 6.900 euros à 10.000 euros du plafond de défiscalisation pour les emplois familiaux, cette mesure concernant 1,2 million d'employeurs et par le doublement de 15.000 à 30.000 euros de l'abattement fiscal sur les donations effectuées par des grands-parents à leurs petits-enfants.

Tout en déplorant le maintien du transfert du financement des majorations de pension pour enfants du fonds de solidarité vieillesse vers la CNAF, ce dernier étant imposé par la situation déficitaire du fonds de solidarité vieillesse, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a rappelé que l'excédent de la branche famille demeurait comparable à celui réalisé les années précédentes, et que le remboursement effectué par la CADES améliorait d'autant les ressources de la CNAF. Aussi s'est-il félicité que le projet de loi ait été reçu favorablement par le conseil d'administration de la CNAF.

Il a précisé que la conférence de la famille n'avait pu se tenir en 2002, du fait du calendrier électoral, mais également en raison d'un souhait qu'il avait lui-même formulé de pouvoir préparer plus en amont cette rencontre avec les partenaires concernés. A ce titre, il a rappelé la mise en place de trois groupes de travail auxquels participeraient l'ensemble des tendances représentées au sein du conseil d'administration de la CNAF ainsi que des élus et des représentants de l'association des maires de France. Il a précisé que le premier groupe relatif à la prestation d'accueil du jeune enfant visait à promouvoir, pour les parents, la liberté de choix entre la poursuite d'une activité professionnelle ou la cessation de cette dernière pour se consacrer à l'éducation de leur enfant. Il a, à ce titre, rappelé l'attachement du Gouvernement à ce que la liberté de choix des parents en ce qui concerne le mode de garde de leurs enfants soit également respectée.

M. Christian Jacob a ensuite indiqué que le groupe de réflexion relatif aux services à la famille et à la parentalité se verrait assigner la mission de concevoir de nouveaux services pour les parents. Il a, enfin, mentionné un troisième groupe chargé de réfléchir et de formuler des propositions relatives à la conciliation entre vie familiale et entreprise.

Observant que les dépenses de la sécurité sociale consacrées au handicap ne faisaient pas l'objet d'une présentation spécifique en loi de financement, Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées , a néanmoins rappelé qu'ainsi que l'avait souligné le rapport de la mission d'information de la commission des affaires sociales du Sénat sur la politique de compensation du handicap, les dépenses supportées par les différentes branches de la sécurité sociale constituent 65 % de l'effort public en direction des personnes handicapées.

Elle a ensuite présenté à la commission les grands axes de la politique du Gouvernement en matière de handicap sur la base de sa traduction dans l'enveloppe handicap du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui atteint 6,1 milliards d'euros en 2003.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a précisé que figuraient dans cette enveloppe essentiellement les crédits de fonctionnement des établissements et services médico-sociaux accueillant des enfants et des adultes handicapés, pris en charge par l'assurance maladie, auxquels s'ajoutaient les crédits de l'allocation d'éducation spéciale (pour 481 millions d'euros), que supporte la branche famille. Elle a souhaité insister tout particulièrement sur la forte croissance des crédits de l'allocation d'éducation spéciale (AES) observée en 2002, du fait de la réforme des compléments de l'allocation intervenue en avril. Elle a précisé que, bien qu'il soit trop tôt pour apprécier le bilan de cette réforme, une évaluation était actuellement réalisée par la Direction générale de l'action sociale.

Elle a ensuite souhaité insister sur le thème de l'enfance handicapée et, notamment, sur l'objectif d'intégration scolaire, objectif commun au ministère de l'éducation nationale et à son ministère, qui conduit le Gouvernement à renforcer le développement des services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) et, en particulier dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, à corriger le passage hâtif et mal préparé à leur financement par dotation globale au 1 er janvier 2002, qui avait suscité de vives protestations de la part des associations gestionnaires.

Mme Marie-Thérèse Boisseau a précisé que l'année 2003 serait la dernière année d'une programmation pluriannuelle axée sur le développement de ces services ainsi que des centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP) et que, grâce au taux de 6 % précédemment évoqué, 4 millions d'euros supplémentaires pourront soutenir les projets innovants en la matière.

Elle a, par ailleurs, observé que le nombre total d'enfants handicapés suivis « en ambulatoire » dépasse depuis peu celui des enfants accueillis en établissements médico-sociaux, cette évolution appelant un accompagnement par la pérennisation des services d'auxiliaires d'intégration scolaire pour les élèves handicapés, qui fait l'objet d'un groupe de travail interministériel installé le 17 octobre dernier.

S'agissant des adultes handicapés, Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a rappelé que l'attente la plus aiguë concernait l'accueil en maisons d'accueil spécialisées (MAS) ou en foyers d'accueil médicalisés (FAM) et que, à cet égard, l'action gouvernementale porterait dans trois directions :

- elle a indiqué, en premier lieu, que le nombre de places en MAS ou en FAM pouvant être créées en 2003 serait doublé, ainsi que s'y était engagé le Président de la République lors de la campagne présidentielle ; elle a précisé que cet effort permettrait d'achever des opérations partiellement financées jusqu'à présent, et de donner espoir aux familles et aux associations ;

- elle a souhaité, en deuxième lieu, que l'effort budgétaire soit assorti d'une réflexion sur les établissements accueillant des personnes lourdement handicapées, sur la pertinence de la distinction MAS et FAM, sur les normes de fonctionnement à définir pour ces établissements, en application de la loi du 2 janvier 2002, ainsi que sur les qualifications des personnels ;

- concernant les personnes lourdement handicapées faisant le choix de vivre à domicile, elle a ensuite fait part de l'intention du Gouvernement d'encourager des réseaux associant des établissements médico-sociaux, des praticiens libéraux et hospitaliers des collectivités locales et des associations, afin de multiplier les expériences.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a enfin indiqué qu'à ces mesures nouvelles s'ajoutent la revalorisation des crédits de reconduction des budgets de fonctionnement, soit près de 156 millions d'euros en 2003, nécessaires pour financer les mesures salariales, le « glissement vieillesse - technicité » (GVT), ainsi que certaines revalorisations conventionnelles, dont celle des médecins spécialistes, qui aspirent légitimement à bénéficier de la même considération que celle qui est accordée aux médecins exerçant en ville ou à l'hôpital.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux, s'est interrogé sur la solution envisagée par le Gouvernement afin de garantir, après la suppression annoncée du FOREC, la compensation intégrale, à la sécurité sociale, des pertes de recettes résultant des exonérations de cotisations. Evoquant le transfert des majorations de pension pour enfants entre le fonds de solidarité vieillesse (FSV) et la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), il a également souhaité connaître l'appréciation du Gouvernement sur la complexité et la nécessité de clarifier les circuits financiers mis en place par son prédécesseur, afin d'assurer le financement du FOREC.

En réponse, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées a, tout d'abord, confirmé la volonté du Gouvernement d'aboutir à la suppression du FOREC. Toutefois, compte tenu des sommes en jeu, soit 16 milliards d'euros, de la complexité des circuits financiers mis en place et de la nécessité de garantir la pérennité des recettes de la sécurité sociale, il a exclu, en ce domaine, toute solution brutale ou précitée. Il a donc indiqué qu'un groupe de travail, ouvert aux propositions des parlementaires concernés, viserait à définir les voies d'une réforme adaptée.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour l'assurance maladie, a demandé au ministre de confirmer l'évolution en 2003 des quatre sous-enveloppes qui composent l'ONDAM (médecine de ville, hôpital, cliniques et médico-social) et d'expliquer les raisons qui avaient justifié ces choix.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a rappelé que l'ONDAM progresserait en 2003 de + 5,3 %, qui se décomposaient ainsi : + 5 % pour l'hôpital, + 5,6  pour la médecine de ville, + 6 % pour le médico-social et + 4 % pour les cliniques.

Il a expliqué que le chiffre de 5,6 % retenu pour la médecine de ville tenait compte de la pente de progression des dépenses, aujourd'hui proche de 8 %. Il a affirmé qu'il avait souhaité que les médecins se sentent totalement responsabilisés, ce qui supposait de les placer devant des défis raisonnables. S'agissant du médico-social, il a indiqué que le chiffre de 6 % s'expliquait par la priorité donnée par le Gouvernement à la prise en charge des personnes handicapées. Evoquant l'hôpital, dont la dotation progresse de 5 %, soit + 0,2 % qu'en 2002, il a fait valoir que ce taux était en réalité de 5,2 % si l'on tenait compte de la rallonge de fin d'année de 300 millions d'euros. Il a ajouté que ce chiffre ne tenait pas compte des aides à l'investissement d'un montant de 300 millions d'euros en 2003. Après avoir précisé que la priorité serait donnée aux dépenses de personnel, il a indiqué qu'un rapport lui serait remis dans les prochains jours sur la réduction du temps de travail (RTT) à l'hôpital.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour l'assurance maladie, a rappelé que l'article 27 du projet de loi donnait au Gouvernement la possibilité d'instaurer un tarif forfaitaire de remboursement pour les médicaments figurant dans un groupe générique. Il a souligné que cette disposition suscitait une vive inquiétude au sein de l'industrie pharmaceutique, qui craignait une forte pression à la baisse sur les prix, avec les risques sanitaires induits. Il a demandé par conséquent que le ministre précise dans quelles conditions il envisageait de recourir à ce tarif forfaitaire.

Evoquant les premiers résultats positifs de l'accord du 5 juin 2002 signé avec les médecins généralistes sur le développement du générique, il a souhaité savoir si l'on disposait d'ores et déjà d'éléments probants sur les modifications de comportement induites par la décision de ne plus rembourser la visite médicale non justifiée.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a indiqué qu'il n'avait pas l'intention d'avoir recours à cette disposition avant le 1 er juillet 2003, afin de ne pas démobiliser les médecins, qui s'étaient fortement impliqués dans la prescription de génériques. Il a fait valoir qu'il instaurerait ensuite systématiquement ce tarif forfaitaire sauf si les médecins s'engageaient fortement dans le générique.

S'agissant des visites médicales, il a souligné que l'on observait déjà une diminution de leur nombre. Il s'est dit confiant sur la capacité des médecins à convaincre leurs patients.

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur pour la famille , a rappelé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 prévoyait la mise en place d'une allocation forfaitaire de 70 euros versée chaque mois aux familles de trois enfants ou plus à charge, qui perdraient normalement le bénéfice des allocations familiales au 20 e anniversaire d'un ou de plusieurs enfants.

Il a demandé à M. Christian Jacob si la mise en place de cette allocation au 1 er juillet 2003 seulement répondait à un souci d'économie, ou tenait compte d'un délai incompressible de mise en oeuvre. Il lui a en outre demandé si cette nouvelle mesure marquait le début d'une évolution en faveur de l'extension de l'intégralité des allocations familiales jusqu'à l'âge de 22 ans, comme le prévoyait la « loi famille » de 1994.

Évoquant la part du financement des majorations de pension pour enfants par la CNAF portée à 60 % par le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur , a rappelé que, dans sa décision du 18 décembre 2001, le Conseil constitutionnel avait semblé poser un curseur au-delà duquel cette prise en charge constituerait une rupture d'égalité entre les familles.

Il a demandé au ministre délégué si, au regard de cette décision, une nouvelle étape dans cette prise en charge lui paraissait possible en 2004.

En réponse à M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a considéré que le choix de mettre en place l'allocation forfaitaire de 70 euros au profit des familles nombreuses au 1 er juillet 2003 n'était pas étranger à une préoccupation d'ordre budgétaire, mais il a rappelé que de nombreuses mesures étaient régulièrement mises en oeuvre en milieu d'année, offrant ainsi aux CAF un délai raisonnable d'organisation.

Concernant l'avenir de cette nouvelle allocation, il s'est interrogé sur la pertinence d'un allongement de la durée des allocations familiales jusqu'à 22 ans, au détriment d'une revalorisation de leur montant.

Il a indiqué, par ailleurs, que la décision du Conseil constitutionnel sur la question des majorations de pension pour enfants avait été nuancée quant à l'autonomie des branches de la sécurité sociale, puisqu'il faisait valoir que c'était l'ampleur des transferts, et non leur existence même, qui serait susceptible de porter atteinte à cette autonomie.

Interrogeant le ministre au nom de M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres généraux, a fait observer que la Caisse de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), qui est également celle du personnel hospitalier, devra, au titre du plan de refinancement de la Caisse, augmenter le taux de contribution employeur de 0,4 point par an pendant trois ans. Il a souhaité savoir quel coût cette augmentation représenterait pour l'assurance maladie, en montant et en parts dans l'ONDAM.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a indiqué que ce coût serait de 60 millions d'euros.

Puis M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis de la commission des finances , s'est étonné du paradoxe qui consistait à faire rembourser par la CADES, organisme constitué pour financer la dette des régimes sociaux, la dette contractée par l'Etat à l'égard de la sécurité sociale au titre du FOREC. Il s'est également interrogé sur les modalités concrètes, dans le secteur hospitalier, de l'expérimentation de la tarification à l'activité, avant la généralisation de cette tarification prévue pour 2004. Enfin, il a souhaité savoir si les conclusions du rapport attendu sur la démographie médicale seront rapidement suivies d'effets.

S'agissant de la CADES, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a indiqué que la solution choisie par le Gouvernement avait le mérite de la clarté et de la franchise et qu'elle ne compromettait en rien la situation financière ni l'échéancier de cet organisme.

Evoquant la tarification à l'activité, il a souligné que ce terme semblait préférable à celui de « tarification à la pathologie » dans la mesure où l'activité englobait aussi, par exemple, la prévention et le dépistage. Il a reconnu que cette forme de tarification constituait un changement culturel important pour l'hôpital public ; il a cependant jugé que c'était le seul moyen pour parvenir à une harmonisation des modalités de financement des établissements.

S'agissant des modalités d'expérimentation de la tarification à l'activité, il a expliqué qu'un appel à candidatures serait lancé courant novembre afin de sélectionner vingt établissements publics et vingt établissements privés volontaires, dotés d'une comptabilité analytique. Parallèlement, une simulation de l'application de la tarification à l'activité serait menée dans cinq régions, qui n'étaient pas encore choisies. Les premiers enseignements de ces expérimentations seraient disponibles au début de l'été 2003. Une mission d'accompagnement sur la tarification à l'activité allait être créée au sein de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS).

S'agissant de la démographie médicale, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a souligné que le rapport annexé au projet de loi mentionnait la possibilité d'autoriser les cabinets secondaires, afin de permettre une permanence médicale en milieu rural. Il a rappelé que l'article 29 du projet de loi permettait en outre à des médecins retraités de reprendre une activité, par exemple pour effectuer des remplacements. Il s'est également dit favorable à des aides à l'installation et au développement des réseaux et de toutes formes d'exercice collectif.

M. Gilbert Chabroux , tout en saluant les bonnes intentions du ministre, a estimé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 n'était pas en mesure de rétablir l'équilibre financier de la sécurité sociale. Il a donc exprimé sa crainte que la dégradation des comptes de la sécurité sociale, que le Gouvernement ne paraît pas en mesure d'enrayer, conduise à une privatisation insidieuse de la sécurité sociale, crainte avivée par les récents propos de personnalités politiques de premier plan.

M. Serge Franchis a souhaité connaître quelles actions le ministre envisageait d'engager en faveur de la médecine psychiatrique et de la lutte contre les maladies mentales, qui sont actuellement en déshérence.

M. Bernard Cazeau s'est interrogé sur le contenu qu'il convenait de donner à la maîtrise médicalisée des dépenses, invoquée par le ministre, et dont certains de ses prédécesseurs avaient pu constater, en leur temps, les limites.

Mme Claire-Lise Campion a regretté le faible nombre de mesures nouvelles en faveur des familles dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 et l'absence de conférence de la famille en 2002.

Elle a fait part de son étonnement face au transfert de 945 millions d'euros de la CNAF au FSV, et a regretté que les crédits du fonds d'investissement en faveur de la petite enfance (FIPE) ne soient pas reconduits en 2003.

Sur ce dernier point, elle a fait valoir que le manque de structures collectives ne permettait pas une vraie liberté de choix du mode de garde, puisque seulement 9 % des enfants étaient accueillis en crèche. Elle a rappelé qu'il y avait là un risque pour les collectivités locales de voir bloqués certains projets déjà engagés.

Elle a enfin interrogé le ministre délégué sur la revalorisation de la base mensuelle des allocations familiales (BMAF) qui n'atteignait que 1,7 % en 2003 et n'avait donné lieu à aucun « coup de pouce ».

M. Jean-Pierre Fourcade a rappelé que les interrogations de la commission au cours des dernières années avaient porté, non seulement sur la multiplication des branchements financiers, mais également sur les ponctions opérées sur la branche famille au profit des autres branches du régime général.

M. Guy Fischer, s'étonnant du consensus apparent de l'ensemble des professions médicales autour des propositions du ministre , s'est inquiété des risques de « médecine à deux vitesses » et de privatisation de la sécurité sociale qui pourraient être, en réalité, induits par cette politique.

En réponse aux différents intervenants, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a expliqué que la maîtrise médicalisée des dépenses de santé consistait, par exemple, à signer avec les médecins des accords sur la prescription de génériques, des accords de bon usage, à développer les règles de bonne pratique ou à encourager la démarche d'évaluation. S'agissant de la psychiatrie, il a reconnu que la prise en charge des malades était aujourd'hui désastreuse et indiqué que ce sujet serait traité dans le projet de loi de programmation quinquennale de santé publique, qui serait présenté au Parlement au printemps.

Il a réitéré son intention de voir le FOREC supprimé. Il a souligné que cela n'avait pas été possible cette année et que cela serait réalisé l'année prochaine.

Il a considéré que les propos de M. Jacques Barrot, auxquels avait fait allusion M. Gilbert Chabroux, avaient été maladroits ou mal interprétés. Il a estimé qu'il n'y avait pas de petit risque ou de grand risque en matière de santé : le risque était unique, un petit pouvant parfois dissimuler un grand. Il a fait part de sa volonté d'éviter une médecine à deux vitesses et de son souhait de voir tout le monde traité de la même manière. Il a dénoncé la gestion calamiteuse du Gouvernement précédent qui avait conduit à des situations catastrophiques, notamment à des phénomènes de files d'attente pour l'accès aux soins. Il s'est insurgé contre le procès en privatisation instruit par ceux qui feignent d'oublier que 85 % des Français sont couverts par une complémentaire maladie. Il a rappelé que le Gouvernement précédent avait institué un mécanisme de couverture maladie complémentaire aux effets de seuil désastreux, qui conduisait 15 % des Français à ne bénéficier ni d'une complémentaire, ni de la couverture maladie universelle (CMU). Il a souligné que le Gouvernement souhaitait faire en sorte que chacun puisse disposer d'une complémentaire.

S'agissant de l'assurance maladie, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a expliqué qu'il avait trouvé, en prenant ses fonctions, un système dépourvu de pilote et où le paritarisme avait disparu, puisque l'on avait contraint le mouvement des entreprises de France (MEDEF) à quitter les conseils d'administration des caisses.

Evoquant les bonnes relations entre le Gouvernement et les syndicats de médecins, il a précisé que ceux-ci avaient souffert d'être méprisés par le précédent Gouvernement et qu'il avait suffi de leur tendre la main pour restaurer le dialogue. Il a fait valoir que le conflit entre le précédent Gouvernement et les médecins généralistes avait été particulièrement mal géré.

Il a considéré qu'il n'était pas possible de remettre sur pied l'hôpital et d'augmenter le nombre des médecins dans les zones déficitaires à moyens constants. Il a souligné qu'il convenait de réfléchir à une nouvelle assiette pour les recettes de la sécurité sociale, la masse salariale apparaissant peu satisfaisante et très sensibles aux aléas de la conjoncture.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a estimé que la sécurité sociale était un patrimoine culturel commun à l'ensemble des Français. Il a souligné qu'il s'opposerait à une évolution de notre système de santé tant vers l'étatisme à la britannique que vers la privatisation à l'américaine. Il a jugé que la précédente majorité avait échoué et qu'il était désormais nécessaire d'explorer de nouvelles voies.

En réponse à Mme Claire-Lise Campion, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, s'est montré étonné de la dénonciation par cette dernière du transfert au profit du FSV, dans la mesure où son principe avait été voté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Il a indiqué que le FIPE avait redémarré le 1 er juillet dernier, et était doté de 228 millions d'euros pour la période 2001-2004 avec une prévision de dépenses pluriannuelle : 30 millions d'euros en 2002, 100 millions en 2003 puis en 2004. Il a rappelé que la CNAF ferait un point précis sur l'état de consommation du fonds à la fin de l'année 2002.

Il a précisé que, sur 2,2 millions d'enfants de moins de trois ans, 200.000 étaient en crèche, 1 million d'enfants étaient gardés par leurs parents (dont 50 % bénéficiaient de l'allocation parentale d'éducation [APE]), 500.000 par une assistante maternelle et donc seulement 500.000 grâce à la solidarité familiale, pour lesquels se posait réellement la question de la liberté du mode de garde. Enfin, il a rappelé que le taux de revalorisation retenu pour la base mensuelle des allocations familiales était celui prévu par la loi.

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