C. LA CONTINUITÉ TERRITORIALE
1. La nécessité de faciliter les transports entre la métropole et l'outre-mer
Le titre V de la loi de programme vise à renforcer la continuité territoriale avec la métropole. Un « passeport mobilité » avait été introduit en septembre 2002 : un jeune qui devait se rendre en métropole pour y effectuer une formation bénéficie une fois par an de la gratuité du transport. La loi renforce la « continuité territoriale » en cherchant à abaisser le coût des transports aériens, par le versement d'une dotation à chaque collectivité. Cette mesure se combine avec les baisses de charge dans ce secteur évoquée dans le titre I du présent projet de loi. Le coût global de ce titre V est estimé à 30 millions d'euros en rythme annuel .
2. Une mise en oeuvre complexe par l'article 53 du présent projet de loi de finances
La solution choisie par le gouvernement pour financer la continuité territoriale n'a pas été la budgétisation, et donc la création d'une ligne spécifique sur les crédits de l'outre-mer.
Le rapporteur spécial des crédits de l'aviation civile, notre collègue Yvon Collin, note à ce propos :
« (...) ce mode de financement ne va pas sans soulever un certain nombre d'interrogations.
« a) Une construction budgétairement complexe
« On peut remarquer que, par construction, le BAAC et le FIATA sont structurellement liés, via la répartition de la taxe de l'aviation civile. Or si les ressources que tire le BAAC de cette taxe sont en baisse non négligeable avec 19 millions d'euros en moins par rapport à 2002, et ce malgré la hausse du taux de la taxe, le budget global augmente de 0,7 %, suite notamment à une hausse modérée de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, et un doublement de cette redevance pour l'outre-mer (les taux exacts seront déterminés par décret au mois de décembre). En conséquence, une partie au moins de la perte de recette fiscale du budget annexe est compensée par la hausse d'une redevance, au bénéfice d'un compte spécial du Trésor.
« Le mécanisme choisi semble donc être le suivant :
« - la taxe de l'aviation civile augmente de 13,07 % (article 27), permettant des recettes supplémentaires de l'ordre de 33 millions d'euros ;
« - la quotité consacrée au FIATA passe de 23,96 % à 36,56 % (article 28).
« Ces deux mouvement se traduisent par une hausse des recettes du FIATA, de 70 à 118 millions d'euros, qui permet de financer notamment les 30 millions d'euros de la continuité territoriale (article 53 du projet de loi de finances), et une baisse des recettes que le BAAC tire de la taxe de l'aviation civile de 19 millions d'euros en 2004.
« Pour compenser cette perte de recettes au niveau du BAAC, les tarifs de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne pour l'outre-mer sont multipliés par deux, permettant ainsi au BAAC de dégager 15 millions d'euros supplémentaires qui viennent compenser la perte de ressources dû à la baisse de quotité de la TAC.
« b) Une construction juridiquement incertaine
« L'article 60 de la loi de programme pour l'outre-mer dispose que la dotation de continuité territoriale doit évoluer comme celui de la DGF. Or il n'y a pas de lien entre les ressources tirées de la taxe de l'aviation civile, qui finance le FIATA, avec les critères d'évolution de la DGF.
« c) Une construction économiquement contestable
« La hausse du taux de la taxe de l'aviation civile sera répercutée sur l'ensemble des prix des billets d'avion, avec des hausses de 51 centimes d'euro pour le trafic intracommunautaire et de 87 centimes d'euros pour le trafic extra communautaire. Deux éléments doivent être soulevés :
« - cette hausse des tarifs frappe un secteur qui traverse à l'heure actuelle une conjoncture difficile, suite aux évènements du 11 septembre 2001, à la guerre en Irak et à l'épidémie de pneumopathie en Asie ;
« - les effets recherchés par le gouvernement sont, selon la loi de programme pour l'outre-mer, de faciliter la continuité territoriale, donc de rendre plus attractif le prix des transports aériens. Or les services de la DGAC ont été tenus, afin de compenser la chute des ressources de la TAC, de doubler les taux de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne pour l'outre-mer. Le surcroît de recettes est estimé à 15 millions d'euros, qui seront donc supportés par les voyageurs en direction de l'outre-mer. Cette hausse spécifique à l'outre-mer est renforcée par la hausse générale de la taxe de l'aviation civile. En conséquence, les bénéfices de la continuité territoriale sont presque annulés ».
Votre rapporteur spécial des crédits de l'outre-mer partage les interrogations ainsi exprimées . Pour autant, il tient à souligner que, dans un contexte budgétaire difficile, et faute de la part du ministère d'avoir pu trouver par redéploiement les 30 millions d'euros correspondants au coût de la continuité territoriale, une solution alternative n'est probablement pas envisageable à court terme.