Rapport n° 73 (2005-2006) de M. Alain VASSELLE , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 9 novembre 2005

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N° 73

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 9 novembre 2005

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Alain VASSELLE,

Sénateur.

Tome II :

I. ASSURANCE MALADIE

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gérard Dériot, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Claire-Lise Campion, Valérie Létard, MM. Roland Muzeau, Bernard Seillier, vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Anne-Marie Payet, Gisèle Printz, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, MM. Jean-Paul Amoudry, Gilbert Barbier, Daniel Bernardet, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mmes Isabelle Debré, Christiane Demontès, Sylvie Desmarescaux, M. Claude Domeizel, Mme Bernadette Dupont, MM. Michel Esneu, Jean-Claude Etienne, Guy Fischer, Jacques Gillot, Francis Giraud, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, Christiane Kammermann, MM. Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Raymonde Le Texier, MM. Roger Madec, Jean-Pierre Michel, Alain Milon, Georges Mouly, Mmes Catherine Procaccia, Janine Rozier, Michèle San Vicente, Patricia Schillinger, M. Jacques Siffre, Mme Esther Sittler, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, François Vendasi, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 e législ . ) : 2575 , 2609, 2610 et T.A. 496

Sénat : 63 et 71 (2005-2006)

Sécurité sociale.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 est le dixième à être présenté devant le Parlement depuis la réforme constitutionnelle de 1996. Il se distingue des lois de financement précédentes pour au moins trois raisons.

Tout d'abord, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est le premier à être établi selon la nomenclature et les règles définies par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale du 2 août 2005.

La présentation retenue par le législateur organique permet désormais de clarifier les comptes de la sécurité sociale et de faire oeuvre de pédagogie en distinguant :

- les dispositions relatives au dernier exercice clos (première partie) ;

- les dispositions relatives à l'année en cours (deuxième partie) ;

- les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour l'année à venir (troisième partie) ;

- les dispositions relatives aux dépenses pour l'année à venir (quatrième partie).

Les mesures relatives à l'assurance maladie figurent dans cette quatrième partie, au sein de laquelle sont inscrits les objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès et l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) de l'ensemble des régimes obligatoires de base.

Désormais, l'Ondam est composé de six sous-objectifs sur lesquels le Parlement est amené à se prononcer par un vote. Parallèlement aux modifications rendues obligatoires par la loi organique, le périmètre de l'Ondam a connu des évolutions à la suite des recommandations émises par la Cour des comptes.

Enfin, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 doit être replacé dans le contexte créé par la situation des comptes de l'assurance maladie. Ceux-ci contribuent majoritairement (- 8,3 milliards) au déficit sans précédent de la sécurité sociale qui s'établit (FSV) pour l'ensemble des régimes de base et du fonds de solidarité vieillesse, à 15,2 milliards d'euros.

Dans ce contexte morose, il convient de rappeler que la réforme de 2004 a permis d'enrayer la spirale des déficits antérieurs et a réduit de 25 % le déficit de l'assurance maladie. L'Ondam devrait être respecté pour la première fois depuis 1997, tandis que l'on constate une nette décélération des dépenses de soins de ville.

Dès lors, l'ambition de ce projet de loi de financement est de consolider les comptes. 2006 est donc une année vérité pour la maîtrise médicalisée des dépenses car, comme le soulignait le secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité sociale en septembre 2004 : « la première année de réduction du déficit prévu en 2005 doit beaucoup aux mesures de financement qui apportent 5 milliards en 2005. Mais ces mesures produiront l'intégralité de leurs effets dès 2005. Sauf à prendre de nouvelles dispositions de ce type, les progrès ultérieurs sur la voie du redressement financier devront reposer sur une inflexion durable des dépenses d'assurance maladie, qui passe par une profonde modification des comportements. »

Le ralentissement des dépenses constitue le défi des années à venir.

I. SOINS DE VILLE : DÉMONTRER L'EFFICACITÉ DE LA MAÎTRISE MÉDICALISÉE

Premier poste de dépenses de l'Ondam par leur volume, les dépenses de soins de ville devraient progresser de 2,7 % en 2005, pour s'établir à 61,9 milliards d'euros, selon les prévisions établies par la commission des comptes de la sécurité sociale en septembre dernier.

Ce résultat, quoique légèrement supérieur aux taux d'évolution ayant prévalu à la fixation de l'objectif (2,1 %), se situe nettement en deçà des évolutions enregistrées les années antérieures (de 6 à 8 % entre 2000 et 2003). Pour la première fois depuis 1998, les dépenses de soins de ville ont augmenté moins vite que l'ensemble de l'Ondam (2,7 % contre 3,2 %).

Ce net infléchissement des dépenses de santé est dû, d'une part, aux mesures d'économies annoncées par le Gouvernement à l'occasion de la réforme de l'assurance maladie (plan médicament, participation financière des assurés), d'autre part, aux premiers effets des mesures de maîtrise médicalisée des dépenses. Cette modération a été rendue possible grâce à une baisse sensible des dépenses d'indemnités journalières, une inflexion des dépenses de médicaments (4 % au lieu de 6 à 8 % les années précédentes) et une évolution modérée des honoraires.

A. PARCOURS DE SOINS ET MAÎTRISE MÉDICALISÉE CONVENTIONNELLE, DES OUTILS NOVATEURS DE LA RÉGULATION DES SOINS DE VILLE

L'infléchissement de taux d'évolution des dépenses de soins de ville traduit les premiers effets de la réforme de 2004 fondée sur une meilleure association des professionnels de santé et une modification du comportement de tous les acteurs.

Des résultats particulièrement encourageants ont été obtenus sur le poste des indemnités journalières (IJ) dont les dépenses baissent régulièrement depuis 2003 sous l'effet des efforts conjugués des pouvoirs publics, de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et des professionnels de santé.

Ils démontrent qu'une action conjointe menée autour d'objectifs partagés par les acteurs peut déboucher sur une optimisation des dépenses de soins. Ils soulignent que cette action doit être menée dans la durée (les premières mesures de maîtrise médicalisée des IJ ont été prises dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004) et que l'inflexion de la courbe des dépenses est la récompense d'efforts longs et constants.

C'était le pari de la réforme de l'assurance maladie qui misait sur la promotion d'une maîtrise médicalisée des dépenses.

Cette action passe par la mise en oeuvre de plusieurs outils susceptibles de contribuer à l'optimisation du parcours de soins (médecin traitant, contrats responsables, dossier médical personnel) et par le développement de négociations conventionnelles entre les professions de santé libérale et l'assurance maladie.

1. Le parcours de soins se met en place progressivement

Elément symbolique s'il en est de la réforme, le parcours de soins se met en place progressivement depuis le début de l'année 2005. La conclusion d'une première convention entre les médecins libéraux et l'assurance maladie a permis d'en déterminer les différentes étapes et la valorisation financière.

Pour des raisons techniques compréhensibles, le déploiement du dossier médical partagé n'est en revanche prévu qu'à l'horizon 2007.

Il convient de souligner qu'il est encore tôt pour véritablement évaluer les effets de ces mesures sur l'évolution des dépenses de santé.

a) Médecin traitant et contrats responsables

Après plusieurs mois d'impasse, et grâce à la réforme de 2004, les médecins libéraux et l'assurance maladie ont su renouer le fil du dialogue conventionnel. Une nouvelle convention, qui définit les différentes étapes du parcours de soins, a pu être conclue dès le 12 janvier 2005.

Elle détermine les missions du médecin traitant et des médecins spécialistes intervenant en coordination et organise les conditions d'accès spécifiques à certains soins (malade en déplacement, urgences, recours à certaines spécialités).

En effet, la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie encadre le parcours de soins par de nouvelles règles de prise en charge destinées à inciter les assurés à respecter un parcours de soins vertueux.

Outre la participation forfaitaire de un euro, qui n'est pas une pénalité, ces règles s'organisent autour de deux dispositifs principaux :

- la majoration de la participation de l'assuré aux dépenses prises en charge par le régime obligatoire d'assurance maladie ;

- une modification des règles d'intervention des organismes complémentaires pour la prise en charge des dépenses d'assurance maladie.

Ce second dispositif a pour ambition de coordonner l'intervention du régime obligatoire et des régimes complémentaires, par l'intermédiaire d'un nouveau contrat d'assurance santé complémentaire : le contrat responsable. Le contenu de ce contrat est défini par la loi du 13 août 2004 et par un décret paru au Journal officiel du 30 septembre 2005. Il exclut de façon totale ou partielle la prise en charge des dépassements d'honoraires perçus lorsque l'assuré a consulté un médecin en dehors du parcours de soins.

Au total, pour la consultation d'un spécialiste hors parcours de soins, la majoration de la participation de l'usager pourra atteindre la somme de 10,5 euros par consultation : 1 euro de participation forfaitaire, 2,5 euros de pénalité appliquée par le régime obligatoire et une franchise de 7 euros non prise en charge par les organismes complémentaires.

Ces mesures doivent permettre de lutter contre le nomadisme médical et surtout d'assurer la coordination du dossier médical du patient sous l'égide du médecin traitant. Elles constituent le socle de la maîtrise médicalisée des dépenses.

Ainsi défini, le parcours de soins est entré en vigueur au 1 er juillet 2005. Il souffre pourtant de ne reposer pour l'instant que sur un seul des deux piliers prévus par la réforme, celui du médecin traitant. En effet, les pénalités financières prévues en cas de non-respect des différentes étapes ne seront applicables qu'à compter du 1 er janvier prochain. Durant un semestre complet, les parcours non vertueux n'auront donc fait l'objet d'aucune sanction.

Au-delà des retards constatés dans la mise en oeuvre de l'intégralité des dispositifs prévus par la réforme, retards explicables par la complexité technique et l'extrême variété des problèmes à résoudre, il faut retenir le double succès remporté par la mise en oeuvre du dispositif « médecin traitant » : succès auprès des médecins, puisque 99 % des médecins généralistes sont rentrés au moins une fois dans le dispositif ; succès auprès des assurés sociaux puisque fin septembre 2005, plus de 32 millions d'entre eux avaient d'ores et déjà déclaré un médecin traitant.

Le Gouvernement dispose désormais d'un levier très puissant pour poursuivre son action d'optimisation du système de santé et pour développer des politiques novatrices, par exemple en matière de prévention.

b) L'instauration d'un dossier médical personnel

Le dossier médical partagé est, avec le médecin traitant, le second pilier de l'optimisation du parcours de soins. Destiné à « favoriser la coordination, la qualité et la continuité des soins », le dossier médical reçoit lors de chaque consultation « les éléments diagnostiques ou thérapeutiques nécessaires à la coordination des soins » ou « les principaux éléments » liés à un séjour à l'hôpital. La non-présentation du dossier médical pourra se traduire par une modulation du niveau de remboursement versé par l'assurance maladie. Mais, pour éviter le risque de sélection, l'accès au dossier médical ne pourra être exigé lors de la conclusion d'un contrat relatif à une assurance complémentaire en matière de santé ou dans le cadre de la médecine du travail. Sa généralisation est prévue pour 2007.

Afin de définir les caractéristiques du dossier médical personnel, d'en conduire et d'en évaluer les premières expérimentations, un groupement d'intérêt public (GIP) a été constitué entre l'Etat, la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et la Caisse des dépôts et consignations, le 11 avril 2005.

Un appel à candidature portant sur la réalisation du dossier médical personnel a été lancé auprès des industriels en juillet 2005. Six offres ont été retenues pour une expérimentation qui doit se dérouler entre octobre 2005 et mars 2006. A l'issue de cette première étape, le cahier des charges du dossier médical personnel sera affiné et la généralisation du dispositif débutera fin 2006.

Selon les responsables du GIP, le montant des dépenses nécessaires à l'expérimentation s'élève à 15 millions d'euros en 2005 et à 90 millions d'euros en 2006. Les sommes nécessaires sont versées par le fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV). Le coût de fonctionnement du dispositif en année pleine pourrait s'élever à 600 millions d'euros.

Ce calendrier demeure très ambitieux et la réussite du projet repose sur la capacité des acteurs à apporter rapidement des réponses claires à deux interrogations capitales. La première est relative à la définition du contenu du dossier médical personnel, la seconde à la capacité de l'Etat et de l'assurance maladie à financer la mise à niveau des systèmes d'information des acteurs de la santé (professionnels de santé libéraux, établissements de santé publics et privés)

2. La maîtrise médicalisée à l'épreuve des premiers résultats

Depuis 2002, le Gouvernement a résolument rejeté le recours à la maîtrise comptable des dépenses de santé en supprimant les dispositifs contraignants pesant sur les médecins (lettres clés flottantes supprimées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003).

A travers les mécanismes prévus par loi du 13 août 2004, pour la prise en charge des patients souffrant d'une affection de longue durée (ALD) pour ne citer que cet exemple, il a promu, avec la collaboration des partenaires conventionnels, une nouvelle forme de régulation : la maîtrise médicalisée des dépenses.

a) Des résultats 2005 qui marquent un premier infléchissement des dépenses

C'est à travers les conventions régissant les rapports entre l'assurance maladie et les professionnels de santé et plus particulièrement celle, disposant de la charge symbolique la plus forte, négociée avec les médecins que les principes de la maîtrise médicalisée conventionnelle prennent toute leur signification.

Les parties à la convention ont défini des objectifs chiffrés de maîtrise médicalisée pour l'année 2005 et ont acté le fait « qu'une partie des dépenses effectivement évitées pourra être utilisée pour valoriser la rémunération des actes médicaux ».

Pour 2005, les partenaires se sont fixé un objectif de 998 millions d'euros . Au 31 août 2005, les projections réalisées par la CNAM laissaient apparaître des résultats mitigés, en deçà des ambitions initiales.

Objectifs et résultats de la maîtrise médicalisée conventionnelle

(en millions d'euros)

Objectifs
des dépenses

Prévisions tous régimes en 2005 (1)

Antibiotiques

91

20

Statines

161

107

Psychotropes

33

10

Arrêts de travail

150

424

ALD (libéraux)

455

82

Génériques

55

33

Accord de bon usage de soins (Acbus)

55

0

Total

998

675

(1) Il s'agit de données provisoires se fondant sur les rythmes d'évolution observés fin août.

Source : CNAM

Comment interpréter ces résultats alors que, dans son rapport annuel consacré à la sécurité sociale, la Cour des comptes a souligné l'échec des mécanismes d'incitation financière octroyés aux professionnels de santé avant 2004 ?

Le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) a appelé les médecins à redoubler d'efforts pour atteindre les objectifs d'économie fixés pour 2005, mais considère les premiers résultats comme plutôt positifs.

Les syndicats médicaux font de même et rappellent, par une remarque non dénuée d'une certaine justesse, que les mécanismes de maîtrise médicalisée ne sont entrés en vigueur que vers le mois d'avril 2005. En conséquence, les économies réalisées doivent être considérées comme le résultat des efforts accomplis sur les deux tiers de l'année et s'apprécier en tendance. Dans ces conditions, l'appréciation peut-être favorable.

Sans entrer dans ces querelles d'interprétation, on peut toutefois observer que le poste d'économie le plus important concerne les dépenses d'indemnités journalières, c'est-à-dire le domaine dans lequel les efforts ont débuté avant la signature conventionnelle.

Si l'on s'en tient à cet exemple et à celui des antibiotiques pour lesquels des résultats positifs ont été obtenus les années précédentes, on constate que la maîtrise médicalisée peut déboucher sur des résultats positifs en termes d'économies et d'optimisation du système de soins, sous certaines conditions : une adhésion de l'ensemble des acteurs à l'objectif, un effort prolongé sur plusieurs années et qui ne se relâche par après l'obtention des premiers résultats positifs.

b) Des objectifs 2006 qui restent à définir

L'annexe 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 prévoit que 890 millions d'économies seront réalisées dans le domaine des soins de ville grâce à la poursuite de la politique de maîtrise médicalisée des dépenses.

Ces mesures sont distinctes d'autres dispositions adoptées par le Gouvernement en matière de produits de santé par exemple. Il s'agit bien de mesures relatives aux honoraires et prescriptions, et donc de moyens qui devront être dégagés, notamment dans le cadre de la négociation conventionnelle entre l'assurance maladie et les professionnels de santé.

Le conseil de l'Uncam a d'ores et déjà arrêté les orientations nécessaires à l'ouverture de négociations avec les transporteurs sanitaires, les masseurs-kinésithérapeutes, les chirurgiens-dentistes, les sages-femmes, les infirmières et les transporteurs sanitaires.

C'est au travers de ces négociations que la question de la régulation des dépenses de soins de ville sera abordée. On peut imaginer que les modalités retenues dans la convention régissant les relations entre les médecins et l'assurance maladie (revalorisation des tarifs en contrepartie d'objectifs chiffrés de maîtrise) seront appliquées aux futures négociations conventionnelles, en étant adaptées pour tenir compte des contraintes spécifiques pesant sur chaque profession concernée.

Aucune mesure de maîtrise médicalisée portant sur les prescriptions hospitalières n'est prévue alors qu'elles pèsent sur les dépenses de soins de ville. Cette situation doit être corrigée rapidement afin que les efforts soient partagés entre les différents acteurs, notamment dans le domaine des arrêts de travail et de la prise en charge des patients souffrant d'une affection de longue durée. La mise en oeuvre des nouveaux accords cadre prévus par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie doit constituer un premier pas en la matière.

In fine , et sans même discuter de la validité des résultats obtenus, il faut constater que la maîtrise médicalisée conventionnelle a prévu un objectif d'économies de 998 millions d'euros en 2005, alors que pour 2006, et sur un champ a priori plus large, le Gouvernement n'anticipe qu'une réduction des dépenses à hauteur de 890 millions d'euros. Dans un cas comme dans l'autre, les sommes considérées représentent moins de 1,5 % des dépenses de soins de ville et sont au moins pour une partie réinvesties pour revaloriser les actes réalisés par les professionnels de santé.

Dans ces conditions, on peut s'interroger sur la capacité de la maîtrise médicalisée conventionnelle à contribuer à la réduction des déficits de l'assurance maladie. Son apport est modeste et son rôle semble plutôt orienté, dans un premier temps, vers une optimisation des dépenses de santé.

B. LE PLAN MÉDICAMENT, UN OUTIL SPÉCIFIQUE DE RÉGULATION DES DÉPENSES DE SOINS DE VILLE

Les dépenses de soins de ville se composent des dépenses déléguées qui regroupent les honoraires des professionnels de santé, d'une part, et des dépenses résultant des prescriptions des professionnels de santé, d'autre part. Dans cette seconde catégorie sont regroupés les prestations en espèces, en particulier les indemnités journalières versées en cas d'arrêt de travail, et les médicaments et dispositifs médicaux.

Le Gouvernement a choisi d'appliquer au secteur du médicament et des produits de santé un double régime de régulation : le premier, dans le cadre de la maîtrise médicalisée conventionnelle puisque les objectifs chiffrés retenus dans la convention régissant les rapports entre les médecins et l'assurance maladie portent sur des réductions de prescriptions de certaines classes de médicaments ; le second, par une régulation spécifique fondée sur une négociation financière entre les laboratoires pharmaceutiques et le comité économique des produits de santé (CEPS) qui négocie le prix des médicaments pour le compte de l'Etat.

Cette politique s'inscrit dans la continuité d'une action entamée depuis 2002 et se traduit par une politique de maîtrise des dépenses de médicaments qui vise à assurer la promotion des médicaments génériques, à apprécier le service médical rendu des produits de santé, mais également à favoriser la diffusion de médicaments innovants coûteux.

1. Une croissance préoccupante des dépenses de médicaments

Les dépenses de médicaments se situent à la première place des dépenses de soins de ville, loin devant les honoraires médicaux. Ainsi en 2004, d'après les comptes nationaux de la santé, la consommation pharmaceutique en ville (achats dans les officines ou les pharmacies hospitalières pour des patients non hospitalisés) s'élevait à 30,3 milliards d'euros , contre 18,5 milliards d'euros pour l'ensemble des honoraires des médecins généralistes et spécialistes.

Face à la forte croissance du poste médicament, + 5 % en 2005, après + 6 % en 2004, le Gouvernement a fait le choix de renforcer le plan médicament conçu à l'occasion de la réforme de l'assurance maladie et dont l'exécution devait s'étendre sur la période 2005-2007.

a) Un niveau de consommation élevée

Dans son rapport de septembre 2004, la commission des comptes de la sécurité sociale attirait l'attention des pouvoirs publics sur la croissance préoccupante des dépenses de médicaments.

La commission signalait quatre évolutions préoccupantes :

- les Français figurent parmi les premiers consommateurs de médicaments du monde or, comme le souligne le rapport du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie publié en janvier 2004, « rien ne justifie que l'assuré se voit prescrire entre deux et quatre fois plus d'analgésiques, d'antidépresseurs et de tranquillisants que dans les pays voisins » ;

- ce niveau de consommation élevé est lié pour partie au non-respect des référentiels de bonne pratique médicale ;

- les médicaments nouveaux coûteux bénéficient d'une diffusion rapide ;

- l'augmentation tendancielle du nombre de personnes exonérées de ticket modérateur (par exemple, l'assuré souffrant d'une affection de longue durée) entraîne mécaniquement une hausse taux de remboursement à la charge du régime obligatoire.

Enfin, une autre spécificité nationale tiendrait au fait que l'équation « consultation=ordonnance=médicaments » est plus forte en France qu'ailleurs : 90 % des consultations s'y concluent par une ordonnance, contre 83 % en Espagne et 72 % en Allemagne 1 ( * ) .

Les professionnels de santé et l'assurance maladie ont apporté une première réponse à ses préoccupations en se fixant des objectifs d'optimisation des prescriptions d'antibiotiques ou de statines par exemple.

b) Une diffusion rapide des médicaments nouveaux innovants

L'assurance maladie dépense chaque année un milliard d'euros supplémentaires pour le remboursement de nouveaux médicaments. Cette situation s'explique par l'arrivée sur le marché de médicaments nouveaux, parfois innovants, qui permettent d'améliorer l'espérance de vie ou la prise en charge de nouvelles pathologies.

Dans l'ensemble, la progression des dépenses de médicaments est essentiellement due à un effet de structure, c'est-à-dire qu'elle correspond à un glissement de la consommation vers des produits de santé plus chers ; cet effet est lié notamment à l'apparition de nouvelles thérapeutiques.

Cette évolution des dépenses de médicaments remboursés reste forte en dépit de la montée en charge des génériques et des mesures d'économies déjà réalisées.

2. Un plan médicament plus rigoureux

La réforme de l'assurance maladie s'accompagne d'un plan médicament dont les objectifs d'économies sont chiffrés à 900 millions en 2005 et à un total de 2,5 milliards en 2007. Ce plan est distinct des mesures d'économies décidées dans le cadre de la maîtrise médicalise conventionnelle.

Ce plan repose sur une politique de prix ambitieuse avec la promotion des médicaments génériques et une nouvelle politique de régulation des médicaments à l'hôpital. Il s'accompagne d'un ajustement des conditions de prise en charge, de la commercialisation de nouveaux conditionnements et de l'adaptation de la prise en charge des médicaments à service médical rendu insuffisant.

Or, avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, le Gouvernement fait le choix d'accélérer la mise en oeuvre de ce plan. On peut supposer qu'il suit en cela les propositions émises par la CNAM qui, dans son rapport au Parlement et au ministre chargé de la sécurité sociale de juin 2005, soulignait qu'une réduction significative du déficit de l'assurance maladie « ne peut être obtenue qu'en mettant en oeuvre des mesures complémentaires tendant à restaurer les conditions de l'équilibre . Et la CNAM précisait : « dans le domaine des dépenses, l'accélération des mesures du plan médicament [...] semble justifiée au regard de la dynamique encore fortement croissante de ces dépenses ».

L'objectif de ces ajustements est de recentrer les dépenses d'assurance maladie sur les produits qui rendent le meilleur service au meilleur coût.

a) De nouvelles mesures de régulation

La diffusion des médicaments génériques est un axe privilégié de la politique menée par le Gouvernement dans le domaine des produits de santé. Cette politique repose sur la collaboration des médecins (recours à la prescription en dénomination commune internationale), des pharmaciens (exercice du droit de substitution) et des assurés sociaux.

La part des médicaments génériques dans les prescriptions est ainsi passée de 24 % en 2000 à 60 % du répertoire (c'est-à-dire le marché du généricable) en janvier 2005 , et 89 % des Français se déclarent aujourd'hui favorables aux médicaments génériques.

Or, malgré ces évolutions favorables, la politique du générique ne produit pas les résultats attendus en matière de réduction des dépenses.

Constatant que les premiers résultats sont incertains, le Gouvernement souhaite compléter et accélérer la mise en oeuvre du plan médicament. Cet objectif sera poursuivi à travers :

- la généralisation des tarifs forfaitaires de remboursement (TFR) ;

- une baisse de 13 % du prix des médicaments génériques inscrits au répertoire ; cette décision est présentée comme une mesure d'ajustement du prix des médicaments génériques commercialisés en France avec les prix pratiqués dans les autre pays européens. Cette mesure devrait se traduire par une économie de 490 millions d'euros en année pleine ;

- la poursuite de l'incitation à la substitution ;

- la poursuite du plan médicament sur les produits de santé avec notamment, la montée en charge des nouveaux conditionnements (180 millions d'économies), la baisse de prix de certaines spécialités et l'extension des règles de régulation applicables aux médicaments vendus en ville à certaines catégories de médicaments vendus à l'hôpital (médicaments rétrocédés, médicaments facturés en sus d'un groupe homogène de séjour (GHS).

b) Une nouvelle politique d'évaluation du service médical rendu des produits de santé

La réforme de la gouvernance de l'assurance maladie opérée par la loi du 13 août 2004 prévoit la création d'une Haute Autorité de santé chargée, entre autres, de procéder à l'évaluation périodique du service rendu des produits, actes ou prestations de santé et de contribuer par ses avis à l'élaboration des décisions relatives à l'inscription, au remboursement et à la prise en charge par l'assurance maladie desdits produits, actes ou prestations.

C'est dans le respect de l'esprit de la réforme que le ministre chargé de la santé et de la sécurité sociale a demandé à la Haute Autorité de santé de procéder à la réévaluation du service médical rendu (SMR) de 245 médicaments. Ce travail poursuit une analyse déjà entamée par les experts de la commission de la transparence, alors sous tutelle de l'Agence française de sécurité des produits sanitaires (Afssaps), aujourd'hui intégrée à la HAS.

A l'issue des travaux d'expertise et d'une procédure contradictoire, la Haute Autorité de santé s'est prononcée en faveur d'un retrait du remboursement de 218 médicaments actuellement remboursés à 35 % et pour lesquels elle a considéré qu'une prise en charge par la solidarité nationale n'est plus justifiée. On ne peut que suivre le raisonnement de la HAS qui considère que l'admission au remboursement n'est pas seulement fondée sur l'efficacité des produits concernés mais sur un ensemble de critères justifiant la prise en charge au titre de la solidarité nationale, notamment la gravité de la maladie.

Face à ces propositions, le Gouvernement a choisi de ménager une période de transition. Dans cette optique, 156 médicaments ne seront plus remboursés à compter du 1 er mars 2006 et 62 autres verront leur prise en charge ramenée de façon temporaire à 15 % jusqu'au début 2008 . Parallèlement, afin de favoriser la prise en charge du médicament à son juste prix, une baisse de 20 % sera appliquée au tarif de ces produits.

Selon l'avis adopté par le Haut Conseil de l'avenir de l'assurance maladie, le 27 octobre dernier : « le déremboursement des médicaments à SMR insuffisant induit en année pleine une économie de 270 [millions d'euros] pour les régimes de base et de 360 [millions d'euros] pour les OC [organismes d'assurance maladie complémentaire]. »

II. HÔPITAL : RÉFORMER SANS DÉSTABILISER

Depuis 2002, le Gouvernement a mis en oeuvre un plan ambitieux de modernisation du système hospitalier public et privé. Les différents volets de cette réforme (modalités de financement des établissements de santé publics et privés, nouvelle gouvernance hospitalière, réforme de la planification, relance de l'investissement) sont regroupés au sein du plan hôpital 2007 . Ils constituent, avec les changements apportés par la réforme de l'assurance maladie (dossier médical personnel, évaluation des pratiques professionnelles, nouvelle procédure d'accréditation des établissements de santé), autant de mutations que les acteurs du monde hospitalier doivent s'approprier et mettre en oeuvre.

Face à l'ampleur de ces réformes, et aux changements culturels qu'elles impliquent, les pouvoirs publics sont attentifs à éviter tout déséquilibre ou déstabilisation de nature à enrayer le processus en cours.

A cet effet, deux ans après l'adoption des premières mesures de cette réforme, un plan d'adaptation va être mis en oeuvre, sous l'autorité du ministre chargé de la santé, afin de former les acteurs de la communauté hospitalière et de leur montrer la cohérence des réformes au service d'une amélioration de la qualité de la prise en charge des patients et de la qualité de la gestion des établissements.

Ce plan d'adaptation est décomposé en trois volets : un volet « information-formation » ; un volet « accompagnement personnalisé des établissements » dont le rôle est de diligenter des missions de diagnostic spécifique dans les établissements signalés par les agences régionales d'hospitalisation comme présentant le plus de difficultés à mettre en oeuvre les réformes ; enfin un volet « adaptation des réformes » pour apporter des solutions aux difficultés très concrètes rencontrées par les établissements pour l'application de la réforme.

Ce dispositif d'accompagnement est doté d'un budget de 20 millions d'euros pour les deux ans à venir , financés par le fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP).

A. UNE AMBITION CONFIRMÉE : POURSUIVRE LA MISE EN oeUVRE DE LA T2A

La mise en oeuvre d'un plan d'adaptation à la réforme des conditions de tarification hospitalière, présenté par le directeur de l'hospitalisation et de l'offre de soins au mois de mai dernier, ne remet pas en cause la montée en charge des nouvelles modalités de financement des établissements de santé publics et privés (tarification à l'activité- T2A).

Toutefois, dans un souci de consolidation de ce nouveau dispositif tarifaire, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 propose des mesures d'ajustement. Ces dispositions sont justifiées au regard des premiers mois de mise en oeuvre de la T2A qui ont mis en exergue le caractère notoirement insuffisant des expérimentations menées en 2003, les conditions de déroulement calamiteuses, pour les établissements de santé, de la campagne tarifaire 2005 et l'absence d'une échelle nationale des coûts de fonctionnement des secteurs public et privé.

S'il est difficile de mesurer les retards que ces ajustements pourront occasionner au calendrier de la réforme, il est indispensable que la réforme se poursuive dans tous les domaines, et notamment en favorisant la montée en charge de la tarification à l'activité dans le financement des établissements de santé publics.

De la même manière, et c'est le sens d'une proposition phare du Gouvernement, il est impératif de mettre fin à la querelle sur les écarts de coût entre public et privé.

1. Les enseignements des premiers mois

La mise en oeuvre de la réforme du financement des établissements de santé n'a pas été identique selon qu'ils appartiennent au secteur public et privé participant au service public (secteur précédemment financé par dotation globale) ou au secteur privé (antérieurement sous-objectif quantifié national).

Pour les premiers, une période transitoire est prévue entre 2004 et 2012 au cours de laquelle la tarification à l'activité connaîtra une montée en charge progressive. Pour les seconds, une mise en oeuvre complète a eu lieu dès le 1 er mars 2005.

Cette différence de traitement résulte des modalités de financement antérieures à la réforme.

a) L'intégration de la T2A dans une réforme plus globale de l'hôpital public

Pour les établissements de santé publics, antérieurement financés par dotation globale, la tarification à l'activité s'applique depuis le 1 er janvier 2004 pour les activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO).

Les 580 établissements concernés ont vu une part de leurs ressources calculée en fonction de leur activité, sur la base de groupes homogènes de séjour (GHS). Les résultats connus de l'activité 2004 montrent que 337 établissements sont gagnants, tandis que 243 sont considérés comme perdants.

Catégorie d'établissements

Etablissements perdants

Etablissements gagnants

Total

Centres hospitaliers

161

254

415

Centres hospitaliers régionaux

18

13

31

Centres de lutte contre le cancer

7

13

20

Autres

57

57

114

Total

243

337

580

Source : ministère de la santé et des solidarités

Ces résultats font apparaître un manque à gagner de 0,04 % pour les centres hospitaliers régionaux alors que les centres hospitaliers réalisent un gain financier égal à 0,42 % de leur budget.

L'exercice budgétaire 2004 ne peut être considéré comme pleinement significatif puisque seulement 10 % des activités ont fait l'objet d'une tarification à l'activité. Tandis que d'autres aspects de la réforme, comme la prise en charge des médicaments onéreux en sus du tarif des GHS ou le financement des transferts d'organes, ne connaissaient qu'une mise en oeuvre partielle. Cette période a surtout été mise à profit pour développer une pédagogie de la réforme auprès des responsables hospitaliers.

En 2005, la part de financement à l'activité est portée à 25 % des activités MCO . Par différence, la dotation complémentaire que les établissements continuent à percevoir a été ramenée à 75 % (contre 10 % et 90 % en 2004). Par ailleurs, les modalités de financement ont été précisées par voie réglementaire et se décomposent ainsi :

- missions d'intérêt général (financées par dotation) ;

- forfaits finançant les activités de greffes d'organes et d'urgences ;

- liste des médicaments et dispositifs médicaux financés en sus des tarifs ;

- tarifs nationaux de prestation par séjour (GHS).

Si les principes sont clairs, le déroulement de la campagne tarifaire 2005 a révélé de nombreuses difficultés de mise en oeuvre.

Les plaintes émises par les établissements de santé portent à la fois sur le retard avec lequel la campagne tarifaire a été entamée, certains établissements ne recevant la notification de leur budget qu'au mois de mai ou de juin, mais également sur les conditions de détermination et d'évolution des tarifs. En 2005, les tarifs des GHS ont été ajustés pour tenir compte de la possibilité de facturer en sus les médicaments les plus coûteux et le versement des enveloppes destinées au financement des missions d'intérêt général. Ces modifications se sont traduites par une réduction de la valeur faciale des tarifs de GHS, notamment pour ceux dont le paiement se compose de deux éléments (GHS + médicaments). Cette modification, insuffisamment expliquée, a été source d'incompréhension entre les services du ministère chargé de l'élaboration des tarifs et la communauté hospitalière.

Dans l'ensemble, cette situation a fait naître chez les responsables hospitaliers un sentiment désagréable d'instabilité budgétaire.

Pour répondre à ces inquiétudes le Gouvernement a choisi de mettre en oeuvre un plan d'adaptation dont l'objet est de permettre d'une part, la poursuite de la réforme, d'autre part, d'accompagner les établissements durant la période de transition. Cet accompagnement, qui prend la forme d'un audit mené au sein de chaque structure, porte non pas sur la seule mise en place de la T2A mais sur l'ensemble des composantes de la réforme (investissement, T2A, gouvernance).

b) Des dispositifs transitoires pour accompagner les nouvelles modalités de financement des cliniques privées

Prévue initialement pour le 1 er octobre 2004, reportée une première fois au 1 er janvier 2005, la mise en oeuvre de la tarification est finalement entrée en vigueur dans le secteur privé depuis le 1 er mars 2005. Elle se traduit par une rémunération forfaitaire fondée sur les groupes homogènes de séjour (GHS) qui viennent se substituer aux anciennes prestations calculées à la journée ou à l'acte.

Ces différents reports sont imputables aux difficultés rencontrées par les établissements de santé privés, et les caisses primaires d'assurance maladie, pour assurer la mise à niveau des systèmes d'information indispensables à la transmission de la facturation et au paiement.

Afin de pallier les effets négatifs liés à ces difficultés techniques, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 (article 23) a autorisé les caisses à verser, pendant une durée de deux mois, des avances de trésorerie aux établissements rencontrant des difficultés dans la transmission des informations et aux professionnels exerçant dans ces établissements.

Un contrat d'engagement relatif au dispositif de préparation et de suivi de la T2A a été établi entre la CNAM, les fédérations représentatives des établissements de santé privés (FHP, Fehap) et le ministère en charge, de la santé. Ce contrat avait pour objet de formaliser les engagements des parties relatives aux modalités et au calendrier du dispositif de préparation et de suivi de la mise en oeuvre de la T2A.

Il autorisait le versement d'avance dans deux cas de figure : l'échec des premières télétransmissions de factures réelles et l'incapacité de l'assurance maladie de verser un acompte de 85 % dans les quatre jours suivant la présentation des factures.

Entre mars et avril 2005, le montant total des avances de trésorerie consenties par l'assurance maladie se sont élevées à près d'un milliard d'euros 2 ( * ) et des aides exceptionnelles ont été accordées à certaines cliniques jusqu'au 31 août 2005, ainsi qu'aux professionnels de santé.

Le montant total des avances de trésorerie versées aux cliniques privées et aux professionnels de santé s'élève à 1,42 milliard d'euros. Elles font l'objet d'un apurement régulier dès que les problèmes de transmission de la facturation sont surmontés. Compte tenu du caractère dérogatoire au droit existant des avances consenties au-delà des deux premiers mois, il conviendrait sans doute d'accorder une validation législative aux aides versées à partir du mois de mai.

c) Les résultats 2004 et 2005 font ressortir une reprise d'activité

La mise en oeuvre de la tarification à l'activité coïncide avec une reprise de l'activité hospitalière et la survenance de dépassements de l'Ondam hospitalier en 2004 et en 2005.

Dans son rapport de septembre 2005, la commission des comptes de la sécurité sociale évalue à 56,5 milliards d'euros les versements à l'ensemble des établissements de santé effectués en 2004, soit une progression de 4,6 %. Elle estime que les objectifs dédiés sont dépassés de près de 500 millions (245 millions pour les établissements publics et 220 millions pour les établissements privés) et qu'un dépassement de 650 millions d'euros est prévisible pour 2005, pour un montant total des dépenses hospitalières de 61,6 milliards d'euros.

L'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l'Inspection générale des finances (IGF) chargées d'une mission d'analyse sur le dépassement des dépenses hospitalières d'assurance maladie en 2004 considèrent que l'objectif de dépenses encadrées a été globalement respecté et que le dépassement résulte d'une part, d'un écart entre l'Ondam et les dotations globales inscrites aux budgets prévisionnels des établissements payés par l'assurance maladie, d'autre part, de moindres recettes de groupe 2 (composées des produits du forfait journalier et du ticket modérateur payés par les assurés) et qui ont été compensées par l'assurance maladie au titre de la dotation globale.

Au-delà de ces explications, il convient de souligner que l'activité des établissements de santé publique a crû de 2,6 % entre 2003 et 2004 alors qu'elle n'avait augmenté que de 1,2 % entre 2000 et 2003.

La mise en oeuvre de la tarification à l'activité explique probablement une partie de cette situation. En effet jusqu'alors, les données du programme médical des systèmes d'information (PMSI, qui retrace les activités de l'établissement) n'avaient pas d'effet direct sur la dotation de l'établissement. 2004 était la première année où le financement reposait, pour une part, sur l'activité. Les établissements ont alors amélioré le codage de leur activité de façon quantitative et qualitative.

Il convient également de rappeler que le comité d'alerte prévu par la loi du 13 août 2004 comme la commission des comptes de la sécurité sociale ont alerté les pouvoirs publics sur les risques de dérapage des dépenses hospitalières et sur l'absence d'outils susceptibles de permettre une régulation.

2. Des ajustements techniques nécessaires

Avant même l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, le Gouvernement a procédé à des ajustements techniques des modalités de mise en oeuvre de la T2A.

C'est ainsi que, dans un souci de consolider les premiers acquis de la réforme et de ne pas déstabiliser à nouveau les établissements de santé publics, il a été décidé que, contrairement aux dispositions transitoires inscrites à l'article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, la facturation des établissements continuera à transiter par l'intermédiaire des agences régionales de l'hospitalisation (ARH) en 2006, alors qu'il était prévu que cette facturation soit directement adressée aux caisses d'assurance maladie.

a) Le report de la facturation directe

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 prévoyait que, dès le 1 er janvier 2006, les établissements de santé publics adresseraient directement leurs factures auprès des caisses d'assurance maladie.

Or, l'article 8 de l'ordonnance n° 2005-1112 du 1 er septembre 2005 portant diverses dispositions relatives aux établissements de santé et à certains personnels de la fonction publique hospitalière reporte cette disposition à une date ultérieure. Cette décision est motivée par l'impréparation des acteurs concernés et par la volonté du Gouvernement d'accorder une année de stabilisation aux établissements de santé après une année 2005 éprouvante.

La fraction d'activité tarifiée en T2A (25 % en 2005) demeurera financée par un système de notification transmise par les agences régionales de l'hospitalisation aux caisses d'assurance maladie et fera l'objet d'une facturation globale trimestrielle.

Un nouveau calendrier de facturation directe aux caisses d'assurance maladie sera établi. Le schéma retenu par le Gouvernement comporte trois étapes : facturation des consultations et actes externes dès la fin de l'année 2006, montée en charge progressive de la facturation et des liquidations des séjours effectués dans les centres hospitaliers universitaires en 2007, puis facturation et liquidation des séjours pour les autres établissements en 2008. Ce nouveau dispositif n'a pas pour l'instant reçu de consécration législative.

b) L'extension de la T2A à de nouveaux champs d'activité tels que les soins de suite et de réadaptation et la psychiatrie

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 présente, au sein de l'Ondam, un sous-objectif « autres dépenses relatives aux établissements de santé » dont le montant est fixé à 17,9 milliards d'euros.

Cet objectif regroupe les dépenses de soins de suite et d'adaptation ainsi que les soins psychiatriques. Il est distinct de l'objectif « dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l'activité ». L'existence de cet objectif s'explique par la différence de modalités de financement de ces activités par rapport aux activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO).

Dans ces secteurs toujours financés à la dotation globale, le Gouvernement a engagé les travaux préparatoires à leur basculement vers un financement à l'activité.

Ces études semblent plus avancées dans le champ des soins de suite et de réadaptation dont l'activité est retracée dans un programme de médicalisation de l'information spécifique (PMSI SSR) et pour lequel une étude nationale de coût à été mise en chantier.

Dans le domaine de la psychiatrie, il n'existe pas encore de recueil d'informations généralisé à l'ensemble des établissements. Sans ces éléments, il est quasiment impossible de faire évoluer le mode de financement de la psychiatrie vers la tarification à l'activité. La mise en chantier d'une nouvelle étude relative aux activités de médecine, chirurgie, obstétrique pourrait être l'occasion de faire avancer simultanément ce dossier.

3. La question de la convergence : une interrogation déterminante pour l'avenir de la réforme

La mise en oeuvre de la tarification à l'activité doit s'étendre sur une période transitoire comprise entre les années 2004 et 2012. C'est au cours de cette période que doit être réalisée la convergence tarifaire entre les établissements publics et privés.

a) La question de la convergence des tarifs et les premières mesures prises en 2005

Un des objectifs principaux de la réforme est d'établir une équité de traitement entre les établissements publics et privés, ce qui nécessite une harmonisation des modes de financement de chacun des secteurs et l'établissement d'un tarif commun pour les activités MCO.

Une période de convergence est nécessaire pour atteindre ces objectifs. Elle comporte une double étape intermédiaire en 2008, c'est-à-dire à mi-chemin, date à laquelle la part tarifée à l'activité et l'objectif de convergence des tarifs devront être atteints à 50 %.

Compte tenu du caractère hétérogène du champ hospitalier, cette convergence est de fait décomposée en trois mouvements différents : une convergence interne à l'ensemble des hôpitaux publics, une convergence interne à l'ensemble des établissements privés et une convergence globale entre les secteurs public et privé.

Ce processus de convergence a débuté dès 2005. Il propose de réduire l'écart apparent entre les tarifs des secteurs public et privé, mais aussi de créer les conditions favorisant l'adaptation des hôpitaux privés participant au service public (PSPH) et des cliniques privées à la réforme.

Pour ce faire, le Gouvernement a débloqué une enveloppe supplémentaire de 130 millions d'euros à destination des établissements PSPH afin de compense le différentiel de charges patronales pesant sur cette catégorie d'établissements par rapport aux établissements publics. Elle apporte également une aide complémentaire à ces établissements au moment où les aides déployées pour la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail arrivent à échéance.

Une démarche de convergence est également engagée en direction des établissements du secteur privé, sachant qu'en 2004, les tarifs du secteur privé, corrigés des différences de champs ouverts par les tarifs (honoraires médicaux, médicaments, analyses) représentaient 59 % de ceux du secteur public.

Dès lors, l'effort de convergence ne pouvait être obtenu que par une différenciation des évolutions tarifaires 2005 au bénéfice du secteur privé ce qui impliquait le recours à un dispositif de convergence destiné à la revalorisation exclusive des tarifs du secteur privé.

Une enveloppe de 35 millions est apparue suffisante au Gouvernement pour amorcer le processus de convergence. Ces éléments ont permis une augmentation tarifaire générale des établissements privés de 1,56 % au 1 er mars 2005 auxquels viennent se rajouter les enveloppes spécifiques respectivement fixées à 3,8 millions d'euros pour le développement des soins palliatifs, 10 millions d'euros pour la mise aux normes des services de néonatologie et 9 millions d'euros destinés à la création de places d'hospitalisation à domicile.

Cette évolution tarifaire constitue une première étape de convergence entre les tarifs des établissements privés et ceux des établissements antérieurement financés par dotation globale qui ont progressé de seulement 0,27 % depuis le 1 er janvier 2005.

Ainsi, selon le ministère chargé de la santé, à l'issue des campagnes tarifaires 2005, les tarifs du secteur privé représentent en moyenne 63 % de ceux du secteur public après correction des différences de périmètre couvert par les tarifs (dans le privé, les tarifs ne prennent pas en compte les honoraires des médecins).

b) L'établissement d'une échelle commune des coûts

La réussite de la convergence public-privé suppose de pouvoir identifier et justifier les divergences tarifaires actuelles. Le Gouvernement considère que les comparaisons faites jusqu'à ce jour ne sont que partielles et imparfaites dès lors qu'elles ne recouvrent pas les mêmes charges.

Ce sujet a fait l'objet d'une première polémique publique dont votre commission s'était fait l'écho 3 ( * ) avant l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005.

Les choses ne semblent guère avoir évolué depuis et, dans son rapport de juillet 2005, le Haut Comité pour l'avenir de l'assurance maladie souligne « la grande opacité qui règne et qui ne permet pas de comprendre la grande variabilité des coûts ».

Face à cette situation, le Gouvernement a choisi de décréter une pause en renonçant à imposer l'étape intermédiaire de convergence prévue en 2008. Cette décision a été motivée par l'absence d'études complètes et consensuelles détaillant les écarts de coûts entre les établissements publics et privés.

Le Gouvernement souhaite saisir cette opportunité pour mettre en oeuvre une échelle nationale des coûts, commune aux deux secteurs, qui verra le jour à compter du 1 er janvier 2006. Par ailleurs, des études complémentaires portant sur la détermination des groupes homogènes de séjour seront diligentées.

Les conclusions de ces études menées par l'administration du ministère chargé de la santé et ses démembrements seront déterminantes pour assurer une convergence des tarifs acceptables par chacun des acteurs de l'hospitalisation et atteindre l'objectif d'équité fixé initialement par les pouvoirs publics « dans la limite des écarts justifiés par des différences dans la nature des charges couvertes par ces tarifs 4 ( * ) ».

Il est souhaitable que ce travail, dont l'urgente nécessité apparaît alors que la traversée du gué est déjà entamée, débouche sur des résultats admissibles par l'ensemble des acteurs et mette fin à une polémique stérile. A l'aune du résultat recherché, peut-être faudrait-il envisager d'associer, dans des formes qui restent à définir, des intervenants extérieurs à l'administration, - sociétés de conseil ou Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie -afin de renforcer la légitimité de ces conclusions aux yeux de l'ensemble des acteurs du secteur hospitalier ?

B. UN OBJECTIF PRIORITAIRE : FAVORISER LA DIFFUSION DES PRINCIPES DE LA MAÎTRISE MÉDICALISÉE A L'HÔPITAL

L'instauration de la tarification à l'activité s'inscrit dans le cadre plus large du plan hôpital 2007, notamment avec la mise en oeuvre d'une nouvelle gouvernance hospitalière. Ce mouvement s'accompagne d'une série de réformes ou d'évolutions moins spectaculaires mais tout aussi importantes pour l'institution hospitalière, parmi lesquelles la diffusion des principes de la maîtrise médicalisée trouve sa place.

Il serait injuste de ne pas reconnaître les progrès réalisés par la communauté hospitalière dans ce domaine, notamment au travers des procédures d'accréditation déjà en vigueur, mais il convient aussi de souligner que la maîtrise médicalisée et les bonnes pratiques telles qu'on les diffuse dans le secteur ambulatoire n'ont pas encore trouvé leur place à l'hôpital.

La diffusion des principes de la maîtrise médicalisée à l'hôpital doit prendre deux formes.

La première est celle du contrôle médicalisé de l'activité des établissements de santé. Ce contrôle est légitime de la part de l'Etat et des organismes de sécurité sociale qui doivent pouvoir constater le bon usage des fonds publics.

La seconde concerne les modalités d'optimisation du système de soins retenues par la loi du 13 août 2004 (ALD, arrêts de travail) et les éléments de maîtrise médicalisée insérés dans la convention régissant les relations entre les médecins libéraux (prescription d'antibiotiques, de statines). Or, sous réserve d'ajustements nécessaires pour tenir compte des spécificités de la médecine hospitalière, rien ne justifie leur non-application à l'ensemble des consultations externes et des prescriptions effectuées à l'hôpital.

1. L'encadrement de l'activité et le contrôle de la réforme

Assurer le contrôle de la facturation des établissements de santé publics et privés est l'unique façon d'encadrer les pratiques des établissements en matière de facturation et d'éviter d'éventuelles dérives, abus ou gaspillages.

Cette mission pourra être assurée dans le cadre des textes législatifs et réglementaires existants. Toutefois, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 pourrait être mis à profit pour réviser ou compléter les textes actuels et confier à l'assurance maladie une responsabilité plus grande en matière de contrôle des prestations T2A.

a) Les procédures de contrôle des activités de médecine, chirurgie, obstétrique

La loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie (article 46) dispose qu'un programme de contrôle régional est établi par la commission exécutive de l'agence régionale d'hospitalisation (ARH). Cette commission, composée à parité de représentants de l'Etat et de représentants de l'assurance maladie, détermine la liste des établissements au sein desquels les médecins inspecteurs de santé publique ou les praticiens conseils des organismes d'assurance maladie réaliseront des contrôles sur pièces et sur place. En cas de non-respect de la réglementation, des sanctions financières peuvent être prononcées à l'encontre des établissements visés.

Ce programme de contrôle concerne l'ensemble des établissements de santé publics et privés de la région exerçant des activités de médecine, chirurgie, obstétrique, qu'il s'agisse d'hospitalisation complète ou d'alternatives à l'hospitalisation. Ces contrôles peuvent prendre la forme d'actions ciblées motivées par la découverte d'anomalies lors de la transmission de la facturation, de contrôles thématiques portant sur certains séjours, activités ou prestations (par exemple : passages aux urgences, soins palliatifs, médicaments remboursés en sus des groupes homogènes de séjour) ou d'un contrôle triennal systématique de tous les établissements.

Afin de mettre en oeuvre ce programme de contrôle, les pouvoirs publics se proposent d'instituer dans chaque ARH, une unité de coordination régionale (UCR).

Cette équipe technique serait composée de représentants des organismes d'assurance maladie et de représentants de l'Etat. Ces derniers constitueront au moins un tiers des membres de l'UCR.

Les UCR seront chargées de proposer le programme de contrôle régional, d'en suivre la réalisation et d'en établir le bilan. Les sanctions éventuelles seront prononcées par la commission exécutive de l'ARH.

Aujourd'hui, ce dispositif demeure incomplet en raison de la non-publication du texte réglementaire fixant le barème des sanctions prévues à l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale en cas de manquements aux règles de facturation, aux erreurs de codage ou à l'absence de réalisation d'une prestation.

Par ailleurs, le bon déroulement des opérations de contrôle nécessite que soit établie une frontière claire entre les activités de consultation externe et d'hospitalisation de jour afin d'éviter que les premières ne soient facturées sur la base d'un GHS.

Des aménagements aux modalités de contrôle existantes seront proposés par votre commission par voie d'amendement afin de faciliter les contrôles exercés par l'organisme payeur - à savoir l'assurance maladie. Il s'agira d'aménagements techniques, susceptibles de fluidifier les opérations de contrôle, de lever certaines imprécisions et dont l'objet n'est en aucun cas de remettre en cause l'équilibre des pouvoirs au sein de la communauté hospitalière.

b) La nécessité de développer d'autres formes de contrôle

Outre le non-respect de la réglementation spécifique à la tarification à l'activité, les pouvoirs publics et l'assurance maladie doivent être extrêmement vigilants sur d'autres risques qui peuvent survenir, comme des répercussions en termes d'organisation des soins, un rationnement des prestations fournies, une insuffisance de la régulation du système et notamment un risque de dépassement de l'Ondam.

L'analyse des expériences étrangères montre qu'un certain nombre de dérives sont possibles. La première d'entre elles réside dans l'éventualité que certains établissements pratiquent une sélection des risques pour ne prendre en charge que les pathologies ou les actes les plus rentables. Une telle orientation pourrait conduire à terme à une situation dans laquelle certains actes ou pathologies ne seront plus pris en charge dans certaines parties du territoire.

Il conviendra également d'apporter une attention particulière à l'éventualité d'une multiplication artificielle des actes ainsi qu'à d'éventuelles manipulations des codages destinés à obtenir une meilleure rémunération.

Enfin, il semble souhaitable de développer une plus grande régulation économique du système. Dans ce cadre, le suivi des dotations servies au titre des missions d'intérêt général et d'aides à la contractualisation (Migac), à la mise en oeuvre des orientations des schémas régionaux d'organisation des soins, à l'amélioration de la qualité des soins et à la mise en oeuvre de l'innovation médicale, doit être organisé.

Les dispositions de l'article 30 du présent projet de loi de financement, qui visent à encadrer le développement de l'activité des établissements, sont une première réponse à ces attentes.

Votre commission vous proposera des amendements qui permettent de renforcer les contrôles menés par l'assurance maladie

2. Les bonnes pratiques : un outil pour une meilleure articulation ville-hôpital

Entre 1998 et 2002, les prescriptions des professionnels de santé ont crû de 8,8 % par an en moyenne. Ces prescriptions peuvent être faites soit dans un cadre libéral (c'est le cas le plus fréquent et les professionnels à l'origine de ces prescriptions sont alors le plus souvent des médecins libéraux), soit par des professionnels de santé salariés (et il s'agit alors le plus souvent de médecins hospitaliers exerçant dans des hôpitaux placés sous dotation globale).

Le taux de croissance de la masse des prescriptions respectivement faites par les uns et les autres n'a pas été le même durant cette période : les prescriptions des médecins libéraux ont crû de 8,3 % par an ; celles des médecins exerçant leur activité au sein des établissements hospitaliers sous dotation globale, de 13,1 %.

Ces deux catégories de prescripteurs produisent à elles seules l'essentiel des prescriptions remboursées par le régime général : 93 % en 2002. Le reste est le fait, soit d'autres prescripteurs libéraux (chirurgiens-dentistes ou sages-femmes), soit de professionnels de santé salariés exerçant dans des établissements médico-sociaux ou dans des centres de santé, et beaucoup plus rarement en clinique privée.

Les prescriptions libérales et les prescriptions hospitalières diffèrent à la fois par leur structure et par leur rythme de croissance. Les pouvoirs publics et les partenaires conventionnels ont engagé des efforts pour optimiser ces prescriptions en fonction, d'une part, des nouvelles dispositions législatives prises dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie, d'autre part, des recommandations de bonne pratique émises par la Haute Autorité de santé.

Les premiers résultats sont visibles dans le domaine des soins, notamment sur les prescriptions d'arrêts de travail ou d'antibiotiques. Il convient maintenant de faire entrer les médecins hospitaliers dans cette réforme.

a) Les prescriptions établies à l'hôpital

Sur pratiquement tous les postes concernés, le taux de croissance des prescriptions faites par des médecins salariés exerçant en établissement de santé sous dotation globale a été plus fort que celui de leurs confrères libéraux. Le seul poste qui fait exception à la règle est celui des indemnités journalières pour arrêt de travail : la croissance des prescriptions faites à l'hôpital y apparaît beaucoup plus modérée que celle des prescriptions faites en ville.

En sens inverse, la croissance des prescriptions de médicaments à l'hôpital (16,2 % par an en moyenne entre 1998 et 2002) est deux fois plus forte que celle des prescriptions de ville (7,4 %). Les prescriptions hospitalières de médicaments donnent souvent lieu à une délivrance de ces médicaments en pharmacie hospitalière, alors que c'est beaucoup plus rarement le cas pour les prescriptions de médicaments faites en cabinet de ville. Or, on sait que, au cours des trois dernières années, ce type de délivrance, appelée rétrocession hospitalière, a crû au rythme d'environ 25 % par an.

Le montant remboursé pour les seules prescriptions des établissements hospitaliers sous dotation globale s'est élevé à près de 5,3 milliards d'euros en 2002 et a augmenté de 13,5 % par rapport à 2001.

Face à une telle situation, les pouvoirs publics ont souhaité disposer d'outils favorisant le développement des bonnes pratiques à l'hôpital .

Pour ce faire, l'article 13 de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie dispose que des accords-cadres peuvent être conclus entre les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, l'Uncam et les fédérations nationales représentatives des établissements de santé en vue d'améliorer les pratiques hospitalières. Cette disposition d'ordre général vient compléter une première mesure concernant les médicaments facturés en sus d'un GHS et pour lesquels un dispositif spécifique de bonne conduite a également été établi.

b) Le cas particulier des médicaments

Le secteur du médicament est le domaine dans lequel l'application de la contractualisation voulue par les pouvoirs publics va trouver sa première application.

Tout d'abord avec la conclusion de contrats de bon usage pour les médicaments visés à l'article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale. A la suite de la publication du décret n° 2005-1023 au Journal officiel du 26 août 2005 ces contrats doivent être négociés entre les établissements de santé et les ARH avant le 1 er janvier 2006.

La conclusion de ces conventions, pour lesquelles une annexe du décret prévoit un contrat type, concerne la prescription des médicaments et des produits de santé facturés en sus d'un GHS. Ces médicaments figurant sur une liste arrêtée par le ministre chargé de la santé sont des médicaments coûteux . La signature d'un tel contrat est indispensable pour que les établissements puissent bénéficier d'une prise en charge à 100 % du prix des médicaments concernés.

Ces médicaments font l'objet d'une seconde mesure de régulation financière dans le projet de loi de finances pour 2006 qui prévoit que le comité économique des produits de santé pourra décider de baisser le prix public de ces médicaments en cas d'une trop forte progression de leur chiffre d'affaires.

Ensuite avec le déploiement des accords-cadres prévus par l'article L. 6113-13 du code de la santé publique.

Un premier accord est effectivement intervenu récemment afin de promouvoir le bon usage des antibiotiques dans les établissements de santé en vue d'améliorer la prescription et de préserver leur efficacité.

Cet accord se fonde sur le référentiel d'accréditation établi par la Haute Autorité de santé et se fixe un objectif de réduction de 10 % de la consommation des antibiotiques dans les établissements de santé au cours des trois ans à venir.

Les partenaires de ce premier accord envisagent de conclure prochainement d'autres conventions portant sur le bon usage des statines ou sur les transports sanitaires.

Ces accords-cadres permettent d'associer les établissements de santé au développement de la maîtrise médicalisée des dépenses. Les accords-cadres conclus ou envisagés reprennent des problématiques communes à la médecine de ville et aux soins hospitaliers. Il est devenu indispensable que les établissements, pour la part de leur activité qui est concernée, s'engagent dans de telles dispositions déjà en vigueur pour les soins de ville.

Cette situation est source d'interrogations puisque la loi du 13 août 2004 prévoit que les professionnels de santé peuvent être associés à la négociation. Le texte réglementaire nécessaire à l'application de cette mesure n'a toutefois pas été publié.

A ce stade, votre commission rappelle son attachement à une mesure simple, et susceptible de favoriser la diffusion de la maîtrise médicalisée des dépenses qu'elle a proposée dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 : l'identification individuelle des médecins hospitaliers afin de connaître précisément les prescripteurs lors de la délivrance des soins. Elle a bien noté que l'annexe 3 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 indique qu'un répertoire sera opérationnel dans le courant du premier semestre 2006. Elle sera attentive à la mise en oeuvre de cette disposition.

III. ONDAM 2006 : POURSUIVRE LE REDRESSEMENT DES COMPTES DE L'ASSURANCE MALADIE

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 s'inscrit dans la continuité de la réforme de l'assurance maladie mise en oeuvre depuis l'été 2004. Son objectif est de consolider l'action entreprise au cours des douze derniers mois et de bonifier les premiers résultats positifs déjà engrangés (décélération des dépenses de soins de ville, respect de l'Ondam 2005, réduction de 25 % du déficit de l'assurance maladie).

Par construction, l'Ondam pour 2006 rassemble les mesures de consolidation arrêtées par le Gouvernement, mais il se caractérise aussi par certains traits qui le distinguent des Ondam précédents :

tout d'abord, en raison de dispositions contenues dans la loi du 13 août 2004 qui invitent chaque caisse nationale d'assurance maladie à transmettre « avant le 30 juin de chaque année [...] des propositions relatives à l'évolution de ses charges et de ses produits au titre de l'année suivante et aux mesures nécessaires pour atteindre le cadrage financier pluriannuel des dépenses d'assurance maladie ». Si le mystère de la construction de l'Ondam n'est toujours pas percé, il convient de souligner que les caisses d'assurance maladie sont désormais associées, quoique de façon indirecte, à sa conception et au cadrage pluriannuel qui l'accompagne ;

ensuite, car après l'adoption de la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, l'Ondam est désormais décliné en un minimum de cinq sous-objectifs de dépenses, sur lesquels le Parlement est amené à se prononcer.

A. UN ONDAM AMBITIEUX POUR 2006

Pour 2006, et après avoir réussi un exercice 2005 déjà audacieux, le Gouvernement a fixé le taux de progression de l'Ondam à 2,5 %.

Au regard des taux de progression constatés au cours des neuf dernières années (4,6 % en moyenne), il s'agit incontestablement d'un choix ambitieux arrêté par le Gouvernement.

Taux de l'Ondam voté et réalisé

(en pourcentage)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Ondam voté

1,7

2,4

1,0

2,9

2,6

4,0

5,3

4,0

3,2

2,5

Ondam réalisé

1,5

4,0

2,6

5,6

5,6

7,2

6,4

5,2

3,2

Ce taux de progression représente un objectif de dépenses de 140,7 milliards d'euros.

Ondam voté et réalisé

(en milliards d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006*

Ondam voté

91,5

93,6

96,0

100,4

105,7

112,8

123,5

129,7

134,5

140,7

Ondam réalisé

91,4

95,1

97,6

103,0

108,8

116,7

124,7

131,0

134,9

Dépassement

- 0,1

1,5

1,6

2,7

3,1

3,9

1,2

1,3

0,4

*prévisions

Par ailleurs, les objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès sont fixés à :

- 153,4 milliards d'euros pour l'ensemble des régimes obligatoires de base ;

- 131,9 milliards d'euros pour le régime général de la sécurité sociale.

Pour respecter ces limites, le Gouvernement table sur un ralentissement des dépenses de soins, rendu possible par les effets conjugués de la maîtrise médicalisée et du plan médicament, et sur une progression modérée des dépenses hospitalières.

Mesures à effet sur les comptes 2006

(en millions d'euros)

Régime général

Tous régimes

Mesures d'économies sur les dépenses d'assurance maladie

3.968

4.708

Mesures sur les produits de santé

1.751

2.085

Mesures sur les établissements de santé

958

1.140

Revalorisation du forfait journalier hospitalier

84

100

Maîtrise médicalisée

748

890

Lutte contre les fraudes

126

150

Maintien d'un ticket modérateur plafonné sur les actes au-delà de 91 euros

84

100

Autres mesures (dont solde net sur les indemnités journalières : 20 millions d'euros tous régimes)

80

95

Revalorisation du forfait CMU

138

148

Source : Annexe 9 - PLFSS 2006

Toutefois, la comparaison des dépenses autorisées en 2006 avec les dépenses des exercices précédents ne peut être menée qu'après avoir pris en compte les modifications du périmètre de l'Ondam pour 2006.

1. La redéfinition des périmètres

Comment les précédents, l'Ondam 2006 connaît des évolutions de périmètre provoquées par l'intégration de dépenses qui, jusqu'ici, étaient demeurées hors Ondam. Cette année, ces modifications tiennent notamment compte des remarques émises par la Cour des comptes 5 ( * ) sur « les anomalies persistantes du périmètre de l'Ondam ».

a) Les recommandations de la Cour des comptes pour crédibiliser le périmètre de l'Ondam

Dans son rapport annuel sur la sécurité sociale, la Cour des comptes rappelle qu'avant l'adoption de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, le périmètre de l'Ondam n'était défini de manière exhaustive par aucun texte législatif ou réglementaire.

C'est désormais chose faite, puisque l'annexe 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale précise le périmètre de l'Ondam et ses modifications éventuelles.

La Cour souligne aussi que certaines dépenses supportées par le régime général de l'assurance maladie ne figuraient pas dans le périmètre de l'Ondam « alors même qu'elles relèvent de la régulation des dépenses ».

A titre d'exemple, elle cite la part des cotisations sociales des professionnels de santé libéraux (1,9 milliard d'euros annuels) prise en charge par l'assurance maladie et qui peut faire l'objet de négociations conventionnelles au même titre que les honoraires, ou encore la contribution des régimes obligatoires au fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP), fixée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 à 470 millions d'euros.

Pour la construction de l'Ondam 2006, une partie des recommandations de la Cour des comptes relatives à l'intégration de certaines dépenses dans le périmètre de l'Ondam ont ainsi été retenues, conformément au tableau ci-après :

Impact des changements de périmètres sur l'ONDAM 2006

(en milliards d'euros)

Objectif 2006

Dépenses de soins de ville (à périmètre 2005)

62,4

Prise en charge des cotisations sociales des professions de santé

2,1

Exonération de ticket modérateur sur ALD 31-32

0,3

FAQSV

0,1

Aides à la télétransmission

0,1

Clause de sauvegarde

0,4

Dépenses de soins de ville (à périmètre 2006)

65,4

Dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l'activité

45,8

Autres dépenses relatives aux établissements de santé (à périmètre 2005)

17,6

FMPESPP

0,3

Autres dépenses relatives aux établissements de santé (à périmètre 2006)

17,9

Contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées (à périmètre 2005)

4,9

Apport de la CNSA

- 0,6

Contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées (à périmètre 2006)

4,3

Contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées (à périmètre 2005)

6,9

Apport de la CNSA

- 0,2

Contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées (à périmètre 2006)

6,6

Dépenses relatives aux autres modes de prises en charge (à périmètre 2005)

0,7

Transferts de l'Etat vers l'assurance maladie du financement des CAARUD

0,0

Dépenses relatives aux autres modes de prise en charge (à périmètre 2006)

0,7

Total ONDAM à périmètre 2005

138,2

Impact des modifications de périmètre

2,5

TOTAL ONDAM à périmètre 2006

140,7

Source : Annexe 7 du PLFSS 2006

b) Des problèmes persistants de définition des sous-objectifs de l'Ondam

Toujours dans son rapport de septembre, qui consacre de larges développements aux problèmes de définition des périmètres, de construction et de suivi des objectifs de dépenses, la Cour des comptes rappelle que « définies principalement selon le critère de versement des régimes obligatoires d'assurance maladie à des catégories d'établissements et de services, plusieurs lignes de l'Ondam présentent des périmètres de dépenses peu significatifs parce que très partiels ».

La Cour met en évidence les défauts de répartition des dépenses entre sous-objectifs. Plus précisément elle montre comment certaines dépenses comptabilisées au sein d'un sous-objectif sont en réalité imputables à un autre.

L'exemple de l'enveloppe des soins de ville illustre particulièrement ces difficultés puisqu'une part importante de dépenses inscrites sur cette ligne ne devrait pas relever du secteur ambulatoire mais des sous-objectifs hospitaliers. C'est le cas pour deux catégories de dépenses bien précises que sont d'une part, les prescriptions hospitalières, d'autre part, les honoraires des praticiens rattachés aux cliniques privés qui représentent 31 % du total des honoraires des spécialistes pris en charge dans le cadre de l'enveloppe « soins de ville ».

2. La ventilation des sous-objectifs de l'Ondam

En application de la nouvelle loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale du 2 août 2005, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 se caractérise par une nouvelle présentation de l'Ondam qui est désormais ventilé entre différents sous-objectifs sur lesquels le Parlement est appelé à se prononcer par un vote.

Le nombre de ces sous-objectifs ne peut être inférieur à cinq, par analogie avec les grandes catégories de dépenses de l'assurance maladie (soins de ville, hôpital public, cliniques privées, secteur médico-social, réseaux).

Après consultation des commissions parlementaires compétentes, le Gouvernement a choisi de retenir six sous-objectifs, en scindant les dépenses hospitalières en deux rubriques, suivant leurs modes de financement (tarifées à l'activité et non tarifées à l'activité).

a) Le sous-objectif « dépenses de soins de ville »

Ce sous-objectif regroupe deux grandes catégories de dépenses : d'un côté, les honoraires des professionnels de santé libéraux et de l'autre, les prestations en espèces (indemnités journalières) et les dépenses résultant des prescriptions délivrées par les professionnels de santé (médicaments et dispositifs médicaux).

Pour 2006, son montant est fixé à 65,3 milliards d'euros mais il est le produit d'une redéfinition du périmètre du sous-objectif. A périmètre constant, c'est la somme de 62,4 milliards d'euros qui doit être retenue pour procéder à une comparaison avec l'objectif de l'année précédente. Le respect de cet objectif suppose la consolidation des efforts déjà entamés en matière de gestion du risque (par exemple sur les indemnités journalières, les antibiotiques) et la réalisation de mesures d'économies (par exemple le déremboursement de certains médicaments).

C'est dans le respect de ce sous-objectif que les professions de santé libérale et l'assurance maladie pourront définir de nouveaux objectifs de maîtrise médicalisée des dépenses. C'est au sein de cette discussion conventionnelle que les partenaires pourront « prévoir les modalités selon lesquelles une partie des dépenses évitées pourra être utilisée pour valoriser la rémunération des actes. »

b) Les sous-objectifs « dépenses hospitalières »

Le projet de loi de financement la sécurité sociale pour 2006 propose deux sous-objectifs de dépenses hospitalières.

Le premier, d'un montant de 45,8 milliards d'euros, regroupe les dépenses consacrées aux établissements de santé tarifés à l'activité . Il englobe à la fois les établissements publics et les établissements privés exerçant des activités de médecine, chirurgie, obstétrique, les dépenses entraînées par l'exercice des missions d'intérêt général et d'aides à la contractualisation (Migac) et les dotations complémentaires versées aux établissements de santé anciennement financés par dotation globale. La répartition des sommes entre les activités de médecine, chirurgie et obstétrique et les missions d'intérêt général ne sera connue qu'à l'issue de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, après que le conseil de l'hospitalisation aura fait connaître son avis aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

Le second d'un montant de 17,9 milliards d'euros regroupe les dépenses de soins de suite et de réadaptation, de psychiatrie mais également les dotations budgétaires des hôpitaux locaux, des unités de soins de longue durée ainsi que la contribution de l'assurance maladie au fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés.

Consolidé, « l'Ondam hospitalier » s'élève à 63,7 milliards d'euros pour 2006, soit une progression de 3,44 % par rapport à 2005. L'annexe 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit 1,14 milliard de mesures d'économies pour les établissements de santé, essentiellement grâce à la poursuite du programme de rationalisation des achats.

c) Les sous-objectifs « dépenses médico-sociales »

Les deux sous-objectifs médico-sociaux concernent pour l'un, les dépenses consacrées aux établissements et services pour personnes âgées, pour l'autre, les dépenses des établissements et services pour personnes handicapées.

Leur montant total est fixé à 10,9 milliards d'euros (respectivement 4,3 milliards et 6,6 milliards d'euros). Cette forte progression des dépenses médico-sociales s'explique par le développement de l'offre de structures assurant une prise en charge sanitaire.

Le plan vieillissement et solidarité a prévu, sur la période 2004-2007, la poursuite de la médicalisation des 8.000 établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, la création de 10.000 places nouvelles en établissements, de 17.000 places de services de soins infirmiers à domicile supplémentaires, de 8.500 places supplémentaires d'accueil de jour et de 4.500 places supplémentaires d'hébergement temporaire.

Le plan adultes handicapés prévoit, sur la période 2005-2007, la création de 6.000 places de services de soins infirmiers à domicile et de services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés, de 7.900 places en maisons d'accueil spécialisé et foyers d'accueil médicalisé.

Le plan enfance inadaptée prévoit la création de 3.750 places en service d'éducation spéciale et de soins à domicile, 540 places en établissements pour polyhandicapés, 750 places en établissements pour autistes et 360 places d'instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques.

d) Le sous-objectif « dépenses relatives aux autres modes de prise en charge »

Ce sous-objectif, dont le montant est fixé à 700 millions d'euros, regroupe la dotation nationale en faveur des réseaux, des soins pour les ressortissants français à l'étranger et des dépenses médico-sociales non déléguées à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) tels que les dépenses de centres de soins spécialisés pour toxicomanes, des centres de cure en alcoologie et des appartements de coordination thérapeutique. En 2006, le champ de ces dépenses sera élargi aux centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (CAARUD), pour lesquels l'article 33 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 crée un objectif spécifique.

La création de cet objectif peut être source de confusion. Il convient de bien distinguer les sous-objectifs de l'Ondam, prévus par la loi organique relative au lois de financement de la sécurité sociale et d'autres objectifs prévus par le code de la sécurité sociale et dans la filiation desquels s'inscrit le nouvel objectif prévu par l'article 33. Il existe ainsi deux objectifs hospitaliers prévus aux articles L. 162-22-9, qui définit un objectif de dépenses d'assurance maladie commun aux activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologique, dit ODMCO, et L. 174-1-1, qui délimite un objectif de dépenses d'assurance maladie, ou Ondam, constitué des activités suivantes : hôpitaux locaux, soins de suite et réadaptation, activités psychiatriques. Afin d'éviter les confusions, il serait opportun de ne plus parler dans ces derniers cas « d'objectifs » mais plutôt « d'agrégats comptables ».

B. UN CADRAGE PLURIANNUEL PARTICULIÈREMENT RIGOUREUX

Dans le cadre de ses obligations européennes, la France présente aux institutions communautaires un programme pluriannuel de maîtrise de ses comptes publics.

Les finances sociales dans leur ensemble, et la loi de financement en particulier, ne peuvent ignorer ce qui constitue des engagements forts du gouvernement français à l'endroit de ses partenaires européens.

La nouvelle loi organique a été l'occasion de prévoir la création de documents annexés au projet de loi de financement de la sécurité sociale. L'un d'entre eux présente une mise en perspective quadriennale des comptes des organismes sociaux, soumise à l'approbation du Parlement.

Elle figure à l'annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, intitulée « rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie pour les quatre années à venir. »

1. Le retour à l'équilibre est prévu pour 2009

Le rapport annexé présente le cadrage macro-économique sur lequel repose ce cadrage pluriannuel. Le ministère chargé de la sécurité sociale a choisi de retenir un scénario intermédiaire entre les deux versions présentées dans le rapport économique et financier annexé au projet de loi de finances pour 2006.

Hypothèses d'évolution
moyennes sur la période 2007-2009

PIB volume

2,60%

Masse salariale du secteur privé

4,45 %

ONDAM

2,20 %

Inflation hors tabac

1,80 %

Source : annexe B du PLFSS 2006

L'examen des hypothèses retenues fait apparaître à la fois une rigueur exemplaire et un certain volontarisme : la masse salariale devrait connaître une progression dynamique, + 4,45% en moyenne, et l'Ondam une croissance maîtrisée, + 2,2%.

Il convient de rappeler que la progression de la masse salariale conditionne largement l'évolution des recettes de la sécurité sociale : une variation d'un point de la croissance de cette masse salariale se traduit par une variation du solde de la branche maladie du régime général d'un milliard d'euros environ.

Or, la croissance de la masse salariale a été particulièrement faible en 2003 (1,7 %), assez médiocre en 2004 (2,6 %) et devrait s'établir aux alentours de 3,2 % en 2005. Son taux de progression retenu pour la période 2007-2009 est égal ou supérieur, selon les analyses proposées par le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2004, au taux moyen de progression de la masse salariale observé sur longue période.

Le taux de croissance de l'Ondam pour les années à venir est fixé à 2,2 %, c'est-à-dire une réduction d'un point de la progression de l'Ondam par rapport au taux exécuté en 2005 et une progression divisée par 2,5 par rapport à l'évolution constatée entre 1999 et 2004. Atteindre cet objectif suppose d'entreprendre une action structurelle pour inscrire les modifications de comportements des acteurs dans la durée et qui nécessite une optimisation des dépenses hospitalières et une meilleure articulation entre la médecine de ville et l'hôpital.

« Sous ces hypothèses », précise le rapport annexé, « le solde global du régime général et de l'ensemble des régimes de base se redresserait régulièrement sur la période 2006-2009 ».

Prévision de recettes et de dépenses sur la période 2006-2009
pour la branche maladie
Ensemble des régimes obligatoires de base

(en millions d'euros)

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Produits

133,4

140,3

146,4

151,5

157,3

163,3

Dépenses

145,0

149,7

153,4

156,1

160,0

163,8

Solde

- 11,7

- 9,4

- 7,0

- 4,6

- 2,8

- 0,5

Source : annexe B du PLFSS 2006

Le retour à l'équilibre des comptes de la branche maladie n'est donc plus envisagé que pour 2009.

2. Comment financer les déficits à venir ?

Le non-retour à l'équilibre financier de l'assurance maladie dès 2007 et la persistance d'une situation financière négative jusqu'en 2009 posent d'ores et déjà la question du financement d'un déficit évalué, par les pouvoirs publics, à 7,9 milliards d'euros 6 ( * ) .

La solution retenue par les différents gouvernements depuis 1996, qui consistait à transférer ces déficits à la Cades, n'est plus envisageable en l'état.

En effet, les dispositions de l'article 20 de la nouvelle loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale interdisent désormais de transférer de nouveaux déficits à la Cades sans l'octroi des ressources supplémentaires lui permettant d'y faire face.

Dans sa décision 7 ( * ) , le Conseil constitutionnel a confirmé l'élévation au niveau organique de cette disposition prévoyant que « tout nouveau transfert de charge à la caisse d'amortissement de la dette sociale devra être accompagné d'une augmentation des recettes de la caisse permettant de ne pas accroître la durée de la dette sociale ». A l'avenir, le Gouvernement et le Parlement devront donc, lorsqu'ils exprimeront la volonté de lui confier le refinancement des déficits sociaux, lui octroyer les ressources nécessaires pour compenser l'alourdissement de sa charge.

Cette situation impose une contrainte financière supplémentaire à l'ensemble des acteurs du système de santé qui devront consacrer une part des recettes de la branche au financement de ce déficit annoncé.

Elle fait apparaître, avec plus d'acuité encore, l'impérieuse nécessité d'infléchir durablement les dépenses d'assurance maladie, ce qui suppose, d'abord, une modification profonde et durable de tous les comportements.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

A. AUDITION DE M. FRÉDÉRIC VAN ROEKEGHEM, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'UNION NATIONALE DES CAISSES D'ASSURANCE MALADIE (UNCAM) ET DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAM)

Réunie le mercredi 12 octobre 2005, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission, dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 , a procédé à l' audition de M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) et de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAM), sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

M. Frédéric Van Roekeghem a souhaité attirer l'attention de la commission sur le décalage existant entre la perception plutôt positive que les acteurs conventionnels peuvent avoir des premiers résultats de la maîtrise médicalisée et les analyses diffusées dans les médias à l'occasion de la parution du rapport annuel de la Cour des comptes consacré à la sécurité sociale.

Il a indiqué que la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAM) se mobilise pour la mise en oeuvre de la réforme et individualise ses actions en direction des assurés. A titre d'exemple, il a fait état d'une action engagée à l'égard de 300.000 assurés souffrant d'une affection de longue durée (ALD), auxquels l'assurance maladie a adressé un courrier personnalisé pour les sensibiliser à la question des médicaments génériques. 30 % de ces assurés ont d'ores et déjà modifié leur comportement, ce qui prouve qu'il existe un potentiel d'évolution des comportements. Il a estimé que le développement de programmes quantifiés et précis nécessite de disposer de temps avant de pouvoir en recueillir les résultats.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers et l'assurance maladie , a rappelé que le rapport de la Cour des comptes se consacre à l'analyse de la situation conventionnelle entre 1998 et 2004 et ne préjuge pas des résultats qui pourraient être obtenus par la nouvelle convention. Il a ensuite souhaité connaître l'appréciation que le directeur général de l'Uncam porte sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 , et plus particulièrement sur le cadrage pluriannuel des dépenses.

Il s'est également interrogé sur les réponses que la négociation conventionnelle est susceptible d'apporter aux problèmes rencontrés par certaines professions de santé, et notamment les chirurgiens libéraux.

M. Frédéric Van Roekeghem a observé que la commission des comptes de la sécurité sociale, dans son rapport de septembre 2005, considère que l'Ondam 2006 sera respecté. Ce résultat encourageant est dû pour partie à la décélération des dépenses de soins de ville (- 650 millions d'euros) ; la maîtrise médicalisée conventionnelle y participe en réalisant environ 600 millions d'économies. Cette situation positive permet de démontrer que les revalorisations financières accordées aux médecins n'entraînent pas un déficit supplémentaire des comptes sociaux.

Il a souligné que contrairement à la pratique antérieure, pratique d'ailleurs critiquée dans le rapport de la Cour des comptes, les accords conventionnels signés en 2005 ont été conclus autour d'un petit nombre d'objectifs et que, pour la première fois, les médecins se sont engagés sur des objectifs quantifiés.

M. Frédéric Van Roekeghem a ensuite estimé que les objectifs financiers du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 et le cadrage pluriannuel des dépenses qui les accompagne sont ambitieux. Ainsi, au sein de l'Ondam pour 2006, le sous-objectif de dépenses de soins de ville voit son taux de progression fixé à 3,2 %. Le respect de cet objectif nécessitera des décisions de gestion d'une grande fermeté, mais devrait permettre de répondre aux demandes de revalorisations financières exprimées par les professions de santé autres que les médecins. Globalement, des mesures d'accompagnement seront nécessaires pour respecter les enveloppes financières prévues par la loi. A ce titre, il a jugé que les efforts devront être répartis équitablement entre les différents acteurs du système de santé, notamment grâce à une meilleure coordination entre la médecine de ville et l'hôpital.

Abordant la question des relations entre l'assurance maladie et les professionnels de santé, il a indiqué que le Conseil de l'Uncam a arrêté des orientations indispensables à l'ouverture des négociations conventionnelles avec les transporteurs sanitaires, les masseurs kinésithérapeutes, les chirurgiens-dentistes, les orthophonistes-orthoptistes, les sages-femmes et les infirmières. Des contacts ont été pris avec l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (Unocam) afin de l'informer des négociations conventionnelles à venir. Enfin, il a souligné que la question de la démographie médicale et de l'implantation des professionnels de santé sera abordée à l'occasion de ces négociations.

M. Frédéric Van Roekeghem a souligné que les discussions conventionnelles sont également l'occasion, grâce à l'instauration de la nouvelle classification commune des actes médicaux (CCAM), d'apporter une première réponse aux demandes de revalorisations tarifaires exprimées par les chirurgiens pratiquant en secteur 1 (tarifs opposables).

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers et l'assurance maladie , a voulu savoir si l'assurance maladie dispose de tous les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs fixés par la réforme du 13 août 2004. Il a également voulu connaître l'impact des consultations externes hospitalières sur les comptes de l'assurance maladie et les moyens d'étendre à ces actes les principes de la maîtrise médicalisée.

M. Frédéric Van Roekeghem a indiqué que le coût financier de ces actes s'élève à environ 6 milliards d'euros en 2004, les données disponibles faisant apparaître une progression rapide de ces dépenses (+ 11 % en 2004 par rapport à 2003).

Il a précisé que l'assurance maladie ne dispose pas des outils nécessaires pour évaluer et suivre ces consultations. Il a considéré que, seule, l'individualisation des prescriptions, et donc l'identification des médecins hospitaliers, est susceptible de permettre une action appropriée. Il a fait part de son souhait d'engager un dialogue entre l'assurance maladie et les médecins hospitaliers.

M. Gilbert Barbier a souligné les difficultés rencontrées par les assurés sociaux, comme par les médecins, pour apprécier et comprendre les nouvelles règles de tarification des actes et consultations. Pour illustrer son propos, il a cité plusieurs exemples démontrant la complexité de la grille tarifaire et s'est soucié des répercussions qu'elle peut avoir sur la prise en charge des assurés sociaux.

M. André Lardeux s'est interrogé sur les limites de la maîtrise médicalisée des dépenses et sur la nécessité éventuelle de recourir dans certains cas à la maîtrise comptable. Il a considéré indispensable la redéfinition du panier des biens et services remboursables et a voulu connaître les raisons des disparités régionales observées en matière de comportements des assurés au regard des dépenses de santé.

Mme Marie-Thérèse Hermange a souhaité connaître les modalités selon lesquelles l'assurance maladie engagera des négociations avec les établissements de santé, ainsi que les moyens dont la CNAM dispose pour favoriser et faciliter le développement des réseaux de soins.

M. Dominique Leclerc s'est félicité de l'existence des nouveaux protocoles tripartites mis en oeuvre pour la prise en charge des assurés sociaux souffrant d'une affection de longue durée (ALD). Il a souhaité connaître les conditions de prise en charge des médicaments reconnus comme disposant d'un service médical rendu insuffisant pour les patients pris en charge dans le cadre d'une ALD. Il a rappelé que les prescriptions effectuées dans le cadre des consultations externes hospitalières sont imputées dans le sous-objectif de dépenses de soins de ville, et non dans celui consacré aux dépenses hospitalières.

M. François Autain a jugé que la réduction du déficit de l'assurance maladie constaté en 2005 est consécutive à l'augmentation des recettes prévues par la loi du 13 août 2004. Il a considéré que cette situation signe l'échec de la maîtrise médicalisée. Il a estimé que la Haute Autorité de santé n'est pas en mesure de publier les référentiels médicaux nécessaires dans les délais qui lui sont impartis. Il a voulu connaître le montant des dépenses imputables aux fraudes, qu'il estime limitées, aux abus et gaspillages liés à des consultations ou aux prescriptions inutiles. Enfin, il s'est enquis de l'existence d'une évaluation globale du dispositif conventionnel dit du médecin référent.

M. Guy Fischer s'est dit préoccupé par l'évolution des comptes de la sécurité sociale et notamment par le fait que, pour la première fois, l'ensemble des branches de la sécurité sociale (assurance maladie, accidents du travail-maladies professionnelles, famille, vieillesse) présentent un déficit. Il s'est interrogé sur le rôle de la Haute Autorité de santé et s'est inquiété des risques que présente le recours à l'expertise scientifique pour redéfinir le panier des biens et services remboursables.

Mme Gisèle Printz a voulu connaître les modalités retenues pour engager une négociation conventionnelle sur la question de l'installation des professionnels de santé.

M. Frédéric Van Roekeghem a rappelé que la loi du 13 août 2004 dispose que le conseil de l'UNCAM se prononce sur la politique hospitalière. L'Uncam fera connaître sa position dans le courant du quatrième trimestre 2005. Il a considéré que la mise en oeuvre de la tarification à l'activité a un effet positif sur la gestion des établissements de santé, mais qu'elle peut aussi avoir un effet inflationniste en incitant les hôpitaux à multiplier les actes.

M. Frédéric Van Roekeghem a considéré que la CNAM ne dispose que de données partielles sur l'hôpital, contrairement aux informations plus complètes qu'elle détient sur les autres acteurs du système de santé. Pour remédier à cette situation, l'assurance maladie va désormais exploiter les informations du programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) afin de développer une politique de contrôle des établissements de santé. Ce contrôle sera assis à la fois sur les informations transmises par l'intermédiaire du PMSI, qui retracent l'ensemble de l'activité des établissements de santé, et sur les référentiels de soins établis sous l'égide de la Haute Autorité de santé.

Il a rappelé que le respect du protocole de soins des patients souffrant d'une affection de longue durée est un facteur important de réussite de la maîtrise médicalisée des dépenses et que, dans ce domaine aussi, le rôle de la Haute Autorité de santé est déterminant.

Il a indiqué que la mise en oeuvre du médecin traitant permettra de développer une véritable politique de prévention auprès des assurés.

Il a estimé que la réforme est extrêmement exigeante et qu'elle nécessite, pour réussir, que le système de soins dégage des gains de productivité.

Il a précisé que la question des disparités régionales de comportements des assurés au regard des dépenses de santé n'est pas expliquée de façon globale.

Mme Marie-Thérèse Hermange a souligné que les disparités régionales et les effets de contournements sont antérieurs à la réforme.

M. Frédéric Van Roekeghem a indiqué que le dispositif conventionnel dit du médecin référent reposait sur une obligation d'abonnement et entraînait des dépenses de santé plus élevées. Il a observé que la généralisation de ce dispositif en lieu et place de celui du médecin traitant aurait coûté plus de 1,25 milliard d'euros à l'assurance maladie.

Il a conclu en indiquant que la faible présence médicale dans les territoires ruraux doit être prise en compte dans les négociations conventionnelles et qu'il convient d'engager une démarche pédagogique en direction des professionnels de santé afin de les sensibiliser à cette question.

B. AUDITION DE M. MICHEL RÉGEREAU, PRÉSIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA CAISSE NATIONALE DE L'ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAM) ET PRÉSIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION DE L'UNION NATIONALE DES CAISSES D'ASSURANCE MALADIE (UNCAM)

Réunie le mercredi 19 octobre 2005, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission, dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 , a procédé à l' audition de M. Michel Régereau, président du conseil d'administration de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAM) et président du conseil d'administration de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) .

M. Michel Régereau a rappelé que le conseil d'administration de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAM), comme celui de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam), ont émis un avis défavorable après examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Dans son avis motivé, le conseil d'administration de la CNAM a considéré que le cadrage macro-économique du texte, ainsi que les prévisions de recettes et de dépenses, ont conduit à l'établissement d'un objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) qui ne répond ni aux préoccupations exprimées par le conseil, ni à l'esprit de la réforme qui repose sur la maîtrise médicalisée des dépenses.

M. Michel Régereau a jugé que le projet fait la part belle à des mesures de réductions de dépenses et ne fournit que peu d'informations utiles sur des questions aussi importantes que le financement du dossier médical personnel ou l'évaluation des pratiques professionnelles des médecins.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a voulu connaître les effets des modifications proposées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 sur les missions et le fonctionnement du fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) et s'est interrogé sur les dispositions de l'article 44 qui prévoit la transmission, par l'Uncam, de propositions relatives à l'évolution des produits et des charges des trois caisses d'assurance maladie.

M. Nicolas About, président , s'est interrogé sur les aides financières que le fonds d'aide à la qualité de soins de ville (FAQSV) est susceptible d'apporter aux maisons médicales de garde.

M. Michel Régereau a rappelé que la mission première du FAQSV est de permettre le déroulement d'expérimentations et de les conduire au niveau régional. Le budget du fonds est réparti entre une dotation nationale (20 % du budget) et des dotations régionales (80 %). En 2005, le FAQSV a accordé 15 millions d'euros aux expérimentations relatives à la mise en oeuvre du dossier médical personnel (DMP) et 90 millions d'euros y seront consacrés en 2006. Il a regretté que cette situation se traduise par une baisse des financements mis à la disposition des régions et a constaté que cette évolution modifie les missions du FAQSV qui ne finance plus seulement une expérimentation mais doit prendre en charge le déploiement d'un nouveau dispositif.

Il a estimé qu'une solution doit être recherchée pour éviter de faire peser sur le FAQSV la prise en charge des frais de fonctionnement courant de quelque dispositif que ce soit et a proposé la mise en oeuvre d'une architecture à double niveau, prévoyant l'intervention du FAQSV pour les expérimentations, puis celle d'une autre structure lorsque la mesure expérimentée est pérennisée. A titre d'exemple, le fonds de réorientation et de modernisation de la médecine libérale (Formmel) pourrait être sollicité pour prendre en charge les frais de fonctionnement des dispositifs d'évaluation des pratiques professionnelles des médecins.

Il a observé qu'une question du même ordre se pose au sortir de la période d'expérimentations relatives aux maisons médicales de garde ainsi que pour le financement de la permanence des soins. Il a rappelé que les modalités de financement de la permanence des soins sont désormais définies par la convention régissant les relations entre les médecins et l'assurance maladie : en conséquence, le FAQSV ne prend plus en charge la rémunération des médecins de garde au sein d'une maison médicale. Néanmoins, des solutions pragmatiques sont recherchées au niveau local et il n'est pas rare que des frais de gestion ou de rémunération d'autres professionnels de santé que les médecins soient financés sur les enveloppes régionales du FAQSV.

Par ailleurs, M. Michel Régereau a jugé que la rédaction actuelle de l'article 44 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 n'est pas totalement satisfaisante et s'est prononcé en faveur d'une rédaction qui laisse à chaque caisse (Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, Caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes) la liberté de rédiger ses propositions, à charge pour le conseil de l'Uncam de les consolider et de les transmettre au ministre chargé de la sécurité sociale et au Parlement.

M. François Autain s'est interrogé sur la possibilité pour l'Etat de verser un surcroît de cotisations à la sécurité sociale au titre des charges patronales. Il a rappelé qu'il existe un différentiel de charges entre celles dues par les employeurs privés et celles versées par l'Etat et a proposé l'instauration d'un plan de rattrapage pluriannuel.

Il a estimé que la réforme du financement des établissements de santé publics et privés rencontre de nombreuses difficultés de mise en oeuvre ainsi que l'illustre la répartition des budgets hospitaliers pour 2005 qui a eu lieu avec plusieurs semaines de retard. Il a observé que des pays comme les Etats-Unis ou le Royaume-Uni, qui ont recouru au financement à l'activité plus de dix ans avant la France, sont en train de faire machine arrière. Il en a conclu que la réforme est mal engagée et doit être réexaminée.

M. François Autain a également voulu connaître les résultats financiers de la maîtrise médicalisée conventionnelle, c'est-à-dire les objectifs chiffrés fixés par la convention régissant les relations entre les médecins et l'assurance maladie.

M. Michel Régereau a rappelé que la CNAM a émis des propositions pour réduire le différentiel de charges sociales existant entre les secteurs public et privé et a souligné qu'aucune suite ne leur a été donnée. Il a précisé que la CNAM est en train de redéfinir sa politique hospitalière et souhaite s'investir davantage dans ce secteur. Il s'est dit convaincu que le financement par la tarification à l'activité (T2A) ne peut pas être utilisé pour pratiquer une maîtrise comptable de l'activité hospitalière, par exemple en réduisant en cours d'année les tarifs des actes les plus pratiqués. Il a estimé que la T2A est un outil de convergence entre établissements d'une même catégorie avant d'être un instrument de convergence entre les établissements publics et privés.

Abordant la question de la maîtrise médicalisée conventionnelle, il a fait part de ses doutes sur la manière dont les syndicats signataires mobilisent leurs adhérents et l'ensemble de la profession, pour respecter les objectifs. Il a souhaité que la prochaine convention d'objectifs et de gestion conclue entre l'Etat et l'assurance maladie autorise le recrutement de nouveaux délégués chargés d'informer les médecins sur les buts de la réforme. Il a rappelé que la maîtrise médicalisée ne se limite pas aux prescriptions médicales mais s'étend à d'autres facettes de la prise en charge des assurés comme les transports sanitaires.

M. Guy Fischer a estimé que la réforme de l'assurance maladie se traduit par un accroissement de la charge financière pesant sur les assurés sociaux. Comme le montrent les exemples des déremboursements de médicaments et l'instauration d'un forfait de 18 euros pour les actes chirurgicaux supérieurs à 90 euros, il s'est interrogé sur le rôle de la Haute Autorité de santé dont les travaux se traduisent par des dépenses supplémentaires pour les assurés.

M. Alain Milon s'est interrogé, d'une part, sur les conditions de l'adossement du régime général des marins géré par la Caisse générale de prévoyance de l'établissement national des Invalides de la marine au régime général d'assurance maladie que prévoit l'article 42 du projet de loi de finances pour 2006, d'autre part, sur les modalités de la réforme du régime de l'avantage social vieillesse des professionnels de santé proposé par l'article 47 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, s'est déclaré très préoccupé par la crise de la démographie médicale. Il a rappelé que l'accès à la profession médicale suppose de s'astreindre à des études longues et difficiles, à des contraintes de gardes hospitalières exigeantes et faiblement rémunérées, surtout si on les rapporte au niveau de responsabilité qui pèse sur les médecins. Il est parfaitement légitime que cet état de fait soit pris en compte dans la valorisation financière de l'activité des médecins au nom de l'équité et pour maintenir l'attractivité de cette profession et éviter que ne se perpétue la pénurie des vocations que l'on constate déjà.

M. Nicolas About , président, a fait observer que la crise de la démographie médicale frappe tous les secteurs du système de santé, qu'il s'agisse de la médecine ambulatoire et hospitalière ou de la recherche pharmaceutique.

M. Paul Blanc a également fait part de ses inquiétudes sur la crise de la démographie médicale. Il a souhaité que l'on puisse également prendre en compte le phénomène de la féminisation croissante de la profession, qui constitue un point très positif pour la mixité du monde médical, mais qui pose des problèmes particuliers en termes de congés de maternité qu'il convient d'intégrer dans la réflexion des pouvoirs publics sur l'avenir de la profession médicale.

M. Michel Régereau a souhaité relativiser la crise de la démographie médicale au regard du fait qu'il n'y a jamais eu autant de médecins en exercice qu'aujourd'hui. Il est convenu que la réflexion sur l'activité médicale doit prendre en compte les exigences des patients et la pénibilité de la permanence des soins. Il a toutefois considéré qu'il serait possible de mieux rationaliser la dépense en procédant à certaines délégations de tâches entre les différents personnels médicaux.

Il s'est déclaré favorable, sur le principe, à l'adossement de régimes particuliers comme celui des marins ou des agriculteurs, au régime général d'assurance maladie dès lors qu'il est avéré qu'il s'effectue dans des conditions équitables pour l'ensemble des assurés sociaux et que chacun y contribue bien à proportion égale de ses revenus.

Enfin, il a estimé que la participation de l'assurance maladie au financement de l'avantage social vieillesse est une contrepartie indispensable pour inciter les médecins à respecter les tarifs du secteur un (tarifs opposables).

M. Michel Régereau a jugé que, dans le contexte actuel, c'est-à-dire en présence de nombreuses demandes d'ouverture d'un secteur optionnel (tarifs libres), il faut maintenir cette contribution au financement de ce système de retraite complémentaire.

M. Nicolas About, président, s'est interrogé sur les moyens dont dispose le CNAM pour sanctionner les dépassements tarifaires illégaux.

M. Michel Régereau a estimé que, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 13 août 2004, la CNAM dispose des outils nécessaires pour sanctionner les abus et les gaspillages, qu'ils soient du fait des médecins ou des assurés.

C. AUDITION DE M. DENIS PIVETEAU, DIRECTEUR DE LA CAISSE NATIONALE DE SOLIDARITÉ POUR L'AUTONOMIE (CNSA)

Réunie le mercredi 26 octobre 2005 , sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission, dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 , a procédé à l'audition de M. Denis Piveteau, directeur de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

M. Denis Piveteau, directeur , a indiqué que le conseil de la Caisse a approuvé les comptes lors de sa réunion du 11 octobre 2005. La nouveauté des comptes prévisionnels de la caisse pour 2006 réside dans le fait qu'ils font apparaître, en ressources, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) pour les personnes âgées et handicapées, pour un montant de 11 milliards d'euros. Cet Ondam médico-social, complété par une contribution de la CNSA alimentée par le produit de la contribution de solidarité pour l'autonomie, permet de financer les établissements pour personnes âgées et handicapées, dépenses retracées en charges dans les comptes de la caisse.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres généraux et l'assurance maladie , a souhaité connaître avec précision les différentes charges de la CNSA, ainsi que la répartition du financement des créations de places en établissement entre la caisse et l'assurance maladie. Il s'est enfin interrogé sur l'effort consenti par la CNSA en 2006 pour le financement de la nouvelle prestation de compensation du handicap.

M. Denis Piveteau, directeur , a détaillé ainsi les dépenses de la CNSA : les charges de financement des établissements médico-sociaux s'élèvent à 11,3 milliards d'euros ; la contribution de la caisse au financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) se monte à 1,4 milliard d'euros, ce qui couvre 37 % des dépenses des départements à ce titre ; le financement de la nouvelle prestation de compensation du handicap est prévu à hauteur de 500 millions d'euros, les départements recevant en outre une contribution de la caisse de 50 millions d'euros pour le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées ; la CNSA rembourse enfin à la branche famille la nouvelle majoration d'allocation d'éducation spéciale (AES), pour un montant de 15 millions d'euros.

Les recettes de la caisse proviennent, pour 2 milliards d'euros, du produit de la contribution de solidarité pour l'autonomie et, pour 1 milliard d'euros, de la contribution sociale généralisée (CSG). Ces recettes sont, pour les deux tiers, reversées aux départements et, pour le reste, elles abondent l'Ondam, majorant d'un dixième les ressources mises à disposition par l'assurance maladie. La CNSA financera également des actions innovantes en matière de modernisation des établissements et de formation des professionnels de l'aide à domicile, pour un montant de 50 millions d'euros et elle réserve une enveloppe de 20 millions d'euros aux dépenses d'animation, d'études et de statistiques.

Pour ce qui concerne les créations de places en établissement, M. Denis Piveteau a d'abord souligné que, dès lors que l'ensemble des dépenses est désormais retracé dans les comptes de la CNSA, il est difficile de distinguer l'origine des financements. Toutefois les créations de places pour personnes handicapées entraînent une augmentation des dépenses de 400 millions d'euros, l'effort supplémentaire de la CNSA s'élevant à 77 millions d'euros. Dans le domaine des personnes âgées, les mesures nouvelles s'élèveront à 560 millions d'euros, la Caisse en finançant environ la moitié. Il a reconnu qu'en 2005, les crédits apportés par la CNSA avaient permis à l'assurance maladie de faire une pause dans la progression de l'Ondam médico-social, mais il a insisté sur le fait que cet effet de substitution n'aura plus cours en 2006 : l'effort de la CNSA permettra de porter de + 11 % à + 13,7 % le taux de croissance des dépenses médico-sociales en faveur des personnes âgées.

M. Paul Blanc a voulu savoir si le retrait des unités de soins de longue durée (USLD) du champ de la CNSA, envisagé par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, constitue un simple ajustement technique de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées ou un vrai recul par rapport à celle-ci. Il s'est interrogé sur la faisabilité d'un référentiel permettant de distinguer, parmi les personnes accueillies en USLD, celles qui relèvent d'une prise en charge sanitaire et celles qui relèvent d'un accompagnement médico-social, rappelant que les travaux sur ce sujet durent depuis plus de huit ans.

Il a également souhaité connaître l'état d'avancement des négociations de la CNSA avec l'Etat sur sa future convention d'objectifs et de gestion. Il a enfin voulu faire le point sur la conclusion entre la CNSA et les départements de leurs conventions pluriannuelles de financement.

M. Denis Piveteau a indiqué que la convention d'objectifs et de gestion de la CNSA devrait être signée avant la fin de l'année 2005. L'élaboration de ce document a été à la fois complexe et passionnante, du fait du rôle original d'animation, de pilotage stratégique et d'évaluation de la caisse ; elle s'est trouvée en outre facilitée par le fait que la Caisse est une structure nouvellement créée et que l'on ne se heurte pas à des traditions administratives anciennes pour mettre en place ces missions.

S'agissant des relations avec les départements, il a rappelé que les contributions de la caisse au titre de l'APA et de la prestation de compensation du handicap ne supposent en aucune manière un conventionnement préalable des départements avec la Caisse. Ce conventionnement n'est prévu que dans le cadre de la participation de la CNSA à l'installation et au fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées et il a pour objectif de définir contractuellement des objectifs en termes de qualité de service. Il a insisté sur la volonté de la caisse de ne pas céder à la précipitation pour la conclusion de ces conventions, indiquant qu'un délai de six mois après le démarrage des différents dispositifs paraît raisonnable. Dans l'attente de ces conventions définitives et pour ne pas retarder d'autant la mise à disposition de ces concours aux départements, la CNSA leur proposera des conventions provisoires, sur un modèle simplifié.

Abordant le sujet des USLD, M. Denis Piveteau a d'abord rappelé la spécificité de ces établissements qui, tout en ayant un statut sanitaire, relèvent d'une tarification médico-sociale : en conséquence, les patients acquittent non pas un forfait journalier, sur le modèle hospitalier, mais un prix de journée, plus onéreux. Dans ces conditions, il est logique que les crédits relatifs à leur financement soient intégrés à l'Ondam médico-social et donc gérés par la CNSA. Il a toutefois reconnu que la réforme proposée par la loi du 11 février 2005 reste au milieu du gué, dès lors que l'autorité de tarification demeure inchangée. Il a également admis que certaines des personnes accueillies en USLD relèvent d'une prise en charge sanitaire, sans qu'il soit possible de déterminer avec précision la proportion qu'elles représentent. Il en a conclu que le retrait des USLD de la compétence de la CNSA constitue une mesure conservatoire, dans l'attente d'une réforme plus profonde de ces établissements les intégrant dans le champ des établissements médico-sociaux. Une telle transformation constituerait un progrès pour les patients, le nombre de places étant susceptible d'être multiplié par deux, voire deux et demi, compte tenu du rapport entre le prix d'une place d'USLD et celui d'un lit en maison de retraite médicalisée.

M. Denis Piveteau a enfin mis en garde contre la quête de l'outil parfait pour assurer le partage entre patients relevant d'une prise en charge sanitaire et personnes nécessitant un accompagnement médico-social. Il a estimé que la définition de grandes masses, au niveau régional, est suffisante pour définir l'ordre de grandeur des dépenses à affecter à l'Ondam médico-social.

M. Bernard Cazeau a d'abord précisé que les départements sont réticents sur la question des USLD, de peur de se voir transférer subrepticement le financement de lits sanitaires. Il a ensuite expliqué que si les représentants des conseils généraux au conseil de la CNSA en ont approuvé le budget, c'est uniquement dans le souci d'avoir les moyens d'assurer un démarrage des maisons départementales des personnes handicapées au 1 er janvier 2006.

Il a également estimé que la question du handicap ne fait pas l'objet d'une réelle décentralisation, l'obligation de passer par la structure du groupement d'intérêt public (Gip) mettant finalement les départements sur le même plan que l'Etat, la sécurité sociale et les associations de personnes handicapées. Le fait que les présidents de conseils généraux soient présidents de droit des Gip n'est pas une garantie d'autonomie suffisante, dans la mesure où, hors le cas de la prestation de compensation du handicap, le département n'est pas assuré d'avoir la majorité des voix dans le processus de décision.

M. Bernard Cazeau s'est par ailleurs inquiété du poids de ces nouvelles responsabilités pour les finances départementales, notant que l'effort de l'Etat était revenu en quelques années de 50 % à 37 % du coût total de l'APA. Pour la prestation de compensation, il a indiqué que l'Etat et la CNSA prévoient une dépense de 1,5 milliard d'euros en 2006, sur la base des dépenses actuelles d'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP), soit 1 milliard d'euros complété par une contribution de la CNSA à hauteur de 0,5 milliard d'euros. Or, cette prévision de dépenses est irréaliste, à son sens, car le nombre des bénéficiaires potentiels serait de 450.000, selon une étude commandée au Cabinet Ernst & Young, contre 150.000 pour l'actuelle ACTP. Il en a conclu que les dépenses nettes des départements au titre de la prestation de compensation du handicap seraient, dès 2006, supérieures aux dépenses actuelles d'ACTP, malgré le concours de la caisse.

M. Guy Fischer a rappelé que le groupe communiste républicain et citoyen du Sénat avait voté contre la création de la CNSA. Il a fait part des inquiétudes des associations de personnes handicapées sur le contenu réel de la prestation de compensation du handicap. Dans un contexte où les départements tentent par tous les moyens de limiter la progression de leurs dépenses d'aide sociale, il a souligné leurs craintes d'un rationnement des aides.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres généraux et l'assurance maladie, s'est interrogé sur la pertinence de l'architecture institutionnelle mise en place avec la CNSA, estimant que celle-ci n'est lisible ni pour les bénéficiaires, ni pour les financeurs. Il a souhaité savoir si les 500 millions d'euros prévus au budget de la CNSA pour le financement de la prestation de compensation du handicap seront suffisants pour financer le surcoût de cette prestation par rapport à l'ACTP et si le nombre de bénéficiaires et le montant moyen versé à chacun d'entre eux avaient été évalués.

M. Denis Piveteau a souligné la difficulté à chiffrer les besoins de compensation du handicap, dans la mesure où ils étaient jusqu'à présent largement inexprimés. En outre, le nombre des bénéficiaires actuels de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ou de l'ACTP ne constitue pas non plus un indicateur suffisant du nombre de bénéficiaires potentiels de la prestation de compensation. Il a toutefois fait état d'une étude réalisée par la CNSA estimant à 250.000 le nombre de ces bénéficiaires potentiels, tout en invitant les sénateurs à prendre ce chiffre avec prudence. S'agissant des montants moyens par individu, il a expliqué une nouvelle fois que ceux-ci sont difficiles à évaluer, en l'absence des décrets fixant les plafonds, les taux et les tarifs de prise en charge. L'enjeu de ces décrets est de concilier responsabilité et amélioration réelle des situations individuelles, ce qui suppose de déterminer des tarifs permettant à la fois d'améliorer concrètement la prise en charge des besoins de compensation tout en demeurant dans l'enveloppe financière prévue.

Il a cependant insisté sur le fait que le premier enjeu immédiat de la réforme, pour les personnes handicapées, réside moins dans les montants attribués que dans la qualité de l'accueil, la simplification, la sincérité des évaluations et la rapidité des démarches.

* 1 Cf. Eco Santé OCDE, 2005. Le rapport des Français et des européens à l'ordonnance et aux médicaments.

* 2 Exactement 954  millions d'euros.

* 3 Financement de la sécurité sociale pour 2005, tome 1, équilibres financiers généraux et assurance maladie, Alain Vasselle, n° 57, 2004-2005.

* 4 Article 17 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005.

* 5 Cour des comptes, la sécurité sociale, septembre 2005.

* 6 Annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Ce rapport est approuvé, après adoption de l'article 9 du projet.

* 7 Conseil constitutionnel, décision n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005.

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