B. L'ABSENCE DE SUIVI DES PRÉCONISATIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Le gouvernement a décidé de ne prendre que partiellement en compte les préconisations faites en 2004 par le Parlement et par la Cour des comptes.
En effet, si les crédits de la présente mission ont bien été « extraits » de la mission « Engagements financiers de l'Etat », ils n'ont pas été ventilés entre différentes missions en fonction de leurs finalités.
1. Selon le gouvernement, il ne serait pas souhaitable de réunir des crédits évaluatifs et des crédits limitatifs au sein d'une même mission
Le gouvernement a justifié ce suivi partiel des préconisations du Parlement par un double argument :
- tout d'abord, le regroupement par finalité n'aurait pas été techniquement possible pour le 1 er janvier 2006 ;
- ensuite, et surtout, le gouvernement ne souhaitait pas la coexistence au sein d'une même mission de crédits limitatifs et de crédits évaluatifs.
En effet, l'article 47 de la LOLF prévoit qu'« au sens des articles 34 et 40 de la Constitution, la charge s'entend, s'agissant des amendements s'appliquant aux crédits, de la mission ». Les parlementaires, au sein d'une mission, ont donc la possibilité de proposer des augmentations de crédits , « gagées » par la diminution d'autres crédits de la même mission, ce qui en réalité correspond à de véritables « arbitrages » budgétaires. Selon le gouvernement, il convenait donc d'isoler les crédits évaluatifs des crédits limitatifs , afin d'éviter que les parlementaires ne proposent par voie d'amendement, en particulier, d'accroître les crédits limitatifs d'un programme à partir d'un programme constitué de crédits évaluatifs.
2. Un point de vue qui ne convainc pas votre commission des finances
Le point de vue défendu par le gouvernement ne convainc pas votre commission des finances.
En effet , la LOLF exigera nécessairement, lors des premières années de son application, la constitution d'une « doctrine » , non seulement de la part du Conseil constitutionnel mais aussi de la part des commissions des finances des deux assemblées parlementaires, en particulier en matière de recevabilité financière.
Par ailleurs, on peut remarquer que la seule autre mission à comporter des crédits évaluatifs, la mission « Engagements financiers de l'Etat », comprend des crédits qui ne sont pas tous évaluatifs . Deux des programmes de cette mission le programme « Charge de la dette et trésorerie de l'Etat » et le programme « Appels en garantie de l'Etat » sont constitués de crédits évaluatifs, mais les trois autres programmes de la mission le programme « Epargne », le programme « Majoration de rentes » et le programme « Versement à la Caisse nationale d'allocations familiales » sont constitués de crédits limitatifs . Certes, l'Etat a compétence liée pour ces trois derniers programmes, et il n'est donc pas maître de ses dépenses. Pour autant, à la lettre du texte, la LOLF n'empêcherait pas le Parlement d'adopter une augmentation de crédits limitatifs « gagée » par une diminution de crédits évaluatifs.
Enfin, une compensation consistant en une diminution de crédits évaluatifs pourrait difficilement être considérée comme « réelle », au sens où l'exige la jurisprudence du Conseil constitutionnel . Pour mémoire, le 98 e considérant de la décision du Conseil constitutionnel sur la LOLF 6 ( * ) indique que le deuxième alinéa de l'article 47 de la loi organique, aux termes duquel « tout amendement doit être motivé et accompagné des développement s des moyens qui le justifient », « permettra, dans le cadre des procédures d'examen de la recevabilité financière, de vérifier la réalité de la compensation ».
Pour la loi de finances pour 2007, alors que les difficultés techniques invoquées par le gouvernement pour regrouper les remboursements et dégrèvements par finalité devraient avoir été résolues, les arguments du gouvernement ne sont donc pas recevables.
* 6 Décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001.