Article 29 bis
(nouveau) (art. L. 321-4 du code de l'entrée et du
séjour des étrangers et du droit d'asile)
Document de
circulation délivré aux mineurs étrangers
Cet article est issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale.
L'article L. 321-4 du CESEDA dispose que les étrangers mineurs reçoivent, sur leur demande, un document de circulation. Ce document fait office de titre de séjour et permet, notamment, à ces mineurs de se déplacer à l'étranger 90 ( * ) .
L'article L. 324-1 du CESEDA énumère de façon exhaustive l'ensemble des articles et paragraphes où il est fait mention d'étrangers mineurs pouvant bénéficier d'une carte de séjour.
En réalité, ces mentions sont des abus de langage. Les mineurs ne peuvent pas, à proprement parler, détenir un titre de séjour. Ils bénéficient en revanche d'un droit au séjour. Lorsqu'ils atteignent leur majorité, ce droit au séjour se matérialise par la détention d'un titre de séjour.
Pour mettre fin à cette confusion, de nombreux articles du projet de loi, notamment les articles 24, 27 et 28, suppriment la référence aux étrangers mineurs lorsqu'il est question de la délivrance d'un titre de séjour.
Par coordination, le présent article tend à modifier l'article L. 321-4 du CESEDA. Il ne renvoie plus aux articles faisant référence aux étrangers mineurs, puisque celles-ci ont été supprimées par le projet de loi. A la place, il fait référence aux étrangers mineurs « dont au moins l'un des parents appartient aux catégories mentionnées aux articles... ».
Sous réserve d'un amendement de coordination, votre commission vous propose d'adopter l'article 29 bis ainsi modifié .
Article 29 ter
(nouveau) (art. L. 622-4 du code de l'entrée et du
séjour des étrangers et du droit d'asile)
Les immunités
et le délit d'aide à l'entrée et au séjour
irrégulier
Cet article a été introduit par l'Assemblée nationale à la suite d'un amendement de Mme Chantal Brunel adopté à l'unanimité des suffrages exprimés. Il a pour objet d'exclure les étrangers vivant en état de polygamie du champ des immunités contre le délit d'aide au séjour irrégulier.
L'article L. 622-4 du CESEDA en vigueur prévoit que le délit d'aide au séjour irrégulier 91 ( * ) d'un étranger ne peut donner lieu à des poursuites pénales lorsqu'il est le fait de trois catégories de personnes :
- des ascendants ou descendants de l'étranger, de leur conjoint, des frères et soeurs de l'étranger ou de leur conjoint, sauf si les époux sont séparés de corps, ont un domicile distinct ou ont été autorisés à résider séparément ;
- du conjoint de l'étranger, sauf si les époux sont séparés de corps, ont été autorisés à résider séparément ou si la communauté de vie a cessé, ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui ;
- de toute personne physique ou morale, lorsque l'acte reproché était, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l'intégrité physique de l'étranger, sauf s'il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace ou s'il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte.
Cette immunité ne concerne que le délit « d'aide au séjour irrégulier » , et non celui d'aide à l'entrée irrégulière ou à la circulation. En outre, elle n'empêche pas la poursuite de ces personnes pour complicité d'entrée et de séjour irréguliers au titre de l'article L. 621-1 du CESEDA ou pour mariage de complaisance.
Le débat sur les immunités est apparu dès 1994, à l'occasion des débats sur la loi n°94-136 du 27 décembre 1994 92 ( * ) . Le débat s'est poursuivi lors de la discussion de la loi n°96-647 du 22 juillet 1996 tendant à la répression du terrorisme. Fut alors votée, l'immunité familiale au bénéfice des ascendants et des descendants de l'étranger ainsi que du conjoint de l'étranger, sauf lorsque les époux sont séparés de corps ou autorisés à résider séparément. La loi RESEDA du 11 mai 1998 a étendu ces immunités au conjoint des descendants ou des ascendants, aux frères et soeurs et à leur conjoint, ainsi qu'à la personne qui vit notoirement en situation maritale avec l'étranger. La condition de n'être pas séparés de corps ou de n'être pas autorisés à résider séparément a été supprimée.
La loi du 26 novembre 2003 a rétabli les conditions de communauté de vie, de non séparation de corps ou de partage d'un domicile commun, à défaut desquelles les conjoints des divers membres de la famille et de l'étranger ne peuvent bénéficier de l'immunité. Les liens familiaux qui confèrent l'immunité doivent être forts et actuels.
A l'initiative d'un amendement déposé par le groupe socialiste, la loi du 26 novembre 2003 a ajouté l'immunité dite « humanitaire » pour protéger les associations venant en aide aux étrangers en situation irrégulière.
Le présent article ne modifie pas cet équilibre. Il tend uniquement à préciser que les membres de la famille (conjoint, ascendant, descendant, frère et soeur...) ne bénéficient pas de l'immunité lorsque l'étranger bénéficiaire de l'aide au séjour irrégulier vit en état de polygamie en France ou lorsque cet étranger est le conjoint d'une personne polygame résidant en France avec le premier conjoint.
Il sanctionne ainsi les étrangers qui font venir plus d'une épouse, voire un autre membre de leur famille facilitant ainsi par son aide une situation de polygamie. Selon l'exposé des motifs de l'amendement, le retrait de cette immunité familiale est compatible avec le droit européen, notamment avec les dispositions de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif à la protection de la famille. Un arrêt de la Cour européenne (décision n°19628/92 du 29 juin 1992 « Rabia Bibi c/ Royaume-Uni ») a reconnu que ces mesures de protection ne s'appliquaient pas aux étrangers polygames.
Votre commission des lois vous propose d'adopter l'article 29 ter sans modification .
* 90 Les mineurs nés en France de parents étrangers titulaires d'un titre de séjour se voient remettre un titre d'identité républicain en vertu de l'article L. 321-3 du CESEDA.
* 91 Article L. 622-1 du CESEDA : Toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d'un étranger en France sera punie d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 30.000 euros.
* 92 Voir le rapport n° 1 (Sénat 2003-2004) de notre collègue M. Jean-Patrick Courtois sur la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 - Commentaire de l'article 16 du projet de loi.