TITRE VI - DISPOSITIONS RELATIVES À LA MAÎTRISE DE L'IMMIGRATION OUTRE-MER
Si l'immigration irrégulière est un phénomène présent en métropole, il prend une ampleur tout à fait inégalée et inquiétante outre-mer .
Toutes les collectivités territoriales ultramarines ne sont cependant pas touchées de manière identique, Mayotte et la Guyane et, dans une moindre mesure, la Guadeloupe, recueillant à eux seuls la quasi-totalité de l'immigration irrégulière outre-mer.
La commission d'enquête du Sénat sur l'immigration clandestine, qui a rendu publics ses travaux le 13 avril 2006, a ainsi estimé que le nombre d'immigrés clandestins présents dans les différentes collectivités ultramarines s'élevait, selon les chiffres les plus couramment cités, à environ :
- 45.000 pour Mayotte, soit plus du quart de sa population ;
- 30.000 à 35.000 pour la Guyane, soit de 20 à 25 % de sa population ;
- au moins 5.000 pour l'ensemble de la Guadeloupe, y compris la commune de Saint-Martin, le chiffre réel étant sans doute beaucoup plus élevé ;
- 600 pour La Réunion ;
- 500 pour la Martinique 193 ( * ) .
Cette situation spécifique, sans commune mesure avec la métropole, nécessite des mesures particulières.
Ainsi que l'a relevé la commission d'enquête, l'immigration clandestine pèse fortement sur les services et équipements publics en outre-mer, tant en matière de santé et d'éducation qu'en matière d'urbanisme, avec en particulier l'explosion de l'habitat insalubre à Mayotte et en Guyane, où il a progressé respectivement de 42 % et 30 % entre 2003 et 2004.
L'ampleur de l'immigration clandestine à Mayotte et en Guyane menace même la stabilité politique et sociale de ces territoires, en exacerbant les tensions intercommunautaires. A Mayotte, en octobre 2005, une manifestation d'étrangers en situation irrégulière, essentiellement des Comoriens, a ainsi suscité en retour des manifestations de la population mahoraise, qui ont fait craindre à l'autorité préfectorale le déclenchement d'affrontements intercommunautaires 194 ( * ) .
Les trois chapitres du présent titre visent à créer des dispositifs dérogatoires adaptés à la situation de chacune des collectivités concernées en matière d'entrée et de séjour des étrangers, d'état civil et de droit du travail.
La possibilité de prévoir des règles spécifiques applicables dans les collectivités territoriales d'outre-mer est en effet ouverte tant par l'article 73 que par l'article 74 de la Constitution. Toutefois, la marge d'adaptation est plus réduite, dans les départements d'outre-mer -puisqu'elles doivent y être justifiées par les « caractéristiques et contraintes particulières » de ces territoires- que dans les collectivités d'outre-mer.
* 193 Rapport n° 300 (Sénat, 2005-2006), tome 1, pp. 45 et 46.
* 194 Op. cit., p. 69.