II. LE DISPOSITIF PRÉVU PAR L'ARTICLE 30 DU PRÉSENT PLF
A. UN FINANCEMENT DE L'AIDE À LA LUTTE CONTRE LA DÉFORESTATION PAR LE PRODUIT DE CESSIONS DE QUOTAS CARBONE
Le Gouvernement se propose de couvrir le besoin de financement de l'engagement international de la France relatif à l'aide aux pays en développement pour la gestion durable de la forêt et la lutte contre la déforestation soit 150 millions d'euros, sur les 250 millions impliqués au total par cet engagement, entre 2010 et 2012 par une partie des produits de cession d'unités de « quantité attribuée » à notre pays (« UQA », représentatives de quotas d'émissions de gaz à effet de serre mesurés en équivalents carbone) dans le cadre du Protocole de Kyoto.
Il convient ici de rappeler que ces quotas ont été affectés à chacun des pays industrialisés ou en transition vers une économie de marché, pour la période 2008-2012, en fonction d'objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre 76 ( * ) . Dans l'hypothèse où un pays émet plus de ces gaz que ses UQA l'y autorisent, il lui incombe d'acheter les quotas manquants sur le marché ; dans le cas inverse, les UQA excédentaires peuvent être vendues par les Etats, de la même façon.
Grâce à ses bonnes performances en matière de lutte contre le changement climatique, la France dispose aujourd'hui d'un volume excédentaire d'UQA par rapport à ses besoins. Ces actifs peuvent donc être valorisés, même si aucune opération en ce sens n'a été encore conduite jusqu'à présent. Les cessions, dans ce domaine, ont vocation à se trouver retracées par le compte de commerce « Gestion des actifs carbone de l'Etat » 77 ( * ) .
B. LA CRÉATION D'UN COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE AD HOC
L' article 30 du présent PLF , adopté sans modification par l'Assemblée nationale et par le Sénat , constitue la traduction, au plan budgétaire, du choix du Gouvernement de financer l'aide française aux pays en développement pour la gestion durable de la forêt et la lutte contre la déforestation, en partie, au moyen de produits de cession de quotas carbone de l'Etat 78 ( * ) .
À cet effet, il est créé, à compter du 1 er janvier 2011, un nouveau compte d'affectation spéciale (au sens de l'article 21 de la LOLF), intitulé « Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique ». Cette création vise expressément à « contribuer au respect des engagements pris par la France en matière de lutte contre le changement climatique dans les pays en développement ».
Le mécanisme retenu constituera un « cercle vertueux » autant qu'un financement innovant des engagements internationaux de notre pays : la vente d'UQA est permise par les efforts français de réduction des émissions de gaz à effet de serre ; les produits de cette vente contribueront à financer la lutte contre le changement climatique, par le biais d'actions de gestion durable des forêts et contre la déforestation dans les pays en développement.
Du reste, ce dispositif est juridiquement prévu pour une durée indéterminée, mais le mécanisme de financement à titre de « démarrage précoce » défini lors de la Conférence de Copenhague, pour sa part, est borné à la fin de l'année 2012. La question du maintien du compte d'affectation spéciale au-delà de cette échéance devrait donc être examinée, au plus tard, dans le cadre du PLF pour 2013.
1. L'organisation du compte
a) Les recettes
Le compte « Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique » retracera, en recettes , le produit de la vente de quotas carbone de l'Etat (UQA définies par le Protocole de Kyoto), dans la limite expresse de 150 millions d'euros .
En effet, le produit de la cession de ces unités serait, à droit constant, intégralement versé au compte de commerce « Gestion des actifs carbone de l'Etat » précité. L'article 30 du présent PLF propose d'affecter en priorité ce produit au nouveau compte d'affectation spéciale, dans la limite du montant 150 millions d'euros, d'ici à 2012 nécessaire pour financer l'engagement de la France d'aider les pays en développement pour la gestion durable de la forêt et la lutte contre la déforestation. Au delà de ce montant, le produit des ventes de quotas carbone se trouvera, comme actuellement, affecté au compte de commerce .
b) Les dépenses
En dépenses , le nouveau compte retracera celles que requiert la contribution française à l'initiative « REDD+ » ci-dessus mentionnée :
- d'une part, les dépenses en faveur de projets de gestion durable de la forêt et de lutte contre la déforestation dans les pays en développement, pour lesquelles le ministre des affaires étrangères est l'ordonnateur principal ;
- d'autre part, les dépenses liées aux actions des fonds environnementaux en matière de gestion durable de la forêt et de lutte contre la déforestation dans les pays en développement, pour lesquelles le ministre chargé de l'économie est l'ordonnateur principal.
* 76 Les Etats concernés, globalement, se sont engagés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, entre 2008 et 2012, à hauteur de 5,2 % par rapport à 1990.
* 77 Ce compte a été créé par la LFR du 30 décembre 2008 pour suivre, en recettes et en dépenses, les flux engendrés par les opérations de l'Etat (cessions et acquisitions) sur l'ensemble des marchés du carbone non seulement celui des UQA issues du Protocole de Kyoto, mais également celui des quotas européens d'émission de gaz à effet de serre se rapportant au Système communautaire d'échange de quotas d'émission (SCEQE, dispositif visant à permettre d'atteindre les objectifs assignés à l'Union Européenne et à ses Etats membres dans le cadre du Protocole de Kyoto). Il doit notamment permettre d'abonder la réserve de quotas pour les nouveaux entrants que prévoit le Plan national d'affectation des quotas d'émission de CO 2 (PNAQ, lancé en 2005 pour décliner au niveau national les exigences issues du Protocole de Kyoto et du SCEQE).
* 78 Votre rapporteur spécial renvoie au rapport sur le présent PLF de notre collègue Philippe Marini, rapporteur général (tome II).