TITRE II DISPOSITIONS PERMANENTES  I. - MESURES FISCALES NON RATTACHÉES

ARTICLE 11  Création d'un second taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

Commentaire : le présent article vise à créer un taux réduit de TVA (également appelé « taux intermédiaire ») à 7 %.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE DROIT COMMUNAUTAIRE EN VIGUEUR : LA FACULTÉ D'INSTAURER UN OU DEUX TAUX RÉDUITS DE TVA

La directive n° 2006/112 CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), dite « directive TVA », autorise 99 ( * ) les Etats membres à appliquer :

- un taux normal qui ne peut être inférieur à 15 % ;

- un ou deux taux réduits de TVA qui ne peuvent être inférieurs à 5 %.

La création d'un deuxième taux réduit, dit « taux intermédiaire » , situé entre 5 % et 15 % est donc possible juridiquement au plan communautaire, pour autant qu'il s'applique à des biens et services visés à l'annexe III de la directive précitée.

Les livraisons de biens et les prestations de services pouvant faire l'objet des taux réduits prévus par la directive n° 2006/112 CE du 28 novembre 2066

En application de l'annexe III de la directive précitée, peuvent faire l'objet d'un taux réduit de TVA :

1) les denrées alimentaires (y compris les boissons, à l'exclusion, toutefois, des boissons alcooliques) destinées à la consommation humaine et animale, les animaux vivants, les graines, les plantes et les ingrédients normalement destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ; les produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires ;

2) la distribution d'eau ;

3) les produits pharmaceutiques normalement utilisés pour les soins de santé, la prévention de maladies et le traitement à des fins médicales et vétérinaires, y compris les produits utilisés à des fins de contraception et de protection hygiénique féminine ;

4) les équipements médicaux, le matériel auxiliaire et les autres appareils normalement destinés à soulager ou traiter des handicaps, à l'usage personnel et exclusif des handicapés, y compris la réparation de ces biens, ainsi que la livraison de sièges d'enfant pour voitures automobiles ;

5) le transport des personnes et des bagages qui les accompagnent ;

6) la fourniture de livres, sur tout type de support physique, y compris en location dans les bibliothèques (y compris les brochures, dépliants et imprimés similaires, les albums, livres de dessin ou de coloriage pour enfants, les partitions imprimées ou en manuscrit, les cartes et les relevés hydrographiques ou autres), les journaux et périodiques, à l'exclusion du matériel consacré entièrement ou d'une manière prédominante à la publicité ;

7) le droit d'admission aux spectacles, théâtres, cirques, foires, parcs d'attraction, concerts, musées, zoos, cinémas, expositions et manifestations et établissements culturels similaires ;

8) la réception de services de radiodiffusion et de télévision ;

9) les prestations de services fournies par les écrivains, compositeurs et interprètes et les droits d'auteur qui leur sont dus ;

10) la livraison, construction, rénovation et transformation de logements fournis dans le cadre de la politique sociale ;

10 bis) la rénovation et la réparation de logements privés, à l'exclusion des matériaux qui représentent une part importante de la valeur du service fourni ;

10 ter) le lavage de vitres et le nettoyage de logements privés ;

11) les livraisons de biens et les prestations de services d'un type normalement destiné à être utilisé dans la production agricole, à l'exclusion, toutefois, des biens d'équipement, tels que les machines ou les bâtiments ;

12) l'hébergement fourni dans des hôtels et établissements similaires, y compris la fourniture d'hébergement de vacances et la location d'emplacements de camping et d'emplacements pour caravanes ;

12 bis) les services de restaurant et de restauration, la fourniture de boissons (alcooliques et/ou non alcooliques) pouvant être exclue ;

13) le droit d'admission aux manifestations sportives ;

14) le droit d'utilisation d'installations sportives ;

15) la livraison de biens et la prestation de services par des organismes reconnus comme ayant un caractère social par les Etats membres et engagés dans des oeuvres d'aide et de sécurité sociales, dans la mesure où ces opérations ne sont pas exonérées en vertu des articles 132, 135 et 136 ;

16) les prestations de services fournies par les entreprises de pompes funèbres et de crémation ainsi que la livraison de biens qui s'y rapportent ;

17) la fourniture de soins médicaux et dentaires ainsi que les cures thermales, dans la mesure où ces prestations ne sont pas exonérées en vertu de l'article 132, paragraphe 1, points b) à e) ;

18) les prestations de services fournies dans le cadre du nettoyage des voies publiques, de l'enlèvement des ordures ménagères et du traitement des déchets, autres que les services fournis par les organismes visés à l'article 13 ;

19) les petits services de réparation des bicyclettes, chaussures et articles en cuir, vêtements et du linge de maison (y compris les travaux de réparation et de modification) ;

20) les services de soins à domicile, tels que l'aide à domicile et les soins destinés aux enfants, aux personnes âgées, aux personnes malades ou aux personnes handicapées ;

21) la coiffure.

Enfin, par dérogation aux règles normales, certains Etats membres ont été autorisés à maintenir des taux réduits, y compris des taux super réduits ou des taux zéro, dans certains domaines.

B. LA MISE EN oeUVRE EN FRANCE : UN SEUL TAUX RÉDUIT DE TVA

Actuellement, la France n'applique qu' un seul taux réduit de TVA de 5,5 % aux biens et services énoncés aux articles 278 bis et suivants du code général des impôts (CGI).

Elle applique également un taux super réduit de 2,1 % pour un nombre très limité de livraisons de biens et de prestations de services énoncé aux articles 281 quater et suivants du CGI. Ce taux concerne les « premières » de spectacles (article 281 quater ), les ventes d'animaux vivants de boucherie et de charcuterie faites à des personnes non assujetties à la TVA (article 281 sexies ), certains médicaments (article 281 octies ) et la contribution à l'audiovisuel public (article 281 nonies ). En application de l'article 298 septies du CGI, la presse écrite est également assujettie à un taux de 2,1 %.

C. LES SITUATIONS CONTRASTÉES AU SEIN DE L'UNION EUROPÉENNE (UE)

Au sein de l'Union européenne (UE), les situations sont très hétérogènes au regard de l'application des différents taux de TVA, ainsi que l'illustre le tableau ci-après.

Les taux de TVA appliqués dans les Etats membres

Etats membres

Taux super réduit

Taux réduit

Taux normal

Taux parking

Belgique

-

6/12

21

12

Bulgarie

-

9

20

-

République tchèque

-

10

20

-

Danemark

-

-

25

-

Allemagne

-

7

19

-

Estonie

-

9

20

-

Grèce

-

6,5/13

23

-

Espagne

4

8

18

-

France

2,1

5,5

19,6

-

Irlande

4,8

9/13,5

21

13,5

Italie

4

10

20

-

Chypre

-

5/8

15

-

Lettonie

-

12

22

-

Lituanie

-

5/9

21

-

Luxembourg

3

6/12

15

12

Hongrie

-

5/18

25

-

Malte

-

5/7

18

-

Pays-bas

-

6

19

-

Autriche

-

10

20

12

Pologne

-

5/8

23

-

Portugal

-

6/13

23

13

Roumanie

-

5/9

24

-

Slovénie

-

8,5

20

-

République slovaque

-

10

20

-

Finlande

-

9/13

23

-

Suède

-

6/12

25

-

Royaume-Uni

-

5

20

-

Source : Commission européenne, juillet 2011

Sur les vingt sept Etats membres, treize ont recours à deux taux réduits . Le taux intermédiaire oscille alors, selon les cas, entre 7 % (pour Malte) et 18 % (pour la Hongrie). L'Allemagne, pour sa part, n'applique qu'un seul taux réduit (à 7 %) et son taux normal est à 19 %.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UN TAUX RÉDUIT DE TVA MAINTENU À 5,5 % POUR CERTAINS PRODUITS DE PREMIÈRE NÉCÉSSITÉ

Le I du présent article insère dans le CGI, en tête des articles consacrés au taux réduit, un nouvel article 278-0- bis énumérant les opérations qui demeurent soumises au taux de 5,5 % : achat, importation, acquisition intracommunautaire, vente, livraison, commission, courtage ou façon portant sur les quatre catégories de biens ou prestations de services suivantes.

1. L'alimentation humaine

Le taux de 5,5 % est maintenu pour l'eau et les boissons non alcooliques, les produits destinés à l'alimentation humaine , à l'exception, comme actuellement, du caviar, des margarines et graisses végétales, des boissons alcooliques, des produits de confiserie et des chocolats et tous produits composés contenant du chocolat ou du cacao. Toutefois le chocolat , le chocolat de ménage au lait, les bonbons de chocolat, les fèves de cacao et le beurre de cacao sont admis au taux réduit de 5,5 %.

Les alinéas 5 à 10 reprennent à l'identique les dispositions des 1° et 2° de l'article 278 bis du CGI, qui sont donc abrogés par l'alinéa 44.

Les produits d'origine agricole, de la pêche, de la pisciculture et de l'aviculture n'ayant subi aucune transformation, non destinés à l'alimentation humaine , sont eux soumis au taux intermédiaire.

Les ventes à emporter sont soumises à la hausse du taux. Le m) de l'actuel article 279 du CGI soumet au taux réduit les ventes à consommer sur place, à l'exclusion de celles relatives aux boissons alcooliques. Les alinéas 34 et 35 complètent l'article 279 par un n) en application duquel les ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d'une consommation immédiate sont taxées au taux réduit de 7 %, sauf les ventes de boissons alcooliques, taxées au taux normal. Actuellement, un sandwich est taxé à 5,5 % en supermarché ou en boulangerie en tant que produit alimentaire, et à 5,5 % dans la restauration sur place. Dans tous les cas, le présent article propose d'augmenter le taux de TVA à 7 %.

Le nouveau taux intermédiaire de 7 % est donc notamment applicable à la restauration, que celle-ci soit fournie sur place ou à emporter . Les ventes à emporter ou à livrer concernées portent sur des produits alimentaires préparés en vue d'une consommation immédiate, à l'exclusion de celles relatives aux boissons alcooliques. Seuls sont donc soumis au taux intermédiaire de 7 % les produits dont la nature, le conditionnement ou la présentation induisent leur consommation dès l'achat, par dérogation au principe général d'application du taux réduit de 5,5 % aux produits alimentaires.

A titre d'exemple, les viennoiseries et les pâtisseries demeurent au taux réduit de 5,5 % dès lors qu'il ne peut être présumé que leur consommation a vocation à être immédiate. Les sandwichs, ou les salades vendues avec des couverts, relèveront en revanche du taux intermédiaire de 7 %.

Comme indiqué dans le tableau ci-dessous, le raisonnement distingue donc les produits, plus que les formes de vente.

Les taux de TVA applicables aux ventes à emporter ou à livrer

Produit

Taux

Commentaire

Repas servi dans un restaurant traditionnel

7 %

Visé par le m de l'article 279 du CGI

Plats servis dans une brasserie

7 %

Restauration sur place dans un fast food

7 %

Consommation à emporter dans un fast-food

7 %

Sauf les boissons non alcooliques dont le conditionnement permet la conservation

Kebabs, crêpes, etc. destinés à une consommation immédiate

7 %

Dès lors qu'il ne fait pas de doute dans ce cas que ces ventes sont faites pour des consommations immédiates

Boissons vendues dans des contenants ne permettant pas leur conservation (gobelet)

7 %

Boissons destinées à la consommation immédiate

Boissons vendues dans des contenants permettant leur conservation (canette, bouteille)

5,5 %

Boissons pouvant être conservées du fait de son conditionnement

Pizzas, sushis, etc. livrés

7 %

Dès lors que vente et livraison se suivent immédiatement, il y a présomption qu'il s'agit de ventes pour des consommations immédiates, donc le taux est de 7 %

Sandwichs, pizzas, quiches vendus en boulangerie ou ailleurs, emballés ou non

7 %

Viennoiseries, pâtisseries

5,5 %

Desserts à emporter (glaces en cornet)

7 %

Exception pour les pâtisseries et viennoiseries soumises au taux de 5,5 %

Produits préparés chez le traiteur vendus à emporter ou à livrer

5,5 %

Ces produits n'ont pas vocation à être consommés immédiatement

Produits vendus par un traiteur en association avec un service (fourniture de salle, de matériel, de personnel, etc. liée à la vente de la nourriture, par exemple pour des fêtes familiales)

7 %

L'ensemble est considéré comme un service de restauration sur place (m du 279 CGI)

Salades préparées vendues avec couverts quel que soit le lieu de vente

7 %

Il y a présomption de consommation immédiate par les couverts

Source : commission des finances d'après le ministère du budget

2. Certains appareils, équipements et prestations de service pour personnes handicapées, malades ou dépendantes

a) Les appareillages et les équipements pour les handicapés

Les appareils et les équipements suivants sont concernés :

- les appareillages pour handicapés mentionnés aux chapitres I er et III à 7 du titre II, au titre III et au titre IV de la liste des produits et des prestations remboursables prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, pris en charge au titre des prestations d'hospitalisation définies aux articles L. 162-22-6 et L. 162-22-7 du même code et dont la liste est fixée par arrêté conjoint du ministre chargé de la santé et du ministre chargé du budget ;

- les équipements spéciaux, dénommés aides techniques et autres appareillages, dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé du budget et qui sont conçus exclusivement pour les personnes handicapées en vue de la compensation d'incapacités graves ;

- les ascenseurs et matériels assimilés, spécialement conçus pour les personnes handicapées et dont les caractéristiques sont fixées par arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances.

b) Les appareils pour diabétiques

Il s'agit des autopiqueurs, des appareils pour lecture automatique chiffrée de la glycémie, des seringues pour insuline, des stylos injecteurs d'insuline et des bandelettes et comprimés pour l'autocontrôle du diabète.

c) Les appareils pour incontinents et stomisés

Il s'agit des appareillages de recueil pour incontinents et stomisés digestifs ou urinaires, des appareillages d'irrigation pour colostomisés, des sondes d'urétérostomie cutanée pour stomisés urinaires, des solutions d'irrigation vésicale et des sondes vésicales pour incontinents urinaires.

Les alinéas 11 à 16 reprennent les dispositions de l'article 278 quinquies , dont l'alinéa 44 prévoit en conséquence l'abrogation.

3. Certaines prestations de service destinées aux personnes âgées ou handicapées

Les paragraphes III et IV de l'article 278-0 bis (nouveau) (alinéas 19 et 20) maintiennent le bénéfice du taux réduit à 5,5 % pour les prestations suivantes :

- la fourniture de logement et de nourriture dans les maisons de retraite et les établissements accueillant des personnes handicapées . Ce taux s'applique également aux prestations exclusivement liées, d'une part, à l'état de dépendance des personnes âgées et, d'autre part, aux besoins d'aide des personnes handicapées, hébergées dans ces établissements et qui sont dans l'incapacité d'accomplir les gestes essentiels de la vie quotidienne.

L'alinéa 19 reprend à l'identique les dispositions du troisième alinéa du a) de l'article 279, supprimé par le I du I du présent article (alinéa 44).

- les prestations de services exclusivement liées aux gestes essentiels de la vie quotidienne des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes , qui sont dans l'incapacité de les accomplir, fournies par des associations, des entreprises ou des organismes déclarés en application de l'article L. 7232-1-1 du code du travail, dont la liste est fixée par décret, à titre exclusif, ou à titre non exclusif pour celles qui bénéficient d'une dérogation à la condition d'activité exclusive selon l'article L. 7232-1-2 du même code.

L'alinéa 20 reprend l'essentiel des dispositions du i) de l'article 279, mais en y ajoutant une condition : ne sont concernées que les prestations de services exclusivement liées aux gestes essentiels de la vie quotidienne des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes, qui sont dans l'incapacité de les accomplir. Les autres prestations seront soumises au taux intermédiaire de 7 %.

Sont dispensées de la condition d'activité exclusive, pour leurs activités d'aide à domicile les associations intermédiaires, les régies de quartiers, les communes, les centres communaux ou intercommunaux d'action sociale, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), les organismes ayant conclu une convention avec un organisme de sécurité sociale au titre de leur action sociale et les organismes gestionnaires d'établissements de santé.

4. Les abonnements énergétiques

Le II de l'article 278-0 bis (nouveau) (alinéas 17 et 18) maintient le bénéfice du taux réduit à 5,5 % pour les abonnements relatifs aux livraisons d'électricité d'une puissance maximale inférieure ou égale à 36 kilovoltampères, d'énergie calorifique et de gaz naturel combustible, distribués par réseaux, ainsi que la fourniture de chaleur lorsqu'elle est produite au moins à 50 % à partir de la biomasse, de la géothermie, des déchets et d'énergie de récupération. La puissance maximale prise en compte correspond à la totalité des puissances maximales souscrites par un même abonné sur un même site.

Ces dispositions correspondent à la reprise, à l'identique, du b decies) de l'article 279 du CGI. En conséquence, le I du IV du présent article (alinéa 44) supprime le b decies) .

Le bois de chauffage , les produits de la sylviculture agglomérés et les déchets de bois destinés au chauffage, actuellement soumis au taux de 5,5 %, sont soumis au nouveau taux réduit.

B. LA SUBSTITUTION DU TAUX INTERMÉDIAIRE AU TAUX RÉDUIT POUR LES AUTRES OPÉRATIONS

Toutes les autres opérations, actuellement soumises au taux de TVA à 5,5 %, seront soumis au taux de 7 % . Cette substitution est opérée par les alinéas suivants.

Les paragraphes B et C du I du présent article (alinéas 21 à 23) remplacent la référence au taux de 5,5 % par une référence au taux de 7 % dans les articles 278 bis , 278 ter , 278 quater et 279, 278 sexies et 278 septies du CGI. L'alinéa 32 4° b du D du I du présent article procède à la même substitution à la deuxième phrase du b octies) de l'article 279, les alinéas 36 à 39 pour l'article 279-0 bis du CGI.

Les alinéas 30, 31, 40 et 41 (paragraphe F) portent mesure de coordination au premier alinéa de l'article 279 bis du CGI, et au b octies de l'article 279 du CGI, pour préciser que les opérations actuellement soumises au taux normal restent exclues du bénéfice des deux taux réduits.

C. DES MODIFICATIONS CONCERNANT LE PÉRIMÈTRE DES OPÉRATIONS BASCULANT DU TAUX RÉDUIT AU TAUX INTERMÉDIAIRE

1. Les spectacles

Actuellement, le b bis ) de l'article 279 du CGI soumet au taux réduit de TVA à 5,5 % les spectacles suivants : théâtres , théâtres de chansonniers, cirques , concerts 100 ( * ) , les spectacles de variétés 101 ( * ) , foires, salons, expositions autorisés, jeux et manèges forains 102 ( * ) .

Le B du III du présent article fait désormais passer le taux de TVA à 7 % pour ces activités .

Les alinéas 26 et 27 du présent article maintiennent (au b bis a) de l'article 279 du CGI) toutefois le principe de l'exception faite pour les concerts donnés dans des établissements où il est d'usage de consommer pendant les séances. Ces concerts bénéficieront toujours d'un taux réduit, mais à 7 %.

S'agissant des spectacles, une attention particulière doit être portée aux recettes réalisées aux entrées lors des « premières » .

Actuellement, en application de l'article 281 quater du CGI, la taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 2,1 % « en ce qui concerne les recettes réalisées aux entrées des premières représentations théâtrales d'oeuvres dramatiques, lyriques, musicales ou chorégraphiques nouvellement crées ou d'oeuvres classiques faisant l'objet d'une nouvelle mise en scène, ainsi que des spectacles de cirque comportant exclusivement des créations originales conçues et produites par l'entreprise et faisant appel aux services réguliers d'un groupe de musiciens ». Le nombre de « premières » concernées est de 140 représentations.

A cet égard, l'alinéa 42 du présent article ( en rétablissant un alinéa c) à l'article 281 quater du CGI) soumet désormais au taux de 7 % les recettes réalisées sur les entrées des 140 premières représentations de concerts donnés dans les établissements où il est servi facultativement des consommations pendant le spectacle 103 ( * ) .

2. La filière équestre

Les alinéas 28 et 29 donnent un nouveau fondement au taux réduit de TVA pour la filière équestre . Après plusieurs années de discussion, la Commission européenne a engagé en décembre 2010 une procédure contre la France devant la CJUE, contestant le taux réduit de TVA appliqué aux opérations concernant les équidés, à des fins autres qu'agricoles et alimentaires. La France est ainsi intervenue devant la CJUE dans les procédures opposant la Commission aux Pays-Bas, à l'Allemagne et à l'Autriche, condamnés pour manquement en mars et en mai 2011.

L'article 5 sexies du projet de loi de finances pour 2012 , adopté en première lecture à l'Assemblée nationale et au Sénat, prévoit le maintien du taux réduit pour la filière équine, non plus au titre de l'agroalimentaire, mais des activités sportives. Sont concernées les prestations correspondant au droit d'utilisation des animaux à des fins d'activités physiques et sportives et de toutes installations agricoles nécessaires à cet effet, ainsi qu'aux prestations accessoires. L'enjeu budgétaire est estimé par le ministère de l'agriculture entre 40 et 60 millions d'euros. La rédaction actuelle de l'article 5 sexies du projet de loi de finances pour 2012 englobe les prestations accessoires, qui sont toutefois exclues par les alinéas 28 et 29.

D. LE MAINTIEN DES RÉGIMES SPÉCIAUX DE CORSE ET D'OUTRE-MER

1. La Corse

Le paragraphe K du I du présent article adapte à la création d'un deuxième taux réduit la rédaction de l'article 297 du CGI qui définit les taux applicables dans les départements de Corse.

Les alinéas 50 à 52 actualisent donc les références aux articles du CGI modifiés par le présent article, pour maintenir le régime fiscal en vigueur. Dans les départements de Corse, la TVA est perçue au taux de :

- 0,9 % pour les premières théâtrales et les ventes d'animaux vivants de boucherie ;

- 2,1 % en ce qui concerne : les produits alimentaires, les cantines d'entreprise, le bois de chauffage, les engrais et les livres, la fourniture de logement et hébergement, les spectacles, les zoos, les transports de voyageurs, les travaux sylvicoles, les abonnements à des services de télévision, les parcs à thème, les abonnements énergie ;

- 8 % en ce qui concerne les ventes et travaux immobiliers, les ventes de matériels agricoles, les fournitures de logement en meublé ou en garni, les ventes à consommer sur place, et les ventes d'électricité effectuées en basse tension ;

- 13 % en ce qui concerne les ventes de produits pétroliers énumérés au tableau B de l'article 265 du code des douanes.

2. L'outre-mer

Le paragraphe J du I du présent article adapte à la création d'un deuxième taux réduit la rédaction de l'article 296 du CGI qui définit les taux applicables dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion. En application de l'article 294 du CGI, la TVA n'est provisoirement pas applicable dans le département de la Guyane. En application de l'article 11 de la loi n° 2010-1487 du 7 décembre 2010 relative au développement de Mayotte, la TVA n'y est pas non plus applicable.

Les alinéas 46 à 49 actualisent donc les références aux articles du CGI modifiés par le présent article, pour maintenir les taux particuliers aux trois départements d'outre-mer précités : un taux réduit de 2,1 % et un taux normal de 8,5 % .

Sont exonérés de TVA :

1° Les transports maritimes de personnes et de marchandises effectués dans les limites de chacun des départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion ;

2° Les ventes et importations de riz dans le département de la Réunion ;

3° Les ventes résultant de l'application des articles L. 128-4 à L. 128-7 du code rural et de la pêche maritime relatifs à la mise en valeur agricole des terres incultes, des terres laissées à l'abandon et des terres insuffisamment exploitées de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Réunion et de la Guyane ;

4° Dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Réunion et de la Guyane, les opérations immobilières effectuées, en vue de l'accession à la propriété rurale, par les SAFER et les SICA, qui ont bénéficié d'un agrément préalable avant le 28 décembre 1969 ;

5° Dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion :

a) les importations de matières premières et produits dont la liste est fixée par arrêté ;

b) les ventes et les livraisons à soi-même des produits de fabrication locale analogues à ceux dont l'importation est exemptée ;

6° Les importations et ventes de produits énergétiques repris au tableau B de l'article 265 du code des douanes.

Par ailleurs, la TVA est perçue au taux de 1,05 % pour les premières théâtrales et 1,75 % pour les ventes d'animaux vivants de boucherie.

E. UNE ENTRÉE EN VIGUEUR À COMPTER DU 1 ER JANVIER 2012

Le II du présent article prévoit que les dispositions créant un nouveau taux intermédiaire et y soumettant l'essentiel des opérations bénéficiant du taux réduit s'appliquent aux opérations pour lesquelles la TVA est exigible à compter du 1 er janvier 2012 .

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l'initiative de nos collègues Gilles Carrez et Charles de Courson, avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté, à l'unanimité, un amendement visant à maintenir le taux de TVA à 5,5 % pour les cantines scolaires soumises à la TVA .

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté, avec avis favorable du Gouvernement et de la commission des finances, deux amendements identiques de François Scellier, d'une part, et de Jean-Yves Le Bouillonnec ainsi que les membres du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche, d'autre part, tendant à maintenir l'application du taux de TVA à 5,5 % en matière de logement social :

- dans le cas de la livraison à soi-même des logements, dès lors que le bailleur social qui les a construit a obtenu une décision favorable de l'Etat avant le 1 er janvier 2012 ;

- dans le cas des opérations de « location-accession » pour la vente du logement à l'issue de la période locative (quelle que soit la date à laquelle elle intervient), dès lors qu'un agrément préalable est intervenu avant le 1 er janvier 2012.

Enfin, l'Assemblée nationale a adopté trois amendements rédactionnels et de coordination.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LA TVA : 52,2 % DES RECETTES FISCALES DE L'ÉTAT

Pour 2011, les recettes de la taxe sur la valeur ajoutée nette devraient s'élever à 132 266 millions d'euros , soit 52,1 % des recettes fiscales nettes de l'Etat. La prévision pour 2012 s'établit à 136 862 millions d'euros, soit une même part des recettes fiscales nettes de l'Etat.

Le produit de la TVA

(en milliards d'euros)

2009

2010

2011

2012

TVA brute

168,1

170,4

179,1

186,6

TVA nette

118,4

127,3

132,3

136,8

Source : projet de loi de finances pour 2012, évaluation des voies et moyens

Ainsi que l'illustre le tableau ci-dessus, la progression des recettes de TVA est de 15,5 % entre 2009 et 2012.

B. LE POIDS DES DÉPENSES FISCALES RÉSULTANT DES « NICHES TVA »

L'application d'un taux réduit de TVA à certains biens et à certains services représente actuellement de lourdes dépenses fiscales , comme l'indique le tableau ci-après.

Les principales dépenses fiscales liées à la TVA

(en millions d'euros)

2010

2011

2012

Rang parmi les dépenses fiscales les plus coûteuses

Travaux d'amélioration des logements

5 200

5 200

5 200

1

Ventes à consommer sur place (hors alcools)

3 000

3 100

3 200

2

Taux de 2,1 % applicable aux médicaments

1 140

1 140

1 140

15

Taux particuliers aux départements de Guadeloupe, Martinique et Réunion

1 100

1 100

1 100

16

Certains appareillages et équipements pour les handicapés

1 000

1 050

1 100

17

Repas dans les cantines d'entreprises ou administrations

980

1 015

1 055

nd

Travaux de construction ou amélioration de divers logements sociaux

1 130

1 030

1 030

nd

Hôtellerie

940

980

1 000

nd

Exonération des services rendus aux personnes physiques par les associations agréées de service à la personne

700

720

730

nd

Total

15 190

15 435

15 655

nd

Source : projet de loi de finances pour 2012, évaluation des voies et moyens

Au total, le coût des principales « niches TVA » s'élève à 15 655 millions d'euros pour 2012.

C. LA NOTATION DE L'EFFICACITÉ DE CES MESURES PAR LE COMITÉ D'ÉVALUATION DES DÉPENSES FISCALES

Dans son rapport de juin 2011 , le Comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales a attribué à ces dépenses des notes allant de 0 à 3.

La note de 0 correspond aux dépenses qui ne sont pas jugées efficaces. Les notes de 1 à 2 vont aux dépenses efficaces, mais peu ou pas efficientes. Les dépenses efficientes , réunissant quatre critères (ciblage correct, coût raisonnable, outil fiscal efficient en lui-même, plus adapté qu'une dépense budgétaire ou non financière) reçoivent la note de 3. Toutes les dépenses, notamment la baisse de la TVA dans la restauration, trop récente, n'ont cependant pas pu être évaluées.

La présentation simplifiée des évaluations des dépenses fiscales  (et mesures assimilées)

Numéro de la mesure

Libellé de la mesure

Chiffrage 2011 (en millions d'euros)

Score attribué

730303

Taux de 2,1 % applicable aux médicaments remboursables ou soumis à autorisation temporaire d'utilisation et aux produits sanguins

1 170

3

730203

Taux de 5,5 % pour les ventes portant sur certains appareillages, ascenseurs et équipements pour les handicapés

1 050

3

730210

Taux de 5,5 % pour certaines opérations (livraisons à soi-même d'opérations de construction et de travaux, ventes, apports, etc.) portant sur des logements sociaux et locaux assimilés et établissements d'hébergement de personnes âgées ou handicapées

900

3

740106

Déduction intégrale de la TVA par les organismes du service public de la communication audiovisuelle consécutive à la soumission de la redevance au taux de TVA de 2,1 %

170

3

730216

Taux de 5,5 % applicable aux logements en accession sociale à la propriété dans les quartiers en rénovation urbaine

100

3

720206

Exonération des produits de leur pêche vendus par les marins-pêcheurs

10

3

730208

Taux de 5,5 % pour les prestations de soins dispensées par les établissements thermaux autorisés

40

3

730305

Taux de 2,1 % applicable aux publications de presse

190

2

720106

Exonération des associations intermédiaires conventionnées dont la gestion est désintéressée

70

2

710102

Exonération de certains produits et matières premières ainsi que des produits pétroliers (Guadeloupe, Martinique et Réunion)

65

2

730218

Taux de 5,5 % pour la fourniture par réseaux d'énergie d'origine renouvelable

25

2

740102

Franchise en base pour les avocats et les avoués dont le chiffre d'affaires n'excède pas 37 400 euros

8

2

740103

Franchise en base pour les auteurs et les interprètes des oeuvres de l'esprit dont le chiffre d'affaires n'excède pas 37 400 euros

6

2

720202

Exonération de la fourniture d'eau dans les communes ou groupements de communes de moins de 3 000 habitants, avec faculté de renoncer à l'exonération

0

2

Numéro de la mesure

Libellé de la mesure

Chiffrage 2011 (en millions d'euros)

Score attribué

730213

Taux de 5,5 % pour les travaux d'amélioration, de transformation, et d'entretien portant sur des logements achevés depuis plus de deux ans

5 050

1

710103

Régime de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion :

- 8,5 % pour le taux normal ;

- 2,1 % pour le taux réduit

1 090

1

730205

Taux de 5,5 % pour la fourniture de logements dans les hôtels

930

1

720107

Exonération des services rendus aux personnes physiques par les associations agréées en application de l'article L. 7232-1 du code du travail

700

1

730219

Taux de 5,5 % pour la fourniture de logement et de nourriture dans les établissements d'accueil des personnes âgées et handicapées

390

1

730206

Taux de 5,5 % applicable à la fourniture de logement dans les terrains de camping classés

170

1

730214

Taux de 5,5 % pour les services d'aide à la personne fournis par les entreprises agréées en application des articles L. 7232-1 à L. 7232-4 du code du travail

120

1

730212

Taux de 5,5 % applicable aux éléments constitutifs des aliments pour le bétail et à certains produits et engrais à usage agricole

70

1

700102

Exonération de TVA sur les objets d'art, de collection et d'antiquité, importés par les établissements agréés par le ministre chargé des affaires culturelles

1

1

730306

Taux particuliers applicables à divers produits et services consommés ou utilisés en Corse

185

0

710104

Régime particulier de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion.

Déductibilité afférente à certains produits exonérés

100

0

730220

Taux de 5,5 % pour les prestations de déneigement rattachées à un service public de voirie communale

15

0

720201

Exonération de la partie du trajet effectué à l'intérieur de l'espace maritime national pour les transports aériens ou maritimes de personnes et de marchandises en provenance ou à destination de la Corse

5

0

Sur vingt sept mesures « TVA » passées en revue, sept obtiennent la note maximale de 3 , tandis que quatre reçoivent la note de 0 et neuf la note de 1.

D. LES CONSÉQUENCES DE LA CRÉATION D'UN TAUX INTERMÉDIAIRE À 7 % : LE CAS CONCRET DE L'ALIMENTATION

Pour bien cerner les conséquences concrètes du passage à un taux de TVA à 7 % il peut être utile de l'illustrer par un cas particulier : celui du domaine de l'alimentation .

? Les opérations actuellement exonérées de TVA le resteraient , à savoir :

- les cantines scolaires et universitaires , sous condition : une cantine scolaire gérée directement par la collectivité locale est exonérée de TVA. Mais les cantines scolaires dont l'exploitation est concédée ou affermée, sont soumises au taux réduit qui passe de 5,5 % à 7 % ;

- les repas servis aux patients d' établissements de santé .

? Le taux de TVA ne serait pas modifié pour la catégorie actuellement taxée à 2,1 % , à savoir les ventes d'animaux vivants de boucherie et de charcuterie faites à des personnes non assujetties.

? Certains produits alimentaires feraient partie des rares biens et services conservant le taux réduit de 5,5 % , à savoir :

- les produits alimentaires, sauf le caviar, la margarine, les alcools et certains produits contenant du chocolat ;

- certains chocolats : les bonbons, le chocolat de ménage, les petits déjeuners en poudre, les crèmes desserts, les pâtes à tartiner ;

- les compléments alimentaires.

? Toutes les autres opérations soumises à la TVA à 5,5 % subiraient la hausse de taux à 7 % qui s'appliquerait aux catégories suivantes :

- les ventes de produits d'origine agricole, de la pêche, de la pisciculture et de l'aviculture non transformés, les sous-produits d'animaux de boucherie et de charcuterie : plans pour l'horticulture maraîchère, arbres fruitiers, semences. Les fruits et légumes et produits de l'horticulture maraîchère non transformés actuellement classés dans cette catégorie devraient cependant rester taxés à 5,5 % en tant que produits alimentaires ;

- la restauration sur place ;

- les ventes à emporter ou à livrer , qui portent sur des produits alimentaires préparés en vue d'une consommation immédiate. Par exemple, il s'agirait des sandwichs, ou des salades vendues avec des couverts (mais les viennoiseries resteraient taxées à 5,5 %) ;

- les cantines d'entreprise ;

- les aliments destinés à la nourriture des animaux destinés à la consommation humaine.

? Aucun changement n'interviendrait pour les opérations soumises à 19,6 %, à savoir :

- la vente d'alcool , dans les restaurants, les fast food ou les commerces ;

- les confiseries et certains chocolats, la margarine et les graisses végétales, le caviar ;

- le tabac.

? Enfin, les taux particuliers appliqués à la Corse et à l'outre-mer ne connaîtraient aucun changement.

E. UN GAIN BUDGÉTAIRE LIMITÉ ...

Le gain budgétaire attendu des dispositions du présent article résulte de l'écart entre le taux réduit de 5,5 % et le nouveau taux intermédiaire de 7 %.

Le rendement d'un point de TVA à 5,5 % est estimé à 2,8 milliards d'euros en 2011. Le relèvement à 7 % du taux de TVA à 5,5 % rapporterait donc 4,2 milliards d'euros tous secteurs confondus.

Ce rendement brut doit cependant être diminué du rendement qui ne sera pas perçu sur les produits et services de première nécessité qui resteront soumis au taux réduit de TVA de 5,5 %, estimé à 2,29 milliards d'euros .

Au total, le rendement net du relèvement du taux de TVA prévu par le présent article n'est donc que de 1,75 milliard d'euros en 2012 (soit sur onze mois de recettes en raison du décalage de perception de la TVA) et de 1,91 milliard d'euros en année pleine à compter de 2013.

Il faut enfin la relative incertitude s'agissant de ce rendement dans la mesure où, comme l'illustre le tableau ci-après, beaucoup des conséquences financières de la mesure demeurent encore « non déterminés » .

Il apparaît en tout état de cause que la mesure proposée par le présent article ne produit en définitive moins de la moitié de son rendement potentiel (1,9 milliard d'euros rapportés à 4,2 milliards d'euros) . Ce constat s'explique par le maintien d'un taux de TVA à 5,5 % pour un certain nombre de biens et services, qui représentent près de la moitié de l'assiette fiscale considérée.

Les taux réduits de TVA en novembre 2011 et le gain espéré d'un passage à un taux de 7 %

Taux en %

Montant de la dépense fiscale  (en millions d'euros)

Gain / 7 %

Eau et boissons non alcooliques

5,5

19 200

0

Produits destinés à l'alimentation humaine

5,5

Produits d'origine agricole, de la pêche, de la pisciculture et de l'aviculture n'ayant subi aucune transformation

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Bois de chauffage et produits de la sylviculture

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Aliments simples ou composés utilisés pour la nourriture du bétail, des animaux destinés à la consommation humaine, ainsi que les produits entrant dans la composition de ces aliments

5,5

70

7

Produits usage agricole : amendements, engrais, produits antiparasitaires

5,5

Non déterminé

Livres

5,5

740

79

Sommes visées au 4° du III de l'article 257 (gains de courses de chevaux)

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Médicaments ou produits pharmaceutiques destinés à l'usage de la médecine humaine

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Appareillages pour handicapés

5,5

1 100

0

Opérations (livraisons à soi-même d'opérations de construction, livraisons à soi-même de travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien, ventes, apports, etc.) portant sur les logements sociaux et locaux assimilés suivants :

5,5

1 030

110

- logements sociaux à usage locatif

5,5

150

16

- logements destinés à la location-accession

5,5

Non déterminé

Non déterminé

- logements relevant des structures d'hébergement temporaire ou d'urgence

5,5

Non déterminé

Non déterminé

- logements relevant de certains établissements d'hébergement de personnes âgées ou handicapées

5,5

Non déterminé

Non déterminé

- partie des locaux dédiés à l'hébergement dans les établissements d'accueil pour enfants handicapés

5,5

Non déterminé

Non déterminé

- immeubles sociaux apportés aux sociétés civiles immobilières d'accession progressive à la propriété

5,5

110

12

Importations d'oeuvres d'art et livraisons subséquentes

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Fourniture de logements dans les hôtels

5,5

1 000

106

Fourniture de logement dans les terrains de camping classés

5,5

240

26

Fourniture de logement et de nourriture dans les lieux de vie et d'accueil mentionnés au III de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles

5,5

Non déterminé

Fourniture de logement et de nourriture dans les maisons de retraite et établissements accueillant des personnes handicapées

5,5

455

0

Location d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Prestations de soins dispensées par les établissements thermaux

5,5

50

5

Fourniture des repas par les cantines d'entreprises

5,5

1 055

112

Remboursements et les rémunérations versés par les communes ou leurs groupements aux exploitants des services de distribution d'eau et d'assainissement

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Taxes, surtaxes et redevances perçues sur les usagers des réseaux d'assainissement

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Les spectacles, concerts, foires et salons

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Droits d'entrée pour la visite des parcs zoologiques et botaniques, des musées, monuments, grottes et sites ainsi que des expositions culturelles

5,5

36 millions d'euros pour les parcs zoologiques et botaniques

4

Transports de voyageurs

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Travaux sylvicoles et d'exploitation forestière réalisés au profit d'exploitants agricoles

5,5

5

0,5

Abonnements souscrits par les usagers afin de recevoir les services de télévision

5,5

415

0

Parcs à thème

5,5

54

6

Abonnements électricité, énergie calorifique et gaz naturel combustible, distribués par réseaux, ainsi que la fourniture de chaleur d'origine renouvelable

5,5

740 + 78 + 20 (pour les ENR)

0

Taux en %

Montant de la dépense fiscale  (en millions d'euros)

Gain / 7 %

Cessions des droits d'auteur

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Collecte, de tri et de traitement des déchets

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Prestations de services fournies à titre exclusif, ou à titre non exclusif pour celles qui bénéficient d'une dérogation à la condition d'activité exclusive selon l'article L. 7232-1-2 du code du travail, par des associations, des entreprises ou des organismes déclarés en application de l'article L. 7232-1-1 du même code

5,5

130

14

Rémunérations versées par les collectivités territoriales et leurs groupements pour la mise en oeuvre d'un contrat d'objectifs et de moyens correspondant à l'édition d'un service de télévision locale

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Prestations de balayage des caniveaux et voies publiques lorsqu'elles se rattachent au service public de voirie communale

5,5

Non déterminé

Non déterminé

Prestations de déneigement des voies publiques lorsqu'elles se rattachent à un service public de voirie communale

5,5

10

1

Ventes à consommer sur place, à l'exclusion de celles relatives aux boissons alcooliques

5,5

3 200

340

Travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien portant sur des locaux à usage d'habitation

5,5

5 200

553

Source : d'après le projet de loi de finances pour 2012, voies et moyens, et le ministère du budget

F. ... POUR UNE RÉFORME MAL CONÇUE

Encore une fois, les dispositions du présent article illustrent l'improvisation de la politique fiscale conduite par le Gouvernement, qui considère que la recherche d'un rendement à court terme justifie le sacrifice de la cohérence du droit fiscal.

D'un point de vue macroéconomique , le choix de relever le taux de TVA applicable à certains produits n'est pas le plus judicieux du point de vue du soutien à la demande intérieure, à la consommation et donc à la croissance. Le rétablissement de l'ancien barème de l'impôt de solidarité sur la fortune aurait procuré le même rendement, mais sans produire les mêmes effets indésirables.

D'un point de vue microéconomique , le partage parfois subtil qu'il faudra opérer entre les activités relevant du taux réduit à 5,5 % et celles relevant du taux réduit à 7 % ne sera pas forcément source de simplification pour les entreprises.

Du point de vue de la cohérence et de la lisibilité de la politique fiscale, la démarche du Gouvernement est incompréhensible. La création d'un deuxième taux réduit, supérieur de 1,5 point au premier n'obéit à aucune logique. Cet écart sera désormais le plus étroit constaté dans les Etats de l'Union européenne ayant fait le choix d'un deuxième taux réduit. Actuellement, parmi les treize Etats membres ayant opté pour deux taux réduits, celui enregistrant l'écart le plus faible est de deux points, à Malte (5 % et 7 %). L'Allemagne, à laquelle le Gouvernement aime se comparer, n'a pas de deuxième taux réduit et se contente d'un taux normal à 19 % et d'un taux réduit à 7 %.

Le choix de disposer de deux taux réduits rapprochés , dont l'absence de pertinence est renforcée par le fait que moins de la moitié de l'assiette actuellement taxée à 5,5 % le sera désormais à 7 %, confirme la réticence du Gouvernement à assumer ses aspirations en matière d'accroissement de la part de la TVA et des impôts de consommation dans le total des prélèvements obligatoires.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 12 (Art. 197 du code général des impôts)  Barème applicable pour le calcul de l'impôt sur le revenu de l'année 2012 (imposition des revenus de l'année 2011) - Absence d'indexation

Commentaire : Le présent article a pour objet de supprimer l'indexation, en fonction de la progression de l'indice des prix hors tabacs, des seuils et limites du barème de l'impôt sur le revenu de l'année 2012, applicable aux revenus de l'année 2011, proposée par le projet de loi de finances pour 2012.

L'absence d'indexation des seuils et limites du barème de l'impôt sur le revenu proposé par le présent article revient exactement à supprimer la revalorisation 104 ( * ) qui a été votée par l'Assemblée nationale comme le Sénat dans le cadre de l'examen de l'article 2 du projet de loi de finances pour 2012 en cours de discussion, sur la base de l' évolution des prix hors tabacs, soit 2,1 % en 2011 . Aussi, se contentera-t-on ici d'en rappeler simplement le principe, le lecteur étant invité à se reporter au rapport général sur le projet de loi de finances pour 2012 105 ( * ) .

I. LE DROIT EXISTANT

Le présent article constitue l'une des composantes du plan de rigueur annoncé par le Premier ministre le 7 novembre dernier, le présent article procède au gel du barème de l'impôt sur le revenu, ainsi que des seuils et limites associés , sur les revenus de l'année 2011 qui donneront lieu à la cotisation d'impôt de 2012. Cette mesure est destinée à s'appliquer pendant deux ans - pour les impositions de 2012 et 2013 - dans le cadre du retour du déficit public sous le seuil de 3 % du produit intérieur brut.

Par simple effet miroir, il est proposé de rétablir l'ensemble des seuils et limites du barème de l'IR applicables aux revenus de 2010, au titre de la loi de finances initiales pour 2011, préexistants au projet de loi de finances pour 2010, ainsi que l'illustrent les tableaux ci-dessous.

Désindexation des limites des tranches du barème de l'IR ( 1. du I de l'article 197 du CGI)

(en euros)

Taux marginaux d'imposition

LFI 2011

Tranches actuelles de revenus

PLF 2012

Tranches proposées de revenus

PLFR 2011

Retour aux tranches de revenus de la LFI 2011

0 %

Jusqu'à 5 963

Jusqu'à 6 087

Jusqu'à 5 963

5,5 %

De 5 964 à 11 896

De 6 088 à 12 146

De 5 964 à 11 896

14 %

De 11 897 à 26 420

De 12 146 à 26 975

De 11 897 à 26 420

30 %

De 26 421 à 70 830

De 26 975 à 72 317

De 26 421 à 70 830

41 %

Plus de 70 830

Plus de 72 317

Plus de 70 830

Les plafonds et limites suivants font également l'objet d'un retour à leurs niveaux antérieurs au vote des dispositions du projet de loi de finances pour 2012 :

Désindexation des autres limites et seuils associés au calcul de l'impôt sur le revenu

(en euros)

Objet de la limite ou du seuil

LFI 2011

Pour les revenus de 2010

PLF 2012

Pour les revenus de 2011

PLFR 2011

Pour les revenus de 2011

Plafonnement de chaque demi-part de quotient familial (2. du I de l'article 197 du CGI)

2 336

2 385

2 336

Plafonnement de la part entière de quotient familial accordée au titre du premier enfant à charge des personnes vivant seules et élevant seules leurs enfants (2. du I de l'article 197 du CGI)

4 040

4 125

4 040

Plafonnement de la demi-part supplémentaire accordée aux personnes célibataires, divorcées ou veuves sans charge de famille et ayant élevé un enfant âgé de plus de 25 ans imposé distinctement (2. du I de l'article 197 du CGI)

897

916

897

Réduction d'impôt accordée au titre de la demi-part supplémentaire accordée aux contribuables anciens combattants, invalides ou parents d'enfants majeurs âgés de moins de 26 ans et imposés distinctement. (2. du I de l'article 197 du CGI)

661

675

661

Plafond de la décote (4. du I de l'article 197 du CGI)

439

448

439

Montant de l'abattement accordé en cas de rattachement d'un enfant majeur marié ou chargé de famille (article 196 B du CGI)

5 698

5 817

5 698

Il en est de même pour les autres plafonds ou limites qui évoluent de droit comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu.

Désindexation des seuils et plafonds évoluant comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu

(en euros)

Mesures afférentes aux revenus catégoriels et au revenu global

Référence au code général des impôts

LFI 2011

Pour les revenus de 2010

PLF 2012

Pour les revenus de 2011

PLFR 2011

Pour les revenus de 2011

Déduction forfaitaire de 10 % sur les traitements et salaires :

Article 83-3

- minimum :

421

430

421

- minimum pour les personnes inscrites en tant que demandeurs d'emploi depuis plus d'un an :

924

943

924

- maximum :

14 157

14 454

14 157

Plafond de la déduction de 10 % sur les pensions :

5a de l'article 158

- minimum :

374

382

374

- maximum :

3 660

3 737

3 660

Déductibilité du revenu global d'une somme représentative des avantages en nature des personnes âgées de plus de 75 ans vivant sous le toit du contribuable

Abattement pour personnes âgées de plus de 65 ans ou invalides :

Article 157 bis

2 312

2 361

2 312

- si le revenu net global ne dépasse pas :

14 220

14 518

14 220

ou :

1 156

1 180

1 156

- si le revenu net global est supérieur à la limite précédente, sans excéder :

22 930

23 412

22 930

Réduction d'impôt afférente aux dons effectués au profit d'associations venant en aide aux personnes en difficulté (plafond relevé comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu de l'année précédant celle du versement) :

1 ter de l'article 200

521

532

521

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Ce faisant, le Gouvernement escompte faire l'économie du coût de l'actualisation du barème de l'IR , proposée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012 précité, qui est estimé à 1 752 millions d'euros. Pour 2013, les recettes fiscales supplémentaires sont évaluées au double de leur montant de l'année précédente, soit 3 504 millions d'euros.

Dans la mesure où l'indexation du barème de l'IR produit également des effets sur le barème de l'impôt de solidarité sur la fortune, sur le plafonnement de la taxe d'habitation, les dégrèvement et abattements à la taxe foncière et aux droits de succession et de donation, le gain fiscal attendu est ainsi réparti.

Evaluation du gain de recettes fiscales engendré par le gel du barème de l'impôt  sur le revenu en 2012 et 2013

(en millions d'euros)

Recettes

2012

2013

Impôt sur le revenu

1 584

3 168

Impôt de solidarité sur la fortune

44

88

Droits de mutation à titre gratuit

42

84

Taxe foncière

9

18

Taxe d'habitation

73

146

TOTAL

1 752

3 504

Source : projet de loi de finances pour 2011 (évaluations préalables)

L'évaluation des recettes annexée au présent projet de loi de finances rectificative pour 2011 reproduit exactement le même chiffrage que celui indiqué à l'appui de l'article 2 de la loi de finances pour 2012. Or, celle-ci a été établie sur la base d'une prévision de croissance du PIB de 1,75 % tandis que le Gouvernement a revu cette prévision à la baisse, la fixant à 1 % pour 2012.

Le dernier chiffrage dont dispose votre rapporteure générale, issu de l'amendement déposé par le Gouvernement 106 ( * ) à l'article d'équilibre du projet de loi de finances pour 2012 destiné à y traduire l'incidence des dispositions fiscales contenues dans le présent projet de loi de finances rectificative pour 2011, n'a pas été revu pour tenir compte de la nouvelle hypothèse de croissance.

Quelques éléments sur l'impact de l'absence d'indexation du barème de l'IR sur les contribuables

1) A quoi sert l'indexation du barème sur l'inflation ?

Traditionnellement, le barème de l'impôt sur le revenu et de l'ISF est indexé chaque année sur l'inflation. L'effet mécanique de cette indexation permet aux contribuables dont les traitements, salaires ou revenus de remplacement suivent l'évolution de l'indice de prix de ne pas être redevables de l'impôt sur le revenu au titre d'une tranche d'imposition supérieure du seul fait de l'augmentation de leurs revenus. L'absence de revalorisation du barème conduirait alors à augmenter le poids des prélèvements.

2) Quelles conséquences du gel du barème de l'IR ?

Du fait de la progressivité de l'impôt sur le revenu, ce sont les cotisations des contribuables des tranches les plus élevées du barème qui supporteront les plus fortes hausses d'impôts. Mais il faut aussi prendre en compte le fait que le gel du barème va également faire entrer des foyers fiscaux dans des tranches supérieures d'imposition. A ce stade, il manque une information pertinente dans les chiffrages présentés par le Gouvernement qui serait de savoir combien de foyers fiscaux sont concernés par un passage dans la tranche supérieure d'imposition du seul fait de l'augmentation de leur salaire dans la même proportion que l'indice d'évolution des prix. L'administration fiscale, en réponse au questionnaire adressé par votre rapporteure générale, indique qu'il n'est « pas possible de déterminer précisément les foyers qui vont être impactés par le dispositif », les effets de la mesure étant fonction de la variation entre 2010 et 2011 des revenus imposables des foyers fiscaux. Néanmoins, il est possible de comparer, à situation constante, le surcoût d'imposition engendré par le présent article. Le tableau suivant présente le surcoût d'imposition de l'absence d'indexation pour un célibataire en fonction de plusieurs hypothèses de revenus :

Calcul du surcoût d'imposition du fait de la non indexation du barème de l'IR pour un célibataire

(en euros)

Source : DLF

L'impôt sans indexation sera donc plus élevé dès lors que le contribuable est imposable. Pour un salarié dont le revenu imposable annuel est de 12 200 euros, le surcoût d'imposition, ou la perte pour le foyer, représente 81 % du montant de l'impôt qui aurait été payé dans le cadre d'un barème indexé . Cet effet est donc particulièrement sensible, en proportion, pour les ménages modestes.

Plus largement, la mesure impactera l'ensemble des foyers qui paient l'impôt, que ces derniers basculent ou non dans une nouvelle tranche.

3) Quels effets collatéraux sur les autres impositions ?

L'absence d'indexation produira également des effets collatéraux sur les impôts indexés sur le barème de l'IR (l'ISF, donations et succession) et sur des impositions locales dont les critères d'exonérations sont alignés sur le revenu fiscal de référence dans lequel est pris en compte le revenu net imposable (TH et TF). Concrètement, cette mesure impactera les seuils de revenu fiscal de référence au-delà desquels les foyers ne sont plus éligibles au bénéfice d'exonération de taxe d'habitation ou de taxe foncière .

Les contribuables bénéficiaires d'un dégrèvement total de TH et de TF en qualité de titulaire de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (APA) ou de l'allocation supplémentaire d'invalidité ne sont pas concernés par le gel du barème de l'IR.

En revanche, les redevables de plus de 75 ans, pour ce qui concerne la TF, et de plus de 60 ans ainsi que les veufs, pour la TH, bénéficient d'un dégrèvement si leur revenus ne dépassent pas 10 024 euros par part de quotient familial et 2 676 euros par demi-part supplémentaire. En l'absence de revalorisation des ces seuils, les contribuables dont les revenus auront augmenté du seul fait de l'évolution de l'indice des prix perdront donc ces exonérations de TH et TF .

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l'initiative de notre collègue Gilles Carrez, rapporteur général, la commission des finances a adopté un amendement tendant à conserver l'indexation de la décote applicable au calcul de l'impôt sur le revenu - en maintenant son montant à 448 euros au lieu de le rétablir à 439 euros - afin de permettre aux contribuables devenant imposables de minimiser leur perte de revenu. Le coût global de cette mesure d'atténuation du ressaut d'imposition pour les bas salaires est évalué à 61 millions d'euros.

Toutefois, en raison de l'avis défavorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article illustre l'incohérence et l'injustice de la politique fiscale du Gouvernement.

Le projet de loi de finances rectificative adopté en Conseil des ministres le 16 novembre 2011 prévoit ainsi un article d'objet exactement contraire au projet de loi de finances pour 2012, adopté en Conseil des ministres le 28 septembre 2011 et dont l'examen par le Parlement n'est pas encore achevé.

Dans ces conditions, soit le Gouvernement a sciemment d'abord proposé au Parlement une indexation du barème tout en sachant qu'il ne la mettrait pas en oeuvre, soit il a effectivement changé d'avis en deux mois et la mesure proposée mérite d'être qualifiée d'improvisée.

Sur la méthode, il est surprenant que le Gouvernement propose de revenir sur une pratique constante et ininterrompue depuis 1969 sans expliquer clairement aux contribuables les conséquences de sa proposition, de manière directe sur le montant des cotisations au titre de l'impôt sur le revenu comme de manière indirecte sur les droits de succession ou les impôts locaux.

Ce faisant, le Gouvernement étend à l'impôt sur le revenu la méthode qu'il applique depuis quatre ans à la prime pour l'emploi, indexée pour la dernière fois dans le cadre de la loi de finances pour 2008, au titre des revenus de l'année 2007.

Sur le fond, le présent article illustre le décalage persistant entre le discours du Gouvernement et sa pratique. Dans son discours, le Gouvernement est opposé aux augmentations générales de la fiscalité et, au contraire, favorable aux suppressions de dépenses fiscales (qu'il n'arrive d'ailleurs pas à assumer en tant qu'augmentations de prélèvements obligatoires). Dans la pratique, quel meilleure exemple d'une augmentation généralisée des prélèvements obligatoires qu'une hausse de l'ensemble du barème de l'impôt sur le revenu ?

Pour obtenir un rendement équivalent à celui que le Gouvernement attend de la non revalorisation du barème de l'impôt sur le revenu, d'autres solutions étaient possibles.

Lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2012, le Sénat a adopté une série de mesure en matière de fiscalité des personnes et du patrimoine qui relèvent d'une logique fiscale exactement inverse :

- l'indexation de la prime de la pour l'emploi (coût de 330 millions d'euros) ;

- l'introduction d'une tranche supplémentaire au sommet du barème de l'IR au taux de 45 % pour la fraction de revenus supérieure à 100 000 euros, dont le rendement est estimé à 530 millions d'euros ;

- la suppression du bouclier fiscal anticipée dès 2012 (gain de 420 millions d'euros) ;

- et le rétablissement du barème de l'impôt de solidarité sur la fortune (gain de 1,9 milliard d'euros).

Les mesures proposées par le Sénat présentent des gains fiscaux supérieurs à l'absence d'indexation du barème de l'impôt sur le revenu.

C'est pourquoi, pour ces motifs et par cohérence avec les principes de justice fiscale défendus par la majorité sénatoriale, votre commission des finances a adopté un amendement de suppression de cet article.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 12 bis (nouveau) (Art. 93 du code général des impôts)  Régime fiscal des droits d'auteur

Commentaire : le présent article étend aux droits d'auteurs afférents à l'ensemble des oeuvres de l'esprit la possibilité d'être assujettis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires.

I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été introduit sur amendements identiques de nos collègues députés Marie-Christine Dalloz, Patrice Martin-Lalande et Michel Herbillon 107 ( * ) . Ces amendements ont reçu un avis favorable du Gouvernement, qui a levé le gage.

A. LE DROIT EXISTANT

Le 1 quater de l'article 93 du code général des impôts, relatif à la détermination des bénéfices imposables, prévoit d'imposer selon les règles prévues en matière de traitements et salaires « les produits de droits d'auteur perçus par les écrivains et compositeurs 108 ( * ) » .

Les revenus issus de la pratique d'un art sont, en principe, imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux . Selon l'article 92 du CGI, cette catégorie concerne en effet les professions libérales, professions où l'activité intellectuelle joue le rôle principal, et qui consistent en la pratique personnelle d'une science ou d'un art que l'intéressé exerce en toute indépendance. Le bénéfice non commercial (BNC) imposable est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession , au cours de l'année civile.

Deux modes d'imposition des BNC coexistent :

1) dans le régime dit « micro-BNC » , le bénéfice imposable est déterminé en appliquant aux recettes un abattement unique de 34 % (avec un minimum de 305 euros), lorsque ces recettes n'excèdent pas 32 600 euros. Comme pour les entreprises relevant du micro-BIC, les contribuables qui bénéficient de la franchise en base de TVA et qui perçoivent des revenus non commerciaux peuvent opter pour le prélèvement libératoire fiscal au taux de 2,20 % ;

2) les contribuables qui déclarent un montant annuel de recettes supérieur à 32 600 euros relèvent obligatoirement du régime de la déclaration contrôlée . Ils doivent alors tenir un livre journal, servi au jour le jour, présentant le détail des recettes et dépenses professionnelles, tenir un registre des immobilisations et amortissements et adresser au service des impôts, chaque année, une déclaration spéciale mettant en évidence les éléments pris en compte pour la détermination du bénéfice net. Déterminé par le contribuable lui-même, le bénéfice imposable peut être soumis à vérification par le service des impôts. En outre, s'il n'adhère pas à un centre de gestion agréé, le contribuable voit son revenu non commercial soumis au barème majoré de 25 %.

Compte tenu de ces contraintes, des régimes spécifiques permettent aux revenus non commerciaux de bénéficier de conditions déclaratives plus simples ou de modalités de calcul plus avantageuses. A ce titre, les écrivains et compositeurs, selon des modalités proches de celles des agents d'assurance ou des médecins conventionnés, peuvent exercer le droit d'option de l'article 93 du CGI afin de se voir appliquer le régime d'imposition sur le revenu des traitements et salaires . Pour des raisons liées au contrôle fiscal de ces revenus, le bénéfice de ce régime spécial est toutefois limité aux cas ou ces droits d'auteurs sont déclarés soit par leur débiteur, soit par la partie versante (c'est-à-dire le producteur, la maison d'édition, l'organisme gestionnaire de droits d'auteurs...).

Les revenus non commerciaux issus de cette activité sont alors intégrés au revenu net imposable, une fois retranchés les cotisations sociales et les frais professionnels (10 % selon le mode forfaitaire). Ce régime est donc plus simple et plus avantageux , notamment en ce qu'il n'implique pas de majoration de 25 % en cas de non-adhésion à un centre de gestion agréée.

B. L'EXTENSION PROPOSÉE

Le présent article propose que l'assimilation aux traitements et salaires soit étendue aux droits d'auteurs afférents à l'ensemble des oeuvres de l'esprit , au sens de l'article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle.

Cette catégorie - qui fait figure d'inventaire à la Prévert - inclut des oeuvres aussi variées que les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques, les conférences, allocutions, sermons, plaidoiries et autres oeuvres de même nature, les oeuvres dramatiques ou dramatico-musicales, les oeuvres chorégraphiques, les numéros et tours de cirque, les pantomimes, les compositions musicales avec ou sans paroles, les oeuvres cinématographiques et autres oeuvres consistant dans des séquences animées d'images, sonorisées ou non, dénommées ensemble oeuvres audiovisuelles, les oeuvres de dessin, de peinture, d'architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie, les oeuvres graphiques et typographiques, les oeuvres photographiques et assimilées, les oeuvres des arts appliqués, les illustrations, les cartes géographiques, les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l'architecture et aux sciences, les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire et les créations des industries saisonnières de l'habillement et de la parure.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La mesure proposée constitue une opportune simplification et supprime une discrimination injustifiée entre certaines oeuvres de l'esprit (littéraires et musicales), qui bénéficient d'un régime d'imposition simplifié, et toutes les autres, qui n'en bénéficient pas. En la matière, le droit fiscal s'adapte donc aux évolutions de la création artistique.

Au reste, si l'incidence budgétaire du présent article n'a pas pu être précisément chiffrée, les montants en jeu sont, selon les services du ministère du budget, peu significatifs, ce qui conduirait à un coût quasi nul .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 12 ter (nouveau) (Art. 199 undecies B et 217 undecies du code général des impôts)  Limitation du dispositif de défiscalisation des investissements productifs en outre-mer

Commentaire : le présent article vise à empêcher les contribuables personnes physiques ou les entreprises de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu ou d'une déduction d'impôt sur les sociétés au titre de la défiscalisation des investissements productifs en outre-mer lorsque ces personnes physiques ou sociétés contrôlent l'entreprise qui exploite l'investissement faisant l'objet de la défiscalisation et que la défiscalisation est mise en oeuvre par l'intermédiaire d'un contrat de location.

I. LE DROIT EXISTANT

Dans le cadre des avantages fiscaux liés aux investissements outre-mer réalisés par des contribuables soumis à l'impôt sur le revenu en application de l'article 199 undecies B du code général des impôts, ou à l'impôt sur les sociétés en application de l'article 217 undecies du même code, les contribuables ont le choix de réaliser des investissements soit en les exploitant directement, soit en les mettant à disposition d'une entreprise exploitante dans le cadre d'un contrat de location, avec obligation de rétrocéder à cette dernière une partie de l'avantage fiscal sous forme de réduction des loyers ou du prix de cession.

Dans ce dernier cas, lorsque le contribuable contrôle en droit ou en fait, directement ou indirectement, l'entreprise exploitante, il bénéficie à la fois :

- du montant de l'avantage fiscal qui lui revient de droit sous forme de réduction d'impôt ou de déduction du montant des investissements de son résultat fiscal ;

- et de la part rétrocédée à l'exploitant de manière indirecte, à hauteur de ses droits dans le capital de l'entreprise exploitante.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été introduit du fait de l'adoption, par l'Assemblée nationale, avec un avis défavorable de sa commission des finances et un avis favorable du Gouvernement , d'un amendement de notre collègue député Charles de Courson.

Il vise à empêcher les contribuables personnes physiques ou les entreprises de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu ou d'une déduction d'impôt sur les sociétés au titre de la défiscalisation des investissements productifs en outre-mer lorsque ces personnes physiques ou sociétés contrôlent l'entreprise qui exploite l'investissement faisant l'objet de la défiscalisation et lorsque le schéma de défiscalisation s'effectue dans le cadre d'un contrat de location .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La commission des finances de l'Assemblée nationale a donné un avis défavorable à l'adoption de l'amendement dont résulte cet article en raison des difficultés à expertiser le dispositif et à appréhender clairement ses conséquences pratiques .

En effet, il est courant que les dispositions de défiscalisation des investissements productifs en outre-mer soient utilisées par les entrepreneurs qui exploitent l'entreprise qui effectue l'investissement. Dans ce cas, la défiscalisation incite en effet les entrepreneurs à investir dans leur propre entreprise .

Même dans ces cas de figure, la défiscalisation peut ne pas être mise en oeuvre directement mais faire l'objet d'un contrat de location, ce qui permet aux entrepreneurs de faire participer à l'investissement d'autres investisseurs, qui bénéficient, comme eux, de l'avantage fiscal procuré par la défiscalisation.

Le risque de l'adoption du présent article est qu'il obligerait les contribuables qui exploitent une entreprises à effectuer leurs investissements directement , et non via un contrat de location, pour bénéficier de la défiscalisation. Or, les montages qui s'effectuent par des contrats de location visent à permettre à plusieurs investisseurs de participer au financement du même investissement.

Votre commission des finances vous propose un amendement visant à supprimer cet article , eu égard aux difficultés rencontrées pour appréhender pleinement les conséquences économiques que son adoption aurait sur les territoires ultramarins. Une réforme d'une telle ampleur de la défiscalisation des investissements productifs en outre-mer ne doit pas passer par l'adoption d'un amendement parlementaire à un projet de loi de finances rectificative de fin d'année. En outre, aucune évaluation de l'économie réalisée par l'adoption de cet amendement n'a été fournie par le Gouvernement .

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 12 quater (nouveau) (Art. 199 terdecies-0 A du code général des impôts)  Recentrage de la réduction d'impôt sur le revenu « Madelin » sur les souscriptions en numéraire au capital de sociétés en amorçage, en démarrage ou en expansion

Commentaire : le présent article tend à resserrer le champ des entreprises éligibles à la réduction d'impôt sur le revenu dite « Madelin », qui seraient désormais uniquement les petites entreprises en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion.

I. LE DROIT EXISTANT

Aux termes de l'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts, les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 22 % des versements effectués au titre de souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés .

Cette réduction d'impôt est incluse dans le plafonnement global des niches fiscales défini à l'article 200-0 A du même code.

A. LE RÉGIME ORDINAIRE DE LA RÉDUCTION « MADELIN »

1. Les investissements éligibles

Cet avantage fiscal est subordonné au respect, par la société bénéficiaire de la souscription, des conditions suivantes :

- les titres de la société ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger ;

- la société a son siège social dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ;

- elle est soumise à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun ou y serait soumise dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France ;

- elle compte au moins deux salariés à la clôture de l'exercice qui suit la souscription ayant ouvert droit à la présente réduction ou un salarié si elle est soumise à l'obligation de s'inscrire à la chambre de métiers et de l'artisanat ;

- elle exerce une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole , à l'exclusion des activités procurant des revenus garantis en raison de l'existence d'un tarif réglementé de rachat de la production, des activités financières, des activités de gestion de patrimoine mobilier et des activités immobilières 109 ( * ) . De plus, l'entreprise ne doit pas exercer une activité de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil ;

- ses actifs ne sont pas constitués de façon prépondérante de métaux précieux, d'oeuvres d'art, d'objets de collection, d'antiquités, de chevaux de course ou de concours ou, sauf si l'objet même de son activité consiste en leur consommation ou en leur vente au détail, de vins ou d'alcools ;

- les souscriptions à son capital confèrent aux souscripteurs les seuls droits résultant de la qualité d'actionnaire ou d'associé, à l'exclusion de toute autre contrepartie notamment sous la forme de tarifs préférentiels ou d'accès prioritaire aux biens produits ou aux services rendus par la société ;

- elle doit être une petite et moyenne entreprise qui satisfait à la définition des petites et moyennes entreprises qui figure à l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie) ;

- elle n'accorde aucune garantie en capital à ses associés ou actionnaires en contrepartie de leurs souscriptions.

L'avantage fiscal trouve également à s'appliquer aux investissements dans des holdings ayant pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés éligibles, à condition que ces holdings :

- ne comptent pas plus de cinquante associés ou actionnaires ;

- aient exclusivement pour mandataires sociaux des personnes physiques ;

- et communiquent à chaque investisseur, avant la souscription de ses titres, un document d'information précisant notamment la période de conservation des titres pour bénéficier de l'avantage fiscal, les modalités prévues pour assurer la liquidité de l'investissement au terme de la durée de blocage, les risques de l'investissement et la politique de diversification des risques, les règles d'organisation et de prévention des conflits d'intérêt, les modalités de calcul et la décomposition de tous les frais et commissions, directs et indirects, ainsi que le nom du ou des prestataires de services d'investissement chargés du placement des titres.

2. Les plafonds de souscription

Selon les dispositions du II de l'article 199 terdecies -0 A précité, les versements ouvrant droit à la réduction d'impôt « Madelin » sont retenus dans la limite annuelle de 20 000 euros pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et de 40 000 euros pour les contribuables mariés soumis à imposition commune . Les réductions d'impôt associées s'élèvent donc respectivement à 4 400 euros et 8 800 euros par an.

Cependant, la fraction d'une année excédant, le cas échéant, les limites mentionnées au premier alinéa, ouvre droit à la réduction d'impôt dans les mêmes conditions au titre des quatre années suivantes.

B. LE « MADELIN AMORÇAGE »

Un plafond spécifique, codifié au II bis de l'article 199 terdecies -0 A précité, concerne les petites entreprises en amorçage.

Plus précisément, les souscriptions doivent concerner des sociétés :

- respectant l'ensemble des conditions précédemment énumérées ;

- employant moins de cinquante salariés et ayant réalisé un chiffre d'affaires annuel ou ayant un total de bilan inférieur à 10 millions d'euros au cours de l'exercice ;

- créées depuis moins de cinq ans ;

- en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion au sens des lignes directrices communautaires concernant les aides d'Etat visant à promouvoir les investissements en capital-investissement dans les petites et moyennes entreprises (2006/ C 194/02) ;

- non qualifiables d'entreprises en difficulté au sens des lignes directrices communautaires concernant les aides d'Etat au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (2004/ C 244/02) et ne relevant pas des secteurs de la construction navale, de l'industrie houillère ou de la sidérurgie.

Les plafonds des versements retenus pour la réduction d'impôt sont alors portés respectivement à 50 000 euros pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et à 100 000 euros pour les contribuables mariés soumis à imposition commune .

En revanche, il est à noter qu'à l'inverse du régime « ordinaire », ces montants majorés ne sont pas reportables, lorsqu'ils sont dépassés, au titre des quatre années suivantes par le contribuable.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de nos collègues députés Gilles Carrez, rapporteur général du budget, et Nicolas Forissier, avec un avis de sagesse du Gouvernement, propose de supprimer le dispositif « Madelin ordinaire », concernant l'ensemble des PME, et de le remplacer par le « Madelin amorçage » .

Ainsi, les conditions supplémentaires d'éligibilité des entreprises à cette réduction d'impôt figurant au II bis de l'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts seraient « remontées » au I de l'article, qui définit le régime général du « Madelin ». En revanche, les plafonds de souscription s'appliquant au Madelin amorçage (soit 50 000 euros pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et 100 000 euros pour les contribuables mariés soumis à imposition commune) seraient conservés . Il est donc proposé de modifier en ce sens le II de cet article 199 terdecies -0 A.

Par coordination les II bis et II ter du même article, désormais superfétatoires, seraient supprimés, et il serait procédé à un aménagement rédactionnel de conséquence du VI quinquies de cet article.

L'ensemble de ces dispositions s'appliqueraient aux versements effectués à compter du 1 er janvier 2012 .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article est vertueux dans son principe.

En premier lieu, il devrait atténuer la charge de l'Etat associée à la réduction d'impôt « Madelin ». Le Gouvernement a estimé à 190 millions d'euros l'économie qui en résulterait pour les finances publiques . Ce chiffre repose cependant sur l'hypothèse d'un comportement constant des contribuables dans leurs choix d'investissements. Or, il est vraisemblable que les épargnants s'orientent davantage vers les entreprises en amorçage du fait de ces nouvelles dispositions, ce qui diminuerait le gain de l'Etat.

Néanmoins, une telle réorientation constituerait la deuxième vertu du dispositif proposé . En effet, plusieurs travaux ont montré que ce sont précisément ces entreprises qui ont le plus besoin de financement, le rapport du Comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales (dit « Comité Guillaume ») ayant même estimé, en juin 2011, qu'en matière de dépenses fiscales relatives au capital-investissement dans les PME, « l'intervention de l'Etat n'est justifiée qu'en présence de défaillances de marché concernant principalement deux types d'entreprises : les entreprises qui présentent un niveau de risque très important en raison du caractère innovant de leur activité et les jeunes entreprises en phases d'amorçage ou les entreprises en phase d'expansion ».

Si la logique du présent article peut donc être suivie, toutes les conséquences de la suppression brutale du dispositif « Madelin » ordinaire n'ont peut-être pas été mesurées .

Cela semble particulièrement vrai pour les entreprises solidaires , définies à l'article L. 3332-17-1 du code du travail et agréées par l'autorité administrative. Entrent dans cette catégorie les entreprises dont les titres de capital, lorsqu'ils existent, ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé et qui :

- soit emploient des salariés dans le cadre de contrats aidés ou en situation d'insertion professionnelle ;

- soit, si elles sont constituées sous forme d'associations, de coopératives, de mutuelles, d'institutions de prévoyance ou de sociétés dont les dirigeants sont élus par les salariés, les adhérents ou les sociétaires, remplissent certaines règles (définies par décret) en matière de rémunération de leurs dirigeants et salariés.

En outre, sont assimilés à ces entreprises les organismes dont l'actif est composé pour au moins 35 % de titres émis par des entreprises solidaires ou les établissements de crédit dont 80 % de l'ensemble des prêts et des investissements sont effectués en faveur des entreprises solidaires.

Selon les informations dont dispose votre rapporteure générale, la très grande majorité des entreprises solidaires ne respectent pas les nouveaux critères introduits par les députés (notamment la création depuis moins de cinq ans) alors même qu'au vu de leur modèle économique, la réduction d'impôt « Madelin » constitue pour elles une source de financement d'une très grande importance . Les députés l'avaient d'ailleurs eux-mêmes reconnu en proposant la suppression du plafond de minimis s'appliquant aux fonds que peuvent recueillir les entreprises solidaires au travers des dispositifs « Madelin » et « ISF-PME » (article 41 bis du projet de loi de finances pour 2012, qui entre d'ailleurs en contradiction avec les dispositions du présent article).

C'est pourquoi votre rapporteure générale propose que la restriction du champ de cette réduction d'impôt ne s'applique pas à ces entreprises .

Décision de la commission : votre commission des finances vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 12 quinquies (nouveau)  (Art. 200 du code général des impôts)  Limitation de l'avantage fiscal consenti dans le cas des dons et des cotisations aux partis et groupements politiques

Commentaire : le présent article vise à limiter à 15 000 euros par an le montant des dons et des cotisations aux partis et groupements politiques ouvrant droit à réduction d'impôt sur le revenu.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article 4 de la Constitution dispose que les partis politiques « concourent à l'expression du suffrage » et « se forment et exercent leur activité librement ».

Les partis et groupements politiques peuvent avoir accès à deux sources de financement : une aide publique provenant de l'Etat et des apports (sous forme de dons ou de cotisations) de la part de personnes physiques.

A. LE FINANCEMENT PUBLIC DES PARTIS ET GROUPEMENTS POLITIQUES

Le montant des aides publiques aux partis et groupements politiques, inscrit en loi de finances initiale, est inchangé depuis 1995 : 40,15 millions d'euros répartis en deux fractions .

La première fraction de l'aide publique est ventilée proportionnellement au nombre de suffrages obtenus par les partis et groupements au 1 er tour des dernières élections législatives, dès lors qu'ils ont atteint 1 % des suffrages.

La seconde fraction , limitée aux bénéficiaires de la première fraction, est partagée selon leur représentation parlementaire. Ces répartitions sont soumises aux conditions fixées par l'article 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique.

Sur ce montant total de 80,3 millions d'euros , l'enveloppe effectivement répartie depuis 2003 et jusqu'en 2007 ne s'élevait toutefois qu'à 73,3 millions d'euros. Une somme de 7 millions d'euros n'était en effet pas répartie au titre de la première fraction, en conséquence des sanctions prévues pour les partis n'ayant pas respecté les règles de parité fixées par la loi n° 2000-493 du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux 110 ( * ) .

De ce point de vue, les élections législatives de 2007 ont conduit à une nouvelle répartition de l'aide publique et le montant effectivement réparti en 2011 s'est élevé à 74,9 millions d'euros (5,4 millions d'euros n'étant pas distribués au titre de la première fraction).

En 2011, 32 partis et groupements politiques ont été bénéficiaires de la première fraction de l'aide publique et 22 de la seconde fraction.

Dans son rapport d'activité pour 2010, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) s'est interrogée sur le phénomène des « micro-partis » . En effet, la moitié des formations politiques ayant déposé des comptes certifiés en 2009 présente des recettes inférieures à 22 336 euros. La Commission relevait notamment que « la création d'une structure politique qui se soumettra à la loi sur la transparence financière puis contribuera au financement d'une campagne électorale n'apparait pas être une démarche contraire à l'esprit de la loi. En revanche, faire entrer dans le champ de la loi une structure qui n'interviendra jamais dans le financement d'une campagne électorale, tout en faisant bénéficier ses membres de l'avantage fiscal , peut paraître moins légitime ».

B. LES DONS ET LES COTISATIONS DES PERSONNES PHYSIQUES

Au-delà de cette aide publique, les partis et groupements politiques peuvent également bénéficier de dons ou de cotisations de personnes physiques .

En application de l'article 11-4 de la loi précitée du 11 mars 1988, « les dons consentis par des personnes physiques dûment identifiées à une ou plusieurs associations agréées en qualité d'association de financement ou à un ou plusieurs mandataires financiers d'un même parti politique ne peuvent annuellement excéder 7 500 euros ».

De ce point de vue, en application de l'article 200 du code général des impôts (CGI), l'Etat finance indirectement la vie politique en accordant aux donateurs et aux cotisants un avantage fiscal pour les versements qu'ils effectuent au mandataire d'un parti (y compris les cotisations d'élus sous certaines conditions).

Plus précisément, cet avantage fiscal correspond à une réduction d'impôt sur le revenu égale à 66 % du montant des dons et cotisations versés .

La CNCCFP ne dispose pas de chiffres précis quant au montant exact de cette dépense fiscale, mais elle en estime néanmoins l'importance « entre la moitié et les deux tiers de l'aide publique directe » 111 ( * ) .

En revanche, les personnes morales (à l'exception des partis ou groupements politiques) ne peuvent contribuer au financement des partis ou groupements politiques , ni en consentant des dons, sous quelque forme que ce soit, à leurs associations de financement ou à leurs mandataires financiers, ni en leur fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de la commission des finances, avec l'avis favorable du Gouvernement .

En complétant l'article 200 du CGI, il propose de limiter à 15 000 euros par an le montant des dons et des cotisations aux partis et groupements politiques ouvrant droit à réduction d'impôt sur le revenu.

Cette disposition entrera en vigueur au 1 er janvier 2012 .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LES DONS ET LES COTISATIONS : UNE PART SIGNIFICATIVE DES RESSOURCES DES PARTIS ET GROUPEMENTS POLITIQUES

En 2009, les recettes des partis et groupements politiques s'établissaient comme suit. Il est précisé que le tableau ci-dessous recense uniquement les formations politiques dont les produits ont été supérieurs à 1,5 million d'euros . Ces formations concentrent plus de 90 % des recettes de l'ensemble des partis politiques ayant déposé des comptes certifiés.

Les recettes des partis et groupements politiques en 2009

Source : CNCCFP

Il apparaît ainsi qu'en 2009 les cotisations des adhérents représentaient, pour ces formations politiques, 13 % de l'ensemble de leurs recettes, les contributions venant des élus s'élevaient à 20,1 % et les dons de personnes physiques à 8,4 %. Au total, ces trois catégories pesaient ainsi 41,5 % des recettes des principales formations politiques .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 13 (Art. 117 quater, 125 A, 125 C et 187 du code général des impôts)  Augmentation des taux du prélèvement forfaitaire libératoire applicables aux revenus du capital (dividendes et intérêts)

Commentaire : le présent article tend à augmenter le taux du prélèvement forfaitaire libératoire applicable à certains revenus du capital - les dividendes et les intérêts - qui passerait de 19 % à 24 %.

I. LE DROIT EXISTANT

A. UNE IMPOSITION AU BARÈME...

Aux termes de l'article 158 du code général des impôts (CGI), les intérêts et autres produits à taux fixe 112 ( * ) sont, en principe, passibles de l'impôt sur le revenu, établi selon un barème progressif 113 ( * ) .

Il en est de même pour les dividendes , après application d'abattements définis aux 2° et 5° du 3 de l'article 158 précité, à savoir :

- un premier abattement de 40 % sur les revenus distribués par les sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés ou d'un impôt équivalent ou soumises sur option à cet impôt, ayant leur siège dans un Etat de la Communauté européenne ou dans un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur les revenus. Cet abattement est théoriquement destiné à éliminer la double imposition des bénéfices distribués par les entreprises ;

- un second abattement annuel de 1 525 euros pour les contribuables célibataires, divorcés ou veufs, et de 3 050 euros pour les contribuables mariés soumis à une imposition commune.

B. ... AVEC LA POSSIBILITÉ D'OPTER POUR UN PRÉLÈVEMENT FORFAITAIRE LIBÉRATOIRE

Toutefois, les contribuables peuvent opter pour un prélèvement forfaitaire libératoire (PFL) au taux de 19 % pour certains revenus.

1. L'option du PFL pour les dividendes

Cette option est possible pour les dividendes :

- d'une part, du fait des dispositions de l'article 117 quater du code général des impôts, créé par la loi de finances pour 2008 (loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007). Comme cela a été montré dans le tome II du rapport général 114 ( * ) sur le projet de loi de finances pour 2012, par construction, du fait des abattements précités, ce prélèvement n'est profitable qu'à certains contribuables dont les revenus les situent dans la tranche marginale de 41 % de l'IR et percevant plus de 20 000 euros de dividendes 115 ( * ) . Sous l'hypothèse d'un rendement du capital de 2 %, la mesure concerne des patrimoines investis en actions d'un minimum d'un million d'euros pour une personne seule ;

- d'autre part, l'article 187 du CGI prévoit une retenue à la source au taux de 19 % pour les dividendes ou revenus assimilés distribués à des personnes physiques qui ont leur domicile fiscal hors de France dans un Etat de l'Espace économique européen (EEE). Pour les autres pays, il s'élève à 25 %, voire à 50 % pour les Etats ou territoires non coopératifs au sens de l'article 238-0 A du code général des impôts. Ces taux peuvent être réduits par les conventions fiscales conclues par la France avec les différents Etats.

2. L'option du PFL pour les intérêts et assimilés

Cette option est également possible :

- pour les intérêts et revenus assimilés , aux termes de l'article 125 A du CGI. En l'absence d'abattement, les contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu au taux marginal de 30 % ou de 41 % ont intérêt à opter pour le PFL ;

- pour la rémunération des sommes mises à la disposition d'une société par les personnes physiques qui en sont associées ou actionnaires, sous certaines conditions (article 125 C du même code).

D'autre part, il convient de signaler que, pour certains produits spécifiques, d'autres taux sont applicables, comme l'indique le tableau ci-après :

Prélèvements fiscaux sur les revenus patrimoniaux

NATURE DES PLACEMENTS

TAUX 116 ( * )

Placements à revenu fixe et bons ou contrats de capitalisation et d'assurance-vie

§ Emprunts d'État.

§ Obligations et autres titres d'emprunt négociables.

§ Fonds salariaux. Comptes bloqués d'associés.

§ Titres de créances négociables : billets de trésorerie, certificats de dépôt, bons d'institutions financières spécialisées, bons des sociétés financières, bons à moyen terme négociables.

Produits encaissés en 2010.

19 %

Parts de fonds communs de créances (FCC).

Produits encaissés en 2010

19 %

Créances, dépôts, cautionnements, comptes courants d'associés.

Intérêts encaissés ayant couru :

> entre le 1.1.1990 et le 31.12.1994

35 %

> à compter du 1.1.1995

19 %

Plan d'épargne populaire (PEP).

> Retrait avant 8 ans (au moins 4 ans )

19 %

> Retrait après 8 ans

0 %

§ Bons du Trésor et assimilés, bons du Trésor sur formules, bons de la Caisse nationale de Crédit agricole, bons d'épargne des PTT ou de La Poste, bons émis par les groupements régionaux d'épargne et de prévoyance, bons à 5 ans du Crédit foncier de France.

§ Bons de caisse émis par des établissements de crédit.

Émis :

> entre le 1.1.1983 et le 31.12.1989

45 %

> entre le 1.1.1990 et le 31.12.1994

35 %

> à compter du 1.1.1995

19 %

Lorsque l'anonymat est demandé

60 %

NATURE DES PLACEMENTS

TAUX

Placements à revenu fixe et bons ou contrats de capitalisation et d'assurance-vie

Bons ou contrats de capitalisation et placements de même nature (assurance-vie).

Souscrits entre le 1.1.1983 et le 31.12.1989 pour une durée de :

> moins de 2 ans

45 %

> 2 à 4 ans

25 %

> 4 à 6 ans

15 %

> 6 ans et plus.

7,5 %

Souscrits depuis le 1.1.1990 pour une durée :

> de moins de 4 ans

35 %

> de 4 à 8 ans

15 %

> de 8 ans et plus

7,5 %

Lorsque l'anonymat est demandé (quelle que soit la durée du contrat)

60 %

Plan d'épargne-logement (PEL).

Intérêts courus à compter du 12 ème anniversaire du plan (ou de son échéance si plan ouvert avant le 1.4.1992)

19 %

Épargne solidaire.

Produits de placement à revenu fixe 117 ( * ) abandonnés au profit d'organismes d'intérêt général

5 %

Placements à revenu variable (dividendes)

Actions et parts de sociétés.

Dividendes éligibles à l'abattement de 40 %

19 %

Source : DGFiP

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose de passer de 19 % à 24 % le taux de droit commun du PFL pour les revenus perçus à compter du 1 er janvier 2012. Cette augmentation concernerait :

- les dividendes distribués par les sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés (IS) ou d'un impôt équivalent ayant leur siège dans un Etat de l'Union européenne ou dans un Etat ou territoire ayant conclu une convention d'assistance en matière de lutte contre la fraude fiscale (modification du premier alinéa du 1 du I de l'article 117 quater du CGI) ;

- les produits des obligations négociables et des titres participatifs (modification du premier alinéa du 1° du III bis de l'article 125 A du CGI) ;

- les produits des titres de créances négociables sur un marché réglementé et non susceptibles d'être cotés (modification du 1° bis du III bis de l'article 125 A du CGI) ;

- les produits des bons et titres émis à compter du 1 er janvier 1995, lorsque le bénéficiaire des intérêts autorise l'établissement payeur à communiquer son identité et son domicile fiscal à l'administration fiscale (modification du premier alinéa du 6° du III bis de l'article 125 A du CGI) ;

- les produits de placements courus à partir du 1 er janvier 1995 (modification du 7° du III bis de l'article 125 A du CGI) ;

- les produits de parts émises par des fonds communs de créances ou les bonis de liquidation répartis par ces fonds (modification du 8° du III bis de l'article 125 A du CGI) ;

- les produits des bons et titres émis à compter du 1 er janvier 1998, lorsque le souscripteur et le bénéficiaire ont autorisé l'établissement payeur à communiquer leur identité et leur domicile fiscal à l'administration fiscale (modification du premier alinéa du 9° du III bis de l'article 125 A du CGI) ;

- les sommes mises à la disposition d'une société par les personnes physiques qui en sont associées ou actionnaires, sous certaines conditions (modification du I de l'article 125 C du CGI) ;

- les produits (précités) énumérés à l'article 125 A du CGI et distribués par des établissements situés dans un État membre de l'Union européenne ou un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance en matière de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales (par renvoi aux dispositions de l'article 125 A du CGI dans l'article 125 D du CGI) ;

- et les dividendes distribués par les sociétés passibles de l'IS ou d'un impôt équivalent à des personnes ayant leur domicile fiscal dans un Etat membre de l'Union européenne ou un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance en matière de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales (modification du quatrième alinéa du 1 de l'article 187 du CGI).

Le Gouvernement estime le rendement de ces mesures à 600 millions d'euros , soit 350 millions d'euros pour les dividendes et 250 millions d'euros pour les produits à taux fixe.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des finances et avec un avis de sagesse du Gouvernement, a adopté un amendement :

- portant à 21 % (au lieu de 24 %) le taux du prélèvement forfaitaire libératoire applicable aux dividendes (pour les résidents comme pour les non-résidents qui ont leur domicile fiscal hors de France dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ) afin que l'option pour le PFL conserve un intérêt objectif pour certains contribuables ;

- et, en parallèle, augmentant de cinq points les taux des prélèvements applicables à d'autres revenus patrimoniaux .

Seraient ainsi concernés par ce nouvel alourdissement :

- les intérêts d'obligations, titres participatifs et autres titres d'emprunts négociables émis avant le 1er janvier 1987 et les détenteurs de bons de caisses émis par les entreprises industrielles et commerciales (passage, selon la date d'émission, de 10 % à 15 % ou de 12 % à 17 %) ;

- et les revenus autres que les dividendes perçus par des non-résidents , visés à l'article 187 du code général des impôts. Le taux applicable serait porté de 25 % à 30 % dans le cas de droit commun, et de 50 % à 55 % lorsque ces produits sont payés dans un Etat ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A du même code .

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE LOGIQUE DE RENFORCEMENT DE LA TAXATION PROPORTIONNELLE QUI NE PEUT ÊTRE SUIVIE

L'économie générale du présent article s'inscrit dans la continuité des choix gouvernementaux, qui privilégie systématiquement l'imposition proportionnelle des revenus patrimoniaux . En cas de besoin, c'est sur le taux des prélèvements que le Gouvernement agit, alors même que celui-ci frappe indistinctement tous les contribuables imposés au PFL, quel que soit le niveau de leurs revenus. Telle a déjà été la démarche suivie en loi de finances pour 2008 (passage du taux des PFL de 16 % à 18 %), puis en loi de finances pour 2011 (passage à 19 %).

L'augmentation proposée est cette fois très substantielle (cinq points).

Pour sa part, votre rapporteure générale ne souscrit pas à la logique du Gouvernement, qui consiste à accroître la proportionnalité de la fiscalité frappant les revenus patrimoniaux plutôt que d'améliorer la progressivité de notre système fiscal. Contrairement à ce qu'a indiqué Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, le dispositif proposé ne consiste pas à faire en sorte que « la fiscalité des revenus du patrimoine soit la même que celle des revenus du travail » 118 ( * ) . D'une part, on reste loin des taux des premières tranches d'imposition sur le revenu pour ce qui concerne les intérêts . D'autre part, pour les contribuables situés dans les tranches inférieures de l'IR (voire non imposés) , c'est-à-dire pour l'épargne populaire, on s'éloigne au contraire des taux applicables à leurs revenus du travail .

De plus, le caractère injuste des mesures proposées est renforcé par le fait que de nombreux contribuables, sans doute souvent mal conseillés (voire non conseillés), recourent au prélèvement forfaitaire libératoire sans y avoir intérêt . Le tableau ci-après le fait bien apparaître pour ce qui concerne les dividendes :

Nombre de foyers ayant opté pour le PFL sur les dividendes par tranche d'imposition sur le revenu

Taux marginal d'imposition

Nombre de foyers

Montant déclaré en 2DA (en millions d'euros)

Produit correspondant en millions d'euros (18 %)

0 %

5 131

111

20

5,5 %

7 872

77

14

14 %

19 051

410

74

30 %

25 622

2 011

362

41 %

22 415

4 656

838

Total

80 091

7 264

1 308

Source : fichier exhaustif des déclarations des revenus de 2010 à la troisième émission

Comme cela a été indiqué précédemment, les contribuables n'étant pas imposés au taux marginal de 41 % sont, par définition, perdants dans cette opération - ceux de la tranche supérieure n'étant pas toujours gagnants . Pourtant, en 2010, 57 676 contribuables relevant d'une des quatre premières tranches du barème ont opté pour le PFL alors qu'ils n'y avaient pas intérêt. Notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général du budget, dans sa propre analyse du présent article 119 ( * ) , a lui-même relevé, en se fondant sur les revenus de 2009, que 43 409 foyers sur les 63 234 qui avaient alors opté pour le PFL dividendes l'avaient fait à tort.

S'agissant des intérêts et revenus assimilés, l'analyse est plus simple puisque les contribuables relevant des deux tranches d'imposition les plus élevés gagnent à opter pour le PFL, à l'inverse des autres contribuables. Or, là aussi, de nombreux foyers (plusieurs millions) effectuent un choix qui ne leur est pas profitable du point de vue de l'impôt acquitté, comme le montre le tableau ci-après :

Nombre de foyers ayant opté pour le PFL sur les intérêts et assimilés par tranche d'imposition sur le revenu

Taux marginal d'imposition

Nombre de foyers

Montant déclaré en 2DA (en millions d'euros)

Produit correspondant en millions d'euros (18 %)

0 %

833 281

372

67

5,5 %

1 660 226

790

142

14 %

3 117 517

1 799

324

30 %

1 449 014

1 738

313

41 %

232 006

776

140

Total

7 292 044

5 475

986

Source : fichier exhaustif des déclarations des revenus de 2010 à la troisième émission

Ce sont donc plus de 5,6 millions de foyers qui gagneraient à l'imposition systématique de ces revenus au barème .

Le même constat figurait d'ailleurs en annexe du rapport de Philippe Marini sur les niches fiscales 120 ( * ) . En réponse au questionnaire qu'il lui avait adressé, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie avait indiqué (sur la base des revenus 2009) :

- d'une part, que les revenus patrimoniaux dans leur ensemble (hors plus-values immobilières) représentaient 18,1 milliards d'euros, réparties comme indiqué dans le tableau ci-après ;

Montants cumulés des différents revenus du patrimoine (revenus 2009)

Type de revenus imposés aux PFL et aux taux de 19% (PV)

(les données ne permettent pas prendre en compte les PVI)

Montants

(en M€)

Revenus des actions et parts soumis au prélèvement libératoire de 18% (ligne 2DA de la 2042)

5 229

Produits d'assurance-vie et de capitalisation soumis au prélèvement libératoire de 7,5%

(ligne 2DH de la 2042)

802

Produits de placement soumis aux prélèvements libératoires autres que ceux indiqués lignes 2DA et 2DH

(ligne 2EE de la 2042)

6 194

Plus-values, gains en capital et profits divers sur valeurs mobilières et assimilés

(ligne 3 VG de la 2042 et lignes du bloc 3 de la 2042C)

4 805

Plus-values des professions non salariées (revenus agricoles)

(lignes concernées de la 2042 C)

93

Plus-values des professions non salariées (revenus industriels et commerciaux)

(lignes concernées de la 2042 C)

571

Plus-values des professions non salariées (revenus non commerciaux)

(lignes concernées de la 2042 C)

446

Ensemble

18 139

Source : DGFiP

- d'autre part, que la très grande majorité des contribuables seraient gagnants en cas de suppression des prélèvements forfaitaires libératoires, alors même que cette opération serait, à terme, bénéfique pour les finances publiques . Cet apparent paradoxe illustre bien les très fortes inégalités qui existent en matière de répartition du patrimoine. Le tableau suivant résume ces constats.

Impact d'une éventuelle suppression des prélèvements forfaitaires libératoires sur les revenus patrimoniaux (sur la base des revenus 2009)

Nombre de contribuables concernés par la mesure

Nombre de contribuables perdants

Surplus d'imposition des contribuables perdants (en millions d'euros)

Nombre de contribuables gagnants

Perte de recettes résultant des contribuables gagnants (en millions d'euros)

Surplus d'imposition total (en millions d'euros)

Nombre de contribuables non impactés

8 055 574

2 381 414

1 944

5 667 821

- 314

1 630

6 339

Source : DGFiP

B. LE DISPOSITIF EN TROMPE L'oeIL INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale n'est pas satisfaisant sur deux points :

- d'une part, il impose un effort moindre aux contribuables percevant des dividendes , ce qui ne saurait se justifier en termes d'équité ;

- d'autre part, la portée réelle des mesures de compensation qu'il a introduite est très incertaine . Interrogé par votre rapporteure générale, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie n'a été en mesure d'indiquer ni la proportion des non-résidents qui échapperait à l'augmentation envisagée du fait de l'existence d'une convention fiscale contenant des clauses contraires, ni le rendement attendu par l'Etat .

Il s'agit donc d'un mécanisme dont les effets réels restent très flous et qui, par rapport à la version initiale du présent article, se traduirait probablement par une moindre taxation des revenus patrimoniaux.

C. LA DÉMARCHE DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES : AMÉLIORER LA PROGRESSIVITÉ DE L'IMPOSITION DES REVENUS DU PATRIMOINE

Votre rapporteure générale ne partage pas la logique sur laquelle repose le présent article et considère, au contraire, qu'il importe d'engager dès à présent un mouvement vers le retour au barème de l'IR des revenus patrimoniaux .

Comme cela a été montré, cette évolution se traduirait, une fois absorbée l'année de décalage de trésorerie qui en résulterait, par :

- une plus grande équité ;

- un gain pour les finances publiques ;

- et un nombre de contribuables « gagnants » nettement supérieur à celui des contribuables « perdants » - ces derniers étant, par construction, les plus aisés.

En cohérence avec la démarche suivie lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2012121 ( * ), il convient donc d'engager ce mouvement en supprimant dès à présent l'option pour le prélèvement forfaitaire libératoire applicable aux dividendes .

Toutefois, en cette période budgétaire tendue, il faut tenir compte du décalage de trésorerie créé, la première année d'application, par cette suppression, l'impôt sur le revenu étant acquitté l'année suivant la perception desdits revenus, à l'inverse du prélèvement à la source. De l'ordre de 990 millions d'euros pour les dividendes , ce décalage s'élèverait à environ 4 milliards d'euros si les intérêts étaient également concernés , ce qui n'est pas compatible avec l'équilibre budgétaire de l'année 2012.

Dans cette optique responsable, il convient donc d' accepter les augmentations des taux des prélèvements sur les intérêts et revenus assimilés proposées par le présent article, et de les considérer comme un premier pas vers le retour au barème.

Décision de la commission : votre commission des finances vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 13 bis (nouveau) (Art. L. 225-209, L. 225-209-2 [nouveau], L. 225-211 et L. 225-214 du code de commerce)  Modalités du rachat d'actions pour les sociétés non cotées

Commentaire : le présent article autorise les sociétés non cotées à racheter leurs propres actions.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article L. 225-206 du code de commerce pose le principe selon lequel « est interdite la souscription par la société de ses propres actions , soit directement, soit par une personne agissant en son nom propre mais pour le compte de la société ».

Les articles L. 225-207 à L. 225-217 du même code prévoient toutefois des dérogations à ce principe.

Toutes les sociétés, cotées ou non cotées, sont autorisées à racheter leurs propres actions dans deux cas :

- lorsque leurs assemblées générales ont décidé une réduction de capital non motivée par des pertes , elles peuvent autoriser le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, à acheter un nombre déterminé d'actions pour les annuler (article L. 225-207) ;

- lorsqu'elles font participer leurs salariés à leurs résultats par attribution d'actions gratuites (ou par option d'achats d'actions) ou dans le cadre d'un plan d'épargne salariale, elles peuvent, à cette fin, racheter leurs propres actions. Les actions doivent être attribuées ou les options doivent être consenties dans le délai d'un an à compter de l'acquisition (articles L. 225-208 et L. 225-209).

En dehors de ces deux cas, le code de commerce prévoit des règles spécifiques pour le rachat d'actions par les sociétés cotées sur un marché réglementé (Euronext) d'une part, et par les sociétés cotées sur un système multilatéral de négociation organisé (Alternext), sous la surveillance de l'Autorité des marchés financiers (AMF).

L'article L. 225-209 du code de commerce prévoit que « l'assemblée générale d'une société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, à acheter un nombre d'actions représentant jusqu'à 10 % du capital de la société ». Cette autorisation est donnée pour une durée qui ne peut être supérieure à 18 mois. Il est possible d'annuler les actions ainsi rachetées dans la limite de 10 % du capital sur une période de 24 mois (« relution » par annulation), ce qui permet d'augmenter le bénéfice par action. Le rachat d'actions est également pratiqué en vue de les utiliser en paiement ou en échange lors d'une opération de croissance externe (fusion, scission ou apport) ou pour favoriser la liquidité du titre .

L'article 37 de la loi de modernisation de l'économie (LME) du 4 août 2008 a autorisé le rachat d'actions pour les sociétés cotées sur des marchés non réglementés dans le seul objectif de liquidité. Ainsi, l'article L. 225-209-1 122 ( * ) du code de commerce autorise l'assemblée générale d'une société cotée « sur un système multilatéral de négociation qui se soumet aux dispositions législatives et réglementaires visant à protéger les investisseurs contre les opérations d'initiés, les manipulations de cours et la diffusion de fausses informations » (Alternext), à racheter ses propres actions, dans la limite de 10 % du capital, « aux seules fins de favoriser la liquidité des titres de la société ».

Dans tous les cas de figure, l'article 225-210 du même code prévoit qu'une société ne peut posséder, directement ou indirectement, plus de 10 % du total de ses propres actions. Au surplus, l'acquisition d'actions de la société ne peut avoir pour effet d'abaisser les capitaux propres à un montant inférieur à celui du capital augmenté des réserves non distribuables. La société doit disposer de réserves, autres que la réserve légale, d'un montant au moins égal à la valeur de l'ensemble des actions qu'elle possède. Les actions possédées par la société ne donnent pas droit aux dividendes et sont privées de droits de vote .

Enfin, l'article L. 225-211 du même code dispose que des registres des achats et des ventes effectués doivent être tenus par la société ou par la personne chargée du service de ses titres. Le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, doit indiquer, dans le rapport annuel, le nombre des actions achetées et vendues au cours de l'exercice, les cours moyens des achats et des ventes, le montant des frais de négociation, le nombre des actions inscrites au nom de la société à la clôture de l'exercice et leur valeur évaluée au cours d'achat, ainsi que leur valeur nominale pour chacune des finalités, le nombre des actions utilisées, les éventuelles réallocations dont elles ont fait l'objet et la fraction du capital qu'elles représentent.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l'initiative de nos collègues députés Nicolas Forissier, Olivier Carré, Arlette Grosskost, Alain Joyandet et Jean-François Mancel , l'Assemblée nationale a adopté le présent article, avec l'avis favorable du Gouvernement et sous-amendé par la commission des finances, tendant à autoriser les sociétés non cotées à racheter leurs propres actions et à en fixer le régime.

Le présent article insère un nouvel article L. 225-209-2 au sein du code de commerce ( alinéas 1 à 19 ) tendant à permettre que l'assemblée générale ordinaire d'une société non cotée puisse autoriser le conseil d'administration ou le directoire à acheter les actions de la société dans trois cas :

- afin d'attribuer, dans l'année de leur rachat, des actions à leurs salariés, notamment dans le cadre de la participation ou d'un plan d'épargne salariale ;

- d'échanger, dans les deux ans de leur rachat, des actions dans le cadre d'une opération de croissance externe ;

- de céder, dans les cinq ans de leur rachat, des actions à des actionnaires de la société « qui manifesteraient à la société l'intention de les acquérir à l'occasion d'une procédure de mise en vente organisée par la société elle-même dans les trois mois qui suivent chaque assemblée générale ordinaire annuelle » ; il s'agit alors de faciliter la transmission d'actions, notamment dans les groupes familiaux, entre les actionnaires existants .

A l'initiative de notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général, l'Assemblée nationale a adopté quatre sous-amendements, dont deux de coordination, avec l'avis favorable du Gouvernement.

Le premier d'entre eux précise notamment que le nombre d'actions acquises par la société ne peut excéder 10 % du capital en cas d'attribution aux salariés ou de rachat-vente à d'autres actionnaires. Le seuil est limité à 5 % en cas d'opération de croissance externe. Le texte initial du présent article prévoyait un seuil de 10 % pour toutes les opérations.

Un deuxième sous-amendement prévoit que « le prix des actions rachetées est acquitté au moyen d'un prélèvement sur les réserves dont l'assemblée générale a la disposition », c'est-à-dire les bénéfices distribuables . La société qui rachète ses propres actions est contrainte de le faire avec ses propres bénéfices et non par endettement ou par ponction sur sa trésorerie. La disposition a la vertu de mettre les actionnaires face à leurs responsabilités : si la société rachète ses propres actions, elle distribuera moins de bénéfices .

Le nouvel article L. 225-209-2 dispose également que :

- l'assemblée générale ordinaire précise les finalités de l'opération. Elle définit le nombre maximum d'actions, le prix ou les modalités de fixation du prix ainsi que la durée de l'autorisation, qui ne peut excéder douze mois ( alinéa 10 ) ;

- les actions rachetées à défaut d'avoir été utilisées pour l'une des finalités et dans les délais prévus sont annulées de plein droit ( alinéa 12 ) ;

- l'assemblée générale ordinaire statue « au vu d'un rapport d'un expert indépendant [...] et sur un rapport spécial des commissaires aux comptes faisant connaître leur appréciation sur les conditions de fixation du prix d'acquisition » ( alinéa 13 ) ;

- le prix des actions ne peut , à peine de nullité, être supérieur à la valeur la plus élevée, ni inférieur à la valeur la moins élevée figurant dans le rapport d'évaluation de l'expert indépendant ( alinéa 14 ) ;

- le conseil d'administration peut déléguer au directeur général - ou le directoire à son président - les pouvoirs nécessaires pour réaliser ces opérations ( alinéa 15 ) ;

- les commissaires aux comptes présentent à l'assemblée ordinaire annuelle un rapport spécial sur les conditions dans lesquelles les actions ont été rachetées et utilisées au cours du dernier exercice clos ( alinéa 16 ) ;

- les actions rachetées peuvent être annulées dans la limite de 10 % du capital de la société par périodes de vingt-quatre mois ( alinéa 17 ) ;

- par dérogation, les actions rachetées mais non utilisées peuvent, sur décision de l'assemblée générale ordinaire, être utilisées pour une autre des finalités prévues par l'article ( alinéa 18 ).

L'article L. 225-209-2 précise que « en aucun cas, ces opérations ne peuvent porter atteinte à l'égalité des actionnaires » ( alinéa 19 ).

Les alinéas 20 à 22 effectuent des coordinations avec les autres dispositions du code de commerce.

Le II. du présent article indique que « le 6° de l'article 112 du code général des impôts s'applique aux rachats d'actions opérés en application de l'article L. 225-209-2 du code de commerce » ( alinéa 23 ).

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN CAVALIER BUDGÉTAIRE

A la lecture de l'article 34 de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 (LOLF), il apparaît très douteux que le présent article relève du champ des lois de finances .

Il pourrait bien évidemment être opposé à cet argument le fait que le présent article comporte une disposition fiscale ainsi rédigée : « Le 6° de l'article 112 du code générale des impôts [CGI] s'applique aux rachats d'actions opérés en application de l'article L. 225-209-2 du code de commerce ».

Or l'article 112 du CGI précise que « ne sont pas considérés comme revenus distribués : [...]

« 6° les sommes ou valeurs attribuées aux actionnaires au titre de rachat de leurs actions, lorsque ce rachat est effectué dans les conditions prévues aux articles L. 225-208 ou L. 225-209 à L. 225-212 du code de commerce ».

Autrement dit, la disposition fiscale du présent article énonce une évidence en forme de pléonasme en indiquant que la loi fiscale applicable s'applique . Sa portée normative semble donc incertaine si ce n'est totalement inexistante !

La proposition de loi relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives, dite « Warsmann IV », en cours d'examen devant le Sénat, semble un véhicule plus approprié pour ce type de dispositions. D'ailleurs, son article 12 bis prévoit un élargissement des possibilités de rachats d'actions pour les sociétés cotées sur Alternext.

B. UN DISPOSITIF À L'OPPORTUNITÉ DISCUTABLE

1. Le Gouvernement n'avait pas souhaité l'inscrire dans la loi de régulation bancaire et financière

Durant l'été 2010, le Haut comité de Place avait procédé à une consultation publique relative à la possibilité d'étendre le rachat d'actions aux sociétés non cotées.

Le document de consultation indiquait que « l'extension de la procédure de rachat d'actions des sociétés non cotées présente cependant plusieurs risques :

« - aucun dispositif de contrôle de l'Autorité des marchés financiers n'est prévu pour les entreprises non cotées qui échappent ainsi aux dispositions relatives aux opérations d'initiés, aux fausses informations ou aux manipulations de cours ;

« - en l'absence de cotation, la valorisation des titres sera particulièrement délicate et pourrait conduire à des abus ;

« - elle pourrait remettre en question le principe d'égalité des actionnaires : pour les sociétés cotées, les actionnaires qui souhaitent céder leurs titres ont toujours la possibilité de le faire lorsque les actions sont admises aux négociations sur un marché organisé. La situation est différente pour les sociétés pour lesquelles il n'existe pas de marché : le fait pour certains actionnaires de pouvoir céder leurs titres plutôt que d'autres pourrait constituer une rupture d'égalité ».

A l'issue de cette consultation, le Gouvernement avait choisi de ne pas présenter cette proposition lors de l'examen de la loi de régulation bancaire et financière .

Votre rapporteure générale s'interroge par conséquent sur les raisons pour lesquelles le Gouvernement a donné un avis favorable au présent article sachant qu'il est la copie quasi-conforme du texte mis en consultation.

2. De fortes incertitudes sur le maintien de l'égalité entre les actionnaires

Le présent article comprend une disposition originale permettant le rachat-revente d'actions aux actionnaires déjà présents dans la société . Elle pourrait être comparée aux rachats d'actions par les sociétés cotées destinés à assurer la liquidité de leur titre.

Plus fondamentalement, elle vise aussi soit à faire entrer des actionnaires dans le capital sans dilution des autres actionnaires (c'est-à-dire sans procéder à une augmentation de capital) ou bien à « fluidifier la circulation des actions entre actionnaires , notamment en cas de déséquilibre temporaire entre l'offre et la demande d'actions » 123 ( * ) . Ce dernier point semble tout particulièrement s'adresser aux groupes familiaux qui souhaitent que la structure de l'actionnariat demeure familiale.

Par là, le présent article touche au coeur du pouvoir dans une société par actions. A ce titre, il est d'autant plus regrettable qu'il comporte moins de garanties en termes d'égalité de traitement entre les actionnaires que le texte proposé à la consultation en août 2010.

Ce dernier comportait la disposition suivante : « lorsque la société a décidé de procéder à l'achat de ses propres actions [...] , elle fait cette offre d'achat à tous les actionnaires , selon des modalités précisées par décret en Conseil d'Etat. Si les actions présentées à l'achat excèdent le nombre d'actions à acheter, il est procédé, pour chaque actionnaire vendeur, à une réduction proportionnelle au nombre d'actions dont il justifie être propriétaire ou titulaire ».

Cette règle stricte est remplacée, dans le présent article, par la mention, fort peu normative : « en aucun cas, ces opérations ne peuvent porter atteinte à l'égalité des actionnaires ». En réalité, il s'agit d'un renvoi implicite à l'article L. 823-11 du code de commerce qui dispose que « les commissaires aux comptes s'assurent que l'égalité a été respectée entre les actionnaires, associés ou membres de l'organe compétent ».

Il ne s'agit plus que d'un contrôle a posteriori et rien n'est dit quant aux réparations apportées par la société aux actionnaires éventuellement lésés (nullité de l'opération ou attribution de dommages-intérêts).

Ainsi, le présent article apparaît insuffisamment protecteur de l'égalité de traitement des actionnaires alors que, s'agissant notamment des groupes familiaux, la transmission des actions peut soulever de vives tensions entre actionnaires.

3. Les contraintes de la cotation sont également justifiées par l'octroi d'avantages spécifiques

Lors de la présentation de l'amendement portant le présent article additionnel, notre collègue député Nicolas Forissier expliquait que les sociétés non cotées « ont choisi de ne pas aller en Bourse, pour ne pas être soumises à des fonds de pension étrangers et à une certaine incertitude quant à leur capital ».

Effectivement, lorsqu'une entreprise choisit de se faire coter, elle accepte de multiples contraintes - légitimes - qui sont d'ordre comptable, juridique ou financière. Ces contraintes sont aussi le gage de la transparence et de l'intégrité du marché .

Pour l'entreprise, ces sujétions doivent être équilibrées par les avantages spécifiques de la cotation.

En particulier, le législateur a d'autant plus autorisé le rachat de leurs propres actions que les sociétés se soumettent à des obligations de plus en plus fortes . A ce jour, les entreprises cotées sur Euronext bénéficient des plus grandes facultés de rachat d'actions, suivies ensuite par les sociétés cotées sur Alternext et enfin par les sociétés non cotées.

L'assimilation des sociétés cotées et non cotées doit donc être regardée avec la plus grande circonspection car les secondes ne se plient à toutes les obligations auxquelles sont soumises les premières - comme le rappelait d'ailleurs le document de consultation cité précédemment.

On ne peut attribuer aux sociétés non cotées des avantages équivalents en termes de négociation d'actions, sans disposer de la contrepartie liée au caractère « public » et transparent de la cotation.

A coté de l'égalité entre les actionnaires, il convient également d'être attentif à l'égalité entre les entreprises de sorte que la puissance publique leur garantisse d'égales conditions de concurrence et opportunités de développement.

Décision de la commission : votre commission des finances vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 13 ter (nouveau)   Exonération de taxation des plus-values immobilières pour les anciennes résidences principales de contribuables désormais hébergés en maison de retraite

Commentaire : le présent article tend à exonérer de taxation sur les plus-values les anciennes résidences principales des personnes entrées en maison de retraite (et les adultes handicapés) dont les revenus sont inférieurs à certains plafonds, si la vente a lieu dans un délai maximum de deux ans après l'entrée dans l'établissement d'hébergement.

I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été adopté à l'initiative de nos collègues députés Arlette Grosskost et Michel Diefenbacher avec l'avis favorable de la commission des finances.

Il vise à exonérer de toute taxation sur les plus-values immobilières les immeubles « qui ont constitué la résidence principale du cédant et n'ont fait l'objet depuis lors d'aucune occupation, lorsque ce dernier est désormais résident d'un établissement mentionné au 6° ou au 7° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles , si, au titre de l'avant-dernière année précédant celle de la cession, il n'est pas passible de l'impôt de solidarité sur la fortune et n'a pas un revenu fiscal de référence excédant la limite prévue au II de l'article 1417, et si la cession intervient dans un délai inférieur à deux ans suivant l'entrée dans l'établissement. »

Le Gouvernement s'est dans un premier temps fermement opposé à son adoption, avant de l'accepter sous réserve d'une modification raccourcissant de trois ans à deux ans le délai maximum séparant l'entrée en maison de retraite de la vente de l'immeuble durant lequel le principe de l'exonération est maintenu.

Les auteurs de l'amendement ont justifié ce dispositif par le fait qu'une personne âgée ayant quitté son logement principal pour une maison de retraite médicalisée, peut décider de vendre sa maison pour couvrir les frais de résidence et qu'elle est soumise, si la cession n'a pas lieu dans un délai maximal d'un an après l'entrée en maison de retraite 124 ( * ) , au régime de taxation des plus-values immobilières.

Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale ne vise pas exclusivement les personnes âgées hébergées dans des maisons de retraite 125 ( * ) . Il bénéficie également aux adultes handicapés hébergés dans « les établissements et les services, y compris les foyers d'accueil médicalisé, qui accueillent des personnes adultes handicapées, quel que soit leur degré de handicap ou leur âge, ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert » (7° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles).

Les plafonds de ressources mentionnés par le dispositif excluent du bénéfice de l'exonération les contribuables assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune et ceux dont les revenus sont inférieurs au seuil permettant de bénéficier des abattements d'impôts locaux, qui est actuellement de 23 572 euros pour la première part de quotient familial.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteure générale partage l'objectif consensuel poursuivi par le présent article qui vise à exonérer les plus-values résultant de la vente des anciennes résidences principales de personnes âgées ou des adultes handicapés, entrés depuis moins de deux ans dans un établissement d'hébergement.

Elle observe que si ce dispositif constitue effectivement une nouvelle dérogation aux nouvelles règles de taxation des plus-values immobilières qui doivent entrer en vigueur au 1 er février 2012, son périmètre est strictement encadré et son bénéfice limité aux personnes à faibles ressources et disposant d'un patrimoine inférieur au seuil de l'ISF.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 13 quater (nouveau)   Report de plus-values en cas d'échange de biens immobiliers avec l'Etat ou une collectivité publique

Commentaire : le présent article institue un dispositif de report de plus-values en cas d'échange de biens immobilier avec l'Etat ou une collectivité publique

I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article résulte d'un amendement de notre collègue député Olivier Dassault adopté avec l'avis favorable du Gouvernement et du rapporteur général de la commission des finances.

Il tend à insérer un nouvel article 238 octies C dans le code général des impôts mettant en place un mécanisme permettant de ne pas imposer immédiatement les plus-values dégagées lors de l'échange d'un bien immobilier avec l'Etat , une collectivité territoriale, un établissement public de coopération intercommunale compétent ou un établissement public ou une association mentionnés aux chapitres Ier, II et IV du titre II du livre III du code de l'urbanisme 126 ( * ) .

Il institue, à cet effet, pour ces plus-values, un double dispositif d'étalement d'imposition ou de report , selon qu'elles sont affectées à des biens amortissables ou non.

Le bénéfice de ce mécanisme est soumis à trois conditions :

- le ou les biens remis et reçus lors de l'échange ont la nature de biens immobiliers , bâtis ou non bâtis, ou de droits portant sur un immeuble ;

- le ou les biens remis lors de l'échange sont affectés par l'Etat, la collectivité territoriale ou l'établissement public ou l'association mentionnés au premier alinéa à la réalisation d'ouvrages d'intérêt collectif ;

- en cas de versement d'une soulte par l'une ou l'autre partie, celle-ci ne dépasse ni 10 % de la valeur vénale des biens ou droits remis à l'échange, ni le montant de la plus-value réalisée lors de l'échange.

Selon l'auteur de l'amendement, ce dispositif vise à favoriser certaines opérations telles que « la création d'espaces affectés à l'usage direct du public (comme, par exemple, des espaces verts) qui nécessite l'acquisition de biens fonciers et immobiliers par une personne publique (Etat, collectivités territoriales, établissements publics d'aménagement foncier, etc.) auprès d'entreprises, cette acquisition étant parfois effectuée sous la forme d'un échange de biens immobiliers qui ne donne, par hypothèse, pas lieu à versement de liquidités . »

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteure générale n'a pas été convaincue, notamment en prenant en considération les arguments échangés lors des débats de l'Assemblée nationale, de l'urgence à instituer un tel dispositif d'échange de biens immobiliers entre une entreprise et une collectivité ou un établissement publics.

Les conditions de l'examen dans le cadre du présent projet de loi de finances rectificative ne permettent pas de réaliser une expertise approfondie qui écarterait de façon certaine tout effet d'aubaine ou d'évitement de l'impôt, dans le domaine de la gestion de l'immobilier de l'Etat et des collectivités publiques, où toutes les précautions doivent être prises pour garantir les intérêts publics.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 13 quinquies (nouveau) (Art. L. 214-31 du code monétaire et financier)  Aménagement du régime des fonds d'investissement de proximité (FIP)

Commentaire : le présent article tend à porter à quatre (au lieu de trois) le nombre de régions limitrophes dans lesquelles doivent se situer les entreprises au capital desquels les FIP doivent investir 60 % de leurs actifs.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA DÉFINITION DES FONDS D'INVESTISSEMENT DE PROXIMITÉ (FIP)

Les fonds d'investissement de proximité (FIP) constituent une catégorie particulière de fonds communs de placement à risques (FCPR). Ils sont définis à l'article L. 214-31 du code monétaire et financier.

Pour être qualifié de FIP, un FCPR doit avoir son actif constitué, pour 60 % au moins , de titres financiers, parts de société à responsabilité limitée et avances en compte courant, dont au moins 20 % dans de nouvelles entreprises exerçant leur activité ou juridiquement constituées depuis moins de huit ans , émis par des sociétés ayant leur siège dans un Etat membre de l'Union européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale, qui sont soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun ou en seraient passibles dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France, et qui remplissent les conditions suivantes :

- exercer leurs activités principalement dans des établissements situés dans la zone géographique choisie par le fonds et limitée à trois régions limitrophes au plus , ou, lorsque cette condition ne trouve pas à s'appliquer, y avoir établi leur siège social. Le fonds peut également choisir une zone géographique constituée d'un ou de plusieurs départements d'outre-mer ainsi que de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin ;

- répondre à la définition des petites et moyennes entreprises figurant à l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission européenne du 6 août 2008, déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité instituant la Communauté européenne 127 ( * ) (règlement général d'exemption par catégorie) ;

- ne pas avoir pour objet la détention de participations financières, sauf à détenir exclusivement des titres donnant accès au capital de sociétés dont l'objet n'est pas la détention de participations financières et qui répondent aux conditions d'éligibilité dans le quota des FIP ;

- respecter les conditions « anti-abus » (notamment en matière d'activités et de composition des actifs) introduites en loi de finances pour 2011 sur les entreprises éligibles à « ISF-PME » 128 ( * ) ;

- compter au moins deux salariés ;

- et ne pas avoir procédé au cours des douze derniers mois au remboursement, total ou partiel, d'apports.

Sont également éligibles à ce quota d'investissement de 60 %, dans la limite de 20 % de l'actif du fonds , les titres de sociétés cotées sur un marché réglementé d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, émis par des sociétés dont la capitalisation boursière est inférieure à 150 millions d'euros, sous réserve que la société émettrice réponde aux conditions mentionnées à l'exception de celle tenant à la non-cotation , et n'ait pas pour objet la détention de participations financières.

Parmi les autres conditions que doivent respecter les FIP, il convient de relever que leurs parts ne peuvent pas être détenues :

- à plus de 20 % par un même investisseur ;

- à plus de 10 % par un même investisseur personne morale de droit public ;

- à plus de 30 % par des personnes morales de droit public prises ensemble.

B. LES AVANTAGES FISCAUX LIÉS À LA SOUSCRIPTION DANS DES FIP

Les souscriptions à des FIP ouvrent droit à des avantages fiscaux, tant en matière d'impôt sur le revenu (IR) qu'en matière d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

1. En matière d'impôt sur le revenu

Aux termes du VI bis de l'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts, les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 22 % des versements effectués au titre de souscriptions en numéraire de parts de FIP s'ils prennent l'engagement de conserver les parts de fonds, pendant cinq ans au moins à compter de leur souscription 129 ( * ) .

Les versements sont retenus , après imputation des droits ou frais d'entrée, dans les limites annuelles de 12 000 euros pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés, et de 24 000 euros pour les contribuables mariés soumis à imposition commune .

2. En matière d'impôt de solidarité sur la fortune

Selon les dispositions du III de l'article 885-0 V bis du même code, le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 50 % du montant des versements effectués au titre de souscriptions en numéraire aux parts de FIP .

Les conditions à respecter sont les mêmes que celles qui concernent l'IR.

Cet avantage fiscal ne peut être supérieur à 18 000 euros par an.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de nos collègues députés Gilles Carrez, rapporteur général du budget, Olivier Carré et Louis Giscard d'Estaing, avec un avis de sagesse du Gouvernement, propose de modifier la définition des FIP en portant à quatre le nombre de régions limitrophes dans lesquelles les sociétés éligibles au quota de 60 % de ces fonds doivent exercer leurs activités principales ou avoir leur siège.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteure générale ne partage pas l'analyse de l'Assemblée nationale, l'extension du nombre de régions dans lesquelles les FIP peuvent investir apparaissant contradictoire avec la notion même de proximité .

Si ces véhicules relativement peu lisibles ne parviennent réellement pas à atteindre le but qui justifie leur création (c'est-à-dire financer l'économie au plus proche des territoires), il serait sans doute plus pertinent de s'interroger sur leur existence plutôt que d'assouplir indéfiniment les critères qu'ils sont censés respecter.

Décision de la commission : votre commission des finances vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 13 sexies (nouveau) (Art. L.137-11-1 du code de la sécurité sociale et art. 83 du code général des impôts)  Révision des modalités de calcul de la contribution des bénéficiaires des retraites dites « chapeaux »

Commentaire : le présent article, introduit par l'Assemblée nationale, tend à instaurer un barème à taux marginaux de taxation des « retraites chapeaux », un nouveau taux d'imposition de 21 % pour la part des rentes supérieures à 24 000 euros par mois et une déductibilité du revenu imposable à l'impôt sur le revenu de la contribution acquittée au titre des premiers 1 000 euros de rente mensuelle.

I. LE DROIT EXISTANT

A. UN RÉGIME DE RETRAITE SUPPLÉMENTAIRE À PRESTATIONS DÉFINIES ET À DROITS ALÉATOIRES

1. Les principales caractéristiques du régime des retraites « chapeaux »

Le régime de retraite dit « chapeau » défini à l'article L. 137-11 de la sécurité sociale revêt les caractéristiques suivantes.

Il s'agit d'un régime de retraite :

1) supplémentaire , qui s'ajoute donc à la retraite de base obligatoire et à la retraite complémentaire obligatoire (AGIRC-ARRCO), comme cela est précisé dans l'encadré suivant ;

La place des retraites supplémentaires dans le système de retraite

« La retraite en entreprise, en France, est constituée de trois étages :

« ? Les régimes de base obligatoires : institués par les ordonnances de 1945 qui ont fondé le système actuel de sécurité sociale , les régimes de base sont des régimes par répartition, qui couvrent l'ensemble des personnes travaillant en France . Le régime le plus important est le régime général des salariés non agricoles.

« ? Les régimes conventionnels obligatoires : institués au bénéfice des cadres par la convention collective du 14 mars 1947 et des salariés par celle du 8 décembre 1961, les régimes de retraite complémentaire ont été consacrés par la loi du 29 décembre 1972 dite de « généralisation de la sécurité sociale » qui a rendu obligatoire l'affiliation à un régime de retraite complémentaire pour tout salarié relevant de l'assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale et du régime des salariés agricoles. Les cotisations permettent d'acquérir des points de retraite, dont la valeur est régulièrement revalorisée, qui viennent s'ajouter à la retraite versée par la sécurité sociale. Tous les salariés sont affiliés et cotisent à une institution relevant de l'Arrco (association pour le régime de retraite complémentaire des salariés). L'Agirc (association générale des institutions de retraite des cadres) gère quant à elle les régimes de retraite complémentaire des cadres.

« ? Les systèmes d'entreprise de retraite supplémentaire : ces systèmes de retraite supplémentaire - ou « surcomplémentaire » - qui fonctionnent normalement par capitalisation prennent la forme d'un complément de prestations destiné à s'ajouter aux pensions des régimes obligatoires . Les employeurs sont libres de proposer ou non un tel système . »

Source : Rapport d'octobre 2010 au Parlement sur la situation des régimes relevant de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale

2) à prestations définies : l'employeur, seul contributeur, au régime s'engage sur un montant donné de prestation ;

3) à « droits aléatoires » , c'est-à-dire conditionnant le droit à prestations à l'achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l'entreprise . Il existe donc un aléa quant au versement des rentes. Si le salarié n'achève pas sa carrière dans l'entreprise, il ne perçoit pas cette retraite supplémentaire ;

4) dont le financement par l'employeur n'est pas individualisable par salarié : l'employeur peut soit constituer des provisions si le régime est géré en interne, ou verser des primes à un organisme tiers qui gère le régime pour son compte, en fonction du montant des primes versées et des primes à verser dans le futur si toutes les personnes achevaient leur carrière dans l'entreprise.

Le tableau suivant compare le dispositif des retraites dites « chapeaux » (à prestations définies à droits aléatoires) aux principaux autres dispositifs de retraites supplémentaires relevant de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale (à cotisations définies ou à prestations définies, et à droits certains).

Comparaison du dispositif des retraites dites « chapeaux » aux autres dispositifs relevant de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale

Régimes de retraite relevant de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale (à cotisations définies ou à prestations définies à droits certains)

Régimes de retraite relevant de l'article L.137-11 du code de la sécurité sociale (à prestations définies à droits aléatoires)

Couverture des salariés

Le régime est :

- collectif : il doit concerner l'ensemble des salariés ou une catégorie objective de salariés (ex : tous les cadres) ;

- obligatoire : les salariés sont tenus de participer au financement du dispositif, sauf exceptions.

Du point de vue des règles de la sécurité sociale, le choix des bénéficiaires peut être à la discrétion de l'employeur , qui n'est pas tenu de déterminer une catégorie objective de salariés.

Mode d'institution

Selon les règles de la négociation collective en application de l'article L.911-1 du CSS :

? Par accord collectif (de branche, d'entreprise ou d'établissement) ;

? Par référendum ;

? Par décision unilatérale de l'employeur.

L'article L.137-11 du CSS ne précise pas. Il peut être instauré par les mêmes voies que celles prévues au L.911-1 (ce qui est le cas dans la majorité des régimes) ou simplement figurer dans le contrat de travail.

Transférabilité des droits

Garantie . Les droits sont portables d'une entreprise à l'autre.

Le caractère aléatoire et non individualisable rend impossible la transférabilité des droits .

Caractère des droits

Certain . Les droits sont acquis.

Aléatoire . Les droits sont conditionnés à l'achèvement de la carrière du salarié dans l'entreprise.

Modalités de la garantie

? A cotisations définies : L'employeur s'engage à verser des cotisations régulières à un organisme gestionnaire, cotisations qui, augmentées du revenu de leur placement, seront versées sous forme de rentes aux salariés retraités.

? A prestations définies : L'employeur s'engage sur le montant ou garantit le niveau des prestations définies par le régime, le plus souvent en fonction du salaire et de l'ancienneté du salarié.

A prestations définies uniquement

Mode de gestion

Externe à l'entreprise. Le dispositif est obligatoirement géré par un organisme habilité : société d'assurance, mutuelle, institution de prévoyance.

Externe ou interne à l'entreprise .

En cas de gestion externalisée, il convient de distinguer 2 phases :

- pour les actifs, l'employeur souscrit à l'assureur un fonds collectif, visant à couvrir les engagements, en moyenne. De par l'aléa créé par le calcul des droits et la condition de présence, le régime n'est en effet pas strictement « assurable » ;

- au moment du départ à la retraite du salarié, généralement, la valeur de l'engagement viager de la rente est transférée du fonds des actifs vers un fonds des retraités (contrat d'assurance).

Source : Rapport d'octobre 2010 au Parlement sur la situation des régimes relevant de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale

2. Les bénéficiaires des retraites « chapeaux »

A titre liminaire, il convient de préciser que les données chiffrées (nombre de bénéficiaires, montant moyen des rentes,...) sur le dispositif des retraites « chapeaux » sont à prendre avec précaution , compte tenu des informations partielles disponibles en la matière. Cet élément est souligné par les auteurs des deux rapports qui sont cités ci-après.


• Selon les données du rapport dit « Guillaume » d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales de juin 2011, 10 500 établissements seraient concernées par le dispositif de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale et 90 000 retraités bénéficieraient de rentes issues de ce dispositif.


• S'agissant du montant moyen des rentes versées, le rapport précité d'octobre 2010 remis au Parlement 130 ( * ) estimait, à partir d'extrapolations, le montant moyen des rentes versées à 3 875 euros par an (323 euros environ par mois) et par bénéficiaire.

Toujours selon cette étude, 75 % des bénéficiaires des retraites « chapeaux » percevraient une rente annuelle inférieure ou égale à 5 000 euros, soit 416 euros par mois environ.

Source : Rapport précité d'octobre 2010 au Parlement sur la situation des régimes relevant de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale

B. LE RÉGIME SOCIAL ET FISCAL DES RETRAITES « CHAPEAUX »

En matière sociale, comme fiscale, il convient de distinguer :

- d'une part, les prélèvements supportés par les employeurs de ceux auxquels sont assujettis les bénéficiaires des retraites « chapeaux » ;

- d'autre part, le « moment » de l'imposition : les abondements employeur (constitution des droits) ou les prestations (rentes versées).

1. Un régime social spécifique

a) Une exonération totale de cotisations sociales, de CSG et de CRDS des versements employeurs (constitution des droits), mais l'introduction de contributions patronales ad hoc


• En raison des règles particulières qui s'appliquent aux retraites dites « chapeaux » (notamment en termes de prévisibilité et de portabilité des droits qui rendent impossible toute individualisation du financement de la retraite par salarié), les abondements des employeurs sont exonérés, sans limite, de cotisations sociales, de CSG et de CRDS .

Il convient de noter que les autres régimes supplémentaires de retraite, qui relèvent notamment de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, ne bénéficient pas d'un tel régime favorable : si les contributions des employeurs sont exonérées de cotisations dans le respect d'un certain plafond, elles sont en revanche soumises au forfait social 131 ( * ) et aux contributions sociales.


• Toutefois, la loi du 21 août 2003 sur les retraites a mis en place une contribution spécifique pour les retraites « chapeaux » que l'employeur peut acquitter, au choix, selon plusieurs modalités .

La contribution, dont le niveau a été relevé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, peut être assise soit :

- sur les rentes versées aux bénéficiaires au taux de 16 % ;

- soit sur les primes versées à un organisme assureur, une institution de prévoyance ou une mutuelle, au taux de 12 % ;

- soit sur la partie de la dotation aux provisions gérées en interne à l'entreprise, au taux de 24 % .


• A l'initiative de notre collègue Jean-Jacques Jégou, alors rapporteur pour avis du projet de loi de financement de la sécurité sociale au nom de la commission des affaires sociales, une taxe patronale supplémentaire de 30 % a également été instaurée sur les rentes dont le montant est supérieur à huit plafonds annuels de la sécurité sociale (soit 282 816 euros en 2011) . Cette mesure s'applique aux retraites liquidées à compter du 1 er janvier 2010.

b) Une contribution sociale spécifique à la charge des bénéficiaires des retraites « chapeaux » introduite en 2011 qui s'ajoute aux prélèvements sociaux de droit commun sur les rentes


• Afin de financer une partie de la réforme des retraites de 2010, le Gouvernement avait souhaité initialement (à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011) la création d'une contribution salariale de 14 % sur l'ensemble des rentes versées dans le cadre de retraites « chapeaux » .


L'article 16 de la loi de finances pour 2011 est revenu sur ce dispositif en modifiant le régime de cette nouvelle contribution :

- le nombre de redevables a, tout d'abord, été sensiblement réduit par rapport au projet de loi initial du Gouvernement qui prévoyait d'assujettir l'ensemble des bénéficiaires de retraites d'entreprise.

Selon la date de liquidation de la retraite, les rentes inférieures à 400 ou 500 euros ne sont pas soumises à cette nouvelle contribution. Le rapport remis au Parlement sur la situation des régimes relevant de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale à l'automne dernier indiquait que 75 % des bénéficiaires de ces régimes perçoivent une rente mensuelle inférieure à 416 euros ;

- une certaine progressivité a ensuite été introduite avec la mise en place d'un taux plus élevé (14 %) pour les rentes dont la valeur mensuelle est supérieure à 1 000 euros, le taux applicable aux autres rentes s'élevant à 7  % ;

- enfin, afin de minimiser les effets du changement des « règles du jeu » pour les personnes déjà retraitées à la date du débat budgétaire , le législateur a choisi de leur accorder un abattement de 500 euros. Ainsi, seule la part supérieure à cette somme est imposée.

Le tableau ci-après résume le dispositif issu de la loi de finances pour 2011.

Dispositif initial présenté par le Gouvernement

(article 10 du PLFSS pour 2011)

Article 16 de la LFI pour 2011

Création d'une nouvelle contribution salariale de 14 % sur l'ensemble des rentes versées au titre de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale (CSS).

(1) Retraites liquidées avant le 1 er janvier 2011

Abattement jusqu'à 500 euros.

- Imposition de la part supérieure à 500 euros au taux de 7 % lorsque la rente est comprise entre 500 et 1000 euros.

- Imposition de la part supérieure à 500 euros au taux de 14 % lorsque la valeur de la rente est supérieure à 1 000 euros.

(2) Retraites liquidées à compter du 1 er janvier 2011

Exonération jusqu'à 400 euros.

- Imposition de la totalité de la rente au taux de 7 % lorsque la rente est comprise entre 400 et 600 euros .

- Imposition au taux de 14 % au delà de 600 euros.

Exemples :

A. Une personne reçoit 310 euros par mois au titre de l'article L. 137-11 du CSS.

B. Une personne reçoit 600 euros par mois au titre de l'article L. 137-11 du CSS.

C. Une personne reçoit 800 euros par mois au titre de l'article L. 137-11 du CSS.

D. Une personne reçoit 1 200 euros par mois au titre de l'article L. 137-11 du CSS.

Montant A : 43,4 euros.

Montant B : 84 euros.

Montant C : 112 euros.

Montant D : 168 euros.

Montant A : 0 euro (1 et 2).

Montant B : 7 euros (1) ou 47 euros (2).

Montant : 21 euros (1) ou 112 euros (2).

Montant D : 28 euros (1) ou 168 euros (2).

Source : commission des finances


Le taux global des prélèvements sociaux sur les rentes des retraites d'entreprise est donc désormais compris entre 8,1 % et 22,1 %, dont 4,2 points déductibles de l'impôt sur le revenu.

Les rentes versées au titre de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale sont en effet soumises à la CSG au taux de 6,6 % (taux appliqué aux pensions), à la CRDS (0,5 %), à la contribution maladie de 1 % due sur les avantages retraite autres que les avantages dits « de base » et, le cas échéant depuis 2011, à la contribution créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 et réaménagée par la loi de finances pour 2011.

Contrairement à une partie de la CSG, cette nouvelle contribution n'est pas déductible de l'impôt sur le revenu 132 ( * ).

2. Un régime fiscal de droit commun

S'agissant du régime fiscal, les contributions employeurs sont déductibles des bénéfices de l'entreprise et les rentes reçues par les bénéficiaires imposables à l'impôt sur le revenu selon les règles de droit commun des pensions et retraites.

Le tableau ci-après synthétise le régime social et fiscal des deux principaux dispositifs de retraites supplémentaires (en distinguant les prélèvements supportés par le salarié de ceux supportés par l'employeur).

3. Une affectation des prélèvements sociaux sur les retraites « chapeaux » au Fonds de solidarité vieillesse

Les contributions patronale et salariale spécifiques sur les retraites chapeaux sont affectées au Fonds de solidarité vieillesse (FSV), chargé de financer les avantages vieillesse non contributifs relevant de la solidarité nationale.

Le rendement de ces deux contributions est de 145 millions d'euros en 2011, dont 90 millions d'euros au titre des contributions patronales et 55 millions d'euros au titre des contributions à la charge des bénéficiaires des rentes.

Comparaison des régimes sociaux et fiscaux (à la charge du salarié ou de l'employeur) des différents dispositifs de retraites supplémentaires

Salarié

Contributions (constitution des droits)

Prestations (rentes)

Régime social

Régime fiscal

Régime social

Régime fiscal

Régimes de retraites à cotisations définies et à prestations définies à droits certains

Art. L.242-1 et D.242-1 CSS

Les contributions de l'employeur sont exclues de l'assiette des cotisations salariales dans la limite de 5 % du PASS ou 5 % de la rémunération dans la limite de 5 fois le PASS.

Art. L.136-2 CSS

Elles sont soumises à CSG/CRDS au taux de 8 %, à la charge du salarié.

Art. 83 2° CGI

L'ensemble des cotisations sont déductibles du revenu imposable dans la limite, y compris les versements de l'employeur, de 8 % de la rémunération annuelle brute à concurrence de 8 fois le PASS.

Art. L.131-2 et L.136-2 CSS

La rente de retraite supplémentaire est assujettie, comme l'ensemble des retraites :

- à une cotisation d'assurance maladie au taux de 1% (cotisation applicable sauf pour les rentes du régime de base) ;

- à la CSG et à la CRDS .

Art. 79 CGI

- La rente de retraite supplémentaire est imposable à l'impôt sur le revenu selon les règles de droit commun des pensions et retraites ;

- Les cotisations d'assurance maladie et la CSG sont partiellement déductibles du revenu imposable.

Régimes de retraites à prestations définies à droits aléatoires

(retraites « chapeaux »)

Aucun

Aucun

Idem

+

Art. L137-11 CSS

Contribution salariale spécifique (introduite en 2011) de 7 % ou 14 % selon les montants des rentes

Idem

Employeur

Contributions (constitution des droits)

Prestations (rentes)

Régime social

Régime fiscal

Régime social

Régime fiscal

Régimes de retraites à cotisations définies et à prestations définies à droits certains

Art. L.242-1 et D.242-1 CSS

Les contributions de l'employeur sont exclues de l'assiette des cotisations et contributions patronales dans la limite de 5 % du PASS ou 5 % de la rémunération dans la limite de 5 fois le PASS.

Art. L.137-15 à 17 CSS

Elles sont soumises au forfait social (8 %) à la charge de l'employeur.

Déductibles des bénéfices de l'entreprise.

Sans objet

Sans objet

OU

Art. L.137-11 CSS

Sur option : assujettissement à la contribution spécifique de 16 % sur les rentes versées.

Contribution spécifique employeur

Sans objet

Source : commission des finances, d'après les données du rapport précité remis au Parlement d'octobre 2010

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l'initiative de nos collègues Gilles Carrez, Jérôme Chartier et Charles de Courson, l'Assemblée nationale a adopté un amendement (sous-amendé par le Gouvernement) portant article additionnel et prévoyant de revenir sur plusieurs modalités de calcul de la contribution payée par les bénéficiaires de retraites « chapeaux », introduite à l'automne dernier .

A. L'INTRODUCTION D'UN BARÈME À TAUX MARGINAUX ET D'UN TAUX SUPPLÉMENTAIRE POUR LES RENTES LES PLUS ÉLEVÉES


• Le I du présent article propose, pour les retraites liquidées avant le 1 er janvier 2011 , de remplacer le dispositif actuel d'abattement jusqu'à 500 euros et de taxation à 7 % ou 14 % de la part de la rente mensuelle supérieure à 500 euros, par un barème comprenant 4 tranches d'imposition :

- 0 % pour la part de ces rentes inférieure à 500 euros par mois ;

- 7 % pour la part de ces rentes supérieure à 500 euros et inférieure ou égale à 1 000 euros par mois ;

- 14 % pour la part de ces rentes supérieure à 1 000 euros et inférieure ou égale à 24 000 euros par mois ;

- 21 % pour la part de ces rentes supérieure à 24 000 euros par mois.


• Le I du présent article propose, pour les retraites liquidées à compter du 1 er janvier 2011, de remplacer le dispositif actuel d'exonération des rentes inférieures à 400 euros et d'imposition au premier euro à 7 % ou 14 % des autres rentes, par un barème progressif, lui aussi, fondé sur 4 tranches d'imposition :

- 0 % pour la part de ces rentes inférieure à 400 euros ;

- 7 % pour la part de ces rentes supérieure à 400 euros et inférieure ou égale à 600 euros par mois ;

- 14 % pour la part de ces rentes supérieure à 600 euros et inférieure ou égale à 24 000 euros par mois ;

- 21 % pour la part de ces rentes supérieure à 24 000 euros par mois.

C. UNE DÉDUCTIBILITÉ PARTIELLE DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

Le II du présent article, introduit par un sous-amendement du Gouvernement, propose d'introduire une déductibilité partielle de la contribution sur les retraites « chapeaux » du revenu imposable au titre de l'impôt sur le revenu.

Cette contribution sera déductible dans la limite de la fraction acquittée au titre des premiers 1 000 euros de rente mensuelle, soit au maximum 35 euros ou 70 euros par mois selon la date de liquidation de la retraite.

Le III du présent article précise, enfin, l'entrée en vigueur du dispositif :

- le I est applicable aux rentes versées à compter du 1 er janvier 2012 ;

- le II est applicable à compter de l'imposition des revenus de 2011.

*

Selon les données du ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, le dispositif proposé par l'Assemblée nationale est neutre pour les ressources du FSV, la création d'un nouveau taux d'imposition pour les rentes les plus élevées compensant l'introduction d'un barème à taux marginaux.

Quant à la perte de recettes qui résulterait de l'introduction d'une déductibilité partielle du revenu imposable au titre de l'impôt sur le revenu, elle est estimée à environ 2 millions d'euros.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LES ARGUMENTS AVANCÉS PAR LES AUTEURS DE L'AMENDEMENT

Les quatre principales finalités recherchées par les auteurs de l'amendement sont les suivantes :

1) conserver un avantage pour les rentes liquidées avant le 1 er janvier 2011 , afin de minimiser les effets du changement des « règles du jeu » pour les personnes déjà retraitées à la date de la réforme de l'année dernière (l'imposition de ces rentes ne débute qu'à compter de la part de la rente supérieure à 500 euros, contre 400 euros dans l'autre régime) ;

2) éviter les effets de seuils qui peuvent exister dans le dispositif actuel, par l'introduction d'un barème progressif reposant sur trois taux marginaux d'imposition ;

Effets de seuil avant et après réforme proposée par l'Assemblée nationale

Montant mensuel de la rente

Montant de la contribution mensuelle dans le dispositif actuel

Montant de la contribution mensuelle dans le dispositif proposé

1) Rentes liquidées avant le 1 er janvier 2011

500 euros

0 euro

0 euro

999 euros

34,93 euros

34,93 euros

1 001 euros

[+ 2 euros]*

70,14 euros

[+ 35,21 euros ou x2]*

35,14 euros

[+ 0,21 euro]*

2) Rentes liquidées à compter du 1 er janvier 2011

400 euros

0 euro

0 euro

401 euros

[+ 1 euro]**

28,07 euros

[+ 28,07 euros]**

0,07 euro

[+ 0,07 euro]**

599 euros

41,93 euros

13,93 euros

601 euros

[+ 2 euros]***

84,14 euros

[+ 42,21 euros ou x2]***

14,14 euros

[+ 0,21 euro]***

* Par rapport à une rente de 999 euros ; ** Par rapport à une rente de 400 euros ; *** Par rapport à une rente de 599 euros

Source : commission des finances

3) faire davantage contribuer les rentes les plus élevées par l'introduction d'un nouveau taux de taxation de 21 % pour la fraction des rentes mensuelles dépassant 24 000 euros, soit environ 8 plafonds de la sécurité sociale mensuels, qui constitue aujourd'hui le seuil de déclenchement de la contribution patronale additionnelle de 30 % sur les versements employeurs ( cf. supra ).

Ecart d'imposition pour les rentes les plus élevées entre le dispositif actuel et le dispositif proposé

Montant mensuel de la rente

Montant de la contribution mensuelle dans le dispositif actuel

Montant de la contribution mensuelle dans le dispositif proposé

Ecart entre le dispositif actuel et le dispositif proposé

1) Rentes liquidées avant le 1 er janvier 2011

25 000 euros

3 430 euros

3 465 euros

+ 35 euros (+1 %)

35 000 euros

4 830 euros

5 565 euros

+ 735 euros (+15 %)

50 000 euros

6 930 euros

8 715 euros

+ 1 785 euros (+26 %)

75 000 euros

10 430 euros

13 965 euros

+ 3 535 euros (+34 %)

2) Rentes liquidées à compter du 1 er janvier 2011

25 000 euros

3 500 euros

3 500 euros

0 euro

35 000 euros

4 900 euros

5 600 euros

+700 euros (+14 %)

50 000 euros

7 000 euros

8 750 euros

+1 750 euros (+25 %)

75 000 euros

10 500 euros

14 000 euros

+ 3 500 euros (+33 %)

Source : commission des finances

4) éviter le « sentiment de double imposition » au titre, d'une part, des contributions sociales et, d'autre part, de l'impôt sur le revenu, par l'introduction d'une déductibilité partielle de la contribution acquittée.

B. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES


• De façon générale, votre rapporteure générale regrette :

- d'une part, la complexité du dispositif qui demeure même après les modifications introduites par l'Assemblée nationale, complexité qui est à mettre au regard du nombre restreint de bénéficiaires (90 000) et du rendement relativement faible de la mesure (55 millions d'euros pour la contribution payée par les bénéficiaires des retraites « chapeaux ») ;

- d'autre part, le manque d'informations disponibles sur le « profil » des bénéficiaires de ces retraites « chapeaux », ce qui ne permet qu'une appréciation partielle de l'impact de la mesure.


• Sur le dispositif adopté à l'Assemblée nationale, votre rapporteure générale relève deux éléments :

- d'une part, le dispositif proposé avantage principalement les rentes jusqu'à 1 000 euros qui voient leur imposition assez fortement diminuer, alors que la taxation des rentes les plus élévées augmente surtout pour les rentes mensuelles extrêment élevées , comme en témoigne le tableau ci-dessous :

Ecart d'imposition pour les rentes entre le dispositif actuel et le dispositif proposé (rentes liquidées à compter du 1 er janvier 2011)

Montant mensuel de la rente

Montant de la contribution dans le dispositif actuel

Montant de la contribution dans le dispositif proposé

Ecart entre le dispositif actuel et le dispositif proposé

400 euros

0 euro

0 euro

0 euros

401 euros

28,07 euros

0,07 euro

- 28 euros (-99,7 %)

599 euros

41,93 euros

13,93 euros

-28 euros (-67 %)

601 euros

84,14 euros

14,14 euros

-70 euros (-84 %)

750 euros

105 euros