III. LA POSITION DE VOTRE RAPPORTEURE
Compte tenu de l'importance du projet de Koniambo et plus largement de l'exploitation du nickel pour l'économie, l'emploi et le développement de la Nouvelle-Calédonie, il convient naturellement de veiller à ce que soient réunies les conditions de leur réussite. L'extension du bénéfice du régime canadien des sociétés mères prévu par la convention fiscale de 1975 est dans cette perspective une étape normale et nécessaire.
Il faut se féliciter du dénouement de ce dossier - le projet de Koniambo date de 1988 et les négociations de l'avenant à la convention franco-canadienne ont débuté en 2004. L'idée d'une mine au nord de l'île est plus ancienne encore, puisqu'elle avait été évoquée par le général De Gaulle en 1966.
Votre rapporteure souligne que le régime des sociétés mères ne soulève pas les critiques souvent adressées aux mécanismes d'incitation fiscale très favorables dont bénéficie d'ores et déjà l'exploitation de nickel en Nouvelle-Calédonie , à l'initiative des gouvernements français et néo-calédonien.
Les incitations fiscales et
budgétaires
Les investissements productifs en outre-mer bénéficient tout d'abord du dispositif de défiscalisation prévu par la « loi Girardin 21 ( * ) |
» de 2003, que ce soit sous forme de réduction de l'impôt sur le revenu (article 199 undecies B du CGI) ou de déduction du résultat imposable à l'impôt sur les sociétés 22 ( * ) (article 217 undecies du CGI). Ces investissements doivent être réalisés dans des secteurs spécifiques (tourisme, aquaculture et énergies renouvelables) ou significatifs pour le développement local, ce qui est le cas de l'industrie minière et métallurgique. Dans son rapport de 2011, notre collègue Eric Doligé a critiqué la pertinence ce dispositif 23 ( * ) , particulièrement coûteux pour des projets de cette ampleur, et dont l'administration peine à évaluer les résultats 24 ( * ) . En outre, le gouvernement de Nouvelle-Calédonie accorde depuis 2002 un régime spécifique au secteur métallurgique 25 ( * ) , et notamment une exonération de la plupart des impôts de droit commun pendant la phase de construction et les quinze premières années d'exploitation. A cela s'ajoutent les aides fiscales au cas par cas , couvertes par le secret fiscal. Par ailleurs, l'Etat a récemment décidé d' effacer la « dette minière » de la Nouvelle-Calédonie , contractée entre 1975 et 1989 : en ne renouvelant pas le « protocole nickel » arrivé à expiration en juin 2013, l'Etat a de facto renoncé à près de 280 millions d'euros qui avaient été avancés à la collectivité d'outre-mer pour compenser les variations du cours du nickel. |
Ces réserves à l'égard des incitations fiscales ne s'appliquent pas au régime canadien des sociétés mères qui fait l'objet du présent avenant. En effet, il s'agit dans ce cas d'un dispositif de droit commun, non-dérogatoire et pleinement légitime dans le cadre de l'élimination des doubles impositions , dont l'équivalent français s'applique d'ailleurs de plein droit. De plus, il pèse entièrement sur le budget du Canada et n'emporte aucune conséquence pour la France.
Le bénéfice de ce dispositif est d'autant plus vital pour le projet de Koniambo que celui-ci, bien que très avancé, demeure sujet à certains aléas. En effet, la demande chinoise connaît un ralentissement 26 ( * ) , qui n'est peut-être que conjoncturel, et l'augmentation de la capacité de production mondiale consécutive à l'ouverture de Koniambo pourrait contribuer à faire baisser un peu plus le prix du nickel. La finalisation du volet fiscal du projet constitue donc un élément de prévisibilité bienvenu.
L'entrée en vigueur du présent avenant aura pour conséquence d'étendre l'ensemble des dispositions de la convention franco-canadienne à la Nouvelle-Calédonie, et non pas seulement le régime des sociétés mères pour les acteurs du projet de Koniambo. Cela dit, il ne devrait pas en résulter d'importantes conséquences financières par ailleurs . La société Vale NC, notamment, est domiciliée en France métropolitaine, et bénéficie donc déjà de la convention fiscale.
* 21 Loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer.
* 22 Après agrément du ministre chargé du budget si l'investissement est supérieur à un million d'euros, ce qui est le cas des projets miniers en Nouvelle-Calédonie.
* 23 Source : Rapport d'information n° 368 (2010-2011) fait par Eric Doligé, précité.
* 24 Les critiques généralement adressées au dispositif « Girardin » prennent une importance particulière dans le cas de l'exploitation du nickel en Nouvelle-Calédonie, compte tenu des montants considérables en jeu : la défiscalisation était évaluée en 2011 à 305 millions de dollars, pour une base défiscalisable de 780 millions de dollars pour Koniambo, et 481 millions de dollars pour Goro.
* 25 Loi du pays n° 2002-19 du 29 avril 2002.
* 26 Par exemple, le cours du nickel a baissé de 13 % au premier semestre 2013 par rapport au premier semestre 2012. Source : Reuters, 29 juillet 2013.