III. LA RÉFORME DES RETRAITES DE 2013 : UNE OCCASION MANQUÉE
Comme les années passées, votre rapporteur spécial s'est intéressé à l'impact des réformes des retraites de 2008 et de 2010 sur l'évolution des subventions d'équilibre versées par l'État aux principaux régimes spéciaux de la mission. Les informations qui lui ont été transmises confirment le constat dressé l'an passé d' un effet incertain et limité de ces deux réformes sur les besoins de financement des régimes spéciaux , en particulier des régimes de la SNCF et de la RATP.
Au vu des craintes exprimées à plusieurs reprises par votre rapporteur spécial et du bilan globalement négatif de la réforme de 2008 établi par la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale de 2012, il est regrettable que la question des régimes spéciaux n'ait pas été attentivement examinée dans le cadre de la réforme des retraites actuellement en cours d'examen par le Parlement.
A. LES RÉSULTATS PEU CONCLUANTS DE LA RÉFORME DES RÉGIMES SPÉCIAUX DE 2008
Dans le cadre de son examen des régimes de retraite du personnel de la SNCF et de la RATP, la Cour des comptes a recommandé de « transmettre au Parlement des informations annuelles détaillées et actualisées sur la montée en charge des réformes des régimes de la SNCF et de la RATP » 8 ( * ) .
Les principes de la réforme des régimes spéciaux de 2008 Les régimes spéciaux de retraite de la SNCF, de la RATP, de l'Opéra de Paris, de la Comédie française, des industries électriques et gazières, des clercs et employés de notaires ont été réformés en 2008, dans le sens d'une harmonisation avec le régime de la fonction publique d'État . Les principaux paramètres de convergence de ces régimes avec ceux de la fonction publique sont les suivants : - le passage de 37,5 à 40 ans (en 2012), puis à 41 ans (en 2016) de la durée d'assurance pour bénéficier d'une retraite à taux plein ; - l' indexation des pensions sur les prix (et non plus sur les salaires) à compter de 2009 ; - l'introduction d'une décote et d'une surcote ; - la suppression des bonifications (validations gratuites de trimestres) pour les nouveaux recrutements ; - la suppression des « clauses-couperets », c'est-à-dire de la mise à la retraite automatique des agents atteignant leur âge d'ouverture des droits à la retraite. Parallèlement à ces mesures, des dispositifs d'accompagnement ont été adoptés par la RATP et la SNCF. Celles-ci ont notamment pris la forme de création d'échelons supplémentaire, attribués de façon automatique, afin de majorer le salaire de fin de carrière, de l'intégration des primes pour le calcul de la retraite ou diverses mesures de majorations salariales en fin de carrière. |
Votre rapporteur spécial a pu constater l' amélioration de la qualité des informations transmises par les caisses de retraite de la SNCF et de la RATP sur l'impact de la réforme de 2008.
Selon les projections réalisées par la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF ( cf . graphique ci-après), les mesures prises dans le cadre de la réforme de 2008 permettraient à l'État de verser une subvention d'équilibre inférieure d'environ 400 millions d'euros à celle qu'il aurait dû verser en l'absence de réforme . Toutefois la réforme n'a pas empêché la dotation de l'État de progresser de 12 % entre 2009 et 2013. Ce n'est qu'à partir de 2017, date à laquelle les mesures d'âge de la réforme de 2010 s'appliqueront aux régimes spéciaux, que la subvention d'équilibre diminuerait de façon significative.
Graphique n° 7 : Projection d'évolution des moyens d'équilibre du régime de retraite du personnel de la SNCF
Source : Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (2013)
De plus, il convient de tenir compte des surcoûts de la réforme liés aux diverses mesures d'accompagnement prises en 2008. La SNCF évalue ces surcoûts à environ 418 millions d'euros en 2012 , en considérant à la fois les mesures salariales d'accompagnement et l'effet démographique lié à la suppression de la retraite d'office. Malheureusement, aucune estimation pour les années 2013 et suivantes n'a été transmise à votre rapporteur spécial.
S'agissant du régime de la RATP , la caisse de retraite du personnel de cette entreprise estime que la réforme de 2008 ne devrait produire ses premiers effets sur le montant des prestations versées qu'à compter de 2015 . De plus, ces effets seraient très limités - de l'ordre de quelques millions d'euros - sur la diminution du montant des prestations versées. Enfin, les mesures salariales d'accompagnement - dont la dernière entrera en vigueur le 1 er janvier 2014 9 ( * ) - entraîneraient un surcoût d'environ 14 millions d'euros par an pour la RATP à compter de 2014.
La réforme des régimes spéciaux de 2008 marque une première étape dans le processus de convergence des différents régimes de retraite. Celle-ci est nécessaire afin de renforcer l'équité et la soutenabilité du système de retraites. Pour autant, cette réforme s'est traduite par un coût conséquent pour la SNCF et la RATP, sans alléger le poids des subventions versées à ces régimes dans le budget de l'État.
* 8 Cour des comptes, rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, 2012.
* 9 La réforme de 2008 s'est traduite, pour le régime de la RATP, par la création de deux échelons supplémentaires en 2012 et en 2014. Ceux-ci sont attribués de façon automatique, sous seule condition d'ancienneté, et se traduisent par une majoration de salaire. Le second échelon entrera en vigueur le 1 er janvier 2014. De plus, à compter de cette même date, des points de retraite supplémentaires seront attribués à compter de vingt-huit ans d'ancienneté.