EXAMEN DES ARTICLES
TITRE IER - Liberté de création et création artistique
Chapitre Ier - Liberté création artistique
Article 1er - - Affirmation de la liberté de création artistique
I. - Le texte du projet de loi
L'article 1 er affirme dans son alinéa unique que : « la création artistique est libre » .
A. État des lieux
L'étude d'impact attachée au projet de loi précise que si « le principe de la création artistique constitue un enjeu majeur de notre démocratie » , en fait, « à ce jour, il n'est pas formellement consacré en tant que tel en droit interne » . Contrairement à d'autres pays européens (Autriche, Allemagne, Italie, Espagne, Grèce, Portugal...), il ne figure pas dans notre Constitution et n'est pas reconnu expressément par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Aujourd'hui, la liberté de création est considérée comme une composante de la liberté d'expression qui, quant à elle, est garantie par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC) du 26 août 1789 : « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la loi » . L'article 10 de la même Déclaration prévoit quant à lui que « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi » .
Ces principes fondamentaux, qui font partie de notre « bloc de constitutionnalité » depuis la décision n° 73-51 du Conseil constitutionnel du 27 décembre 1973, sont reconnus depuis longtemps au niveau réglementaire. Le décret n° 59-889 du 24 juillet 1959 donne ainsi mission au ministère chargé des affaires culturelles de « favoriser la création des oeuvres de l'art et de l'esprit qui l'enrichissent » tandis que le décret n° 82-394 du 10 mai 1982 reconnaît au même ministère la mission de « permettre à tous les Français de cultiver leur capacité d'inventer, de créer, d'exprimer librement leurs talents et de recevoir la forme artistique de leur choix » . Ces mêmes missions figurent toujours aujourd'hui dans le décret n° 2014-411 du 16 avril 2014 relatif aux attributions du ministre de la culture et de la communication.
B. Le dispositif proposé
L'inscription dans la loi du principe de liberté de création doit permettre de donner un fondement incontestable au soutien de la nation à l'égard de la création artistique. Ce cadre légal vise à consacrer le rôle de l'État en faveur de la protection des artistes et de la liberté de création artistique. Le dispositif proposé a aussi pour effet de « combler un vide » en inscrivant dans le droit interne la liberté de création artistique et d'affirmer, ainsi, la spécificité de la démarche artistique au sein de la liberté d'expression.
II. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Le débat à l'Assemblée nationale a soulevé deux questions principales concernant d'une part la portée de la disposition et, d'autre part, l'éventuelle nécessité de la compléter.
La question de la portée de l'affirmation du principe de la liberté de création a été d'autant plus débattue que l'étude d'impact annexée au projet de loi a semblé minimiser la portée normative de la disposition en expliquant que « la mesure proposée a une indéniable portée normative puisqu'elle porte sur un droit, même si cette reconnaissance aura davantage de portée symbolique que pratique » 5 ( * ) . La même étude d'impact explique également que « cette reconnaissance par le législateur ne va pas modifier substantiellement l'état du droit dans la mesure où la liberté artistique a toujours été appréhendée par l'intermédiaire de la liberté d'expression qui peut se prévaloir d'un ancrage constitutionnel et constitue l'un des droits fondamentaux » tout en considérant que « la reconnaissance législative permettra toutefois de mettre pour la première fois en exergue la spécificité de la démarche artistique au sein de la liberté d'expression, ce qui pourra peut-être peser dans l'appréciation portée par le juge » .
Lors des débats, tant en commission qu'en séance publique, la ministre de la culture et de la communication a expliqué que la disposition avait une double portée, à la fois normative et symbolique. Elle s'est, par ailleurs, attachée à préserver la rédaction de l'article 1 er dans sa version issue du projet de loi afin de lui conserver une portée symbolique particulièrement forte.
III. - La position de votre commission
A. Sur la portée de cet article
Si la liberté d'expression bénéficie d'une reconnaissance de niveau constitutionnel, certaines de ses composantes bénéficient déjà d'une reconnaissance législative. C'est le cas de la liberté de publier qui est reconnue à l'article 1 er de la loi du 29 juillet 1881 - « L'imprimerie et la librairie sont libres » - et de la liberté de communiquer qui est consacrée par le premier alinéa de l'article 1 er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication - « La communication au public par voie électronique est libre » . Il n'est donc pas illégitime, dans ces conditions, de prévoir une consécration législative du principe de la liberté de création comme le fait l'article 1 er du projet de loi même si, comme le précise l'étude d'impact, celle-ci « ne va pas modifier substantiellement l'état du droit » .
Même s'il ne s'agit que de symbole, vos rapporteurs estiment que la République est aussi affaire de symboles et qu'il n'est sans doute pas inutile, dans les temps troublés que nous connaissons, de réaffirmer certaines valeurs qui fondent notre société démocratique à l'image du rôle de la création artistique.
Concernant la portée normative stricto sensu de cette disposition, vos rapporteurs considèrent que même si elle faisait déjà l'objet d'une protection juridique solide, il n'est pas vain de proclamer à travers cet article 1 er la spécificité de la création artistique afin d'inciter le juge à limiter au minimum les contraintes qui pourront lui être opposées au nom du respect des autres libertés.
B. Sur la nécessité de compléter l'article 1 er
Plusieurs propositions ont été faites pour compléter la rédaction de l'article 1 er afin, d'une part, de proclamer d'autres libertés « complémentaires » comme la liberté de la diffusion et de la programmation artistiques et de prévoir, d'autre part, que la liberté de création devait respecter la propriété intellectuelle. Dans un cas, il s'agissait de compléter l'article en spécifiant d'autres libertés tandis que, dans l'autre cas, il était plutôt question d'encadrer la liberté proclamée dans cet article 6 ( * ) .
Concernant l'intérêt d'élargir le champ de l'article à la liberté de diffusion, vos rapporteurs considèrent qu'il y a un risque que la reconnaissance d'un tel droit dans cet article affaiblisse la notion même de droits d'auteur dans le cadre d'un contentieux sur l'originalité d'une oeuvre, cette notion apparaissant, dès lors, comme étant d'une importance moindre que la liberté de diffusion.
Une autre solution aurait pu consister à compléter l'article 1 er pour à la fois en élargir la portée tout en précisant les limites de son application. Le Gouvernement a exclu cette perspective afin de préserver « la pureté de la rédaction de l'article 1 er » 7 ( * ) en invoquant le précédent de l'article 1 er de la loi de 1881.
Pourtant, un autre exemple aurait pu être utilement convoqué pour élargir le débat, celui de l'article 1 er de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication qui énonce de manière tout aussi symbolique une autre liberté fondamentale - la liberté de communication - tout en comprenant deux alinéas supplémentaires (voir encadré ci-dessous). Or le deuxième alinéa de cet article énonce les motifs susceptibles de limiter le principe général comme, par exemple, le respect de la dignité de la personne humaine, la protection de l'enfance et de l'adolescence ou encore la sauvegarde de l'ordre public sans, pour autant, affaiblir la portée du premier alinéa. Une telle rédaction, dans l'esprit de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen permet de rappeler qu'aucune liberté n'est absolue et qu'elles peuvent être également limitées par d'autres principes de rang législatif.
L'article 1 er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication « La communication au public par voie électronique est libre. L'exercice de cette liberté ne peut être limité que dans la mesure requise, d'une part, par le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d'autrui, du caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion et, d'autre part, par la protection de l'enfance et de l'adolescence, par la sauvegarde de l'ordre public, par les besoins de la défense nationale, par les exigences de service public, par les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication, ainsi que par la nécessité, pour les services audiovisuels, de développer la production audiovisuelle. Les services audiovisuels comprennent les services de communication audiovisuelle telle que définie à l'article 2 ainsi que l'ensemble des services mettant à disposition du public ou d'une catégorie de public des oeuvres audiovisuelles, cinématographiques ou sonores, quelles que soient les modalités techniques de cette mise à disposition ». |
Vos rapporteurs estiment qu'il n'est pas souhaitable de compléter l'article 1 er de manière imprécise ou lacunaire. Soit cet article se limite à énoncer la liberté de création artistique seule, soit il doit être complété afin de préciser l'ensemble des restrictions qui peuvent lui être apportées. Mais vos rapporteurs ne sont pas favorables à ce que la seule limite apportée à la liberté de création concerne le respect des droits d'auteur, même s'il est, bien entendu, très attaché à ce principe. Un tel choix pourrait, en effet, laisser entendre que les autres motifs de restriction seraient moins légitimes, ce qui n'est pas la volonté du législateur.
Compte tenu du fait que les références à la liberté de programmation et à la liberté de diffusion artistique ainsi celle relative au respect des droits des auteurs et des artistes sont mentionnées dans l'article 2 dans sa rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, vos rapporteurs vous proposent d'adopter cet article sans modification.
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 2 - Définition des objectifs de la politique en faveur de la création artistique
I. - Le texte du projet de loi
Le présent article détermine les objectifs des politiques publiques de l'État et des collectivités territoriales en faveur de la création artistique.
Il donne également aux collectivités publiques la responsabilité de veiller au respect de la liberté de programmation artistique.
A. État des lieux
Comme le rappelle l'étude d'impact annexée au projet de loi : « à la différence des autres secteurs culturels tels le patrimoine ou l'audiovisuel, le cadre juridique de l'intervention de l'État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements en faveur du spectacle vivant et des arts plastiques n'a fait l'objet d'aucun dispositif législatif d'ensemble et s'est construit au fil du temps sur des bases juridiques éparses, composées de textes de niveaux différents, institués soit pour certains secteurs, soit pour certaines activités » 8 ( * ) . Un tel cadre juridique hétérogène constitue à la fois une source d'insécurité juridique et une difficulté pour l'ensemble des acteurs concernés par l'action culturelle.
Parmi les références juridiques en vigueur concernant le spectacle vivant on peut mentionner l'article 1er -2 de l'ordonnance du 13 octobre 1945 issu de l'article 2 de la loi n° 99-198 du 18 mars 1999 qui prévoit que « les entreprises de spectacles vivants peuvent être subventionnées par l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements et établissements publics dans le cadre de conventions » . Toutefois, aucun dispositif ne prévoit un principe similaire concernant les arts plastiques. Et, plus généralement, aucune loi n'est venue, jusqu'à présent, préciser les objectifs de l'intervention des collectivités publiques dans le domaine de la création artistique.
Cette absence de cadre législatif n'a pas empêché une forte implication de l'État et des collectivités territoriales en faveur de l'émergence d'un vaste réseau de structures dédiées à la production et à la diffusion du spectacle vivant et des arts plastiques 9 ( * ) . Elle est néanmoins à l'origine de dysfonctionnements qui peuvent pénaliser le financement de certains projets.
Comme le souligne l'étude d'impact : « l'absence de coordination des actions publiques peut conduire à des approches partielles, à une perte d'efficacité globale de l'intervention publique, voire à de possibles conflits entre plusieurs politiques sans approche d'ensemble » . Par ailleurs, il apparaît que l'absence d'instance de concertation réunissant l'État et les collectivités territoriales en matière de culture ne permet pas de corriger ces évolutions.
B. Le dispositif proposé
Le présent article a pour objectif d'améliorer la cohérence des politiques menées en faveur de la création artistique par les différents acteurs publics en donnant un cadre législatif à leurs interventions et en précisant les principes qui dictent leurs actions, dans le respect de la libre administration des collectivités territoriales.
Dans cette perspective, le premier alinéa de l'article prévoit que l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements, ainsi que leurs établissements publics, définissent et mettent en oeuvre une politique en faveur de la création artistique.
Il prévoit ensuite que les collectivités publiques ont vocation à soutenir :
- le développement de la création artistique sur l'ensemble du territoire ainsi que l'émergence et le développement des talents (1°) ;
- la liberté de choix des pratiques culturelles (2°) ;
- le développement des moyens de diffusion de la création artistique (3°) ;
- l'égal accès des citoyens à la création artistique et aux oeuvres y compris dans l'espace public (4°) ;
- les artistes, les structures publiques et privées qui oeuvrent dans le domaine de la création, la production, la diffusion des oeuvres, l'enseignement supérieur, la sensibilisation des publics et l'éducation artistique et culturelle (5°) ;
- le dynamisme de la création artistique au plan local, national et international, ainsi que le rayonnement de la France à l'étranger (6°) ;
- la promotion de la circulation des oeuvres et des artistes, la diversité des expressions culturelles et les échanges et les interactions entre les cultures (7°) ;
- la formation des professionnels de la création artistique et la transmission des savoirs et des savoir-faire entre les générations (8°) ;
- le développement et la pérennisation de l'emploi artistique, la structuration des secteurs professionnels ainsi que la lutte contre la précarité (9°) ;
- le maintien et le développement d'un dialogue régulier avec les organisations professionnelles et l'ensemble des acteurs de la création artistique (10°).
Le dernier alinéa de l'article 2 donne pour mission à l'État et aux collectivités territoriales de veiller au respect de la liberté de programmation artistique. Ce principe important qui ne figure pas à l'article 1 er est donc bien mentionné à l'article 2.
II. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Cet article a été complété et précisé lors de son examen par l'Assemblée nationale. Une référence aux services centraux et déconcentrés a été introduite afin de pouvoir mentionner indirectement le rôle des directions régionales des affaires culturelles (DRAC). La notion de « service public » de la culture a également été introduite dans le premier alinéa.
Le 1° a été complété pour mentionner en particulier le soutien à la création d'oeuvres d'expression originale française et le soutien à l'émergence, au développement et au renouvellement des talents « et de leur expression » .
Un 1° bis a ensuite été ajouté qui prévoit de « garantir la liberté de diffusion artistique » . Cet ajout permet de répondre aux demandes exprimées afin de compléter l'article 1 er pour qu'il mentionne la liberté de diffusion artistique.
Le 3° a été complété afin de mentionner la nécessité pour les collectivités publiques de « garantir la diversité de la création en mobilisant notamment le service public des arts, de la culture et de l'audiovisuel » .
Le 4°, relatif à l'égal accès des citoyens à la création artistique a été modifié afin de faire référence au « respect de l'équité territoriale » tandis la nécessité de garantir également « la diversité des expressions culturelles » a été ajoutée. Une référence au fait qu'il était nécessaire de favoriser l'accès du public le plus large aux oeuvres de la création « notamment dans une perspective d'émancipation individuelle et collective » a été adjointe tandis qu'il est également précisé que la mise en valeur des oeuvres dans l'espace public doit se faire « dans le respect des droits des auteurs et des artistes » . Cette dernière référence au respect des droits des auteurs permet de répondre à des demandes qui avaient été formulées concernant des compléments à apporter à l'article 1 er .
Un 4° bis a été également ajouté qui prévoit que les collectivités publiques doivent mettre en oeuvre, à destination de toutes les personnes, notamment celles qui sont les plus éloignées de la culture, des publics spécifiques, ainsi que des jeunes, des actions d'éducation artistique et culturelle permettant l'épanouissement des aptitudes individuelles et favorisant l'égalité d'accès à la culture, en veillant notamment à la conception et à la mise en oeuvre du parcours d'éducation artistique et culturelle mentionné à l'article L. 121-6 du code de l'éducation 10 ( * ) et en favorisant l'implication des artistes dans ces actions.
Le 5° a été modifié afin, d'une part, de préciser que les collectivités publiques peuvent soutenir des établissements de droit public ou de droit privé « bénéficiant ou non d'un label » et, d'autre part, d'assurer le respect des droits sociaux et des droits de propriété intellectuelle des artistes et des auteurs dans l'attribution des subventions.
Un 5° bis a été ajouté qui prévoit que les collectivités publiques doivent contribuer à la promotion des initiatives portées par le secteur associatif, les lieux intermédiaires indépendants, acteurs de la diversité culturelle et de l'égalité des territoires.
Un 5° ter a, par ailleurs, été inséré afin de favoriser, notamment à travers des initiatives territoriales, les activités de création artistiques pratiquées en amateur au motif qu'elles sont sources de développement personnel et de lien social.
Le 7° a été modifié afin de prévoir la promotion de la mobilité des auteurs en plus de celle des artistes déjà prévue par le texte initial ;
Un 7° bis a été adopté qui vise à favoriser l'accès de la culture dans le monde du travail.
Le 8° a été complété afin de préciser que les collectivités publiques contribuent à la formation « initiale et continue » des professionnels de la création artistique et que des dispositifs de reconversion professionnelle adaptés aux métiers artistiques sont mis en place. La rédaction de cet alinéa prévoit aussi que la transmission des savoirs et des savoir-faire doit également se faire « au sein » des générations et non seulement entre elles.
La rédaction du 9° a précisé que les collectivités publiques doivent contribuer à la lutte contre la « précarité des auteurs et des artistes » et non de l'activité artistique.
Un 9° bis prévoit que les collectivités publiques doivent favoriser une juste rémunération des créateurs et un partage équitable de la valeur, notamment par la promotion du droit d'auteur et des droits voisins aux plans européen et international.
Le 10° a été complété pour prévoir, au-delà du dialogue évoqué initialement, une « concertation » entre l'État, l'ensemble des collectivités publiques concernées, les organisations professionnelles, le secteur associatif, l'ensemble des acteurs de la création et le public concerné.
Un 11° a été inséré qui prévoit la nécessité, pour les collectivités publiques, de favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes dans le domaine de la création artistique.
Le dernier alinéa de l'article relatif au respect de la liberté de programmation artistique n'a pas été modifié.
III. La position de votre commission
Vos rapporteurs remarquent que la rédaction de l'article 2 a été complétée lors du débat à l'Assemblée nationale afin d'inclure certains principes qui avaient fait l'objet d'un débat pour compléter l'article 1 er . C'est en particulier le cas de la liberté de diffusion artistique mentionnée dans le 1° bis et de la nécessaire défense des droits d'auteurs invoquée aux 4° et 5°. Le principe de liberté de programmation artistique figurait déjà dans la rédaction originelle du dernier alinéa de l'article 2.
Outre ces ajouts qui apparaissent justifiés, vos rapporteurs observent que les nombreuses mentions supplémentaires réalisées présentent néanmoins le risque d'affaiblir la portée de cet article qui au lieu de fixer des priorités tend, de plus en plus, à lister des objectifs sans véritable portée normative . Une seconde conséquence tient au fait qu'à partir du moment où le choix a été fait de lister de manière exhaustive les objectifs de la politique publique en faveur de la création artistique, chaque oubli ou omission peut être considérée comme l'expression d'un choix politique .
Afin de prévenir ce dernier risque, vos rapporteurs ont estimé utile de mieux mettre en valeur le rôle des acteurs privés en général et celui des fondations reconnues d'utilité publique agissant dans le domaine culturel en particulier, ainsi que la nécessité de favoriser le mécénat . Comme cela a été soulevé lors du débat en commission à l'Assemblée nationale, certains ajouts qui insistent sur le rôle du service public peuvent donner le sentiment d'exclure les acteurs privés ou parapublics de la définition et de la mise en oeuvre des politiques culturelles en faveur de la création. Le service public a un rôle essentiel à jouer en faveur du développement de la création artistique mais il ne saurait embrasser à lui seul toutes les initiatives en sa faveur.
Vos rapporteurs vous proposent ainsi (dans le cadre d'un amendement COM-158 rectifié ) de supprimer la référence au « service public » dans le premier alinéa compte tenu du fait que la politique en faveur de la création ne se limite pas au seul secteur public notamment du fait des difficultés budgétaires qui contraignent structurellement son action. Ils rappellent que l'article 2 fait déjà référence dans son 3° au « service public des arts, de la culture et de l'audiovisuel » .
Concernant les objectifs de la politique en faveur de la création artistique, vos rapporteurs vous proposent une nouvelle rédaction de certains alinéas 11 ( * ) afin d'en réduire le nombre de 18 à 17 tout en ajoutant deux nouveaux alinéas. Pour ce faire, ils rapprochent les alinéas suivants :
- le 11° relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes dans le domaine de la création artistique est intégré au 1° afin de rappeler l'importance de cet objectif ;
- les dispositions du 3° relatives au développement de la diffusion de la création artistique et à la diversité de la création sont rapprochées de celles du 4° qui évoquent la diversité des expressions culturelles au sein d'un nouveau 2°, le reste du 4° étant maintenu dans un nouveau 5° ;
- le 6°, qui prévoit de favoriser le dynamisme de la création artistique sur les plans local, national et international, ainsi que le rayonnement de la France à l'étranger, est intégré au 1°.
Deux nouveaux alinéas sont ensuite ajoutés :
- le nouveau 9° prévoit de garantir la transparence et l'équité dans l'octroi des subventions publiques à des personnes morales publiques et privées intervenant en faveur de la création artistique à travers le recours à des appels à projet et l'évaluation régulière des actions menées ;
- le nouveau 11° prévoit d' encourager les actions de mécénat des particuliers et des entreprises en faveur de la création artistique et de favoriser le développement des actions des fondations reconnues d'utilité publique qui accompagnent la création .
Plusieurs rédactions d'alinéas ont enfin fait l'objet de modifications afin de préciser les dispositions, clarifier la compréhension ou alléger la formulation :
- la référence dans le 4° (ancien 5° ter ) au fait que les activités de création artistique pratiquées en amateur constituent des « sources de développement personnel et de lien social » est supprimée pour alléger la rédaction ;
- le 5° (ancien 4°) est complété afin de préciser que la mise en valeur des oeuvres dans l'espace public peut se faire au travers de dispositifs de soutien adaptés 12 ( * ) ;
- la rédaction du 6° (ancien 4° bis ) est modifiée pour supprimer la référence au parcours d'éducation artistique et culturelle qui n'apparaît pas nécessaire compte tenu du fait que l'alinéa fait référence aux actions d'éducation artistique et culturelle ;
- la rédaction du 13° (ancien 8°) est également modifiée afin de supprimer la référence au fait que la transmission des savoirs et des savoir-faire se fait « au sein et entre les générations » , cette précision n'apparaissant pas nécessaire.
La rédaction proposée par vos rapporteurs ne modifie pas l'alinéa 21 du texte voté par l'Assemblée nationale qui prévoit que l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi que leurs établissements publics veillent au respect de la liberté de programmation artistique .
Lors de l'examen du texte, votre commission a adopté, avec un avis favorable de vos rapporteurs un amendement COM-113 de Mmes Marie-Christine Blandin et Corinne Bouchoux, au premier alinéa, qui précise que la politique en faveur de la création artistique est définie et mise en oeuvre dans le respect des droits culturels des personnes . Cet amendement vise à mieux articuler l'article 2 du projet de loi avec l'article 103 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (« NOTRe ») qui prévoit que : « La responsabilité en matière culturelle est exercée conjointement par les collectivités territoriales et l'État dans le respect des droits culturels énoncés par la convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles du 20 octobre 2005 » .
Votre commission a également adopté, avec un avis favorable de vos rapporteurs, un amendement au premier alinéa COM-11 de M. Patrick Abate, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Pierre Laurent, Mme Christine Prunaud et les membres du groupe CRC qui souligne que cette même politique en faveur de la création artistique est construite en concertation avec les acteurs de la création artistique .
Votre commission a ensuite adopté un sous-amendement de Mmes Marie-Christine Blandin et Corinne Bouchoux ( COM-113 ) à l'amendement COM-158 rectifié qui complète le nouveau 12° afin de prévoir que les échanges culturels doivent être conduits avec une attention particulière pour les pays en développement afin de contribuer à des échanges culturels équilibrés .
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 2 bis - (art. L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales) - Inscription annuelle à l'ordre du jour des conférences territoriales de l'action publique d'un débat sur la politique en faveur de la création artistique
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté, sur proposition du rapporteur, un amendement proposant la création d'un article 2 bis prévoyant l'obligation pour le président de la conférence territoriale de l'action publique (CTAP) d'inscrire à son ordre du jour au moins une fois par an un débat en faveur de la création artistique.
Cet amendement a été adopté à l'issue d'un débat sur l'opportunité de compléter cette disposition par la création d'une commission de la culture au sein de chaque CTAP, comme cela avait préconisé par la même commission des affaires culturelles dans le cadre du débat sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République. Cette proposition a finalement été repoussée compte tenu, en particulier, d'un avis défavorable de la ministre de la culture et de la communication et du rapporteur.
II. - La position de votre commission
Lors du débat sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, votre commission, sur la proposition de sa rapporteure, Mme Catherine Morin-Desailly, avait fait adopter à l'article 28 (voir encadré ci-dessous) le principe de la création au sein de chaque CTAP prévue par l'article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales d'une commission de la culture, d'une commission du sport et d'une commission du tourisme. Votre commission avait, en effet, estimé « qu'il était nécessaire de permettre aux collectivités territoriales de mieux coordonner leurs actions » 13 ( * ) . L'amendement adopté devait permettre d'établir un lien « entre compétence partagée et commission thématique de la CTAP, afin que le cadre propice au dialogue soit garanti au sein de la conférence territoriale » .
Vos rapporteurs vous proposent dans ces conditions, au travers d'un amendement COM-159 , de compléter le deuxième alinéa du III de l'article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales afin de prévoir que la CTAP comprend une commission de la culture. Ils vous proposent également de prévoir de donner une vocation plus générale au débat annuel au sein de la CTAP prévu par cet article 2 bis en prévoyant qu'il portera sur la politique en faveur de la culture dans son ensemble et non seulement sur la création et la diffusion artistiques.
Article 28 du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République tel qu'adopté par le Sénat en première lecture le 27 janvier 2015 Après le premier alinéa de l'article L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés : « Les compétences en matière de culture, de sport, de tourisme, d'action extérieure et de coopération internationale sont partagées entre les communes, leurs groupements, les départements, les régions et les collectivités territoriales à statut particulier . La conférence territoriale de l'action publique définie à l'article L. 1111-9-1 comprend une commission de la culture, une commission du sport et une commission du tourisme ». |
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 3 - Labellisation des institutions de référence nationale
I. - Le texte du projet de loi
Le présent article a pour objectif de donner une base législative à la politique de labellisation des institutions dans le domaine du spectacle vivant et des arts plastiques.
A. État des lieux
La politique de labellisation ne dispose aujourd'hui d'aucun fondement législatif alors même qu'elle occupe une place déterminante dans la politique culturelle d'aménagement du territoire.
L'étude d'impact annexée au projet de loi rappelle qu'il existe aujourd'hui dix types de label dans les secteurs du spectacle vivant.
En 2014, les structures bénéficiant d'une labellisation sont réparties entre : 38 centres dramatiques nationaux et régionaux (CDN-CDR), 70 scènes nationales (SN), 18 centres chorégraphiques nationaux (CCN), 14 opéras et 19 orchestres en régions, 8 centres nationaux de création musicale (CNCM), 92 scènes de musiques actuelles (SMAC) et autres lieux de musiques actuelles, 12 pôles nationaux des arts du cirque (PNAC) ; 9 centres nationaux des arts de la rue (CNAR), 9 centres de développement chorégraphique (CDC), soit au total 289 établissements représentant un subventionnement de plus de 194 millions d'euros pour l'État.
Hormis le décret n° 72-904 du 2 octobre 1972 relatif aux contrats de décentralisation dramatique qui encadre les rapports entre l'État et les centres dramatiques nationaux, la politique de soutien aux structures de création et de diffusion dite « labels et réseaux » repose aujourd'hui sur une circulaire du 31 août 2010, modifiée le 22 février 2013 14 ( * ) , qui regroupe en un seul texte les circulaires relatives à chaque label du spectacle vivant. Par ailleurs, dans le secteur des arts plastiques, la politique de soutien aux structures et aux lieux de création et de diffusion de l'art contemporain repose sur la circulaire du 9 mars 2001 pour les centres d'art.
L'étude d'impact considère que « ces dispositifs ne sont pas d'une portée juridique suffisante compte tenu de la variété des modes d'intervention des collectivités publiques dans le fonctionnement des structures et ne permettent pas en conséquence à l'État et aux collectivités territoriales d'avoir une influence suffisante pour s'assurer du respect de ce qui a conduit à l'attribution du label » .
Les structures bénéficiaires d'un label ou constituant un réseau sont pour la plupart des structures de droit privé majoritairement constituées sous forme associative, à part les centres dramatiques nationaux et régionaux qui ont, à deux exceptions près, un statut de sociétés commerciales (SARL ou SA) et sur lesquelles l'État attributeur du label n'a, en l'absence de disposition législative dérogatoire au droit commun, aucun autre outil de contrôle ou d'influence sauf à jouer sur le montant des subventions versées, ou à retirer le label.
Le cadre de l'intervention de l'État repose sur le schéma classique de subvention d'activités privées présentant un intérêt général avec comme contreparties des responsabilités spécifiques et un encadrement particulier. Ce régime a été institué par le décret du 2 octobre 1972, relatif aux centres dramatiques nationaux, qui a été décliné pour les différentes structures, en l'adaptant à chaque « label ».
Dans ce schéma, l'État apporte son soutien aux structures qui présentent un niveau d'exigence artistique et de développement culturel, répondent aux critères de la politique publique et présentent un caractère d'intérêt général par leurs activités et leurs projets.
La politique d'attribution des labels Le cahier des missions et des charges spécifique au label conféré à une structure fixe les obligations que celle-ci doit remplir pour satisfaire aux critères de la politique publique d'aides mise en oeuvre au niveau national par l'État. Ces obligations varient suivant chaque label mais sont identifiées autour d'un socle d'engagements communs qui se traduisent par des responsabilités en termes de : - missions artistiques : les établissements contribuent à développer la création et/ou la diffusion artistique dans un objectif d'exigence et d'innovation artistiques ; - missions territoriales et en direction des publics : ils assument une responsabilité vis-à-vis de la population du territoire dans lequel ils sont implantés en proposant une politique visant à développer, renouveler et diversifier tous les publics, et particulièrement les plus éloignés et les publics empêchés, par tous moyens de diffusion ; - missions pédagogiques par le développement d'actions d'éducation artistique et culturelle et de sensibilisation en direction des enfants, des jeunes et des publics spécifiques ; - missions professionnelles : ils doivent constituer des espaces de ressources pour les artistes et les professionnels du territoire et leur offrir la possibilité de développer leur pratique artistique notamment par la mise en oeuvre de dispositifs d'accueil et d'espace de travail, d'assistance et de conseil, voire de soutien financier à la production. Ils participent également à la formation et à l'insertion professionnelle des jeunes, notamment par l'accueil d'étudiants stagiaires et d'apprentis et la mise en place de contrats de professionnalisation. Sur cette base, le cadre d'intervention de l'État se caractérise par l'instauration de procédures harmonisées et transparentes pour la sélection du projet artistique et la désignation des personnes chargées de la mise en oeuvre de ce projet au sein de la structure, qui reposent sur une procédure d'appel à candidatures et une évaluation qui se traduit par un dispositif d'encadrement conventionnel. Source : Étude d'impact annexée au projet de loi |
Le Gouvernement estime que le cadre juridique de l'intervention de l'État mérite d'être renforcé et précisé. En particulier, l'État souhaite pouvoir organiser et définir les modalités retenues pour la désignation du dirigeant de la structure candidate à une labellisation, le choix de ce dernier constituant un élément essentiel pour le succès du projet culturel porté par la structure candidate. Il s'agit donc de ce point de vue de permettre, sans que cela puisse être contesté et par dérogation aux règles de droit commun s'appliquant aux structures susceptibles d'être candidates pour un label, de pouvoir intervenir dans la désignation des dirigeants.
B. Le dispositif proposé
Le premier alinéa de l'article 3 donne un caractère législatif aux pratiques existantes. Il rappelle, en effet, que c'est le ministre chargé de la culture qui peut attribuer des labels aux structures, personnes morales de droit public ou de droit privé ou services en régie d'une collectivité territoriale, qui en font la demande et dont le projet artistique et culturel présente un intérêt général pour la création artistique dans les domaines du spectacle vivant ou des arts plastiques.
Cet intérêt s'apprécie au regard d'un cahier des missions et des charges, qui fixe des objectifs de développement et de renouvellement artistique, de diversité et de démocratisation culturelles, de traitement équitable des territoires, d'éducation artistique et culturelle ainsi que de professionnalisation des artistes et des auteurs des secteurs du spectacle vivant et des arts plastiques. Là encore, cette disposition correspond au droit applicable.
Le deuxième alinéa introduit un novation puisque si la circulaire du 30 août 2010 prévoyait déjà que le dirigeant d'une structure labellisée est choisi à l'issue d'un appel à candidatures associant les collectivités territoriales et leurs groupements partenaires et l'État 15 ( * ) , elle ne mentionnait pas le fait que sa nomination devait faire l'objet d'un agrément du ministre chargé de la culture. Cet alinéa prévoit également que les nominations des dirigeants des structures labellisées concourent à une représentation paritaire des femmes et des hommes ce qui avait été rappelé par la circulaire du 22 février 2013.
En réalité, le principal objectif du deuxième alinéa vise à sécuriser juridiquement la procédure d'agrément des nominations par l'État.
Le dernier alinéa de l'article renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de fixer la liste des labels et de définir les modalités de mise en oeuvre de l'article, notamment les conditions d'attribution du label et la procédure de sélection du projet artistique et culturel et du dirigeant de la structure labellisée ainsi que les modalités d'instruction des demandes d'attribution de label et ses conditions de retrait.
II. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté cet article après avoir modifié son dernier alinéa pour préciser que les conditions d'attribution du label et la procédure de sélection du projet artistique et culturel et du dirigeant de la structure labellisée doivent respecter les principes de transparence, d'égalité d'accès des femmes et des hommes aux responsabilités, de renouvellement des générations et de mixité sociale.
L'ajout de ces termes comme l'introduction dans la rédaction initiale de l'article d'une procédure d'agrément du dirigeant par l'État, qui n'était pas prévue dans la circulaire du 31 août 2010, ont été à l'origine d'un large débat qui a mis en évidence le risque d'une part que les nominations ne privilégient pas la qualité des candidatures compte tenu des nombreux critères à prendre en compte et, d'autre part, que la procédure de labellisation se révèle comme déséquilibrée au bénéfice de l'État et au détriment des collectivités territoriales.
III. - La position de votre commission
Vos rapporteurs observent que la détermination des critères et des procédures de labellisation dans des textes de niveau réglementaire ou infra-réglementaire n'avait pas empêché le développement de ces structures. Ils remarquent que c'est la volonté de l'État d'intervenir davantage dans les nominations sur la base de critères très généraux et sans lien avec la compétence des candidats qui justifie au final de passer par la loi compte tenu du caractère privé d'une grande majorité des structures concernées. Or on ne peut que s'interroger sur cette volonté de l'État de pouvoir disposer d'un véritable « droit de véto » sur les nominations de dirigeants de structures privées.
Certes, cette prérogative s'inscrirait dans le cadre des nécessaires contreparties aux subventions accordées mais outre le fait que le montant de ces subventions n'est pas garanti, on ne peut qu'être inquiet du caractère arbitraire que pourrait prendre la décision de refus d'agréer une nomination, la rédaction actuelle ne prévoyant pas la nécessité d'une motivation.
Vos rapporteurs estiment qu'il n'y aurait que des inconvénients à créer les conditions d'une « mise sous tutelle » de l'État des structures labellisées à travers cette procédure d'agrément des nominations. Outre le fait qu'il convient de s'interroger sur la constitutionnalité d'une telle mesure qui porte atteinte à la liberté de nomination des structures privées, vos rapporteurs s'inquiètent des conséquences pour la culture de la désignation de dirigeants sur des critères extra-professionnels. Ils rappellent, en particulier, que selon les termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, tous les citoyens sans distinction sont admissibles aux emplois publics « sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leur talents » .
Article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen « La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents ». |
Si le principe d'un agrément du seul ministre de la culture n'est donc pas satisfaisant, il convient de poursuivre la réflexion sur la façon dont doivent être associés l'ensemble des acteurs au pilotage de ces structures afin de ne pas déséquilibrer les relations entre l'État et les collectivités territoriales. Par ailleurs, la rédaction doit sans doute être précisée afin de mieux distinguer entre les structures nationales labellisées pour lesquelles il est complètement légitime que l'État dispose d'un pouvoir d'agrément et les structures locales pour lesquelles les collectivité territoriales devraient avoir davantage leur mot à dire compte tenu en particulier de leur participation financière. Les membres de notre commission ont considéré que la réflexion devait se poursuivre sur ce sujet d'ici l'examen du projet de loi en séance publique.
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 3 bis (supprimé) - Rapport au Parlement sur la mise en place d'un dispositif de « 1 % travaux publics »
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Le présent article prévoit que le Gouvernement devra remettre au Parlement, dans les six mois suivant la promulgation de la loi, un rapport sur l'opportunité de créer un nouveau dispositif, à côté du dispositif dit du « 1 % artistique » ou « 1 % bâtiments publics » créés en 1951, destinés à promouvoir l'accès et la diffusion des oeuvres d'art plastique contemporaines. L'objectif serait de permettre à l'État et aux collectivités territoriales de consacrer volontairement 1 % du coût des opérations de travaux publics au soutien d'actions artistiques dans l'espace public.
Le recours à un rapport s'explique, selon le rapporteur, par le fait que le dépôt d'un amendement prévoyant la disposition aurait été irrecevable financièrement.
II. - La position de votre commission
Le « 1 % artistique » constitue un dispositif original de soutien de la création dans le domaine des arts plastiques, la diffusion des oeuvres dans l'espace public et la constitution d'un patrimoine pérenne. L'objectif du rapport étant d'examiner la possibilité d'étendre le périmètre du 1 % artistique à des formes de création éphémères à l'image des arts de la rue, votre rapporteur s'interroge sur les risques qu'une telle évolution pourrait constituer pour le secteur des arts visuels.
Par ailleurs, les représentants des associations d'élus locaux ont indiqué à vos rapporteurs qu'il n'était pas envisageable d'étendre de manière obligatoire le dispositif du 1 % artistique à l'ensemble des projets de construction publique compte tenu des difficultés budgétaires.
En outre, alors que les dépenses de travaux publics peuvent être considérées comme des investissements, un financement des formes d'arts éphémères par le biais d'un prélèvement sur le montant total des travaux n'apparaît pas comme le schéma le plus vertueux.
Afin de ne pas minimiser le rôle des arts de la rue dans la création artistique vos rapporteurs rappellent qu'il ont proposé dans sa rédaction de l'article 2 de compléter le nouveau 5° afin de préciser que la politique en faveur de la création artistique met en valeur les oeuvres dans l'espace public à travers des dispositifs de soutien adaptés . Une telle disposition ouvre donc la voie à la recherche de mesures de soutien nouvelles et rend moins utile le maintien de cet article 3 bis .
En conséquence, vos rapporteurs vous proposent de supprimer cet article (COM-161) .
Votre commission a supprimé cet article .
Chapitre II - Le partage et la
transparence des rémunérations dans les secteurs de la
création artistique
Article 4 A (art. L. 131-2 du code de la
propriété intellectuelle)
-
Formalisme des contrats de transmission des droits d'auteur
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
À l'initiative de son rapporteur, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a introduit le présent article, visant à compléter le premier alinéa de l'article L. 131-2 du code de la propriété intellectuelle.
Cet alinéa prévoit que les contrats de représentation, d'édition et de reproduction audiovisuelle, comme les autorisations gratuites d'exécution doivent être constatés par écrit. Aux termes du présent article, l'obligation de constatation par écrit est élargie aux contrats par lesquels sont transmis des droits d'auteur, c'est-à-dire à tout contrat de cession de droits .
Il s'agit de protéger les auteurs contre les pratiques contractuelles informelles qui se sont développées, notamment dans le domaine des arts visuels, et de garantir aux parties une meilleure transparence des relations contractuelles.
L'Assemblée nationale n'a apporté, en séance publique, aucune modification au dispositif adopté par sa commission des affaires culturelles.
II. - La position de votre commission
Bien que la très grande majorité des contrats de cession de droits soit déjà constatés par écrit , cette disposition ne pose aucune difficulté de principe.
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 4 B (supprimé) - Rapport sur l'amélioration du partage et de la transparence des rémunérations dans le secteur du livre
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
La commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a, à l'initiative de son rapporteur adopté le présent article, qui prévoit que, dans un délai de six mois suivant la promulgation du texte le Gouvernement remettra au Parlement un rapport relatif aux conséquences qu'il entend tirer de la concertation entre les organisations représentatives des éditeurs et des titulaires de droits d'auteur .
Cette concertation relative aux conditions de partage et de transparence des rémunérations dans le secteur du livre, est envisagée comme le prolongement des négociations ayant permis d'aboutir, à l'issue de quatre années de négociation, à l'accord du 21 mars 2013 portant modification du contrat d'édition à l'ère numérique . Selon les voeux des auteurs, largement repris par la rédaction de l'Assemblée nationale, la seconde phase de discussion doit porter sur cinq points :
- la fréquence et la forme de la reddition des comptes , que l'éditeur n'est aujourd'hui tenu d'adresser à l'auteur qu'une fois par an ;
- la mise en place d' une obligation d'établissement et de transmission du compte d'exploitation des livres à un organisme de confiance désigné par décret, afin, sur le modèle du dispositif prévu par l'article 8 du projet de loi pour le secteur du cinéma, d'assurer un meilleur contrôle de la véracité des chiffres transmis aux titulaires de droits ;
- la mise en place d' une obligation, pour l'éditeur, d'envoyer à l'auteur un certificat de tirage initial, réimpression, de réédition et, le cas échéant, de pilonnage , afin de garantir son information pleine et entière ;
- les conditions d' un encadrement des provisions sur retour , qui conduit à reporter d'un an le versement d'une part conséquente de la rémunération due à l'auteur comme à rendre confuse la reddition des comptes portant alors sur des chiffres différents, et d' une interdiction de la pratique de la compensation intertitre , consistant, pour un éditeur, à compenser les droits d'un auteur entre plusieurs ouvrages. Plus précisément, l'éditeur déduit d'un à-valoir non couvert sur un ouvrage des droits à percevoir sur un autre ouvrage, ce mécanisme lui évitant alors de verser la rémunération due à l'auteur telle que prévue par second titre ;
- enfin, l'opportunité d' un élargissement des compétences du médiateur du livre aux litiges opposant auteurs et éditeurs , à l'instar des pouvoirs conférés par l'article 7 au nouveau médiateur de la musique.
L'Assemblée nationale n'a apporté, en séance publique, aucune modification au dispositif adopté par sa commission des affaires culturelles.
II. - La position de votre commission
Votre commission rappelle que le nouveau contrat d'édition n'est applicable que depuis le 1 er décembre 2014. Les premiers effets s'en font donc encore à peine sentir, d'autant que certaines mesures ne sont mises en oeuvre que progressivement, notamment la reddition des comptes, dont le premier envoi en application du nouveau contrat ne sera réalisé qu'au printemps 2016.
Le contrat d'édition désormais applicable fait des auteurs français les mieux protégés au monde au regard des particularités de l'édition numérique, comme le rappelait récemment un rapport du Parlement européen.
Pourtant, certains auteurs, sans attendre que puisse être tiré un bilan du nouveau dispositif, ont réclamé de nouvelles avancées s'agissant du partage de la valeur et de la transparence des rémunérations. Comme l'indiquait le Syndicat national de l'édition (SNE) lors de son audition, des négociations ont d'ores et déjà commencé avec le Conseil permanent des écrivains (CPE). Une dizaine de réunions se sont tenues depuis le mois de septembre et les parties sont sur le point de trouver un accord sur un certain nombre de points évoqués par le présent article, notamment l'encadrement de la provision sur retour et de la compensation intertitre.
Dès lors, le maintien du présent article, qui a essentiellement pour objet de faire pression sur les parties aux fins de trouver un accord, n'a guère d'intérêt, d'autant qu'il propose, en pratique, le dépôt d'un énième rapport au Parlement, méthode à laquelle votre commission n'est traditionnellement pas favorable, dès lors, elle a considéré justifié de supprimer cette disposition ( COM-162 ).
Votre commission a supprimé cet article.
Article 4 (chapitre II du titre unique du livre II du code de la propriété intellectuelle) - Coordination
I. - Le texte du projet de loi
Le présent article vise à modifier la structure du chapitre II du titre unique du livre II de la première partie du code de la propriété intellectuelle, relatif aux droits voisins du droit d'auteur.
Ce chapitre traite des droits des artistes-interprètes et comprend les articles L. 212-1 à L. 212-11. La création, par l'article 5 du projet de loi, d'une section 3 consacrée, au sein de ce chapitre, aux contrats conclus entre un artiste-interprète et un producteur de phonogrammes rend nécessaire de modifier la numérotation d'une partie des articles existants et de les répartir en deux sections distinctes précédant la nouvelle section 3.
Dès lors, aux termes de l'alinéa 2, les articles L. 212-10 et L. 212-11 deviennent respectivement les articles L. 212-3-5 et L. 212-3-6. L'alinéa 3 les intègre, avec les articles L. 212-1 à L. 212-3, dans une section 1 intitulée « Dispositions communes » . Enfin, l'alinéa 4 crée une section 2 « Contrats conclus entre un artiste-interprète et un producteur de vidéogrammes » rassemblant les articles L. 212-4 à L. 212-9.
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a apporté, via la direction de la séance, une modification rédactionnelle.
III. - La position de votre commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 5 (art. L. 212-10, L. 212-11, L. 212-12 nouveau, L. 212-13 nouveau, L. 212-13-1 nouveau et L. 212-14 nouveau du code de la propriété intellectuelle) - Protection contractuelle des artistes-interprètes
I. - Le texte du projet de loi
A. État des lieux
Les tensions entre acteurs de la filière musicale n'ont cessé de croître, ces dernières années, dans un contexte économique particulièrement déprimé . À 570 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2014, le marché de la musique a perdu 65 % de sa valeur et plus de la moitié de ses emplois en douze ans.
La crise de l'industrie musicale, pour partie due au développement des usages illicites, a été renforcée par une difficulté des professionnels à s'adapter au numérique . Mais désormais, si les revenus issus du numérique ne parviennent pas encore à compenser le recul des ventes physiques, ils enregistrent depuis plusieurs années une forte croissance .
Parts des ventes physiques et numériques
En millions de dollars |
En pourcentage |
||||
2013 |
2014 |
Évolution 2014/2013 |
2013 |
2014 |
|
Ventes de supports |
7 419 |
6 819 |
-8,1 % |
51 % |
46 % |
Ventes numériques |
6 412 |
6 852 |
+6,9 % |
39 % |
46 % |
Droits perçus en gestion collective |
876 |
948 |
+8,3 % |
7 % |
6 % |
Synchronisation |
320 |
346 |
+8,4 % |
2 % |
2 % |
Total marché |
15 027 |
14 965 |
-0,4 % |
100 % |
100 % |
Source : International federation of the phonographic industry (IFPI)
Selon les éléments statistiques publiés par le Syndicat national des éditeurs phonographiques (SNEP), les ventes numériques ont augmenté de 6 % en 2014 et se concentrent progressivement sur le streaming : le marché du téléchargement a subi une forte diminution (- 14 %), tandis que le streaming légal a fortement progressé (+ 34 %), jusqu'à représenter, avec 73 millions d'euros, 16 % du chiffre d'affaires de l'industrie musicale et 55 % des revenus du marché numérique.
Structure du marché de la musique
Source : SNEP
Le streaming permet à l'utilisateur d'écouter légalement de la musique sans avoir à l'acquérir. En cela, il diffère du téléchargement et de l'achat physique, qui impliquent une possession définitive du titre ou de l'album. On distingue deux modèles économiques : un service d'écoute gratuit pour l'utilisateur et financé par la publicité ou un système d'abonnement payant. La croissance du streaming , qui permet de compenser la baisse des revenus du téléchargement , est essentiellement tirée par l'accroissement du nombre des abonnements, qui contribuent à hauteur de 67 % au chiffre d'affaires global du streaming : en 2014, deux millions de Français sont abonnés à un service de streamin g musical.
L'offre est dominée par le « champion national » Deezer , avec ses 6,5 millions d'abonnés et ses 16 millions de visiteurs uniques par mois, et par la plateforme suédoise Spotify . Le service de streaming d' Apple , Apple Music , lancé le 30 juin dernier, devrait sans doute rapidement occuper une place centrale sur le marché. D'autres plateformes existent mais, malgré des offres variées, connaissent des situations économiques souvent précaires. La structure du marché du streaming demeure largement oligopolistique : en 2013, les chiffres d'affaires de Spotify et de Deezer s'établissaient respectivement à 747 millions d'euros et à 65 millions d'euros, tandis que le chiffre d'affaires cumulé de leurs concurrents affichait péniblement 15 millions d'euros. La plateforme de musique en ligne Qobuz a ainsi été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Paris le 9 novembre 2015, après une période de sauvegarde ouverte, sans succès, le 19 août 2014.
En 2015, le streaming poursuit sa croissance grâce notamment aux revenus générés par les abonnements (+ 66 %). À la fin du mois de juillet, le SNEP enregistrait déjà une progression de 43 % des revenus générés : le streaming , avec près de neuf milliards d'écoutes en sept mois, réalisait à cette date les deux tiers des revenus numériques et 28 % du chiffre d'affaires global du secteur. Les quatre plateformes principales ont enregistré, depuis le mois de janvier 2015, près de 50 millions de visites uniques mensuelles, soit, selon les sites, une croissance variant entre 4 % et 18 % . Dans ce contexte, le streaming pourrait devenir en France la source principale de revenus de l'industrie musicale et de ses artistes , comme c'est déjà le cas en Suède et en Norvège, où il représente deux tiers des ventes de morceaux.
S'il constitue indéniablement l'avenir de l'industrie musicale, le développement des pratiques numériques d'écoute de la musique, et notamment celle du streaming , fondée sur la location et non plus sur l'achat, conduit à une remise en cause profonde des modes de rémunération des différentes parties et, partant, à une virulente critique des nouvelles modalités de partage de la valeur.
En effet, en streaming , comme en téléchargement sur des plateformes du type iTunes , la rémunération des artistes est extrêmement faible , même s'il convient de prendre en considération que le modèle économique du streaming , consiste à ce que chaque écoute rapporte à l'artiste et au producteur, à la différence d'un achat d'album pour lequel, même plus élevée, la rémunération n'est perçue qu'une fois. Le calcul applicable à la rémunération de chacun doit donc être réalisé sur le long terme pour être exact.
Partage de la valeur pour un morceau de musique en streaming
Source : SNEP - E&Y
Dans ces conditions, nombreux sont les artistes à s'opposer aux modalités de partage des revenus issus du streaming . Les plus puissants d'entre eux obtiennent parfois gain de cause, à l'instar de l'artiste américaine Taylor Swift, qui, récemment, a réussi à faire plier le géant Apple. Sous sa pression, le groupe est revenu sur une disposition controversée d' Apple Music , le service de streaming que la société a lancé le 30 juin dernier, qui prévoyait qu'aucune rémunération ne serait versée aux artistes, compositeurs et maisons de disque pendant la période d'essai de trois mois offertes aux utilisateurs. Déjà, elle avait décidé, en novembre 2014, de retirer ses chansons de la plateforme Spotify , s'estimant lésée par la rétribution proposée par le leader suédois. Un tel bras de fer n'est cependant pas à la portée de tous les artistes.
La problématique du partage de la valeur dans l'univers numérique a fait l'objet d'une réflexion entre les acteurs français de la filière, conduisant à la signature, en janvier 2011, des « treize engagements pour la musique en ligne » avec pour objectifs de développer une offre légale innovante et rentable, de garantir l'accès des éditeurs aux catalogues des producteurs et d'améliorer le partage de la valeur avec les artistes interprètes . En février 2013, Jacques Toubon, alors membre du Collège de la Hadopi, a été chargé d'évaluer les actions mises en oeuvre dans ce cadre, afin de permettre à la ministre de la culture et de la communication d'envisager les suites à donner à cette initiative.
Ses travaux ont mis en exergue les bénéfices de l'accord sur l'économie du secteur de la musique en ligne, notamment dans les relations entre plateformes et producteurs. En revanche, il est apparu que persistait le désaccord entre les parties sur les modalités de création et de partage de la valeur : les plateformes continuent à dénoncer les conditions défavorables imposées par les producteurs, qui ne leur permettent pas d'assurer la viabilité du modèle économique de la musique en ligne. Ces derniers souhaitent la définition d'un modèle de répartition de la valeur correspondant aux coûts, moins élevés que ceux des supports physiques, de la diffusion numérique des oeuvres. Les relations entre producteurs et artistes-interprètes sur le sujet ne sont guère meilleures : les artistes souhaitent la création d'une gestion collective des droits de la musique en ligne, au grand dam des producteurs.
Dès lors, quelques mois plus tard, le rapport de Pierre Lescure 16 ( * ) préconise la conclusion d'accords collectifs , étendus à l'ensemble du secteur par arrêté, pour déterminer le taux minimum et l'assiette de la rémunération des artistes dans le champ numérique . Les sociétés de gestion collective d'artistes devaient ensuite être mandatées par les producteurs afin de percevoir et de répartir les revenus, en contrepartie d'obligations relatives à l'efficacité de la répartition et à sa transparence. Un tel système vise à calculer les rémunérations dues aux artistes sur des assiettes correspondant au prix réellement payé par le public ou aux recettes réellement encaissées par le producteur .
Aux fins d'envisager sa mise en oeuvre pratique et notamment celle de son volet relatif à la mise en place d'une gestion collective des droits des artistes-interprètes s'agissant de l'exploitation numérique des oeuvres, Aurélie Filippetti, alors ministre de la culture et de la création, a confié, en septembre 2013, une mission à Christian Phéline, conseiller maître à la Cour des comptes. Ce rapport, remis en décembre 2013 et dont nombre de recommandations ont été reprises par le présent projet de loi, suggère d' encadrer les pratiques contractuelles dans le but d'assurer une meilleure transparence et une plus grande protection aux artistes-interprètes. Ainsi, l'obligation de mentionner l'ensemble des droits d'exploitation cédés dans le contrat de cession des droits patrimoniaux conclu entre un artiste-interprète et un producteur doit, selon l'auteur, permettre de mieux protéger les artistes, notamment en cas d'inexploitation de leur oeuvre. Par ailleurs, pour améliorer les relations entre les producteurs et les plateformes de musique en ligne, le rapport Phéline préconise qu'à défaut d'autorégulation par la signature d'un code des usages, soient insérés dans la loi les « treize engagements pour la musique en ligne » , notamment ceux relatifs à l'information et la transparence.
Compte tenu de l'absence persistante de consensus entre les parties sur la question du partage des recettes d'exploitation numériques, Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, a confié à Marc Schwartz une mission de médiation destinée à aboutir à un accord interprofessionnel . Sa lettre de mission, en date du 21 mai 2015, indique ainsi que « l'absence de transparence des données et de constat partagé en matière de monétisation et de rémunération des exploitations numériques des enregistrements musicaux a conduit à de profonds désaccords entre représentants des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et des plateformes de musique en ligne, quant à la répartition des revenus au sein de la chaîne de valeur » . Il s'agit en conséquence, pour le médiateur, « de chercher, dans un contexte marqué par une progression soutenue du streaming, à faire converger les positions des parties prenantes (...) sur le renforcement des règles, en particulier de transparence, applicables aux relations contractuelles et à la structure de la rémunération ».
Les discussions, qui ont associé les organismes représentant les artistes-interprètes, les producteurs de phonogrammes et les plateformes de musique en ligne, ainsi que les sociétés de perception et de répartition des droits des artistes-interprètes et des producteurs de phonogrammes, ont été relativement tendues, au point de faire craindre un échec de la médiation. L'un des points d'achoppement résidait dans le souhait des artistes-interprètes de se voir appliquer une rémunération minimale additionnelle devant, pour l'ADAMI et la SPEDIDAM, être prélevée directement sur les plateformes dans un système de gestion collective obligatoire, d'une part, et, la suppression de l'abattement sur les revenus digitaux, d'autre part.
Sous la menace que le présent projet de loi n'intègre unilatéralement, à l'Assemblée nationale, des éléments n'ayant fait l'objet d'aucun accord, un protocole a finalement été adopté in extremis . Il renouvelle pour trois ans les engagements de janvier 2011, qui constituent un socle de bonnes pratiques préfigurant le futur code des usages qui devra être institué par le nouveau médiateur de la musique . En outre, les artistes-interprètes bénéficieront d'une rémunération minimale sur la diffusion numérique de leurs oeuvres , pour laquelle les producteurs ont consenti à un effort sur leurs marges, même s'il ne s'agit finalement pas d'une rémunération additionnelle et qu'elle n'entre pas dans le champ de la gestion collective obligatoire. Enfin, est prévue la création d'un fonds de soutien à l'emploi des musiciens par les plus petites structures de production et d'un observatoire de l'économie de la musique, qui s'intéressera aux usages de la musique numérique et physique.
B. Le dispositif proposé
Le présent article complète le chapitre II du titre unique du livre II du code de la propriété intellectuelle, structurellement modifié par l'article 4 du projet de loi, par une section 3 consacrée aux contrats conclus entre un artiste-interprète et un producteur de phonogrammes, comprenant les articles L. 212-10 à L. 212-14, en vue d'améliorer la transparence des relations entre les parties. Il constitue, pour ce qui concerne cet objectif, le pendant législatif à l'accord obtenu par la médiation de Marc Schwartz s'agissant du partage de la valeur et de la rémunération des artistes-interprètes dans le marché numérique.
La protection contractuelle des artistes-interprètes : état du droit 1. Le code de la propriété intellectuelle
L'article L. 212-3 du code de la propriété
intellectuelle pose l'exigence d'un contrat écrit pour autoriser la
cession des droits exclusifs d'un artiste-interprète, tout en
établissant la liste de ces droits. Il dispose en effet que
« sont soumises à l'autorisation écrite de
l'artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa
communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du
son et de l'image de la prestation lorsque celle-ci a été
fixée à la fois pour le son et l'image. Cette autorisation et les
rémunérations auxquelles elle donne lieu sont régies par
les dispositions des articles
L'article L. 7121-3 du code du travail, auquel le code de la propriété intellectuelle renvoie, instaure une présomption de salariat au bénéfice des artistes-interprètes : « Tout contrat par lequel une personne s'assure, moyennant rémunération, le concours d'un artiste du spectacle en vue de sa production, est présumé être un contrat de travail dès lors que cet artiste n'exerce pas l'activité qui fait l'objet de ce contrat dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce. » Les artistes-interprètes employés ponctuellement pour la réalisation d'un album par exemple exécutent donc leur travail sous le régime du contrat à durée déterminée (CDD). L'article L. 7121-8 du code du travail précise enfin que la rémunération, lorsqu'elle n'est pas fixée en fonction du salaire initial, est « fonction du produit de la vente ou de l'exploitation de cet enregistrement. » L'article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle énumère ainsi les droits permettant aux artistes-interprètes de contrôler les différents actes de reproduction et de communication au public de leurs prestations, y compris dans l'univers numérique. Les contrats des artistes-interprètes sont en revanche très peu encadrés par le code de la propriété intellectuelle, à la différence de ceux des auteurs. Les droits voisins des artistes doivent s'articuler avec la régulation de leur activité prévue par le droit social. La présomption de salariat constitue une spécificité du statut des artistes interprètes. L'article L. 111-1, alinéa 3 du code de la propriété intellectuelle dispose pour sa part que la qualité de salarié de l'auteur n'empêche pas la reconnaissance de droits de propriété intellectuelle. L'absence de disposition similaire au bénéfice des artistes-interprètes a pu nourrir certaines ambiguïtés en ce qui concerne la mise en oeuvre du droit exclusif au profit des artistes interprètes. La jurisprudence a toutefois considéré, par transposition de la règle posée en droit d'auteur, que le contrat de travail n'emporte aucune dérogation à la jouissance des droits voisins de l'artiste-interprète. Enfin, en ce qui concerne la rémunération, l'article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle renvoie à l'article L. 7121-8 du code du travail, lequel indique que la rémunération, lorsqu'elle n'est pas fixée en fonction du salaire initial, est « fonction du produit de la vente ou de l'exploitation de cet enregistrement ». Ainsi, la rémunération des artistes n'est pas nécessairement fixée en fonction des modes d'exploitation cédés. La jurisprudence a cependant jugé que le cachet touché par l'artiste lors des séances d'enregistrement de sa prestation ne couvre pas la communication au public ultérieure de cette prestation. Si un principe de proportionnalité « aux recettes provenant de la vente ou de l'exploitation » est posé à l'article L. 131-4 du code de la propriété intellectuelle en matière de cession des droits des auteurs, il importerait de prévoir, pour les droits voisins des artistes-interprètes, que la cession des droits d'exploitation doit donner lieu à une rémunération distincte pour chaque mode d'exploitation. Par ailleurs, par l'intermédiaire de leur société de gestion collective - l'ADAMI ou la SPEDIDAM - les artistes bénéficient des ressources issues de licences légales et dont la loi prévoit qu'elles sont obligatoirement perçues et réparties en gestion collective. Il s'agit de la rémunération pour copie privée et de la rémunération équitable, créées par la loi n° 85-660 du 3 juillet 1985 relative aux droits d'auteur et aux droits des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et des entreprises de communication audiovisuelle. 2. La convention collective nationale de l'édition phonographique Les conditions de travail et de rémunération des artistes-interprètes sous contrat avec une maison de disques sont encadrées par la Convention collective nationale de l'édition phonographique du 30 juin 2008 conclue entre les producteurs de phonogrammes et les syndicats d'artistes-interprètes. Cette convention collective a été étendue par un arrêté du ministre chargé du travail du 20 mars 2009. La convention collective établit tout d'abord un salaire minimum, dénommé « cachet de base », ayant pour objet de rémunérer, outre la prestation de travail de l'artiste-interprète liée à l'enregistrement d'une oeuvre musicale, l'autorisation de fixer la prestation de cet artiste-interprète ainsi que l'autorisation de l'exploiter sous certaines formes expressément visées. Outre ce salaire minimum, la convention collective institue également des rémunérations complémentaires au profit des artistes-interprètes en contrepartie de l'exploitation de leurs prestations. L'annexe 3 de la convention collective dresse une nomenclature des modes d'exploitation des phonogrammes qui ouvrent droit à une rémunération forfaitaire complémentaire dont le montant minimum est déterminé par la convention. Une rémunération proportionnelle complémentaire est également due dès lors qu'un producteur de phonogrammes fait le choix de confier la gestion de l'un de ces modes d'exploitation à une SPRD de producteurs. L'artiste-interprète perçoit alors, outre la rémunération forfaitaire complémentaire, une rémunération complémentaire proportionnelle dont le montant est déterminé selon des modalités de calcul fixées par la convention collective. Source : ministère de la culture et de la communication |
La rédaction proposée pour l'article L. 212-10 par l'alinéa 4 du présent article prévoit que l'existence d'un contrat de travail ou de prestation de service entre un artiste-interprète et un producteur phonographique n'entraîne pas la cession de ses droits voisins au dit producteur , par parallélisme avec l'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, qui dispose qu'un tel contrat ne prive par l'auteur de la jouissance de ses droits. Dès lors, la perception d'un salaire en contrepartie d'une prestation n'épuise pas les droits d'exploitation de l'artiste-interprète .
Aux termes de l'article L. 212-11 (alinéas 5 à 7), la cession des droits voisins de l'artiste-interprète n'est possible que si chacun des droits cédés (droit d'autoriser la fixation de la prestation, sa reproduction ou sa communication au public) fait l'objet d' une mention spécifique dans le contrat signé avec le producteur , d'une part, et que si l'exploitation de ses droits est délimitée quant à son étendue, c'est-à-dire le nombre d'exemplaires concernés, sa finalité, son champ géographique et sa durée , d'autre part. Là encore, il s'agit de faire bénéficier les artistes-interprètes d'un droit reconnu aux auteurs par l'article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle.
Comme les contrats d'auteurs (article L. 131-6), ceux des artistes-interprètes devront préciser, le cas échéant, le droit d'exploiter la prestation sous une forme non prévisible ou non prévue à la date de la signature et prévoir une rémunération sur les recettes issues de cette nouvelle exploitation . Cette disposition permet d'éviter aux parties d'avoir à systématiquement renégocier les contrats à la faveur de l'émergence de nouveaux modes d'exploitation, comme ce fut le cas avec la diffusion numérique. Aux termes de la convention collective nationale de l'édition phonographique, les musiciens et artistes d'accompagnement bénéficient actuellement d'une rémunération forfaitaire incluant tous les modes d'exploitation.
Enfin, la cession au producteur, par l'artiste-interprète, d'autres droits que ceux attachés à l'enregistrement de sa prestation (droit à l'image ou droits attachés à des revenus éditoriaux, tirés de produits dérivés ou liés à une tournée par exemple) doit être, pour chaque droit, expressément stipulée dans le contrat qui les lie.
L'alinéa 8 précise, pour l'article L. 212-12, que la juridiction civile compétente peut ordonner toute mesure appropriée en cas d'abus notoire , par le producteur, en matière d'usage des droit d'exploitation, qui lui ont été cédés contractuellement par un artiste-interprète. Il ne s'agit pas ici, à proprement parler, de la création d'une obligation d'exploitation au profit des producteurs de phonogrammes, comme il en existe pour les éditeurs de livres, mais d'une possibilité, pour l'artiste-interprète de faire trancher par le juge un litige lié à une exploitation nulle ou manifestement insuffisante de sa prestation. Cette disposition complète le mécanisme prévu par la directive 211/77/UE, dit « use it or lose it » , qui impose la perte des droits en cas d'absence d'exploitation sur une période donnée.
L'article L. 212-13 nouveau du code de la propriété intellectuelle (alinéas 9 à 11 du présent article) distingue le salaire de l'artiste-interprète, défini comme « une rémunération minimale garantie en contrepartie de l'autorisation de fixation » de la prestation, de la rémunération due, au titre des droits voisins, pour chaque mode d'exploitation du phonogramme prévu au contrat et incluant ladite prestation. Dans ce cadre, est notamment différenciée l'exploitation numérique de l'exploitation physique .
Enfin, l'article L. 212-14 nouveau (alinéas 12 et 13 du projet de loi initial) instaure une reddition semestrielle de comptes obligatoire à la charge du producteur, distinguant, par souci de clarté, les rémunérations versées pour chaque modes d'exploitation et complétée, si l'artiste-interprète en fait la demande, des justificatifs nécessaires à la vérification des données inscrites. Cette disposition traduit, dans le code de la propriété intellectuelle, l'un des treize engagements précités de janvier 2011, convenablement respecté dans les faits, qui prévoyait que « les producteurs de phonogrammes et les éditeurs de services en ligne s'engagent à trouver les formes de mise à disposition, aux artistes-interprètes, des informations dont ils disposent sur l'exploitation de leurs prestations. Ils transmettront des informations semestrielles de redevance par modes d'exploitation ».
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
Outre un amendement rédactionnel du rapporteur à l'alinéa 5, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a modifié l'alinéa 12 (article L. 212-14 nouveau du code de la propriété intellectuelle), aux fins de préciser que la reddition des comptes ne concernera pas les artistes musiciens mais les seuls artistes-interprètes , qui bénéficient, en sus de leur cachet, d'une rémunération proportionnelle sur les recettes d'exploitation prévue par le contrat les liant à leur producteur.
En séance publique, l'Assemblée nationale a, à l'initiative du Gouvernement, introduit un article L. 212-13-1 nouveau, afin de compléter les dispositions de la nouvelle section 3 créée par le présent article des engagements pris par les parties dans le cadre de la médiation de Marc Schwartz.
Le I de l'article L. 212-13-1 nouveau prévoit ainsi que l'exploitation en streaming fait l'objet d'une garantie de rémunération minimale pour les artistes-interprètes . Aux termes du II, les modalités et le niveau de cette garantie sont établis par un accord collectif conclu entre les organisations représentatives des artistes-interprètes et des producteurs de phonogrammes, accord pouvant être rendu obligatoire par arrêté du ministre en charge de la culture. À défaut d'accord dans un délai de douze mois à compter de la promulgation du présent texte, le III dispose qu'une commission, composée paritairement de représentants des parties et présidée par un représentant de l'État, fixe la garantie de rémunération minimale.
III. - La position de votre commission
Le dispositif proposé par le présent article constitue un compromis entre les tenants d'un mécanisme de gestion collective obligatoire et ses détracteurs , permettant de renforcer la protection contractuelle des artistes-interprètes, mais aussi d'améliorer la transparence de leur rémunération dans l'univers numérique , puisque la rémunération due pour chaque mode d'exploitation devra être précisée et distinguée du salaire versé par le producteur.
Aux termes de l'article 38 du projet de loi, il entrera en vigueur le premier jour du quatrième mois suivant sa publication du Journal officiel et sera, s'agissant de l'obligation de reddition des comptes, applicable aux contrats en cours.
Au cours de la table ronde organisées par votre commission le 2 décembre dernier sur les articles du projet de loi relatifs à la musique, il est apparu que la grande majorité des acteurs de la filière, signataires du protocole d'accord Schwartz relative au partage de la valeur tirée de l'exploitation numérique à l'exception notable de l'ADAMI et de la SPEDIDAM, ne s'accordaient guère sur les différentes dispositions « musique » du projet de loi.
Pour autant, le présent article, qui renforce les garanties contractuelles des artistes-interprètes, n'est pas le plus concerné par ces antagonismes. Du reste, les modifications qu'il nécessite sont limitées :
- d'abord, la rédaction de l 'alinéa 6 n'assure pas de distinction entre les artistes principaux, sous le nom duquel les phonogrammes sont publiés et qui ont le statut de créateurs, et les artistes musiciens exécutants, qui effectuent une prestation ponctuelle lors de l'enregistrement et ne bénéficient pas de ce statut. Selon les usages en vigueur dans l'édition phonographique, les artistes musiciens ne bénéficient pas, à la différence des artistes principaux, de rémunérations proportionnelles aux recettes d'exploitation. Dès lors, il est nécessaire de préciser que l'alinéa 6, relatif aux formes non prévisibles et non prévues d'exploitation, ne concerne que les artistes principaux (COM-163) ;
- ensuite, à l' alinéa 11 , le mot « notamment » n'apporte qu'une précision inutile au regard du sens de la phrase. Il peut donc être supprimé (COM-164) ;
- enfin, à l' alinéa 17 , la rédaction actuelle ne garantit pas, en l'état, la confidentialité des informations transmises. L'obligation, pour le producteur, de fournir à la demande de l'artiste « toutes justifications propres à établir l'exactitude des comptes » ne tient pas compte de la réalité des flux de revenus : le producteur perçoit les recettes d'exploitation de distributeurs, d'éditeurs de services de communication, de sociétés de gestion collective, français ou étrangers, qui eux-mêmes perçoivent les recettes auprès de détaillants, de consommateurs ou d'utilisateurs très divers. Les informations traitées pour établir les comptes concernent généralement l'ensemble des phonogrammes exploités par le producteur : les documents échangés comportent donc des informations relatives à d'autres artistes-interprètes ou à des relations commerciales .
Il est ainsi préférable de prévoir que les informations demandées par l'artiste sont transmises par le producteur à un expert-comptable mandaté par l'artiste et, par nature, soumis au secret professionnel (COM-165).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 6 (art. L. 213-2 nouveau du code de la propriété intellectuelle) - Relations entre les producteurs de phonogrammes et les éditeurs de services de musique en ligne
I. - Le texte du projet de loi
Le présent article complète le chapitre III du titre unique du livre II de la première partie du code de la propriété intellectuelle, consacré aux droits des producteurs de phonogrammes par un article L. 213-2 nouveau prévoyant que tout contrat conclu par un producteur avec un éditeur de services de musique en ligne doit fixer les conditions d'exploitation de matière objective et équitable et s'interdire toute clause discriminatoire non justifiées par une contrepartie réelle .
Ainsi, le recours, sans justification, à des conditions d'exploitation différenciées ou créant des avantages concurrentiels discriminants à l'égard de la concurrence est interdit. Néanmoins, la pratique, par les producteurs, des exclusivités demeure autorisée dès lors qu'elle s'accompagne d'une contrepartie.
Le caractère objectif et équitable des conditions d'exploitation fixées sera estimé au regard de l'accès au catalogue du producteur, des critères financiers du contrat commercial et de la définition des objectifs de résultats. Le médiateur de la musique institué par l'article 7 du projet de loi pourra traiter des litiges relatifs aux contrats entre éditeurs et producteurs , sur le modèle du rôle confié au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) par la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, qui peut être saisi par les parties sur tout différend portant sur le caractère objectif, équitable et non discriminatoire des conditions de la mise à disposition de programmes et sur les relations commerciales entre éditeurs et distributeurs de services audiovisuels.
La mesure viendra compléter les dispositifs, insuffisants, visant à assurer une meilleure transparence dans les relations commerciales entre acteurs de la filière musicale. Les articles L. 441-6 et suivant du code de commerce prévoient ainsi notamment une obligation de communication des conditions générales de vente applicables entre professionnels, dont la charte des « treize engagements pour la musique en ligne » confiait aux producteurs la charge de la publication. Cet engagement, difficilement conciliable avec les principes de la liberté commerciale et du droit de la concurrence, n'a de fait pas été toujours tenu, notamment s'agissant des contrats applicables à l'exploitation des oeuvres en streaming , comme l'a montré le bilan dressé par Jacques Toubon sur la mise en oeuvre des treize engagements précités.
Dès lors, le déséquilibre des relations commerciales entre producteurs et plateformes, bien souvent au détriment de ces dernières, n'a pas réellement cessé. Christian Phéline, dans son rapport précité, évoque ainsi encore, en décembre 2013, « l'ampleur des divergences d'appréciation qui subsistent entre plateformes et fournisseurs de catalogues ». De fait, le caractère non normatif des treize engagements a eu pour conséquence un respect limité, d'où le choix d' intégrer l'exigence de transparence et d'équité dans les relations commerciales entre plateformes et producteurs dans le code de la propriété intellectuelle.
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
À l'initiative de son rapporteur, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a adopté deux amendements de précision au présent article : les éditeurs de services de communication au public par voie électronique dont il est question sont ceux qui mettent à disposition des oeuvres musicales, d'une part, et les conditions d'exploitation visées concernent bien l'exploitation des phonogrammes, d'autre part.
La rédaction retenue par la commission a ensuite été adoptée sans modification par l'Assemblée nationale au cours de sa séance publique du 29 septembre dernier.
III. - La position de votre commission
Le dispositif proposé par le présent article va dans le sens d' une plus grande objectivité et d'une meilleure équité des contrats conclus entre producteurs phonographiques et plateformes de téléchargement ou de streaming et, partant, de l'instauration de relations commerciales plus transparentes et saintement concurrentielles.
Trop souvent, les producteurs de phonogrammes font preuve d'une transparence limitée quant aux conditions d'exploitation de leurs catalogues, tandis que certaines plateformes internationales puissantes n'hésitent pas à imposer brutalement leur décision dans la négociation tarifaire des licences. La filière musicale s'était ainsi mobilisée contre YouTube , qui, aux termes d'un accord conclu pour la période 2010-2012, versait des rémunérations encore inférieures à celles des plateformes de streaming . À l'occasion de sa renégociation, YouTube avait fait pression en menaçant de retirer les publicités sur les clips et de cesser le partage de revenus publicitaires. Lors du MIDEM de Cannes en 2013, le patron d' Universal Music France , Pascal Nègre, avait, en retour, menacé de retirer ses vidéos de la plateforme de Google. La difficulté portait alors sur le montant que le groupe américain reverse aux ayants droit lorsque les internautes visionnent un clip musical, que Google voulait réviser à la baisse. Finalement, en avril 2013, le site a signé un contrat de trois ans avec la SACEM et Universal Music , qui, selon des modalités restées confidentielles, le conduit à rémunérer les auteurs, les compositeurs et les éditeurs de musique français, lors du visionnage de clips intégrant leurs morceaux. Dans un cas comme dans l'autre, un rapport de force profondément déséquilibré nuit à l'ensemble du marché.
En assurant un accès équitable aux catalogues musicaux pour les éditeurs les plus modestes et en protégeant les producteurs de toute discrimination, la mesure favorisera, en outre, au-delà d'une relation plus équilibrée entre les acteurs, l'exposition des oeuvres en ligne au bénéfice des artistes-interprètes , qui verront leurs revenus augmenter en conséquence.
Elle devrait également rendre plus aisée l'entrée sur le marché de la musique en ligne pour de nouveaux acteurs, dont la mortalité demeure extrêmement élevée, comme le rappelait Christian Phéline dans son rapport susmentionné : « il est normal qu'un marché en voie d'essor et de structuration s'avère assez discriminant entre des modèles économiques ou des projets entrepreneuriaux inégalement viables ou qui ne rencontrent pas leur public. Ce phénomène peut toucher même des offres portées par des opérateurs puissants (...). L'ampleur de la mortalité observée en quelques années parmi les plateformes d'origine nationale et le nombre de celles qui sont aujourd'hui en difficulté plus ou moins sérieuse paraissent cependant excéder cet effet d'éviction concurrentielle. Le phénomène touche tant le téléchargement que le streaming et aussi bien des modèles gratuits que payants ».
Sous réserve de ces observations, votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 6 bis (supprimé) (art. L. 214-1, L. 214-3 et L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle) - Application du régime de la licence légale aux services radiophoniques diffusés sur Internet
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Introduit en séance publique à l'initiative du Gouvernement, le présent article vise à étendre, au-delà des radios hertziennes, le principe de la licence légale aux webradios en modifiant, à cet effet, l'article L. 214-1 et en complétant les articles L. 214-3 et L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle.
Pour mémoire, cet article crée une limite aux droits exclusifs de l'artiste-interprète et du producteur en instituant un système de licence légale, qui supprime l'exigence du consentement des titulaires des droits, pour n'accorder qu'un droit à une rémunération en cas d'utilisation, par un tiers, de la prestation ou de la production . Il prévoit ainsi que, lorsqu'un phonogramme a été publié à des fins de commerce, l'artiste-interprète comme le producteur ne peuvent s'opposer :
- à sa communication directe dans un lieu public, dès lors qu'il n'est pas utilisé dans un spectacle, ce que la doctrine appelais autrefois la sonorisation « au moyen d'un appareil lecteur » ;
- ni à sa radiodiffusion et à sa câblodistribution simultanée et intégrale, ainsi qu'à sa reproduction strictement réservée à ces fins, effectuées par ou pour le compte d'entreprises de communication audiovisuelle en vue de sonoriser des programmes.
Dès lors, l'utilisation des phonogrammes ouvre en contrepartie droit à rémunération pour les artistes-interprètes et les producteurs. Cette rémunération, répartie équitablement entre les parties , est versée par l'utilisateur du phonogramme. Son montant est assis sur les recettes d'exploitation ou évalué forfaitairement , lorsque le calcul proportionnel est matériellement difficile, selon des barèmes fixés par accords interprofessionnels.
Dans les faits, il revient aux tribunaux de fixer au cas par cas la ligne de partage entre droit exclusif et licence légale. Les contentieux sont, en effet, nombreux car la frontière entre le principe et l'exception au droit des artistes-interprètes et de producteurs, que représente la licence légale, n'est pas toujours évidentes, les enjeux financiers élevés et les antagonismes fortement marqués.
La loi n° 2006-961 du 1 er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, dite DADVSI, a, dans le respect des engagements internationaux de la France en matière de droit d'auteur et de droits voisins (convention de Rome du 26 octobre 1961, directives européennes du 29 octobre 1993 et du 22 mai 2001), élargi le champ d'application de la licence légale. Le présent article poursuit cet élargissement, déjà applicable aux radios hertziennes, aux webradios en webcasting non interactif.
La radiodiffusion sur Internet : le « simulcasting » et le « webcasting » Le « simulcasting » consiste à diffuser simultanément sur Internet un programme déjà diffusé par radiodiffusion hertzienne terrestre. Le programme est inchangé. Comme la radiodiffusion traditionnelle de phonogrammes, le « simulcasting » relève de la licence légale de l'article L.214-1 du code de la propriété intellectuelle. Le « webcasting » consiste, pour sa part, à diffuser, exclusivement sur Internet, un programme musical. Dans la mesure où ce programme n'utilise pas la technologie de la radiodiffusion, il n'existe a pas de limites au nombre de programmes musicaux envisageables. Le « webcasting » peut prendre plusieurs formes : - le « webcasting » non interactif , au sens où il ne permet pas d'interaction avec le public, n'offre pas de programme personnalisé. Il comporte toutefois des fonctions qui le différencient significativement de la radiodiffusion, telle que pause ou skip (passage au titre suivant) ; - le « webcasting » semi-interactif correspond à la diffusion exclusivement sur Internet d'un programme musical établi avec une interaction avec un auditeur individuel, mais sans que celui-ci puisse choisir individuellement les titres qui composent le programme musical. Il s'agit donc d'un programme personnalisé, qui reste composé par le « webcaster » ; - enfin, le « webcasting » interactif permet de diffuser un programme musical composé à la demande d'un auditeur individuel (choix des titres et de leur ordre de passage). Les services de « webcasting » ne sont pas couverts par l'exception de la licence légale. Ils relèvent donc actuellement du droit exclusif d'autoriser ou d'interdire. |
Le 1° a) du présent article crée une troisième exception à l'application du droit exclusif de l'artiste-interprète et du producteur en cas de communication du phonogramme au public par un service de radio au sens de l'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. Y est considéré comme service de radio « tout service de communication au public par voie électronique destiné à être reçu simultanément par l'ensemble du public ou par une catégorie de public et dont le programme principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des sons. »
Le 1° b) rend applicable à la communication d'un phonogramme au public par une webradio les modalités de rémunération des titulaires de droits déjà prévues par l'article L. 214-4 pour les communications directes au public hors spectacle, les radiodiffusions et les câblodistributions.
Enfin, le 2° ajoute la référence aux radios en ligne aux articles L. 214-3 et L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle relatifs au barème et aux modalités de versement des rémunérations dans le cadre de la licence légale.
II. - La position de votre commission
Avec seulement quelques centaines de milliers d'euros collectés chaque année au profit des ayants droit, le marché des radios en ligne demeure encore embryonnaire. Dès lors, l'extension du mécanisme réputé efficace de licence légale à leur profit pourrait, dans son principe, faciliter l'accès aux catalogues des producteurs de phonogrammes et, partant, favoriser leur développement.
L'élargissement de la licence légale aux radios en ligne qui proposent des services non interactifs ressortirait, en outre, de l'application du principe de neutralité technologique , auquel votre commission, comme elle l'a autrefois exprimé s'agissant du livre numérique et de la presse en ligne au cours des débats relatifs à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), est particulièrement attachée.
Au regard des usages, à la différence des services interactifs de streaming , les webradios non interactives, sur lesquelles l'internaute ne peut choisir les titres qu'il souhaite entendre, s'apparentent effectivement aux radios traditionnelles par voie hertzienne. La logique plaiderait donc pour une application identique du régime de licence légale, que constitue la rémunération équitable, aux deux modes de diffusion.
Pour autant, il n'est pas certain que le dispositif soit réellement favorable, aussi bien aux artistes qu'aux producteurs . En effet, l'extension de la licence légale au webcasting pourrait entrainer un nivellement par le bas des rémunérations de l'ensemble des ayants droit . Dans le régime de la licence légale, la rémunération collectée est partagée également entre les artistes et les producteurs. Celle-ci représentant, pour les radios hertziennes, un taux net de 2,85 %, les artistes principaux et les artistes musiciens reçoivent respectivement en licence légale près de 0,58 % de ces revenus.
En droit exclusif, pour les principales formes de webcasting , que constituent le webcasting non-interactif et le webcasting semi-interactif, les artistes musiciens bénéficient de la rémunération complémentaire prévue à l'annexe III de la Convention collective nationale de l'édition phonographique (CCNEP), soit 6 % des sommes gérées collectivement. Sur le taux net de 11,25 % est appliquée une retenue de 10 % pour les frais de gestion. Les musiciens reçoivent donc 0,61 % des revenus des webradios non interactives, soit une rémunération supérieure à ce qu'ils sont susceptibles de recevoir en licence légale . Ainsi, bien que la quote-part des revenus soit plus élevée en licence légale qu'en droit exclusif, le montant net qu'ils reçoivent en droit exclusif est supérieur, les écarts défavorables de quotes-parts étant plus que compensés par le niveau plus élevé de l'assiette de calcul de leur rémunération. La situation est encore plus favorable pour les artistes principaux , puisqu'ils reçoivent de leurs producteurs des rémunérations s'échelonnant de 8 à 25 % des revenus du producteur, alors qu'en licence légale, ils bénéficient de sommes identiques à celles des artistes musiciens.
Dans l'attente d' une véritable étude d'impact qui viendrait infirmer ces chiffres et plaider en faveur de la licence légale au-delà du seul argument de la neutralité technologique, il ne semble pas opportun de légiférer sur ce sujet ( COM-166 ).
Votre commission a supprimé cet article.
Article 7 (art. L. 214-6 nouveau du code de la propriété intellectuelle) - Création d'un médiateur de la musique
I. - Le texte du projet de loi
Le présent article complète le chapitre IV, qui traite des dispositions communes aux artistes-interprètes et aux producteurs de phonogrammes, du livre deuxième « Les droits voisins du droit d'auteur » du code de la propriété intellectuelle, par un article L. 214-6 instituant un médiateur de la musique .
La création de cette instance ressort directement des propositions du rapport « Musique et ligne et partage de la valeur - État des lieux, voies de négociations et rôles de la loi » remis par Christian Phéline, conseiller maître à la Cour des comptes, à Aurélie Filippetti, alors ministre de la culture et de la communication, le 18 décembre 2013, qui prônait l'instauration d'une procédure ad hoc de traitement précontentieux des conflits dans le secteur de la musique. « Le régime des contrats des artistes-interprètes se fonde sur une imbrication complexe du droit du travail et de la propriété littéraire et artistique. La rédaction des contrats est en outre elle-même d'une complexité qui confine souvent à l'équivoque ou à l'opacité. Cela suffit à expliquer que ceux des contentieux qui sont soumis à la justice ne soient traités qu'avec difficulté tant par les juridictions prud'homales que par les tribunaux de grande instance. De manière générale, les tensions entre parties, aussi bien dans les rapports des producteurs et des plateformes que dans ceux avec les artistes, sont accentuées par l'ensemble des incertitudes demeurant sur l'économie des offres musicales en cours d'essor dans l'univers numérique et par l'absence à ce jour de normes directrices partagées. Dans sa spécificité, ce type de situations pourrait ainsi justifier le recours à des formes spécialisées de traitement des conflits, telles qu'il a pu s'en mettre en place dans d'autres domaines. »
Le I de l'article L. 214-6 nouveau du code de la propriété intellectuelle crée par le présent article précise le cadre de la mission du médiateur de la musique et les modalités de son exercice. Sans préjudice du droit des parties de saisir le juge, a contrario du médiateur du cinéma dont la saisine constitue un préalable obligatoire à l'action judiciaire, le médiateur est chargé d'une mission de conciliation pour tout litige relatif à l'interprétation ou à l'exécution des accords interprofessionnels entre les artistes-interprètes, les producteurs de phonogrammes et les éditeurs de services de musique en ligne, comme d'un engagement contractuel entre un artiste-interprète et un producteur ou entre un producteur et un éditeur de services de musique en ligne.
Le médiateur peut être saisi par tout artiste-interprète, producteur de phonogramme et éditeur de services de musique en ligne, mais également par leurs mandataires, la ministre chargée de la culture et de la communication et toute organisation professionnelle ou syndicale représentative des acteurs de la filière musicale.
Pour l'exercice de sa mission, il invite les parties prenantes au litige, sans que puisse lui être opposé le secret des affaires , à lui fournir les informations nécessaires. Il peut également entendre toute personne dont l'audition lui paraît utile. Son rôle consiste à favoriser ou à susciter une solution de conciliation aux litiges qui lui sont soumis : si un accord aboutit entre les parties à l'issue de la médiation, il rédige un procès-verbal de conciliation précisant les mesures à prendre pour le mettre en oeuvre. En cas d'échec, il peut émettre une recommandation proposant des solutions en vue de mettre fin au litige. Cette recommandation, à la différence du pouvoir d'injonction dont dispose le médiateur du cinéma ou des décisions de justice, n'a aucun caractère obligatoire pour les parties . Sous réserve des informations couvertes par le secret des affaires, le procès-verbal de conciliation comme la recommandation peuvent être rendus publics.
L'action du médiateur de la musique n'interfère pas avec les missions de l'Autorité de la concurrence. Il devra donc saisir cette dernière s'il décèle, dans l'exercice de sa mission, des faits pouvant constituer des pratiques anticoncurrentielles au sens du code du commerce.
Le II de l'article L. 214-6 créé par le présent article dispose que le médiateur de la musique, outre sa mission de conciliation en cas de litige, peut faire au ministre chargé de la culture toute proposition relative aux relations interprofessionnelles dans la filière musicale (modification législative ou réglementaire, mesure favorisant l'adoption de codes des usages entre les parties, etc.). Il lui adresse par ailleurs chaque année un rapport d'activité, qui est rendu public.
Enfin, le III de l'article L. 214-6 précité renvoie à un décret en Conseil d'État ses conditions d'application, notamment les modalités de désignation du médiateur de la musique. L'étude d'impact préalable au projet de loi précise d'ores et déjà que, comme le médiateur du livre, sa désignation sera au choix du ministre en charge de la culture. Par décret du 5 septembre 2014, Laurence Engel, conseillère maître à la Cour des comptes, a ainsi été nommée médiateur du livre.
L'étude d'impact dévoile également, à grands traits, l'impact économique et financier du dispositif envisagé. Pour les parties, dans la mesure où la médiation vise à tenter de trouver un accord rapidement et à moindre frais, le bénéfice financier est évident par rapport au recours à une procédure judiciaire potentiellement longue et coûteuse .
Pour l'État, en revanche, le coût de la mesure n'est pas neutre . Les moyens nécessaires au fonctionnement du médiateur, estimé entre vingt et trente dossiers par an en première analyse, seront fonction de l'évolution de son niveau d'activité, dont le rapport annuel d'activité constituera la jauge. Toutefois, il est d'ores et déjà prévu de lui adjoindre un chargé de mission de catégorie A et une assistante. Ces créations de poste seront rendues possibles par un redéploiement des effectifs du ministère de la culture et de la communication, ce qui n'est pas le cas du médiateur lui-même, qui représente un nouvel emploi, dont la rémunération sera sans nul doute conséquente. Les frais de fonctionnement (locaux, fournitures, communications, déplacements, etc.) seront également couverts par redéploiement des moyens du ministère.
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
À l'initiative de son rapporteur, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a élargi les compétences du médiateur de la musique aux relations entre les producteurs de phonogrammes et les producteurs de spectacles , en créant un 4° au I et en complétant le II de l'article L. 214-6 nouveau du code de la propriété intellectuelle. En conséquence, tout producteur de spectacles est autorisé à saisir le médiateur (alinéa 7 du présent article).
Elle a également précisé, aux alinéas 3 et 11 du présent article, que les éditeurs de services de communication au public par voie électronique concernés par le dispositif sont les plateformes mettant à disposition des oeuvres musicales.
Elle a enfin prévu qu'une copie du rapport d'activité annuel du médiateur de la musique est adressée aux présidents des commissions parlementaires permanentes en charge de la culture.
Au cours de sa séance publique du 29 septembre 2015, l'Assemblée nationale n'a apporté aucune modification à la rédaction issue des travaux de sa commission des affaires culturelles.
III. - La position de votre commission
La solution choisie par le projet de loi est celle d'une médiation publique, telle que le proposait le rapport Phéline précité, néanmoins considérablement plus étendue que le rôle confié au médiateur du cinéma, créé en 1982 pour traiter des litiges relatifs à la diffusion des films entre distributeurs et exploitants de salles, ou au médiateur du livre institué par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation avec une mission de conciliation des conflits portant sur l'application de la législation relative au prix unique du livre.
Dans le cinéma comme dans le secteur du livre, la médiation a souvent fait la preuve de son efficacité. Ainsi, Laurence Engel, toute récente médiatrice du livre, a, au mois de février dernier, remis un premier avis à la ministre de la culture et de la communication sur la conformité des offres d'abonnement avec accès illimité à la loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique. Une procédure de conciliation a parallèlement été menée avec succès, puisqu'à son terme les prestataires d'abonnement concernés se sont engagés à adapter leur offre pour la rendre conforme à la législation sur le prix du livre numérique.
Les bouleversements des modes de consommation des oeuvres musicales induits par la révolution numérique a, dans un secteur peu régulé, conduit d'importantes tensions dans les relations entre les acteurs , en particulier entre les artistes-interprètes et les producteurs phonographiques s'agissant du partage des rémunérations dans un marché de plus en plus exsangue, mais également entre producteurs et éditeurs de musique en ligne pour ce qui concerne les conditions d'exploitation des phonogrammes sur les plateformes.
Or, les normes applicables à la filière (code de la propriété intellectuelle, code du travail, code de commerce ou encore convention collective nationale de l'édition phonographique) ne suffisent ni à éviter les litiges, ni à garantir les équilibres économiques entre les différents acteurs. Dès lors, il n'est pas rare que les plus modestes pâtissent de rapports de force peu régulés , d'autant que le recours au juge leur apparaît aussi complexe que coûteux.
En conséquence, les médiations et négociations interprofessionnelles sont fréquentes dans l'industrie musicale . C'est ainsi, comme cela a été évoqué précédemment, qu'une réflexion s'est tenue entre les acteurs de la filière, conduisant à la signature, en janvier 2011, des « treize engagements pour la musique en ligne » avec pour objectifs de développer une offre légale innovante et rentable, de garantir l'accès des éditeurs aux catalogues des producteurs et d'améliorer le partage de la valeur avec les artistes interprètes. De même, Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, a confié à Marc Schwartz une mission de médiation, qui a abouti en septembre dernier à un protocole d'accord relatif à la définition de la structure des rémunérations et au partage des revenus issus des exploitations numériques de la musique.
Par ailleurs, le recours à la médiation constitue une voie de régulation économiquement équitable pour les parties. Tel n'aurait pas été le cas d'une solution fondée sur une médiation privée - un médiateur est choisi par les parties, qui s'accordent sur l'opposabilité de sa décision -, qui n'aurait pu éviter les écueils du rapport de force originellement déséquilibré entre les acteurs, notamment lorsque le litige oppose un artiste-interprète et un producteur phonographique. Elle est également plus souple qu'une médiation judiciaire - le médiateur est alors désigné par le juge -, puisqu'elle ne nécessite nullement, pour se tenir, l'engagement préalable d'une procédure judiciaire, dont les inconvénients pour les acteurs de la filière musicale ont été précédemment évoqués.
En outre, votre commission est attachée à la négociation interprofessionnelle . En ce sens, le fait que le médiateur de la musique soit également chargé de favoriser le conclusion d'accords entre les parties et le développement des bonnes pratiques contractuelles, sur le modèle des « treize engagements » d'Emmanuel Hoog, lui semble particulièrement bienvenu.
Lors de la table ronde organisée le 2 décembre dernier par votre commission sur les dispositions du projet de loi portant sur la filière musicale, il est apparu que les professionnels présents étaient globalement favorables à la création d'une instance de médiation, exception faite des représentants des producteurs, qui dénonçaient la mise en place d'un dispositif de surveillance généralisée de leur profession . La SACEM a également fait part de ses craintes que le médiateur s'impose en « tribunal du droit d'auteur ».
Telle n'est pas l'opinion de votre commission, qui estime que le déséquilibre du rapport de force au sein de la filière rend nécessaire la création d'un médiateur , dans les termes prévus par le présent article.
Elle estime notamment que le dispositif pourrait être mieux articulé avec les missions de l'Autorité de la concurrence en complétant l'alinéa 9 ( COM-168 ) : d'une part, le médiateur de la musique doit pouvoir saisir l'Autorité en urgence, ainsi que pour avis. Réciproquement, une faculté de saisine pour avis du médiateur par l'Autorité s'agissant des affaires, consultatives ou contentieuses, intervenant dans le secteur de la musique, doit être prévue.
Il lui apparaît en outre nécessaire d' éviter un conflit de compétence entre le médiateur de la musique et la commission paritaire d'interprétation, de conciliation et de validation des accords de l'édition phonographique . Ainsi, votre commission a précisé, après l'alinéa 9 ( COM-3 ), que lorsque le litige dont est saisi le médiateur relève du champ de compétence d'une autre instance créée par convention ou accord collectif de travail, il peut saisir cette instance pour avis et doit se déclarer incompétent dès lors que cette dernière lui en fait la demande.
Par ailleurs, le niveau de publicité prévu à l'alinéa 10 s'agissant du procès-verbal de conciliation ou la recommandation est excessive au regard du secret des affaires. Il convient donc de limiter cette publicité à la seule conclusion de la conciliation et à la recommandation (COM-169).
Enfin, à l'alinéa 11, la rédaction mérite d'être précisée afin qu'il soit clairement indiqué que le médiateur a en charge, avec les parties, l'élaboration d'un code des usages faisant suite aux engagements de 2011 ( COM-170 ).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 7 bis AA (nouveau) (art. L 212-5, L. 211-3 et L. 311-4 du code de la propriété intellectuelle) - Assujettissement à la rémunération pour copie privée de certaines pratiques de copie dans le nuage
Le mécanisme de la copie privée permet, en contrepartie de l'exception ouverte aux utilisateurs pour effectuer des copies d'oeuvres à usage privé, d'offrir une compensation équitable aux créateurs par un prélèvement sur le prix de vente des matériels utilisés pour la copie. La copie privée représente à la fois une liberté pour les utilisateurs et une ressource non négligeable pour les titulaires de droit, dont un quart est destiné à des actions d'intérêt général telles que des projets de création artistique, des festivals ou des formations pour les artistes.
Or, l'émergence rapide de nouveaux services recourant à l'« informatique dans les nuages », qui permettent à des particuliers de louer de l'espace de stockage en vue de conserver à distance des oeuvres et des objets protégés, ainsi que de les consulter et de les reproduire sur une pluralité d'appareils, interroge aujourd'hui le mécanisme de la copie privée .
Le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) a examiné, en 2012, le statut juridique des actes de reproduction permis par ces services et a considéré que certaines pratiques effectuées dans le nuage correspondent à une forme de copie privée et devraient donc être assujetties à la rémunération correspondante.
Le rapport de la mission d'information parlementaire de l'Assemblée nationale sur le bilan et les perspectives de trente ans de copie privée 17 ( * ) invite également à s'interroger sur la pertinence de l'assiette actuelle de la rémunération eu égard au développement de nouvelles technologies.
Il est effectivement incontestable que les services de l'informatique en nuage ont profondément modifié l'accès aux oeuvres et aux objets protégés et les conditions dans lesquelles les particuliers peuvent en effectuer des copies . Aussi le cadre législatif actuel doit-il être adapté en conséquence, afin de garantir l'application de l'exception de copie privée et un juste équilibre entre l'intérêt des créateurs et celui du public .
L'application de l'exception pour copie privée dans le nuage suppose, en premier lieu, de revoir la jurisprudence dite « Rannou-Graphie » de la Cour de cassation du 7 mars 1984. Celle-ci subordonne en effet l'application du régime de la copie privée à une identité de personnes entre celui qui réalise la copie et le bénéficiaire de la copie réalisée. Or, dans le nuage, le prestataire de services est le détenteur du matériel de copie, ce qui tend à écarter la possibilité de copies privées, par l'utilisateur, dans le nuage. Le présent article additionnel adopté par votre commission à l'initiative de David Assouline et des membres du groupe socialiste ( COM-5 ), précise donc que l'intervention d'un tiers dans l'acte de copie n'interdit pas de considérer que ces copies puissent être qualifiées de copie privée.
Votre commission a identifié, en second lieu, les services de l'informatique dans les nuages qui devraient relever du champ de l'exception pour copie privée. Il s'agit des services de communication au public en ligne qui permettent aux utilisateurs d'obtenir la copie d'un programme de télévision ou de radio qu'ils éditent ou distribuent, au moment de sa diffusion, dits network personal video recorder (VPVR). Au regard des usages de copie, il apparaît que ce type de copie est destinée à se substituer aux modalités actuelles de la copie effectuée par les particuliers sur les supports permettant la réception des programmes de télévision et de radio.
Enfin, le dispositif procède à une adaptation de la détermination des redevables de la rémunération pour copie privée et des conditions de sa fixation rendue nécessaire par l'assujettissement de certains services de l'informatique en nuage.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé .
Article 7 bis A - Publicisation du rapport du médiateur du livre
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Au cours de sa séance publique du 29 septembre dernier, l'Assemblée nationale a introduit l'article 7 bis A, qui vise à ce que le rapport d'activité du médiateur du livre soit rendu public .
Pour mémoire, aux termes de l'article 144 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, le médiateur du livre est chargé, sans préjudice du droit des parties de saisir le juge et dans le respect des prérogatives de l'Autorité de la concurrence, d'une action de conciliation dans le cadre de litiges relevant de l'application des lois n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre et n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique.
Il peut être saisi à cet effet par tout détaillant, toute personne qui édite des livres, en diffuse ou en distribue auprès des détaillants, par toute organisation professionnelle ou syndicale concernée, par les prestataires techniques auxquels ces personnes recourent ou par le ministre intéressé. Il peut également se saisir d'office de toute affaire entrant dans sa compétence.
Pour l'examen de chaque affaire, le médiateur du livre invite les parties à lui fournir toutes les informations qu'il estime nécessaires, sans que puisse lui être opposé le secret des affaires, et peut entendre toute personne dont l'audition lui paraît utile.
Dans le respect de la liberté de négociation commerciale des parties, le médiateur du livre favorise ou suscite toute solution de conciliation. Lorsque le médiateur constate un accord entre les parties, il rédige un procès-verbal précisant les mesures à prendre pour le mettre en oeuvre. Il peut rendre public le procès-verbal de conciliation, sous réserve des informations couvertes par le secret des affaires. Si aucun accord n'a pu être trouvé entre les parties, il peut adresser aux parties une recommandation précisant les mesures qui lui paraissent de nature à mettre fin à la situation litigieuse.
En cas d'échec de la conciliation, le médiateur du livre peut saisir la juridiction compétente pour lui demander d'ordonner la cessation des pratiques contraires aux lois précitées relatives au prix du livre. Si les faits dont il a connaissance sont susceptibles de recevoir une qualification pénale, il en informe le ministère public.
Le médiateur du livre peut enfin formuler des préconisations afin de faire évoluer les dispositions normatives relevant de son champ de compétences.
Il adresse enfin chaque année un rapport sur ses activités au ministre chargé de la culture. En application du présent article, ce rapport sera désormais public , comme celui du médiateur de la musique créé par l'article 7 du projet de loi.
II. - La position de votre commission
À l'instar du dispositif prévu par l'article 7 du projet de loi relatif au médiateur de la musique, le présent article rend public le rapport annuel d'activité du médiateur du livre. Afin de parachever le parallélisme des formes et d' améliorer l'information du Parlement , votre commission propose qu'une copie en soit également adressée aux présidents des commissions permanentes parlementaires chargées de la culture (COM-171) .
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 7 bis (art. L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle) - Participation de trois représentants des ministres chargés de la culture, de l'industrie et de la consommation aux travaux de la commission de la copie privée
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
À l'initiative du Gouvernement, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a introduit le présent article, portant modification de l'article L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle. Son premier alinéa indique, s'agissant de la rémunération pour copie privée, que « les types de supports, les taux de rémunération et les modalités de versement (...) sont déterminés par une commission présidée par un représentant de l'État et composée, ou outre, pour moitié, de personnes désignées par les bénéficiaires du droit à rémunération, pour un quart, de personnes désignées par les organisations représentant les fabricants ou importateurs de supports (...) et, pour un quart, de personnes désignées par les organisations représentant des consommateurs. » Chaque participant y dispose d'une voix, à l'exception de la société de gestion collective Copie France, dotée de dix voix.
Comme le constatait récemment le député Michel Rogemont, dans son rapport d'information relatif à la copie privée 18 ( * ) , « concilier les points de vue d'interlocuteurs ayant des intérêts contradictoires s'est avéré de plus en plus difficile à mesure que les montants en jeu s'accroissaient. L'adoption même des procès-verbaux des réunions occasionne des débats et des tensions. »
Pour tenter de remédier à ces blocages, le décret n° 2009-744 du 19 juin 2009 a introduit plusieurs modifications préconisées par le plan France numérique 2012 et destinées à apporter un certain apaisement :
- le président de la commission, personnalité indépendante ayant voix prépondérante en cas de partage des voix, n'est plus seulement nommé par le ministre en charge de la culture, dont on estime en creux la position proche de celle des ayants droit, mais conjointement par ce dernier et par les ministres en charge de l'industrie et de la consommation ;
- lorsque le président fait usage de la faculté de demander une seconde délibération, la décision est désormais adoptée à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés ;
- enfin, est déclaré démissionnaire d'office par le président tout membre qui n'a pas participé sans motif valable à trois séances consécutives de la commission.
Composition de la commission pour la rémunération de la copie privée fixée par l'arrêté du 31 octobre 2012 Au titre des fabricants et importateurs de supports : - Fédération du e-commerce et de la vente à distance (FEVAD)* - Fédération française des télécoms (FFT) - Syndicat des entreprises de commerce international de matériel audio, vidéo et informatique grand public (SECIMAVI)* - Syndicat des industries de matériels audiovisuels électroniques (SIMAVELEC)* - Syndicat de l'industrie des technologies de l'information (SFIB)* - Syndicat national des supports d'image et d'information (SNSII)* Au titre des organisations des consommateurs : - Association de défense, d'éducation et d'information du consommateur (ADEIC) - Association études et consommation (ASSECO-CFDT) - Confédération de la consommation, du logement et du cadre de vie (CLCV) - Familles de France (FF) - Familles rurales (FR) - Union nationale des associations familiales (UNAF) Au titre des bénéficiaires du droit à rémunération : - Société pour la perception de la rémunération de la copie privée sonore et audiovisuelle (Copie France) - Société française des intérêts des auteurs de l'écrit (SOFIA) - Société des arts visuels associés (AVA) Les membres ayant quitté la commission le 12 novembre 2012 sont suivis d'un astérisque. |
Cette réforme a minima n'a guère apaisé les tensions, puisque les contentieux devant le Conseil d'État contre les délibérations de la commission n'ont pas cessé. Pire, le 12 novembre 2012, cinq des six industriels représentant les fabricants et importateurs de supports d'enregistrement ont présenté leur démission, entraînant la paralysie de la commission.
Dans la perspective du renouvellement de la commission à la fin de l'année 2015, Marcel Rogemont, dans son rapport d'information précité, se montrait particulièrement pessimiste sur une possible reprise des travaux en l'état, compte tenu des oppositions frontales qui se sont manifestées ces dernières années. En effet, « les relations entre les représentants des ayants droit, d'une part, et les principaux fabricants et importateurs de supports, d'autre part, sont marquées par une défiance réciproque, si bien qu'un retour des industriels au sein de la commission semble difficile ».
À cet égard, le rapport issu de la mission de médiation sur le fonctionnement de la commission de la copie privée, menée par Mme Christine Maugüé du 15 avril au 30 juin 2015, propose, pour permettre à la commission de fonctionner à nouveau à cadre législatif et réglementaire constant, conformément à la lettre de mission signée par la ministre chargée de la culture, d'y renforcer « la présence de la puissance publique (...), perçue comme le moyen de ramener davantage de sérénité dans les débats ». Cette évolution pourrait « par exemple prendre la forme de la présence dans la commission de commissaires du Gouvernement, sans voix délibérative, représentant respectivement le ministère de la culture, le ministère de l'industrie et le ministère de la consommation ».
Le présent article complète le premier alinéa précité de l'article L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle relatif à la composition de la commission, dans le sens proposer par la médiation de Christine Maugüé, afin de lui adjoindre, avec voix consultative, trois représentants des ministres chargés de la culture, de l'industrie et de la consommation.
La rédaction de sa commission des affaires culturelles a été adoptée sans modification par l'Assemblée nationale.
II. - La position de votre commission
Si la commission de la copie privée a récemment, et c'est heureux, repris ses travaux en décembre, avec Jean Musitelli, son nouveau président, il n'en demeure pas moins que les sujets de tensions sont loin d'être aplanis. Or, le dispositif proposé par le présent article ne règle en rien la difficulté de la commission à trouver de véritables accords, d'autant que les représentants des ministères concernés n'auront qu'une voix consultative. En outre, il est probable que le représentant du ministère en charge de la culture aura tendance à soutenir les ayants droit, ceux du ministère de l'industrie les industriels et ceux du ministère de la consommation, les consommateurs.
Marcel Rogemont, dans son rapport précité, considérait d'ailleurs la mesure inutile : « Tout d'abord, l'ajout de représentants de l'État ne constitue pas nécessairement une garantie d'indépendance . En effet, le Président actuel de la commission, représentant de l'État, est considéré par les représentants des fabricants et importateurs de supports et par les représentants des consommateurs comme insuffisamment neutre et trop souvent favorable à la cause des ayants droit. Ensuite, l'État peut avoir intérêt à ce que le montant de la rémunération pour copie privée soit le plus élevé possible dans la mesure où la part des 25 % consacrée à l'action artistique et culturelle sera d'autant plus importante. Alors que le ministère de la culture est soumis à une contrainte budgétaire importante, une contribution croissante des SPRD au financement de la culture peut être bienvenue. Par ailleurs, la présence de représentants des différents ministères pourrait se traduire par des conflits interministériels , un rapport de force déséquilibré au profit du ministère chargé de l'industrie et un risque de blocage nécessitant un arbitrage systématique du Premier ministre. »
Christine Maugüé elle-même considérait, en conclusion de son rapport, s'agissant de ses propositions relatives à la composition et à la gouvernance de la commission de la copie privée, « les mesures préconisées dans le rapport ne parviendront pas nécessairement à faire disparaître le sentiment d'un déséquilibre structurel de la commission » et que « si la commission devait parvenir à une nouvelle situation de blocage, il ne pourrait alors être fait l'économie d'une réforme de sa gouvernance, réforme qui passerait nécessairement par une modification des règles de fonctionnement de la commission, voire de sa composition » .
Votre commission estime à tout le moins que les objectifs évoqués par la ministre de la culture et de la communication lors de la présentation de son amendement devant la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale - « renforcer la légitimité du prélèvement, apaiser le fonctionnement de la commission de la copie privée et limiter les risques de recours contentieux » - paraissent disproportionnés au regard de la modestie de la réforme proposée.
Elle estime donc plus efficient que soient nommés, en lieu et place de simples représentants des ministères, un conseiller d'État désigné par le vice-président du Conseil d'État, un magistrat de la Cour de cassation désigné par le premier président de la Cour de cassation et un magistrat de la Cour des comptes désigné par le premier président de la Cour des comptes.
Il lui semble, en outre, nécessaire, au regard de l'objectif de transparence, que les membres de la commission soient soumis à une déclaration d'intérêt auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique.
Enfin, toujours aux fins d'une meilleure transparence et d'une visibilité accrue, elle souhaite que le règlement intérieur de la commission de la copie privée, comme les éventuelles modifications qui y seraient apportées, soient publiés au Journal officiel (COM-172) .
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 7 ter (art. L. 311-6 du code de la propriété intellectuelle) - Financement des études d'usage pour l'établissement des barèmes de la rémunération pour copie privée
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Le présent article a été introduit par la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, par l'adoption d'un amendement de Marcel Rogemont, rapporteur de la mission d'information précitée portant sur le bilan et les perspectives de trente ans de copie privée.
L'article L. 311-6 du code de la propriété intellectuelle dispose que la rémunération pour copie privée est perçue pour le compte des ayants droit par un ou plusieurs organismes, Copie France en l'espèce, pour être répartie ensuite entre les ayants droit à raison des reproductions privées dont chaque oeuvre fait l'objet.
Le présent article complète l'article L. 311-6 pour préciser qu'une part, ne pouvant excéder 1 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée, de cette ressource devra être affectée par Copie France au financement d'enquêtes d'usage portant sur la réalité de la copie d'oeuvre à des fins personnelles, réalisées par la commission de la copie privée.
Aux termes de l'article L. 311-4, l'adoption des barèmes de la rémunération pour copie privée par la commission est subordonnée à la réalisation préalable d'études d'usage, portant sur chaque type de supports et de matériels soumis à la rémunération pour copie privée, destinées à évaluer l'évolution des comportements de copie au regard du changement des technologies et des pratiques numériques. Le Conseil d'État, dans sa décision du 17 juin 2011 rappelait la nécessité de leur régulière réactualisation , de façon à ce que les barèmes fixés tiennent compte au plus près du préjudice subi par les ayants droit. Or, les études d'usage au fondement des barèmes actuels datent d'il y a quatre ans, lorsque le téléchargent direct ou le ripping , par exemple, n'étaient encore que peu développés. Pour Marcel Rogemont, l'actualisation des données d'usage devraient être a minima annuelle.
Trop peu fréquentes, les études d'usages présentent également des écueils méthodologiques , notamment l'absence d'une approche qualitative de l'évolution des pratiques de copie.
En revanche, dans deux décisions du 19 novembre 2014, le Conseil d'État a rejeté les recours pour excès de pouvoir, présentés par des fabricants et importateurs de supports, tendant à l'annulation des décisions de la commission, considérant notamment « qu' il ne résulte d'aucune disposition, ni d'aucun principe que les enquêtes doivent nécessairement être financées par les pouvoirs publics » . Ainsi, le fait qu'une étude ait été quasi exclusivement financée par les représentants des bénéficiaires de la rémunération pour copie privée, comme ce fut le cas en 2012, ou par Copie France n'est pas de nature à porter atteinte à l'impartialité de la commission.
Pour autant, en synthèse de sa médiation, Christine Maugüé, rappelant que les études d'usage jouent un rôle clé dans la fixation des tarifs de la copie privée , puisqu'ils sont fondés à la fois sur la capacité d'enregistrement du support concerné et sur les usages de copie qui en sont faits par les consommateurs, propose de formaliser certains principes relatifs à l'élaboration et à la réalisation de ces études :
- les études d'usage doivent être confiées à des personnes indépendantes des acteurs dont le choix ne peut intervenir qu'après une procédure transparente de passation d'un marché public ;
- le questionnaire de l'étude doit faire l'objet d'une élaboration contradictoire et d'une approbation par les membres de la commission ;
- les études doivent être financées par les pouvoirs publics sous la forme d'un prélèvement sur le budget de fonctionnement de la commission ;
- les résultats doivent être communiqués à tout membre de la commission qui en fait la demande, sous réserve de confidentialité ;
- enfin, elles doivent être programmées sur un calendrier organisé sur deux ans.
Le présent article ne réalise qu'une reprise timide de ces propositions puisqu'il se limite à la question du financement des études d'usage par une part de la rémunération pour copie privée récoltée par Copie France.
La rédaction de sa commission des affaires culturelles a été adoptée sans modification par l'Assemblée nationale.
II. - La position de votre commission
Votre commission approuve le principe d'un versement d'une portion, raisonnable, de la rémunération pour copie privée au financement d'études d'usage, qui représentent le fondement de l'évaluation du préjudice des ayants droit , d'une part, et de la mesure des comportements de copie des consommateurs pour chaque support, d'autre part.
Compte tenu de l'importance de ces études en amont du dispositif, Marcel Rogemont a tenté de faire valoir, au cours de la séance publique à l'Assemblée nationale, que le cahier des charges des études d'usage devait faire l'objet d'une adoption à la majorité après avis motivé de chacun des trois collèges. Un avis défavorable lui a été opposé, la mesure ressortant du règlement intérieur de la commission de la copie privée. Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication a indiqué à cette occasion que « par le passé, les questionnaires des études d'usage ont fait l'objet d'une élaboration contradictoire entre les membres des différents collèges de la commission de la copie privée. Cette pratique devrait être confortée quand elle reprendra prochainement ses travaux. Je suis très attachée à ce qu'elle s'attelle à la mise en oeuvre des préconisations du rapport de médiation de Christine Maugüé, parmi lesquelles figure la mise en place de groupes de travail en son sein pour préparer ses séances et élaborer le cahier des charges des études d'usage . Par ailleurs, la nomination d'un pôle public au sein de cette commission est à même de garantir le nécessaire dialogue qui doit présider à la rédaction dudit cahier des charges ».
Sans revenir à cette proposition, votre commission souhaite rappeler que les études d'usage doivent répondre à un cahier des charges fixé par la commission . Elle estime, en outre, que la réalisation de ces études doit être confiée à la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), à laquelle l'article L. 331-13 du code de la propriété intellectuelle confère déjà, entre autres, une mission d' « observation de l'utilisation licite et illicite des oeuvres et des objets auxquels est attaché un droit d'auteur et un droit voisin sur les réseaux de communication électroniques utilisés pour la fourniture de services de communication au public en ligne ».
Son indépendance au regard de la commission de la copie privée et son expertise en matière d'observation et d'évaluation des pratiques culturelles en ligne justifient pleinement de lui confier cette mission, dans le respect du cahier des charges imposé par la commission. À titre d'illustration, le premier motif d'annulation, par le Conseil d'État de plusieurs décisions relatives aux barèmes, prises par la commission en 2006, 2007 et 2008, tenait au fait que n'avaient pas été exclues de l'assiette de la rémunération les copies illicites d'oeuvres. La part respective, pour chaque support, des usages licites et illicites de copies privées n'avait pas été recherchée dans le cadre d'une étude. Cette différenciation n'est certes pas évidente ; or, la Hadopi la maîtrise parfaitement.
Enfin, votre commission, compte tenu des montants élevés de la rémunération pour copie privée, considère que son ou ses organismes de gestion doivent faire, à l'instar des sociétés de gestion collective, l'objet d' un agrément conjoint des ministres en charge de la culture, de l'industrie et de la consommation (COM-173).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 7 quater AA (nouveau) (art. L. 311-4 et L. 331-31 du code de la propriété intellectuelle) - Élargissement des missions de la Hadopi aux études d'usage de la copie privée
En conséquence des modifications apportées par votre commission à l'article L. 311-6 du code de la propriété intellectuelle, deux coordinations doivent être réalisées aux articles L. 311-4 et L. 331-31 du même code ( COM-174 ) :
- à l'article L. 311-4, il est nécessaire de préciser au troisième alinéa que les enquêtes d'usage servant à la fixation des barèmes de la rémunération pour copie privée sont réalisées par la Hadopi ;
- logiquement, l'article L. 331-31 relatif aux missions de la Haute Autorité doit être complété pour faire référence à cette nouvelle tâche.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé .
Article 7 quater A (art. L. 311-8 du code de la propriété intellectuelle) - Exonération de redevance copie privée pour les exportateurs
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale au cours de sa séance publique du 29 septembre dernier, par l'adoption d'un amendement de Marcel Rogemont, membre de sa commission des affaires culturelles.
Le code de la propriété intellectuelle précise, dans son article L. 311-4, que la rémunération pour copie privée est versée par le fabricant, l'importateur ou la personne qui réalise les acquisitions intracommunautaires de supports d'enregistrement lors de leur mise en circulation en France.
Aux termes du I de l'article L. 311-8, la rémunération pour copie privée n'est cependant pas due par les entreprises de communication audiovisuelle, les producteurs de phonogrammes ou de vidéogrammes, les éditeurs d'oeuvres publiées sur supports numériques, les organismes qui utilisent les supports d'enregistrement dans le cadre de l'exception handicap. Son II ajoute qu'elle n'est pas non plus due sur les supports d'enregistrement acquis à des fins professionnelles , dont les conditions d'utilisation ne permettent pas de présumer un usage pour une activité de copie privée. Dès lors, en application du III de ce même article, les personnes visées par les I et II peuvent conclure avec Copie France une convention constatant l'exonération. À défaut, elles ont droit au remboursement de la rémunération pour copie privée versée sur production de justificatifs.
Cette rédaction est issue de la loi n° 2011-1898 du 20 décembre 2011 relative à la rémunération pour copie privée, qui a rendu la législation française conforme aux dispositions de la directive 2001/29 du 22 mai 2001 relative aux droits d'auteur s'agissant de l'exonération des supports utilisés à des fins professionnelles de la rémunération pour copie privée. Ce principe est réaffirmé par la jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), en particulier dans son arrêt Padawan du 21 octobre 2010, qui affirme que « l'application sans distinction de la redevance pour copie privée, notamment à l'égard d'équipements, d'appareils ainsi que de supports de reproduction numérique non mis à la disposition d'utilisateurs privés et manifestement réservés à des usages autres que la réalisation de copies à usage privé, ne s'avère pas conforme à la directive 2001/29 ».
En cela, la loi du 20 décembre 2011 a donné valeur législative au principe développé par le Conseil d'État dans son arrêt du 17 juin 2011 précité, qui annulait une décision de la commission au motif qu'elle n'excluait pas du champ de la rémunération pour copie privée « les supports acquis, notamment à des fins professionnelles, dont les conditions d'utilisation ne permettent pas de présumer un usage de ces matériels à des fins de copie privée » , la pondération du taux de la rémunération à raison du degré professionnel d'usage ne pouvant suffire l'exonération des usages autres que la copie privée.
La loi du 20 décembre 2011 prévoit certes deux modalités d'exonération des professionnels (une exonération sur le fondement d'une convention ou un remboursement sur justificatifs) mais, en pratique, les remboursements des professionnels restent limités . De fait, il a fallu attendre le 10 décembre 2013 pour que l'arrêté relatif aux factures soit publié, rendant ainsi le remboursement effectif au 1 er janvier 2014 seulement. L'étude d'impact accompagnant la loi du 20 décembre 2011 évaluait les remboursements à un montant annuel de 58 millions d'euros. Or, en 2014, le total des remboursements depuis la mise en place de ce système atteignait environ 375 000 euros, soit moins de 0,65 % de la somme prévue.
En réalité, comme le rappelle Marcel Rogemont dans son rapport d'information précité, le manque d'effectivité des remboursements des professionnels tient en grande partie à la lourdeur des démarches administratives que ces derniers doivent engager, notamment s'agissant du nombre de justificatifs à fournir à Copie France.
L'absence de remboursement effectif pose la question de la compatibilité du système français avec le droit européen. En effet, la CJUE, dans son arrêt Amazon du 11 juillet 2013 a apporté une précision à la jurisprudence Padawan précitée : si elle admet que la rémunération puisse, pour des raisons de simplicité, s'appliquer indistinctement à l'ensemble des supports mis en circulation, elle demande à ce qu'un tel système soit assorti, pour ceux qui ont été acquis à des fins professionnelles, d' un mécanisme permettant un remboursement effectif et ne rendant pas excessivement difficile la restitution de la rémunération payée.
Dès lors, le rapport de médiation de Christine Maugüé, comme le conseil pour la simplification de la vie des entreprises dans son rapport du 14 avril 2014, ont appelé à une simplification effective des démarches relatives au remboursement de la rémunération pour copie privée aux professionnels. Las, l'arrêté du 19 décembre 2014 relatif au remboursement de la rémunération pour copie privée n'a apporté au système que des modifications cosmétiques ; il n'a, notamment, pas réduit le nombre de documents à fournir.
Le présent article est, pour sa part, muet sur le sujet des remboursements pour des supports à usage professionnel utilisés en France. Il se contente de traiter de la problématique de l'exportation de supports soumis à la rémunération pour copie privée.
Le dispositif présente également des difficultés s'agissant des supports acquis auprès d'un fournisseur implanté en France en vue d'être exportés et, ce faisant, non soumis en principe à la rémunération pour copie privée. En effet, l'entreprise exportatrice est tenue d'engager une procédure en remboursement fort complexe, sans exonération possible , et longue de plusieurs mois, qui impose dès lors souvent une importante mobilisation de trésorerie. De plus, lorsque le remboursement est acquis, Copie France en verse le montant au fabricant ou à l'importateur, vers lequel doit ensuite se tourner le distributeur, avant que l'exportateur ne soit enfin destinataire du remboursement.
Le présent article vise donc à compléter l'article L. 311-8 du code de la propriété intellectuelle par un II bis précisant que la rémunération pour copie privée n'est pas due non plus par les personnes qui procèdent à l'exportation ou à la livraison intracommunautaire des supports d'enregistrement mis en circulation en France , afin de permettre aux exportateurs d'être exonérés sur la base d'une convention signée avec Copie France ou d'obtenir directement auprès de la société le remboursement de la rémunération pour copie privée.
Cette disposition ressort des propositions de Christine Maugüé, qui estimait qu' « on pourrait passer à un mécanisme de doubles comptes qui permettrait, lorsque les flux de matériels exportés sont pérennes entre un fournisseur et un client donné, d'exonérer du paiement de la rémunération pour copie privée les supports destinés à l'exportation. Il y a en ce domaine probablement place pour une contractualisation entre Copie France, le fournisseur et l'acquéreur, avec élaboration d'un contrat type ».
II. - La position de votre commission
Le présent article représente un progrès indéniable pour les exportateurs, mais il ne règle nullement les difficultés des professionnels évoquées précédemment, alors que le constat de l'inefficacité du système actuel est partagé à la fois par Marcel Rogemont et par Christine Maugüé, auteurs des travaux les plus récents sur le fonctionnement de la copie privée.
Dans cette perspective, il est nécessaire d'apporter des modifications à l'article L. 311-8, afin d' exonérer du paiement de la rémunération pour copie privée, en application d'une convention ou sur remboursement, tout support acquis pour un usage professionnel (COM-175).
Reste que, pour être efficace, cette mesure devra s'accompagner sans délai d'une réécriture de l'arrêté précité du 19 décembre 2014, dans le sens d'une véritable simplification des démarches imposées aux professionnels désireux d'obtenir le remboursement de la rémunération pour copie privée indument payée.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 7 quater (art. L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle) - Champ et transparence de l'utilisation des 25 % de la rémunération pour copie privée affectés au financement d'actions artistiques et culturelle
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Aux termes de l'article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle, les sociétés de perception et de répartition des droits doivent consacrer 25 % des sommes perçues au titre de la rémunération pour copie privée, ainsi que les sommes qui n'ont pu être réparties, à des actions d'aides à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à des actions de formation des artistes , selon un principe admis par la CJUE dans son arrêt Amazon précité du 11 juillet 2013 en application de la directive du 22 mai 2001.
Les ressources brutes consacrées à l'action artistique et culturelle par les sociétés de gestion collective s'élevaient à 109 millions d'euros en 2013, soit 52,3 millions d'euros de la quote-part issue de la copie, 26,9 millions d'euros n'ayant pu être répartis, 24,9 millions d'euros de reports de l'année précédente, 4,8 millions d'euros d'aides volontaires mises en oeuvre par la SACEM, la SACD et l'ARP, enfin, 100 000 euros de produits financiers issus des sommes mises en réserve.
Si le principe d'un tel financement n'est nullement remis en cause, tel n'est pas le cas de la transparence du système, dont l'insuffisance est régulièrement dénoncée , notamment s'agissant de la difficulté à obtenir des informations sur les actions aidées chaque année. Pierre Lescure, dans son rapport de mai 2013 relatif à l'acte II de l'exception culturelle, dresse un constat similaire en notant que « l'information disponible publiquement est pour le moins laconique. Les rapports remis au ministre de la Culture et aux commissions parlementaires compétentes ne sont pas rendus publics » .
Des efforts récents ont toutefois permis d' améliorer l'accès aux données . Ainsi, la loi susmentionnée du 20 décembre 2011 rend destinataire les présidents des commissions des affaires culturelles de l'Assemblée nationale et du Sénat des rapports annuels des sociétés de gestion, auparavant uniquement transmis au ministre de la culture. Surtout, ces rapports sont désormais consultables en ligne. Dès lors, la commission permanente de contrôle des sociétés de gestion et de répartition des droits, qui dénonçait régulièrement le manque de précision et de transparence quant à l'utilisation des fonds dédiés à l'action artistique et culturelle, reconnaît, dans son rapport de 2014, les efforts accomplis.
Les améliorations ont, en outre, été réelles s'agissant de la transparence des procédures d'attribution des aides , afin que les divers soutiens apportés à des manifestations ou événements dans le cadre de l'action artistique et culturelle échappent à toute suspicion de complaisance ou de conflit d'intérêt . Des règles déontologiques claires ont ainsi été adoptées par les différentes sociétés de gestion, ce que la commission de contrôle a également salué en 2014.
Pour autant, comme le note Marcel Rogemont dans son rapport précité, les crédits destinés aux actions artistiques et culturelles font l'objet d' une sous-consommation chronique, entraînant une accumulation des reports . Ainsi, en 2013, seulement 68 % des ressources brutes disponibles ont été effectivement affectées. C'est pourquoi, il a proposé que « le champ des actions éligibles aux 25 % pourrait intégrer le soutien à l'éducation artistique et culturelle, dispensée par des artistes » , par ailleurs insuffisamment financés par le ministère de la culture et de la communication.
Le présent article est le fruit de l'adoption consécutive, par la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, d'un amendement du Gouvernement et d'un amendement présenté par Marcel Rogemont, tous deux modifiant l'article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle, et visant à répondre au double sujet de la transparence des comptes et de la sous-consommation des crédits.
À l'initiative du Gouvernement et comme le proposait Marcel Rogemont, les 25 % du montant de rémunération pour copie privée perçu par les sociétés de gestion collectives utilisés pour le financement d'actions culturelles pourront ainsi également être destinés au développement de l'éducation artistique et culturelle , entendu comme le concours apporté par des auteurs ou des artistes-interprètes aux actions mentionnées au 4° bis de l'article 2 du projet de loi, c'est-à-dire « permettant l'épanouissement des aptitudes individuelles en favorisant l'égalité d'accès à la culture » au bénéfice plus particulièrement des personnes « les plus éloignées de la culture, des publics spécifiques, ainsi que des jeunes ».
Pour sa part, l'amendement de Marcel Rogemont, prévoit que les sociétés de perception et de répartition des droits établissent une base de données électronique unique recensant le montant et l'utilisation de ces sommes, régulièrement mise à jour et accessible gratuitement . Les informations qui y figurent sont vérifiées par un commissaire aux comptes au regard de leur sincérité et de leur concordance avec les documents comptables de chaque société de gestion.
Au cours de sa séance publique du 29 septembre 2015, l'Assemblée nationale a précisé que la base de données recensant l'utilisation, par les sociétés de gestion collective, des 25 % de la rémunération pour copie privée destinés aux actions culturelles devra être accessible dans un format ouvert et librement réutilisable.
II. - La position de votre commission
Le système des 25 % permet d'apporter à la création un soutien financier particulièrement utile à son développement et à son rayonnement. Dès lors, la sous-consommation chronique des crédits est particulièrement dommageable. En cela, l'ouverture du dispositif au soutien à l'éducation artistique et culturelle semble particulièrement appropriée.
Reste qu' il incombe normalement à l'État d'assumer le financement de ces actions. Votre commission rappelle donc que la rémunération pour copie privée, pour utile qu'elle soit, ne doit pas servir de compensation à une diminution des crédits publics en faveur de la culture . De fait, entre 2006 et 2013, la croissance des crédits d'action artistique et culturelle des sociétés de gestion collective (+ 33 %) a dépassé de treize points celle des crédits d'intervention de l'État, qui ont augmenté de 20 %.
Elle est également favorable à la mesure de transparence proposée par Marcel Rogemont, qui complètera utilement les dispositions de la directive européenne du 26 février 2014 relative à la gestion collective des droits d'auteur et des droits voisins, que l'article 29 du projet de loi autorise à transposer par voie d'ordonnance.
La transparence devrait, en effet, s'en trouver renforcée et la gestion de la part de la rémunération pour copie privée consacrée à l'action artistique et culturelle améliorée, notamment par les articles 9 (fonction de surveillance), 10 (obligations des personnes qui gèrent les activités de l'organisme de gestion collective), 11 (perception et utilisation des revenus provenant des droits), 21 (publicité des informations) et 22 (rapport de transparence annuel).
Pour plus de clarté, il convient toutefois, à l'alinéa 4, de remplacer « en particulier les sommes utilisées à des actions d'aide à la jeune création » par « toutes les subventions accordées sont inscrites dans cette base de données établies par les sociétés de perception et de répartition des droits avec le nom de leurs bénéficiaires » (COM-176) .
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 8 (art. L. 213-24 à L. 213-37 nouveaux du code du cinéma et de l'image animée) - Transparence des comptes de production et d'exploitation des films de cinéma
I. - Le texte du projet de loi
A. État des lieux
Selon les termes de l'étude d'impact annexée au projet de loi, « l'exigence de transparence résulte, de manière générale, de la spécificité de l'industrie cinématographique et de son modèle économique tenant à la solidarité qui sous-tend les relations économiques entre les multiples intervenants, des auteurs aux différentes personnes auxquelles a été confiée l'exploitation de l'oeuvre, en raison du principe de la rémunération au pourcentage des ayants droit. Plus particulièrement, le secteur de la production cinématographique, caractérisé par des montages complexes de financement impliquant de multiples acteurs, doit constamment renforcer ses exigences de transparence économique tant sur le coût des oeuvres que sur la réalité des remontées de recettes ou encore l'état d'amortissement des investissements des différents intervenants ».
René Bonnell, après un premier travail en décembre 2008 sur « Le droit des auteurs dans le domaine cinématographique : coûts, recettes et transparence » , ne dit pas autre chose dans son rapport de décembre 2013 portant sur « Le financement de la production et de la distribution cinématographique à l'heure du numérique » , qui sert en grande partie de fondement aux dispositions du projet de loi relatives au cinéma. Considérant que la transparence et le partage de la recette représentent un axe stratégique de l'amélioration du financement , il y souligne la nécessité de renforcer la transparence des relations entre acteurs, notamment quant aux rendus de comptes, et de clarifier la pratique des mandats groupés.
L'amélioration de la transparence a déjà fait l'objet d'accords interprofessionnels. Ainsi, en juin et en juillet 2010, deux accords ont été conclus s'agissant des conditions d'évaluation et de remontée de la rémunération revenant aux auteurs, puis les associations concernées d'auteurs, d'agents et de producteurs sont parvenues à un texte commun en date du 16 décembre 2010 , étendu par arrêté du ministre de la culture le 17 février 2011.
L'accord du 16 décembre 2010 Cet accord a pour objet d'assurer la transparence de l'ensemble de la filière cinématographique pour les films de long métrage. Il rappelle un principe : l'attachement « indéfectible » des signataires à « la liberté contractuelle et aux principes et aux règles qui fondent la rémunération des auteurs pour ce qui concerne la gestion individuelle. » La gestion individuelle traite ainsi, de gré à gré, de la rémunération des auteurs et de ses éventuels compléments dans le cadre du code de la propriété intellectuelle. Cet accord ne présuppose cependant pas le principe d'une rémunération additionnelle qui relève du contrat auteur/producteur, mais précise que, si elle est prévue, « elle aura pour assiette les recettes nettes par producteur. » Ce protocole s'attache « à simplifier, clarifier, harmoniser, les notions clés qui président à la définition des coûts, des recettes et des modalités d'amortissement des oeuvres cinématographiques ». Pour l'essentiel l'accord s'attache ensuite à définir avec beaucoup de précision :
L'accord comporte à deux avancées substantielles susceptibles d'apaiser certaines dissensions anciennes :
Cependant, l'un et l'autre ne peuvent être pris en compte que pour calculer l'amortissement du coût du film et non la rémunération additionnelle de l'auteur. Les producteurs s'engagent à communiquer aux auteurs dans les deux mois suivant la délivrance de l'agrément définitif le coût final du film et l'état de son amortissement assorti de tous les éléments entrant dans ce calcul. Pour faciliter ce travail, le CNC doit produire dans les six mois suivant la date de l'accord un bordereau type facilitant la tâche du producteur. L'accord met à la charge du CNC l'institution d'un audit comptable approfondi de dix films par an, tirés au sort dans cinq tranches de budget. Ce contrôle s'exerce « chez le producteur et ses mandataires ». Le CNC doit transmettre chaque année un rapport de synthèse sur ces audits à une commission de suivi de l'accord créée pour en surveiller l'application et éventuellement l'adapter à l'évolution de l'environnement du secteur. Début 2013, une première vague d'audits a été réalisée sur huit films, qui, selon le CNC, n'a relevé aucun manquement significatif à la façon de calculer l'amortissement et de présenter les comptes. Les auditeurs ont relevé une pratique satisfaisante en général, grandement améliorée d'ailleurs depuis l'instauration du crédit d'impôt cinéma. Les remarques des auditeurs sur certaines écritures (placement de produit imputé au chiffre d'affaires de la société et non du film par exemple) ont été corrigées par les producteurs sans opposition. Une seconde vague de dix audits est en cours. Cet accord a le mérite de favoriser un climat de coopération interne à l'industrie du cinéma, permettant d'augurer qu'il est possible de bâtir peu à peu une économie du droit d'auteur satisfaisante pour toutes les parties. Source : rapport de René Bonnell - décembre 2013 |
Cependant, les principes de transparence posés par l'accord du 16 décembre 2010 ne sont pas toujours respectés . En outre, il ne s'applique qu'aux rapports entre producteurs et auteurs : ni les financeurs ni les mandataires ou cessionnaires ne sont concernés.
B. Le dispositif proposé
Sur le fondement des propositions du rapport précité de René Bonnell, le présent article créé un chapitre III bis au titre Ier du livre II du code du cinéma et de l'image animée relatif à l'exercice des professions et activités du cinéma, intitulé « Transparence des comptes de production et d'exploitation des oeuvres cinématographique de longue durée » et composé de deux sections.
La première section porte sur la transparence des comptes de production et comporte deux sous-sections. La première, avec les articles L. 213-24 à L. 213-26 nouveaux, concerne les obligations des producteurs délégués.
Le nouvel article L. 213-24 impose au producteur délégué, entendu comme le responsable financier, artistique et technique de la réalisation, d'une oeuvre cinématographique d'une durée supérieure à une heure, admise au bénéfice des aides financières à la production du CNC, d' établir et de transmettre le compte de production de l'oeuvre à ses coproducteurs (bénéficiaires d'une part de propriété sur les droits corporels et incorporels de l'oeuvre et d'un droit à recettes correspondant) et cofinanceurs intéressés aux recettes (SOFICA intervenant dans le cadre d'un contrat d'association à la production par exemple), ainsi qu'aux auteurs avec lesquels il est lié par un contrat de production audiovisuelle et qui bénéficient, à ce titre, d'une rémunération proportionnelle . Aux termes de l'article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, sont présumés auteurs : l'auteur du scénario, celui de l'adaptation, du texte parlé, des compositions musicales réalisées pour l'oeuvre et le réalisateur.
La transmission du compte de production, comprenant l'ensemble des dépenses engagées pour la préparation, la réalisation et la post-production d'une oeuvre, devra intervenir dans les huit mois suivant la date de délivrance du visa d'exploitation par le ministre en charge de la culture. Ce délai correspond à celui posé par l'article 211-63 du règlement général des aides financière (RGA) du CNC pour demander l'agrément de production, qui constitue la décision d'attribution à titre définitif d'une aide à la production. Une fois cet élément fourni, le producteur délégué est donc en mesure de transmettre au CNC les comptes définitifs de l'oeuvre, ainsi que les rendus de comptes à ses partenaires financiers.
En moyenne, 200 à 210 films d'initiative française devraient être concernés chaque année par la nouvelle obligation de transmission. L'établissement des comptes de production, déjà réalisé pour l'obtention des aides du CNC varie en moyenne entre 3 000 et 5 000 euros par film ; la transmission ne devrait pas sensiblement modifier ce coût.
L'article L. 213-25 nouveau dispose que la forme du compte de production et la définition des différentes catégories de dépenses qui y figureront sont déterminées par accord professionnel conclu entre les organisations représentatives des producteurs, les organismes professionnels d'auteurs et les sociétés de perception et de répartition des droits concernées.
Les dépenses de préparation du film recouvrent l'ensemble des dépenses engagées avant le tournage, soit les dépenses des différentes phases du travail d'écriture (option et achat de droits d'adaptation cinématographique d'oeuvre littéraire ou de scénario original, écriture et réécriture, recherches et documentation), les frais éventuels de traduction, le versement de droits musicaux, les conseils juridiques ou encore les frais de repérage de tournage. Les dépenses de réalisation correspondent aux dépenses engagées pendant le tournage (salaires des artistes et techniciens, location de studios de tournage, construction de décors, costumes, effets spéciaux de tournage, dépenses de matériels techniques, etc.). Enfin, les dépenses de post-production concernent les frais de laboratoire, les travaux sur les images (étalonnage, effets spéciaux) et le son (montage, mixage), mais également les effets spéciaux numériques.
Le protocole d'accord précité du 16 décembre 2010 relatif à la transparence dans la filière cinématographique devrait constituer le fondement de l'accord prévu par l'article L. 213-25 nouveau, qui pourra être rendu obligatoire pour l'ensemble des professionnels intéressés par un arrêté du ministre en charge de la culture. À défaut d'accord dans un délai d'un an suivant la promulgation du présent texte, les dispositions prévues seront fixées par un décret en Conseil d'État.
Pour garantir la bonne information des parties, le nouvel article L. 213-26 précise que le contrat de production, le contrat de financement, ainsi que le contrat de production audiovisuelle comporteront une clause rappelant les obligations relatives à l'établissement et à la transmission du compte de production.
Une seconde sous-section porte sur l'audit des comptes de production. Son unique article L. 213-27 nouveau précise que le CNC peut, dans un délai de trois ans suivant la délivrance du visa d'exploitation, procéder ou faire procéder par un expert indépendant à un audit visant à contrôler la régularité et la sincérité du compte de production . Ce délai correspond au cycle d'exploitation d'une oeuvre cinématographique, de la salle à la diffusion par un service de vidéo à la demande par abonnement.
À cet effet, le producteur délégué devra transmettre au CNC ou à l'expert indépendant tous les documents ou pièces utiles à la réalisation de l'audit, dont les résultats lui seront transmis, ainsi qu'aux destinataires du compte de production.
En application du protocole d'accord étendu du 16 décembre 2010, le CNC diligente déjà chaque année des experts indépendants pour réaliser un audit comptable sur dix films ayant bénéficié d'une aide à la production.
La section 2 du nouveau chapitre III bis concerne la transparence des comptes d'exploitation. Elle comprend trois sous-sections, dont la première est relative aux obligations des cessionnaires de droits d'exploitation ou des détenteurs de mandats de commercialisation , avec les articles L. 213-28 à L. 213-31 nouveaux
Le nouvel article L. 213-28 prévoit que « tout cessionnaire de droits d'exploitation ou détenteur de mandats de commercialisation d'une oeuvre cinématographique de longue durée admise au bénéfice des aides financières à la production du Centre national du cinéma et de l'image animée doit, dans les six mois suivant la sortie en salles puis au moins une fois par an pendant la durée d'exécution du contrat conclu avec le producteur délégué, établir et transmettre à ce dernier le compte d'exploitation de cette oeuvre ».
Le compte d'exploitation doit indiquer : le montant des encaissements bruts réalisés par le cessionnaire de droits d'exploitation ou le détenteur de mandats de commercialisation, le prix payé par le public dans le cadre de l'exploitation en salles et de la vidéo à la demande à l'acte, le montant des coûts d'exploitation (coûts techniques, achats d'espaces publicitaires, la conception et tirage du matériel publicitaire, coût de promotion et de mission, etc.), celui de la commission retenue par le mandataire, l'état d'amortissement des coûts d'exploitation et des minimas garantis éventuellement consentis et le montant des recettes nettes revenant au producteur après rémunération du cessionnaire de droits d'exploitation ou du détenteur de mandats de commercialisation et déduction des coûts d'exploitation. Le montant des encaissements bruts réalisés, le prix payé par le public, le montant des coûts d'exploitation et le montant de la commission éventuellement retenue sont fournis pour chaque mode d'exploitation de l'oeuvre en France, ainsi que pour chaque territoire d'exploitation de l'oeuvre à l'étranger.
Le compte d'exploitation doit également faire mention des aides financières perçues (aides automatiques et sélectives à la distribution en salles ou en faveur des éditeurs vidéographiques et des éditeurs de vidéo à la demande) et des frais généraux supportés , à raison de l'exploitation de l'oeuvre, par le cessionnaire de droits d'exploitation ou par le détenteur de mandats de commercialisation. Pour mémoire, le cessionnaire de droits d'exploitation a conclu un contrat de cession ou de concession de droits d'exploitation avec le producteur pour une durée et des territoires donnés. Il exploite alors l'oeuvre pour son propre compte et encaisse les recettes d'exploitation correspondantes. Le producteur peut céder ses droits moyennant une somme forfaitaire et/ou un intéressement aux recettes. En revanche, dans le cadre d'un contrat de mandat conclu avec le producteur, le mandataire assure la commercialisation de l'oeuvre pour le ou les modes d'exploitation concernés au nom et pour le compte du producteur. Il se rémunère par une commission sur les recettes d'exploitation.
Le délai de six mois prévu par l'article L. 213-27 nouveau pour la transmission du compte d'exploitation correspond à un cycle moyen d'exploitation d'une oeuvre cinématographique en salle et un début d'exploitation en vidéo à la demande à l'acte. La fréquence annuelle paraît ensuite raisonnable ; elle est d'ailleurs retenue pour la fourniture, à l'auteur, par le producteur d'un état des recettes provenant de l'exploitation de l'oeuvre, au terme de l'article L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle.
Comme pour les comptes de production, le nouvel article L. 213-29 précise que « la forme du compte d'exploitation, ainsi que la définition des encaissements bruts, des coûts d'exploitation et des frais généraux d'exploitation sont déterminées par accord professionnel conclu entre les organisations représentatives des producteurs d'oeuvres cinématographiques de longue durée, les organisations professionnelles représentatives des cessionnaires de droits d'exploitation ou des détenteurs de mandats de commercialisation de ces oeuvres, les organismes professionnels d'auteurs et les sociétés de perception et de répartition des droits ». De la même manière, l'accord peut être rendu obligatoire à l'ensemble des intéressés par arrêté du ministre de la culture . À défaut, dans un délai d'un an, interviendra un décret en Conseil d'État.
Les obligations relatives au compte d'exploitation seront rappelées dans le contrat de cession de droits d'exploitation ou le contrat de mandat de commercialisation, afin de garantir l'information des parties (article L. 213-30 nouveau).
Les dispositions nouvelles concernant le contrat d'exploitation ne seront toutefois, aux termes de l'article L. 213-31 nouveau, pas applicables aux concessions de droits de représentation en salles de spectacles cinématographiques conclues entre distributeurs et exploitants de salles, ni aux cessions de droits de diffusion à un éditeur de services de télévision . En effet, la transparence des contrats de concession des droits de représentation cinématographique est déjà garantie par le contrôle des recettes d'exploitation réalisé par le CNC, tandis que les contrats de cession de droits de diffusion aux chaînes de télévision sont acquis pour un montant forfaitaire et ne donnent pas lieu à une commercialisation par les chaînes.
La deuxième sous-section porte sur les obligations du producteur délégué s'agissant du compte d'exploitation.
En application du nouvel article L. 213-32, il devra transmettre le compte d'exploitation , qui lui sera remis par le cessionnaire de droits d'exploitation ou par le détenteur de mandats de commercialisation, aux autres coproducteurs, aux entreprises avec lesquelles il est lié par un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d'exploitation, ainsi qu'aux auteurs avec lesquels il est lié par un contrat de production audiovisuelle.
Toutefois, si le producteur délégué exploite directement une oeuvre, il lui revient d'établir et de transmettre aux intéressés, selon des règles identiques à celles qui s'appliquent aux cessionnaires de droits d'exploitation et aux détenteurs de mandats de commercialisation, le compte d'exploitation (article L. 213-33 nouveau).
Le nouvel article L. 213-34 précise que « lorsqu'un contrat de cession de droits de diffusion d'une oeuvre cinématographique à un éditeur de services de télévision prévoit une rémunération complémentaire en fonction des résultats d'exploitation de cette oeuvre en salles de spectacles cinématographiques, le producteur délégué joint à la transmission du compte d'exploitation (...) les informations relatives au versement de cette rémunération ». Il peut s'agir, par exemple, des « primes au succès » prévues par les accords professionnels conclus entre les organisations de producteurs et les chaînes cinéma Canal + et OCS, qui consistent, pour une chaîne, à verser au producteur une rémunération complémentaire, en sus du montant initial des droits de diffusion, dès lors que l'oeuvre a dépassé un certain nombre d'entrées en salles.
Enfin, une troisième sous-section concerne l'audit des comptes d'exploitation.
À l'instar des comptes de production, le nouvel article L. 213-35 confie au CNC le soin de procéder ou de faire procéder par un expert indépendant à un audit du compte d'exploitation , en vue d'en contrôler la régularité et la sincérité. À cet effet, le cessionnaire de droits d'exploitation, le détenteur de mandats de commercialisation ou le producteur délégué dans le cadre d'une exploitation directe transmet au CNC ou à l'expert tous les documents ou pièces utiles à la réalisation de l'audit.
Le CNC transmet le rapport d'audit au cessionnaire de droits d'exploitation ou au détenteur de mandats de commercialisation, ainsi qu'au producteur délégué. Ce dernier est seul destinataire du rapport lorsqu'il se charge lui-même d'exploiter l'oeuvre. Il le transmet ensuite aux coproducteurs et à toute personne physique ou morale intéressée, en application d'un contrat, à l'exploitation de l'oeuvre.
Par ailleurs, en application de l'article L. 213-36 nouveau, lorsqu'un accord professionnel étendu relatif à la rémunération des auteurs comporte des stipulations relatives au coût de production, à son amortissement et aux recettes d'exploitation, le CNC peut procéder ou faire procéder à un audit du compte d'exploitation établi par le producteur délégué en application de cet accord, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 213-35 précité.
Lors de son audition, le CNC a indiqué viser l' audit d'environ cinquante films par an, soit un quart de la production de films d'initiative française , choisie de façon aléatoire. Or, l'exploitation des films pouvant être assurée par une ou plusieurs sociétés de distribution, trois sociétés devraient en moyenne être auditées par film, sur un prix de prestation, au regard des marchés passés par le CNC par le passé, d'une moyenne de 5 000 euros. Le coût total prévu serait donc de l'ordre de 600 000 euros par an à la charge de l'opérateur.
Un décret fixera les conditions d'application du chapitre III bis du code du cinéma et de l'image animée relatif à la transparence des comptes de production et d'exploitation créé par le présent article (article L. 213-37 nouveau).
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
À l'initiative de son rapporteur, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a apporté plusieurs éléments de précision au présent article :
- à l'article L. 213-28 nouveau, un nouvel alinéa a été inséré, visant à ce que « le montant des coûts d'exploitation ainsi que l'état d'amortissement de ces coûts mentionnés aux 3° et 5° ne (soient) indiqués que lorsqu'ils sont pris en compte pour le calcul du montant des recettes nettes revenant au producteur ».
En effet, si dans un modèle classique de partage des revenus d'exploitation entre le détenteur d'un mandat de commercialisation ou cessionnaire de droits d'exploitation et le producteur délégué, un certain nombre de coûts variables sont opposables par le mandataire (frais de sortie en salle pour le distributeur, frais d'édition de vidéo physiques pour le distributeur vidéographique, etc.) pour le calcul des recettes nettes revenant au producteur, tel n'est pas le cas, par exemple, d'une exploitation en vidéo à la demande (VàD), où le partage des revenus dépend du seul prix de vente au public ;
- au même article, l'état d'amortissement des coûts d'exploitation et des minimas garanties éventuellement consentis, ainsi que le montant des recettes revenant au producteur , dès lors que ces éléments sont individualisables , ont été intégrés aux informations devant figurer au compte d'exploitation.
Dans le cas contraire, lorsque, par exemple, le mandataire mutualise les risques en se donnant la possibilité de « compenser » entre eux les coûts et les résultats afférents aux différents modes d'exploitation couverts par le mandat, ces informations peuvent être fournies sans précision quant au territoire ou au monde d'exploitation.
- à l'article L. 213-31 nouveau, ont été exclus de l'obligation relative à l'établissement et à la transmission de comptes d'exploitation les éditeurs de services de télévision au titre des cessions de droits de diffusion conclues avec le producteur.
De fait, la diffusion télévisuelle d'une oeuvre ne générant pas de recettes d'exploitation dont les chaînes auraient à rendre compte au producteur délégué qui leur a cédé des droits de diffusion, cette obligation n'aurait pas eu de sens. En revanche, demeurent concernés par l'établissement d'un compte d'exploitation les mandataires ou cessionnaires de droits d'exploitation télévisuels, qui concluent des cessions de droits de diffusion pour des exploitations secondaires.
Au cours de la séance publique du 29 septembre dernier, la rédaction proposée pour l'article L. 213-31 nouveau a été, à nouveau, modifiée : désormais les dispositions relatives au compte d'exploitation ne sont applicables ni aux éditeurs de services de télévision s'agissant des cessions de droits de diffusion contribuant au financement de la production de l'oeuvre, ni aux salles de spectacles cinématographiques elles-mêmes pour les concessions de droits de représentation.
III. - La position de votre commission
La création d'une obligation de transparence des comptes de production et d'exploitation, contrôlée par le biais d'audits diligentés par le CNC et pouvant faire l'objet de sanctions administratives conformément à l'article 9 du projet de loi, devrait assurer une responsabilisation accrue de l'ensemble des acteurs de la filière cinématographique, placés dans une situation d'interdépendance économique. De fait, une transparence accrue est essentielle au regard du cas fréquent de financements s'appuyant sur un mécanisme de garanties croisées, où des mandats cédés sur plusieurs marchés (télévision, salle, vidéo, export) peuvent se compenser les uns les autres lorsqu'ils sont groupés par un même distributeur.
La mesure, qui représente le fruit d'une négociation de plusieurs mois entre les parties dans le cadre des Assises du cinéma, renforcera également la confiance réciproque des parties et permettra, en conséquence, de contribuer à l'amélioration des conditions de financement de la production en oeuvrant à la diversification des sources de financement et de garantir la remontée des recettes au bénéfice des différents acteurs de la chaîne de valeur en évitant la tendance de chacun à s'assurer une rémunération en amont de la sortie des oeuvres en salles afin de réduire leur risque. Cette tendance est par ailleurs source d'inflation des devis et de certaines rémunérations, au détriment du financement des oeuvres.
Votre commission y est donc favorable. Elle estime également, à l'instar de René Bonnell, que « l'harmonisation et l'accélération des rendus de compte accompliraient des progrès décisifs si était conçu, à cette fin, un logiciel commun à toute la profession, sur le modèle du logiciel ARECOA élaboré par des producteurs indépendants pour la télévision. (...) La conception finale d'un tel logiciel pourrait être prise en charge par le CNC. Certes la tâche n'est pas aisée car les montages financiers des films sont souvent complexes et singuliers. Ils comportent, pourtant, suffisamment de caractéristiques communes pour persévérer dans cette voie. Chacune des parties y gagnerait, notamment les sociétés de production mal outillées pour ce type d'exercice ». Elle estime enfin qu'une véritable transparence consisterait à ce que le CNC publie la liste des aides automatiques distribuées .
Votre commission a complété le présent article afin d' intégrer les auteurs au sens de l'article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle (auteur du scénario, de l'adaptation, des dialogues, le compositeur, le réalisateur, etc.) dans la liste des bénéficiaires des informations relatives aux comptes de production et d'exploitation (COM-8 et COM-321).
En outre, elle propose, afin de ne pas encadrer trop strictement la négociation interprofessionnelle prévue par l'article L. 213-29 nouveau s'agissant de la forme et du contenu du compte d'exploitation, de modifier l'article L. 213-28 nouveau afin de supprimer les précisions données sur ledit compte (COM-177) . Par ailleurs, les précisions relatives au compte d'exploitation se doivent d'être rédigées similairement à celles du compte de production, en modifiant à cet effet l'article L. 213-29 nouveau (COM-178).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 9 (art. L. 421-1 du code du cinéma et de l'image animée) - Sanctions des manquements aux obligations de transparence des comptes de production et d'exploitation des oeuvres cinématographiques de longue durée
I. - Le texte du projet de loi
En cohérence avec les obligations créées par l'article 8 du projet de loi concernant l'établissement et la transmission des comptes de production et d'exploitation, le présent article prévoit, pour en assurer le respect, l'application de sanctions administratives par la commission du contrôle de la réglementation (CCR) en cas de manquement.
À cet effet, sont insérés les 6 ter et 6 quater à l'article L. 421-1 du code du cinéma et de l'image animée. Le 6 ter intègre dans les manquements susceptibles d'être sanctionnés ceux relatifs à l'établissement et à la transmission du compte de production et du compte d'exploitation, ainsi que ceux qui concernent l'obligation d'information et la transmission du rapport d'audit. Le 6 quater cite, pour sa part, les manquements aux dispositions des accords interprofessionnels et décrets en Conseil d'État portant sur les comptes de production et d'exploitation et sur l'audit de ce dernier.
À l'instar des fautes pouvant déjà faire l'objet d'une sanction, les infractions aux dispositions de l'article 8 du projet de loi seront constatées par des agents assermentés et commissionnés du CNC, qui en dresseront le procès-verbal. À compter de sa notification, l'intéressé disposera de quinze jours pour faire état de ses observations au CNC. Le procès-verbal sera parallèlement communiqué au président du CNC, qui sera habilité à saisir la CCR, autorité administrative indépendante présidée par un magistrat de l'ordre administratif et composée de deux collèges distincts compétents pour des catégories différentes d'infractions. À l'issue d'une nouvelle procédure écrite contradictoire et, le cas échéant, d'une audition de l'intéressé, la CCR pourra prendre une décision administrative de sanction (avertissement, réduction ou remboursements des aides versées par le CNC, amende, fermeture temporaire d'établissement, exclusion du bénéfice des aides, etc.). Les sanctions pécuniaires viendront abonder le budget du CNC.
L'article 28 du projet de loi prévoit de modifier cette procédure par voie d'ordonnance, notamment en réservant la possibilité de saisine de la CCR à un rapporteur indépendant.
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.
III. - La position de votre commission
Votre commission a opéré une coordination nécessaire, s'agissant des sanctions pouvant être appliquées par le CNC, eu égard aux modifications qu'elle a apportées à l'article 8 du projet de loi (COM-10) .
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié .
Article 9 bis A (nouveau) (art. 43-1 de la loi n°1067 du 30 septembre 1986) - Définition du distributeur de programmes audiovisuels
Cet article, inséré par votre commission, sur proposition de notre collègue David Assouline et des membres du groupe socialiste ( COM-12 ) avec avis favorable de ses rapporteurs, vise à introduire une définition du distributeur de programmes dans la loi du 30 septembre 1986.
Cette définition qui figurerait dans un nouvel article 43-1 de la loi n°87-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, prévoit que le distributeur de programmes audiovisuels est la personne physique ou morale, à laquelle un ou plusieurs détenteurs de droits desdits programmes confient le mandat d'en assurer la commercialisation .
La rédaction proposée par cet article ne modifie pas le droit en vigueur mais permet de reconnaître une profession qui joue un rôle important dans le fonctionnement du marché de l'audiovisuel et qui est mentionnée en particulier dans les dispositions prévues par l'article 9 quater du présent projet de loi relatives à la transparence des comptes de production et d'exploitation des oeuvres audiovisuelles.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.
Article 9 bis (art. L. 132-25 et L. 132-25-1 du code de la propriété intellectuelle) - Champ des accords entre représentants des auteurs et des producteurs d'oeuvres audiovisuelles pouvant donner lieu à une extension par arrêté
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
À l'initiative de son rapporteur, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a introduit le présent article en vue d'adapter le champ des accords conclus entre les représentants des auteurs, les organisations professionnelles des producteurs et, le cas échéant, d'autres secteurs d'activité en lien avec la production audiovisuelle, pouvant être étendus par arrêté du ministre en charge de la culture.
Initialement, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 132-25 du code de la propriété intellectuelle, seuls les accords relatifs à la rémunération des auteurs conclus entres les organismes professionnels d'auteurs ou les sociétés de perception et de répartition des droits et les organisations représentatives d'un secteur d'activité pouvaient être rendus obligatoires pour l'ensemble des intéressés par arrêté du ministre de la culture.
Cette formulation s'est révélée à la fois trop restrictive et délicate à manipuler lors de procédures d'extension d'accords . En effet, une lecture juridique stricte peut inviter à réserver le bénéfice de l'extension par arrêté aux seuls articles d'un accord contenant des chiffres et des pourcentages en relation directe avec la rémunération des auteurs , alors que celle-ci peut être influencée par d'autres types de dispositions.
Le risque est alors de ne pouvoir étendre un accord que partiellement , alors que ses dispositions sont fréquemment inséparables et insécables. De fait, certains accords collectifs n'ont pu être étendus, à l'instar de celui relatif aux pratiques contractuelles en matière de documentaires, ou ont du faire l'objet d'arrêtés modificatifs ultérieurs, comme l'accord signé en 2013 entre auteurs scénaristes et producteurs de fiction, cette dernière solution faisant peser une insécurité juridique certaines sur l'extension.
Pour remédier à ce risque, le 1° du présent article supprime le dernier alinéa susmentionné de l'article L. 132-25 du code de la propriété intellectuelle, que son 2° remplace par un article L. 132-25-1 nouveau. Celui-ci prévoit de pouvoir étendre par arrêté du ministre en charge de la culture les accords relatifs non seulement à la rémunération des auteurs, mais également aux pratiques contractuelles ou aux usages professionnels entre auteurs et producteurs. Dès lors, il est prévu que les organisations professionnelles représentatives des producteurs soient obligatoirement signataires des accords ainsi étendus, afin que la profession ne se voit pas imposer des règles qu'elle n'aurait pas approuvées dans le cadre d'un accord initial.
Au cours de sa séance publique du 29 septembre 2015, l'Assemblée nationale a adopté la rédaction issue des travaux de sa commission des affaires culturelles sans modification.
II. - La position de votre commission
Il n'apparaît pas incohérent à votre commission qu'un arrêté ministériel puisse procéder à l'extension intégrale des accords collectifs signés entre les représentants des auteurs et des organisations représentatives d'un secteur d'activité.
La rédaction proposée ne fait, en outre, pas fi de la nécessité de devoir compter, parmi les signataires de l'accord, les organisations représentatives des parties et offre une garantie juridique appréciable pour les syndicats signataires. En cas de non-extension d'un accord collectif, il sera, par ailleurs, toujours possible aux adhérents d'un syndicat signataire d'en démissionner, afin de ne pas avoir à l'appliquer.
L'extension du champ de l'extension par arrêté représente donc une sécurité apportée à la négociation et aux accords collectifs, qu'il est utile d'encourager pour favoriser la diffusion de bonnes pratiques contractuelles.
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 9 ter (nouveau) (art. L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle) - Information des auteurs en cas de cession d'une oeuvre audiovisuelle
Dans la rédaction actuelle de l'article L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle, le producteur est tenu de fournir à l'auteur et aux co-auteurs, au moins une fois par an, un état des recettes provenant de l'exploitation de l'oeuvre au titre de chaque mode d'exploitation. Cette information peut être complétée, à la demande de l'auteur ou des co-auteurs, des justificatifs correspondants, notamment la copie des contrats de cession de tout ou partie des droits.
Or, en pratique, les auteurs et co-auteurs ne sont souvent pas informés des cessions intervenues sur leurs oeuvres , y compris lorsqu'elles ont pour effet de transmettre la totalité des obligations d'un contrat à un tiers, avec lequel les auteurs se trouvent alors liés.
En outre, le cédant peut n'avoir pas respecté son obligation de rendre compte et de verser les droits au titre des exploitations qu'il a initiées. Les auteurs rencontrent alors les plus grandes difficultés à exiger de lui le respect d'obligations dont il n'est plus, en principe, débiteur une fois le contrat cédé. Le cessionnaire est également susceptible de se trouver confronté à des revendications de la part des auteurs sans qu'il en ait été informé par le cédant.
Il apparaît donc nécessaire, pour assurer la sécurité juridique des auteurs et la transparence des comptes, que, en complétant l'article L. 132-28 précité, le cédant ait l'obligation d'informer, en amont, les auteurs et les co-auteurs de la prochaine cession de leur contrat (COM-179) , afin de permettre à ces derniers d'engager, le cas échéant, les démarches relatives au respect de ce contrat par le cédant. L'obligation d'information devant figurer sur les contrats de production audiovisuelle, le juge pourrait être saisi de tout manquement au respect de cette clause.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé .
Article 9 quater (nouveau) (art. L. 251-1 à L. 251- 13 et L. 421-1 du code du cinéma et de l'image animée) - Transparence des comptes de production et d'exploitation des oeuvres audiovisuelles
La commission a adopté un amendement de notre collègue David Assouline et des membres du groupe socialiste ( COM-15) , sous-amendé par le sous-amendement COM-322 de vos rapporteurs, insérant un nouveau titre V au sein du code du cinéma et de l'image animée, consacré à la transparence des comptes de production et d'exploitation des oeuvres audiovisuelles.
Ce nouveau titre crée en particulier treize nouveaux articles dans le code du cinéma et de l'image animée .
Les dispositions de ce nouvel article 9 quater constituent le pendant, pour les oeuvres audiovisuelles, des dispositions adoptées à l'article 8 concernant la transparence des comptes de production et d'exploitation des films de cinéma qui font suite au rapport de René Bonnell.
Vos rapporteurs ont déjà eu l'occasion de préciser que la création d'une obligation de transparence des comptes de production et d'exploitation était de nature à assurer une responsabilisation accrue de l'ensemble des acteurs de la filière cinématographique placés dans une situation d'interdépendance économique . Ils partagent le même état d'esprit concernant ces dispositions « miroir » relatives aux comptes de production et d'exploitation concernant les oeuvres audiovisuelles.
Le nouvel article L. 251-1 du code du cinéma et de l'image animée prévoit une obligation de transmission du compte de production de l'oeuvre par le producteur ayant bénéficié des aides financières à la production du CNC à l'ensemble des partenaires (financeurs, diffuseurs, auteurs, éditeurs concessionnaires...).
Le nouvel article L. 251-2 prévoit que les modalités du compte de production sont définies par un accord professionnel qui associe les producteurs, les distributeurs, les éditeurs de services de télévision, les auteurs et les sociétés de perception et de répartition des droits des auteurs. À défaut d'accord professionnel rendu obligatoire dans l'année suivant la publication de la présente loi, les modalités du compte seront définies par décret en Conseil d'État.
Le nouvel article L. 251-3 prévoit que le contrat de coproduction, le contrat de financement, les contrats conclus avec les auteurs ou toute autre personne physique ou morale bénéficiant d'un intéressement aux recettes d'exploitation de l'oeuvre comporte une clause rappelant les obligations de l'article L. 251-1.
Le nouvel article L. 251-4 reconnaît la possibilité au CNC de procéder dans les trois années suivant la date d'achèvement de l'oeuvre audiovisuelle à un audit du compte de production .
Le nouvel article L. 251-5 prévoit d' obliger les distributeurs à transmettre au producteur délégué le compte d'exploitation des oeuvres . Suite à l'adoption du sous-amendement COM-322 de votre rapporteur, les dispositions précisant les détails du compte d'exploitation ont été supprimées et renvoyées à un décret.
Le nouvel article L. 251-6 prévoit que la forme du compte d'exploitation et - selon les termes du sous-amendement COM-322 - la définition des différentes catégories qui le composent, ainsi que les conditions dans lesquelles est négociée la commission opposable, sont déterminées par accord professionnel conclu par les représentants des producteurs, des distributeurs, des éditeurs de services de télévision, des auteurs et des sociétés de perception et de répartition des droits des auteurs. L'accord peut être rendu obligatoire à l'ensemble des intéressés du secteur par arrêté. À défaut d'accord, dans un délai d'un an à compter de la publication de la présente loi, la forme du compte d'exploitation, la définition des encaissements bruts et des coûts d'exploitation ainsi que les conditions dans lesquelles est négociée la commission opposable seront fixées par décret en Conseil d'État.
Le nouvel article L. 251-7 prévoit que la cession des droits d'exploitation ou le contrat de mandat de commercialisation comporte une clause rappelant les obligations relatives à la transmission du compte d'exploitation prévue par l'article L. 251-5.
Le nouvel article L. 251-8 prévoit que les obligations prévues à l'article L. 251-5 précité ne sont pas applicables aux éditeurs de services de télévision et aux éditeurs de services de médias audiovisuel à la demande (SMAD) au titre des acquisitions de droits de diffusion ou de mise à disposition du public sur les services qu'ils éditent réalisés en contrepartie d'un prix forfaitaire et définitif.
Le nouvel article L. 251-9 prévoit d'appliquer la même obligation de transmission du compte d'exploitation par le producteur délégué aux autres coproducteurs, aux entreprises avec lesquelles il est lié par un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d'exploitation, aux auteurs et, le cas échéant, aux éditeurs concessionnaires des droits d'adaptation audiovisuelle d'une oeuvre imprimée.
Le nouvel article L. 251-10 prévoit que l'obligation d'établir un compte d'exploitation s'impose aussi au producteur délégué qui exploite directement une oeuvre audiovisuelle par un ou plusieurs modes d'exploitation. Ce compte d'exploitation est transmis aux autres coproducteurs, aux entreprises avec lesquelles il est lié par un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d'exploitation.
Le nouvel article L. 251-11 prévoit que le CNC peut procéder ou faire procéder par un expert indépendant à un audit du compte d'exploitation ayant pour objet de contrôler la régularité et la sincérité du compte . Le rapport d'audit est transmis au distributeur, au producteur délégué, aux autres coproducteurs ainsi qu'aux éditeurs de services de télévision qui ont contribué au financement de la production de l'oeuvre. L'article prévoit également les conditions de sanction lorsque l'audit révèle un manquement.
Le nouvel article L. 251-12 prévoit les conditions dans lesquelles le CNC peut faire procéder à un audit du compte d'exploitation établi par le producteur délégué en application d'un accord interprofessionnel obligatoire prévoyant notamment la définition du coût de production d'une oeuvre audiovisuelle.
Un second paragraphe complète l'article L. 421-1 du code du cinéma et de l'image animée qui définit les cas dans lesquels des sanctions administratives peuvent être prononcées à l'encontre des personnes ayant méconnu des obligations qui leur incombent afin de tenir compte des nouveaux impératifs prévus par le présent article.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.
Article 10 (art. L. 212-32, L. 212-33, L. 212-33-1 et L. 212-34 nouveaux et L. 213-21 du code du cinéma et de l'image animée) - Contrôle des recettes d'exploitation cinématographique et échanges d'informations relatives à la projection numérique des oeuvres cinématographiques en salle
I. - Le texte du projet de loi
Le présent article modifie, dans son I, les dispositifs de contrôle des recettes d'exploitation cinématographique et précise, dans son II, l'organisation et les destinataires des échanges d'informations relatives à la projection numérique des oeuvres cinématographiques en salles.
Les mesures figurant au I et visant à compléter l'article L. 212-32 du code du cinéma et de l'image animée sont, pour l'essentiel, prévues dans la réglementation au sein de la section 7 relative au contrôle des recettes d'exploitation cinématographique du chapitre 2 du titre 1 er du Livre II de la partie réglementaire du même code, soit aux articles D. 212-67 à D. 212-89. De fait, l'encadrement juridique du contrôle des recettes d'exploitation des oeuvres cinématographiques , qui constitue le fondement des mécanismes de remontée de ces recettes vers le CNC comme vers les ayants droit, est au coeur de l'activité de l'opérateur depuis sa création. Il a fait l'objet d'une premier modernisation en 2009 lors de l'édiction de la partie législative du code du cinéma et de l'image animée et de la publication de son décret d'application n° 2009-1254 du 16 octobre 2009, codifié aux articles D. 212-67 à D. 212-89 précité.
La taxe sur les entrées en salle Cette taxe, assise sur les recettes de la billetterie des salles de cinéma , est recouvrée et contrôlée directement par le CNC. Son taux est établi 10,72 % en métropole et à 1 % dans les départements d'Outre-mer, auxquels le périmètre de la taxe sera étendu au 1 er janvier 2016, en application de la loi de finances rectificative pour 2014. La diffusion en salle de cinéma étant un marché d'offre, ses résultats sont difficilement prévisibles au-delà d'un horizon de six mois correspondant au calendrier connu des sorties de films. Il est néanmoins possible de tirer de l'analyse des années précédentes des tendances et d'en déduire des projections pour l'avenir. Dès lors, les prévisions de rendement pour 2016 reposent sur une hypothèse de fréquentation globale annuelle de 198,3 millions d'entrées , dont 195 millions en métropole (moyenne de la fréquentation des dix dernières années) et 3,3 millions dans les départements ultramarins. S'agissant du prix moyen du billet, l'hypothèse retenue s'établit à 6,44 euros en métropole et 6,58 euros Outre-mer. Ces prévisions conduisent à estimer le produit de la taxe à 134,8 millions d'euros en 2016 , dont 217 000 liés à son extension aux départements d'Outre-mer. Cette stabilité devrait se confirmer dans les années à venir. |
Or, il est apparu que la base légale de ces dispositions , qui précisent les contraintes reposant sur les exploitants quant à la manière dont fonctionne et dont est tenue leur billetterie, ainsi que leurs obligations de transmission régulière d'informations, devaient ressortir du niveau législatif et non pas de la partie réglementaire. En effet, en application de l'article 34 de la Constitution, relèvent du domaine de la loi, au titre de la garantie des libertés publiques , toute disposition imposant une contrainte à un professionnel ou à individu.
À cet effet, le A du I complète l'article L. 212-32 relatif au contrôle des recettes d'exploitation cinématographique et en modernise certains termes.
Le 1° remplace le mot « billet » par le mot « droit » afin que les recettes prises en compte ne se limitent pas à la seule vente de billets imprimés mais concernent également les titres d'entrée dématérialisés.
Le 2° élargit l'obligation de transmission hebdomadaire, au CNC, de la déclaration des recettes réalisées par l'exploitant pour chaque programme aux distributeurs et à la SACEM. Il permet également que cette transmission aux distributeurs et à la SACEM soit réalisée par le CNC lui-même en lieu et place de l'exploitant.
Enfin, le 3° fait remonter dans la partie législative du code les obligations suivantes, relatives au contrôle des outils de vente et d'émission des titres d'entrée :
- les fabricants, les importateurs et les marchands de billets déclarent au CNC la livraison de ces billets aux établissements ;
- les constructeurs et les fournisseurs de systèmes informatisés de billetterie les font homologuer par l'opérateur, sur la base de leur conformité à un cahier des charges, et lui en déclarent la livraison aux établissements ;
- les installateurs des systèmes précités déclarent au CNC leur installation dans les établissements, ainsi, à l'instar des exploitants, que l'état des compteurs de numérotation lors de toute mise en service, tout changement de lieu d'implantation ou toute modification technique nécessitant l'intervention du constructeur ou du fournisseur.
Le B du I complète, pour sa part, la section 7 du chapitre II du titre I er du livre II du code du cinéma et de l'image animée précitée par deux articles L. 212-33, qui reprend également des dispositions figurant dans la partie réglementaire du même code, et L. 212-34.
L'article L. 212-33 nouveau précise que le droit d'entrée à une séance est individuel et sa tarification est organisée en catégories selon des modalités fixées par voie réglementaire. Sauf exception, un droit d'entrée non dématérialisé ne peut être délivré hors d'un établissement. Quelle que soit sa forme, il doit être conservé par le spectateur jusqu'à la fin du spectacle.
L'article L. 212-34 nouveau renvoie au pouvoir réglementaire le soin de fixer les modalités d'application de la section 7 susmentionnée ainsi complétée.
Le II du présent article complète, quant à lui, avec des dispositions nouvelles, l'article L. 213-21, introduit dans le code par la loi n° 2010-1149 du 30 septembre 2010 relative à l'équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques, qui dispose que « les exploitants d'établissements de spectacles cinématographiques transmettent aux distributeurs les données extraites des journaux de fonctionnement des équipement de projection numérique relative à l'exploitation des oeuvres cinématographiques de longue durée que ces distributeurs ont mis à leur disposition. » Les données relatives à l'utilisation de l'ensemble des équipements de projection numérique sont également transmises au CNC. Cette double obligation vise à assurer la transparence de la programmation des films en salles, ainsi que, en matière d'exploitation numérique, l'efficacité de la remontée comme la sincérité des recettes d'exploitation.
Elle n'a cependant jamais été mise en oeuvre, en raison de difficultés techniques. Pour remédier à ce blocage, le CNC a diligenté une mission d'évaluation puis une mission de maîtrise d'oeuvre, afin de concevoir et organiser les modalités pratiques d'une transmission et d'une interprétation automatisées de données. Ces travaux ont mis en lumière la nécessité d'imposer des obligations de transmission de données accessoires, mais indispensables pour l'interprétation des données extraites des journaux de fonctionnements, à la charge d'autres professionnels que les exploitants d'établissements de spectacles cinématographiques.
Dès lors, outre le 1°, qui, comme pour la déclaration de recettes hebdomadaire de l'exploitant qui peut être transmise aux distributeurs et à la SACEM par le CNC, permet à l'opérateur de se charger de la transmission des données extraites des journaux de fonctionnement des équipements de projection numérique en lieu et place de l'exploitant, le 2° impose aux exploitants de transmettre au CNC les certificats de ces équipements . En outre, les distributeurs et les régisseurs de messages publicitaires qui mettent à la disposition des exploitants des oeuvres sous forme numérique ou les laboratoires qui réalisent ces fichiers pour le compte des distributeurs et des régisseurs sont tenus de transmettre au CNC les identifiants universels uniques, ainsi que les numéros internationaux normalisés de ces oeuvres.
Les modalités relatives à la mise en oeuvre de ces nouvelles obligations, qui porteront sur l'ensemble des exploitants et des distributeurs puisque l'intégralité des salles françaises est équipée pour la projection numérique, seront fixées par décision du président du CNC.
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
À l'initiative de son rapporteur, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a permis, à l'article L. 212-32 du code du cinéma et de l'image animée, que la SACEM ne soit pas l'unique société de perception et de répartition des droits musicaux à être récipiendaire des bordereaux de recettes hebdomadaires transmises directement par les exploitants de salles ou via le CNC, afin de ne pas créer un régime de gestion collective obligatoire pour les droits musicaux dans les salles.
En outre, à l'initiative du Gouvernement, elle a introduit un article L. 212-33-1 nouveau au sein du même code visant à interdire la diminution artificielle du prix du droit d'entrée, soit en raison d'une vente liée (achat groupé d'un billet avec une boisson ou une confiserie par exemple ), soit par la facturation de frais de réservation ou de vente en ligne. Il s'agit de préserver la sincérité de l'assiette applicable à la taxe spéciale additionnelle (TSA) versée au CNC sur le montant des recettes réalisées sur les entrées en salles, comme à la rémunération des titulaires de droits.
Puis, au cours de sa séance publique du 29 septembre 2015, l'Assemblée nationale a procédé à deux modifications rédactionnelles au présent article.
III. - La position de votre commission
Le présent article est majoritairement constitué de dispositions figurant déjà dans la partie réglementaire du code du cinéma et de l'image animée . D'ailleurs, son contenu figurait originellement à l'article 28, visant à habiliter le Gouvernement à introduire des dispositions nouvelles dans la partie législative dudit code, mais le Conseil d'État a considéré que son niveau de précision justifiait un article à part entière dans le projet de loi.
Les mesures nouvelles, notamment celle introduite par l'Assemblée nationale dans le cadre de l'article L. 212-33-1 nouveau relatif aux ventes liées, apportent une clarification utile dans le calcul et la remontée des recettes d'exploitation . Si des interrogations ont pu naître, s'agissant de ce dispositif, quant à la prise en compte des frais de vente ou de réservation en ligne, il apparaît que leur fondement est largement exagéré. En effet, avec un taux moyen d'occupation des salles de 16 %, la réservation de billets en ligne reste un phénomène minoritaire.
Reste que la rédaction proposée pour l'article L. 212-34 nouveau n'est guère satisfaisante. Il convient de la modifier afin de la limiter à un renvoi, sans précision inutile, à un texte réglementaire (COM-180).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 10 bis (art. L. 234-1 du code du cinéma et de l'image animée) - Limitation à trois ans de la validité de l'arrêté d'extension des accords professionnels relatifs à la chronologie des médias
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
À l'initiative du Gouvernement, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a introduit le présent article, qui vise à compléter l'article L. 234-1 du code du cinéma et de l'image animée relatif à l'extension par arrêté du ministre en charge de la culture des accords professionnels portant sur l'exploitation des oeuvres cinématographiques sur les services de médias audiovisuels à la demande (SMAD) et sur les services de télévision.
En application de la directive 97/36/CE du 30 juin 1997, « la question des délais spécifiques à chaque type d'exploitation télévisée des oeuvres cinématographiques doit, en premier lieu, faire l'objet d'accords entre les parties intéressées ou les milieux professionnels concernés ». En revanche, la fixation des délais applicables à la vidéo et à la vidéo à la demande ressort de la compétence du législateur, qui en a fait d'ailleurs usage lors de l'examen de la loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet.
Ces accords professionnels, étendus par arrêté, constituent le fondement de la chronologie des médias, dont le principe repose sur la cohérence et la proportionnalité des différentes fenêtres d'exploitation par rapport au poids et aux obligations de chacun dans le préfinancement des oeuvres.
La chronologie des médias La loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet (dite loi Hadopi) a renouvelé les bases juridiques du dispositif, désormais prévu aux articles L. 231-1 à L. 234-2 du code du cinéma et de l'image animée. Concernant l'exploitation sous forme de vidéogrammes, le délai minimum, fixé par la loi a été avancé à quatre mois après la date de sortie en salles, contre six mois, en pratique, dans le régime précédent. Une possibilité de dérogation, accordée par le président du CNC, est prévue pour l'application contractuelle d'un délai inférieur, lorsque le film concerné enregistre moins de 200 entrées au cours de sa quatrième semaine d'exploitation. Les délais d'exploitation sur les services de médias audiovisuels à la demande (SMAD) et de télévision ont été fixés par l'accord professionnel étendu du 6 juillet 2009 conformément à la directive 2007/65/CE du 11 décembre 2007 dite « Services de médias audiovisuels » et aux accords de l'Élysée. Ces délais sont de dix mois pour une chaîne payante ayant signé un accord avec les organisations du cinéma, de douze mois pour la télévision payante en générale, de vingt-deux mois pour une chaîne coproductrice, de trente mois pour toute autre chaîne, de trente-six mois pour la VàD par abonnement et de quarante-huit mois pour la VàD gratuite. Faute d'avoir été dénoncé par une ou plusieurs organisations professionnelles représentatives dans un délai de trois mois avant sa date d'échéance, l'accord du 6 juillet 2009, initialement conclu pour trois ans, est reconduit tacitement chaque année. Source : CNC |
L'évolution de la chronologie a fait l'objet de négociations sous l'égide du CNC dès le premier trimestre 2012. Ces discussions ont été gelées à compter de l'été 2012 , dans le contexte de la mise en place de la mission confiée par le Gouvernement à Pierre Lescure concernant l'acte II de l'exception culturelle, dont la remise du rapport en mai 2013 a permis de relancer les échanges.
En 2014, le CNC a rencontré formellement l'ensemble des organisations professionnelles et sociétés signataires de l'accord du 6 juillet 2009, la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) et la Société civile des auteurs, réalisateurs et producteurs (ARP). Durant cette phase d'échanges bilatéraux , il a recueilli les positions des professionnels et sondé auprès d'eux, de manière confidentielle, les principales hypothèses de travail relatives aux évolutions de l'accord.
À l'issue de ce processus, lors d'une seconde phase de négociations, le CNC a soumis aux signataires potentiels plusieurs projets d'avenant à l'accord actuel. Le dernier date de janvier 2015 et envisage les évolutions suivantes :
- l'amélioration des conditions de dérogation automatique à trois mois pour la vidéo et la vidéo à la demande (VàD), élargie aux films ayant fait moins de 20 000 entrées cumulées au cours des quatre premières semaines d'exploitation et moins de 1 000 entrées sur la quatrième semaine ; soit environ 40 % des films sortant en salles chaque année ;
- l'avancement de deux mois de l'ensemble des fenêtres des chaînes de télévision ;
- la mise en place d'un principe de « fenêtres glissantes », par dérogation automatique : le glissement pourrait aller jusqu'au début de la fenêtre précédente, pour les seuls films ayant réalisé moins de 200 000 entrées, et sans diffuseurs avérés sur la fenêtre précédente ;
- la limitation du « gel des droits » pour la VàD à l'acte, selon des modalités en cours de discussion avec les chaînes de télévision ;
- l'exclusion du court métrage de l'accord.
Les discussions ont été suspendues durant les négociations professionnelles de deux accords : l'un entre les organisations professionnelles du cinéma et Canal+, l'autre entre ces mêmes organisations et OCS. Après leurs conclusions respectives, les échanges relatifs à l'accord chronologie des médias ont repris et se poursuivent durant le dernier trimestre 2015.
En vue d'inciter fortement les parties à trouver rapidement un accord, le rapporteur de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale avait initialement envisagé de limiter à trois ans la durée des accords professionnels relatifs à la chronologie des médias . Dès lors, celui de 2009 devenait immédiatement caduc à la date de la promulgation du présent texte en 2016, forçant ainsi les professionnels à s'entendre avant cette date.
A été préférée à cette solution la rédaction proposée par le Gouvernement, qui consiste à appliquer le délai maximum de trois ans à la validité de l'arrêté ministériel d'extension et non à l'accord lui-même. Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, justifiait ainsi sa position devant la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale : « Je suis effectivement favorable au renforcement de la clause de rendez-vous de l'accord professionnel relatif à la chronologie des médias. Toutefois, je crois qu'il faut veiller à ne pas prendre le risque d'une absence, même temporaire, d'accord collectif, qui entraînerait un retour automatique à la fixation de la chronologie par le contrat individuel. Ce serait, à mon avis, extrêmement préjudiciable aux différents intérêts en présence et, probablement, source de déstabilisation de la filière cinématographique ».
Au cours de sa séance publique du 29 septembre 2015, l'Assemblée nationale a adopté la rédaction issue des travaux de sa commission des affaires culturelles sans modification.
II. - La position de votre commission
Votre commission est convaincue de l'intérêt de faire évoluer la chronologie des médias par la conclusion d'un nouvel accord, en vue d'améliorer l'offre légale disponible et de renforcer les possibilités d'exploitation des oeuvres . Elle est donc favorable à l'esprit du présent article , qui reprend notamment les recommandations des rapports Lescure de 2013 et Bonnell de 2014, qui invitaient à sortir de l'inertie.
Toutefois, elle s'étonne de l'argumentation développée par la ministre de la culture et de la communication à l'Assemblée nationale car la limitation à trois ans, qu'elle s'applique à l'accord de 2009 ou à son arrêté d'extension, ne modifie en rien le fait qu'une négociation devra aboutir avant la promulgation du présent texte . En effet, la caducité de l'arrêté précité rendra, quoi qu'il en soit, l'accord de 2009 difficilement applicable. Dès lors, quelle que soit la terminologie choisie, un nouvel accord devra être négocié avant l'été, calendrier probable de ladite promulgation.
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 10 ter (art. L. 421-1 du code du cinéma et de l'image animée) - Coordination
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Le présent article, intégré par la commission des affaires culturelles à l'initiative de son rapporteur, modifie l'article L. 421-1 du code du cinéma et de l'image animée, relatif aux sanctions administratives, afin de tenir compte des dispositions figurant à l'article 10.
Outre les modifications apportées à l'article L. 212-32 s'agissant du contrôle des recettes des oeuvres cinématographiques dans les établissements de spectacles cinématographiques, l'article 10 créé les articles L. 212-33 relatif à la délivrance et à la tarification du droit d'entrée et L. 212-34 renvoyant à un texte réglementaire les modalités d'application de l'ensemble des dispositions relatives au contrôle des recettes d'exploitation cinématographique. Le non-respect de ces dernières pourra donc faire l'objet d'une sanction administrative aux termes de l'article L. 421-1.
II. - La position de votre commission
Il convient en réalité d'intégrer à l'article L. 421-1 du code du cinéma et de l'image animée, outre les deux premiers alinéas de l'article L. 212-33 nouveau, non pas l'article 212-34 nouveau, qui renvoie à un texte réglementaire, mais l'article L. 212-33-1 nouveau, intégré en séance publique à l'article 10 du projet de loi, qui créé de nouvelles obligations pour les exploitants de salles s'agissant des ventes liées (COM-181).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 10 quater (nouveau) (articles L. 136-1 à L. 136-3 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) - Rémunération des photographes et plasticiens dont les oeuvres sont reproduites par des services de moteur de recherche et de référencement sur Internet
Adopté par votre commission à l'initiative de ses rapporteurs, cet article additionnel vise à assurer la rémunération des auteurs d'oeuvres d'art plastiques, graphiques et photographiques ou de leurs ayants droit pour les images que les moteurs de recherche et de référencement mettent à la disposition des internautes sans avoir obtenu d'autorisation préalable ( COM-182 ).
Ces pratiques échappent jusqu'à présent à toute rétribution, à l'inverse des banques d'images, qui offrent un service payant aux utilisateurs et rémunèrent les auteurs des oeuvres reproduites. Les services de recherches d'images reproduisent sur leurs serveurs les pages des sites web incluant des images fixes, les indexent et les offrent aux internautes en fonction de leurs recherches par mots-clés, leur donnant la possibilité de visualiser et de copier les images en format « vignette » ou en format non réduit, hors de tout contexte des sites d'origine. Dans la plupart des cas, les actes de reproduction et de mise à la disposition du public des images fixes ne sont ni autorisés par les ayants droit, ni rémunérés, avec des conséquences en termes de précarité sur la situation des auteurs d'oeuvres d'art, en particulier des photographes.
Le présent article instaure un système de gestion de droits obligatoire , qui devrait permettre de rétribuer les auteurs, tout en garantissant une sécurité juridique aux éditeurs des services de moteur de recherche et de référencement dont l'activité sur Internet n'est pas remise en cause.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé .
Article 10 quinquies (nouveau) (Art. 27 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986) - Fixation à 60 % du quota de production indépendante
Le présent article est le fruit de l'amendement ( COM-185 ) présenté par vos rapporteurs, qui vise à fixer à au moins 60 % le niveau du quota de production indépendante pour les diffuseurs publics comme privés .
Cette disposition s'inscrit dans le droit fil des propositions faites par votre commission dans le cadre du groupe de travail sur les relations entre les producteurs audiovisuels et les éditeurs de services de télévision, dont le rapporteur était notre collègue Jean-Pierre Plancade 19 ( * ) . La majorité des membres du groupe de travail proposait en effet de porter à 50 % le quota de part dépendante, ce qui constitue un niveau plus élevé que celui proposé par votre rapporteur 20 ( * ) .
Les recommandations du rapport Plancade : « Un assouplissement du quota d'indépendance » 21 ( * ) « Votre groupe de travail considère que le retour des « parts de copro » ne suffira pas, à lui seul, à répondre aux défis qui attendent l'audiovisuel français. Il considère que l'on est devant une alternative : - soit l'on reste dans le système actuel de l'éparpillement des structures de production, avec certes une incitation des chaînes à avoir plus d'audace grâce aux parts de coproducteurs, mais un risque que cela soit insuffisant face aux rouleaux compresseurs américains (Apple, Netflix, Amazon) qui débarqueront demain sur nos écrans de télévision, comme ils ont débarqué sur le marché de la musique et du livre en ligne ; - soit l'on souhaite réellement structurer le marché de la production en France et dans ce cas l'idéal serait que soient créés quelques grands pôles (autour des chaînes de télévision ou non), susceptibles de tenir un rang dans la compétition mondiale des programmes, tout en maintenant une production indépendante à un niveau élevé afin de préserver l'innovation et la diversité dans la production audiovisuelle. Il a la conviction que si notre tissu industriel n'est pas construit pour le marché domestique, il le sera encore moins, demain, dans un monde où la concurrence sera internationale. Il faut donc laisser aux diffuseurs le choix : travailler avec des producteurs indépendants ou internaliser une partie de leur production, selon des stratégies propres d'optimisation du financement des oeuvres. Votre rapporteur a donc suggéré au groupe de travail que soit diminué le quota de production indépendante pour l'ensemble des diffuseurs, publics comme privés. Tous les membres se sont pleinement accordés sur cet objectif. Un long débat a cependant eu lieu, au sein du groupe de travail, sur l'importance de cette baisse du quota. (...) Votre rapporteur, rejoint par une partie du groupe de travail, estime que l'on pourrait assez simplement s'orienter vers une baisse du quota à 50 % pour tous les diffuseurs. Il ne souhaite pas, avec une telle suggestion, remettre en cause le « modèle français » reposant sur la production indépendante. En effet : - d'une part, le taux de 50 % reste élevé (il est de 10 % en Angleterre) ; - et, d'autre part, il est convaincu que le choix sera fait par la plupart des chaînes de prolonger le partenariat qu'elles ont avec les producteurs. Ainsi une chaîne comme NRJ 12, qui a une obligation à 70 %, connaît de facto un taux de production indépendante de 90 %. Il a en revanche comme objectif assumé d'enclencher (enfin) une recomposition du marché de la production audiovisuelle autour d'acteurs moins nombreux et plus solides. Une telle liberté laissée aux diffuseurs encouragera en effet forcément des rachats de sociétés de production par les chaînes et, pour répondre à cette conséquence, des regroupements de producteurs indépendants ». |
Comme l'expliquait notre collègue Jean-Pierre Plancade dans son rapport, la hausse de la part dépendante doit permettre d'engager une véritable restructuration du marché de la production audiovisuelle de nature à permettre un meilleur équilibre et l'émergence de groupes audiovisuels français de taille européenne.
Cette évolution n'aura pas pour conséquence, selon vos rapporteurs, de limiter la créativité ou l'autonomie des sociétés de production puisque ces dernières devront pouvoir continuer à travailler avec l'ensemble des diffuseurs, ce qui nécessitera de la part des diffuseurs des engagements sur le respect de l'autonomie de leurs filiales 22 ( * ) .
Le maintien d'un quota de 60% de production indépendante apparaît, par ailleurs, comme une garantie forte permettant d' assurer le maintien d'un tissu important de sociétés de production indépendantes qui constitue une caractéristique du modèle français .
L'amendement COM-185 prévoit à cette fin de modifier le premier alinéa du 3° de l'article 27 de la loi n° 86 -1067 du 30 septembre 1986. Cet alinéa dispose que des décrets en Conseil d'État, dits « décrets Tasca », peuvent fixer des obligations concernant la contribution des éditeurs de services au développement de la production, en tout ou partie indépendante à leur égard, d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, ainsi que la part de cette contribution ou le montant affectés à l'acquisition des droits de diffusion de ces oeuvres sur les services qu'ils éditent, en fixant, le cas échéant, des règles différentes pour les oeuvres cinématographiques et pour les oeuvres audiovisuelles et en fonction de la nature des oeuvres diffusées et des conditions d'exclusivité de leur diffusion. Cette contribution peut tenir compte de l'adaptation de l'oeuvre aux personnes aveugles ou malvoyantes, et, en matière cinématographique, comporter une part destinée à la distribution.
L'amendement précité introduit dans ce 3° deux références au fait que la part indépendante devra représenter au moins 60 % des oeuvres audiovisuelles 23 ( * ) ce qui revient a contrario à porter à 40 % le quota de part dépendante . Il prévoit également de supprimer la possibilité d'encadrer par voie réglementaire l'acquisition des droits de diffusion et la limitation de la durée de ces droits lorsqu'ils sont exclusifs par cohérence avec les modifications apportées à l'article 71-1 de la même loi du 30 septembre 1986 24 ( * ) .
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.
Article 10 sexies (nouveau) (art. 28 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986) - Modification de la convention prévue entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel et les éditeurs de services de télévision
Sur proposition de ses rapporteurs, votre commission a adopté cet article additionnel ( COM-186 ) qui modifie le 2° de l'article 28 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 afin de supprimer le fait que la convention signée entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et les éditeurs de services de télévision puisse limiter la durée des droits des oeuvres commandées au titre de ses obligations en termes de production indépendante.
Cette suppression est une conséquence des modifications proposées par vos rapporteurs dans l'article 10 octies du présent projet de loi afin de modifier l'article 71-1 de la loi du 30 septembre 1986 de sorte de prévoir que la qualification de la commande en production indépendante doit se faire au regard du seul critère de l'indépendance capitalistique de la société de production avec laquelle l'éditeur contracte.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.
Article 10 septies (nouveau) (art. 33 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986) - Coordinations
Adopté par votre commission sur proposition de ses rapporteurs ( COM-187 ) cet article additionnel modifie l'article 33 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986. Il procède à plusieurs coordinations avec les modifications apportées par ailleurs.
La première phrase du 6° de l'article précité est ainsi modifiée pour tenir compte dans le visa de l'alinéa supplémentaire ajouté dans l'article 27 de la loi précitée à l'article 10 quinquies . Une référence au quota de 60 % de production indépendante est également insérée dans le même 6°.
La première phrase du 7° est supprimée par coordination avec les modifications apportées à l'article 10 sexies afin de supprimer la possibilité de fixer par voie réglementaire les modalités d'acquisition des droits de diffusion et la limitation de ces droits lorsqu'ils sont exclusifs. Cette modification intervient en cohérence avec les modifications apportées par l'article 10 octies à la définition de l'indépendance.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.
Article 10 octies (nouveau) (art. 71-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986) - Définition de la production audiovisuelle indépendante
Sur proposition de ses rapporteurs, votre commission a adopté cet article additionnel. Il constitue l'aboutissement de la réflexion sur les nouveaux rapports à établir entre les diffuseurs et les producteurs dans la perspective de la restructuration nécessaire du marché de la production audiovisuelle.
Si le rapport de notre collègue Jean-Pierre Plancade ne traitait pas spécifiquement ce point, celui de l'Institut Montaigne de février 2015 25 ( * ) considérait qu'il s'agissait d'une condition nécessaire. Consacré à l'avenir de la production audiovisuelle, il constatait, en particulier, que « l'indépendance des producteurs vis-à-vis des diffuseurs, jusqu'à maintenant calculée à partir de 15% du capital social, devrait être définie comme moins de 50% du capital qui revient au diffuseur. Cette nouvelle définition de l'indépendance, qui correspond à des critères de droit commun, devrait permettre de renforcer les liens entre les producteurs et les diffuseurs et ainsi de créer des entreprises de médias plus puissantes sur le marché mondial » .
Vos rapporteurs partagent l'objectif d'encourager la restructuration du marché de la production audiovisuelle en favorisant des rapprochements respectueux de l'autonomie opérationnelle des sociétés de production. Dans cet esprit, ils ont proposé à votre commission, qui l'a adopté, un amendement ( COM-188 ) qui vise à modifier l'article 71-1 de la loi du 30 septembre 1986 afin de faire référence à des critères de droit commun pour apprécier la réalité du contrôle d'une société par une autre.
Les critères du contrôle selon les termes de l'article L. 233-3 du code de commerce « I.- Toute personne, physique ou morale, est considérée, pour l'application des sections 2 et 4 du présent chapitre, comme en contrôlant une autre : 1° Lorsqu'elle détient directement ou indirectement une fraction du capital lui conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de cette société ; 2° Lorsqu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote dans cette société en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires et qui n'est pas contraire à l'intérêt de la société ; 3° Lorsqu'elle détermine en fait, par les droits de vote dont elle dispose, les décisions dans les assemblées générales de cette société ; 4° Lorsqu'elle est associée ou actionnaire de cette société et dispose du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société. II. Elle est présumée exercer ce contrôle lorsqu'elle dispose directement ou indirectement, d'une fraction des droits de vote supérieure à 40 % et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne. III. Pour l'application des mêmes sections du présent chapitre, deux ou plusieurs personnes agissant de concert sont considérées comme en contrôlant conjointement une autre lorsqu'elles déterminent en fait les décisions prises en assemblée générale ». |
Alors que le décret du 2 juillet 2010 prévoit que la détention du capital ou des droits de votes d'un éditeur de services dans une société de production audiovisuelle est limitée à 15 % pour que celle-ci soit considérée comme indépendante, cet article additionnel renvoie à l'article L. 233-3 du code de commerce qui définit les conditions de droit commun selon le principe de la majorité.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.
Article 10 nonies (nouveau) (article L. 123-7 du code de la propriété intellectuelle) - Transmission du droit de suite par legs aux musées et aux associations et fondations reconnues d'utilité publique à but culturel
Le droit de suite permet aux auteurs d'oeuvres d'arts graphiques et plastiques de percevoir, à chaque revente d'une de leurs oeuvres, une fraction du prix de la vente . Cet outil a été mis en place en France en 1920 pour assurer un complément de rémunération aux auteurs d'oeuvres d'art originales et leur permettre de bénéficier de la valorisation de leurs oeuvres après la première cession de celles-ci. Il garantit une compensation au cas où la valeur de l'oeuvre viendrait à augmenter, suite à la réputation croissante de l'artiste.
L'article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle prévoit qu'il s'agit toutefois d'un droit inaliénable , c'est-à-dire que l'auteur ne peut pas le céder, le donner ni le léguer. Seuls les héritiers de l'artiste peuvent ensuite en jouir, pendant un délai de soixante-dix ans après son décès.
L'encadrement du droit de suite Pour qu'une vente donne lieu au droit de suite, il faut qu'elle remplisse plusieurs types de conditions : 1° Des conditions relatives à l'auteur de l'oeuvre : - l'auteur doit être ressortissant d'un État membre de l'Union européenne ou d'un État faisant partie de l'espace économique européen ; - l'auteur doit être vivant ou décédé depuis moins de soixante-dix ans ; 2° Des conditions relatives à l'oeuvre elle-même : - il doit s'agir d'une oeuvre graphique ou plastique, telle qu'un tableau, un collage, une peinture, un dessin, une gravure, une estampe, une lithographie, une sculpture, une tapisserie, une céramique, une verrerie, une photographie ou une création plastique sur support audiovisuel ou numérique ; - il doit s'agir d'une oeuvre originale ou d'un exemplaire exécuté en quantité limitée, par l'artiste lui-même ou sous sa responsabilité, ce qui nécessite qu'il soit numéroté, signé ou dûment autorisé d'une autre manière par l'auteur. 3° Des conditions relatives à la vente : - la vente doit avoir lieu en France ou y être assujettie à la TVA. Le taux du droit de suite est dégressif en fonction du montant de la vente . Le décret n° 2007-756 du 9 mai 2007 pris pour l'application de l'article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle et relatif au droit de suite prévoit qu'il s'établit à 4 % du prix de vente pour les ventes inférieures à 50 000 euros, à 3 % pour les ventes pouvant atteindre 200 000 euros, à 1 % pour celles pouvant atteindre 350 000 euros, à 0,5 % pour celles pouvant atteindre 500 000 euros et, enfin à 0,25 % pour les ventes dont le montant excède 500 000 euros. Le montant du droit de suite est toutefois plafonné à 12 500 euros . |
Si la France a été pionnière dans la mise en oeuvre du droit de suite en Europe, de nombreux pays européens qui l'ont ensuite mis en place ont laissé ouverte la possibilité, pour l'auteur, de léguer son droit de suite à la personne de son choix, sans jamais remettre en cause l'interdiction de pouvoir le céder de son vivant. Une directive européenne 26 ( * ) est intervenue sur ce sujet en 2001, afin de permettre aux artistes de bénéficier de ce droit, quel que soit le pays de l'Union européenne dans lequel leurs oeuvres sont vendues. Elle a fixé des règles minimales relatives au droit de suite, telles que l'éligibilité et la durée de la protection, les catégories d'oeuvres d'art soumises au droit de suite, son application à toutes les ventes dans lesquelles intervient un professionnel du marché de l'art ou la valeur en pourcentage du droit de suite en fonction du prix de vente. Cette directive prévoit en particulier en préambule qu'il s'agit du « droit incessible et inaliénable de l'auteur d'une oeuvre originale d'art graphique ou plastique à être intéressé économiquement aux reventes successives de l'oeuvre concernée ». Pour respecter le principe de subsidiarité, la directive n'est pas intervenue sur les questions relatives aux droits des successions et prévoit simplement que « les ayants droit de l'auteur doivent pouvoir pleinement bénéficier du droit de suite après sa mort ».
Par rapport à la solution retenue par d'autres États membres, la législation française pénalise aujourd'hui les musées et les fondations d'artistes créées par testament , qui pourraient profiter de ce droit de suite pour faciliter leur fonctionnement et enrichir leurs collections. Elle peut freiner le dynamisme de la vie artistique.
Adopté à l'initiative des rapporteurs dans l'objectif d'encourager et de soutenir la création artistique, cet article additionnel ouvre la possibilité pour un auteur d'oeuvres originales graphiques et plastiques de léguer son droit de suite à un musée ou à une fondation, dès lors qu'il n'existe aucun héritier réservataire ( COM-183 ). Ce droit de suite serait alors acquis pour une durée de soixante-dix ans , comme le prévoit le droit actuel.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé .
Chapitre III Promouvoir la diversité culturelle et élargir l'accès à l'offre culturelle
Article 11 A (article L. 7121-4-1 du code du travail) - Reconnaissance des pratiques artistiques amateurs
I. - Le droit en vigueur
Le cadre juridique applicable aux pratiques artistiques amateurs est très imprécis. Un décret de 1953 27 ( * ) encadre en principe ces pratiques mais il concerne le seul théâtre et est aujourd'hui, bien que non abrogé, totalement obsolète.
Le cadre juridique applicable aux amateurs se déduit donc « en creux » de celui applicable aux artistes professionnels. L'artiste professionnel est celui qui tire les moyens de sa subsistance de son travail artistique. À ce titre, il perçoit une rémunération qu'il est tenu de déclarer.
Dans un souci de lutter contre le travail dissimulé dans le domaine du spectacle vivant, le code du travail pose une présomption de caractère lucratif de représentations publiques ainsi qu'une présomption de salariat, très larges , sur la base de faisceaux d'indices (rémunération, billetterie, caractère professionnel du matériel utilisé, etc.).
L'article L. 8221-4 du code du travail relatif au travail dissimulé prévoit qu'une activité ayant recours à la publicité est présumée accomplie à titre lucratif ; de même qu'une activité artisanale lorsqu'elle est réalisée « avec un matériel présentant (...) un caractère professionnel ».
Or les artistes amateurs ont souvent recours à de la publicité (par affichage et tractage notamment) pour assurer la promotion de leurs représentations publiques et ils utilisent fréquemment du matériel professionnel ou quasi-professionnel (instruments de musique, matériel d'amplification sonore, costumes, décors, etc.).
La présomption de salariat pour les artistes du spectacle (extraits du code du travail) Article L. 7121-3 « Tout contrat par lequel une personne s'assure, moyennant rémunération , le concours d'un artiste du spectacle en vue de sa production, est présumé être un contrat de travail dès lors que cet artiste n'exerce pas l'activité qui fait l'objet de ce contrat dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce ». Article L. 7121-4 « La présomption de l'existence d'un contrat de travail subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération , ainsi que la qualification donnée au contrat par les parties. « Cette présomption subsiste même s'il est prouvé que l'artiste conserve la liberté d'expression de son art, qu'il est propriétaire de tout ou partie du matériel utilisé ou qu'il emploie lui-même une ou plusieurs personnes pour le seconder, dès lors qu'il participe personnellement au spectacle ». |
Les amateurs qui apportent leur concours à des représentations publiques à but lucratif ou non peuvent ainsi se retrouver très rapidement dans la situation de voir cette participation requalifiée en contrat de travail. Ce risque est de nature à freiner la contribution des amateurs à de certaines représentations, alors même que leur présence fait partie parfois intégrante du projet artistique ou pédagogique.
II. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Sur proposition du Gouvernement, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a adopté un article additionnel qui confère un cadre juridique rénové aux pratiques artistiques amateurs.
La question de l'instauration d'un tel cadre juridique est un sujet ancien. Un avant-projet de loi avait déjà été préparé en ce sens en 2008. Une nouvelle concertation impliquant l'ensemble des acteurs concernés (organisations syndicales, associations d'amateurs, ministère de la culture et de la communication, etc.) a été engagée en 2013 dans la perspective du présent projet de loi.
Cette nouvelle disposition fait également écho aux débats intervenus sur l'article 2 du présent projet de loi qui reconnait désormais les « activités de création artistique pratiquées en amateur, sources de développement personnel et de lien social » 28 ( * ) .
Le I. du présent article définit l'artiste amateur : l' « artiste amateur dans le domaine de la création artistique » est « toute personne qui pratique seule ou en groupe une activité artistique à titre non professionnel et qui n'en tire aucune rémunération ».
Il est précisé que l'artiste amateur « peut obtenir le remboursement des frais occasionnés par son activité sur présentation de justificatifs ». Cette disposition explicite vise à éviter tout risque de requalification en salariat ou travail dissimulé : le défraiement des frais engagés ne peut s'apparenter à une quelconque « rémunération ». Il s'agit ainsi de faire échec à la rigueur du premier alinéa de l'article L. 7121-4 du code du travail qui maintenait la présomption de salariat « quels que soient le montant et le mode de la rémunération ».
Le II. du présent article précise les conditions dans lesquelles les artistes amateurs se produisent en public dans un cadre non lucratif .
Le texte du présent article prévoit que, par dérogation aux dispositions de l'article L. 8221-4 du code du travail, les représentations en public d'artistes amateurs relèvent d'un cadre non lucratif, « y compris lorsque (leur) réalisation a lieu avec recours à la publicité et à l'utilisation de matériel professionnel ».
Ces représentations ne relèveront donc pas des articles L. 7121-3 et L. 7121-4 du code du travail relatifs à la présomption de salariat.
Le cadre non lucratif de ces représentations n'interdit toutefois pas la mise en place d'une billetterie payante. La part de la recette attribuée à l'artiste amateur ou à son groupement servira à payer ses activités amateurs (achat de matériel, voyage du groupe, préparation d'un prochain concert) et, le cas échéant, les frais engagés pour les représentations concernées. Seule « une part » de cette recette est attribuée aux amateurs qui sont intervenus, ce qui permet, par exemple, qu'une association caritative organise un concert faisant intervenir des amateurs, qu'elle instaure une billetterie payante et qu'elle puisse, une fois les amateurs défrayés, conserver le produit de la billetterie pour ses activités propres 29 ( * ) .
Le III. du présent article précise les conditions dans lesquelles les artistes amateurs peuvent se produire en public dans un cadre lucratif.
Sur proposition du Gouvernement adoptée par l'Assemblée nationale, le III. réaffirme tout d'abord le principe de la présomption de salariat.
Il prévoit ensuite que les entreprises du spectacle vivant pourront faire participer des artistes amateurs à des représentations publiques à caractère commercial sans les rémunérer, sous deux conditions cumulatives :
1- « dans la limite d'un nombre annuel de représentations » qui sera défini par voie réglementaire (probablement de l'ordre de 30) ;
2- et « dans le cadre d'un accompagnement de la pratique amateur ou d'actions pédagogiques et culturelles » ce qui suppose que ces structures développent des actions de promotion de l'activité amateur, autres que ces seules représentations publiques.
Comme dans le cadre non lucratif, une part de la recette de ces spectacles pourra être attribuée aux artistes amateurs pour financer « leurs frais liés aux activités pédagogiques et culturelles et, le cas échéant, leurs frais engagés pour les représentations concernées ».
III. - La position de votre commission
On estime à 12 millions le nombre d'artistes amateurs en France, et à 300 000 le nombre de leurs associations, essentiellement dans le domaine de la musique et du théâtre. C'est une formidable richesse que l'on doit à un réseau d'écoles de musique et de conservatoires exceptionnel mais aussi au maillage de ces associations sur l'ensemble de nos territoires.
Il est de tradition constante dans notre pays que ces amateurs participent à des représentations publiques, non lucratives mais aussi parfois lucratives, le cas échéant en collaboration avec des artistes professionnels. Certaines oeuvres d'ailleurs ne pourraient être représentées sans le concours d'amateurs et les initiatives amateurs sont aussi génératrices d'emplois pour les professionnels du spectacle.
La mixité amateurs/professionnels concourt au perfectionnement des amateurs. Elle permet aussi de diversifier l'offre culturelle et d'amener les publics à découvrir d'autres pratiques artistiques.
Le dispositif proposé par le présent article permet de reconnaître et de sécuriser les pratiques artistiques amateurs 30 ( * ) . Votre commission partage entièrement ces objectifs et y est très favorable.
Elle regrette cependant que le dispositif proposé ait été introduit en cours de discussion du présent projet de loi par voie d'amendement gouvernemental, et qu'il n'ait pas pu être stabilisé dès le projet de loi. L'absence d'exposé des motifs et d'étude d'impact de ce dispositif est en effet regrettable.
Les organisations syndicales représentatives des professionnels du spectacle ont exprimé des inquiétudes quant à la rédaction du III du présent article, notamment sur un risque de concurrence (voire d'éviction) d'artistes professionnels par les amateurs . Évoquant un risque d'« ubérisation » du secteur, ces organisations syndicales craignent notamment que, dans un contexte économique difficile, les producteurs de spectacles ne soient tentés de remplacer des professionnels (notamment des « artistes de complément », figurants, choristes) par des amateurs, pour des raisons purement économiques.
Votre commission est très attentive à la défense de l'emploi artistique et également soucieuse que la concurrence entre entreprises de spectacle se déroule dans des conditions équitables et loyales.
Elle estime que le dispositif proposé, amélioré au cours d'un long et riche débat à l'Assemblée nationale, est relativement équilibré. En particulier, les deux conditions posées à la présence d'amateurs dans des représentations à caractère commercial (l'accompagnement des pratiques amateurs doit faire partie des missions des entreprises de spectacle ; le nombre de spectacles sur l'année 31 ( * ) est limité) sont de nature à permettre une coexistence harmonieuse et même créatrice entre professionnels et amateurs.
Toutefois, afin de conforter plus avant l'emploi artistique , à l'initiative de ses rapporteurs, votre commission a adopté plusieurs amendements de clarification. Ils :
- codifient ce nouveau dispositif au sein du code du travail ( COM-190 ) ;
- remplacent la notion d'« artiste amateur dans le domaine de la création artistique » par celle, plus simple, d'« amateur dans le domaine de la création artistique » ; il s'agit de bien distinguer les « artistes » qui sont des professionnels 32 ( * ) , des « amateurs » qui n'en sont pas ( COM-189 et COM-190 ) ;
- prévoient que l'accompagnement des pratiques amateurs doit être attesté dans un document de nature contractuelle établi entre l'entreprise de spectacle et une ou plusieurs collectivités publiques ( COM-192 ).
Votre commission a également adopté un amendement de cohérence légistique proposé par vos rapporteurs (COM-191), inversant les deux premiers alinéas du II du présent article et prévu d'insérer ce nouveau dispositif dans le code du travail afin d'éviter qu'il ne constitue une « disposition flottante » dans notre droit.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 11 (art. L. 122-5, L. 122-5-1 nouveau et L. 122-5-2 nouveau du code de la propriété intellectuelle) - Réforme de l'exception au droit d'auteur au bénéfice des personnes handicapées
I. - Le texte du projet de loi
A. État des lieux
À la différence du droit moral de l'auteur, perpétuel, inaliénable, imprescriptible et opposable à tous, les droits patrimoniaux comptent de nombreuses exceptions , destinées à assurer la compatibilité du droit d'auteur avec les libertés et droits fondamentaux, comme avec l'intérêt public, notamment en matière d'information et d'enseignement. Peuvent être citées la diffusion d'une oeuvre dans le cercle de famille, la copie privée rémunérée par redevance auprès des sociétés de gestion collective puis répartie entre les ayants droit, la citation, la revue de presse, la diffusion de discours, l'utilisation d'une oeuvre aux fins de parodie ou de caricature, l'exception pédagogique ou en faveur des personnes handicapées.
Autorisées, dans leur principe, par la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, dite DADVSI, qui constitue une mise en conformité du droit européen avec les traités de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) de 1996, le choix des exceptions applicables au droit d'auteur et aux droits voisins ressort de la liberté des États membres . Pour la France, ces exceptions ont été définies par la loi n° 2006-961 du 1 er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, qui les a introduites à l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle.
Dans ce cadre, l'exception au profit des personnes handicapées, dite « exception handicap », consiste à ce que des organismes titulaires d'un agrément ministériel mettent à disposition des personnes handicapées, pour une consultation strictement personnelle, des versions adaptées d'oeuvre de l'esprit protégées, sans autorisation préalable ni rémunération des titulaires de droits . S'agissant plus précisément de l'édition (livres, presse, partitions musicales), ces organismes peuvent produire une version adaptée des oeuvres à partir du fichier numérique ayant servi à leur édition.
Toutefois, le nombre de titres accessibles, en braille, en très gros caractères ou en écoute vocale, est encore faible, en raison du retard pris, depuis 2006, dans la mise en oeuvre effective de l'exception handicap . De fait, il a fallu attendre le décret du 19 décembre 2008, puis celui du 6 février 2009 s'agissant du dépôt des fichiers numériques à la BnF et enfin l'ouverture de la plateforme PLATON de la BnF, qui met à disposition des organismes agréés les fichiers numériques des oeuvres, en juin 2010 pour que le dispositif prévu par la loi DADVSI soit applicable.
Une première évaluation en a été dressée en mai 2013 par l'IGAC dans son rapport « Exception handicap au droit d'auteur et développement de l'offre de publications accessibles à l'ère numérique ».
Le bilan de l'exception handicap par l'IGAC Le rapport de l'IGAC fait le constat de la faiblesse du nombre d'oeuvres accessibles malgré la mise en oeuvre de l'exception handicap : la production annuelle de publications adaptées ne représente que 3,5 % de l'offre grand public et l'offre globale, moins d'un cinquième des références disponibles en France selon les estimations les plus optimistes. La réalité se situe plus vraisemblablement autour d'un dixième. Dès lors, le taux d'oeuvres accessibles par rapport aux oeuvres référencées diminuera inéluctablement. Selon l'IGAC, la production de publications adaptées ne bénéficie qu'à la marge des technologies issues de l'Internet. Cette anomalie n'est pas l'effet d'une mise en oeuvre défectueuse du dispositif, mais la conséquence de la rédaction des dispositions législatives et réglementaires qui ont organisé ce dispositif, la nature et la portée des obligations respectives des acteurs ayant été mal définies. Cette rédaction, qui explique la faible part des fichiers XML transmis par les éditeurs aux organismes agréés, serait la seule cause du faible volume d'ouvrages adaptés. Le législateur a fait obligation à la BnF de mettre les fichiers numériques des oeuvres à disposition des organismes agréés dans un standard ouvert, définition correspondant également au format PDF, majoritairement utilisés par les éditeurs et la BnF alors qu'il ne permet pas une adaptation aisée et à moindre coût. Ensuite, l'offre globale de publications adaptées est non seulement indigente et mal connue, mais également largement théorique, les bénéficiaires de l'exception n'ayant accès qu'à une faible part de la totalité de cette offre, du fait du cloisonnement des différents catalogues disponibles. Enfin, la définition du champ des bénéficiaires ne permet pas de répondre aux besoins avérés, en particulier dans le domaine de l'éducation. La définition législative se fonde sur des critères d'éligibilité purement quantitatifs, qui font référence à un taux d'incapacité conçu pour déterminer des droits à prestations sociales. Fixé à 80 % minimum, il exclut du bénéfice de l'exception certaines déficiences cognitives, qui compromettent pourtant grandement la réussite scolaire, voire la scolarisation. Sur la base de ce constat, le rapport de l'IGAC énonce vingt-six propositions, organisées en trois axes : - créer les conditions d'un développement substantiel de l'offre de publications adaptées, en généralisant la fourniture, aux organismes agréés des fichiers des éditeurs en format XML ; - faire entrer les bibliothèques de l'édition adaptée dans l'ère de l'inclusion numérique ; - modifier les critères d'éligibilité pour élargir le bénéfice de l'exception handicap aux publics « dys ». Source : ministère de la culture et de la communication |
À l'issue de ce bilan, les propositions de l'IGAC ont fait l'objet d'une concertation entre les éditeurs, les associations de personnes handicapées, les bibliothèques et les services de l'État concernés, dont le présent article constitue l'aboutissement.
B. Le dispositif proposé
Le 1° du I du présent article modifie le 7° de l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle portant définition de l'exception handicap, afin d'en faire bénéficier l'ensemble des personnes empêchées, du fait de déficiences des fonctions motrices, physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'accéder à l'oeuvre dans la forme sous laquelle l'auteur la rend disponible au public. Cette définition élargie permet notamment d'inclure dans le champ de l'exception les dyslexiques et les dyspraxiques.
La réalité de l'empêchement devra être vérifiée par les organismes agréés , qui devront également s'assurer, avant toute adaptation, qu'une version correspondant au besoin avéré n'est pas disponible dans le commerce. Les modalités de mise en oeuvre de cette responsabilité seront précisées dans un guide pratique prochainement mis à leur disposition.
Par cohérence avec les dispositions du II du présent article relatives aux modalités d'application du 7° de l'article L. 122-5, le 2° du I supprime une précision devenue inutile au même article.
Le II créé ensuite deux articles nouveaux au code de la propriété intellectuelle, respectivement numérotés L. 122-5-1 et L. 122-5-2.
L'article L. 122-5-1 reprend la définition des structures autorisées à assurer la reproduction et la représentation des oeuvres, figurant actuellement au 7° de l'article L. 122-5. Il s'agit des personnes morales ou des établissement figurant sur une liste arrêtée conjointement par les ministres chargés respectivement de la culture et des personnes handicapées . Elles doivent, à cet effet, faire la preuve de l'effectivité de leur activité d'adaptation des oeuvres au bénéfice des personnes handicapées, des effectifs de leurs membres et de leurs usagers, mais également des moyens humains et matériels dont ils disposent. Les candidatures sont examinées par la commission en charge de la mise en oeuvre de l'exception handicap, composée à parité de représentants des ayants droit et des personnes handicapées. Quatre-vingt-dix structures sont actuellement inscrites sur cette liste. Il s'agit à 60 % d'associations, le reste étant composé de bibliothèques municipales et universitaires, ainsi que d'établissements publics.
Il prévoit, en outre, que la reproduction et la représentation peut porter sur toute oeuvre dont le fichier numérique est déposé par l'éditeur à la BnF, qui le met ensuite à la disposition des structures inscrites sur la liste précitée, disposant en sus d'un agrément, accordé conjointement par les ministres de la culture et des personnes handicapées , obtenu au regard des garanties apportées en matière et sécurisation et de confidentialité des fichiers . Ces structures agréés, au nombre de quarante aujourd'hui, transmettent ensuite les fichiers des oeuvres aux bénéficiaires de l'exception handicap.
À rebours des préconisations de l'IGAC, il a été choisi d'attribuer aux éditeurs et non à la BnF la responsabilité du format dans lequel le fichier est transmis. Cette solution permet d'éviter de faire peser sur un établissement public une charge financière liée à de lourds processus de conversion, alors que le format XML par exemple, qui permet de fabriquer simultanément des formats de diffusion à destination de l'édition papier et de l'édition numérique, est déjà utilisé pour les éditeurs pour une majorité de textes. La facilité d'adaptation que représente ce format devrait conduire à accélérer la mise à disposition des oeuvres au profit des personnes handicapées. En tout état de cause, une liste des formats autorisés sera définie par un arrêté du ministre en charge de la culture, après avis de la BnF, des personnes morales et des établissements publics agréés, ainsi que des organisations représentatives des titulaires de droit et des personnes handicapées concernées.
Le dépôt des fichiers à la BnF est rendu obligatoire pour les livres scolaires mis à disposition du public à compter du 1 er janvier 2016 . Dans le cadre actuel de l'exception, les fichiers des livres sont déposés par les éditeurs, à la demande des structures adaptatrices, dans un délai de deux mois après la demande. Or, les enseignants choisissent tardivement les manuels pour l'année à venir et la demande de fichiers pour l'usage des élèves handicapés intervient rarement avant la rentrée scolaire. Le délai de deux mois et le temps de réaliser l'adaptation rendent dès lors souvent caduque la demande elle-même. L'obligation de dépôt à la BnF porte, en outre, sur toute oeuvre pour laquelle une demande est effectuée par une structure inscrite sur la liste précitée, formulée dans les dix ans suivant le dépôt légal s'il est postérieur au 4 août 2006 ou si l'oeuvre est disponible sous forme numérique.
Les fichiers déposés par les éditeurs sont conservés sans limitation de temps par la BnF ; elle garantit leur confidentialité et la sécurisation de leur accès. En revanche, les personnes morales et établissements publics agréés en vue d'être bénéficiaires directs de ces fichiers sont dans l'obligation de les détruire une fois réalisé le travail de conception, de réalisation et de communication de la version adaptée de l'oeuvre.
Les fichiers adaptés par les structures figurant sur la liste susmentionnés sont également transmis à la BnF, qui les met à disposition des autres personnes morales et établissements. Outre l'entremise de la BnF, ces structures peuvent mutuellement se mettre à disposition lesdits fichiers. À la différence des fichiers des éditeurs, l'opérateur sélectionne les fichiers qu'il conserve - la conservation intégrale de ces documents impliquerait un coût élevé - et rend compte de ses choix dans un rapport annuel.
Les modalités d'application de l'article L. 122-5-1 seront précisées par un décret en Conseil d'État.
L'article L. 122-5-2 nouveau, pour sa part, prévoit les conditions de la diffusion à l'étranger d'oeuvres adaptées en France pour un public handicapé . Ses modalités d'application seront également précisées par un décret en Conseil d'État.
La possibilité est ainsi offerte, sur autorisation conjointe des ministres en charge respectivement de la culture et des personnes handicapées, aux personnes morales et aux établissements, qui bénéficient de l'agrément les autorisant à reproduire et représenter les oeuvres en version adaptée, de recevoir et de mettre à disposition ces formats d'un organisme à but non lucratif établi à l'étranger et autorisé par son État, en vue de leur consultation par les bénéficiaires de l'exception handicap, dès lors qu'une telle exception existe dans l'État concerné.
Afin de s'assurer que cette diffusion se fera dans des conditions de sécurité juridique et de transparence satisfaisantes, des conventions devront être conclues entre les organismes français et étrangers concernés, afin de préciser les conditions de mise à disposition et les garanties quant au contrôle des bénéficiaires. S'agissant des structures nationales, elles devront rendre compte chaque année aux ministres concernés de la mise en oeuvre de ces conventions (nombre et liste des oeuvres, pays de destination, etc.)
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
La commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a adopté plusieurs précisions au présent article. Outre quelques modifications rédactionnelles, elle a :
- clarifié les contours de l'obligation de destruction des fichiers par les organismes transcripteurs une fois effectué leur travail d'adaptation des oeuvres. Dans la mesure où les fichiers qu'il convient de protéger sont seulement ceux déposés par les éditeurs auprès de la BnF, l'obligation de destruction ne pèse que sur les organismes agréés par le Gouvernement en vue d'avoir accès à ces fichiers ;
- précisé que le rapport annuel de la BnF concernant son activité de sélection et de conservation des documents est rendu public ;
- indiqué que la mise à disposition des fichiers des éditeurs par la BnF est limitée aux seuls organismes agréés à cet effet .
L'article a ensuite été adopté sans nouvelle modification en séance publique.
III. - La position de votre commission
Le présent article représente le fruit de longues discussions entre le SNE, le ministère de l'éducation nationale, celui de la culture et les associations de personnes handicapées , comme le rappelait le SNE lors de son audition.
En élargissant à l'ensemble des handicaps entraînant une impossibilité de lire, y compris aux troubles du langage et de l'apprentissage les dispositions de l'exception handicap prévue par le code de la propriété intellectuelle, le présent article renforce l'application du dispositif tout en en respectant pleinement l'esprit. Selon les études disponibles, dont les résultats varient sensiblement, entre 5 % et 15 % de la population française éprouverait des difficultés graves en lecture en raison d'un trouble « dys ».
Le présent article donne également toute sa mesure à la signature par la France, le 30 avril 2014, du traité de Marrakech en introduisant dans la législation des dispositions en faveur de l'accès à la lecture pour les déficients visuels par des échanges de documents adaptés entre pays .
Les dispositions prévues par le traité de Marrakech Le traité de l'OMPI du 27 juin 2013, dit traité de Marrakech, vise à faciliter l'accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d'autres difficultés de lecture des textes imprimés aux oeuvres publiées. Le traité établit un ensemble de règles internationales, qui garantissent l'existence, au niveau national, de limitations ou d'exceptions au droit d'auteur en faveur des handicapés et permettent l'échange transfrontalier des exemplaires en format accessible d'oeuvres publiées réalisés en application d'une limitation ou d'une exception au droit d'auteur sur le territoire d'un État partie au traité. La définition des bénéficiaires au sens du traité (article 3) est plus large que celle retenue actuellement par le code de la propriété intellectuelle. Le traité définit les bénéficiaires comme les personnes qui sont aveugles, souffrent d'une déficience visuelle, d'une déficience de perception ou de difficultés de lecture ou sont incapables, en raison d'un handicap physique, de tenir ou de manipuler un livre ou encore de fixer ou de bouger les yeux afin de pouvoir lire. Ainsi, les dyslexiques, dyspraxiques et dysphasiques font partie des bénéficiaires au sens du traité, tandis qu'ils ne sont pas concernés par l'exception nationale française existante. Pour autant, une réflexion sur l'inclusion d'autres catégories de bénéficiaires avait commencé antérieurement à la conclusion du traité et une réforme avait été envisagée en ce sens. Par ailleurs, le traité permet aux établissements publics et aux organisations, qui offrent des services en matière d'enseignement, de formation pédagogique, de lecture adaptée ou d'accès à l'information aux aveugles, déficients visuels ou personnes ayant d'autres difficultés de lecture, d'exporter les exemplaires en format adapté réalisés en vertu d'une limitation ou d'une exception au droit d'auteur. Selon l'article 2 du traité, ces entités autorisées doivent être à but non lucratif, ne distribuer les formats adaptés qu'à des bénéficiaires et décourager la reproduction, la distribution et la mise à disposition d'exemplaires non autorisés. De plus, elles doivent tenir un registre de reproduction, de distribution et de mise à disposition des exemplaires d'oeuvres qu'elles gèrent. Le traité précise également que, dans la mesure où une partie contractante autorise une personne bénéficiaire ou une entité autorisée à réaliser un exemplaire d'une oeuvre en format accessible, elle doit aussi autoriser l'importation de tels exemplaires en format adapté. Source : ministère de la culture et de la communication |
La ratification du traité impliquera toutefois d'apporter plusieurs modifications aux dispositions du présent article : le transfert de fichiers devra être autorisé directement aux personnes handicapées vivant à l'étranger, et non plus via des organismes autorisés, et les conventions deviendront inutiles du fait des garanties entre États apportées par l'Union de Marrakech.
Par ailleurs, s'agissant de la rédaction proposée pour l'article L. 122-5-1 nouveau , la précision apportée par la dernière phrase de l' alinéa 23 du présent article semble superfétatoire dans la mesure où l'alinéa suivant renvoie ses modalités d'application à un décret en Conseil d'État ( COM-193 ). En outre, à l' alinéa 24 , le développement relatif au contenu dudit décret est également inutile (COM-194).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 11 bis - Respect des quotas de chansons francophones par les radios
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Aux termes de l'article 18 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il revient au conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) d'établir chaque année un rapport public, adressé au Président de la République, au Gouvernement et au Parlement , rendant compte de son activité, de l'application de la loi précitée et du respect de leurs obligations par les opérateurs audiovisuels.
Ce rapport peut comporter des suggestions de modifications de nature législative et réglementaire rendues nécessaires par l'évolution technologique, économique, sociale et culturelle des activités du secteur de l'audiovisuel. Il peut également formuler des observations sur la répartition du produit de la redevance et de la publicité entre les organismes du secteur public. Il fait, en outre, état du volume d'émissions télévisées sous-titrées ainsi que de celles traduites en langue des signes.
Le présent article, introduit à l'initiative de son rapporteur par la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, propose de spécifier que le rapport d'activité du CSA rend compte du respect des obligations de diffusion d'oeuvres en langue française ou régionales, que la loi précitée du 30 septembre 1986 impose aux radios privées 33 ( * ) , de la variété des oeuvres proposées au public, mais également des mesures prises, le cas échéant, par le CSA pour mettre fin aux manquements constatés et des raisons pour lesquelles ces mesures n'ont éventuellement pas été mises en oeuvre . Le détail des obligations prévues est explicité supra, dans le cadre de l'analyse du dispositif proposé par l'article 10 ter du projet de loi.
Cette précision quant au rôle du CSA s'agissant du contrôle de l'application de la législation sur les quotas est justifiée, selon le rapporteur de l'Assemblée nationale, par le fait que « des doutes ont été émis sur la réalité du respect de ces dispositions par les opérateurs radiophoniques et sur le contrôle (...) du CSA. Il appartient pourtant à l'instance de régulation de veiller à la bonne application de la loi et d'en sanctionner les manquements ».
Plus précisément, selon les derniers relevés établis par la société Yacast relatifs aux taux de diffusion de titres francophones, de nouvelles productions et de nouveaux talents en radio pour les mois de juin et juillet 2015, le constat est alarmant. En prenant pour base le panel de trente-et-unes radios établi par l'Observatoire de la musique, il apparaît qu'aucune des treize radios soumises au quota de 35 % de chansons francophones ne l'a respecté la moitié des onze radios soumises au quota de 40 % ne l'a pas appliqué.
Or, en dix ans, le CSA n'a décidé que deux mises en demeure. Dès lors, soit ces manquements sont récents, soit leur contrôle n'est pas suffisamment effectif.
II. - La position de votre commission
Compte tenu des accusations que certains acteurs, notamment les représentants des artistes et des producteurs, font peser sur le CSA s'agissant de sa mission de contrôle de l'application, par les radios, des obligations relatives aux quotas d'oeuvres francophones ou en langues régionales définies dans la loi du 30 septembre 1986, cette disposition a l'avantage de clarifier le rôle de l'instance de régulation en la matière.
Elle permettra également que les pouvoirs publics disposent d'une information régulière et objective sur l'effectivité du respect de cette obligation et, le cas échéant, des sanctions prises à l'encontre des contrevenants.
Il apparaît toutefois à votre commission que le niveau de détail de la rédaction de l'Assemblée nationale pour le présent article ne se justifie pas. Elle propose, en conséquence, de supprimer la mention relative à la justification des actions du CSA dans le cadre de son rapport annuel, pour se limiter à la description des mesures prises ( COM-195 ).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 11 ter - Diversité des titres francophones diffusés au titre des quotas radiophoniques
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'alinéa 2° bis de l'article 28 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, introduit par la loi du 1 er février 1994 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, impose aux services radiophoniques la diffusion d'un minimum de chansons en langue française ou régionales. Ainsi, « la proportion substantielle d'oeuvres musicales d'expression française ou interprétées dans une langue régionale en usage en France doit atteindre un minimum de 40 % de chansons d'expression française, dont la moitié au moins provenant de nouveaux talents ou de nouvelles productions, diffusées aux heures d'écoute significative par chacun des services de radio autorisés par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, pour la part de ses programmes composée de musique de variétés ».
Par dérogation, le CSA peut toutefois autoriser, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2006-961 du 1 er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, pour des formats spécifiques, des proportions différentes :
- pour les radios spécialisées dans la mise en valeur du patrimoine musical : 60 % de titres francophones, dont un pourcentage de nouvelles productions pouvant aller jusqu'à 10 % du total, avec au minimum un titre par heure en moyenne ;
- pour les radios spécialisées dans la promotion de jeunes talents : 35 % de titres francophones, dont 25 % au moins du total provenant de nouveaux talents.
Depuis leur application au 1 er janvier 1996, les règles relatives aux quotas de chansons francophones n'ont cessé d'être décriées par les radios autant que soutenues par les producteurs et les artistes . Les antagonismes se concentrent essentiellement sur l'adaptation des quotas à certains formats radiophoniques, à la concentration des titres diffusés et à la promotion des nouveaux talents.
Pour faire suite aux engagements annoncés en 2013 en faveur des artistes francophones lors du Marché international du disque et de l'édition musicale (MIDEM) et du Printemps de Bourges, Aurélie Filippetti, alors ministre de la culture et de la communication a confié, au mois de septembre de la même année, à Jean-Marc Bordes, ancien directeur de l'Institut national de l'audiovisuel (INA), une mission consacrée à l'exposition de la musique dans les médias.
Le rapport, remis le 17 mars 2014, s'appuyant sur une large consultation des professionnels concernés et sur une analyse des études disponibles, dresse un état des lieux détaillé de l'exposition de la musique sur les services de communication audiovisuelle traditionnels (télévision et radio) et sur les services numériques.
Il fait notamment état d' une moindre exposition du répertoire francophone sur les ondes depuis 2007 : diminution de 14 % du nombre de titres en programmation, recul de 26 % de l'audience des nouveautés francophones et des listes de lecture composées d'un nombre de titres plus restreint que les listes internationales, alors même que le nombre de titres envoyés aux radios par les producteurs a cru sur la période. En 2014, seulement une nouveauté sur dix diffusées sur les ondes est en français, contre une sur quatre en 2007.
936
804
- 14 %
Nombre de titres francophones entrés en programmation
2007 2013
Source : Observatoire de la radio / Yacast
Nombre de nouveautés francophones envoyées aux radios
Source : Yacast/Muzicenter nov. 2014
Au final, la concentration est extrême : une dizaine de titres , soit 2 % des chansons disponibles, bénéficie, sur certaines stations, des trois quarts du nombre de diffusions. Sur un panel de trente-et-unes radios majeures, à peine un quart de l'offre francophone produite est diffusée, comme le montre le rapport de l'Observatoire de la musique pour 2014, avec de grandes variations de rotation selon les titres. Par exemple, NRJ , Skyrock , Fun Radio et Virgin Radio respectent leur obligation de quotas avec seulement cinquante titres diffusés, sur un total de 6 700 nouveautés produites chaque année. Un titre peut ainsi atteindre une centaine de diffusions hebdomadaires, soit environ une toutes les heures en journée.
Or, pour se faire connaître, les jeunes artistes doivent pouvoir compter sur un nombre élevé de passages sur les ondes , d'autant que, comme le rappelait un sondage IFOP du mois de janvier 2014, la radio demeure, pour 74 % des Français, le média privilégié de découverte de nouveaux talents.
Le rapport de Jean-Marc Bordes comporte, au-delà du constat, des propositions pour améliorer l'exposition de la musique francophone et des jeunes talents dans les médias, afin de soutenir le développement et la créativité du secteur musical face aux mutations technologiques et concurrentielles et aux nouvelles attentes du public. Il souligne notamment l'importance du maintien - et du respect - des quotas de musique francophone, ainsi que la nécessité de limiter la concentration des titres diffusés.
Compte tenu de ce constat et conformément aux recommandations du rapport précité, le présent article instaure, en complétant le 2° bis de l'article 28 de la loi du 30 septembre 1986 susmentionnée, un seuil de référence mensuel, à hauteur de 50 % des diffusions francophones, pour les dix oeuvres musicales d'expression françaises les plus diffusées par un service de radio. Au-delà de ce seuil, les diffusions de ces titres ne seront plus prises en compte pour atteindre les quotas imposés.
II. - La position de votre commission
Cette mesure permet d' améliorer l'exposition de nouveaux talents francophones en radio et de promouvoir la diversité des expressions culturelles . Il ressort, en effet, de façon évidente des travaux de Jean-Marc Bordes que le respect des règles en matière de quotas de chansons francophones par les radios, lorsqu'il est effectif, est dévoyé par l'extrême concentration des titres diffusés à rebours de l'esprit de la loi du 1 er février 1994.
Contrairement aux dires de ses détracteurs, la disposition prévue n'augmente nullement le pourcentage de chansons francophones ou en langues régionales devant obligatoirement être diffusées, ni ne remet en cause de la liberté éditoriale des radios . Elle consiste uniquement à ce que les quotas prévus soient respectés sans méconnaître l'objectif de diversité. À titre d'illustration, pour une radio qui concentre actuellement les deux tiers de sa programmation francophone sur dix titres, la mise en place du plafond de 50 % prévu génèrera automatiquement une proportion de 16 % de la programmation pour d'autres titres, soit environ deux nouveaux titres par mois.
La contrainte est raisonnable, d'autant qu'elle portera sur les seules radios coupables d'une extrême concentration des titres , c'est-à-dire presque exclusivement les stations nationales qui s'adressent à un public jeune, sans avoir aucune conséquence sur la majorité des opérateurs radiophoniques.
En outre, rien n'empêche aujourd'hui les radios d'appliquer les obligations de quotas, compte tenu du nombre de titres et de la diversité de la production francophone . Jean-Marc Bordes, dans son rapport précité, estime ainsi que, selon les informations fournies par les producteurs depuis 2010, « la production francophone se serait maintenue au-dessus de 32 % du total des titres produits, ce qui paraît cohérent avec le maintien d'un quota francophone en radiodiffusion de 40 % ou de 35 % suivant le choix du régime. En effet, les radios programmant des nouveautés doivent faire leur marché dans la production fraîche de l'année, quelle que soit l'évolution de ce chiffre de production ». Nul doute qu'avec un tel niveau de production francophone, le programmateur le plus exigeant trouve suffisamment d'artistes francophones talentueux pour respecter son obligation de quotas tout en veillant à la diversité des oeuvres diffusées.
Votre commission se fait enfin l'écho des propos tenus en séance publique, à l'Assemblée nationale, par Fleur Pellerin, qui rappelait à cette occasion que les services de radiodiffusion par voie hertzienne occupent le domaine public des fréquences radioélectriques ; compte tenu de leur rareté, il n'est pas absurde que des contreparties visant à soutenir la création d'oeuvres d'expression originale française leur soient imposées.
Pour autant, il serait malhonnête de ne pas rappeler l'opposition des radios à la mesure proposée . Lors d'une table ronde organisée avec les représentants des principales radios privées le 2 décembre dernier, la principale critique émise a porté sur le constat du rapport Bordes s'agissant du niveau de production en chansons francophones, jugé erroné. En réalité, la production de chansons en français aurait considérablement diminué ces dernières années (- 60 % en 2015 et seulement 17 % des nouveautés) et son niveau, dans certains genres musicaux, ne permettrait pas aux radios de présenter autant de nouveautés qu'elles le souhaiteraient. Les producteurs, auxquels ne s'impose aucun quota de production, ne feraient aucun effort qualitatif ou quantitatif en faveur de la chanson française. En outre, ils ne communiqueraient pas d'indicateurs précis à l'Observatoire de la musique.
Par ailleurs, les radios ont fait valoir qu'un artiste ne peut s'imposer auprès du public que grâce à un nombre élevé de rotations, d'autant que la durée moyenne d'écoute d'une radio ne dépasse pas deux heures. De fait, les producteurs eux-mêmes harcèleraient les programmateurs pour que leurs artistes soient entendus fréquemment.
Selon elles, la mesure proposée au présent article comporte un risque d'uniformisation des programmes , alors même que les radios doivent affirmer leurs spécificités face à la concurrence des plateformes, non régulées par ailleurs en matière de diversité culturelle. Elle sera également défavorable aux artistes français qui chantent en anglais. La réglementation de 1994 n'est peut-être plus adaptée aux usages, comme le suppose un récent rapport du CSA.
Le CSA, a publié, en décembre 2013, un rapport relatif à « l'exposition des musiques actuelles sur les radios musicales privées » , qui préconise une modification de la loi précitée du 30 septembre 1986, visant à assouplir le système des quotas pour donner plus de place à la régulation via l'introduction de critères de diversité dans les conventions. Ainsi, les radios respectant certains critères (variété des interprètes et des titres différents diffusés, part des nouveaux talents, rotation périodique maximale d'un même titre, etc.) pourraient bénéficier d'un régime adapté. Le CSA envisage ce type d'assouplissement en faveur des radios qui « sont confrontées à une production d'expression française limitée dans les genres musicaux sur lesquels est construite leur programmation » et qui « jouent un rôle de découverte en exposant des titres et/ou des artistes peu connus du grand public et faiblement exposés dans les médias ».
Il est exact que la diffusion d'artistes émergents constitue un risque pour les programmateurs. En outre, la propension fréquente des jeunes talents francophones à chanter en anglais pose la question de l'adaptation des quotas à ce phénomène, qui semble perdurer.
Au final, tout en maintenant la contrainte supplémentaire proposée par l'Assemblée nationale en faveur d'une diversité culturelle effective , il pourrait s'avérer utile d'autoriser une adaptation plus souple de ces quotas en fonction du type de radios et des actions mises en oeuvre, au-delà de la seule programmation musicale, en faveur de la chanson francophone et des jeunes talents. Votre commission a, à cet effet, jugé opportun de laisser la possibilité au CSA d'accorder une dérogation au seuil imposé par le présent article aux radios qui s'engageraient concrètement en faveur de la diversité musicale dans le cadre de leur programmation comme hors antenne ( COM-196 ).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 12 (art. L. 211-3 du code de la propriété intellectuelle) - Coordination
I. - Le texte du projet de loi
Le présent article vise à compléter le 6° de l'article L. 211-3 du code de la propriété intellectuelle, qui dispose que les bénéficiaires de droits voisins ne peuvent interdire « la reproduction et la communication au public d'une interprétation d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme dans les conditions définies au 7° de l'article L. 122-5 » , c'est-à-dire dans le cadre posé par l'exception au droit d'auteur au bénéfice des personnes handicapées.
Il s'agit de prendre en compte l'élargissement de cette exception, par l'article 11 du projet de loi , au travers de la création des articles L. 122-5-1 et L. 122-5-2 du code de la propriété intellectuelle.
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a apporté, via la direction de la séance, une modification rédactionnelle.
III. - La position de votre commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 13 (art. L. 342-3 du code de la propriété intellectuelle) - Coordination
I. - Le texte du projet de loi
Le présent article tend à compléter le 3° de l'article L. 342-3 du code de la propriété intellectuelle, qui autorise l'extraction et la réutilisation d'une base de données dans le cadre de l'exception au droit d'auteur au bénéfice des personnes handicapées, pour y intégrer la référence aux articles L. 122-5-1 et L. 122-5-2 créés par l'article 11 du projet de loi.
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a apporté, via la direction de la séance, une modification rédactionnelle.
III. - La position de votre commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 13 bis (art. L. 132-27 du code de la propriété intellectuelle) - Renforcement de l'obligation d'exploitation des oeuvres audiovisuelles
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Introduit par la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale à l'initiative de son rapporteur, le présent article modifie l'article L. 132-27 du code de la propriété intellectuelle relatif à l'obligation d'exploitation des oeuvres audiovisuelles par les producteurs.
Issue de la loi n° 85-660 du 3 juillet 1985 relative aux droits d'auteur et aux droits des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et des entreprises de communication audiovisuelle, dite loi Lang, cette disposition prévoit que « le producteur est tenu d'assurer à l'oeuvre audiovisuelle une exploitation conforme aux usages de la profession ».
Le droit applicable en matière d'obligation d'exploitation L'obligation exploitation créée par la loi du 3 juillet 1985 se justifiait à l'origine par la volonté de substituer à l'antagonisme fréquent entre auteurs et producteurs, une nouvelle conception de leurs relations où ils seraient associés dans l'exploitation de l'oeuvre, face aux diffuseurs. L'article L. 132-27 énonce l'existence d'une obligation d'exploitation conforme aux usages de la profession à la charge du producteur audiovisuel. La loi du 12 juin 2009 a ajouté la possibilité, pour les organisations professionnelles, d'établir un recueil des usages. Il s'agit d'une obligation de moyens, qui peut fonder, en cas de manquement, une résolution du contrat aux torts exclusifs du producteur. Cette résolution ne pose pas de difficulté lorsque le manquement est caractérisé par l'absence de réalisation de l'oeuvre. A ainsi été résolue une cession de droits d'auteur sur un scénario et une cession de droits d'un réalisateur pour un projet de film n'ayant jamais vu le jour, faute de financement. Mais les conséquences d'une telle résiliation restent incertaines une fois l'oeuvre audiovisuelle achevée. La jurisprudence, consciente des conséquences excessives d'une résiliation, utilise la qualification d'obligation de moyens. Les auteurs parlent plus généralement, d'un ordre public économique de protection des auteurs, obligeant à une mise en valeur optimum de l'oeuvre audiovisuelle. Le fondement de cette obligation est le mandat, la commission ou la fiducie, tous impliquant une notion de représentation et de confiance, source d'obligations renforcées. Cette obligation se justifie également au regard de l'intérêt commun qui caractérise le contrat de production audiovisuelle, le producteur bénéficiant d'une part des recettes tirées de la diffusion de l'oeuvre qu'il assure pour les auteurs. La jurisprudence a précisé le contenu de cette obligation : elle implique pour le producteur, d'accomplir les diligences nécessaires pour obtenir le financement d'un film pour lequel il s'est fait céder les droits sur un scénario. Elle a également énoncé, pour le commanditaire d'un téléfilm, une obligation de diffusion lorsque la cession était consentie à titre exclusif. Elle l'a également étendue aux mandataires du producteur pour considérer, par exemple, que le distributeur exclusif du producteur devait déployer tous les efforts possibles pour promouvoir le film et son exploitation en salles ainsi que de rechercher les débouchés existants pour son exploitation télévisuelle et vidéographique. Ces mandataires, notamment lorsqu'ils sont rémunérés, peuvent ainsi voir leur responsabilité engagée par le producteur sur ce fondement. |
Aux termes du second alinéa du même article, introduit pas la loi du 12 juin 2009 précitée, l'établissement d'un code des usages relève de la responsabilité conjointe des organisations représentatives des producteurs, des organisations professionnelles d'auteurs et des sociétés de perception et de répartition des droits concernées.
Lesdits usages n'ayant jamais été définis , ni même aucune réunion jamais organisée pour engager une concertation professionnelle sur le sujet, l'obligation d'exploitation est demeurée à l'état de principe , tant et si bien que de trop nombreuses oeuvres sont encore indisponibles légalement comme le soulignait récemment les sénateurs Corinne Bouchoux et Loïc Hervé dans un rapport d'information consacré à la Hadopi 34 ( * ) . À titre d'exemple, sur un potentiel de 28 000 oeuvres, seuls 12 000 films français sont actuellement disponibles sur le moteur de recherche créé par le CNC. En outre, l'imprécision de la notion d'usages ne permet pas aux auteurs de s'assurer que le producteur accomplit toutes les diligences pour que les films restent disponibles ou pour susciter leur exploitation.
L'indisponibilité de certaines oeuvres s'explique généralement soit parce qu'elles ne sont pas numérisées - c'est le cas de nombreux films patrimoniaux -, mais il est vrai que le coût de la numérisation d'une oeuvre approche 80 000 euros, soit parce que les droits ne sont pas disponibles en application de la chronologie des médias, soit parce que les titulaires de droits ne souhaitent pas les diffuser (c'est notamment le cas des films de Jean Eustache), soit enfin parce que des producteurs ne font pas montre d'une extrême motivation pour les exploiter.
De nombreux auteurs ont été confrontés à l'absence de volonté de certains producteurs de s'engager en faveur de l'exploitation de leurs oeuvres. Le cas le plus emblématique reste à ce jour celui de Pierre Etaix qui, aux côtés de Jean-Claude Carrière, a dû saisir la justice pour obtenir la restitution de ses droits à l'égard d'un producteur, qui, ne souhaitant pourtant pas exploiter l'oeuvre, avait même assigné en justice la fondation GAN pour contrefaçon alors que cette dernière avait restauré l'un de ses films. En tout état de cause, le nombre extrêmement élevé de films indisponibles pose question.
Le constat de l'indisponibilité d'un grand nombre de films sur les plateformes numériques a conduit le rapporteur de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale à présenter en commission un amendement en faveur d'une révision de l'article 132-27, afin de substituer une « obligation d'exploitation permanente et suivie » à l'actuelle obligation d'exploitation « conforme aux usages de la profession ». La modification proposée rappelait les récentes évolutions du contrat d'édition. Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, a toutefois émis des réserves à son adoption, rappelant que « le producteur n'est en général pas lui-même diffuseur ou distributeur et ne maîtrise donc pas totalement les conditions d'exposition des oeuvres dont il détient les droits » , et proposé, en conséquence, de lancer une réflexion sur le sujet afin d'être en mesure de présenter une rédaction mieux adaptée lors du débat en séance publique . Dans cette attente, l'amendement du rapporteur a été adopté par la commission des affaires culturelles.
Lors du débat en séance publique, Fleur Pellerin a présenté une modification de l'obligation d'exploitation initialement prévue, qui permet de répondre à la nécessité d'améliorer la disponibilité des oeuvres, tout en protégeant le mécanisme de préfinancement. L'obligation de résultat en matière d'exploitation est ainsi remplacée par une obligation de moyens .
Un amendement du gouvernement est, en outre, venu compléter la rédaction issue des travaux de la commission des affaires culturelles en intégrant les éditeurs de service de communication audiovisuelle et de communication au public en ligne dans le champ de la négociation interprofessionnelle.
In fine , aux fins d'élargir l'offre légale d'oeuvres audiovisuelles et cinématographiques sur les plateformes numériques et de garantir aux auteurs une continuité dans l'exploitation des oeuvres qu'ils ont créées et dont ils ont cédé les droits à des tiers à des fins de bonne exploitation, le 1° du présent article renforce les obligations des producteurs, désormais tenus « de rechercher une exploitation suivie de l'oeuvre audiovisuelle , conformément aux usages de la profession, notamment par un service de communication au public en ligne ».
Le 2° renvoie à la concertation professionnelle entre représentants des auteurs, des producteurs, des éditeurs de service de communication audiovisuelle et des plateformes de VàD pour définir les modalités pratiques d'application de la nouvelle obligation, afin d'envisager un dispositif tenant compte des spécificités relatives aux mécanismes de financement des oeuvres, à la distinction de l'économie de l'audiovisuel et du cinéma, mais également à la nécessité de maintenir des conditions objectives, équitables et non-discriminatoires dans les relations entre les détenteurs des droits et les diffuseurs des oeuvres. À cet égard, les exclusivités de ceux qui financent les oeuvres doivent demeurer protégées, tout comme le droit des plateformes de diffusion de choisir les oeuvres qu'elles acquièrent . Cet accord pourra être rendu obligatoire par arrêté d'extension du ministre de la culture.
Pour autant, si aucun accord n'était trouvé entre les parties dans un délai de trois mois à compter de la promulgation du présent texte, un décret en Conseil d'État fixera les conditions d'application de l'obligation susmentionnée. Il s'agit, en obligeant les professionnels à faire rapidement aboutir leurs discussions, que la législation relative à l'exploitation des oeuvres prévue par cet article ne reste pas lettre morte.
II. - La position de votre commission
Votre commission est favorable à toute mesure permettant, dans le respect des droits de chacun, un développement accéléré de l'offre légale bénéfique à la lutte contre le piratage. La mesure proposée, qui n'a pas vocation à mettre à la charge des détenteurs de droits une obligation de résultat mais seulement de moyens et un engagement à fournir ses meilleurs efforts pour que les oeuvres soient exploitées , correspond à cette philosophie.
À cet égard, la modification ne s'éloigne pas fondamentalement des prescriptions de l'article L. 132-27 dans sa rédaction actuelle s'agissant de l'obligation de moyens. Il y est juste précisé que cette exploitation recherchée doit être suivie, ce qui ne doit pas être confondu avec l'obligation d'exploitation permanente et suivie imposée à l'éditeur . De fait, un rapprochement intégral avec l'édition littéraire n'aurait guère de sens, puisque la diffusion des oeuvres audiovisuelles ne dépend pas uniquement du producteur, mais est subordonnée à l'action d'autres intervenants et à l'existence d'autres mécanismes, notamment le droit des plateformes de choisir les oeuvres qu'elles acquièrent.
D'ailleurs, cette obligation limitée aux moyens , comme les facilités qu'offre le numérique en matière d'exploitation, expliquent le délai particulièrement court dont disposent les parties pour trouver un accord. Selon les informations dont dispose votre commission, des contacts ont d'ores et déjà été établis entre les représentants des auteurs, les chaînes de télévision et les cataloguistes et un accord pourrait être envisagé prochainement. Cet accord devra prendre en compte les impératifs de production et les conditions de distribution pour préciser cette obligation.
Par ailleurs, il pourrait être utile que le CNC aide particulièrement les producteurs, qui mettent les oeuvres à disposition.
Afin d'améliorer la clarté de la rédaction proposée pour le 1°, il est nécessaire de supprimer la précision relative aux services de communication au public en ligne (COM-197).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 13 ter (nouveau) (art. L. 331-3 du code de la propriété intellectuelle et L. 442.1 du code du cinéma et de l'image animée) - Renforcement de l'action du Centre national du cinéma et de l'image animée en matière de lutte contre la contrefaçon
Le 6° de l'article 111-2 du code du cinéma et de l'image animée confie au Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) la mission « de participer à la lutte contre la contrefaçon des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles et des oeuvres multimédia ». Dès lors, l'article 331-3 du code de la propriété intellectuelle lui permet d'exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne le délit de contrefaçon, entendu comme la reproduction, la représentation ou la diffusion d'une oeuvre en violation du droit d'auteur, lorsque l'action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée.
Le présent article additionnel, adopté à l'initiative de David Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain, renforce les pouvoirs du CNC en la matière en lui permettant, par une modification de l'article L. 331-3 précité, de porter plainte et de se constituer partie civile devant le juge d'instruction dès lors que le délit de contrefaçon constaté emporte pour lui un préjudice quant aux ressources qui lui sont affectées. Il étend en outre le champ des délits au titre duquel le CNC peut intervenir en partie jointe au délit concernant les droits voisins.
En cohérence, l'article L. 442-1 du code du cinéma et de l'image animée, relatif au délit de contrefaçon, est complété pour intégrer cette nouvelle prérogative ( COM-26 ). Dans le droit en vigueur, le président du CNC ne pouvait qu'exercer les droits reconnus à la partie civile.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.
Article 13 quater (nouveau) (art. L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle et L. 443.1 nouveau du code du cinéma et de l'image animée) - Renforcement de l'action du Centre national du cinéma et de l'image animée en matière de lutte contre le piratage sur Internet
Cet article additionnel, des mêmes auteurs que le précédent, poursuit un objectif identique au dispositif précédent pour ce qui concerne, cette fois, les atteintes au droit d'auteur sur Internet . Il autorise ainsi le CNC à engager une action en cessation devant le tribunal de grande instance lorsqu'il constate une telle atteinte. À cet effet, est complété l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle qui n'offre, dans sa rédaction actuelle, cette possibilité qu'aux seuls titulaires de droits sur les oeuvres et objets protégés, à leurs ayants droit, aux société de perception et de répartition des droits et aux organismes de défense professionnels.
Par coordination, cette nouvelle prérogative du CNC est intégrée, dans un nouveau chapitre III du titre IV du Livre IV comprenant l'article L.443-1 nouveau, au code du cinéma et de l'image animée ( COM-29 ).
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé .
Chapitre IV Développer et pérenniser l'emploi et l'activité professionnelle
Article 14 A (supprimé) - Rapport sur la situation du dialogue social et de la représentativité des négociateurs professionnels du secteur du spectacle vivant et enregistré
I. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Cet article a été introduit par l'Assemblée nationale en séance publique, à l'initiative de M. Jean-Patrick Gille, rapporteur en 2013 de la mission d'information commune de cette même assemblée sur les conditions d'emploi dans les métiers artistiques. Il visait initialement à compléter l'article L. 2152-2 du code du travail afin d'étendre le mécanisme de la consultation multi-professionnelle au champ du spectacle vivant et enregistré. Ce mécanisme, créé par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale afin de fixer des règles relatives à la représentativité nationale des organisations patronales dans les secteurs dits du « hors champ », c'est-à-dire non couverts par les accords nationaux interprofessionnels, s'applique aujourd'hui dans trois secteurs : ceux de l'agriculture, des professions libérales et de l'économie sociale et solidaire. Il prévoit l'obligation pour les organisations patronales représentatives au niveau national et interprofessionnel, avant toute ouverture et toute conclusion d'un accord national et interprofessionnel, de consulter les organisations représentatives au niveau national et multiprofessionnel.
À la suite d'une seconde délibération demandée par le Gouvernement, la rédaction de l'article 14 A a été modifiée au profit de la rédaction initialement prévue par l'amendement de repli de M. Jean-Patrick Gille. Cet article prévoit désormais la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, portant sur la situation du dialogue social et de la représentativité des négociateurs professionnels du secteur du spectacle vivant et enregistré.
II. - La position de votre commission
Cet article s'inscrit dans le cadre de la réforme mise en oeuvre par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi. Compte tenu de l'existence de règles spécifiques pour l'indemnisation chômage des artistes et techniciens intermittents du spectacle, l'article 20 de cette loi a en effet autorisé les organisations représentatives des intermittents et de leurs employeurs à négocier directement ces règles entre elles, sur la base d'un cadre fixé par l'échelon interprofessionnel.
Ce nouveau mécanisme devrait s'appliquer dès 2016, à l'occasion de l'ouverture de la renégociation de l'assurance chômage, qui devrait se prolonger jusqu'en 2018. La question de la représentativité des négociateurs professionnels revêt donc une importance stratégique à l'aube de telles échéances. Deux lois sont intervenues pour définir les critères relatifs à la représentativité respectivement syndicale et patronale : la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail et la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale .
Pour autant, votre commission s'interroge sur l'opportunité de cette demande de rapport, pour des raisons tenant tant à la forme qu'au fond.
D'un point de vue purement formel, votre commission rappelle les réticences du Sénat à l'égard des demandes de rapport, qui conduisent à insérer dans la loi des dispositions dépourvues de tout caractère normatif. Elle observe par ailleurs que cette demande de rapport émane d'un amendement finalement repris à son compte par le Gouvernement à l'occasion d'une seconde délibération. Votre commission estime dès lors que si le Gouvernement souscrit à l'objectif du rapport au point d'en déposer l'amendement, il peut tout à fait prendre l'initiative de le rédiger sans qu'un article de loi ne l'y ait invité.
Sur le fond, votre commission estime que la rédaction d'un rapport ne constitue pas une réponse suffisante au regard du problème soulevé par la représentativité des négociateurs professionnels dans le domaine du spectacle et de l'imminence de l'ouverture des négociations . À quelques semaines des échéances, il convient de déterminer les parties qui seront autorisées à prendre place autour de la table des négociations. C'était d'ailleurs le sens de la position de la commission des affaires sociales du Sénat au moment de l'examen du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi. Elle avait alors estimé qu'une négociation reposant sur le principe de reconnaissance réciproque des organisations, notamment patronales, serait vouée à l'échec, compte tenu des problèmes de reconnaissance qui existent aujourd'hui dans ce secteur. Elle avait alors proposé que les organisations représentatives de l'ensemble des professions de la production cinématographique, de l'audiovisuel et du spectacle soient définies par décret avant l'ouverture des négociations. Cette solution n'avait cependant pas recueilli l'aval du Gouvernement et avait été supprimée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.
Votre commission a adopté un amendement de suppression à l'initiative de ses rapporteurs ( COM-198 ).
En conséquence, votre commission a supprimé cet article.
Article 14 (article L. 7121-2 du code du travail) - Élargissement de la liste des métiers des artistes du spectacle aux artistes de cirque, aux marionnettistes et aux artistes-interprètes du spectacle
I. - Le droit en vigueur
Le chapitre I er du titre II du livre I er de la septième partie du code du travail est consacré aux dispositions particulières relatives aux artistes du spectacle. L'article L. 7121-2 du code du travail ne donne pas de définition des artistes du spectacle, mais en dresse la liste des principaux métiers . Dix types d'artistes y figurent : l'artiste dramatique, l'artiste chorégraphique, l'artiste de variétés, le musicien, le chansonnier, l'artiste de complément, le chef d'orchestre, l'arrangeur-orchestrateur et le metteur en scène pour l'exécution matérielle de sa conception artistique.
La qualité d'artiste du spectacle confère à la personne qui en bénéficie des droits spécifiques. L'article L. 7121-3 du code du travail pose en particulier le principe de la présomption de salariat de l'artiste du spectacle, quels que soient le mode et le montant de sa rémunération ou la qualification donnée au contrat par les parties. Cette présomption s'accompagne de l'octroi de droits sociaux, tels que l'assurance chômage, la sécurité sociale, la médecine du travail, les prestations de retraite et de retraite complémentaire ou les congés payés.
Les artistes de cirque, les marionnettistes et les artistes-interprètes ne sont pas aujourd'hui explicitement mentionnés dans le code du travail. Seul le code de la propriété intellectuelle leur consacre un chapitre spécifique. L'article L. 212-1, en particulier, définit la notion d'artiste-interprète : « l'artiste-interprète ou exécutant est la personne qui représente, chante, récite, déclame, joue ou exécute de toute autre manière une oeuvre littéraire ou artistique, un numéro de variétés, de cirque ou de marionnettes ».
II. - Le texte du projet de loi
Cet article complète l'article L. 7121-2 du code du travail afin d'y intégrer les artistes de cirque, les marionnettistes et les personnes reconnues comme artistes-interprètes par les conventions collectives du spectacle vivant étendues.
D'une part, il vise à clarifier le régime juridique applicable à ces artistes en levant toute ambiguïté sur leur appartenance à la catégorie des artistes du spectacle. Bien que la rédaction de l'article L. 7121-2 du code du travail ne fasse pas obstacle à ce que les artistes de cirque, les marionnettistes ou les artistes-interprètes se voient octroyer la qualité d'artiste du spectacle et les droits qui l'accompagnent, certains se sont parfois vus exclure du bénéfice des dispositions particulières du code du travail qui leur sont applicables en raison d'interprétations restrictives de l'article L. 7121-2 du code du travail. L'ajout de ces trois nouvelles catégories pourrait permettre de mettre un terme aux risques juridiques qui pèsent sur ces artistes et aux risques contentieux qui en découlent.
D'autre part, il a pour objet d' apporter une plus grande souplesse dans la définition de la catégorie en renvoyant aux conventions collectives négociées dans le domaine du spectacle vivant. Les métiers du spectacle ont subi d'importantes évolutions ces dernières années, les pratiques artistiques étant marquées par une diversité et une transdisciplinarité croissantes. Certains métiers ont fait leur apparition ou ont pris une ampleur nouvelle. Un certain nombre d'artistes ne se retrouvent pas dans la définition des artistes du spectacle, telle qu'elle est donnée à l'article L. 7121-2 du code du travail. La référence aux conventions collectives pourrait donc permettre d'adapter la législation aux évolutions actuelles, mais aussi à celles qui interviendront demain et que les conventions collectives ne manqueront pas de prendre en compte. Elle ne concernerait cependant que les conventions collectives applicables dans le domaine du spectacle vivant. Le domaine du cinéma, par exemple, ne serait pas concerné.
III. - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
Les seules modifications apportées par l'Assemblée nationale sont d'ordre légistique et ont été introduites, sans amendement, à la demande de la direction de la séance.
IV. - La position de votre commission
Au-delà des objectifs premiers de clarification et d'actualisation de notre droit, cet article devrait se traduire par la reconnaissance de certaines professions artistiques, mais aussi du rôle joué par le dialogue social dans ce secteur.
Par ailleurs, votre commission a adopté un amendement de ses rapporteurs ( COM-199 ) qui modifie le 10° de l'article L. 7121-2 du code du travail afin de préciser que le statut d'artiste du spectacle est également applicable aux chorégraphes. En théorie, le 10°, qui mentionne le metteur en scène, couvre déjà le chorégraphe, puisqu'il est entendu dans un sens large comme le metteur en scène d'ouvrages dramatiques, lyriques et chorégraphiques. Cependant, l'ajout de cette précision permet de lever tout risque contentieux. Il convient de noter que le statut d'artiste du spectacle, ce qui sous-entend une rémunération sous forme de salaire, ne leur est octroyé que pour l'exécution matérielle de leur conception artistique, à savoir les répétitions et les premières représentations. La création intellectuelle de la conception artistique relève, pour sa part, d'une rémunération sous forme de droits d'auteur.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 15 - Conditions d'emploi des artistes du spectacle vivant par les collectivités territoriales
I. - Le droit en vigueur
La jurisprudence du Tribunal des conflits relative à la nature, publique ou privée, du contrat de travail des artistes du spectacle vivant engagés par les collectivités territoriales a évolué en 2011. En application de la jurisprudence dite « Berkani », le Tribunal des conflits considérait, jusqu'à cette date, que « les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public administratif sont des agents contractuels de droit public, quel que soit leur emploi ». La seule exception à ce principe constant concernait les contrats de droit privé par détermination de la loi.
Dans deux décisions rendues le 6 juin 2011, le Tribunal des conflits a finalement écarté cette solution. Il a estimé que « le contrat par lequel une collectivité publique gérant un service public administratif et agissant en qualité d'entrepreneur de spectacle vivant, engage un artiste du spectacle en vue de sa participation à un tel spectacle, est présumé être un contrat de travail soumis aux dispositions du code du travail ». Cette requalification en contrat de droit privé suppose l'application non seulement des dispositions du code du travail, comme le précise le Tribunal des conflits, mais aussi celle des conventions collectives nationales, en particulier la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1 er janvier 1984.
Les fondements des décisions du 6 juin 2011 du Tribunal des conflits Afin de dégager une solution, le Tribunal des conflits, dans ses deux décisions du 6 juin 2011, s'est fondé sur les dispositions législatives particulières qui régissent les articles du spectacle, aujourd'hui prévues au chapitre I er du titre II du livre I er de la septième partie du code du travail. Il a notamment combiné les dispositions des articles L. 7121-3 et L. 7122-2 du code du travail, figurant alors respectivement à l'article L. 762-1 du code du travail et à l'article 1-1 de l'ordonnance n° 45-2339 du 13 octobre 1945 relative aux spectacles. L'article L. 7121-3 dispose que « tout contrat par lequel une personne s'assure, moyennant rémunération, le concours d'un artiste du spectacle en vue de sa production, est présumé être un contrat de travail dès lors que cet artiste n'exerce pas l'activité qui fait l'objet de ce contrat dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce ». En application de l'article L. 7122-2, « est entrepreneur de spectacles vivants toute personne qui exerce une activité d'exploitation de lieux de spectacles, de production ou de diffusion de spectacles , seul ou dans le cadre de contrats conclus avec d'autres entrepreneurs de spectacles vivants, quel que soit le mode de gestion, public ou privé, à but lucratif ou non , de ces activités ». |
L'impact de cette jurisprudence n'est pas négligeable pour les collectivités territoriales. Il est en effet fréquent que celles-ci aient recours aux services d'artistes-interprètes, en particulier lorsqu'elles ont à gérer, généralement sous forme de régie directe ou personnalisée ou de syndicat d'économie mixte, un théâtre, un orchestre symphonique ou une maison d'opéras. Plusieurs établissements publics à caractère industriel et commercial sont également concernés.
Les conséquences de cette jurisprudence sont doubles.
D'une part, la requalification des contrats de droit public des artistes-interprètes en contrats de droit privé est susceptible d'engendrer un surcoût lié à l'application de règles auxquelles ne sont pas aujourd'hui soumises les collectivités (salaire minimum, cotisations d'assurance chômage, indemnité obligatoire des frais de déplacements, indemnités de licenciement, indemnités de départ à la retraite, régime de prévoyance des intermittents). Une enquête menée par la chambre professionnelle des directions d'opéra conclut que le surcoût pourrait osciller entre 15 % et 30 %. D'aucuns craignent que les collectivités ne soient pas en mesure de le prendre en charge, compte tenu du contexte budgétaire actuel, et que l'avenir de plusieurs structures se trouve menacé.
D'autre part, les collectivités, n'étant pas associées à la négociation des conventions collectives, pourraient perdre la maîtrise des conditions d'emploi en étant contraintes d'appliquer lesdites conventions.
II. - Le texte du projet de loi
Cet article clarifie le régime du contrat de travail applicable aux artistes du spectacle vivant engagés par des collectivités territoriales ou leurs groupements suite à l'évolution de la jurisprudence du Tribunal des conflits. Il opère une distinction fondée sur la nature du besoin présidant au recrutement, selon que ce besoin est permanent ou ponctuel.
Le I de l'article prévoit que les artistes employés au titre d'un besoin permanent par les collectivités territoriales ou leurs groupements, agissant en qualité d'entrepreneur de spectacles vivants, doivent être considérés comme des agents contractuels de la fonction publique territoriale. Leur contrat de travail serait donc un contrat de droit public.
La notion de besoin permanent renvoie à la jurisprudence du Conseil d'État, selon laquelle le caractère permanent d'un emploi ne s'apprécie pas seulement au regard de sa durée, mais aussi en fonction de la nature du besoin auquel il répond.
Le II traite des artistes recrutés par les collectivités territoriales ou leurs groupements en raison d'un besoin ponctuel. Ce paragraphe dispose que les artistes recrutés, en application du 3° de l'article L. 1242-2 du code du travail, pour occuper « des emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois » relèvent, pour leur part, des dispositions du code du travail. Leur contrat de travail serait donc un contrat de droit privé. Ils pourraient alors bénéficier du contrat à durée déterminée d'usage (CDDU) et des dispositions particulières aux articles du spectacle prévues au chapitre I er du titre II du livre I er de la septième partie du code du travail relatif aux articles du spectacle. Les conventions collectives en matière de spectacle vivant leur seraient applicables.
L'Assemblée nationale n'a apporté aucune modification à cet article.
III. - La position de votre commission
Cet article répond à une attente des collectivités territoriales et de leurs groupements, susceptibles d'être confrontés à des difficultés depuis le revirement de jurisprudence du Tribunal des conflits quant à la nature du contrat de travail qu'ils ont pu conclure avec des artistes. L'Association des maires de France se montre favorable à sa rédaction, qui devrait permettre de régler le statut des artistes recrutés à titre permanent.
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 16 - Communication d'informations relatives aux billetteries par les entrepreneurs du spectacle au ministère de la culture
I. - Le texte du projet de loi
Cet article vise à faciliter l'observation centralisée du secteur du spectacle vivant en mettant en place un dispositif de remontée obligatoire des données de billetterie . L'objectif est, à terme, de confier l'exploitation des données à un observatoire de la création, qui serait créé par voie réglementaire, placé auprès du ministre de la culture et chargé d'évaluer l'impact des politiques publiques dans ce secteur.
Le dispositif s'applique aux entrepreneurs de spectacles vivants titulaires d'une licence, que constituent les exploitants de lieux de spectacles aménagés pour les représentations publiques, les producteurs de spectacles ou entrepreneurs de tournées et les diffuseurs de spectacles.
Le I prévoit que les entrepreneurs de spectacles vivants doivent communiquer au ministre chargé de la culture des données relatives à chacune des représentations :
- d'une part, des informations quantitatives relatives au nombre de billets émis, au prix de la place et à la recette correspondante . Il s'agit d'informations que les seuls exploitants de spectacles étaient déjà tenus de compiler en application de l'article 50 sexies H du code général des impôts dans la perspective d'un éventuel contrôle de l'administration fiscale, mais qui ne faisaient pas l'objet, jusqu'ici, d'une transmission obligatoire ;
- d'autre part, des informations qualitatives relatives au domaine, à la localisation et au type de lieu de chaque représentation .
Il est précisé que cette obligation d'information devrait également s'appliquer aux spectacles pour lesquels la billetterie a été confiée à des tiers , de manière à prendre en compte la forte externalisation de la billetterie intervenue dans les dernières décennies, en particulier sous l'effet des mutations technologiques. La commercialisation de la billetterie relève désormais, pour une bonne partie d'entre elle, des distributeurs, à l'image de la Fnac, de Ticketnet ou de Digitick, qui peuvent eux-mêmes faire appel à des sous-distributeurs, notamment les grandes surfaces ou les agences de voyage, ou à des vendeurs en gros, tels les comités d'entreprise.
Le II renvoie à un décret le soin de fixer les modalités d'application.
II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
Cet article a été modifié en commission par un amendement du Gouvernement destiné à améliorer la connaissance de la composition du prix des billets , en exigeant des informations relatives au prix global payé par le spectateur ou à la gratuité du billet. Aujourd'hui, le 4° du III de l'article 50 sexies B du code général des impôts impose déjà que chaque partie du billet comporte, de façon transparente ou sous forme d'informations codées, ces données.
Dans le contexte de développement toujours croissant de la billetterie en ligne, ces informations devraient être utilisées pour déterminer les frais de réservation et d'intermédiation, ainsi que les éventuelles rétro-commissions, qui s'imputent au prix des places au détriment tant des spectateurs que des auteurs. En effet, ces frais ne sont pas pris en compte dans l'assiette de rémunération des auteurs.
L'amendement a également ajouté l'obligation de transmettre, parmi les diverses informations qualitatives, le nom du spectacle.
III. - La position de votre commission
Votre commission se félicite de l'instauration de ce dispositif contraignant de transmission de données relatives à la billetterie, qui devrait contribuer à améliorer la connaissance du secteur du spectacle vivant. À ce titre, elle appelle de ses voeux la mise en place rapide de l'observatoire, dont la création est annoncée par voie réglementaire dans l'étude d'impact qui accompagne le projet de loi. Cet organe, qui devrait être investi d'un « rôle d'animation, de recueil et de centralisation des données, de coordination, de partage et de mise en cohérence des méthodes » et rassembler autour d'une même table des représentants de l'État, des collectivités territoriales et des acteurs professionnels est attendu par tous les représentants professionnels que votre rapporteur a rencontrés comme par les collectivités territoriales.
Néanmoins, votre commission s'est étonnée que cet observatoire, dont l'étude d'impact indique pourtant qu'il serait chargé d'analyser « les secteurs du spectacle vivant, des arts plastiques et des industries culturelles qui y sont liées », dispose à cette fin d'informations portant principalement sur les remontées de billetteries du spectacle vivant. Le Gouvernement a indiqué qu'il s'agissait des seules informations dont la transmission nécessitait la création d'une base légale. Pour le reste, l'observatoire devrait se fonder sur les données statistiques, sociologiques, économiques et sociales que récoltent chacun des acteurs du secteur (État, collectivités territoriales, établissements publics, personnes morales de droit public ou de droit privé des secteurs concernés) et qu'ils partageraient aux fins d'analyse.
Au bénéfice de ces observations, votre commission a adopté cet article sans modification .
Article 16 bis (art. L. 136-5 et L. 243-1-3 du code de la sécurité sociale) - Maintien du versement des cotisations sociales à la caisse des congés spectacles
I. - Le droit en vigueur
Les indemnités de congés payés sont normalement financées directement par les employeurs. Néanmoins, dans quatre secteurs d'activités caractérisés par une forte intermittence (bâtiments et travaux publics, transports, spectacles, manutention portuaire), le législateur a créé des caisses de congés payés afin de garantir le versement des indemnités de congés payés que les entreprises ne parvenaient pas à assurer aux travailleurs changeant souvent d'employeurs. Dans le domaine du spectacle vivant, de l'audiovisuel et du cinéma, c'est la caisse des congés spectacles, dont la création remonte à 1939, qui procède au versement des indemnités auprès des artistes et techniciens intermittents qui n'ont pas été employés de manière continue chez un même employeur pendant les douze mois précédant leur demande de congé.
Pour assurer le paiement des indemnités de congés payés, les caisses de congés des différents secteurs prélevaient jusqu'alors sur les entreprises membres une cotisation, qui incluait le montant des cotisations et contributions de sécurité sociale dues sur ces indemnités. L'article 23 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015 est revenu sur ce principe. Il a imposé que, pour les droits à congés acquis postérieurement au 1 er avril 2015, les cotisations de sécurité sociale, la contribution sociale généralisée (CSG), la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) et la contribution solidarité autonomie (CSA) dues par les employeurs au titre des périodes de congés payés soient versés directement à l'Union de recouvrement pour la sécurité sociale et les allocations familiales (URSSAF), avec un régime transitoire jusqu'en 2018.
Cette disposition a immédiatement soulevé des difficultés pour la caisse des congés spectacles, à l'heure où le ministère de la culture et de la communication lui renouvelait pourtant son soutien en confiant sa gestion à Audiens, en dépit de la position exprimée par la Cour des comptes dans son rapport public annuel de 2013 recommandant sa suppression. Conscientes que cette réforme pourrait obérer les efforts de la caisse à améliorer sa rentabilité financière, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et la ministre de la culture et de la communication ont décidé, en février dernier, la mise en place d'un moratoire sur l'application de l'article 23 susmentionné aux employeurs d'intermittents du spectacle.
II. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Cet article résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale en séance publique, qui avait fait l'objet d'un sous-amendement du rapporteur destiné à rendre sa rédaction conforme aux canons légistiques. Il vise à revenir, pour le seul secteur du spectacle, sur la réforme prévue par l'article 23 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.
À cet effet, il modifie l'article L. 243-1-3 du code de la sécurité sociale, qui prévoit le prélèvement à la source , pour les employeurs affiliés aux caisses de congés, du versement transport et de la cotisation due au Fonds national d'aide au logement, d'une part, et des cotisations de sécurité sociale et des contributions sociales, d'autre part, afin d'en exclure les employeurs d'artistes et techniciens intermittents du spectacle .
Il répond à une demande des employeurs, exprimée dans le cadre du Conseil national des professions du spectacle, et soutenue par Audiens.
III. - La position de votre commission
Votre commission a pris acte de la nécessité, pour le législateur, de retranscrire dans la loi le moratoire décidé par les ministres chargés des affaires sociales et de la culture s'agissant de l'application de l'article 23 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 aux employeurs d'intermittents du spectacle.
Elle a cependant modifié la rédaction proposée par l'Assemblée nationale, qui ne lui paraissait pas suffisamment précise, en adoptant un amendement à l'initiative de ses rapporteurs ( COM-200 ).
D'une part, dans un souci de cohérence, elle a rétabli, au III de l'article L. 136-5 du code de la sécurité sociale, les dispositions qui avaient été abrogées par coordination par l'article 23 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 relatives au recouvrement de la CSG par les caisses de congés payés, en adaptant leur rédaction à la seule caisse des congés spectacles.
D'autre part, elle a décidé de circonscrire le champ de la dérogation accordée aux employeurs d'intermittents aux seules cotisations et contributions pour lesquelles le principe du prélèvement à la source avait été décidé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. Cette modification se justifie par la volonté de limiter au maximum les exceptions mises en place en faveur du secteur du spectacle, qui suscitent légitimement la colère des autres caisses de congés payés qui existent dans d'autres secteurs d'activités, en particulier celui des bâtiments et travaux publics.
En effet, l'article 16 bis , dans sa rédaction résultant des débats de l'Assemblée nationale, aurait eu pour conséquence de remettre en cause non seulement le prélèvement à la source des cotisations de sécurité sociale et contributions sociales versées par les employeurs au titre des congés payés, mais également du versement transport et de la cotisation due au Fonds national d'aide au logement. Or, ce second prélèvement à la source ne résulte pas de l'article 23 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, mais de l'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Il s'applique donc déjà aux employeurs d'intermittents, sans qu'il ait été remis en cause jusqu'ici.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Chapitre V - Enseignement
supérieur de la création artistique et enseignement artistique
spécialisé
Article 17 A (articles L. 214-13 et
L. 216-2 du code de l'éducation) - Missions des conservatoires
I. - Le droit en vigueur
L'enseignement initial de la musique, de la danse et de l'art dramatique est assuré par des établissements d'enseignement public, communément appelés « conservatoires », qui relèvent de l'initiative et de la responsabilité des collectivités territoriales.
La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales 35 ( * ) a tenté de clarifier les responsabilités des respectives des différents niveaux de collectivités territoriales. C'est ainsi qu'aux termes de l'article L. 216-2 du code de l'éducation :
- la commune (ou l'établissement public de coopération intercommunale) organise et finance l'enseignement initial et l'enseignement artistique en partenariat avec les établissements scolaires ;
- le département adopte un « schéma départemental de développement des enseignements artistiques » (sauf arts plastiques) en concertation avec les communes ; il y fixe les conditions de sa participation au financement de l'enseignement initial ;
- la région organise et finance le ( cycle d'enseignement professionnel initial) (CEPI) 36 ( * ) et sanctionné par l'obtention du diplôme national d'orientation professionnelle (DNOP).
L'État procède au classement des établissements, définit les qualifications exigées du personnel enseignant et apporte une aide technique à l'élaboration du contrat de plan et du schéma précités.
L'organisation des cycles d'études musicales au sein des conservatoires 37 ( * ) Éveil et initiation - objectifs : ouvrir et affiner les perceptions - durée : entre 1 et 3 ans selon l'âge - pas d'évaluation formalisée 1 er cycle - objectifs : construire la motivation et la méthode, choisir une discipline, constituer les bases de pratique et de culture - durée : entre 3 et 5 ans - examen de 1 er cycle donnant accès au 2 e cycle 2 e cycle - objectifs : contribuer au développement artistique et musical personnel - durée : entre 3 et 5 ans - cycle conclu par le brevet de fin de 2 e cycle qui donne accès au 3 e cycle et à l'examen d'entrée dans le CEPI, dit brevet d'études musicales ( BEM ) 3 e cycle non diplômant - objectifs : approfondissement des connaissances et des pratiques pour les musiciens amateurs - durée en fonction du contrat et du projet ou 3 e cycle diplômant - objectifs : développer un projet artistique personnel, accéder à une pratique autonome, acquérir des connaissances structurées, s'intégrer dans le champ de la pratique musicale amateur, pouvoir évoluer vers la pratique amateur - durée : entre 2 et 4 ans - cycle conclu par le certificat d'études musicales ( CEM ) ou 3 e cycle professionnalisant , dit cycle d'enseignement professionnel initial ( CEPI ) ou cycle d'orientation professionnelle ( COP ) selon les régions - objectifs : approfondir sa motivation et ses aptitudes en vue d'une orientation professionnelle, confirmer sa capacité à suivre un enseignement supérieur - durée : entre 2 et 4 ans - cycle conclu par le diplôme national d'orientation professionnelle ( DNOP ). |
Avant 2004, l'État organisait et finançait le 3 e cycle professionnalisant proposé par les conservatoires. La loi de 2004 a décentralisé cette compétence au profit des régions au titre de leur compétence générale sur la formation professionnelle initiale. Mais celles-ci ont estimé qu'il s'agissait moins d'une décentralisation que de la création d'une compétence nouvelle dont la compensation financière était inadéquate. Sur les 21 régions alors existantes, seules deux ont mis en place et financé de tels cycles, le Nord-Pas-de-Calais et le Poitou-Charentes.
Le CEPI est donc resté peu développé, très mal connu et la très grande majorité des étudiants qui se destinaient à une carrière musicale, chorégraphique ou théâtrale, a de facto validé :
- soit le Diplôme d'études musicales, chorégraphiques ou théâtrales (DEM, DEC ou DET) ;
- soit un COP (cycle d'orientation professionnelle), dispositif remplaçant le CEPI dans les régions ayant refusé sa mise en oeuvre.
Face à cette situation de blocage impliquant la quasi-totalité des régions, l'État a renoncé à transférer les crédits aux régions et a maintenu un financement direct des conservatoires concernés mais dans des montants de plus en plus restreints.
Le désengagement de l'État du financement des conservatoires Entre 2012 et 2015, les crédits du budget de l'État consacrés aux conservatoires sont passés de 27 millions d'euros annuels à moins de 6 millions d'euros (soit - 80 % en trois ans). Seuls les conservatoires à rayonnement régional adossés à un pôle d'enseignement supérieur (soit 9 conservatoires en plus des conservatoires nationaux de Paris et de Lyon) ont conservé un financement étatique, accentuant l'écart entre les pôles urbains les plus performants et le reste du territoire. L'année 2015 a même été marquée par la disparition de la ligne budgétaire spécifique qui était consacrée à ce financement, augurant la possible disparition totale des crédits. Cette quasi-disparition des crédits de l'État s'est conjuguée avec les difficultés croissantes des autres collectivités confrontées elles aussi au désengagement de l'État (les subventions de l'État aux collectivités territoriales ont baissé de 11 milliards d'euros sur les trois dernières années). Comme l'a bien montré la « Table ronde sur la situation des conservatoires » organisée par votre commission le 1 er juillet 2015 , transformations (voire suppressions) de postes et hausse des tarifs (ou modulation en fonction des revenus des parents) ont constitué les deux principales pistes pour équilibrer les budgets. De surcroît, la réforme des rythmes scolaires généralisée pour les établissements publics à compter de la rentrée de septembre 2014 a largement contribué à compliquer l'équation budgétaire et organisationnelle des conservatoires. |
Très tôt soucieuse de sortir de cette crise institutionnelle liée à la décentralisation inachevée des enseignements artistiques, la présidente de votre commission, Catherine Morin-Desailly a étudié en 2007 avec attention les expérimentations d'instauration du CEPI dans 2 régions et démontré dans un rapport d'information 38 ( * ) que les charges étaient maîtrisées et que les équipes des conservatoires étaient en attente d'une mise en oeuvre de la réforme et d'un pilotage au niveau régional.
La situation n'ayant pas évolué, et afin de proposer une nouvelle sortie de crise, elle a déposé successivement deux propositions de loi , l'une en 2014 39 ( * ) , l'autre en 2015 40 ( * ) .
L'adoption l'été dernier de la loi NOTRe 41 ( * ) , qui confie pourtant de nouvelles compétences aux régions, n'a pas non plus permis de clarifier cette situation puisque la culture est restée une « compétence partagée » entre les différents niveaux de collectivités.
II. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Il y a quelques mois, le Premier ministre a reconnu que la baisse du budget de la culture au début de l'actuel quinquennat avait été « une erreur » 42 ( * ) . La ministre de la culture et de la communication a ensuite, à son tour, regretté la diminution du financement des conservatoires par l'État 43 ( * ) . Ces mea culpa successifs, bien que tardifs, ont été accueillis avec soulagement par l'ensemble du secteur. Pour 2016, 13,5 millions d'euros de crédits ont été votés pour les conservatoires dans le budget de la culture.
Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement lors de l'examen du texte en commission, se veut, lui aussi, la manifestation du réengagement de l'État dans le fonctionnement des conservatoires.
Dans son 1° , le présent article remplace la notion de CEPI par celle d' « enseignement préparant à l'entrée dans les établissements d'enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant », ce qui correspond à un dispositif de « classes préparatoires ». Selon les termes de la ministre : « cette dénomination commune permettra de rendre l'organisation des enseignements artistiques plus lisible ».
Aux termes de l'article L. 216-2, l'enseignement initial dispensé par les conservatoires vise à permettre une « pratique artistique autonome ». Le aa) (nouveau) du 2° du présent article, adopté par l'Assemblée nationale sur proposition de notre collègue député François de Mazières, précise que cette pratique artistique autonome est « à vocation professionnelle ou amateur ».
Cet article traduit également un certain réengagement de l'État dans le financement du 3 e cycle spécialisé : le b) du 2° prévoit désormais que la région « participe au financement » de cet enseignement, et non plus qu'elle le « finance » comme c'était le cas dans le texte issu de la loi de 2004. Cette modification implique donc que désormais , aux termes de la loi, les régions ne seront plus les seules responsables du financement de ce 3e cycle professionnalisant . L'État pourra s'y réengager et les communes et intercommunalités sur lesquelles reposait de facto le financement de ce 3 e cycle, pourront également poursuivre leur implication financière.
Cette modification est conforme à l'une des préconisations du rapport de notre présidente Catherine Morin-Desailly : que les régions ne soient pas seules à financer le 3 e cycle professionnalisant des conservatoires.
Le c) du 2° du présent article met une nouvelle obligation à la charge de l'État : celle de définir un « schéma national d'orientation pédagogique dans le domaine de l'enseignement public spécialisé de la musique, de la danse et de l'art dramatique ». Il s'agit, selon les termes de la ministre, de « réaffirmer et approfondir le rôle de l'État en matière d'expertise et d'orientation pédagogique ». Ces schémas existent déjà 44 ( * ) , il ne s'agit donc ici que de leur conférer une base juridique.
III. - La position de votre commission
Votre commission salue le réengagement de l'État dans le financement des conservatoires , qui constituent l'une des richesses culturelles de notre pays.
Parler, comme le fait la ministre, d'un « Plan conservatoires » est toutefois quelque peu abusif : le « réengagement financier » de l'État pour 2016 ne permet même pas de retrouver le niveau de financement de 2014 ...
Les montants accordés par l'État sont relativement faibles au regard des budgets concernés (à peine 7 % des budgets des conservatoires en 2012), mais le symbole d'un soutien de l'État est important et la situation financière tendue des établissements ne permet pas de se désintéresser du moindre financeur.
Votre commission s'est toujours montrée très attachée à la défense du réseau des conservatoires dans notre pays et de l'enseignement spécialisé de la musique, de la danse et du théâtre.
Longtemps taxés d'élitisme, les conservatoires sont aujourd'hui totalement ouverts sur la société, ouverts aux nouvelles pratiques artistiques, ouverts aux nouveaux publics. Ils jouent le rôle indispensable de centres de ressources pour le développement de l'éducation culturelle et artistique sur nos territoires.
Mais les nouvelles missions qui leur sont confiées ne doivent pas s'exercer au détriment d'un enseignement de qualité de la musique, de la danse et du théâtre. Les conservatoires doivent conserver un enseignement de haut niveau, exigeant et qui permet de former à la fois les éminents amateurs et les professionnels de très grand talent qui font la richesse culturelle et contribuent au rayonnement culturel de notre pays.
Un réseau de conservatoires exceptionnel Créé en 1795 en remplacement des maîtrises religieuses pour former les musiciens professionnels de la jeune République, le Conservatoire de Paris est l'ancêtre de notre réseau de conservatoires. Progressivement étoffé par le développement d'écoles de musique créées par les collectivités, et principalement les communes, ce réseau a conservé sa mission initiale de formation des musiciens professionnels tout en devenant également un lieu d'enseignement artistique en direction des amateurs. On estime aujourd'hui que 2 % des élèves des conservatoires optent pour une carrière professionnelle artistique ; ce sont donc 98 % des élèves qui sont formés en « amateurs ». Ce réseau compte aujourd'hui 441 conservatoires « classés » (42 conservatoires à rayonnement régional, 104 conservatoires à rayonnement départemental, 323 conservatoires à rayonnement communal ou intercommunal) qui accueillent au total 300 000 élèves. À ces structures classées, s'ajoutent 3 500 « écoles de musique » municipales ou associatives qui accueillent 1,5 million d'élèves. S'y ajoute enfin l'action des 5 000 intervenants en milieu scolaire des conservatoires (dits « DUMIstes ») qui, à la demande des établissements, interviennent auprès de publics qui n'ont pas forcément accès facilement à l'offre du conservatoire. |
S'agissant des missions des conservatoires , la mention insérée à l'Assemblée nationale relative aux pratiques amateurs rejoint l'une des propositions que Mme Catherine Morin-Desailly avait inscrites dans sa proposition de loi précitée. Votre commission les a élargies, sur proposition de ses rapporteurs ( COM-203 ) : « Leur mission est également la formation des amateurs et le développement de leur pratique ; à ce titre ces établissements peuvent apporter, avec leurs enseignants, leur concours aux actions conduites en matière d'éducation artistique et culturelle ».
S'agissant de la réforme des CEPI , votre commission est favorable à leur transformation en un système plus simple et plus clair pour les familles de « classes préparatoires » à l'entrée dans les établissements d'enseignement supérieur de la création artistique.
Votre commission a toutefois souhaité préciser, à l'initiative de ses rapporteurs, que la participation de la région au financement des 3 es cycles professionnalisants se fera :
- dans des conditions précisées par convention avec les collectivités gestionnaires des établissements ;
- et après concertation dans le cadre de la conférence territoriale de l'action publique (CTAP).
En adoptant un amendement de vos rapporteurs ( COM-204 ), votre commission a en outre souhaité préciser, toujours suivant le texte de la proposition de loi précitée de Mme Morin-Desailly, que la région adopte un « schéma régional de développement de l'enseignement artistique » . Ce schéma serait établi en concertation avec les collectivités concernées et après avis de la CTAP et conférerait ainsi aux régions un rôle clair de « chef de file » en matière d'enseignement artistique.
Votre commission a également souhaité que le rôle de l'État soit complété en prévoyant qu'il coordonne, au plan régional, l'organisation des examens du DNOP et qu'il délivre ce diplôme. Elle a adopté un amendement de ses rapporteurs en ce sens ( COM-205 ).
Outre un amendement de rectification d'une erreur matérielle proposé par ses rapporteurs (COM-201) 45 ( * ) , votre commission a adopté un amendement de ses rapporteurs ( COM-202 ) précisant que le schéma départemental est élaboré en concertation avec les communes, mais aussi avec leurs groupements : de plus en plus souvent, ce sont les intercommunalités qui sont porteuses des établissements d'enseignement artistique.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 17 (articles L. 759-1 à L.759-5 et article L. 75-10-1 du code de l'éducation) - Structuration de l'enseignement supérieur de la création artistique
I. - Le droit en vigueur
Signataire de la Déclaration de Bologne du 19 juin 1999, la France s'est engagée à réorganiser son enseignement supérieur pour l'intégrer dans l'espace européen de l'enseignement supérieur.
Cet engagement, qui a été essentiellement porté par le ministère chargé de l'enseignement supérieur, a également concerné les établissements de l'enseignement supérieur « culture ».
Le paysage de l'enseignement supérieur de la création artistique en France 45 écoles supérieures d'art (11 600 étudiants) - 10 établissements publics nationaux la plupart administratifs : École nationale supérieure des beaux-arts, École nationale supérieure des arts décoratifs, École nationale supérieure de la création industrielle, École nationale supérieure de la photographie et 6 établissements publics nationaux en région ; - le Fresnoy (à statut associatif) ; - 34 établissements préalablement en régie municipale et transformés pour 31 d'entre eux en établissements publics de coopération culturelle (EPCC). 30 établissements d'enseignement supérieur du spectacle vivant (3 700 étudiants) - 5 établissements publics nationaux : les deux Conservatoires nationaux supérieurs de musique et de danse de Paris et de Lyon, le Conservatoire national supérieur d'art dramatique, l'École de danse de l'Opéra national de Paris, l'École supérieure du théâtre national de Strasbourg ; - une association ayant le statut d'opérateur de l'État : le Centre national des arts du cirque de Châlons-en-Champagne ; - 2 établissements publics de coopération culturelle (EPCC) ; - des associations de préfiguration d'EPCC parmi les pôles d'enseignement de la musique (dits « pôles sup »), les centres de formation des enseignants de danse et de musique (CEFEDEM), les écoles supérieures de danse et les écoles supérieures de théâtre. 2 établissements d'enseignement supérieur dans le cinéma et l'audiovisuel (300 étudiants) - la FEMIS (établissement public industriel et commercial) ; - l'INA Sup (service d'enseignement supérieur et de recherche de l'INA, également sous statut d'établissement public industriel et commercial). |
Les dispositions législatives existantes ont permis d'engager les mutations nécessaires à la mise en oeuvre du protocole de Bologne (notamment la mise en place du schéma licence/master/doctorat dit « LMD ») mais une réécriture de ces articles semblait nécessaire notamment pour :
- harmoniser le cadre applicable à ces écoles (et faire notamment converger le secteur du spectacle vivant et celui des arts plastiques en matière d'enseignement supérieur) ;
- y intégrer les novations de la loi dite « Fioraso » de 2013 sur l'enseignement supérieur et la recherche (notamment la nouvelle procédure d'accréditation des établissements) ;
- donner un cadre juridique solide aux 3 es cycles de ces écoles (le « PhD » est devenu la norme internationale et la France doit combler son retard en la matière) et à leurs activités en matière de recherche .
Les dispositions législatives existantes Dans le domaine du spectacle vivant (musique, danse, théâtre et arts du cirque), les établissements sont aujourd'hui régis par un article législatif du code de l'éducation, l'article L. 759-146 ( * ) |
, qui donne un socle juridique à ces établissements et définit leurs missions : ils « assurent la formation aux métiers du spectacle, notamment des interprètes, des enseignants et des techniciens » ;
Dans le domaine des arts plastiques , les établissements sont aujourd'hui régis par trois articles législatifs du code de l'éducation : - l'article L. 216-3, qui n'est pas spécifique à l'enseignement supérieur, précise notamment que « les établissements d'enseignement public des arts plastiques relèvent de la responsabilité des communes, des départements et des régions » ou parfois aussi de l'État ; - l'article L. 75-10-147 ( * ) |
donne un socle juridique à ces établissements et définit leurs missions : ils «
assurent la formation aux métiers de la création plastique et industrielle, notamment celle des artistes, photographes, designers et des graphistes » ; - l'article L. 75-10-248 ( * ) |
étend à ces établissements le bénéfice des dispositions de l
'article L. 952-1 relatif à l'emploi d'enseignants associés ou invités ou de chargés d'enseignement. Dans le domaine du cinéma et de l'audiovisuel , ces établissements ne sont aujourd'hui régis par aucun article législatif du code de l'éducation. |
II. - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Le présent article propose une réécriture complète des dispositions des chapitres IX (« les établissements d'enseignement supérieur de la musique, de la danse du théâtre et des arts du cirque ») et X (« les établissements d'enseignement supérieur des arts plastiques ») 49 ( * ) du code de l'éducation en deux chapitres nouveaux :
- un chapitre IX désormais consacré aux « établissements d'enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques » ;
- et un chapitre X désormais consacré aux « établissements d'enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du cinéma et de la communication audiovisuelle » .