Rapport général n° 140 (2016-2017) de M. Serge DASSAULT , fait au nom de la commission des finances, déposé le 24 novembre 2016
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PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR
SPÉCIAL
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PREMIÈRE PARTIE : LA MISSION
« ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »
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I. LE PROGRAMME 117 « CHARGE DE LA DETTE
ET TRÉSORERIE DE L'ÉTAT »
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A. UN PROGRAMME QUI PORTE UN DIXIÈME DU TOTAL
DES DÉPENSES DE L'ÉTAT, DONT LA PERFORMANCE EST DIFFICILE
À ÉVALUER
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B. EN 2016 : DES CRÉDITS REVUS À
LA BAISSE EN LIEN AVEC LA FAIBLESSE DES TAUX D'INTÉRÊT
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1. Une diminution de la charge de la dette
malgré l'augmentation de l'encours en raison de la faiblesse des taux
d'intérêt et de l'inflation
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2. Un besoin de financement
réévalué à la baisse et qui devrait s'élever
à 197,4 milliards d'euros en 2016
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3. Une forte hausse des primes à
l'émission par rapport aux prévisions
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4. Un programme de financement de 187
milliards d'euros pour 2016 réalisé à 76,5 % au
31 août, de nombreux nouveaux titres créés en lien
avec un contexte de taux exceptionnel
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1. Une diminution de la charge de la dette
malgré l'augmentation de l'encours en raison de la faiblesse des taux
d'intérêt et de l'inflation
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C. EN 2017 : UNE CHARGE QUI DEVRAIT
CROÎTRE TRÈS MODÉRÉMENT MALGRÉ LA HAUSSE DE
L'ENCOURS
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D. UN RISQUE MAJEUR POUR LES FINANCES PUBLIQUES EN
CAS DE REMONTÉE DES TAUX D'INTÉRÊT
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1. Une dette qui ne cesse de croître et qui
devrait atteindre près de 1 690 milliards d'euros en 2017
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2. Une baisse des taux d'intérêt qui
n'est pas réellement liée à la qualité de la
signature de la dette française
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3. Des conséquences potentiellement
désastreuses en cas de remontée des taux
d'intérêt
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1. Une dette qui ne cesse de croître et qui
devrait atteindre près de 1 690 milliards d'euros en 2017
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A. UN PROGRAMME QUI PORTE UN DIXIÈME DU TOTAL
DES DÉPENSES DE L'ÉTAT, DONT LA PERFORMANCE EST DIFFICILE
À ÉVALUER
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II. LES AUTRES PROGRAMMES DE LA MISSION
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A. LE PROGRAMME 114 « APPELS EN GARANTIE
DE L'ETAT » : UNE RÉDUCTION DES CRÉDITS DE 80 % EN
LIEN AVEC LA RÉORGANISATION DES PROCÉDURES
D'ASSURANCE-CRÉDIT
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B. LE PROGRAMME 145
« ÉPARGNE » : DES DÉPENSES QUI DEVRAIENT
DEMEURER FAIBLES EN RAISON DU BAS NIVEAU DES TAUX D'INTÉRÊT
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C. LE PROGRAMME 344 « FONDS DE SOUTIEN
RELATIF AUX PRÊTS ET CONTRATS FINANCIERS STRUCTURÉS À
RISQUE » : UN ABONDEMENT EN CRÉDITS DE PAIEMENT CONFORME
AUX ENGAGEMENTS DE L'ÉTAT
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D. LE PROGRAMME 168 « MAJORATION DE
RENTES » : UN DISPOSITIF EN EXCTINCTION
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E. LE PROGRAMME 336 « DOTATION EN
CAPITAL DU MÉCANISME EUROPÉEN DE
STABILITÉ » : PAS DE DÉPENSES PRÉVUES EN
2017
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F. LE PROGRAMME 338 « AUGMENTATION DE
CAPITAL DE LA BANQUE EUROPÉENNE D'INVESTISSEMENT » : PAS
DE DÉPENSES PRÉVUES EN 2017
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A. LE PROGRAMME 114 « APPELS EN GARANTIE
DE L'ETAT » : UNE RÉDUCTION DES CRÉDITS DE 80 % EN
LIEN AVEC LA RÉORGANISATION DES PROCÉDURES
D'ASSURANCE-CRÉDIT
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I. LE PROGRAMME 117 « CHARGE DE LA DETTE
ET TRÉSORERIE DE L'ÉTAT »
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SECONDE PARTIE : LES COMPTES
SPÉCIAUX
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LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR
L'ASSEMBLÉE NATIONALE
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EXAMEN EN COMMISSION
N° 140
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017
Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2016 |
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2017 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
Par M. Albéric de MONTGOLFIER,
Rapporteur général,
Sénateur.
TOME III
LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES
ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES
( Seconde partie de la loi de finances )
ANNEXE N° 13
ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : ACCORDS MONÉTAIRES INTERNATIONAUX
COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS
COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : PARTICIPATION DE LA FRANCE AU DÉSENDETTEMENT DE LA GRÈCE
Rapporteur spécial : M. Serge DASSAULT
(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Éblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel . |
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 4061, 4125 à 4132 et T.A. 833
Sénat : 139 et 141 à 146 (2016-2017)
PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
I. La mission « Engagements financiers de l'État » La charge de la dette devrait stagner en 2016 en raison du niveau exceptionnellement bas des taux d'intérêt 1. En 2017, la charge de la dette, héritage de décennies de déficits budgétaires, constituera une fois de plus la deuxième dépense de l'État, devant d'autres missions essentielles telles que la défense ou la recherche. Elle représente plus de 10 % du total des dépenses de l'État. 2. En dépit du maintien des taux d'intérêt à un niveau exceptionnellement faible, la charge de la dette va légèrement augmenter en 2017 (+ 300 millions d'euros) en raison de la hausse de l'encours de la dette. 3. L'augmentation des taux d'intérêt pourrait provoquer une hausse très rapide de la charge de la dette, dont les conséquences seraient désastreuses pour les finances publiques françaises. 4. Seule une politique de baisse des dépenses publiques résolue et ambitieuse, à rebours de celle que mène actuellement le Gouvernement, permettrait de faire diminuer durablement le fardeau de la dette de l'État. La dette de l'État va poursuivre en 2016 sa hausse 5. La décorrélation exceptionnelle entre la charge d'intérêts et le niveau d'endettement ne doit pas masquer le fait que l'encours de dette française continue de croître et atteint des niveaux particulièrement préoccupants. En 2017, il devrait s'élever à 1 689,2 milliards d'euros, soit une hausse de plus de 65 milliards d'euros (+ 4,1 %) par rapport à la prévision révisée pour 2016 (1 624 millions d'euros). 6. La France se trouve donc dans une situation inverse de celle de l'Allemagne et ne parvient pas à renouer avec un excédent budgétaire et à maîtriser l'évolution de son endettement. D'ailleurs, la dette par actif est bien inférieure outre-Rhin et s'élevait à moins de 48 000 euros en 2015 contre plus de 73 000 euros en France, soit une différence de plus de 52 %. Les besoins de financement se maintiennent à un niveau important 7. L'État devra emprunter en 2017 192 milliards d'euros, dont 69,3 milliards d'euros pour financer le déficit de l'année et 121,8 milliards d'euros pour amortir ses emprunts de moyen et long terme arrivant à échéance. 8. La souscription de nouveaux emprunts de moyen et long terme permettra de couvrir 96 % de ce besoin de financement. Les autres programmes de la mission 9. Les crédits du programme 114 « Appels en garantie de l'État » diminuent de 80 % à 27,4 millions d'euros en AE et en CP en raison du transfert de la gestion des garanties liées au développement international de l'économie française, qui étaient jusqu'ici mises en oeuvre par la Compagnie française pour le commerce extérieur (Coface), filiale de Natixis, à Bpifrance Assurance Export, filiale du groupe Bpifrance. 10. Le programme 145 « Épargne » voit quant à lui ses crédits diminuer de 34 % en AE et en CP à 217 millions d'euros en raison de l'évolution du marché de l'immobilier, des taux d'intérêt des prêts PEL qui demeurent trop peu attractifs et de l'impact de la réforme de l'épargne-logement de mars 2011 qui impose la souscription d'un prêt d'épargne-logement destiné au financement d'une résidence principale de 5 000 euros minimum pour bénéficier du versement de la prime. 11. Les crédits du programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats structurés à risque » sont abondés de 183 millions d'euros en crédits de paiement, conformément aux annonces du Gouvernement. 204,6 millions d'euros devraient être reportés sur l'exercice 2017. Au total, le fonds disposera donc de près de 300 millions d'euros de crédits de paiement en 2017. 12. Les programmes 336 « Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité » et 338 « Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement » ne sont pas dotés de crédits en 2017. II. Les comptes spéciaux 13. En ce qui concerne le compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », les dépenses devraient s'élever en 2017 à 16,5 milliards d'euros contre des recettes de 16,6 milliards d'euros. Le solde serait donc légèrement excédentaire. Une enveloppe de 285 millions d'euros serait ouverte en pour faire face aux besoins de trésorerie signalés par FranceAgrimer. 14. Le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux » est dédié à la coopération monétaire avec la zone franc. Il n'est, comme les années précédentes, pas doté et ne fait l'objet d'aucun projet annuel de performances. 15. Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Participation de la France au désendettement de la Grèce » permettra le versement par la France de 239,6 millions d'euros à la Grèce en 2017 au titre de la restitution à cet État des revenus perçus sur les titres grecs. L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 97,44 % des réponses étaient parvenues à votre rapporteur spécial. |
PREMIÈRE PARTIE : LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »
La mission « Engagements financiers de l'État » comporte sept programmes dont l'ampleur et les finalités sont très diverses.
La quasi-totalité des crédits de la mission est portée par le programme 117 « Charge de la dette et de la trésorerie de l'État » , doté de 41,8 milliards d'euros (en AE=CP) en 2017 soit près de 99 % du montant total des crédits. Ce programme assure le paiement de la plupart des dépenses liées au financement de l'État, à la fois en trésorerie (financement de court terme) et sur les moyen et long termes. Conformément à l'article 10 de la loi organique relative aux lois de finances 1 ( * ) , les crédits du programme sont évaluatifs , ce qui signifie que les dépenses s'imputent si besoin au-delà des crédits ouverts sans que le Gouvernement n'ait d'autre obligation que celle d'informer les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances des motifs du dépassement et des perspectives d'exécution jusqu'à la fin de l'année.
Le programme 114 « Appels en garantie de l'État » est lui aussi doté de crédits évaluatifs. Il retrace les dépenses liées à la mise en jeu des garanties de l'État . Pour 2017, des dépenses sont prévues à hauteur de 27,04 millions d'euros (en AE=CP), soit 0,06 % des crédits de la mission .
Le programme 145 « Épargne » , avec 217 millions d'euros (en AE=CP) prévus pour 2017, représente 0,51 % des crédits de la mission . Il porte principalement les dépenses liées aux instruments de financement du logement ayant un impact budgétaire.
Le programme 168 « Majoration de rentes » vise à poursuivre le service des majorations légales acquises jusqu'à extinction des droits à versement. Il est doté de 145,6 millions d'euros (en AE=CP) en 2017, soit 0,34 % du total des crédits de la mission .
Enfin, le programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » finance le fonds de soutien 2 ( * ) en faveur des collectivités territoriales ayant souscrit des emprunts sensibles. Avec 183,26 millions d'euros prévus pour 2017, il représente 0,43 % des crédits de la mission .
Deux autres programmes de la mission ne sont pas dotés de crédits pour l'année 2017 : le programme 336 « Dotation en capital du mécanisme européen de stabilité » et le programme 338 « Augmentation de capital de la banque européenne d'investissement ».
Évolution des crédits de paiement de la
mission
« Engagements financiers de l'État »
entre la LFI 2016 et le PLF 2017
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
I. LE PROGRAMME 117 « CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L'ÉTAT »
Le programme 117 regroupe les crédits que consacre l'État au paiement des intérêts des emprunts qu'il a souscrits pour financer ses déficits successifs .
L'ensemble de ces crédits sont situés en dehors du périmètre de la norme étroite d'évolution des dépenses (norme « zéro valeur » 3 ( * ) ) mais sont en revanche inclus dans le périmètre de la norme « zéro volume » 4 ( * ) .
Ces crédits devraient atteindre, en 2017, 41,8 milliards d'euros , soit une diminution de 6,06 % par rapport à la prévision retenue en loi de finances initiale pour 2016 (44,5 milliards d'euros) et une très légère hausse de 0,5 % par rapport à la prévision révisée pour 2016 (41,6 milliards d'euros).
Le programme comporte deux actions : l'action n° 1 « Dette » et l'action n° 3 « Trésorerie ».
Les crédits de l'action 01 « Dette » correspondent à la charge d'intérêt des emprunts de moyen et long termes de l'État et devraient s'élever à 40,8 milliards d'euros , soit une diminution de 6,7 % par rapport à la loi de finances pour 2016. Cependant, au regard de l'estimation révisée 2016 qui s'élève à 40,5 milliards d'euros, la charge de la dette augmenterait très légèrement (+ 0,65 %).
Les crédits de l'action 03 « Trésorerie » représentent le coût du financement infra-annuel de l'État, qui devrait atteindre 948 millions d'euros en 2017 , soit une hausse de 3 % par rapport à la prévision de la loi de finances initiale pour 2016 mais une diminution de 7,1 % par rapport à l'estimation révisée 2016 associée au projet de loi de finances pour 2017.
En vertu de l'article 22 de la LOLF, « les opérations budgétaires relatives à la dette et à la trésorerie de l'État, à l'exclusion de toute opération de gestion courante, sont retracées dans un compte de commerce déterminé ». Le programme 117 du budget général effectue ainsi des versements au profit du compte de commerce « Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État » . C'est ce même compte qui retrace les recettes issues du programme de financement de l'État (par exemple primes et décotes à l'émission). Les dépenses du compte de commerce sont légèrement plus élevées que les crédits versés par le programme 117 car le compte de commerce porte des opérations qui ne relèvent pas du programme 117 (comme les contrats d'échange de taux, les interventions de la Caisse de la dette publique...).
A. UN PROGRAMME QUI PORTE UN DIXIÈME DU TOTAL DES DÉPENSES DE L'ÉTAT, DONT LA PERFORMANCE EST DIFFICILE À ÉVALUER
1. Un programme qui représente 10 % des dépenses de l'État
Le programme 117 est doté de 41,8 milliards d'euros en 2017, soit 10,75 % des dépenses de l'État 5 ( * ) . Comme votre rapporteur spécial a déjà eu l'occasion de le souligner, la charge de la dette est par définition une dépense « stérile » .
Elle constitue cette année encore le deuxième poste budgétaire de l'État en crédits de paiement après la mission « Enseignement scolaire », dotée de 70 milliards d'euros, mais devant la mission « Défense » (40,6 milliards d'euros) ou bien encore la mission « Recherche et enseignement supérieur » (27 milliards d'euros), qui constituent pourtant des priorités pour garantir, respectivement, notre sécurité et l'amélioration du taux de croissance potentielle de notre pays.
2. Une performance difficile à évaluer
a) Une gestion effectuée par l'Agence France Trésor
La gestion de la dette est effectuée par l'Agence France Trésor, service à compétence nationale . Les effectifs de l'AFT sont à peu près stables depuis le début des années 2010 et comprennent entre trente-cinq et quarante agents, dont environ un tiers de contractuels. La masse salariale de l'AFT devrait s'élever en 2016 à 3,1 millions d'euros (y compris les charges patronales).
Évolution des effectifs de l'Agence France Trésor de 2011 à 2016
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses de l'AFT au questionnaire du rapporteur spécial
Il faut noter que les dépenses de fonctionnement de l'Agence France Trésor ne sont pas financées par la mission « Engagements financiers de l'État » mais par les missions « Économie » (programme « Stratégie économique et fiscale ») et « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » (programme « Conduite et pilotage des politiques économique et financière »).
b) Des indicateurs de performance dont l'interprétation est malaisée
La gestion de la dette et de la trésorerie de l'État a pour objectif de garantir le financement de l'État tout en limitant la charge de gestion . Si le fait d'être parvenu à assurer un financement constant de l'État et à éviter une rupture de paiement peut être constaté sans grandes difficultés, en revanche, l'appréciation de la maîtrise du coût du financement - hors erreurs manifestes - est plus complexe .
En effet, la charge de la dette dépend de nombreux facteurs (niveau des taux, demande des investisseurs pour certaines catégories de titre, besoin de financement de l'État...) et la stratégie de financement de l'État suppose de formuler des hypothèses sur les différentes variables et leur évolution dans le temps. La réalisation des prévisions du gestionnaire de la dette n'est, par définition, pas certaine. Par exemple, le rallongement de la maturité de la dette augmente le coût du financement ceteris paribus mais il peut également permettre de le diminuer si les taux sont très faibles et que leur remontée est anticipée dans un futur proche.
En outre, la charge de la dette de l'État dépend également de facteurs exogènes à la gestion mise en oeuvre par l'Agence France Trésor : ainsi, la politique monétaire des grandes banques centrales, notamment en Europe et aux États-Unis, contribue à former les taux d'intérêt sans qu'elle ne soit directement liée à la qualité de la gestion budgétaire et financière de la France.
Il est donc difficile de construire des indicateurs de performance pertinents en raison de la nature même de la politique publique mise en oeuvre.
Malgré ces difficultés de principe, la mesure de la performance de la mission pourrait être améliorée et rendue plus cohérente par la modification de certains indicateurs.
c) Sept indicateurs de performance, dont deux pourraient être améliorés
Le programme compte sept indicateurs de performance répartis en quatre objectifs : couvrir le programme d'émission dans les meilleures conditions d'efficience et de sécurité, optimiser la gestion de la trésorerie en fonction des conditions de marché, améliorer l'information préalable par les correspondants du Trésor de leurs opérations financières affectant le compte du Trésor et enfin obtenir un niveau de contrôle des risques de qualité constante et qui minimise la survenance d'accidents.
Votre rapporteur spécial tient tout d'abord à noter le fort niveau d'exigence de la plupart des cibles fixées , concernant en particulier l'indicateur 4.1 « Qualité du système de contrôle ». Ainsi, l'Agence France Trésor a obtenu en 2016 et vise à maintenir la note 6 ( * ) la plus haute en matière de contrôle interne . Aucun incident ni aucune infraction au cadre général d'activité n'a été constatée depuis 2014.
Cependant, certains des indicateurs de performance de la mission paraissent peu mobilisateurs et ne dépendent pas réellement de la gestion du responsable de programme. C'est en particulier le cas de l'indicateur 3.1 « Taux d'annonce des correspondants du Trésor » : ces annonces doivent être effectuées par les comptables publics des correspondants du Trésor dans le cas où un mouvement de fonds supérieur à un million d'euros est prévu le lendemain. Si la prévisibilité des opérations financières importantes est en effet un élément essentiel à l'optimisation de la trésorerie de l'État, votre rapporteur spécial ne comprend pas en quoi l'Agence France peut être tenue responsable de l'évolution de ce taux .
De façon similaire, le projet annuel de performances précise que l'Agence France Trésor n'a pas de prise directe sur l'atteinte de la cible de l'indicateur 4.2 « Incidents d'exécution des opérations de dette et de trésorerie » .
Dans ce cas, les informations présentées à ce titre, bien qu'utiles à l'information du Parlement, ne peuvent pas être à proprement parler intégrées au dispositif de performance de la mission .
Il convient donc de supprimer les indicateurs de performance sur lesquels le responsable de programme n'a pas d'influence directe et déterminante .
Enfin, l'indicateur 2.1 « Solde du compte de l'État à la Banque de France en fin de journée » , qui est constitué du pourcentage de journées où la cible fixée au départ pour le solde a été atteinte, est calculé à partir d'un échantillon de données trop faibles . En effet, sont retenues dans le calcul les journées où l'AFT vise un solde compris entre 560 et 580 millions d'euros. Sont exclus du calcul les jours dits de « faible demande » , c'est-à-dire ceux où les taux offerts par le marché sont inférieurs à la rémunération offerte sur le solde du compte à la Banque de France au-delà du seuil de 570 millions d'euros. Le projet annuel de performances indique que le résultat de l'année 2015 est obtenu à partir de 28 journées dotées d'une cible. Ce faible nombre rend difficile l'interprétation de l'évolution de la cible et de la réalisation . Ainsi, la cible a été abaissée de 5 points entre 2014 et 2017, ce qui peut paraître significatif. En réalité, en faisant l'hypothèse d'une trentaine de jours inclus dans le calcul, la dégradation ne correspond qu'à 1,5 jour de moins.
Il serait donc pertinent soit de modifier le calcul de cet indicateur, soit de le supprimer .
Bien entendu, l'éventuelle suppression de ces indicateurs ne devrait pas conduire à ce que l'information cesse d'être présentée au Parlement : les chiffres produits contribuent à la compréhension du contexte dans lequel l'Agence France Trésor mène ses missions. C'est leur intégration au sein d'un dispositif de performance, censé orienter l'action du responsable de programme, qui paraît moins pertinente.
B. EN 2016 : DES CRÉDITS REVUS À LA BAISSE EN LIEN AVEC LA FAIBLESSE DES TAUX D'INTÉRÊT
La charge de la dette varie principalement en fonction de la courbe des taux d'intérêt (effet taux), de l'inflation , du montant des titres émis (effet volume) ainsi que, de façon beaucoup plus marginale, du moment dans l'année auquel l'État procède au financement (effet calendaire).
L'effet calendaire Dans le cadre de l'analyse des variations de la charge de la dette d'une année sur l'autre, on appelle « effet calendaire » la variation du coût budgétaire net des opérations de l'année (émissions et rachats) sur titres à moyen et long terme . Cet effet retrace les différences entre les dates, les volumes et les taux des opérations conduites les deux années. Cet effet est modeste. En 2015 l'effet calendaire s'est élevé à -0,06 milliard d'euros (la charge budgétaire des opérations de l'année est passée de 0,54 milliard d'euros en 2014 à 0,48 milliard d'euros en 2015). Pour les années suivantes il est estimé à -0,05 milliard d'euros pour 2016 et -0,28 milliard d'euros pour 2017. Le montant de l'effet calendaire est susceptible de variations importantes entre la prévision et l'exécution . Il est en effet sensible à la position relative de la date anniversaire des titres par rapport à leur date d'émission, ainsi qu'à leur taux de coupon. Or d'une part les caractéristiques des émissions réalisées peuvent s'écarter du schéma d'émission utilisé pour la prévision, car le choix des titres émis dépend de la demande émanant des investisseurs avant chaque adjudication et d'autre part les rachats dépendent de l'offre du marché et ne peuvent être anticipés avec précision. Source : réponse de l'Agence France Trésor au questionnaire du rapporteur spécial |
Le projet annuel de performances indique qu'un allègement important de la charge de la dette est d'ores et déjà attendu au titre de l'année 2016 par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale : ainsi, la charge de la dette devrait être inférieure de près de 3 milliards d'euros aux prévisions en raison du maintien de taux d'intérêt faibles voire négatifs jusqu'aux maturités inférieures à 9 ans .
Les provisions pour indexation du capital des titres indexés devraient être inférieures de 1,8 milliard d'euros à la prévision de loi de finances initiale, et les intérêts décaissés seraient diminués de 1,1 milliard d'euros.
1. Une diminution de la charge de la dette malgré l'augmentation de l'encours en raison de la faiblesse des taux d'intérêt et de l'inflation
Cette réduction de la charge de la dette n'est aucunement liée à une réelle maîtrise de l'endettement de l'État : bien au contraire, celui-ci continue de croître et l'effet « volume », c'est-à-dire la hausse de la dette, contribue à augmenter la charge de la dette à hauteur de 1,2 milliard d'euros. Cependant, cet effet est compensé par la faiblesse des taux d'intérêt et de l'inflation, qui contribuent à réduire le coût de financement de l'État de 1,8 milliard d'euros. Au total, la charge de la dette diminuerait donc de 600 millions d'euros entre 2015 et 2016.
Facteurs d'évolution de la charge de la dette
entre 2015 et 2016
(estimation révisée)
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
2. Un besoin de financement réévalué à la baisse et qui devrait s'élever à 197,4 milliards d'euros en 2016
Le besoin de financement de l'État devrait être inférieur d'un peu plus d'un milliard d'euros aux prévisions de la loi de finances initiale, principalement en raison de la baisse de 2,4 milliards d'euros du déficit à financer.
Évolution du besoin de financement de
l'État pour l'année 2016 entre la loi de finances initiale pour
2016 et l'estimation révisée associée
au projet de loi
de finances pour 2017
(en milliards d'euros et en %)
2016 LFI |
2016 révisé PLF 2017 |
Évolution LFI 2016 - 2016 révisé |
||
I. Besoin de financement |
||||
Amortissement de la dette à moyen et long termes |
125 |
124,9 |
-0,1 |
-0,1% |
Dont remboursement du nominal à valeur faciale |
124,5 |
124,5 |
0 |
0,0% |
Dont suppléments d'indexation versés à l'échéance (titres indexés) |
0,5 |
0,4 |
-0,1 |
-20,0% |
Amortissement des autres dettes |
0 |
0 |
0 |
- |
Déficit à financer |
72,3 |
69,9 |
-2,4 |
-3,3% |
Autres besoins de trésorerie |
1,2 |
2,6 |
1,4 |
116,7% |
Dont annulation des opérations budgétaires sans impact en trésorerie 7 ( * ) |
-1,8 |
0 |
1,8 |
-100,0% |
Dont décaissements au titre des PIA 1 et 2, nets des intérêts |
3 |
2,6 |
-0,4 |
-13,3% |
Total du besoin de financement |
198,5 |
197,4 |
-1,1 |
-0,6% |
Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances
3. Une forte hausse des primes à l'émission par rapport aux prévisions
Du côté des ressources de financement, l'évolution la plus significative concerne les primes à l'émission : ainsi, celles-ci sont supérieures de 16,5 milliards d'euros aux prévisions et s'établiraient à environ 17 milliards d'euros . Pour mémoire, les primes à l'émission s'étaient établies à un montant particulièrement important en 2015, à hauteur de 22,7 milliards d'euros . Elles diminueraient donc d'environ 25 % entre 2015 et 2016.
La proportion de titres émis sur souches anciennes s'établit à 18,9 % à la mi-octobre 2016 . Par comparaison, les émissions sur souches anciennes ont représenté 33,9 % du total en 2015.
Évolution des ressources de financement de l'État pour l'année 2016 entre la loi de finances initiale pour 2016 et l'estimation révisée associée au projet de loi de finances pour 2017
(en milliards d'euros et en %)
2016 LFI |
2016 révisé PLF 2017 |
Évolution LFI 2016 - 2016 révisé |
||
II. Ressources de financement |
||||
Émission de dette à moyen et long termes nettes des rachats |
187 |
187 |
0 |
0,0% |
Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement |
2 |
0 |
-2 |
-100,0% |
Variation nette de l'encours des titres d'État à court terme |
0 |
-15 |
-15 |
- |
Variation des dépôts des correspondants |
0 |
0 |
0 |
- |
Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l'État |
9 |
8,4 |
-0,6 |
-6,7% |
Autres ressources de trésorerie |
0,5 |
17 |
16,5 |
3300,0 % |
Total des ressources de financement |
198,5 |
197,4 |
-1,1 |
-0,6 % |
Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances
D'après les éléments transmis à votre rapporteur spécial, à la mi-octobre 2016, les primes nettes des décotes enregistrées sur les émissions à moyen-long terme de l'État s'élèvent à 18 357 millions d'euros depuis le début de l'année. Elles résultent des émissions de titres de référence pour 5 786 millions d'euros, de titres anciens (dites « off-the-run ») pour 10 208 millions d'euros et de titres indexés pour 2 363 millions d'euros.
Les primes et décotes à l'émission Les titres émis à moyen ou long terme par l'État peuvent l'être au moyen d'une technique d'assimilation , qui consiste à abonder une même « ligne » ou « souche » de dette plusieurs fois pour en améliorer la liquidité. Ces émissions à partir de souches anciennes, pratiquées depuis septembre 2007, ont été systématisées à partir de 2008 . |
Ainsi, le prix d'acquisition de ces titres peut varier de leur valeur nominale de remboursement . Par exemple, si le titre vaut 100 et s'accompagne d'un coupon (c'est-à-dire d'un intérêt) de 4, alors que la plupart des autres titres sur le marché ont un coupon de 2, il est probable que les souscripteurs proposent d'acheter le titre pour un prix supérieur au prix nominal : par exemple, pour 200 alors que le prix nominal était de 100. Dans ce cas, une prime apparaît pour l'État . Dans le cas inverse, les souscripteurs proposeront un prix d'achat inférieur au nominal, et une décote apparaîtra pour l'État. En comptabilité budgétaire, ces primes et décotes à l'émission sont traitées comme opérations de trésorerie (comme le prévoit l'article 25 de la loi organique relative aux lois de finances) et apparaissent dans la catégorie « autres ressources de trésorerie » . Quand les taux d'intérêt sur la dette de l'État diminuent, les primes ont tendance à augmenter dans la mesure où les souches anciennes de dette proposent un rendement plus élevé que les souches nouvelles. Source : commission des finances du Sénat |
Ces primes à l'émission ne permettent pas, comme certains ont pu le soutenir, de diminuer le déficit budgétaire de l'État ou son programme d'émission de dette à moyen et long terme. En revanche, elles constituent des moyens de trésorerie qui se substituent aux titres de court terme (BTF) , dont l'encours diminuerait ainsi de 15 milliards d'euros en 2016. Cette utilisation paraît conforme à l'intérêt général de long terme : plutôt que de minimiser la charge budgétaire de la dette dans l'immédiat, ce qui aurait exigé de privilégier l'endettement à court terme dont les taux sont très faibles voire négatifs, l'Agence France Trésor a préféré diminuer l'endettement à court terme qui est aussi celui dont les taux d'intérêt vont les plus volatils. Cette stratégie ne vise donc pas à réduire au maximum la charge d'intérêt immédiate mais à limiter le risque budgétaire couru en cas de remontée des taux .
4. Un programme de financement de 187 milliards d'euros pour 2016 réalisé à 76,5 % au 31 août, de nombreux nouveaux titres créés en lien avec un contexte de taux exceptionnel
Pour 2016, le programme de financement à moyen et long terme net des rachats s'établit à 187 milliards d'euros , dont 155,4 milliards d'euros ont été réalisés au 31 août 2016, soit 76,5 %. Ce taux de réalisation doit être rapproché du taux de 73,1 % constaté à la même époque en 2015 : est donc constatée une légère avance de 3,4 %.
Différents types de dette Il faut distinguer la dette négociable, c'est-à-dire contractée sous forme d'instruments financiers échangeables sur les marchés financiers (obligations et bons du Trésor) de la dette non négociable, correspondant aux dépôts de certains organismes (collectivités territoriales, établissements publics...) sur le compte du Trésor. L'immense majorité de la dette française est négociable. Pour se financer, l'État peut émettre différents types de titres de dette dont la maturité et le coupon varie. Ces titres peuvent, ou non, être indexés sur l'inflation (française ou européenne). L'endettement à moyen et long terme de l'État s'effectue par l'émission d'obligations assimilables du Trésor (ou OAT) 8 ( * ) . Les besoins de trésorerie de l'État - c'est-à-dire des besoins de financement infra-annuels - sont assurés par l'émission de titres dont l'échéance est inférieure à un an, les bons du Trésor à taux fixe et à intérêts précomptés (ou BTF). Source : commission des finances du Sénat |
Le tableau ci-dessous récapitule la réalisation du programme de financement à moyen et long terme au 31 août 2016 et sa répartition par grande catégorie de titres, ainsi que les montants consacrés aux rachats.
Taux de réalisation cumulé
(en % du programme total de financement)
janv. |
fév. |
mars |
avril |
mai |
juin |
juillet |
août |
|
OAT LT* |
4,8% |
10,5% |
15,4% |
24,5% |
29,8% |
35,7% |
42,4% |
46,4% |
OAT MT* |
5,6% |
10,5% |
15,0% |
18,2% |
22,3% |
25,6% |
30,3% |
30,3% |
OATi et ei |
1,0% |
1,6% |
2,8% |
3,6% |
4,5% |
5,2% |
6,1% |
6,5% |
Rachats |
-0,3% |
-0,6% |
-1,1% |
-1,9% |
-3,3% |
-3,4% |
-5,6% |
-6,6% |
Total |
11,1% |
22,0% |
32,2% |
44,4% |
53,3% |
63,1% |
73,1% |
76,5% |
* OAT LT = OAT de Long Terme (maturité initiale supérieure à 7 ans). OAT MT = OAT de Moyen Terme (OAT de maturité initiale entre 2 et 7 ans): OAT de Moyen Terme. En effet, depuis le 1 er janvier 2013, les nouveaux titres de maturité 2 ans à 5 ans sont également des OAT et non plus des BTAN.
Source : réponse de l'AFT au questionnaire du rapporteur spécial
L'AFT peut en effet procéder à des rachats anticipés de titres de dette qui arrivent à échéance en année n, n+1 ou n+2 .
Les rachats de titres arrivant à échéance en année n+1 et n+2 sont financés par l'émission de titres à moyen et long terme et le programme de financement de l'État est exprimé en montant d'émission net des rachats.
L'AFT ne communique pas d'objectif de rachats et ceux-ci constituent un élément de flexibilité du programme d'émission de dette française . Ils visent à lisser le programme de financement de l'État afin d'éviter une hausse trop importante d'une année à l'autre. En effet, une augmentation brutale du besoin de financement de l'État pourrait créer des difficultés d'absorption des titres émis par les marchés financiers. En outre, de tels rachats visent à contribuer au bon fonctionnement du marché secondaire des titres d'État « en offrant un débouché possible lorsque certains investisseurs (comme ce fut le cas en 2015 pour certaines banques centrales cherchant à défendre leurs devises) souhaitent vendre leurs titres dans le march é ou souhaitent vendre des titres courts pour racheter des titres longs (opération d'extension de maturité) ».
Les rachats ont pour conséquence d'augmenter la durée de vie de la dette , ce qui signifie qu'ils augmentent en principe la charge de la dette « toutes choses égales par ailleurs ». Cependant, l'allongement de la maturité a aussi pour effet de couvrir l'État contre une hausse des taux, dans un environnement de taux historiquement bas. Au surplus, la liquidité de la dette française, à laquelle contribue la politique de rachat, est un élément de son attractivité, laquelle détermine pour partie le niveau des taux d'intérêt acquittés par l'État français.
Après avoir fortement augmenté entre 2012 et 2015, passant de 23,2 milliards d'euros à 41,1 milliards d'euros - soit une hausse proche d'un doublement - les rachats semblent diminuer en 2016 bien que les données soient encore, à ce stade, provisoires .
Évolution des rachats de dette entre 2012 et 2016
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses de l'AFT au questionnaire du rapporteur spécial
Dans le contexte de taux d'intérêt très négatifs à court terme, l'AFT a créé plusieurs titres dont la maturité est plus importante et qui sont pour certains indexés sur l'inflation , ce qui permet de répondre aux problématiques de gestion actif-passif des institutions financières : celles-ci, en particulier les assurances, achètent des titres de long terme dont les coupons sont faibles. En cas de remontée rapide des taux, leurs clients opteraient certainement pour des produits au rendement plus avantageux et leur stock d'actifs perdrait beaucoup de valeur. Un titre indexé sur l'inflation protège partiellement ces acteurs d'une hausse des taux liée à une augmentation des prix à la consommation .
Ainsi, l'Agence France Trésor a créé en janvier l'OAT 0 % 25 février 2019 9 ( * ) en remplacement de l'OAT 0 % 25 février 2018. D'après les réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial, « la décision d'allonger la maturité de ce benchmark à trois ans, contre deux ans traditionnellement, est la conséquence du niveau très négatif des taux à court terme , qui augmente la maturité demandée par de nombreux investisseurs, y compris certaines banques centrales ».
De façon similaire, l'OAT 0,25 % 25 novembre 2020 a été remplacé par l'OAT 0 % 25 mai 2021 et l'OAT 1 % 25 novembre 2025 par l'OAT 0,5 % 25 mai 2026. L'Agence France Trésor a indiqué à votre rapporteur spécial que ce titre « a rencontré un grand succès, atteignant 27 milliards d'euros d'encours en six mois, à des taux d'émission records (0,16 % en juillet). Un nouveau benchmark dix ans sera créé à la rentrée (entre septembre et novembre) ».
Plusieurs émissions par syndication ont également été réalisées.
Les techniques d'émission Deux principales techniques d'émission de dette doivent être distinguées : l'adjudication et la syndication. Depuis 1985, la technique de l'adjudication « au prix demandé » (dite « à la hollandaise ») constitue la voie privilégiée d'émission des valeurs du Trésor , la syndication bancaire n'étant utilisée que dans des circonstances spécifiques. I. L'adjudication au prix demandé L'adjudication « au prix demandé » consiste à servir les titres au prix ou au taux effectif de soumission, par opposition au prix ou au taux marginal . On appelle également ce type d'adjudication « enchère à prix multiples et à prix scellés ». Les offres dont les prix sont les plus élevés sont servies en premier . Celles de niveau inférieur le sont ensuite, jusqu'à hauteur du montant souhaité par l'AFT. Les participants dont les offres ont été retenues paient donc des prix différents, correspondant exactement aux prix qu'ils ont demandés. II. La syndication La syndication constitue un engagement précis entre les banques, souscripteurs réunis dans un syndicat bancaire , et l'émetteur, d'acquérir des titres à un prix défini avec l'émetteur. Cette technique est utilisée pour le lancement de titres innovants ou sur des segments de marché moins profonds , notamment sur la partie longue de la courbe (15 ans et plus). Source : Agence France Trésor |
Ainsi, a été mise en oeuvre en avril une opération syndiquée consistant en l'émission simultanée d'une OAT à vingt ans 10 ( * ) et d'une OAT à cinquante ans 11 ( * ) . Au total, 9 milliards d'euros ont été mis sur ces deux titres dont 6 milliards d'euros à vingt ans avec un taux à l'émission de 1,32 % et 3 milliards d'euros émis à cinquante ans avec un taux à l'émission de 1,92 %. D'après les informations transmises à votre rapporteur spécial par l'Agence France Trésor, « il s'agit du premier titre souverain à cinquante ans émis sous 2 % et portant un coupon inférieur à 2 % . [...] Ces émissions reflètent la forte demande du marché pour des titres très longs, dans un environnement de taux perçus comme durablement bas ».
L'AFT a également émis une nouvelle obligation à cinq ans indexée sur l'inflation européenne (OAT €i 0,10 % 1 er mars 2021) dans la mesure où « le rebond du pétrole a généré un regain d'intérêt de la part du marché pour des titres indexés de moyen terme ».
Enfin, une opération syndiquée d'un titre à trente ans indexé à l'inflation européenne , annoncée dans le programme de financement indicatif pour 2016, « pourrait intervenir au second semestre, en fonction des conditions de marché ».
C. EN 2017 : UNE CHARGE QUI DEVRAIT CROÎTRE TRÈS MODÉRÉMENT MALGRÉ LA HAUSSE DE L'ENCOURS
1. Une stagnation de la charge de la dette à environ 41 milliards d'euros
La charge de la dette devrait pratiquement stagner entre 2016 et 2017 : elle augmenterait de 300 millions d'euros, soit de 0,7 %.
Facteurs d'évolution de la charge de la dette
entre 2015 et 2016
(estimation révisée)
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
La hausse de l'encours de dette conduirait à alourdir le coût de financement de l'État de 700 millions d'euros et l'inflation prévue par le Gouvernement à hauteur de 0,8 % serait à l'origine d'une augmentation de 1,6 milliard d'euros de la charge budgétaire de la dette. Ces effets haussiers seraient partiellement compensés par un effet calendaire de -300 millions d'euros et surtout par la faiblesse maintenue des taux d'intérêt , qui permettrait une réduction de la charge de la dette de 1,7 milliard d'euros. En effet, le scénario retenu par le Gouvernement prévoit un redressement des taux à moyen et long terme au rythme moyen de 75 points de base par an , ce qui signifie que le taux à dix ans s'élèverait à 0,50 % fin 2017 et 1,25 % fin 2017.
Évolution constatée et prévisionnelle des taux d'intérêt à long terme et à court terme sur la dette française
Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances
2. Une réduction du besoin de financement de l'État qui découle principalement de la diminution des amortissements de dette
Le besoin de financement total de l'État devrait diminuer et passer de 197,4 milliards d'euros en 2016 à 192 milliards d'euros en 2017, soit une réduction de 5,4 milliards d'euros.
En revanche, le plafond de variation de la dette négociable de moyen et long terme serait fixé à 65,7 milliards d'euros en 2017 , soit une hausse de 3,2 milliards d'euros (+ 5 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2016.
Évolution du besoin de financement de l'État entre l'estimation révisée pour 2016 et la prévision 2017
(en milliards d'euros et en %)
2016 révisé PLF 2017 |
2017 PLF |
Évolution 2017-2016 révisé |
||
Amortissement de la dette à moyen et long termes |
124,9 |
121,8 |
-3,1 |
-2,5% |
Dont remboursement du nominal à valeur faciale |
124,5 |
119,3 |
-5,2 |
-4,2% |
Dont suppléments d'indexation versés à l'échéance (titres indexés) |
0,4 |
2,5 |
2,1 |
525,0% |
Amortissement des autres dettes |
0 |
0 |
0 |
- |
Déficit à financer |
69,9 |
69,3 |
-0,6 |
-0,9% |
Autres besoins de trésorerie |
2,6 |
0,9 |
-1,7 |
-65,4% |
Annulation des opérations budgétaires sans impact en trésorerie |
0 |
-1,6 |
-1,6 |
- |
Décaissements au titre des PIA 1 et 2, nets des intérêts |
2,6 |
2,5 |
-0,1 |
-3,8% |
Total |
197,4 |
192 |
-5,4 |
-2,7% |
Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances
La diminution du déficit n'explique qu'une part marginale de cette baisse qui provient surtout d'un moindre montant des amortissements de dette à moyen et long termes. En effet, le montant total d'amortissement devrait diminuer de 3,1 milliards d'euros entre 2016 et 2017.
Montants et répartition des dettes à amortir de 2016 à 2019 par catégorie de titre
(en milliards d'euros)
N.B. : Les projections d'amortissement transmises en réponse au questionnaire adressé en amont du dépôt du projet de loi de finances présentent les amortissements connus à la date d'élaboration. Ainsi, ces projections d'amortissement n'incluent pas les amortissements des titres qui seront émis dans le futur.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses de l'Agence France Trésor questionnaire du rapporteur spécial
3. Une baisse prévisionnelle des primes à l'émission et des dépôts des correspondants
Concernant les ressources de financement de l'État, les variations les plus notables entre 2016 et 2017 devraient toucher l'encours des correspondants du Trésor et les primes à l'émission .
Ces dernières sont attendues à hauteur de 4,5 milliards d'euros, soit un montant significativement supérieur à celui inscrit en loi de finances initiale pour 2015 et 2016 (à hauteur de 500 millions d'euros) mais très inférieur aux encaissements constatés de primes à l'émission au cours de ces deux années. Dans la mesure où elle dépend directement du niveau des taux d'intérêt, l'ampleur des primes à l'émission est en effet difficile à anticiper.
Par ailleurs, la variation de l'encours des correspondants du Trésor devrait être nettement négative, à hauteur de 5,1 milliards d'euros , en raison du transfert de la gestion des procédures d'assurance-crédit de la Coface vers Bpifrance (-4,3 milliards d'euros) et du transfert de la trésorerie de la troisième section du Fonds solidarité vieillesse (FSV) à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale ou Acoss (-0,8 milliard d'euros).
Évolution des ressources de financement de l'État entre l'estimation révisée pour 2016 et la prévision 2017
(en milliards d'euros et en %)
2016 révisé PLF 2017 |
2017 PLF |
Evolution 2017-2016 révisé |
||
Émission de dette à moyen et long termes nettes des rachats |
187 |
185 |
-2 |
-1,1% |
Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement |
0 |
0 |
0 |
- |
Variation nette de l'encours des titres d'État à court terme |
-15 |
0 |
15 |
-100,0% |
Variation des dépôts des correspondants |
0 |
-5,1 |
-5,1 |
- |
Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l'État |
8,4 |
7,6 |
-0,8 |
-9,5% |
Autres ressources de trésorerie |
17 |
4,5 |
-12,5 |
-73,5% |
Total |
197,4 |
192 |
-5,4 |
-2,7% |
Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances
Le montant du solde excédentaire de la Coface auprès du Trésor sera inscrit en recettes au compte spécial nouvellement créé « Soutien au commerce extérieur ». Ce mouvement conduit donc à améliorer de plus de 4 milliards d'euros le déficit budgétaire de l'État et à augmenter le besoin de financement du même montant, soit un mouvement neutre pour les finances publiques prises dans leur ensemble mais très favorable en matière d'affichage d'une amélioration du solde budgétaire de l'État .
D. UN RISQUE MAJEUR POUR LES FINANCES PUBLIQUES EN CAS DE REMONTÉE DES TAUX D'INTÉRÊT
1. Une dette qui ne cesse de croître et qui devrait atteindre près de 1 690 milliards d'euros en 2017
La décorrélation exceptionnelle entre la charge d'intérêts et le niveau d'endettement ne doit pas conduire à oublier que l'encours de dette française continue de croître et atteint des niveaux particulièrement préoccupants . En 2017, il devrait s'élever à 1 689,2 milliards d'euros , soit une hausse de plus de 65 milliards d'euros (+4,1 %) par rapport à la prévision révisée pour 2016 (1 624 millions d'euros). Après deux années de décélération - toute relative - de l'augmentation de l'encours de dette, celle-ci devrait donc repartir de plus belle à partir de 2017.
Évolution comparée de l'encours de la dette de l'État et de la charge de la dette de 2008 à 2017
(en milliards d'euros)
Note de lecture : la charge de la dette se lit par rapport à l'ordonnée de gauche, l'encours par rapport à celle de droite. Les données pour 2016 et 2017 sont prévisionnelles.
Source : commission des finances du Sénat
La France se trouve donc dans une situation inverse de celle de l'Allemagne et ne parvient pas à renouer avec un excédent budgétaire et à maîtriser l'évolution de son endettement.
Si la dette publique allemande reste, au total, supérieure à celle de la France (elle s'élevait ainsi à 2153,9 milliards d'euros en Allemagne à la fin de l'année 2015, contre 2097,4 milliards d'euros pour la France à la même période), la dette par actif est revanche bien inférieure outre-Rhin et s'élevait à moins de 48 000 euros en 2015 contre plus de 73 000 euros en France, soit une différence de plus de 52 %.
Dette par actif en France et en Allemagne
(en euros)
Note de lecture : au sens de l'Insee, la population active regroupe la population active occupée (appelée aussi « population active ayant un emploi ») et les chômeurs.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses de l'Agence France Trésor questionnaire du rapporteur spécial
2. Une baisse des taux d'intérêt qui n'est pas réellement liée à la qualité de la signature de la dette française
La baisse du taux d'intérêt sur la dette française n'est aucunement liée à la qualité de la gestion budgétaire du Gouvernement, qui n'a toujours pas tenu son engagement de ramener le déficit public en-dessous du seuil de 3 % du PIB mais à des facteurs exogènes, notamment la politique menée par la Banque centrale européenne (BCE) .
a) Le programme d'achats de titres du secteur public de la Banque centrale européenne (BCE) : 90 milliards d'euros de dette française achetés en un peu plus d'un an
Face aux conséquences des crises économiques et financières qui ont touché la zone euro à la fin des années 2000, la Banque centrale européenne a été amenée à mettre en place des outils dits « non conventionnels » de politique monétaire dans le but de soutenir les marchés financiers et l'inflation.
Outre ses programmes de refinancement et d'apport de liquidités (LTRO) en direction des actifs privés, lancés dès décembre 2011, elle a annoncé un programme d'assouplissement quantitatif en janvier 2015 et l'a mis en oeuvre à partir de mars 2015. Ce programme prévoyait initialement l'achat de 60 milliards d'euros de titres publics chaque mois jusqu'en septembre 2016. Les titres publics pouvaient être émis par des États de la zone euro et par des institutions publiques comme la Banque européenne d'investissement (BEI), par exemple. En décembre 2015, a été annoncée la prolongation du programme jusqu'en mars 2017 . L'éventail de titres éligibles au programme de rachat d'actifs a également été élargi et inclut certaines obligations émises par des collectivités locales et régionales. Le programme devrait s'achever quand l'inflation dans la zone euro se rapprochera de la cible de 2 % fixée par la BCE.
Les achats sont notamment effectués par les banques centrales des États de la zone euro pour le compte de la Banque centrale européenne. La Banque de France, qui fait évidemment partie des résidents français, est chargée de l'essentiel du programme d'achats en France.
D'après les informations transmises à votre rapporteur spécial, on estime que l'Eurosystème a acquis du 9 mars 2015 au 31 mars 2016 près de 90 milliards d'euros de titres d'État français (en valeur faciale), soit près de 6 % de l'encours de dette français (hors titres de court terme, qui ne sont pas inclus dans le programme).
Ces achats massifs ont donc largement contribué à tirer les taux d'intérêt sur les dettes souveraines vers le bas, sans lien réel avec la demande des investisseurs privés ni avec la qualité intrinsèque de la signature française.
b) Une croissance encore hésitante dans la zone euro et une inflation à la traîne
En outre, d'autres facteurs ont contribué à ce que les taux d'intérêt demeurent faibles.
Tout d'abord, la reprise au sein de la zone euro est restée modérée et l'inflation peine à se redresser (+0,3 % attendu en 2016) tandis que le taux de chômage est resté élevé (10,2 % attendu en 2016).
D'après l'Agence France Trésor, « l'activité a suffisamment redémarré pour atténuer les inquiétudes sur les pays les plus en difficulté de la zone euro tout en se montrant insuffisante pour justifier un resserrement de la politique monétaire ».
Par ailleurs, le contexte international suscite de nombreuses incertitudes depuis 2015 : après les craintes relatives à la Grèce à l'été 2015, puis la dévaluation inattendue de la devise chinoise en août de la même année, la rechute des prix du pétrole à la fin de l'année 2015 et le retour des craintes sur la vigueur de la croissance mondiale ont conduit les investisseurs à privilégier les actifs les plus sûrs, parmi lesquels se situent les obligations souveraines. Ce mouvement de « fuite vers la qualité » a été amplifié par le ralentissement de l'économie américaine et le référendum britannique sur la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne en 2016.
Comme le souligne l'Agence France Trésor dans ses réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial, « les réactions des banques centrales à ces incertitudes ont également profité aux obligations souveraines » dans la mesure où la Banque du Japon a poursuivi ses achats d'actifs et abaissé son taux directeur en territoire négatif en janvier 2016 et que la Banque fédérale américaine n'a procédé qu'à une unique hausse de son taux directeur, en décembre 2015. De même, au Royaume-Uni, la Banque d'Angleterre a baissé son taux directeur au début du mois d'août 2016.
Enfin, il faut noter que les nouvelles réglementations financières européennes , qui imposent aux banques et à la plupart des acteurs financiers de détenir d'importantes réserves d'actifs liquides dits « sûrs », dont font partie les titres souverains, sont très avantageuses pour les États endettés : en effet, la dette souveraine est largement considérée dans la réglementation financière comme un actif à faible risque ou sans risque . Comme le notait Danièle Nouy, alors secrétaire général de l'Autorité de contrôle prudentiel dans une note d'analyse en 2012 12 ( * ) , « tout en créant incontestablement des normes plus robustes, Bâle III ne traite pas en tant que tel le problème de la dette souveraine . En effet, le traitement réglementaire du risque souverain dans le portefeuille bancaire ne change pas et permet toujours d'attribuer, notamment, une pondération en risque nulle à la dette souveraine libellée en monnaie nationale . Le statut de la dette souveraine en tant qu'actif assorti du risque le plus faible a été maintenu ».
3. Des conséquences potentiellement désastreuses en cas de remontée des taux d'intérêt
La plupart des facteurs qui expliquent la faiblesse actuelle des taux d'intérêt sont de nature conjoncturelle et ne devraient pas durer éternellement . Ni la Fed ni la BCE ne pourront maintenir pendant des dizaines d'années leur programme d'assouplissement quantitatif.
Il est également à craindre qu'en l'absence de véritable réduction des dépenses et de réforme structurelle, la hausse de l'encours de dette et la dégradation des fondamentaux économiques de la France conduisent les investisseurs à se détourner de la dette française , obligeant l'État à se financer dans des conditions moins avantageuses.
En effet, une corrélation claire existe au sein des États de la zone euro entre l'encours de dette, le déficit budgétaire et le niveau des taux d'intérêt , comme le montrent les graphiques ci-dessous. Si la France continue de mener une politique laxiste en matière de finances publiques, il faut s'attendre à ce que les taux d'intérêt sur la dette souveraine finissent par s'adapter.
Corrélation entre le poids du déficit budgétaire dans le PIB et les taux d'intérêt sur la dette souveraine
Note : les données utilisées sont les plus récentes disponibles.
Source : commission des finances, d'après des données BCE et Eurostat
Corrélation entre le poids de la dette dans le
PIB et les taux d'intérêt
sur la dette souveraine
Note : les données utilisées sont les plus récentes disponibles.
Source : commission des finances du Sénat, d'après des données BCE et Eurostat
Les conséquences budgétaires d'une hausse des taux d'intérêt seraient catastrophiques , comme le montrent les simulations réalisées par l'Agence France Trésor : une hausse des taux de l'ordre de 100 points de base à partir de 2017 conduirait à ce que la charge de la dette augmente de près de 9 milliards d'euros à horizon 2020 et de 16 milliards d'euros en 2026. Sur dix ans, l'augmentation de la charge de la dette en raison de cette seule augmentation de 100 points de base serait de 25 % par an !
Impact d'un choc de taux de 100 points de base sur la
charge
de la dette maastrichtienne
(en milliards d'euros)
Note de lecture : la courbe et le taux correspondent à la croissance composée entre 2017 et 2026.
Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances
Cette augmentation serait d'autant plus dangereuse pour les finances publiques qu'elle nourrirait un effet « boule de neige » : en l'absence d'excédent budgétaire, la charge de la dette alourdit encore davantage le déficit et contribue donc, par ricochet, à augmenter encore l'encours de dette souveraine.
La situation pourrait être particulièrement grave si se creusaient des différences importantes , sur le plan de la notation ou sur celui des taux d'intérêt, entre la France et les pays voisins .
Certes, une augmentation des taux d'intérêt associée à une reprise de la croissance pourrait n'avoir des effets que modérés : en principe, les théories économiques prévoient qu'un contexte de croissance plus favorable devrait se traduire par de moindres dépenses publiques, en particulier dans le domaine social. Cependant, l'histoire française montre que les dépenses publiques n'ont pas connu de réduction drastique, bien au contraire, même en période de croissance .
En outre, une augmentation des taux d'intérêt associée à une croissance stationnaire est tout à fait envisageable en cas de dégradation de la signature de la dette française.
Malgré ces risques graves, aucune politique sérieuse de réduction des dépenses n'est mise en oeuvre et la dette continue d'augmenter . Ce n'est pas une stabilisation de la dette qu'il faut viser, mais une diminution de son encours à travers un désendettement massif .
Votre rapporteur spécial considère donc que seule une politique de baisse des dépenses publiques résolue et ambitieuse, à rebours de celle que mène actuellement le Gouvernement, permettrait de faire diminuer durablement le fardeau de la dette de l'État .
II. LES AUTRES PROGRAMMES DE LA MISSION
A. LE PROGRAMME 114 « APPELS EN GARANTIE DE L'ETAT » : UNE RÉDUCTION DES CRÉDITS DE 80 % EN LIEN AVEC LA RÉORGANISATION DES PROCÉDURES D'ASSURANCE-CRÉDIT
Conformément à l'article 34 de la loi organique relative aux lois de finances, tout nouveau régime de garantie de l'État doit être autorisé par une loi de finances. Les garanties ainsi octroyées constituent des engagements hors bilan retracés en annexe du compte général de l'État.
Elles n'entraînent une dépense budgétaire pour l'État qu'en cas de réalisation du risque garanti . Ces dépenses sont regroupées au sein du programme 114 « Appels en garantie de l'État ».
Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit 27,4 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) au titre du programme 114 « Appels en garantie de l'État », soit une très forte diminution de plus de 80 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2016, qui prévoyait des crédits à hauteur de 125 millions d'euros.
Cela s'explique par le transfert de la gestion des garanties liées au développement international de l'économie française , qui concentraient 80 % de la dépense et qui étaient jusqu'ici mises en oeuvre par la Compagnie française pour le commerce extérieur (Coface), filiale de Natixis, à Bpifrance Assurance Export, filiale du groupe Bpifrance.
Ce transfert, décidé en loi de finances rectificative pour 2015 13 ( * ) , s'accompagne du passage à un schéma de garantie directe dans lequel Bpifrance Assurance Export gérera les garanties émises non plus seulement pour le compte mais également au nom de l'État.
La maquette budgétaire est réorganisée en conséquence. D'une part, les garanties seront retracées sur un nouveau compte de commerce « Soutien financier au commerce extérieur » , qui reproduit - à l'exception de la ligne « Garantie de taux d'intérêt Natixis » - la présentation de l'action 4 de ce programme . D'autre part, la rémunération de Bpifrance Assurance Export au titre de sa mission est dorénavant retracée sur le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Économie » .
Le projet annuel de performances indique que « l'essentiel des informations relatives aux procédures de soutien financier au commerce extérieur (encours, flux de garanties octroyées, etc.) resteront présentées dans les documents budgétaires relatifs au présent programme ».
Cela permettra de continuer de disposer d'une vue d'ensemble des garanties accordées par l'État . Votre rapporteur spécial y est donc favorable.
B. LE PROGRAMME 145 « ÉPARGNE » : DES DÉPENSES QUI DEVRAIENT DEMEURER FAIBLES EN RAISON DU BAS NIVEAU DES TAUX D'INTÉRÊT
L'essentiel du programme 145 concerne la dépense de primes d'épargne-logement qui représente 99,5 % du montant du programme .
Le compte épargne-logement (CEL) et le plan d'épargne-logement (PEL) ont pour finalité de permettre aux ménages de se constituer un apport personnel et leur donnent droit à un prêt épargne logement dont les caractéristiques sont fixées lors de l'ouverture du CEL ou du PEL. Les CEL sont avant tout destinés au financement de petites opérations, tandis que les PEL concernent généralement des acquisitions plus importantes.
Ces deux produits financiers permettent d'obtenir, sous certaines conditions, une prime versée par l'État, dont le montant est plafonné et calculé en fonction des intérêts acquis pendant la phase d'épargne .
À l'issue d'un appel d'offre, le Crédit foncier a été désigné le 9 février 2015 comme opérateur de la gestion de ces primes pour le compte de l'État.
L'action 01 du programme 145 regroupe les crédits consacrés au financement de ces primes , soit 215,53 millions d'euros en 2017 (AE=CP) contre 329,19 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2015, ce qui représente une diminution marquée de près de 35 % .
La baisse tendancielle depuis plusieurs années de la dépense des primes d'épargne-logement peut être imputée à plusieurs facteurs tels que l'évolution du marché de l'immobilier, les taux d'intérêt des prêts PEL qui demeurent supérieurs aux taux des prêts libres ou bien encore l'impact de la réforme de l'épargne-logement de mars 2011 qui impose la souscription d'un prêt d'épargne-logement destiné au financement d'une résidence principale de 5 000 euros minimum pour bénéficier du versement de la prime.
Afin de les rendre plus attractifs, les PEL ouverts depuis le 1 er février 2015 voient désormais leur taux de rémunération fixé à 2 %.
Parallèlement, les frais de gestion et les frais financiers des établissements bancaires sont plafonnés à 120 points de base au-dessus du taux de rémunération du plan, ce qui permet actuellement une distribution des prêts PEL à des taux de 3,2 % contre 4,2 % pour les PEL ouverts entre août 2003 et janvier 2015.
En outre, en 2016 sont intervenues deux nouvelles modifications des plans d'épargne-logement : le taux de rémunération des plans a été fixé à 1,50 % à compter du 1 er février 2016 puis, à compter du 1 er août 2016, le taux a été fixé à 1 %. Ces deux modifications visent à renforcer l'attractivité des prêts PEL et à améliorer l'accès à la propriété à un horizon de quatre ans - soit au terme de la phase minimale d'épargne des nouveaux plans. En effet, le taux de prêts d'épargne-logement ouverts à compter du 1 er février 2016 est de 2,70 %. Pour les plans ouverts à partir du 1 er août 2016, il s'élève à 2,20 %.
L'action 02, pour sa part, retrace d'une part les dépenses d'aide de l'État au secteur aidé , dispositif ancien de prêts à l'accession sociale distribués et gérés par le Crédit Foncier et d'autre part le remboursement des frais de la Société de gestion des financements et de la garantie de l'accession sociale à la propriété (SGFGAS) pour le contrôle des prêts conventionnés.
Cette action finance principalement des bonifications d'intérêt et des commissions de gestion de prêts à l'accession à la propriété accordés aux personnes physiques dans le cadre de dispositifs aujourd'hui fermés et en extinction, ainsi que des frais de gestion et de contrôle des prêts conventionnés.
Le montant des crédits portés par cette action pour 2016 est de 1,5 million d'euros contre 1,8 million d'euros en loi de finances initiale pour 2016 (soit une baisse de 18 %).
C. LE PROGRAMME 344 « FONDS DE SOUTIEN RELATIF AUX PRÊTS ET CONTRATS FINANCIERS STRUCTURÉS À RISQUE » : UN ABONDEMENT EN CRÉDITS DE PAIEMENT CONFORME AUX ENGAGEMENTS DE L'ÉTAT
À la suite de la crise financière, il s'est avéré que certaines collectivités territoriales avaient souscrit des emprunts risqués dont les charges d'intérêt seraient très importantes (plusieurs fois le montant du capital) et qui fragilisaient les finances locales.
Dans le but de faciliter le remboursement de ces emprunts par anticipation, le fonds de soutien aux collectivités territoriales et à leurs groupements ayant souscrit des emprunts structurés et des instruments financiers à risque a été créé par l'article 92 de la loi de finances pour 2014 14 ( * ) .
D'abord rattaché à un programme de la mission « Économie », ce fonds a été intégré dans le périmètre de la mission « Engagements financiers de l'État » à partir de 2015 par la création du programme 334 qui regroupe les seuls crédits destinés au fonds.
Le financement du fonds est partiellement assuré par le secteur bancaire à travers deux mécanismes : d'une part, le versement de 11,5 millions d'euros 15 ( * ) par an pendant quinze ans par Dexia et la Société de financement local (SFIL) à un fonds de concours abondant les crédits du programme 334, d'autre part, l'acquittement d'une taxe spécifique , prévue à l'article 235 ter ZE bis du code général des impôts et qui reprend les principales caractéristiques de la taxe pour risque systémique.
La taxe pour le financement du fonds de soutien aux collectivités territoriales Le fonds de soutien devait initialement être financé à hauteur de 50 millions d'euros par une fraction de la taxe pour risque systémique, dont le taux avait été relevé par la loi de finances pour 2014 16 ( * ) . Cette taxe a toutefois été mise en extinction à partir de 2015 17 ( * ) afin de tenir compte de la mise en place d'un Fonds de résolution unique (FRU) au niveau européen. A donc été créée, par la loi de finances rectificative pour 2014 18 ( * ) , à l'article 235 ter ZE bis du code général des impôts, une nouvelle taxe, pesant sur le secteur bancaire, au profit du fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des produits structurés dits « emprunts toxiques » , due jusqu'en 2028 et recouvrée à l'appui de l'annexe à la déclaration de TVA. Son taux était fixé à 0,026 % en 2015, afin d'assurer un rendement de 40 millions d'euros en 2015 et 2016 et 50 millions d'euros par an à partir de 2017. Il a été relevé par la loi de finances pour 2016 19 ( * ) à 0,0642 % pour les années 2016 à 2025 et à 0,0505 % pour les années 2026 à 2028. Par ailleurs, une fraction du produit de la taxe est affectée, à hauteur de 28 millions d'euros par an, à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés pour les années 2016 à 2025. En 2015, 34,2 millions d'euros ont été recouvrés . Au total, le secteur bancaire a donc participé à hauteur de 45,7 millions d'euros au financement du fonds de soutien en 2015. |
Il faut noter que le produit de la taxe n'est pas affecté au fonds de soutien stricto sensu dans la mesure où le montant recouvré, hors fraction affectée à la Caisse nationale de l'assurance maladie, est versé au budget général. Le lien entre cette taxe et le fonds de soutien relève ainsi de l'intention du législateur et non d'une disposition inscrite dans le droit. Source : commission des finances du Sénat (d'après les données transmises par le ministère du budget) |
La mise en oeuvre du fonds a tout d'abord connu un certain retard au démarrage , la doctrine d'emploi du fonds n'ayant été validée par le comité national d'orientation et de suivi (CNOS) que le 13 novembre 2014 20 ( * ) .
En outre, la décision prise par la Banque nationale suisse de laisser fluctuer sa monnaie par rapport à l'euro à compter du 15 janvier 2015 a conduit à un brusque changement du taux de change , passé de 1 euro pour 1,2 franc CHF à 1 euro pour 1 franc CHF. Les emprunts indexés sur le taux de change entre l'euro et le franc CHF ont vu les coûts d'indemnités de remboursement anticipé augmenter . L'État a donc décidé de renforcer la capacité d'intervention du fonds de soutien. Les conditions d'octroi des aides 21 ( * ) ont également été revues en 2015 afin de prendre en charge la quasi-totalité des surcoûts.
Les autorisations d'engagement avaient été engagées dans leur quasi-totalité à la fin de l'année 2015 (2,9 milliards d'euros), moins de 30 millions d'euros de crédits de paiement avaient été effectivement décaissés. Les crédits n'ont pas non plus été consommés en 2016 et 204,6 millions d'euros devraient être reportés sur l'exercice 2017 .
183,3 millions d'euros sont ouverts en crédits de paiement pour 2017, soit un montant conforme aux engagements de l'État .
Au total, le fonds disposera de près de 400 millions d'euros de crédits de paiement en 2017 .
D. LE PROGRAMME 168 « MAJORATION DE RENTES » : UN DISPOSITIF EN EXCTINCTION
Les crédits du programme 168 pour 2016 sont consacrés au financement du dispositif des majorations légales de rentes viagères. Les montants versés sont fonction du nombre, de l'âge des crédirentiers et de leurs conditions de ressources ainsi que de la date de souscription du contrat et du montant des arrérages versés.
Ce dispositif ayant été fermé, les droits acquis disparaissent avec la diminution progressive de la population des crédirentiers .
En 2017, les crédits devraient s'établir à 145,6 millions d'euros, soit une baisse de près de 4 % par rapport aux 151 millions d'euros de crédits votés en loi de finances initiale pour 2016.
Comme indiqué en réponse au questionnaire de votre rapporteur spécial, « au regard de l'exécution de dépenses 2016 qui s'établirait à près de 149,5 millions d'euros, les provisions actualisées (au taux de l'OATi€ 2024) pour charges à payer futures représentent un montant global de l'ordre de 1,86 milliard d'euros jusqu'à l'extinction du programme à l'horizon 2050 , sur la base des tables de mortalité en vigueur ».
E. LE PROGRAMME 336 « DOTATION EN CAPITAL DU MÉCANISME EUROPÉEN DE STABILITÉ » : PAS DE DÉPENSES PRÉVUES EN 2017
Le programme 336 « Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité » retrace l'engagement de la dotation en capital apportée par la France , à la suite de l'adoption de la loi n° 2012-323 du 7 mars 2012 autorisant la ratification du traité instituant le Mécanisme européen de stabilité (MES).
Le MES a pris le relais du Fonds européen de stabilité financière (FESF) , mis en place en juin 2010 pour trois ans et ayant une capacité d'intervention financière de 440 milliards d'euros. Le MES ne repose pas seulement sur des garanties des États, mais sur un capital effectivement constitué.
La souscription de la France au capital MES s'est élevée au total à 16,3 milliards d'euros et a été versée en cinq tranches de 3,3 milliards d'euros chacune. La dernière tranche a été versée le 29 avril 2014.
Le présent projet de loi de finances ne prévoit pas de dépenses pour l'exercice 2017 .
F. LE PROGRAMME 338 « AUGMENTATION DE CAPITAL DE LA BANQUE EUROPÉENNE D'INVESTISSEMENT » : PAS DE DÉPENSES PRÉVUES EN 2017
La Banque européenne d'investissement (BEI) est la banque de prêts à long terme de l'Union européenne . Elle a été créée en 1958 par le Traité de Rome.
Aucune augmentation de capital n'étant envisagée à ce jour, il n'est pas inscrit de crédits dans le projet de loi de finances pour 2017 .
SECONDE PARTIE : LES COMPTES SPÉCIAUX
I. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS »
En application de l'article 24 de la loi organique relative aux lois de finances 22 ( * ) , le compte « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » retrace les avances accordées par le Trésor aux organismes susceptibles d'en recevoir.
Les avances constituent les dépenses du compte et ses recettes découlent des remboursements en capital des avances consenties.
A. TROIS PRINCIPALES CATÉGORIES D'AVANCES
Les avances consenties peuvent être de trois ordres :
1) les avances consenties à des services de l'État (budgets annexes, services autonomes de l'État, services nationalisés) ou à des organismes distincts de l'État gérant des services publics (établissements publics nationaux, services concédés, sociétés d'économie mixte, organismes divers de caractère social). Ces avances visent à répondre à des situations d'urgence , pour assurer la continuité de l'action publique ou mettre en oeuvre une mesure de façon accélérée, ou à couvrir provisoirement un besoin de trésorerie imprévu. Elles sont retracées sur les programmes 823 « Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics » et 824 « Avances à des services de l'État » ;
2) les avances octroyées à l'Agence de services et de paiement (ASP), au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune (PAC). Ces avances répondent au mode de financement propre aux aides de la PAC, que les États membres doivent préfinancer et qui sont ensuite remboursées par la Commission européenne. Pour la France, ce préfinancement est assuré par les versements de l'ASP. Ces avances sont imputées sur le programme 821 « Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune » ;
3) les avances à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex 23 ( * ) ( programme 825). Ces avances, qui permettent à l'Oniam d'honorer les premiers dossiers d'indemnisation, constituent une solution provisoire dans l'attente de ressources pérennes de l'Oniam , parmi lesquelles des produits tirés des actions subrogatoires.
Chacun de ces programmes se trouve sous la responsabilité du ministre de l'économie et des finances et, au plan administratif, de celle du directeur général du Trésor. La mise en oeuvre en est assurée par l'AFT.
Les recettes du compte sont constituées des remboursements en capital des avances consenties.
B. DES CRITIQUES RÉCURRENTES DE LA COUR DES COMPTES RELATIVES À L'UTILISATION DU COMPTE D'AVANCES POUR RÉALISER DES PRÊTS
La Cour des comptes souligne dans sa note d'exécution budgétaire (NEB) relative à la mission que le financement du budget annexe de contrôle et d'exploitation aériens (BACEA) par avances récurrentes est contraire à la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) dans la mesure où un tel financement ne constitue pas une avance mais bien un prêt , à rebours des prescriptions de à l'article 24 de la LOLF.
De façon plus générale, des critiques récurrentes ont trait à la nature des avances consenties : sans objet précis, celles-ci couvrent parfois des besoins structurels, constituant ainsi une facilité financière sans durée réellement déterminée .
Or l'article 46 de la loi de finances pour 2005 qui institue ce compte prévoit des « avances », sans mention de la possibilité d'octroyer de « prêts » sur ce compte.
Votre rapporteur spécial considère donc que le Gouvernement doit suivre la recommandation formulée par la Cour des comptes consistant à cesser de recourir au compte d'avances pour réaliser des prêts .
C. EN 2016, 7,1 MILLIONS D'EUROS AVANCÉS AU 31 AOÛT
D'après les informations transmises à votre rapporteur spécial, concernant le programme 821 « Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune », l'Agence de services et de paiement (ASP) a bénéficié d'avances au titre de la PAC 2015, pour un montant de 7,1 millions d'euros . Elle pourra également bénéficier d'une avance pour la PAC 2016, dans la limite de 7,2 millions d'euros . La date limite de remboursement de cette avance est fixée au 10 janvier 2017.
Sur le programme 823 « Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics », aucune avance n'a été accordée depuis le 1 er janvier 2016 à la date du 30 août.
D'ici la fin de l'année, une avance pourrait être accordée à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) pour permettre le financement de projets immobiliers. Un montant de 6 millions d'euros a été voté en loi de finances pour 2016 à cet effet. Les besoins budgétaires liés à la politique immobilière de l'AEFE ne semblent pourtant pas correspondre à une situation d'urgence ni même imprévue . Le financement de ces projets par le biais d'avances ne paraît donc pas réellement conforme à la définition de l'objet de la mission tel que défini par la loi organique relative aux lois de finances.
Sur le programme 824 « Avances à des services de l'État », le budget annexe de contrôle et d'exploitation aériens (BACEA) pourra bénéficier d'une avance de 112,6 millions d'euros . Une convention d'avance a été conclue entre la Direction générale de l'aviation civile, qui assure la tutelle du BACEA, et l'Agence France Trésor. Cette avance n'avait cependant pas encore fait l'objet de tirage au 30 août . Aux termes de la convention, la DGAC peut choisir librement, pour chaque tirage, le délai de remboursement de l'avance, dans la limite d'un plafond de douze ans .
Sur le programme 825 « Avances à l'Office National d'Indemnisation des Accidents Médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) au titre de l'indemnisation du Benfluorex », l'Oniam peut avoir recours à une avance du Trésor de 15 millions d'euros . Une convention d'avance a été conclue entre la Direction générale de la santé (DGS), qui assure la tutelle de l'Oniam, et l'Agence France Trésor. Jusqu'à présent, les Laboratoires Servier ont indemnisé l'ensemble des victimes. Par conséquent, l'Oniam n'a encore sollicité aucune avance .
D. EN 2017, UN MONTANT DE DÉPENSES EN LÉGÈRE AUGMENTATION
En 2017, les dépenses devraient rester stables sur l'ensemble des programmes à l'exception du programme « Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics » qui verra ses crédits augmenter de 290 millions d'euros , soit une hausse supérieure à un quintuplement par rapport à la loi de finances initiale pour 2016 .
Évolution des recettes et des dépenses entre 2016 et 2017
(en euros)
LFI 2016 |
PLF 2017 |
Variation |
||
euros |
% |
|||
Recettes |
16 300 041 571 |
16 566 610 615 |
266 569 044 |
1,6 % |
Remboursement des avances octroyées au titre du préfinancement des aides de la PAC |
16 000 000 000 |
16 000 000 000 |
0 |
0,0 % |
Remboursement des avances octroyées à des organismes gérant des services publics |
80 396 284 |
334 536 615 |
254 140 331 |
316,1 % |
Remboursement des avances octroyées à des services de l'État |
219 645 287 |
217 074 000 |
-2 571 287 |
-1,2 % |
Remboursement des avances octroyées au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex |
0 |
n.s. |
n.s. |
n.s. |
Dépenses |
16 183 612 547 |
16 464 202 000 |
280 589 453 |
1,7 % |
Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune |
16 000 000 000 |
16 000 000 000 |
0 |
0,0 % |
Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics |
56 000 000 |
346 600 000 |
290 600 000 |
518,9 % |
Avances à des services de l'État |
112 612 547 |
102 602 000 |
-10 010 547 |
-8,9 % |
Avances à l'Oniam au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex |
15 000 000 |
15 000 000 |
0 |
0,0 % |
Solde |
116 429 024 |
102 408 615 |
-14 020 409 |
-12,0 % |
n.s. : non significatif
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Cette forte augmentation s'explique principalement par l'ouverture d'une enveloppe de 285 millions d'euros pour faire face aux besoins de trésorerie signalés par FranceAgrimer et dont la répartition est présentée dans le graphique ci-après.
Répartition des avances prévues au profit de FranceAgrimer en 2017
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances pour 2017
Du côté des recettes, une hausse significative (+ 254 millions d'euros, soit une multiplication par trois des recettes prévues en loi de finances initiale pour 2016) est prévue au titre des avances octroyées à des organismes gérant des services publics .
Cette augmentation est cependant largement conventionnelle : il est fait l'hypothèse que les avances concédées à FranceAgrimer en 2017, en particulier au titre du Fonds européen d'aide aux plus démunis, seront remboursées dans l'année, mais le projet annuel de performances précise qu'une avance « peut être remboursée dans l'année ou sur plusieurs années ».
Ainsi, le solde du compte est censé demeurer excédentaire, mais cela dépendra du montant des avances finalement utilisées par FranceAgrimer et du calendrier de remboursement mis en oeuvre.
II. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « ACCORDS MONÉTAIRES INTERNATIONAUX »
Le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux » est dédié à la coopération monétaire avec la zone franc, c'est-à-dire avec l'Union monétaire ouest africaine, l'Union monétaire d'Afrique centrale et l'Union des Comores. Conformément à l'article 24 de la loi organique relative aux lois de finances, il est doté de crédits évaluatifs 24 ( * ) .
Il est destiné à garantir, en tant que de besoin, l'ancrage de la parité du taux de change du franc sur l'euro et la garantie de convertibilité illimitée . Il retrace, en recettes et en dépenses, les opérations d'octroi et de remboursement des appels en garantie de convertibilité effectuées par le Trésor au profit des banques centrales liées à la France par un accord monétaire international.
Eu égard aux niveaux importants de réserves détenues par les banques centrales de la zone franc et à la très faible probabilité d'appel en garantie de l'État qui en résulte, cette mission n'est dotée d'aucun crédit pour 2017, comme les années précédentes . Elle ne fait d'ailleurs pas l'objet d'un projet annuel de performances annexé au présent projet de loi de finances.
III. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PARTICIPATION DE LA FRANCE AU DÉSENDETTEMENT DE LA GRÈCE »
Créé par la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 25 ( * ) , le compte d'affectation spéciale (CAS) « Participation de la France au désendettement de la Grèce » traduit dans le droit national les engagements pris par la France dans le cadre des réunions des ministres des finances de la zone euro (Eurogroupe) du 20 février 2012 et du 26 novembre 2012 :
- lors de la réunion du 20 février 2012, la France s'est engagée, aux côtés des autres États membres de la zone euro, à reverser à la Grèce les revenus perçus et à percevoir par la Banque de France entre 2012 et 2020 sur les obligations grecques que celle-ci détient en compte propre (ANFA) ;
- l'accord du 26 novembre 2012 prévoit que les banques centrales nationales de la zone euro doivent reverser aux États membres les revenus qu'elles reçoivent des obligations grecques détenues au titre du Programme pour les marchés de titres (PMT), ou Security Market Programme (SMP), qui sont ensuite restitués à la Grèce .
Ces initiatives s'inscrivent parmi les mesures tendant à réduire la dette publique grecque et à rétablir la soutenabilité de celle-ci ; le taux d'endettement de la Grèce a, après une légère inflexion observée en 2015, repris sa progression et devrait atteindre 182,8 % du PIB en 2016.
Programme pour les marchés de titre (PMT) En mai 2010, la Banque centrale européenne (BCE) a lancé le programme pour les marchés de titres (PMT), ou Securities Market Programme (SMP), qui permet aux banques centrales de la zone euro d' acheter de la dette publique sur les marchés secondaires , et ce afin d'empêcher une hausse excessive des taux d'intérêt des États membres touchés par la crise de la dette publique dans la zone euro. Entre mai 2010 et mars 2012, les banques centrales nationales (BCN) de l'Eurosystème, qui sont responsables de l'exécution des opérations de politique monétaire, ont acheté près de 220 milliards d'euros d'obligations grecques, irlandaises, portugaises, italiennes et espagnoles dans le cadre du PMT 26 ( * ) . À compter de septembre 2012, le PMT a été remplacé par le programme des opérations monétaires sur titres (OMT), ou Outright monetary transactions , qui consisterait également, s'il devait être utilisé, en une intervention sur les marchés secondaires. Il a été précisé par la BCE qu'elle ne fixait aucune limite à ses interventions et celles-ci seraient conditionnées à l'acceptation d'un plan d'assainissement des finances publiques par les États concernés. |
Les transferts financiers opérés au profit de la Grèce dans ce cadre sont inscrits au sein du programme 795 du présent compte d'affectation spéciale, dont le responsable est le directeur général du Trésor.
Le recours à un compte d'affectation spéciale (CAS) afin de faire transiter ces flux se justifie à deux titres 27 ( * ) . En premier lieu, le financement monétaire des États membres de la zone euro par les banques centrales nationales est interdit en vertu de l'article 123 du traité relatif au fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). En second lieu, il était nécessaire d' isoler ces opérations spécifiques au sein du budget de l'État .
Ainsi, le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » retrace :
- en recettes , le produit de la contribution spéciale versée par la Banque de France au titre de la restitution des revenus qu'elle a perçus sur les titres grecs. Celui-ci s'élève à 183 millions d'euros en 2017 ;
- en dépenses , d'une part, le versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus précités (cf. programme 795) et, d'autre part, les rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France (cf. programme 796).
Tableau n° 1 : Récapitulation des crédits par programme et action
Autorisations d'engagement (AE) |
Crédits de paiement
|
|||
Programme/Action |
LFI pour 2016 |
PLF pour 2017 |
LFI pour 2016 |
PLF pour 2017 |
795 - Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus sur les titres grecs |
233,0 |
233,0 |
325,6 |
239,6 |
01 - Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre |
92,6 |
56,6 |
||
02 - Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus au titre du portefeuille dit SMP |
233,0 |
233,0 |
233,0 |
183,0 |
796 - Rétrocession de trop-perçus à la Banque de France |
0 |
0 |
0 |
0 |
Source : projet annuel de performances pour 2015 du compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce »
A. LES VERSEMENTS DE LA FRANCE À LA GRÈCE
Le programme 795 comporte deux actions. L'action 01 accueille le versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre (ANFA) , effectué en application de l'engagement pris par les États de la zone euro le 20 février 2012. Le montant de ce transfert doit s'élever à 754,3 millions d'euros pour la période 2012-2020 28 ( * ) .
L'action 02, quant à elle, retrace les montants correspondant au versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus au titre du portefeuille dit SMP . Le total des sommes reversées sur la période 2013-2025 doit s'élever à 2,06 milliards d'euros 29 ( * ) .
Cependant, le dispositif de restitutions à la République hellénique a été suspendu par l'Eurogroupe lors de sa réunion du 27 juin 2015 , au cours de laquelle il a été mis fin au deuxième programme d'assistance financière en raison des difficultés apparues dans le cadre des négociations avec la Grèce 30 ( * ) . Aussi les versements depuis le compte d'affectation spéciale prévus au titre des exercices 2015 et 2016 n'ont-ils pas eu lieu .
Pour autant, le projet annuel de performances associé à ce compte précise que le dispositif de rétrocession « pourrait être réactivé dans le cadre des mesures de dette prévues à la suite de l'octroi d'un troisième programme d'assistance financière à la Grèce, comme l'envisage le communiqué de l'Eurogroupe du 25 mai 2016. Si la reprise des versements suspendus en 2015 et 2016 n'est pas envisagée dans ce cadre, le communiqué du 25 mai évoque la possibilité, à la fin du programme en 2018, de transférer de nouveau à la Grèce les profits SMP pour l'année 2014, ainsi que les profits SMP et ANFA initialement prévus pour les années 2017 et suivantes, ce qui nécessite de réserver le montant prévu pour 2017 conformément à l'échéancier originel ».
En somme, la consommation effective des crédits inscrits au sein de ce programme demeure hypothétique - même si leur programmation est, malgré tout, nécessaire, en raison des engagements européens de la France.
B. LES RÉTROCESSIONS DE TROP-PERÇUS À LA BANQUE DE FRANCE
Le programme 796 du présent compte d'affectation spéciale retrace les rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France . Si ce programme n'a jamais retracé aucun flux depuis sa création en 2012, son existence n'en présente pas moins une grande importance dans son principe.
En effet, le plan de désendettement de la Grèce adopté en juillet 2011 et mis en oeuvre à compter de 2012 prévoit un certain nombre de conditionnalités en contrepartie de l'aide financière apportée à cet État. Aussi, dans le cas où les conditions d'exécution du plan de désendettement ne seraient plus réunies, il y aurait lieu de revoir les modalités selon lesquelles la France rétrocède à la Grèce les revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre (ANFA) ou au titre du portefeuille dit SMP . Ainsi que le rappelle le rapport annuel de performances associé au compte d'affectation spéciale, les conventions du 3 mai 2012 et du 26 juin 2013 entre l'État et la Banque de France prévoient que « le dispositif sera revu dans l'hypothèse d'une rupture par la Grèce des conditions contractuelles fixées par le plan, ou d'une restructuration des titres détenus par la Banque de France ou de l'annonce par le Fonds monétaire international et/ou de l'Union européenne de l'interruption de leur soutien financier en raison d'une rupture par la Grèce des conditions qui y sont attachées ».
Dès lors, le présent programme porterait, le cas échéant, la restitution à la Banque de France de tout ou partie des sommes versées au présent compte d'affectation spéciale dans l'hypothèse d'une remise en cause du plan de désendettement de la Grèce. Toutefois, aucun flux n'a dû être enregistré au titre du présent programme en 2015 et 2016 ni prévu au titre de l'exercice 2017, dès lors que les restitutions à la République hellénique ne sont, à ce jour, que suspendues, comme cela a été indiqué précédemment.
LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
En première délibération, l'Assemblée a adopté les crédits de la mission sans modification.
En seconde délibération, les crédits de la mission ont été minorés à l'initiative du Gouvernement de 23,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Cette minoration porte intégralement sur le programme « Épargne » et fait partie du « rabot » appliqué par le Gouvernement sur la quasi-totalité des missions du budget général pour compenser les hausses des dépenses votées en première et en seconde délibération sur certaines missions.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le 19 octobre 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a examiné le rapport de M. Serge Dassault, rapporteur spécial, sur la mission « Engagements financiers de l'État », les comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » et le compte d'affectation spéciale « Participations de la France au désendettement de la Grèce », et a entendu sa communication sur son contrôle budgétaire relatif au rôle des banques spécialistes en valeurs du Trésor.
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - En tant que rapporteur de la mission « Engagements financiers de l'État », je suis chargé de vous présenter les conclusions de la mission d'évaluation relative aux banques spécialistes en valeur du Trésor que j'ai menée et de vous donner des informations sur la situation financière de la France en 2016 et ses perspectives pour 2017.
Ces informations vous permettront, je l'espère, de mieux apprécier les risques financiers qui pèsent sur la France en raison de l'accroissement permanent de son endettement non maîtrisé.
Nous empruntons chaque année environ 200 milliards d'euros : 70 milliards d'euros pour financer notre déficit et 130 milliards d'euros pour payer nos échéances d'emprunt. En règle générale, il est rigoureusement interdit, dans toute gestion financière privée, d'emprunter pour payer des dépenses de fonctionnement et des échéances d'emprunt. Mais notre Gouvernement se l'autorise, depuis un certain nombre d'années... Cela s'appelle de la cavalerie, et c'est synonyme, à long terme, de faillite. Cette pratique est devenue courante en France depuis la présidence de François Mitterrand.
Notre dette publique était de 100 milliards d'euros en 1980 ; elle est aujourd'hui de 2 170 milliards d'euros. Pour la seule dette de l'État, la charge d'intérêts financée par le budget général de l'État sera cette année de 41,8 milliards d'euros. Cela représente plus de la moitié du produit de l'impôt sur le revenu pour 2017, qui sera, d'après les prévisions optimistes du Gouvernement, de 73 milliards d'euros. Ces 41,8 milliards d'euros de charge de la dette représentent 10,75 % des dépenses de l'État.
La charge de la dette, qui est pourtant une dépense stérile, est le deuxième poste budgétaire de l'État, devant les missions « Défense » et « Enseignement supérieur », qui sont pourtant des priorités pour garantir notre sécurité et l'amélioration du taux de croissance potentielle de notre pays.
M. Daniel Raoul . - Attendons de voir 2017 !
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - Malheureusement, la charge de la dette a vocation à augmenter encore davantage.
En effet, quand nos taux d'intérêt augmenteront, à la suite d'une décision de la Banque centrale européenne ou de la Réserve fédérale américaine, mais aussi et surtout en raison d'une perte de confiance de nos investisseurs, constatant que le Gouvernement actuel ne tient pas ses promesses de réduction de déficit et que la signature de la France n'est plus ce qu'elle était, notre charge de la dette augmentera immédiatement. Nous serons rapidement en cessation de paiement... comme la Grèce !
M. Richard Yung . - Quelle horreur !
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - Et ce n'est pas l'Europe qui nous sauvera.
D'ailleurs la Commission européenne, par la voix du commissaire Pierre Moscovici, que vous connaissez bien, a récemment rappelé que la France devait respecter ses engagements de réduction des déficits, ce qu'elle ne fait pas. Le Gouvernement ne veut pas changer de politique et réduire les dépenses de fonctionnement financées par des emprunts. C'est la raison pour laquelle la prévision de 2,7 % de déficit présentée par le Gouvernement me paraît insincère, tout comme au Haut Conseil des finances publiques qui considère ce taux comme improbable, pour présenter les choses de façon agréable.
M. Didier Guillaume . - On verra ça !
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - Notre besoin de financement atteindra, en 2017, 192 milliards d'euros, correspondant à un déficit de 69,3 milliards d'euros et au financement de la dette arrivant à échéance. Il sera financé par un emprunt de 185 milliards d'euros.
Notre dette ne pourra jamais être remboursée, car elle est alimentée par des emprunts couvrant des dépenses de fonctionnement, qui ne rapportent rien. Et plus elle croît, plus nous empruntons pour la payer.
Si le Gouvernement n'émettait pas en continu de nouveaux titres de dette, la France se trouverait en cessation de paiement. Nos investisseurs, de plus en plus inquiets en raison non seulement de notre incapacité à réduire nos dépenses, mais surtout de notre propension à en créer de nouvelles, se trouveront obligés d'augmenter nos taux d'intérêt, ce qui provoquera une catastrophe et la faillite de la France. Nous sommes de plus en plus menacés.
Pour émettre des nouveaux titres, l'Agence France Trésor, qui gère la trésorerie et la dette de l'État, s'appuie sur un réseau d'une vingtaine de banques avec lesquelles elle entretient des relations privilégiées, et qu'on appelle les « spécialistes en valeur du Trésor », ou SVT. Jusqu'à présent, ces banques sont honorées de participer à ces opérations, et nous n'avons jamais eu de problèmes avec elles, mais l'insistance que met le Gouvernement à ne tenir aucun de ses engagements et à continuer d'augmenter ses dépenses, sans faire aucune économie, commence à les inquiéter. À force, les investisseurs peuvent finir par ne plus vouloir acheter nos bons du Trésor ou par augmenter leurs taux d'intérêts, ce qui provoquerait immédiatement la cessation de paiement de la France. Cela va bien finir par nous tomber dessus.
Il faudra que nos futurs présidents de la République, quels qu'ils soient, acceptent de mettre en oeuvre une saine gestion de nos finances publiques et cessent d'accorder leur préférence à la satisfaction des électeurs par l'accumulation de niches fiscales, qui représentent aujourd'hui près de 90 milliards d'euros.
M. Didier Guillaume . - Ils vont avoir du travail !
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - Les impôts ont été créés pour financer les dépenses de l'État et pas pour être redistribués à certains électeurs ; or c'est malheureusement ce qui se passe.
Même le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, le CICE, que tout le monde applaudit...
M. Didier Guillaume . - C'est vrai !
M. Serge Dassault , rapporteur spécial . - ...coûte à l'État 16 milliards d'euros par an, financés par des emprunts.
M. Didier Guillaume . - Il est fait pour les entreprises !
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - Il est facile de réduire les charges sur salaire en les faisant payer par des emprunts !
C'est le cas de la réduction des charges payées par l'État aux entreprises pour les dédommager des trente-cinq heures payées trente-neuf, dues à la générosité de Martine Aubry. Cette mesure était gratuite pour elle, mais pas pour les contribuables. En effet, elle coûte chaque année 21 milliards d'euros, qui sont empruntés, ce qui représente plus de 300 milliards d'euros depuis 2000. Quel bénéfice en tire l'économie française ? Aucun ! Que l'on supprime la limitation de la semaine de travail à trente-cinq heures et l'on fera une économie significative de 21 milliards d'euros.
M. Daniel Raoul . - Bon courage !
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - Il faudrait également que nos futurs présidents de la République suppriment au moins la moitié des niches fiscales, lesquelles représentent 90 milliards d'euros en diminution de recettes. En diminuant le coût de ces niches de 45 milliards d'euros, nous pourrions commencer à réduire nos déficits.
Une épée de Damoclès est suspendue au-dessus de nos têtes : la hausse des taux d'intérêt. Ceux-ci peuvent augmenter dans tous les pays de la zone euro, mais ils pourraient également être relevés uniquement par nos investisseurs, découragés par notre politique budgétaire laxiste. Si nos futurs présidents ne se préparent pas à ces menaces, l'avenir de la France comme puissance économique est très menacé.
Heureusement, nous n'en sommes pas encore là, car nos prêteurs ne semblent pas encore inquiets, mais nous continuons à nous endetter sans limites. La dette publique s'élève aujourd'hui à 2 170 milliards d'euros, mais il est presque certain que nous allons passer à 2 200 milliards d'euros, puis à 2 300 milliards d'euros... Où s'arrêtera cette folie, que nous ne pourrons jamais rembourser ?
Il serait indispensable que les candidats à l'élection présidentielle prennent conscience de ces problèmes, ce qui ne semble pas être le cas. Ils paraissent préférer promettre des cadeaux à leurs électeurs sans penser à la France.
Je tiens enfin à vous signaler notre engagement à l'égard de la Grèce à hauteur de 239,6 millions pour 2017, ce qui n'est pas énorme. En revanche, nous nous sommes engagés à prêter à la Grèce 40 milliards d'euros si ce pays faisait défaut à ses engagements, ce qui est de l'ordre du probable. Nous aurions donc à supporter 40 milliards d'euros de charges supplémentaires.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose d'adopter les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » qui s'élèvent, pour 2017, à 42,15 milliards d'euros, en espérant qu'ils n'augmentent pas plus, et des comptes spéciaux dont je suis également rapporteur.
M. Roger Karoutchi . - A la lecture de la note de présentation, j'ai été interpellé par le comparatif avec l'Allemagne, notre principal partenaire. En effet, il y est précisé que la dette par actif a augmenté pratiquement de 10 % en France entre 2012 et 2015, contre une baisse de 5 % pour l'Allemagne dans le même temps.
La facilité de la France à recourir à la dette, qu'a regrettée Serge Dassault, n'est-elle pas d'autant plus préjudiciable dans le cadre d'une relation de compétitivité avec notre principal partenaire ? En d'autres termes, n'accroît-on pas nos handicaps commerciaux par rapport à l'Allemagne ?
M. Richard Yung . - Il est effectivement important que les politiques budgétaire et de la dette ne soient pas basées sur la recherche de cadeaux à faire à des électeurs. Une telle attitude serait tout à fait condamnable, quel que soit le bord politique qui en est responsable.
M. Roger Karoutchi . - Ce serait inadmissible.
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - Tout le monde doit le condamner !
M. Richard Yung . - Concernant le point soulevé par Roger Karoutchi, je ne suis pas sûr que le critère de la dette par actif soit pertinent. Vous connaissez la situation allemande, caractérisée par une population très vieillissante, avec un fort taux d'épargne et un patrimoine immobilier stabilisé. Les Allemands ne sont donc pas dans la même situation que nous.
Le vrai critère, c'est le coût horaire par salarié. Or, sur ce point, les situations française et allemande se sont rapprochées, pour être quasiment au même niveau.
Serge Dassault évoque une baisse des taux d'intérêt qui n'est pas réellement liée à la qualité de la signature de la dette française. Cette affirmation me pose problème, car elle donne l'impression qu'elle pourrait être liée à autre chose, mais alors à quoi ? Pour ma part, je crois savoir que la signature française est au contraire très valorisée, venant juste après l'Allemagne sur l'ensemble des marchés monétaires et financiers. J'en veux pour preuve notre importante contribution à la politique du quantitative easing que pratique la BCE en achetant des montants importants de titres français, car elle considère qu'ils sont de bonne qualité.
Reste qu'effectivement le marché peut évoluer...
M. Philippe Dallier . - Les taux d'intérêt sont volatiles !
M. Richard Yung . - La fin de la récréation sera peut-être sifflée en décembre par la Réserve fédérale américaine, la Fed, et nous aurons alors à assumer. Pour autant, je le répète, la signature de la France est bonne et nous n'avons pas de mal à placer notre papier.
M. Éric Bocquet . - Ma première question prolonge ce que Richard Yung vient de dire. Comment la France, qui serait surendettée, au bord de l'apocalypse, peut-elle encore emprunter sur les marchés financiers ? Richard Yung a apporté un début de réponse en affirmant que notre signature était fiable, reconnue, sérieuse, ce que je crois également. Néanmoins, j'aimerais avoir un éclairage sur ce point.
Ma seconde question concerne les aides à la Grèce. J'ai lu dans un article très sérieux sur le site internet du journal Le Figaro que 10 % des 125 milliards d'euros d'aides versées à la Grèce depuis 2010 sont allés effectivement dans les caisses de l'État, 90 % de cette somme ayant bénéficié aux banques. Pouvez-vous me confirmer cette information ?
M. Philippe Dallier . - Jusque-là, tout va bien, grâce à la qualité de la signature de la France mais, comme le soulignait Roger Karoutchi, le décrochage entre la France et l'Allemagne aura un jour des conséquences.
M. Didier Guillaume . - Ce n'est pas vrai !
M. Philippe Dallier . - Mais si ! Ce qui m'inquiète, c'est que vous avez l'air non pas de baigner dans l'optimisme, mais de considérer qu'on peut toujours s'endetter plus sans aucun risque de décrochage ou de flambée de nos taux d'intérêt. Plus le temps passe, plus le risque que les taux d'intérêt remontent devient important. Avec une maturité de sept ans en moyenne, nous savons ce que nous coûterait une hausse de 100 points de base.
À l'heure actuelle, il est paradoxal que nous soyons toujours plus endettés et que cela nous coûte à peine plus que l'année dernière, mais cette situation aura une fin. Aussi, il vaudrait mieux que nous nous y préparions en abordant ce sujet avec le recul nécessaire.
À mon sens, nous allons droit dans le mur ; c'est juste une question de temps. Je crains que le réveil, peut-être en décembre après les élections américaines, ne soit douloureux. En tout état de cause, la remontée des taux commence à se profiler, et le jour où elle surviendra, cela fera très mal, sachant qu'une augmentation de 100 points de base représenterait 2 milliards d'euros supplémentaires de charge de la dette dès la première année.
M. Bernard Lalande . - Le rapport de Serge Dassault constitue presque un catalogue de prescriptions sur la manière de gérer la France sans dette. Or je constate que, depuis la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, la France s'est toujours endettée. La situation aurait-elle été très mal gérée jusqu'à aujourd'hui, les prescriptions délivrées par le docteur Dassault permettant enfin, dans les mois qui viennent, de redresser la situation ?
La comparaison permanente avec l'Allemagne m'interroge également. Nous sommes actuellement la sixième puissance mondiale, tandis que l'Allemagne doit être la cinquième. Notre seul objectif serait-il de passer devant l'Allemagne ? Serait-ce le seul enjeu ? À mon sens, il s'agit surtout de pouvoir adapter une économie territoriale à la culture d'un pays, à sa façon d'avoir construit son unité.
Bien évidemment, il peut être nécessaire de recourir au déficit. J'en veux pour preuve la lecture de certains programmes : pour financer le futur, beaucoup de candidats à de hautes fonctions préconisent d'accroître l'endettement et le déficit public. Soit ils sont irresponsables, soit cette voie n'est pas sans issue.
Enfin, vous dites que la dette augmente en nominal, mais il faut aussi prendre en considération l'augmentation de la richesse du pays. Il faut relativiser l'endettement en fonction non pas de l'endettement des autres pays, mais de l'augmentation de notre richesse.
Serge Dassault, vous avez certainement raison, il faut « nettoyer la table » en matière de dette. Mais à condition, bien évidemment, que ce nettoyage n'entraîne pas de récession ou de ralentissement de la distribution de la richesse pour le plus grand nombre dans notre pays.
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - On peut toujours dire que la signature de la France est respectée - pour l'instant. Quand j'interroge les banques, elles ne sont pas encore inquiètes, mais cela ne doit pas nous dispenser de l'être. La signature de la France est liée aujourd'hui à une conjoncture correcte, mais il ne faut pas oublier qu'elle dépend aussi, à terme, de notre endettement, donc de l'absence de réduction des déficits.
Pour être tout à fait honnête, je reconnais que la responsabilité d'une telle situation incombe à tous les présidents, de gauche comme de droite, qui ont tous emprunté pour couvrir des dépenses de fonctionnement. C'est inadmissible ! Si on n'a pas d'argent pour faire ce qu'on a envie de faire, on ne le fait pas, comme dans les entreprises.
En France, depuis toujours, les présidents de la République ont pris l'habitude d'emprunter chaque fois qu'ils voulaient faire un petit cadeau à leurs électeurs, et cela va continuer si l'on considère les programmes de plusieurs candidats à la présidence de la République, qui viennent pour l'instant d'un seul bord politique, puisqu'on ne connaît pas encore les autres protagonistes.
M. Didier Guillaume . - C'est vous qui voulez emprunter !
M. Serge Dassault , rapporteur spécial. - C'est de l'inconscience totale ! C'est l'avenir de la France qui est en jeu ! Comme l'a dit Philippe Dallier, la fin des taux d'intérêt bas étant proche, la catastrophe nous pend au nez. Il suffirait que nos investisseurs, qui pour l'instant nous ont maintenu leur confiance, s'inquiètent et arrêtent de nous prêter de l'argent à des taux aussi faibles pour que tout s'effondre.
C'est pourquoi il faut arrêter d'emprunter pour couvrir les dépenses de fonctionnement. Tout le monde s'extasie sur le CICE, mais avec quoi est-il financé ? De l'emprunt. Arrêtons de dépenser l'argent que l'on n'a pas. C'est une évidence qui s'impose partout et toujours. Le problème est purement financier.
La France est mal gérée, au contraire de l'Allemagne, qui a arrêté de financer des dépenses pour faire plaisir à des cibles électorales. Or, en France, le Gouvernement continue à supprimer des impôts à travers l'instauration de niches fiscales toujours plus nombreuses. Les bénéficiaires sont sans doute très contents, mais les comptes publics en pâtissent.
À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».
La commission a également décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l'État ou organisme gérant des services publics » ainsi que du compte d'affectation spéciale « Participations de la France au désendettement de la Grèce ».
La commission a donné acte de la communication du rapporteur spécial sur son contrôle budgétaire relatif au rôle des banques spécialistes en valeur du Trésor et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.
*
* *
Réunie à nouveau le jeudi 24 novembre 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a décidé de proposer au Sénat d'opposer la question préalable au projet de loi de finances pour 2017.
* 1 Article 10 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances : « Les crédits relatifs aux charges de la dette de l'État, aux remboursements, restitutions et dégrèvements et à la mise en jeu des garanties accordées par l'État ont un caractère évaluatif. Ils sont ouverts sur des programmes distincts des programmes dotés de crédits limitatifs ».
* 2 Créé par la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013.
* 3 La norme « zéro valeur » prévoit que les dépenses du budget général de l'État et les prélèvements sur recettes, hors charge de la dette et hors contributions aux pensions des fonctionnaires de l'État, doivent être stabilisés en valeur à périmètre constant.
* 4 La norme « zéro volume » prévoit que la progression annuelle des crédits du budget général de l'État et des prélèvements sur recettes, y compris charge de la dette et dépenses de pension, doit être, à périmètre constant, au plus égale à l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation.
* 5 Le total des dépenses de l'État s'élevant en 2017 à 388,3 milliards d'euros selon l'exposé général des motifs du projet de loi de finances pour 2017.
* 6 Cette note est attribuée à l'issue d'un audit externe.
* 7 Les opérations budgétaires sans impact en trésorerie peuvent relever de deux catégories :
a) D'une part, la charge budgétaire d'indexation du capital des titres indexés. Celle-ci est constatée à la date anniversaire des titres en vie mais ne donne lieu à décaissement qu'à l'amortissement du titre. Cette catégorie représente l'essentiel du volume des opérations budgétaires sans impact en trésorerie ;
b) D'autre part, la charge d'intérêts capitalisés sur une ligne unique, qui arrivera à échéance en décembre 2019. Les intérêts acquis sur cette souche ne sont pas versés à date anniversaire et portent eux-mêmes intérêt (principe de capitalisation des intérêts). Ils seront versés à l'échéance du titre. L'encours de cette souche s'élève à 33 millions d'euros fin 2015, intérêts capitalisés inclus.
* 8 En effet, depuis le 1 er janvier 2013, les nouveaux titres de maturité deux ans à cinq ans sont également des OAT et non plus des bons du Trésor à intérêt annuel ( BTAN ), émis jusqu'en 2013 pour des maturités comprises entre deux et cinq ans. Le dernier BTAN arrivera à échéance le 25 juillet 2017.
En outre, parmi les titres d'État, on dénombre 9 OAT (dont 2 OAT indexées sur l'inflation) et 2 BTAN de maturité résiduelle strictement inférieure à 2 ans. Ces titres ne sont plus émis. Les OAT et BTAN de maturité inférieure à 2 ans peuvent faire l'objet de rachats, dans le cadre du programme de rachat de titres.
* 9 C'est-à-dire une obligation assimilable du Trésor dont le coupon est fixé à 0 % et qui arrivera à échéance le 25 février 2019.
* 10 OAT 1,25% 25 mai 2036.
* 11 OAT 1,75% 25 mai 2066.
* 12 Désormais présidente du conseil de supervision au sein de la Banque centrale européenne (BCE).
* 13 Article 103 de la loi n° 1786-2015 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.
* 14 Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.
* 15 Dont 1,5 million d'euros pour Dexia et 10 millions d'euros pour la SFIL.
* 16 Article 35 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.
* 17 Article 26 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.
* 18 Article 26 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.
* 19 Article 31 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.
* 20 Le décret n° 2014-444 fixant les modalités d'intervention du fonds de soutien a été publié le 29 avril 2014, son arrêté d'application le 4 novembre 2014. Doit aussi être signalé le décret n° 2014-810 du 16 juillet 2014 relatif au service à compétence nationale dénommé « Service de pilotage du dispositif de sortie des emprunts à risque ».
* 21 Rehaussement du taux maximal d'aide à 75 % du montant des indemnités de remboursement anticipé par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notre), limitation des possibilités de refinancement des emprunts à risque par le décret n° 2015-619 du 4 juin 2014, barèmes différenciés selon la nature juridique du bénéficiaire par l'arrêté du 22 juillet 2015 et adoption d'une nouvelle doctrine d'emploi du fonds par le CNOS le 2 avril 2015.
* 22 « Art. 24. - Les comptes de concours financiers retracent les prêts et avances consentis par l'État. Un compte distinct doit être ouvert pour chaque débiteur ou catégorie de débiteurs. Les comptes de concours financiers sont dotés de crédits limitatifs, à l'exception des comptes ouverts au profit des États étrangers et des banques centrales liées à la France par un accord monétaire international, qui sont dotés de crédits évaluatifs.
« Les prêts et avances sont accordés pour une durée déterminée. Ils sont assortis d'un taux d'intérêt qui ne peut être inférieur à celui des obligations ou bons du Trésor de même échéance ou, à défaut, d'échéance la plus proche. Il ne peut être dérogé à cette disposition que par décret en Conseil d'État.
« Le montant de l'amortissement en capital des prêts et avances est pris en recettes au compte intéressé.
« Toute échéance qui n'est pas honorée à la date prévue doit faire l'objet, selon la situation du débiteur :
« - soit d'une décision de recouvrement immédiat, ou, à défaut de recouvrement, de poursuites effectives engagées dans un délai de six mois ;
« - soit d'une décision de rééchelonnement faisant l'objet d'une publication au Journal officiel ;
« - soit de la constatation d'une perte probable faisant l'objet d'une disposition particulière de loi de finances et imputée au résultat de l'exercice dans les conditions prévues à l'article 37. Les remboursements ultérieurement constatés sont portés en recettes au budget général. »
* 23 La mise en place du dispositif d'indemnisation des victimes du Benfluorex (commercialisé sous le nom de Mediator) résulte des dispositions de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011.
* 24 L'article 24 de la LOLF dispose en effet que « les comptes de concours financiers sont dotés de crédits limitatifs, à l'exception des comptes ouverts au profit des États étrangers et des banques centrales liées à la France par un accord monétaire international, qui sont dotés de crédits évaluatifs. »
* 25 Cf. article 21 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.
* 26 C. Blot, C. Mathieu et C. Rifflart, « Politiques monétaires : en attendant la demande... », Revue de l'OFCE , 2012/6, n° 125, 2012, p. 221-246.
* 27 Conformément à l'article 21 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les « comptes d'affectation spéciale retracent, dans les conditions prévues par une loi de finances, les opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées ».
* 28 Au total, 3 950 millions d'euros doivent être rétrocédés à la Grèce par les banques centrales de la zone euro conformément aux décisions prises lors de la réunion de l'Eurogroupe du 20 février 2012, la somme de 754,3 millions d'euros correspondant à la quote-part de la Banque de France.
* 29 Le montant total devant être reversé par les banques centrales à la Grèce en application de l'accord du 26 novembre 2012 s'élève à 9 902 millions d'euros, la quote-part française étant de 2 060 millions d'euros.
* 30 Voir rapport d'information (n° 599, 2014-2015) d'Albéric de Montgolfier sur les risques financiers pour la France inhérents à un éventuel défaut grec fait au nom de la commission des finances du Sénat, 8 juillet 2015.