EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI ORGANIQUE
TITRE IER - DISPOSITIONS
RELATIVES AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Article 1er(art. 3 et 4 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel, art. 3 de la loi organique n° 2016-1047 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France) - Publicité et contrôle de la déclaration de situation patrimoniale du Président de la République - Déclaration d'intérêts et d'activités des candidats à l'élection à la présidence de la République
L'article 1 er du projet de loi organique tend à instaurer un dispositif de contrôle de la déclaration de situation patrimoniale du président de la République à l'issue de son mandat.
Cet article tend également à prévoir l'application des modifications apportées par le projet de loi en matière de financement des campagnes électorales à la campagne pour l'élection du président de la République.
1. La publication et le contrôle de la déclaration de situation patrimoniale du président de la République
Conformément à l'article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 179 ( * ) , les candidats à l'élection présidentielle doivent remplir une déclaration de situation patrimoniale 180 ( * ) et la transmettre, sous pli scellé, au Conseil constitutionnel au plus tard le sixième vendredi précédant le premier tour de scrutin à dix-huit heures (soit, pour l'élection de 2017, 38 jours avant le premier tour). Dans le cas contraire, leur candidature est déclarée nulle par le Conseil constitutionnel.
Depuis la loi organique n° 88-226 du 11 mars 1988 181 ( * ) , le président de la République est également tenu de déposer une déclaration de situation patrimoniale à l'issue de son mandat 182 ( * ) . Les documents correspondants sont publiés au Journal officiel , mais ne font l'objet d'aucun contrôle.
Le Conseil constitutionnel transmet ensuite ces déclarations de situation patrimoniale à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui les rend publiques sur son site internet au moins quinze jours avant le premier tour.
Le délai de consultation de ces documents dépend alors de l'issue du scrutin.
Délais de consultation des déclarations
de situation patrimoniale
des candidats à l'élection
présidentielle
Délais de consultation |
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Candidats dont la candidature n'est pas validée par le Conseil constitutionnel |
Aucun (déclaration non publique) |
Candidats éliminés au premier tour
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Jusqu'à la proclamation des résultats
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Candidat éliminé au second tour |
Jusqu'à la proclamation des résultats
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Candidat élu |
Jusqu'à la fin du sixième mois
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Source : commission des lois du Sénat
À l'issue de son mandat, le président de la République doit remplir une nouvelle déclaration de situation patrimoniale.
Deux cas de figure sont alors envisageables :
- si le président exerce ses fonctions jusqu'au terme normal de son mandat, la déclaration doit être déposée deux mois au plus tôt et un mois au plus tard avant l'expiration du mandat ;
- s'il démissionne, la déclaration doit être déposée au plus tard un mois après cette démission.
La déclaration de situation patrimoniale « de fin de mandat » est transmise à la HATVP et publiée au Journal officiel dans les huit jours.
Par dérogation, les déclarations de situation patrimoniale des candidats et du président de la République sortant ne font pas l'objet de contrôle de la part de la HATVP. Cette dernière se borne à retirer des éléments personnels, non mis à la disposition du public, comme les adresses personnelles de la personne soumise à déclaration, les noms des membres de sa famille, la localisation géographique des biens (sauf le nom du département) ou, en cas d'indivision, les noms des autres propriétaires indivis.
Lors de l'examen du projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique 183 ( * ) en 2013, le Parlement a tenté de renforcer le contrôle de la déclaration de situation patrimoniale des candidats à l'élection présidentielle et du candidat élu en permettant à la HATVP, après avoir entendu l'intéressé, de formuler des appréciations sur :
- l'exhaustivité, l'exactitude et la sincérité de la déclaration des candidats, y compris celle du président de la République candidat à un second mandat, en amont de l'élection ;
- l'exhaustivité, l'exactitude et la sincérité de la déclaration du président de la République à l'issue de son mandat ou sur une éventuelle « évolution de situation patrimoniale pour laquelle [la HATVP] ne dispose pas d'explications suffisantes ».
Ces deux dispositions ont été censurées par le Conseil constitutionnel au motif qu'« en retenant que la Haute autorité peut assortir la publication de la déclaration, qui intervient au moins quinze jours avant le premier tour de scrutin de toute appréciation qu'elle estime utile (...), le législateur a conféré à cette autorité le pouvoir d'intervenir dans la campagne électorale, dans les derniers jours de celle-ci, dans des conditions qui pourraient porter atteinte à l'égalité devant le suffrage » 184 ( * ) .
Afin de tenir compte de cette censure, l'article 1 er du projet de loi organique prévoit d'instaurer un contrôle par la HATVP de la seule déclaration de situation patrimoniale de « fin de mandat » du président de la République en l'assortissant de deux réserves :
- le dépôt de cette déclaration serait avancé de deux mois de manière à l'éloigner du début de la campagne électorale ; il interviendrait donc entre quatre et trois mois avant la fin du mandat présidentiel plutôt que de deux à un mois avant celle-ci ;
- l'avis de la HATVP serait rendu public 15 plus tard, après qu'elle aurait invité l'intéressé à présenter ses observations, mais se limiterait aux appréciations portées sur la variation de la situation patrimoniale du chef de l'État depuis son entrée en fonction.
Dans ces conditions, l'avis de la HATVP ne serait rendu public, au plus tard, que 75 jours avant l'échéance du mandat présidentiel et 40 jours avant le premier tour du scrutin. En effet, en application de l'article 7 de la Constitution, le scrutin peut avoir lieu jusqu'à 35 jours avant l'échéance du mandat présidentiel en cours.
Les déclarations de situation patrimoniale des candidats à l'élection présidentielle continueraient à ne faire l'objet d'aucun contrôle de la HATVP.
Si elle a approuvé les dispositions proposées, votre commission a adopté un amendement COM-35 de son rapporteur ayant pour objet de préciser que la publicité de la déclaration de situation patrimoniale de « fin de mandat » du président de la République et de l'avis de la HATVP dont elle serait assortie serait assurée selon les modalités en vigueur pour les déclarations de situation patrimoniale déposées par les autres déclarants, notamment les parlementaires, auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique . En seraient ainsi retirées les mentions relatives à la vie privée du chef de l'État (adresse personnelle, identité et informations relatives à des tiers, etc .).
2. L'application des modifications apportées par le projet de loi en matière de financement des campagnes électorales à la campagne pour l'élection du président de la République
En application des articles 6 et 7 de la Constitution, les règles relatives à la campagne pour l'élection du président de la République relèvent du domaine de la loi organique. Les dispositions applicables sont donc celles du code électoral dans la version « cristallisée » à la date indiquée à l'article 4 de la loi du 6 novembre 1962 relative à l'élection du président de la République au suffrage universel.
L'article 1 er du projet de loi organique tend à actualiser ce compteur pour étendre à la campagne électorale en vue de l'élection du président de la République les modifications apportées par le projet de loi en matière de financement des campagnes électorales 185 ( * ) .
Ce faisant, il a également pour effet de rendre applicables à la campagne précédant l'élection présidentielle les modifications législatives intervenues depuis la publication de la loi organique n° 2016-506 du 25 avril 2016 de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle. Il en est ainsi des règles de publication des informations relatives aux emprunts contractés en annexe des comptes de campagne, introduites à l'article L. 52-12 du code électoral par la loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats.
Le II de l'article 1 er du projet de loi organique prend en compte la modification de l'article 4 de la loi du 6 novembre 1962 qui interviendra postérieurement à l'entrée en vigueur du présent texte, et au plus tard le 31 décembre 2019, en application de l'article 3 de la loi organique n° 2016-1047 du 1 er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France. Il modifie ainsi l'article 3 de ladite loi organique n° 2016-1047 pour y insérer la référence à la présente loi organique.
Votre commission a adopté un amendement COM-91 de son rapporteur de manière à assurer une coordination rendue nécessaire par la modification, par l'article 9 bis du projet de loi, de l'article L. 52-6 du code électoral, auquel renvoie l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962.
Votre commission a adopté l'article 1 er ainsi modifié .
* 179 Loi relative à l'élection du président de la République au suffrage universel.
* 180 Le patrimoine évalué est celui détenu par le candidat à la date du premier jour du troisième mois précédant le premier tour de scrutin (article 9-1 du décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 portant application de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel).
* 181 Loi relative à la transparence financière de la vie politique.
* 182 Il n'est, à l'inverse, pas soumis à une obligation de déclaration d'intérêts.
* 183 Dont est issue la loi organique n° 2013-906 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.
* 184 Conseil constitutionnel, 9 octobre 2013, Loi organique relative à la transparence de la vie publique, décision n° 2013-675 DC.
* 185 Cf. commentaire de l'article 9 du projet de loi.