B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
A l'issue des auditions que votre rapporteur a menées sur cette proposition de loi, il est apparu que la volonté d'améliorer les règles d'indemnisation est accueillie très positivement. L'Anses en particulier, s'est montrée favorable à la recherche d'une plus grande équité dans la prise en charge des victimes. Elle a également souligné l'avantage d'un tel dispositif qui permet d'éviter une judiciarisation des demandes.
Les réserves formulées sur le texte portent essentiellement sur deux points : en premier lieu, la gouvernance et la procédure d'instruction, que d'aucuns voudraient voir précisées ; en second lieu, le financement, sur lequel les avis sont partagés.
De manière générale, les syndicats agricoles souhaiteraient que le financement soit entièrement étatique et craignent qu'une hausse de la taxe sur les produits phytopharmaceutiques ne soit répercutée sur le prix de vente. Compte tenu du chiffre d'affaires du secteur en France, qui s'élève à plus de 2 milliards d'euros chaque année, et de la capacité de négociation des intermédiaires, votre rapporteur estime que cette réserve pourrait être levée. Il tient en outre à souligner que les règles de recevabilité financière auxquelles les parlementaires sont contraints ne permettraient pas de faire reposer le financement du fonds en intégralité sur l'État.
En tout état de cause, votre rapporteur rappelle que la taxe sur les produits phytopharmaceutiques est aujourd'hui collectée par l'Anses dont elle finance le dispositif de phytopharmacovigilance. Il est essentiel que celui-ci soit totalement préservé . Dans ce cadre, pour financer l'activité du fonds et sa montée en charge, les ressources devront nécessairement être revues après la phase d'amorçage.
A l'initiative de votre rapporteur, votre commission a adopté huit amendements qui résultent essentiellement de trois séries de considérations.
S'agissant en premier lieu des personnes éligibles au dispositif, le texte retient une rédaction particulièrement large. Pour les victimes non professionnelles, il convient de renvoyer à un arrêté ministériel le soin de définir la liste des pathologies ouvrant droit à indemnisation. Afin d'établir cette liste, le Gouvernement pourra se fonder sur les tableaux de maladies professionnelles et les résultats de l'expertise collective de l'Inserm. A l'instar des tableaux, la liste aurait vocation à évoluer à mesure que progressent nos connaissances scientifiques.
En deuxième lieu, des modifications apparaissent également nécessaires pour préciser la gouvernance du fonds d'indemnisation. Votre commission a précisé qu'il comprend un conseil de gestion et qu'il est représenté à l'égard des tiers par le directeur de la CCMSA.
En dernier lieu, s'agissant de la procédure d'examen des demandes, le texte dispose que le demandeur justifie d'un lien direct entre son exposition aux pesticides et la pathologie. Or, de l'avis général, faire reposer la charge de la preuve sur le demandeur rendrait le dispositif extrêmement complexe. Votre commission a estimé qu'il était préférable de retenir une présomption de causalité : la jurisprudence civile et administrative dans le domaine de la santé reconnaît aujourd'hui que le doute scientifique ne fait pas nécessairement obstacle à la preuve requise du demandeur dès lors que celui-ci fait valoir un faisceau d'indices concordants sur les dommages causés par le produit. Le texte adopté par votre commission renvoie ainsi à commission médicale indépendante la mission d'examiner les circonstances des expositions et de statuer sur leur lien avec la pathologie, selon un dispositif analogue à celui prévu pour le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva).