Rapport n° 299 (2020-2021) de M. Philippe BAS , fait au nom de la commission des lois, déposé le 26 janvier 2021

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N° 299

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 26 janvier 2021

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi , adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, prorogeant l' état d' urgence sanitaire ,

Par M. Philippe BAS,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet , président ; Mmes Catherine Di Folco, Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Christophe-André Frassa, Jérôme Durain, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Bonnecarrère, Mme Nathalie Goulet, M. Alain Richard, Mmes Cécile Cukierman, Maryse Carrère, MM. Alain Marc, Guy Benarroche , vice-présidents ; M. André Reichardt, Mmes Laurence Harribey, Jacky Deromedi, Agnès Canayer , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Philippe Bas, Arnaud de Belenet, Mmes Catherine Belrhiti, Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Valérie Boyer, M. Mathieu Darnaud, Mmes Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Pierre Frogier, Mme Françoise Gatel, M. Loïc Hervé, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Mikaele Kulimoetoke, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Mme Marie Mercier, MM. Thani Mohamed Soilihi, Jean-Yves Roux, Jean-Pierre Sueur, Mmes Lana Tetuanui, Claudine Thomas, Dominique Vérien, M. Dany Wattebled .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

3733 , 3739 et T.A. 542

Sénat :

296 et 300 (2020-2021)

INTRODUCTION

Après avoir entendu M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, le jeudi 21 janvier 2021, la commission des lois, réunie le mardi 26 janvier 2021 sous la présidence de François-Noël Buffet (Les Républicains - Rhône), a examiné le rapport de Philippe Bas (Les Républicains - Manche) sur le projet de loi n° 296 (2020-2021) prorogeant l'état d'urgence sanitaire .

Compte tenu de la situation sanitaire, la commission des lois a estimé justifié de proroger les pouvoirs exceptionnels conférés au Gouvernement pour lutter contre l'épidémie de covid-19. Elle a donc adopté ce projet de loi, tout en y apportant plusieurs modifications visant à parfaire le régime de l'état d'urgence sanitaire et à assurer que son application fasse l'objet d'un réexamen régulier par le Parlement.

I. UNE SITUATION SANITAIRE QUI DEMEURE PRÉOCCUPANTE ET JUSTIFIE LE MAINTIEN DE MESURES D'EXCEPTION

Les mois passent et se ressemblent trop. Après la flambée épidémique de la fin de l'hiver et du printemps 2020, puis l'accalmie constatée au cours de l'été, une nouvelle augmentation du nombre de cas d'infection par le coronavirus SARS-CoV-2 et le risque de saturation du système hospitalier avaient conduit le Gouvernement, par décret du 14 octobre 2020 1 ( * ) , à remettre en application le régime de l'état d'urgence sanitaire, créé par la loi du 23 mars 2020 2 ( * ) et qui confère aux autorités de l'État des prérogatives exorbitantes du droit commun, fortement attentatoires aux libertés individuelles et publiques, pour tenter d'enrayer cette progression. Par la loi du 14 novembre 2020 3 ( * ) , le Parlement en avait autorisé la prorogation jusqu'au 16 février 2021, tout en prévoyant que le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire, créé par la loi du 9 juillet 2020 4 ( * ) , resterait en vigueur jusqu'au 1 er avril 2021.

L'échéance de l'expiration de l'état d'urgence sanitaire approche, et le Gouvernement constate que le régime de sortie issu de la loi du 9 juillet 2020 ne lui confère pas les pouvoirs nécessaires pour affronter une situation qui demeure très préoccupante.

A. LE REGAIN ÉPIDÉMIQUE DU DÉBUT DE L'ANNÉE 2021

En effet, alors que les mesures de police sanitaire prises au titre de l'état d'urgence sanitaire au cours de l'automne - notamment le confinement « allégé » de la population, en métropole et dans certaines collectivités d'outre-mer, entre le 30 octobre et le 14 décembre 2020 inclus - avaient permis de ralentir à nouveau la progression des contaminations, les indicateurs épidémiologiques sont repartis à la hausse depuis le début du mois de janvier . Ainsi, en France, à la date du vendredi 23 janvier 2021 :

- le nombre de contaminations en une journée (stabilisé entre 10 000 et 15 000 au mois de décembre) atteignait 23 924 nouveaux cas ;

- le taux d'incidence (nombre de personnes testées positives sur une semaine pour 100 000 habitants) s'établissait ainsi à 207,99 au niveau national, contre un peu plus de 100 début décembre ;

- l'indicateur de reproduction effectif du virus (R 0 ), soit le nombre moyen de personnes qu'un malade peut contaminer, s'élevait à 1,09, témoignant de la progression de l'épidémie ;

- on comptait 25 900 patients hospitalisés, dont 2 896 en réanimation (soit un taux de 57,1 % d'occupation des lits en réanimation, en légère progression) ;

- le nombre total de décès lié à la covid-19 (à l'hôpital et en établissement) était évalué à 72 877 5 ( * ) .

La principale cause de ce regain épidémique semble être la reprise d'interactions sociales plus nombreuses - sans pour autant revenir à la normale - à la suite de la levée du confinement en métropole le 15 décembre 2020. Un couvre-feu lui a succédé entre 20 heures et 6 heures, auquel il a été fait exception pour le réveillon de Noël. Malgré les contraintes et les précautions prises par nos concitoyens, les fêtes de fin d'année ont probablement occasionné de nouvelles contaminations.

Par ailleurs, dès le 22 décembre dernier 6 ( * ) , le comité de scientifiques « Covid-19 », créé en application de la loi du 23 mars 2020 et chargé d'éclairer les pouvoirs publics sur les décisions à prendre pour endiguer l'épidémie, alertait sur l'apparition d'un nouveau clone du virus dans l'Est et le Sud-Est de l'Angleterre. Selon les données disponibles, ce clone VOC 202012/01 serait, en effet, plus facilement transmissible que la forme initiale du virus (l'indicateur de reproduction effectif R 0 étant augmenté d'environ 0,4), sans que l'on sache encore s'il est plus pathogène ou susceptible d'échapper à la réponse immunitaire des personnes déjà infectées. Une autre variante, apparue en Afrique du Sud, présente des caractéristiques similaires, tandis qu'une variante identifiée au Brésil pourrait être plus contagieuse. On ignore encore dans quelle mesure ces variantes ont commencé à circuler sur le territoire français 7 ( * ) , mais il s'agit là d' un sujet de grave préoccupation pour les prochaines semaines , car la diffusion de ces variantes pourrait rendre l'épidémie incontrôlable et créer une situation critique dans nos hôpitaux.

Enfin, pour l'heure, il serait illusoire de compter sur les progrès de la vaccination pour ralentir suffisamment la diffusion de la maladie . Certes, il existe à ce jour deux vaccins mis sur le marché en France : le vaccin Comirnaty des laboratoires BioNTech et Pfizer (depuis le 21 décembre 2020) et le vaccin COVID Vaccine Moderna (depuis le 6 janvier 2021). L'un et l'autre sont des vaccins à acide ribonucléique (ARN) messager, ce qui constitue une première pour la vaccination humaine. Toutefois, les débuts de la campagne française de vaccination ont, de l'aveu général, été poussifs . Selon les chiffres enfin publiés par le ministère des solidarités et de la santé, le 11 janvier dernier, 138 477 personnes en France avaient reçu une première dose de vaccin à cette date, soit environ 0,2 % de la population, ce qui plaçait notre pays à la traîne parmi ses voisins européens 8 ( * ) . Le rythme s'est heureusement accéléré depuis 9 ( * ) . Il n'en demeure pas moins que seuls les publics prioritaires peuvent encore se faire vacciner 10 ( * ) , ce qui restera le cas pendant plusieurs mois . Les capacités de production des laboratoires, confrontés à une demande mondiale, n'augmentent pas assez vite pour satisfaire celle-ci, et des retards de livraison sont d'ores et déjà constatés. À cela s'ajoute le fait que ce nouveau type de vaccins à ARN messager soulève des difficultés logistiques importantes , en raison de leurs conditions de conservation à très basse température. L'arrivée sur le marché d'un vaccin à vecteur viral du groupe AstraZeneca pourrait, à cet égard, changer la donne.

Ces incertitudes expliquent-elles la surprenante contradiction que l'on a pu relever dans les propos du ministre des solidarités et de la santé qui, lors de son audition devant la commission des lois, a évoqué l'objectif de vacciner 15 millions de personnes en France avant l'été, et qui, le jour même, au journal télévisé de TF1, a déclaré que le nombre de personnes vaccinées se monterait à « 4 millions fin février, 9 millions au mois de mars, 20 millions à la fin d'avril, 30 millions à la fin mai, 43 millions à la fin du mois de juin, 57 millions à la fin du moins de juillet et 70 millions, c'est-à-dire la totalité de la population française, d'ici à la fin août » ? Il serait souhaitable, pour la transparence du débat public comme pour le moral de la population, que les projections fournies par le Gouvernement ne varient pas d'heure en heure...

Enfin, si les vaccins aujourd'hui mis sur le marché permettent de prévenir l'apparition des formes graves de covid-19, le doute demeure, d'une part, sur l'immunité qu'ils confèrent à moyen et long terme, d'autre part, sur leurs effets sur la transmission du virus . Lors de son audition par la commission des lois, le ministre des solidarités et de la santé a cependant fait état de premières données encourageantes sur ce second point.

B. LE MAINTIEN DE MESURES DE POLICE SANITAIRE TRÈS RESTRICTIVES, MALGRÉ DES VA-ET-VIENT

Dans ce contexte, le Gouvernement a annoncé, le 14 janvier dernier, un nouveau durcissement des mesures de police prises sur le fondement de l'état d'urgence sanitaire pour endiguer l'épidémie , notamment l'extension à tout le territoire métropolitain du couvre-feu dès 18 heures et jusqu'à 6 heures.

Rappel des principales mesures de police sanitaire prises sur le fondement
de l'état d'urgence sanitaire depuis le 14 octobre 2020

Plusieurs phases se sont succédé dans la mise en oeuvre de l'état d'urgence sanitaire déclaré le 14 octobre 2020, marquées par un va-et-vient entre des mesures plus ou moins restrictives pour les libertés. Sans entrer dans le détail des très nombreuses mesures réglementaires prises par le Premier ministre, le ministre des solidarités et de la santé et les représentants de l'État au niveau local, on peut distinguer six étapes principales.

1° Du 17 au 29 octobre 2020

Le décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire a imposé plusieurs types de mesures (dont certaines, mais non les plus restrictives, étaient déjà en application sous le régime de sortie de l'état d'urgence défini par la loi du 9 juillet 2020). Il s'agissait notamment de :

- l'imposition d'un couvre-feu (c'est-à-dire l'interdiction faite aux personnes de sortir de leur lieu de résidence, sauf motif dérogatoire) entre 21 heures et 6 heures dans seize départements ;

- l'autorisation donnée aux préfets de département d'interdire les déplacements en dehors de celui-ci ou au-delà d'un rayon de 100 kilomètres ;

- l'autorisation donnée aux préfets d'interdire l'ouverture de certains établissements recevant du public, notamment les commerces, restaurants et débits de boissons, salles de spectacle, musées, salles de sport et stades, ou d'en réglementer l'ouverture ;

- l'interdiction, sauf exception, des rassemblements de plus de six personnes sur la voie publique ou dans un lieu ouvert au public , et, de manière générale, la prohibition des événements réunissant plus de 5 000 personnes ;

- diverses mesures réglementant l'usage des transports terrestres, maritimes et aériens (notamment l'interdiction des déplacements aériens entre la métropole et certains territoires ultramarins, ainsi que l'obligation pour les passagers aériens de présenter le résultat d'un test de dépistage à l'arrivée sur le territoire national ou au départ de celui-ci) ;

- l'autorisation du placement en quarantaine ou à l'isolement des personnes entrant sur le territoire hexagonal ou arrivant en Corse ou dans une collectivité ultramarine.

2° Du 30 octobre au 27 novembre 2020

En raison de l'aggravation rapide de la situation sanitaire, le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, tout en maintenant en vigueur le décret précédent dans la plupart des territoires ultramarins, marqua le retour de restrictions beaucoup plus sévères en métropole et, dans un premier temps, en Martinique, avec notamment :

- un nouveau confinement de la population (interdiction de sortir de son lieu de résidence à toute heure, sauf motif dérogatoire) ;

- la fermeture généralisée des établissements recevant du public relevant de nombreuses catégories , en particulier les commerces, restaurants et débits de boissons, salles de spectacle, musées, salles de sport et stades.

3° Du 28 novembre au 14 décembre 2020

À compter du 28 novembre dernier, comme le Président de la République l'avait annoncé dans son allocution du 24 novembre, les conditions du confinement en métropole furent assouplies puisqu'il devint possible de sortir de chez soi pour une promenade ou une activité physique pendant trois heures (au lieu d'une) et dans un rayon de 20 kilomètres autour de son lieu de résidence (au lieu d'un kilomètre).

En outre, les commerces furent autorisés à rouvrir jusqu'à 21 heures (décret n° 2020-1454 du 27 novembre 2020).

Le confinement fut levé en Martinique à compter du 8 décembre 2020 et remplacé par un couvre-feu entre 20 heures et 4 heures (décret n° 2020-1505 du 2 décembre 2020).

4° Du 15 décembre 2020 au 1 er janvier 2021

Le confinement en métropole fut levé par le décret n° 2020-1582 du 14 décembre 2020, qui rétablit un couvre-feu entre 20 heures et 6 heures . Deux dérogations avaient d'abord été envisagées pour les nuits du 24 au 25 décembre et du 31 décembre au 1 er janvier, afin de permettre aux Français de se réunir pour les fêtes de fin d'année ; mais le maintien d'un niveau élevé de contaminations obligea finalement à maintenir le couvre-feu pour le réveillon du Nouvel An. De même, le Gouvernement dut renoncer à rouvrir les salles de spectacle et les musées.

En outre-mer, seule la Polynésie française était désormais soumise à un couvre-feu, entre 20 heures et 4 heures.

5° Du 2 au 15 janvier 2021

La situation épidémique se détériorant à nouveau au début de l'année, tout particulièrement dans l'Est de la France, le couvre-feu fut avancé à 18 heures , par arrêté préfectoral, dans quinze départements métropolitains à compter du 2 janvier 2021, puis dans dix autres départements à compter du 10 ou du 12 janvier.

6° Depuis le 16 janvier 2021

En dernier lieu, le Premier ministre Jean Castex a annoncé le 14 janvier que l'heure du couvre-feu serait avancée à 18 heures sur l'ensemble du territoire métropolitain à compter du surlendemain, pour une durée d'au moins deux semaines. Par ailleurs, les conditions du transport aérien entre la métropole et les territoires ultramarins (autres que la Polynésie française, Wallis-et-Futuna et la Nouvelle-Calédonie où les autorités locales avaient déjà pris des mesures similaires) ont été durcies , puisque les passagers doivent désormais non seulement présenter à l'embarquement le résultat d'un test de dépistage négatif de moins de 72 heures, mais aussi s'engager à rester à l'isolement à leur arrivée pendant sept jours, et à se soumettre à un nouveau test à l'issue (décret n° 2021-31 du 15 janvier 2021).

II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT : LA PROLONGATION DE PLUSIEURS RÉGIMES D'EXCEPTION

A. LE REPORT À LA FIN 2021 DE LA DATE DE CADUCITÉ DU RÉGIME GÉNÉRAL DE L'ÉTAT D'URGENCE SANITAIRE

Face à la situation qui vient d'être décrite, le Gouvernement propose tout d'abord de maintenir en vigueur, au-delà de la date initialement envisagée, les dispositions du chapitre I er bis du titre III du livre I er de la troisième partie du code de la santé publique , issues de la loi du 23 mars 2020 et qui définissent le régime de l'état d'urgence sanitaire (conditions de déclaration et de prolongation, pouvoirs exceptionnels conférés aux autorités de l'État, garanties légales accordées aux personnes).

L'article 7 de la loi du 23 mars 2020, en effet, prévoit que ce chapitre n'est applicable que jusqu'au 1 er avril 2021 . Cette date de caducité avait été introduite par le Sénat, en première lecture, à l'initiative de la commission des lois : il avait, en effet, paru préférable de ne pas introduire de manière pérenne, dans notre ordre juridique, un nouveau régime d'exception conçu en quelques jours seulement et adopté dans des conditions d'extrême urgence par le Parlement, alors même qu'il autorisait des mesures très attentatoires aux libertés de nos concitoyens. Cette disposition n'a jamais été remise en cause depuis.

Ayant renoncé à faire examiner en temps utile par le Parlement son projet de loi instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires , déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 21 décembre 2020 et dont certaines dispositions ont suscité de vives réactions au sein du public, le Gouvernement se voit contraint de solliciter la prolongation de la durée d'application du régime transitoire issu de la loi du 23 mars 2020, et cela jusqu'au 31 décembre 2021 ( article 1 er du projet de loi en discussion).

B. LA PROROGATION DE L'ÉTAT D'URGENCE SANITAIRE JUSQU'AU 1ER JUIN 2021

L'état d'urgence sanitaire lui-même , déclaré par décret le 14 octobre 2020 et prolongé une première fois (jusqu'au 16 février 2021) par la loi du 14 novembre 2020, serait prolongé derechef jusqu'au 1 er juin 2021 ( article 2 du projet de loi).

Pour mémoire, l'état d'urgence sanitaire autorise le Premier ministre à prendre, par décret, des mesures générales visant notamment à restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules, à interdire aux personnes de sortir de leur domicile, à autoriser le placement à l'isolement ou en quarantaine des personnes affectées ou susceptibles de l'être, à fermer les établissements recevant du public et lieux de réunion, à limiter ou interdire les rassemblements, à ordonner la réquisition de tous biens ou services et à instaurer un contrôle des prix 11 ( * ) .

Le ministre chargé de la santé est, lui, autorisé à prescrire, par arrêté, toute autre mesure réglementaire relative à l'organisation et au fonctionnement du dispositif de santé, ainsi que toute mesure individuelle nécessaire à l'application des mesures prescrites par le Premier ministre 12 ( * ) .

Enfin, les préfets de département peuvent être habilités par le Premier ministre et le ministre de la santé à prendre toutes les mesures générales ou individuelles d'application des dispositions qu'ils ont édictées, ou encore à prendre eux-mêmes de telles dispositions, lorsque leur champ d'application n'excède pas le territoire d'un département 13 ( * ) .

C. LA PROROGATION DU RÉGIME DE SORTIE DE L'ÉTAT D'URGENCE SANITAIRE JUSQU'AU 30 SEPTEMBRE 2021

Par ailleurs, le Gouvernement souhaite proroger jusqu'au 30 septembre 2021 le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire défini à l'article 1 er de la loi du 9 juillet 2020 ( article 3 du projet de loi), dont la loi du 14 novembre 2020 avait déjà prolongé la durée d'application jusqu'au 1 er avril 2021.

Ce régime , dont la création a été inspirée par des considérations psychologiques et politiques plus que juridiques, est en réalité très proche de celui de l'état d'urgence sanitaire . Les autorités de l'État y conservent les mêmes prérogatives pour lutter contre l'épidémie 14 ( * ) , à l'exception :

- du pouvoir d'interdire aux personnes de sortir de leur domicile (sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé), qui sert de fondement non seulement aux mesures de confinement, mais aussi de couvre-feu 15 ( * ) ;

- du pouvoir de prendre toute mesure limitant la liberté d'entreprendre, autre que la fermeture d'établissements recevant du public, les réquisitions et les autres mesures visées aux 1° à 9° du I de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, pouvoir résiduel dont le Gouvernement n'a encore jamais fait usage.

Le régime de la loi du 9 juillet 2020 n'est applicable que sur les parties du territoire où l'état d'urgence sanitaire n'est pas en vigueur. Autrement dit, malgré sa prolongation, il n'a pas trouvé à s'appliquer depuis le 17 octobre 2020, date d'entrée en vigueur de l'état d'urgence sanitaire sur l'ensemble du territoire de la République.

Initialement, le Gouvernement prévoyait de demander la prorogation de ce régime de sortie jusqu'au 31 décembre 2021 . Il s'est cependant rangé à l'avis du Conseil d'État, qui avait souligné combien il était « délicat » d'évaluer le bien-fondé d'une telle demande, plus de onze mois avant l'échéance prévue et alors même que ce régime habilite le Premier ministre « à prendre des mesures de police sanitaire exceptionnelles affectant les droits et libertés constitutionnellement garantis ». Le Conseil d'État avait donc estimé qu'au-delà du 30 septembre prochain, une nouvelle prolongation supposait « une nouvelle appréciation par le Parlement de la nécessité d'une telle option, au vu des données sanitaires alors disponibles ».

D. LA PROLONGATION JUSQU'À LA FIN 2021 DES SYSTÈMES D'INFORMATION DÉDIÉS À LA LUTTE CONTRE L'ÉPIDÉMIE

L'article 4 du projet de loi vise à prolonger jusqu'au 31 décembre 2021 l'autorisation de mettre en oeuvre les systèmes d'information dédiés à la lutte contre l'épidémie .

Pour mémoire, au regard de l'ampleur de la tâche et du caractère massif de l'épidémie, le législateur a autorisé de façon exceptionnelle que le traitement de certaines informations s'affranchisse du secret médical et du consentement des intéressés pour pouvoir partager les données de santé indispensables au traçage des contacts.

Plusieurs fichiers et outils numériques ont ainsi été créés ou adaptés pour équiper les professionnels de santé en charge de la lutte contre l'épidémie afin de faciliter les opérations de prévention et de dépistage et de permettre la remontée d'informations épidémiologiques :

- le système d'information national de dépistage (« SI-DEP » ), mis en oeuvre sous la responsabilité du ministère de la santé, essentiellement par les laboratoires de tests et les médecins, sert à enregistrer les résultats des laboratoires de tests covid-19 et permet le suivi des opérations de dépistage et la diffusion des résultats des tests ;

- le téléservice « Contact covid », élaboré par l'Assurance maladie, permet le suivi des personnes contaminées et des cas-contacts .

Concernant spécifiquement l'utilisation de ces fichiers aux fins de surveillance épidémiologique et de recherche sur le virus :

- les données doivent être pseudonymisées (les nom et prénoms des intéressés, leur numéro de sécurité sociale, et leur adresse devant être supprimés) ;

- la durée de conservation desdites données peut être allongée au-delà du délai normal de suppression de trois mois après leur collecte (pour cette seule finalité, pour des données non directement identifiantes, dans la limite de la durée d'autorisation globale des systèmes d'information, et de façon encadrée par un décret soumis à avis public de la CNIL et du comité de contrôle et de liaison).

Les garanties encadrant le traitement des données de santé
par les systèmes d'information destinés au suivi des contacts
et à la lutte contre la covid-19

L'article 11 de la loi du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions fixe un cadre juridique général pour les systèmes d'information déployés en appui à la lutte contre la propagation de l'épidémie de covid-19 et que doivent respecter les traitements de données ultérieurement créés ou modifiés.

Il autorise expressément que le partage de données traitées dans le cadre de ces systèmes d'information déroge au secret médical 16 ( * ) et à la nécessité de recueillir le consentement des intéressés.

Eu égard au caractère exceptionnel et particulièrement sensible de ces traitements, le législateur les a assortis d'importantes garanties , qui répondent ainsi aux exigences du Règlement général sur la protection des données (RGPD) :

- limitation du périmètre des données de santé pouvant être traitées (statut virologique ou sérologique de la personne à l'égard du virus et éléments probants de diagnostic clinique et d'imagerie médicale) ;

- double encadrement dans le temps , non seulement pour la durée de vie des systèmes d'information (initialement « six mois à compter de la fin de l'état d'urgence sanitaire », et désormais jusqu'au 1 er avril 2021 ), mais également pour la durée autorisée pour le traitement des données personnelles collectées (« trois mois après leur collecte ») ;

- identification précise des responsables de traitement pour les dispositifs envisagés et des catégories de personnes pouvant avoir accès à ces informations ;

- limitation des finalités poursuivies (identification des personnes infectées et des « cas-contacts », orientation et suivi, recherche et surveillance épidémiologique, accompagnement social) ;

- instauration de contrôles spécifiques , par un « comité de contrôle et de liaison covid-19 » (chargé d'associer la société civile et le Parlement aux opérations de lutte contre la propagation de l'épidémie par suivi des contacts ainsi qu'au déploiement des systèmes d'information prévus à cet effet) et l'obligation de remise d'un rapport trimestriel au Parlement rendu après avis public de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

C'est au regard de l'ensemble de ces garde fous, et après leur analyse détaillée, que le Conseil constitutionnel a déclaré les dispositions autorisant ces traitements de données conformes à la Constitution 17 ( * ) .

Ces systèmes d'information ont été mis en place le 13 mai 2020 .

La durée de l'autorisation consentie par le législateur, initialement prévue jusqu'à six mois après la fin de l'état d'urgence sanitaire, a déjà été prolongée une première fois, jusqu'au 1 er avril 2021 (loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire).

Au vu de l'importance des systèmes d'information pour gérer et suivre efficacement la situation sanitaire, et pour les mêmes raisons qui justifient de proroger l'état d'urgence sanitaire , l'article 4 du présent projet de loi vise à prolonger de neuf mois la mise en oeuvre de ces outils, fixant au 31 décembre 2021 la nouvelle date de caducité de l'autorisation donnée par le législateur.

L'article 4 du présent projet de loi permettrait également au Gouvernement de prolonger par décret jusqu'au 31 décembre 2021 la durée de conservation des données pseudonymisées pour les finalités spécifiques de surveillance épidémiologique et de recherche sur le virus .

E. L'APPLICATION OUTRE-MER

Enfin, l'article 5 du projet de loi étend les dispositions de celui-ci dans les territoires d'outre-mer où ces matières relèvent du principe de spécialité législative. Plus exactement :

- il modifie les dispositions du code de la santé publique relatives à l'application à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie des dispositions fixant le régime de l'état d'urgence sanitaire, afin de les y maintenir en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021 (au lieu du 1 er avril 2021) ;

- il rend applicable sur l'ensemble du territoire de la République la prorogation du régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire 18 ( * ) .

III. LE REFUS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE DE LA PROROGATION DU RÉGIME DE SORTIE DE L'ÉTAT D'URGENCE SANITAIRE

La principale modification apportée au projet de loi lors de son examen en première lecture par l'Assemblée nationale consiste en la suppression de son article 3, qui prévoyait de prolonger jusqu'au 30 septembre 2021 la durée d'application du régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire défini à l'article 1 er de la loi du 9 juillet 2000. Cette suppression a fait l'objet du plus large consensus parmi les députés , puisqu'elle résulte de l'adoption en commission d'amendements identiques du rapporteur, du groupe La République en marche, de Philippe Gosselin et plusieurs membres du groupe Les Républicains, de Danièle Obono et plusieurs membres du groupe La France insoumise, ainsi que de Paul Molac et Jean-Félix Acquaviva, membres du groupe Libertés et territoires. Le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire expirerait donc à la date actuellement prévue, soit le 1 er avril prochain - sans d'ailleurs avoir trouvé à s'appliquer jusque-là, sauf à ce qu'il soit mis fin dans l'intervalle à l'état d'urgence sanitaire sur tout ou partie du territoire national.

Par cohérence, les dispositions de l'article 5 étendant cette prolongation à l'ensemble du territoire de la République ont également été supprimées, et l'intitulé du projet de loi a été modifié 19 ( * ) .

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES LOIS : ACCEPTER LA PROROGATION DE L'ÉTAT D'URGENCE SANITAIRE POUR UNE DURÉE RAISONNABLE, TOUT EN ADAPTANT SON RÉGIME

Dans la situation sanitaire actuelle, qui demeure très dégradée et porteuse d'incertitudes, l'esprit de responsabilité commande d'accorder au Gouvernement les pouvoirs exceptionnels qu'il sollicite pour combattre l'épidémie . Le Sénat ne les lui a jamais refusés , aussi un accord a-t-il été trouvé sans difficulté avec l'Assemblée nationale lors de l'instauration de l'état d'urgence sanitaire par la loi du 23 mars 2020, puis lors de la prolongation de ce régime par la loi du 11 mai 2020.

En revanche, le Sénat s'est opposé aux mesures d'affichage, comme l'instauration par la loi du 9 juillet 2000 d'un régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire fort proche de celui de l'état d'urgence sanitaire lui-même , qu'il aurait été aussi expédient de maintenir en vigueur, sans d'ailleurs que les autorités de l'État aient obligatoirement et constamment à en exploiter toutes les potentialités - puisque au contraire les mesures de police sanitaire doivent, à tout instant et en tout lieu, être adaptées aux circonstances, strictement nécessaires et proportionnées.

Le Sénat s'est également opposé à ce que le Parlement soit trop longtemps dépossédé de la prérogative qui est la sienne d'autoriser la prolongation de régimes d'exception, à échéances régulières et en fonction de la situation du moment . C'est pourquoi il n'a pu accepter que la loi du 14 novembre 2020, d'une part, prolonge jusqu'au 16 février 2021 l'état d'urgence sanitaire, d'autre part, reporte au 1 er avril 2021 la date de caducité du régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire, ce qui aurait pu permettre au Gouvernement de continuer à user de pouvoirs exceptionnels sans nouvelle habilitation législative pour une durée de quatre mois et demi.

Le rapporteur se félicite donc que le principal point d'achoppement qui aurait pu apparaître entre les deux assemblées, à propos du projet de loi actuellement en discussion, ait disparu lors de l'examen du texte par l'Assemblée nationale, puisque celle-ci a refusé la prolongation jusqu'au 30 septembre 2020 - pour huit mois ! - du régime « en trompe-l'oeil » 20 ( * ) de sortie de l'état d'urgence sanitaire .

Cela étant, la commission a apporté plusieurs modifications au texte soumis à son examen.

A. AJUSTER LE RÉGIME DE L'ÉTAT D'URGENCE SANITAIRE POUR EN ASSURER LA LISIBILITÉ ET LA ROBUSTESSE JURIDIQUE

La commission a accepté , à l'article 1 er , le report de la date de caducité des dispositions du code de la santé publique fixant le régime de l'état d'urgence sanitaire au 31 décembre prochain , dans l'attente de l'examen par le Parlement du projet de loi instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires . Il convient de rappeler, à cet égard, que ce report d'entraîne pas, par lui-même, le maintien en vigueur de l'état d'urgence sanitaire jusqu'à la fin de l'année : il devrait au contraire être prolongé par la loi au-delà de la date fixée à l'article 2, ou déclaré à nouveau par décret après son expiration.

En revanche, conformément à la position qui était la sienne lors de l'examen du précédent texte, la commission a adopté plusieurs modifications du régime de l'état d'urgence sanitaire , tel que défini par le code de la santé publique, afin notamment d'en assurer la lisibilité et la robustesse juridique ( amendement COM-27 du rapporteur à l'article 1 er ).

En premier lieu, la commission a modifié la rédaction du 6° du I de l'article L. 3131-15 de ce code, qui, en l'état, autorise le Premier ministre à « limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ainsi que les réunions de toute nature », afin d' empêcher toute limitation des réunions dans les locaux d'habitation . Quoique la jurisprudence du Conseil constitutionnel ne soit pas tout à fait explicite sur ce point 21 ( * ) , il est vraisemblable qu'une telle limitation, même dans le but de limiter l'étendue d'une catastrophe sanitaire, porterait une atteinte disproportionnée aux droits et libertés constitutionnellement garantis, notamment le droit au respect de la vie privée et le droit de mener une vie familiale normale. Le Gouvernement s'est d'ailleurs rallié à la position du Sénat, puisque son projet de loi instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires écarte lui aussi expressément « toute réglementation des conditions de présence ou d'accès aux locaux à usage d'habitation ». La commission des lois a repris à l'identique cette rédaction suggérée par le Conseil d'État.

En deuxième lieu, la commission a supprimé le 8° du I du même article L. 3131-15 , qui permet au Premier ministre de « prendre des mesures temporaires de contrôle des prix de certains produits rendues nécessaires pour prévenir ou corriger les tensions constatées sur le marché de certains produits », à la seule condition d'en informer le Conseil national de la consommation (CNC). L'article L. 410-2 du code de commerce autorise déjà le Gouvernement à prendre des mesures de contrôle des prix , après avoir consulté ledit conseil, formalité qui ne paraît pas insurmontable dans le contexte actuel et qui garantit l'association des organisations professionnelles et des associations de consommateurs à la prise de décision. D'ailleurs, les dernières mesures de contrôle des prix des masques, gels et solutions hydro-alcooliques avaient été prises par un décret du 10 juillet 2020 22 ( * ) sur le fondement de ces dispositions de droit commun ; elles ne sont plus en vigueur depuis le 11 janvier dernier.

En troisième lieu, la commission a ajusté le régime des mesures de quarantaine et d'isolement , afin de tenir compte d'une réserve d'interprétation formulée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2020-800 DC du 11 mai 2020. Elle a ainsi précisé que de telles mesures ne peuvent être prolongées au-delà d'une durée de quatorze jours que sur autorisation du juge des libertés et de la détention , dès lors qu'elles imposent à la personne concernée de demeurer à son domicile ou dans son lieu d'hébergement pendant une plage horaire de plus de douze heures par jour , ce qui conduit à les qualifier de mesures privatives de liberté.

Ces différentes modifications du régime de l'état d'urgence sanitaire ont été rendues applicables à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie par l' amendement COM-31 du rapporteur à l'article 5.

B. ACCEPTER LA PROROGATION DE L'ÉTAT D'URGENCE, SOUS RÉSERVE D'UN RÉEXAMEN RÉGULIER PAR LE PARLEMENT

Tout en acceptant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire , en vigueur sur l'ensemble du territoire national depuis le 17 octobre dernier, la commission a ramené sa date d'échéance au lundi 3 mai 2021 au lieu du 1 er juin ( amendement COM-28 du rapporteur à l'article 2). Ce régime d'exception serait ainsi prolongé pour une durée de deux mois et demi , ce qui paraît raisonnable et correspond à la durée de prolongation maximale acceptée par le Sénat au cours de l'année écoulée. Au-delà de ce délai, il appartiendrait au Parlement de se prononcer à nouveau, en fonction des circonstances de temps et de lieu .

En outre, sur proposition de son rapporteur, la commission a inséré une disposition prévoyant qu'aucune mesure de confinement - plus exactement, aucune mesure ayant pour conséquence d'interdire aux personnes de sortir de leur domicile pendant plus de douze heures par jour, prise par voie réglementaire par le Premier ministre sur le fondement de l'état d'urgence sanitaire - ne puisse être prolongée au-delà d'un mois sans l'accord du Parlement ( amendement COM-29 rectifié au même article 2).

C. AUTORISER UNE PROLONGATION LIMITÉE DES SYSTÈMES D'INFORMATION MIS EN oeUVRE CONTRE L'ÉPIDÉMIE

Au vu de la situation sanitaire, la commission des lois a également accepté le principe d'une nouvelle prolongation de l'autorisation de recourir aux systèmes d'information qui ont été créés spécifiquement en appui aux opérations de dépistage de la maladie et de traçage des cas-contacts.

Néanmoins, par cohérence avec la fixation au 3 mai 2021 de la date d'échéance de l'état d'urgence sanitaire actuellement en vigueur (article 2), et avec la suppression du régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire (article 3), la commission des lois a également ramené au 1 er août 2021 (au lieu du 31 décembre), soit trois mois après la fin de l'état d'urgence, le terme de l'autorisation consentie par le législateur pour la mise en oeuvre de ces fichiers et outils numériques ( amendement COM-30 du rapporteur à l'article 4).

Cette prudence semble d'autant plus justifiée au rapporteur que le Parlement ne dispose toujours pas à cette date des éléments permettant une évaluation sérieuse de l'efficacité sanitaire réelle des outils numériques de lutte contre la covid. Alors que d'un commun accord, en novembre dernier, Assemblée nationale et Sénat avaient tenu à renforcer le contenu du rapport trimestriel demandé au Gouvernement sur la mise en oeuvre de ces systèmes d'information, pour préciser qu'il devrait désormais comprendre « des indicateurs d'activité, de performance et de résultats », force est de constater que ces données n'ont toujours pas été ni collectées ni présentées au Parlement.

D. AMÉLIORER LE FONCTIONNEMENT DU CONSEIL SCIENTIFIQUE

Mentionné à l'article L. 3131-19 du code de la santé publique, le conseil scientifique est obligatoirement réuni en cas de déclaration de l'état d'urgence sanitaire. Son rôle est de « rend[re] périodiquement des avis sur l'état de la catastrophe sanitaire, les connaissances scientifiques qui s'y rapportent et les mesures propres à y mettre un terme [...] ainsi que sur la durée de leur application ».

Face à des choix de politique sanitaire qui ont un impact considérable sur la vie de nos concitoyens (confinement, couvre-feu...), s'appuyer sur des données scientifiques est une exigence démocratique, et les avis du conseil scientifique sont un outil majeur de contrôle parlementaire pendant la période exceptionnelle d'état d'urgence sanitaire.

Dès lors, la commission des lois du Sénat, dans une démarche largement transpartisane 23 ( * ) et suivant l'avis favorable de son rapporteur, a souhaité améliorer le fonctionnement du conseil scientifique et prévoir :

- qu'il puisse également être saisi par une commission permanente du Parlement sur un sujet relevant de sa compétence, dès lors qu'il a pour mission d'éclairer les pouvoirs publics ( amendements COM-5 rect. de Valérie Boyer et COM-23 rect . de Marie-Pierre de La Gontrie à l'article 1 er ) ;

- et que ses membres soient soumis à des règles de déontologie, de prévention des conflits d'intérêt, d'indépendance et d'impartialité , dans des conditions fixées par décret ( amendement COM-6 de Valérie Boyer à l'article 1 er ).

E. ADAPTER À LA CRISE SANITAIRE CERTAINS DÉLAIS IMPARTIS AUX CONSEILS COMMUNAUTAIRES

Alors que la crise sanitaire a bouleversé la gestion des collectivités territoriales et de leurs groupements, la commission des lois a accordé des délais supplémentaires aux conseils communautaires pour leur permettre de prendre sereinement certaines décisions stratégiques .

Par l'adoption de l' amendement COM-8 rectifié bis de Françoise Gatel , la commission a porté de neuf mois à un an le délai dont disposent les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre pour adopter leur pacte de gouvernance . Pleinement consacrées à la gestion de la crise sanitaire, les intercommunalités n'ont en effet pas toutes eu le temps de réflexion nécessaire à l'adoption d'un tel document stratégique. Un délai supplémentaire est donc bienvenu.

Par l'adoption de l' amendement COM-9 rectifié de Françoise Gatel , la commission a reporté de six mois le transfert de la compétence en matière d'organisation de la mobilité aux communautés de communes . Outre un temps supplémentaire permettant d'apprécier les tenants et aboutissants de ce transfert de compétences, ce report permettra aux communes membres des communautés de communes concernés d'engager des discussions avec la prochaine majorité régionale avant de prendre leur décision 24 ( * ) .

*

* *

La commission des lois a adopté le projet de loi ainsi modifié .

EXAMEN EN COMMISSION

__________

MARDI 26 JANVIER 2021

M. François-Noël Buffet , président . - Nous examinons à présent le rapport de Philippe Bas sur le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire.

M. Philippe Bas , rapporteur . - C'est le sixième texte législatif que nous étudions depuis le début de la crise sanitaire sur le sujet. Parmi eux, un projet de loi de prolongation du régime de sortie de l'état d'urgence, déposé à l'automne dernier, a été balayé par l'aggravation de la crise. Quant au projet de loi instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires, adopté en conseil des ministres à la fin de l'année, il a immédiatement été retiré de l'ordre du jour. M. Olivier Véran, ministre rapporteur, a annoncé de lui-même que le texte n'était pas encore mûr... Voici un nouvel art de gouverner : on présente un texte en conseil des ministres, on le laisse de côté mûrir quelque temps, et quinze jours plus tard, le conseil des ministres adopte un autre texte - en l'espèce, le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire dont nous avons à débattre aujourd'hui...

Le Sénat et l'Assemblée nationale sont parvenus à s'entendre sur deux des projets de loi relatifs à la lutte contre la covid-19.

La loi du 23 mars 2020 a créé le régime de l'état d'urgence sanitaire pour un an. Le Gouvernement voulait un régime permanent, pour pouvoir l'activer en 2030 de la même manière qu'il peut activer le régime de l'état d'urgence issu de la loi de 1955 en cas d'attaque terroriste. Au Sénat, nous avons demandé que ce régime de l'état d'urgence sanitaire soit temporaire, et qu'il prenne fin au 1 er avril 2021. Cette durée d'un an a été choisie après mûre réflexion, car le Gouvernement nous avait alertés sur le risque d'une nouvelle flambée épidémique à l'automne, en raison du comportement des coronavirus - il avait raison. Conscients du risque, nous avions donc accepté cette possibilité d'activer ce régime pendant un an. Ce risque s'est réalisé.

En mai dernier, nous avons également adopté un texte prorogeant une première fois l'état d'urgence sanitaire, pour une courte durée.

En revanche, nous nous sommes opposés au Gouvernement et à la majorité de l'Assemblée nationale par deux fois. En juillet, le Gouvernement voulait créer un régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire, équivalent au régime de l'état d'urgence sanitaire à ceci près qu'il n'autorise pas de confinement ni de couvre-feu généralisé. S'il y avait besoin de restreindre les libertés malgré l'atténuation du risque sanitaire, nous avions plutôt préconisé de maintenir l'état d'urgence sanitaire sans faire usage de tous les pouvoirs qu'il prévoit. Nous n'avons donc pas pu nous entendre.

À l'automne dernier, nous étions également en désaccord, car le Gouvernement voulait continuer à user de pouvoirs spéciaux sans vote du Parlement pendant une durée trop longue : il souhaitait que l'état d'urgence sanitaire se poursuive jusqu'au 16 février et laisse place jusqu'à la fin avril au régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire. Or ce n'est pas parce qu'il n'autorise pas le confinement que le régime de sortie n'implique pas des restrictions aux libertés très importantes : le Gouvernement peut continuer à fermer les cafés, les restaurants et les commerces, limiter les déplacements, etc.

Nous avons toujours pris nos responsabilités et accepté de donner à l'exécutif les moyens d'agir contre la crise. Mais n'oublions pas que le régime de l'état d'urgence sanitaire est plus sévère que celui de l'état d'urgence classique, il permet de restreindre les libertés de toute la population française. On ne peut s'habituer à une telle situation. Le Parlement doit avoir son mot à dire régulièrement, aux côtés du juge qui vérifie la proportionnalité des mesures prises aux exigences de la politique sanitaire.

Le projet de loi dont nous débattons aujourd'hui est assez simple : il comporte seulement quelques articles, et a été amélioré par l'Assemblée nationale, dans le sens des attentes du Sénat. Le Gouvernement avait initialement proposé de prolonger non seulement l'état d'urgence sanitaire, mais aussi le régime de sortie de celui-ci, afin de pouvoir enchaîner d'un régime à l'autre sans repasser devant le Parlement. L'Assemblée nationale a heureusement supprimé cet article, ce qui évite la coexistence de deux régimes se recouvrant à quatre-vingt-dix pour cent. Le texte est donc expurgé d'une partie de son vice, et j'en suis satisfait.

Il nous est également proposé de reconduire jusqu'en décembre le régime général de l'état d'urgence sanitaire, défini par la loi du 23 mars 2020. Ce régime pourra ne pas être activé jusque-là, mais il sera disponible en cas de besoin.

Cela fait, le Gouvernement nous demande de prolonger l'état d'urgence sanitaire aujourd'hui en vigueur jusqu'au 1 er juin 2021.

Je n'ai pas besoin d'entrer dans les détails de l'évolution sanitaire, que vous connaissez. À la date du 23 janvier, on comptait quelque 24 000 contaminations par jour, soit un niveau cinq fois plus élevé que l'objectif qui avait justifié le reconfinement de l'automne dernier. L'indicateur de reproduction effectif du virus, de 1,1, est trop élevé. Il devrait être largement inférieur à 1 pour être rassurant. Plus de 57 % des lits de réanimation sont occupés. La situation épidémique est d'autant plus préoccupante que le nombre de personnes vaccinées dépasse à peine 1 million. Si en fin de semaine dernière, le rythme des vaccinations était soutenu, avec 130 000 vaccinations vendredi dernier, ce nombre est tombé à 66 000 hier. Les problèmes de disponibilité du vaccin, la complexité logistique, les goulets d'étranglement pour obtenir un rendez-vous vaccinal, et les difficultés de mise au point de vaccins en cours d'évaluation font que les objectifs du Gouvernement seront extrêmement difficiles à tenir.

Au rythme actuel, l'objectif de vacciner 20 millions de personnes
- soit le nombre de personnes âgées et à risque - au début de l'été est pratiquement hors d'atteinte, à moins d'une dynamique beaucoup plus favorable. Les promesses stupéfiantes faites par le ministre de la santé jeudi dernier, selon lesquelles tous les Français seraient vaccinés en août, n'ont a priori pas la moindre chance de se réaliser, surtout si le vaccin d'AstraZeneca n'est produit qu'à hauteur de 30 % des objectifs affichés initialement.

La vaccination permettra d'éloigner le spectre de l'épidémie, mais prendra du temps. Dans l'immédiat, quoi de mieux que de suivre la demande du Gouvernement de prolonger l'utilisation de pouvoirs qui sont, hélas, le seul moyen de franchir l'obstacle des prochains mois ?

Le Sénat doit être cohérent dans sa doctrine. Point important, l'Assemblée nationale s'est ralliée à notre position sur le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire qui a créé beaucoup de confusion et était parfaitement inutile juridiquement.

Mais s'agissant du calendrier, le Gouvernement demande encore les pleins pouvoirs pour lutter contre la crise sur une durée plus longue que ce qui a jamais été consenti. Par cohérence, je vous propose de ramener ce délai à deux mois et demi, même si nous resterons prêts à prolonger ces pouvoirs aussi longtemps que cela sera justifié et que les mesures prises seront efficaces. Adoptons la date du lundi 3 mai, pour laisser au Gouvernement la possibilité de gérer le week-end de vacances scolaires qui précède et les manifestations du 1 er mai.

Je vous propose également d'accepter la prolongation jusqu'au 31 décembre du régime général de l'état d'urgence sanitaire, pour être prudents. Si en septembre 2021, il s'avérait nécessaire de prendre des mesures exceptionnelles, il serait bon que ce régime existe encore et qu'un décret puisse l'activer, une autorisation législative étant nécessaire au-delà d'un mois.

Nous ferons ainsi prévaloir l'esprit de responsabilité pour lutter contre la crise sanitaire. Les aménagements que je vous propose ne sont pas extravagants, et je ne comprendrais pas que nous n'obtenions pas satisfaction. Les systèmes d'information liés à la lutte contre l'épidémie devront aussi pouvoir être maintenus trois mois après la fin de l'état d'urgence sanitaire.

Hier, la presse annonçait un reconfinement imminent. Ce matin, l'exécutif semble faire machine arrière. Le Président de la République, dit-on, est en colère contre le Premier ministre : les Français auraient été trop préparés à un reconfinement, alors qu'il n'est pas temps de le faire. L'hypothèse rode, se rapproche puis s'éloigne... Je vous proposerai un amendement pour que le Gouvernement ne puisse reconfiner sans un vote du Parlement dans un délai d'un mois. Sinon, ce serait la seule question que nous ne pourrions aborder, en pleine discussion parlementaire ? Reconfiner est la restriction maximale à nos libertés. Le régime de l'état d'urgence sanitaire permet de le mettre en oeuvre ; c'est normal et nous l'avons accepté en mars dernier. Pour autant, un verrou supplémentaire par un contrôle parlementaire dans les trente jours est dans l'ordre des choses. La représentation nationale doit veiller à ce que les libertés ne soient pas exagérément restreintes.

Mme Esther Benbassa . - Notre groupe est opposé à la prorogation de l'état d'urgence sanitaire pour différentes raisons. Ce qui est exceptionnel ne peut devenir pérenne. Or l'état d'urgence sanitaire risque de s'étaler jusqu'au 31 décembre. Ce régime renforce la centralisation de la gestion de la crise sanitaire, qui a provoqué de nombreux manquements : nous avons vu l'échec de la politique sur les masques et les tests durant la première vague.

Les acteurs locaux veulent être davantage impliqués dans la gestion de la crise et notamment la politique vaccinale. Sinon, cela entraînera une perte de confiance envers leurs institutions, et une défiance envers toute la classe politique. Le Gouvernement doit tenir compte des disparités d'évolution et de circulation du virus sur le territoire.

Pour la vaccination, les différences avec les autres pays sautent aux yeux. Ailleurs, les acteurs locaux ont été plus actifs et ont pu prendre davantage d'initiatives en proposant des modes d'organisation différents, tandis que notre gouvernement se contente de communiquer. Enfin, le ministre de la santé, lors de son audition par notre commission, avait évoqué le chiffre de 15 millions de personnes vaccinées en juin, alors que quelques heures après, à la télévision, il annonçait 70 millions de vaccinés en août... La différence est notable !

Mme Cécile Cukierman . - Voici encore un exercice imposé régulièrement... Or l'état d'urgence sanitaire doit répondre à une situation exceptionnelle. Qu'en est-il de cette notion d'urgence, un an après ? Je ne veux pas atténuer l'estimation de la situation épidémique, mais nous nous interrogeons sur la finalité des mesures prises depuis mars 2020. Celles-ci ne répondent pas suffisamment à l'impérieuse nécessité de sortir de la crise sanitaire, afin de reprendre une vie normale et équilibrée, relancer la machine économique et éviter les conséquences sociales si rien n'est fait.

Nous nous interrogeons sur les prises de parole publiques des ministres qui, semaine après semaine, demeurent si évasifs.

Le temps de flottement en mars était normal : personne ne pouvait objectivement prévoir la situation, à moins d'être complotiste. Il en va différemment aujourd'hui. J'entends la proposition du rapporteur que le Gouvernement revienne devant le Parlement pour valider un confinement. Une décision à quelques-uns au cours d'un conseil de défense est inadaptée et ne répond pas à l'enjeu de combattre l'épidémie et au besoin que les mesures prises soient acceptables socialement.

Nous nous inquiétons que des mesures d'exception tendent à s'ancrer dans le temps, au-delà de la situation d'urgence sanitaire. Nous avons parfois vu, lorsque la France a traversé d'autres périodes, la pérennisation de telles mesures d'exception...

Nous abordons ce débat avec toute l'incertitude qui demeure, mais tenons à rappeler que la démocratie n'est jamais un handicap pour sortir de la crise.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Nous convergeons sur la plupart des sujets. Madame Benbassa, nous voulons éviter, par glissements successifs, une pérennisation du régime à laquelle nous sommes opposés. Le Gouvernement demande de prolonger le régime de l'état d'urgence, temporaire - car nous l'avons décidé ainsi. Sur ce point, le Gouvernement a cédé à notre exigence.

Oui, il faut solliciter davantage tous les acteurs locaux. Vous avez relevé les manques d'efficacité pour les masques, les tests et les vaccins. Si l'État avait recherché une meilleure articulation avec les collectivités territoriales, certaines difficultés nous auraient probablement été épargnées.

Madame Cukierman, je ne m'interroge pas pour ma part sur la finalité des mesures prises, qui consiste à rétablir une situation sanitaire normale dans notre pays, mais sur les moyens employés. Comment sortir le plus vite possible de cette crise sanitaire ? Si nous avions la recette, elle aurait déjà été mise en oeuvre. Je prends acte de votre accord pour voter sur un éventuel reconfinement au-delà d'une certaine durée, et vous en remercie.

EXAMEN DES ARTICLES

M. Philippe Bas , rapporteur . - Je vous propose de considérer que, pour l'application de l'article 45 de la Constitution, le périmètre du projet de loi inclut les prérogatives conférées aux autorités publiques sous le régime de l'état d'urgence sanitaire et sous le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire, ainsi que la durée d'application desdits régimes ; les systèmes d'information mis en oeuvre dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19 ; et les dispositions tendant à tirer les conséquences de la crise sanitaire.

Article additionnel avant l'article 1 er

M. Philippe Bas , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-32 .

L'amendement COM-32 n'est pas adopté.

Article 1 er

M. Philippe Bas , rapporteur . - Les amendements COM-1 et COM-12 visent à ramener au 30 septembre 2021, au lieu du 31 décembre, la date de caducité du régime de l'état d'urgence sanitaire. Restons-en au 31 décembre. Nous ne pouvons pas nous passer d'ici à la fin de l'année d'un régime qui nous permet d'agir ; soyons plus prudents. Avis défavorable.

L'amendement COM-1 n'est pas adopté, non plus que l'amendement COM-12.

M. Philippe Bas , rapporteur . - L'amendement COM-24 prévoit la remise d'un rapport mensuel du Gouvernement au Parlement sur le contentieux administratif des mesures prises au titre de l'état d'urgence sanitaire. Mais le Gouvernement adresse chaque semaine aux présidents des deux assemblées un rapport avec ces éléments, qui est ensuite transmis à tous les présidents de groupe politique. Avis défavorable.

L'amendement COM-24 n'est pas adopté.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Mon amendement COM-27 apporte des mesures de correction à la marge au régime de l'état d'urgence sanitaire, dont certaines découlent de décisions du Conseil constitutionnel. Je le préfère aux amendements COM-18 rectifié et COM-19 rectifié.

L'amendement COM-27 est adopté ; les amendements COM-18 rectifié et COM-19 rectifié deviennent sans objet.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-21 .

L'amendement COM-21 n'est pas adopté

M. Philippe Bas , rapporteur . - Avis défavorable aux amendements COM-22 rectifié et COM-2 , qui n'apporteraient pas de précisions réellement utiles juridiquement.

L'amendement COM-22 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement COM-2.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Mme Valérie Boyer voudrait ajouter des parlementaires à la composition du conseil scientifique. Il faudrait alors le renommer en comité scientifique et politique... Cela créerait une ambiguïté sur le rôle de cette instance. Avis défavorable à l'amendement COM-3 .

L'amendement COM-3 n'est pas adopté.

M. Philippe Bas , rapporteur . - L'amendement COM-4 vise à inscrire dans la loi que les comptes rendus des débats du conseil scientifique sont rendus publics. Nous aurions ainsi connaissance des opinions contraires. Mais, à ma connaissance, cette instance n'établit pas de comptes rendus et ce formalisme me semble lourd. Retrait ?

Mme Valérie Boyer . - Je comprends votre position, mais ces commissions ont été créées à la suite d'un discours du Président de la République. On ne sait pas ce qu'il s'y passe, alors que c'est sur cette base que nos libertés sont restreintes. Il faut plus de transparence.

Le ministre a déclaré à l'Assemblée nationale que nous, parlementaires, ne sommes pas assez intelligents pour pouvoir comprendre ce qui se passe dans les comités scientifiques. L'action du Gouvernement est entourée d'un nuage d'opacité... Comment les décisions sont-elles prises, alors que le Gouvernement nous demande de proposer l'état d'urgence ad vitam aeternam ? Contraignons le Gouvernement à plus de transparence : cela se passe dans tous les autres Parlements. Pourquoi le Parlement français en serait-il exclu ? Il y a assez de médecins parlementaires qui seraient capables de comprendre, d'autant que les membres de ces comités se répandent sur les plateaux de télévision pour nous dire tout et son contraire. Sifflons un peu la fin de la partie et redonnons au Parlement sa place.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Je comprends et partage votre préoccupation, et je donnerai un avis favorable à l'amendement suivant.

Mme Valérie Boyer . - Je retire donc l'amendement COM-4, qui est satisfait dans son esprit par le suivant.

L'amendement COM-4 est retiré.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Il est souhaitable que le président de la commission des lois et la présidente de la commission des affaires sociales, Mme Deroche, puissent saisir le conseil scientifique. Avis favorable aux amendements identiques COM-5 rectifié et COM-23 rectifié.

Les amendements COM-5 rectifié et COM-23 rectifié sont adoptés.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Comment l'indépendance du conseil scientifique peut-elle être garantie alors que la loi n'impose aucune obligation déontologique à ses membres ? Mme Valérie Boyer propose qu'un décret fixe ces obligations. Avis favorable.

M. Alain Richard . - Ce qui serait vraiment utile et transparent, c'est que le compte rendu du conseil scientifique indique s'il se prononce à l'unanimité ou à la majorité sur les différents points, sans en faire une disposition légale. Ce serait plutôt une recommandation.

M. Philippe Bas , rapporteur . - À une reprise, l'un des membres du conseil scientifique s'est exprimé différemment sur une recommandation. Cette opinion a été jointe à l'avis.

Mme Valérie Boyer . - Dans certaines grandes démocraties, comme aux États-Unis, on sait à combien de voix les décisions sont prises, notamment à la Cour suprême. Pourquoi, dans notre état de privation de libertés et alors que la gestion de cette crise fait l'objet d'informations confuses, ne disposerions-nous pas de ce type d'informations ?

M. Alain Richard . - Je ne souhaite à aucun pays de se voir appliquer les règles de la Cour suprême américaine...

Mme Valérie Boyer . - Moi non plus, mais tout de même...

M. Philippe Bas , rapporteur . - Peut-être voudriez-vous introduire par analogie la notion d'opinions dissidentes au conseil scientifique, mais celui-ci essaie de faire émerger un consensus scientifique sur des questions controversées. Au demeurant, les membres du conseil scientifique sont parfaitement libres d'exprimer des différences d'appréciation, le cas échéant.

L'amendement COM-6 est adopté.

Articles additionnels après l'article 1 er

M. Philippe Bas , rapporteur . - Je suis défavorable à l'amendement COM-25 .

L'amendement COM-25 n'est pas adopté.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Il en est de même pour l'amendement COM-26 .

L'amendement COM-26 n'est pas adopté.

Article 2

M. Philippe Bas , rapporteur . - Mon amendement COM-28 tend à ramener du 1 er juin au 3 mai 2021 la date d'échéance de l'état d'urgence sanitaire. Le Parlement devra être saisi pour qu'il soit prolongé au-delà de cette date. En conséquence, avis défavorable aux amendements COM-13 et COM-14 .

L'amendement COM-13 n'est pas adopté, non plus que l'amendement COM-14.

L'amendement COM-28 est adopté.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Mon amendement COM-29 rectifié prévoit qu'aucune mesure de confinement ne puisse être prolongée au-delà d'un mois pendant l'état d'urgence sanitaire, sans l'autorisation préalable du Parlement. En conséquence, avis défavorable à l'amendement COM-20 .

L'amendement COM-20 n'est pas adopté.

L'amendement COM-29 rectifié est adopté.

Article 4

M. Philippe Bas , rapporteur . - Nous avons toujours voté le maintien des systèmes d'information de lutte contre l'épidémie trois mois après la fin de l'état d'urgence sanitaire. Aussi, par cohérence avec la modification de la date d'expiration de l'état d'urgence sanitaire, je propose l'amendement COM-30 pour ramener au 1 er août le terme de l'autorisation consentie pour la mise en oeuvre des systèmes d'information. Je suis défavorable aux amendements COM-15 et COM-7 rectifié.

L'amendement COM-15 n'est pas adopté, non plus que l'amendement COM-7 rectifié.

L'amendement COM-30 est adopté.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-16 .

L'amendement COM-16 n'est pas adopté.

Articles additionnels avant l'article 5

M. Philippe Bas , rapporteur . - Je suis favorable à l'amendement COM-8 rectifié bis qui porte le délai dont disposent les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) pour adopter un pacte de gouvernance de neuf mois à un an.

L'amendement COM-8 rectifié bis est adopté.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Je suis également favorable à l'amendement COM-9 rectifié.

L'amendement COM-9 rectifié est adopté.

M. Alain Richard . - Je n'avais pas retenu que les amendements visant à allonger les délais applicables à la gestion des collectivités locales étaient ici considérés comme recevables au titre de l'article 45 de la Constitution. J'indique que se pose un problème portant sur le droit d'opposition des communes au transfert à l'intercommunalité de la compétence en matière de plan local d'urbanisme. Le vote de ces délibérations est enserré dans un délai de trois mois. Or le Parlement a, cette année, reporté la date butoir au 1 er juillet 2021. Il en résulte que les délibérations prises au cours des trois derniers mois de l'année 2020 sont privées d'effet. Je suggère un amendement pour régler ce problème.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Nous allons examiner ce point d'ici à la séance.

Article 5

L'amendement de coordination COM-31 est adopté.

L'amendement COM-17 n'est pas adopté.

Articles additionnels après l'article 5

M. Philippe Bas , rapporteur . - L'amendement COM-10 rectifié bis prévoit un vote par correspondance « papier » en cas d'élection en 2021. Tel n'est pas le sens des conclusions du rapport d'information que vous avez présenté, monsieur le président. Avis défavorable.

L'amendement COM-10 rectifié bis n'est pas adopté.

M. Philippe Bas , rapporteur. - Je suis également défavorable à l'amendement COM-11 rectifié.

L'amendement COM-11 rectifié n'est pas adopté.

Mme Catherine Di Folco . - Permettez-moi de revenir sur l'amendement COM-29 rectifié adopté à l'article 2, aux termes duquel le confinement ne peut pas être prolongé au-delà d'un mois sans l'accord du Parlement. Cela laisse-t-il la possibilité au Gouvernement d'ordonner un confinement dans les jours qui viennent, mais pour un mois seulement ?

M. Philippe Bas , rapporteur . - C'est exactement cela. Dans la mesure où nous sommes toujours sous le régime d'état d'urgence sanitaire, le Gouvernement peut ordonner un confinement par décret, mais il ne pourrait pas se prolonger au-delà d'un mois sans un vote du Parlement.

M. Alain Richard . - Cela vaudra lorsque cette loi-ci sera promulguée.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Nous avons veillé à ce que la règle s'applique rétroactivement à un confinement ordonné avant la publication de la loi.

M. Alain Richard . - C'est fragile...

M. Philippe Bas , rapporteur . - Je ne crois pas.

Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements adoptés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article additionnel avant l'article 1 er

M. CARDON

32

Rapport sur l'urgence sociale chez les jeunes

Rejeté

Article 1 er

Mme Valérie BOYER

1

Fixation au 30 septembre 2021 de la date de caducité du régime de l'état d'urgence sanitaire

Rejeté

Mme de LA GONTRIE

12

Fixation au 30 septembre 2021 de la date de caducité du régime de l'état d'urgence sanitaire

Rejeté

M. LECONTE

24

Rapport mensuel du Gouvernement au Parlement sur le contentieux administratif des mesures prises au titre de l'état d'urgence sanitaire

Rejeté

M. BAS, rapporteur

27

Modifications du régime de l'état d'urgence sanitaire (réunions dans les lieux d'habitation, contrôle des prix, contrôle juridictionnel des mesures d'isolement et de quarantaine)

Adopté

Mme de LA GONTRIE

18 rect.

Exclusion des limitations aux réunions dans les lieux d'habitation

Satisfait ou sans objet

Mme de LA GONTRIE

19 rect.

Précision sur les conditions de prolongation au-delà de quatorze jours des mesures d'isolement et de quarantaine

Satisfait ou sans objet

Mme de LA GONTRIE

21

Régime général de l'état d'urgence sanitaire - Conditions du confinement

Rejeté

Mme de LA GONTRIE

22 rect.

Adaptation aux spécificités locales des mesures prises au titre de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique

Rejeté

Mme Valérie BOYER

2

Adaptation aux spécificités locales des mesures prises au titre de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique

Rejeté

Mme Valérie BOYER

3

Ajout de parlementaires à la composition du comité scientifique

Rejeté

Mme Valérie BOYER

4

Publicité des compte rendus des débats du conseil scientifique

Retiré

Mme Valérie BOYER

5 rect.

Possibilité de saisine du conseil scientifique par les commissions parlementaires

Adopté

Mme de LA GONTRIE

23 rect.

Possibilité de saisine du conseil scientifique par les commissions parlementaires

Adopté

Mme Valérie BOYER

6

Règles déontologiques applicables aux membres du conseil scientifique

Adopté

Article additionnel après l'article 1 er

M. SUEUR

25

Rapport sur les conditions sanitaires des personnes détenues ou retenues

Rejeté

Mme LUBIN

26

Instauration d'un comité de suivi social et économique pendant l'état d'urgence sanitaire

Rejeté

Article 2

M. BAS, rapporteur

28

Fixation au 3 mai 2021 de la date d'expiration de l'état d'urgence sanitaire

Adopté

Mme de LA GONTRIE

13

Fixation au 16 avril 2021 de la date d'expiration de l'état d'urgence sanitaire

Rejeté

Mme de LA GONTRIE

14

Fixation au 30 avril 2021 de la date d'expiration de l'état d'urgence sanitaire

Rejeté

M. BAS, rapporteur

29 rect.

Autorisation par la loi de la prolongation de mesures de confinement au-delà d'un mois

Adopté

Mme de LA GONTRIE

20

Autorisation par la loi de la prolongation de mesures de confinement au-delà de quinze jours

Rejeté

Article 4

M. BAS, rapporteur

30

Modification de la date de fin d'autorisation de la mise en oeuvre de traitements informatiques (1 er août au lieu de 31 décembre 2021)

Adopté

Mme de LA GONTRIE

15

Modification de la date de fin d'autorisation de la mise en oeuvre de traitements informatiques (30 septembre au lieu de 31 décembre 2021)

Rejeté

Mme Valérie BOYER

7 rect.

Modification de la date de fin d'autorisation de la mise en oeuvre de traitements informatiques (30 septembre au lieu de 31 décembre 2021)

Rejeté

M. LECONTE

16

Interdiction des transferts hors UE des données personnelles issues des systèmes d'information de lutte contre la Covid

Rejeté

Article additionnel avant l'article 5

Mme GATEL

8 rect. bis

Passage du délai pour adopter un pacte de gouvernance dans les EPCI de neuf mois à un an

Adopté

Mme GATEL

9 rect.

Report de six mois du transfert de la compétence "organisation de la mobilité" aux communautés de communes

Adopté

Article 5

M. BAS, rapporteur

31

Coordination pour l'application outre-mer

Adopté

Mme de LA GONTRIE

17

Coordination pour l'application outre-mer

Rejeté

Article additionnel après l'article 5

M. KERROUCHE

10 rect. bis

Expérimentation du vote par correspondance "papier"

Rejeté

M. KERROUCHE

11 rect.

Vote anticipé en cas d'élection ou de référendum en 2021

Rejeté

COMPTE RENDU DE L'AUDITION DE M. OLIVIER VÉRAN, MINISTRE DES SOLIDARITÉS ET DE LA SANTÉ

__________

JEUDI 21 JANVIER 2021

M. François-Noël Buffet , président . - Monsieur le ministre, nous avons souhaité vous entendre sur le projet de loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et reportant la date de caducité des régimes institués pour faire face à la crise sanitaire, qui sera examiné mardi prochain en commission, et le lendemain en séance publique. Je vous propose de vous laisser commencer par un exposé liminaire, avant de donner à la parole au rapporteur, Philippe Bas.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé . - Les mesures de police sanitaire prises depuis plusieurs mois ont permis de limiter la propagation du virus et d'éviter la saturation de nos services de réanimation. Toutefois, l'épidémie circule toujours activement en France, comme d'ailleurs en Europe et dans une large partie du monde.

Avec plus de 18 000 cas par jour en moyenne, on peut parler de plateau légèrement ascendant, mais l'épidémie tend potentiellement à s'accélérer de nouveau avec l'apparition des fameux variants, contre lesquels une véritable course contre la montre est engagée. Le risque d'une reprise épidémique est réel, en dépit des mesures prises pour limiter l'importation de ces variants sur notre sol.

Depuis le début de l'année 2020, l'épidémie a déjà causé plus de 71 000 décès dans notre pays. Ces derniers jours, on comptait encore plus de 25 000 patients hospitalisés et près de 2 800 en réanimation.

L'état d'urgence sanitaire est déclaré depuis le 17 octobre 2020 sur l'ensemble du territoire national. À la demande du Gouvernement, il avait été prorogé par le Parlement jusqu'au 16 février 2021.

Le Gouvernement a ainsi pu prendre, sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, les mesures nécessaires et proportionnées à la catastrophe sanitaire, en limitant notamment les déplacements des personnes hors de leur domicile, les rassemblements sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public ainsi que l'accès à certains établissements.

Aujourd'hui, les indicateurs épidémiologiques nous amènent à demander au législateur une prorogation de l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 1 er juin 2021. Tel est le sens de l'article 2 du projet de loi.

L'article 1 er vise pour sa part à reporter au 31 décembre 2021 la caducité du régime juridique de l'état d'urgence sanitaire, initialement fixée au 1 er avril 2021 par l'article 7 de la loi du 23 mars 2020.

Le projet de loi adopté en conseil des ministres le 21 décembre dernier visait à pérenniser dans le code de la santé publique les outils pouvant être actionnés en cas de crise sanitaire. Ce texte a finalement été retiré de l'ordre du jour ; il sera examiné par le Parlement une fois la crise derrière nous. Il n'est cependant pas possible aujourd'hui de nous priver à partir du 1 er avril d'un cadre juridique dédié à la gestion des phases les plus critiques de la crise sanitaire. J'ai entendu à l'Assemblée nationale les critiques sur la longueur des délais prévus par ce projet de loi, et je comprends le souhait du Parlement d'avoir des clauses de revoyure plus fréquentes.

L'article 3 du texte, qui prévoyait initialement une prorogation jusqu'au 30 septembre du régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire, a été supprimé en commission à l'Assemblée nationale, ce que nous avons accepté.

Disons toutefois les choses franchement : si la crise sanitaire devait durer, ce qui est une possibilité non négligeable, je jugerais légitime de me représenter devant les deux chambres avant l'été pour faire un point de situation et vérifier que les outils et pouvoirs dont nous disposons sont proportionnés à la situation sanitaire.

L'article 4 du texte prolonge jusqu'au 31 décembre 2021 la possibilité de recourir aux outils numériques Contact Covid et SI-DEP - système d'information de dépistage populationnel -, absolument indispensables pour déployer notre stratégie « tester, alerter, protéger ».

Enfin, l'article 5 étend aux outre-mer les dispositions qui le nécessitent.

M. Philippe Bas , rapporteur . - Monsieur le ministre, vos propos vont dans le sens de l'apaisement de nos relations.

Nous avons toujours été extrêmement attentifs à ce que les restrictions nécessaires à l'exercice d'un certain nombre de libertés fondamentales pour lutter contre cette crise sanitaire soient assorties d'un contrôle régulier et approfondi du Parlement. Nous pensons que l'enchaînement de mesures prises au titre du régime de l'état d'urgence sanitaire et du régime de sortie de celui-ci ne devrait pas se faire sans un vote du Parlement. Par conséquent, nous apprécions que vous ayez accepté la suppression de l'article 3 à l'Assemblée nationale, qui permettait de continuer à prendre après le mois de juin des mesures qui, certes, ne sont ni le confinement ni le couvre-feu généralisé, mais qui sont tout de même des mesures fortement restrictives des libertés. Nous considérons que de telles mesures, quand elles sont dûment justifiées et proportionnées aux exigences du traitement de la crise sanitaire, ne doivent pouvoir être prises qu'après un vote du Parlement.

Le Sénat a accepté en mars, en mai, en juillet et en novembre derniers d'accorder au Gouvernement des pouvoirs exceptionnels face à la crise. Notre accord pour mettre en oeuvre des restrictions aux libertés suppose toutefois que celles-ci soient temporaires, que le Parlement soit appelé à voter régulièrement et, bien sûr, que les juges constitutionnel et administratif s'assurent de la proportionnalité de telles mesures.

Une course contre la montre est engagée. Pour apprécier la durée pendant laquelle nous sommes prêts à autoriser le Gouvernement à user de ces pouvoirs exceptionnels, nous avons donc besoin d'en savoir un peu plus sur le développement de la campagne de vaccination. Dans mon esprit, plus vite on aura vacciné les Français, moins longtemps on aura besoin de restreindre leur liberté.

Nous sommes donc très sensibles aux difficultés qui sont apparues dès le lancement de la campagne de vaccination. Depuis, le Gouvernement a tenu compte des premiers retours d'expérience, mais des difficultés persistent. L'accès au vaccin, y compris pour les populations cibles, ne se fait pas dans des conditions optimales. Pour atteindre vos objectifs, ne vous faudrait-il pas davantage tenir compte des offres de service qui vous sont faites par beaucoup de collectivités, de médecins et d'infirmiers ?

Nous craignons que le rationnement du vaccin, les difficultés d'accès et autres rendez-vous décommandés n'entravent le développement de la vaccination et vous forcent, dans quelques semaines ou quelques mois, à nous demander d'autoriser de nouvelles restrictions aux libertés.

Ce point me semble essentiel, et je tiendrai compte de vos réponses dans les propositions de délais que je ferai à mes collègues.

M. Olivier Véran, ministre . - La première cible de la stratégie vaccinale représente environ 8 millions de personnes - résidents dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), personnes très vulnérables, personnes âgées de plus de 75 ans et professionnels de santé. Lorsque vous devez ainsi vacciner plusieurs millions de personnes, vous n'avez que deux façons de faire, me semble-t-il.

La première méthode consiste à attendre d'avoir tous les vaccins à disposition - en l'occurrence 16 millions de doses en comptant le rappel - et à organiser ensuite une campagne éclair de vaccination, ce que l'on sait faire - pour la grippe, on est capable de vacciner 1 million de personnes par jour.

La seconder méthode consiste à vacciner à flux tendu, en utilisant les vaccins au fur et à mesure de leur livraison. C'est le choix que nous avons fait, et aussi celui de tous les pays européens. Mais cela impose bien évidemment de coordonner le rythme de livraison des vaccins avec le rythme de vaccination.

Nous avons donc 8 millions de personnes à vacciner, nous disposons pour l'instant de 2 millions de doses, nous en recevons 500 000 supplémentaires par semaine, et bientôt 1 million.

Comme la Belgique ou les Pays-Bas, mais à la différence de l'Allemagne, nous avons choisi de diviser en deux ce public prioritaire, en commençant par le million de résidents en Ehpad, jugés ultra-prioritaires.

On nous reproche de ne pas avoir commencé à recueillir le consentement des résidents avant l'arrivée des premiers vaccins. Nous y avons pensé, bien entendu, mais il était impossible de le faire pour un vaccin qui n'était pas encore validé par l'Agence européenne des médicaments (EMA), et sur lequel toutes les données scientifiques n'étaient pas encore disponibles.

La période des congés de fin d'année a pu retarder le recueil des consentements, et il faut aussi intégrer la contrainte forte du transport des vaccins, qui ne doit pas excéder douze heures pour ne pas sacrifier un brin d'ARN messager.

La campagne de vaccination en Ehpad est désormais bien lancée : 160 000 personnes seront vaccinées cette semaine, 150 000 la semaine prochaine. Nous avons par ailleurs décidé d'accélérer le début de la vaccination des soignants de plus de 50 ans et des personnes de plus de 75 ans. L'organisation en flux tendu se traduit inévitablement par des phénomènes de stop-and-go .

J'avais parlé de 300 centres de vaccination à l'échelle du pays fin janvier, et de 600 centres à terme. Or ce sont presque 1 000 centres qui ont été accrédités. On ne peut que saluer l'allant des élus locaux. J'avais exigé 6 centres de vaccination en moyenne par département ; certains en comptent 33 ! Mais ce n'est pas parce qu'on ouvrira plus de centres qu'il y aura plus de vaccins. Le redispatching dans une multitude de centres des vaccins qui avaient été provisionnés pour six centres par département peut entraîner un mécanisme de hoquet. Au total, trente départements ont procédé à du surbooking et se sont retrouvés avec un peu plus de créneaux qu'ils n'avaient de doses. Le problème a été résolu pour une quinzaine d'entre eux. Nous allons demander aux quinze autres de maintenir leurs créneaux ouverts. Dans les cas critiques, je pense à la région des Hauts-de-France, nous demandons aux centres de différer d'une à deux semaines les vaccinations, mais de n'annuler aucun rendez-vous, et d'utiliser en flux tendu, par anticipation, les doses qui auraient dû servir à la primo-vaccination en février.

Pour résumer, les centres qui ont fait preuve d'un grand enthousiasme et qui vaccinent beaucoup plus que prévu en janvier ne feront que des rappels de vaccination en février. Nous ne ferons donc quasiment plus de primo-vaccinations en février puisque l'augmentation des livraisons n'est pas linéaire ; elle se fait par paliers.

Dois-je demander aux préfets de fermer des centres dans les départements qui comptent plus de six centres ou dix centres au maximum ? Ou doit-on maintenir des centres qui ont l'avantage d'offrir de la proximité aux populations ? Dès le début, j'ai fait le choix de la proximité, car je ne voulais pas que, comme en Allemagne, nous n'ayons que cinquante centres et que l'on soit obligé de faire une heure et demie de voiture et trois heures de queue devant un grand gymnase pour être vacciné, en plein hiver, à l'âge de 85 ans. Nous pouvons tous nous entendre sur ce point.

Aujourd'hui encore, de nombreux élus nous disent qu'ils veulent ouvrir un centre, mais qu'on les en empêche. Or le problème, ce n'est pas le centre, c'est l'approvisionnement en vaccins. J'ai vu qu'un centre réalise 32 vaccinations par jour. C'est très bien, mais faut-il mobiliser des soignants, du personnel de mairie, des bâtiments pour seulement 32 vaccinations par jour ? Peut-être est-il préférable de regrouper certains centres pour gagner en efficacité ?

Hier et avant-hier, nous avons réalisé plus de 100 000 vaccinations par jour - 108 000 hier, pour être précis - soit, au quotidien, le double de l'Allemagne par exemple. J'avais annoncé au début du mois de janvier qu'il ne fallait pas s'affoler, que le rythme de vaccination en France allait s'accélérer et que nous rattraperions notre retard, si tant est qu'on puisse parler de retard, car quatre jours de décalage dans une campagne de vaccination sont sans conséquence en santé publique. J'avais annoncé que notre objectif était d'atteindre 1 million de vaccinations à la fin du mois de janvier, nous serons très au-delà, mais en flux tendu.

Les seules doses que les centres conservent sont celles qui sont indispensables pour assurer le rappel vaccinal des personnes qui ont été primo-vaccinées. Je ne garde dans le stock national que 8 000 doses sur les 2 millions. Tout le reste est déployé dans les centres sur l'ensemble du territoire. Chaque département, ainsi que les territoires ultramarins, compte au moins un centre de stockage.

Nous avons fait le choix d'une politique déconcentrée et un peu décentralisée. Nous aurions pu faire le choix d'une politique hyper-concentrée : j'aurais pu décider du nombre de vaccins envoyés dans chaque centre et organiser les plannings pour trente ou quarante centres dans le pays. Nous aurions pu choisir une politique totalement décentralisée et donner les vaccins à une collectivité, qui aurait ensuite été libre de s'organiser, mais nous avons fait le choix d'une politique déconcentrée, reposant sur l'intervention des préfets, des agences régionales de santé (ARS) et des élus, réunis au sein de cellules de coordination territoriale, chargées de la répartition entre les centres. Nous nous appuyons également énormément sur les hôpitaux, que je remercie pour leur mobilisation.

Il sera intéressant d'avoir un retour d'expérience sur cette politique déconcentrée, même si j'ai déjà une petite idée sur la question. La responsabilité incombe toujours à l'État central, même quand les choses ont été organisées au sein des territoires ! C'est ainsi...

Je suis très confiant sur notre capacité à maintenir un bon rythme de vaccination. Je demande, et je suis intransigeant sur ce point, à tous les centres d'organiser la seconde vaccination, c'est-à-dire le rappel pour les primo-vaccinés. J'anticipe le fait que nous connaîtrons, comme l'Allemagne aujourd'hui, une diminution des primo-vaccinations à mesure que les rappels de vaccination augmenteront, car ils consommeront des doses.

Enfin, nous ciblons la vaccination de 15 millions de personnes d'ici à l'été, ce qui inclut une grosse partie de la population à risque de forme grave, mais pas tous les malades chroniques, les personnes âgées de 60 ans et plus, auquel cas il faudrait avoir vacciné entre 25 et 30 millions de personnes. Avec la meilleure organisation du monde, et même si tous les approvisionnements nous parvenaient en temps et en heure, nous ne pourrons pas vacciner tous les publics fragiles d'ici à l'été. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous demandons la poursuite des mesures de protection sanitaire jusqu'à l'automne. C'est mathématiquement défendable, me semble-t-il.

J'espère avoir répondu à toutes vos questions, mais je suis à votre disposition si vous souhaitez m'en poser d'autres. Une réunion de commission se prête mieux à cet exercice que l'hémicycle.

M. François-Noël Buffet , président . - Dans quelle mesure est-il possible d'augmenter la production et la fourniture de vaccins ?

M. Olivier Véran, ministre . - J'aimerais que nous disposions d'autant de vaccins que prévu, mais cela dépendra de plusieurs paramètres : la capacité des laboratoires à honorer leurs commandes - on assiste déjà à un ralentissement des approvisionnements par rapport à ce qui était prévu de la part d'un grand laboratoire, qui affecte la France, l'Europe, le Québec - et la validation d'autres vaccins par l'Agence européenne des médicaments (EMA) ainsi que les indications pour lesquelles ils seront prescrits.

La marge d'incertitude est importante. Imaginons que, dans deux ou trois semaines, l'EMA nous dise que le vaccin d'AstraZeneca est utilisable chez les personnes âgées : ce serait le bonheur total ! Des millions de doses nous arriveraient chaque mois. Ce vaccin se conserve de manière classique, il est donc injectable en pharmacie ou chez le médecin. En revanche, si elle considère que, parce que l'étude n'inclut pas un nombre suffisant de personnes âgées, on ne peut pas utiliser ce vaccin pour cette catégorie de la population, je devrais ouvrir un nouveau circuit parallèle au circuit actuel, ciblant un autre public. J'anticipe déjà les polémiques ! Tous ces paramètres auront forcément un impact très important sur notre capacité à protéger les publics vulnérables et dans les délais.

Les commandes ont été passées par la Commission européenne
- cette campagne vaccinale est une aventure européenne - des mois avant que les vaccins ne soient validés. L'Europe a fait le pari fou, que l'on aurait pu nous reprocher si les vaccins n'avaient pas abouti, de commander des centaines de millions de vaccins auprès de laboratoires qui nous disaient que leurs recherches étaient avancées, mais sur lesquels nous ne disposions pas des données nécessaires. Évidemment, un travail très sérieux a été fait avec les scientifiques, à la fois de la Commission européenne et des laboratoires, afin de déterminer quels vaccins avaient une chance d'aboutir. Pour l'instant, c'est carton plein ! Tant mieux, mais quel pari d'avoir anticipé il y a six mois l'achat de vaccins qui n'étaient ni produits ni validés ! L'Europe peut donc se targuer d'avoir bien fonctionné, ce qui n'a pas toujours été le cas en temps de crise sanitaire. Cela nous permet de couvrir largement tous les besoins de la population européenne à l'horizon de quelques mois.

Nous déployons les capacités industrielles françaises et européennes pour renforcer la production de vaccins. Trois entreprises pharmaceutiques en France vont produire des vaccins : Fareva va assurer le fill and finish du vaccin de CureVac, Recipharm produira du Moderna et Delpharm du BioNTech/Pfizer. Nous travaillons également avec une grande industrie dont le siège social est en France, Sanofi, afin qu'elle puisse nous aider à produire davantage de vaccins pour l'Europe, tout en poursuivant ses recherches sur son propre vaccin, mais cela prendra du temps. Il faut au moins deux ou trois mois avant qu'une usine de fabrication de produits pharmaceutiques puisse faire du fill and finish pour le compte d'un laboratoire. Le démarrage est aujourd'hui imminent, ce qui renforcera nos capacités d'approvisionnement.

Les laboratoires ont développé un vaccin en moins d'un an, et heureusement qu'ils ont commencé à en fabriquer en masse avant d'obtenir leur validation, mais le temps de production est, lui, incompressible. Ils produisent aujourd'hui 1 milliard et demi de vaccins par mois, et plus le temps passe, plus leurs capacités de production sont importantes. Nous sommes dans la phase initiale d'une campagne vaccinale qui va prendre de l'ampleur. Si vous regardez bien les chiffres que nous avons publiés de façon transparente sur les arrivages de vaccins, vous verrez que nous recevrons d'ici à quelques mois des millions de doses, ce qui nous permettra d'augmenter le rythme de vaccination, mais tout cela prendra du temps. J'ai dit aux Français, lorsque je les ai invités à prendre rendez-vous pour se faire vacciner, que tout le monde ne serait pas vacciné en février, ni même peut-être en mars.

Nous commençons à vacciner, en flux tendu et, chaque fois que quelqu'un est vacciné, lui est protégé contre les formes graves de la maladie et nous gagnons du terrain sur le virus.

M. Jean-Yves Leconte . - On peut se satisfaire que le Gouvernement n'ait pas mis en place de mesures d'isolement absolu et surveillé pour les personnes atteintes de la covid, comme dans certains autres pays européens, de telles mesures donnant lieu à des stratégies d'évitement et conduisant à un développement plus important de l'épidémie qu'en France. Cette position pourrait-elle évoluer avec l'apparition des variants ? Pensez-vous que nous sommes en mesure de bien identifier l'apparition de nouveaux variants ?

Un certain nombre de pays envisagent d'instaurer très vite un passeport vaccinal. Le Gouvernement pourra-t-il résister ? Comment abordez-vous les négociations européennes à cet égard ? Pensez-vous que des quarantaines seront mises en oeuvre pour ceux qui franchissent les frontières intra-européennes ? Dans ce cas, comment gérera-t-on les frontaliers ? Les frontières européennes sont-elles pertinentes pour surveiller les variants ?

Mme Cécile Cukierman . - On va nous demander la semaine prochaine de prolonger une nouvelle fois l'état d'urgence sanitaire, en raison de la situation vaccinale. J'espère que la campagne vaccinale sera une réussite et qu'elle nous permettra de reprendre une vie en tous points normale. J'ai entendu ce que vous nous avez dit hier à l'Assemblée nationale sur la suppression de l'article 3. Or, nous l'avons déjà dit : ce n'est pas un handicap de travailler avec le Parlement. Le temps sera long jusqu'au 1 er juin, car nous n'aurons pas de retour pendant près de quatre mois. Associer le Parlement, ce n'est pas simplement venir lui présenter la situation ; associer les élus locaux, ce n'est pas simplement non plus les informer. Associer signifie « faire avec ».

Je ne sais pas s'il y a des vaccins cachés - je ne souhaite pas attiser les craintes à cet égard - mais une chose est sûre, c'est que nous manquons de vaccins. Même si un nouveau vaccin devait être réservé à une autre partie de la population, à une classe d'âge plus productive, ce ne serait pas incompatible avec la poursuite de la vaccination des plus âgés, car l'urgence dans notre pays est aussi d'éviter la crise économique et sociale qui menace à l'issue de cette crise sanitaire.

M. Jérôme Durain . - Je tiens à attirer votre attention sur l'épuisement moral de la population de ce pays : il y a de l'impatience, de l'inquiétude, de la frustration, et même de la colère. Nous avons compris qu'il n'y avait pas assez de vaccins, mais alors qu'il y a un risque non négligeable que la crise dure assez longtemps, il nous faut une ligne d'horizon, en attendant que tous ceux qui en ont besoin puissent être vaccinés.

Ma question porte sur l'application TousAntiCovid : cet outil a-t-il encore la moindre utilité ? Fonctionne-t-il, sachant qu'un centre médical a détecté 155 personnes porteuses du virus sans que jamais l'application ne passe du vert au rouge ?

M. Alain Richard . - Si j'ai bien compris, nous allons passer en février ou en mars d'un million environ à deux millions de vaccins supplémentaires par semaine, ce qui nous donne une chance d'atteindre l'objectif de vacciner 15 millions de personnes d'ici à la fin du printemps. Ne serait-il pas utile de diffuser ces chiffres dans le débat public ?

Disposer en moins d'un an de trois vaccins validés et efficaces à 80 % contre un virus totalement nouveau est un fait historique, que personne ne prévoyait il y a encore six mois. C'est un exploit de la part des scientifiques et des industriels, qui bénéficie à l'ensemble de l'humanité.

Notre tâche est de fixer le régime juridique de l'état d'urgence. Pour cela, nous avons besoin d'estimer l'impact de la vaccination sur la circulation du virus. Nous allons bientôt arriver à une proportion de la population vaccinée qui atteindra quelques points de pourcentage. Dans cinq ou six mois, nous devrions avoir vacciné un quart de la population. Ce taux affectera-t-il substantiellement la circulation du virus ? Ce que j'ai retenu de ce que nous ont dit les scientifiques est que l'on n'en sait rien pour le moment, mais que les premières indications tendent à montrer que la diffusion du vaccin ne freine pas substantiellement la circulation du virus. Les responsables politiques que nous sommes fixent, au nom des citoyens, des règles de limitation de toutes les interactions et de toutes les activités susceptibles de favoriser la circulation du virus ; à la différence de Philippe Bas, je ne suis pas sûr, et je crois que nous ne pouvons pas tenir pour acquis, qu'une proportion de 5 ou 10 % de la population vaccinée réduise en quoi que ce soit la circulation du virus. Qu'en dites-vous ?

M. Olivier Véran, ministre . - L'isolement contraint n'est pas à l'ordre du jour. Nous avons consulté l'ensemble des présidents de groupe des deux assemblées parlementaires et nous avons vu qu'à une exception près, l'ensemble de la classe politique était opposée à l'instauration d'un isolement contraint dans le droit commun extraordinaire qu'est l'état d'urgence sanitaire. Nous n'avons donc pas poussé les choses plus loin, et ce type de disposition n'est pas sur la table. Il peut y avoir des arrêtés préfectoraux de placement à l'isolement, pour des personnes qui, individuellement, ne respectent pas le confinement et mettent en danger la santé de la population. On l'observe notamment pour certaines personnes qui ont contracté un variant à l'étranger et qui ont fait état de leur décision de ne pas respecter l'isolement.

Il est beaucoup trop tôt pour poser la question du passeport vaccinal. Il est normal de vouloir anticiper et de se projeter dans l'avenir, mais nous ne savons pas encore si le vaccin, en plus de préserver des formes graves, fait chuter la contagiosité du virus et préserve des formes bénignes potentiellement contaminantes. Nous avons cependant des raisons d'espérer. D'ailleurs, de façon générale, on a le droit et même le devoir d'espérer, mais sans nous désarmer - et c'est exactement ce qui nous réunit aujourd'hui. Moderna a fait état - et Pfizer dira vraisemblablement la même chose - de données qui montreraient une réduction de la contamination. Et mon homologue israélien, avec lequel j'ai tenu il y a deux jours une visioconférence, m'a donné de précieuses informations : Israël a déjà atteint un taux de couverture vaccinale important, grâce à un accord avec Pfizer, selon lequel ce pays échange ses données contre un surplus de vaccins. Il commence à constater une réduction de la contamination - pas à 100 %, certes, mais c'est une très bonne nouvelle. Ce serait du reste conforme à l'histoire de la vaccination et à ce que l'on sait de l'impact des vaccins depuis qu'ils existent.

Pour l'heure, il serait très prématuré de permettre l'accès à des musées ou à des voyages à des personnes vaccinées, surtout quand on vaccine des personnes âgées en Ehpad... Nous en reparlerons si notre taux de couverture vaccinale devient élevé. Je sais que le taux d'adhésion de la population à la vaccination sera beaucoup plus fort que ce que l'on pouvait imaginer. Cela ne m'étonne pas, car je crois au bon sens français. Pour l'heure, en tout cas, parler de passeport vaccinal revient à faire du roman d'anticipation.

M. Jean-Yves Leconte . - Certains pays européens y réfléchissent déjà...

M. Olivier Véran, ministre . - Je sais, et pas seulement des pays européens. Ils demandent, puisqu'ils ont atteint un bon taux de couverture vaccinale, que nous laissions entrer leurs ressortissants sans test PCR. La réponse est non : nous ne nous désarmons pas. Le Conseil européen, aujourd'hui, portera notamment sur les politiques de tests, et abordera la question des frontières au sein de l'espace Schengen, mais aussi à l'extérieur. Nous verrons ce qui en ressortira.

Pour l'identification des variants en France, nous déployons beaucoup de moyens afin d'augmenter nos capacités de séquençage génomique. La Grande-Bretagne dispose de bonnes capacités de séquençage, et c'est heureux. Nous sommes loin d'être les derniers de l'Europe en matière d'équipement. Cela fait trente ans que cet équipement se met en place progressivement, mais nous ne sommes pas moins dotés que nos voisins allemands, par exemple. Toujours est-il qu'il nous faut amplifier nos capacités de séquençage génétique. Par ailleurs, nous travaillons d'arrache-pied avec les autorités de santé pour valider des kits PCR permettant d'identifier les variants sans avoir besoin de recourir au séquençage génétique. Nous déploierons ces kits dans les plateformes de laboratoires privés et publics, en privilégiant le territoire ultramarin, qu'il faut absolument protéger de l'arrivée des variants, et les régions dans lesquelles la dynamique épidémique est la plus forte - Grand Est, Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne-Rhône-Alpes et, en partie, Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Nous traquons ces variants. J'étais avant-hier en déplacement à l'ARS d'Île-de-France. Vous n'imaginez pas les moyens humains et technologiques qui sont mis en place à cet effet. J'ai visité une salle dans laquelle cinq personnes travaillent avec, sur les murs, les plans des cabines des différents types d'avions, Airbus ou Boeing, avec les notices de leurs systèmes de ventilation. Ces personnes épluchent les documents que remplissent les passagers sur les vols internationaux et, quand il y a une suspicion de présence du variant, ils appellent le passager concerné pour qu'il reste chez lui et contactent toutes les personnes qui, selon le plan de la cabine et la nature de la ventilation, ont pu être exposées à un risque de transmission du variant. C'est très impressionnant à voir. Ils font également du traçage rétrospectif, à la japonaise, pour identifier les personnes qui ont pu contaminer chaque cas positif identifié.

Le variant d'origine sud-africaine m'inquiète spécialement, même si on le trouve moins, à ce stade, que le variant anglais. Sur ce dernier, tous les laboratoires sont mobilisés pour nous donner des indicateurs de suivi et de croissance. Pour être clair, la propagation du variant d'origine anglaise sur le territoire français peut être un élément déterminant dans les stratégies de lutte contre l'épidémie dans les prochains jours et les prochaines semaines. Si la part de ce variant devait augmenter de façon sensible et que nous devions suivre une trajectoire à l'anglaise, le confinement deviendrait probablement une nécessité absolue. Nous le traquons, donc, avec les données qui nous proviennent au quotidien des laboratoires privés et publics, et c'est une véritable course contre la montre, car il s'agit d'un facteur déterminant pour les jours à venir.

Vous m'avez interrogé sur les campagnes vaccinales. Bien sûr, ce n'est pas une mauvaise nouvelle si l'on peut utiliser le vaccin chez d'autres publics que les personnes âgées. En termes de lisibilité, il sera certes difficile d'expliquer, si cette situation se présentait, qu'on commencera à vacciner des personnes de moins de 60 ans avant de vacciner des personnes de plus de 60 ans, alors même que les risques de formes graves sont plus importants pour ces dernières. Mais si le vaccin n'a pas toutes les garanties pour être utilisé chez les personnes de plus de 60 ans, on ne va pas l'utiliser de force sur eux. Nous mènerons donc des campagnes en parallèle, en veillant à leur lisibilité.

L'utilité de l'application TousAntiCovid n'est plus à démontrer : 12,5 millions d'utilisateurs, 56 000 notifications envoyées, 102 000 cas déclarés... Ce sont des dizaines de milliers de chaînes de contamination qui ont pu être évitées. L'application est fonctionnelle. Je l'ai sur mon téléphone - j'imagine que vous aussi - et l'on y a accès aux chiffres que je viens de vous donner.

Nous sommes déjà à un rythme d'un million de personnes vaccinées par mois. Nous aurons dépassé largement le million à la fin du mois. Bien sûr, il faudra tenir compte des rappels de vaccination : dès lors qu'on est en flux tendu et qu'on doit garder des doses pour faire des rappels vaccinaux, il y aura une période, en février, où l'on observera un creux dans la courbe des primo-vaccinations, alors qu'on aura reçu plus de vaccins. Déjà, l'Allemagne est tombée à 50 000 primo-vaccinations depuis deux jours, alors qu'elle était bien au-delà les jours précédents.

Mme Jacky Deromedi . - Vous évoquez les cas détectés par l'ARS dans les avions, et vous dites qu'on leur demande de s'isoler. Comment vous assurez-vous qu'ils le font ? Les pays qui ont réussi sont ceux qui ont obligé les personnes positives à s'isoler.

Si vous allez à Singapour, par exemple, un autobus vous attend à l'arrivée pour vous emmener dans un hôtel, et vous y restez quatorze jours ; si vous arrivez contaminé, vous allez directement à l'hôpital ; et si vous êtes cas contact, vous devez vous isoler et porter un bracelet électronique pour faciliter le contrôle.

M. Olivier Véran, ministre . - Entre thèse et antithèse, je vais essayer de proposer une synthèse. En France, au tout début, dès qu'une personne était testée positive, elle était hospitalisée. Cela n'a pas empêché la première vague. Les pays qui, autour de nous, imposent l'isolement, sont parmi les pays qui subissent la troisième vague la plus violente et la plus meurtrière : au Royaume-Uni, par exemple, qui avait adopté des mesures contraignantes, le nombre de morts dépasse 1 500 chaque jour ; l'Espagne a été obligée de confiner, et un tableau que je regardais hier montrait que, sur trente-deux pays du continent européen, nous étions depuis plusieurs jours le dernier en termes de mortalité et de nombre de cas graves.

Certains pays, en Asie, ont mobilisé l'armée dans les rues. C'est un peu anxiogène... Et j'ai vu que la Chine construisait un centre pour pouvoir isoler plusieurs dizaines de milliers de personnes. Ce n'est pas le choix que nous faisons - ce n'est pas le choix que vos présidents de groupe ont fait, puisqu'ils nous ont demandé, quasi unanimement, de ne pas recourir à ce type de mesure. Tant mieux, car je ne suis pas convaincu qu'elles soient efficaces. Nous, nous avons fait le choix de la confiance et de l'accompagnement : plus de 94 % des gens qui sont positifs ou cas contacts reçoivent dans les vingt-quatre heures un premier appel de l'assurance maladie ou de l'ARS pour les informer qu'ils n'auront pas de rupture de droits. Nous sommes le seul pays où il n'y a même pas de jour de carence, et où vous pouvez vous enregistrer directement sur internet.

Nous renforçons le système « tester, alerter, protéger » en déployant des infirmières au domicile des personnes mises à l'isolement pour aller tester jusqu'à l'entourage familial de la personne positive, avec un accompagnement qui peut être quotidien, sur le plan tant sanitaire que social. Nous avons mis en place des possibilités d'accueil et d'hébergement dans des structures hôtelières pour les personnes qui ne peuvent pas être isolées dans de bonnes conditions chez elles.

L'accompagnement est très bien fait, et l'expérience nous permet de dire avec certitude que l'isolement contraint ne protège pas un pays d'une vague ; ce n'est pas la martingale.

Mme Laurence Harribey . - Lors d'une audition tenue ce matin devant la commission des affaires européennes, M. Pierre Delsaux, directeur général adjoint de la santé et de la sécurité alimentaire à la Commission européenne, en réponse à une question sur la possibilité pour la Commission d'assurer une plus grande transparence et un meilleur contrôle démocratique sur les contrats passés avec les laboratoires pour les vaccins, a répondu, dans le langage diplomatique de Bruxelles que vous connaissez bien, qu'il n'y avait pas de problème de transparence au niveau européen, mais plutôt à l'échelle des États. Qu'en dites-vous ?

Une communication de la Commission européenne a été diffusée hier en préalable à la réunion de ce soir. Il y est question de la préparation de deux règlements qui semblent avoir pour objet de donner plus de pouvoir à la Commission européenne en matière de coordination des plans de santé, d'approvisionnement en médicaments et de plans de vaccination. Selon M. Delsaux, au-delà de l'approvisionnement, la vraie question est la transparence sur les plans de vaccination. Qu'en pensez-vous ? Quelle sera la position du Gouvernement sur ces questions ?

M. Olivier Véran, ministre . - Sont accessibles à tout un chacun, en toute transparence, les critères de responsabilité des laboratoires qui produisent et vendent les vaccins ; les prix d'acquisition des vaccins par la Commission européenne ; les volumes acquis par la Commission européenne ; les délais et les rythmes de livraison de ces différents vaccins ; et l'ensemble des données scientifiques et médicales qui ont permis à l'EMA de valider et d'autoriser ces vaccins, en open data . Honnêtement, je ne sais pas ce qui manque !

M. Alain Richard . - Il manque bien quelque chose, et les personnes qui savent ce que c'est qu'un contrat public le comprennent parfaitement : quand il y a une mise en concurrence pour passer des contrats qui représentent, en l'occurrence, des dizaines de milliards d'euros, une partie des informations industrielles et commerciales fournies par chacun des candidats n'a pas à être rendue publique. Sinon, au prochain appel d'offres, cela fausserait la concurrence. Tous les responsables publics savent cela depuis des dizaines d'années, même si certains font semblant de continuer à s'étonner.

M. Olivier Véran, ministre . - Vous avez raison. Mais du point de vue du citoyen, si je me demande ce que j'ai besoin de savoir pour être rassuré, outre les prix, les volumes, les délais, les rythmes, les données et les critères de responsabilité appliqués aux laboratoires, j'ai beau chercher, je ne vois pas ce qui est susceptible de m'intéresser.

L'Europe est une chance pour la santé. C'est même une opportunité formidable. Or l'Europe a trop longtemps mis la santé de côté, considérant que c'était l'affaire des États. Les inégalités en matière de santé sont beaucoup trop importantes en Europe. Nous partageons la même monnaie, mais pas la même espérance de vie ! Il ne s'agit certes pas d'uniformiser les systèmes de protection sociale. Historiquement, la France a le système le plus protecteur, et c'est tant mieux, mais il y a de nombreuses coopérations que nous pouvons mener ensemble à l'échelle européenne en matière de politique sanitaire ou en termes de recherche et développement. D'ailleurs, la crise actuelle l'a confirmé. On disait depuis des années qu'il fallait que nous retrouvions de l'autonomie en matière de production de médicaments, d'approvisionnement en matières premières et en matériels de protection... Nous devons nous réindustrialiser pour retrouver notre souveraineté en matière de médicaments. Nous ne pouvons pas être dépendants de trois États dans le monde, la Chine, l'Inde et le Pakistan.

Il faut une stratégie européenne marquée en la matière. La présidence française de l'Union européenne s'ouvrira dans quelques mois, et il y a matière à bâtir sur plusieurs années un plan stratégique de coopération européenne en santé. Nos objectifs sont ambitieux, car je crois profondément que ce sera beaucoup plus efficace pour la population.

M. François-Noël Buffet , président . - Merci de votre intervention.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat .

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 25 ( * ) .

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 26 ( * ) .

Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 27 ( * ) . Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 28 ( * ) .

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des lois a arrêté, lors de sa réunion du mardi 26 janvier 2021, le périmètre indicatif du projet de loi n° 296 (2020-2021) prorogeant l'état d'urgence sanitaire.

Elle a considéré que ce périmètre incluait :

- les prérogatives conférées aux autorités publiques sous le régime de l'état d'urgence sanitaire et sous le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire, ainsi que la durée d'application desdits régimes ;

- les systèmes d'information mis en oeuvre dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19 ;

- les dispositions tendant à tirer les conséquences de la crise sanitaire.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives des textes, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl20-296.html


* 1 Décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 déclarant l'état d'urgence sanitaire .

* 2 Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 .

* 3 Loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire .

* 4 Loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire .

* 5 Source : ministère des solidarités et de la santé.

* 6 Note d'alerte du comité de scientifiques Covid-19, « Le clone anglais VUI-UK : anticiper une reprise épidémique en janvier », 22 décembre 2020.

* 7 À la date du 14 janvier 2021, selon le ministère des solidarités et de la santé, 87 cas de contamination par la variante VOC 202012/01 (variante « anglaise ») et quatre cas de contamination par la variante 501.V2 (variante « sud-africaine ») avaient été confirmés, en France, par le centre national de référence des infections respiratoires.

* 8 D'après un décompte effectué par l'Agence France presse, le taux moyen de personnes vaccinées dans l'Union européenne se situait autour de la même date à 0,68 %, le Danemark arrivant en tête avec un taux de 2 %. Au Royaume-Uni, cette proportion se montait même à 3,38 % (« Course à la vaccination : France et Pays-Bas lanternes rouges, Royaume-Uni et Danemark en tête », La Tribune , 14 janvier 2021).

* 9 À la date du 24 janvier 2021, 1 026 871 personnes avaient été vaccinées en France selon les données rendues publiques par le Gouvernement.

* 10 À savoir les personnes âgées résidant en établissement, les professionnels qui y exercent et présentent un risque élevé, tous les professionnels de santé, pompiers et aides à domicile de plus de 50 ans ou atteints de comorbidités, les personnes en situation de handicap hébergées en établissement et les personnels qui y exercent, ainsi que, depuis le 18 janvier, toutes les personnes âgées de plus de 75 ans ou atteintes de pathologies à haut risque. Un élargissement progressif est prévu à compter du mois de mars, d'abord aux personnes de plus de 65 ans, puis à l'ensemble de la population.

* 11 Article L. 3131-15 du code de la santé publique.

* 12 Article L. 3131-16 du même code.

* 13 Article L. 3131-17 dudit code.

* 14 Aux pouvoirs conférés au Premier ministre et, sur son habilitation, au préfet de département par l'article 1 er de la loi du 9 juillet 2020, il faut, en effet, ajouter ceux dont dispose le ministre de la santé en application de l'article L. 3131-1 du code de la santé publique, ainsi que d'autres dispositions éparses dans notre législation (par exemple l'article L. 410-2 du code de commerce relatif au contrôle des prix).

* 15 Si l'on pouvait s'interroger lors de l'adoption de la loi du 9 juillet 2020, il est désormais établi que les mesures de couvre-feu se fondent sur le pouvoir d'interdire aux personnes de sortir de leur domicile, prévu au 2° du I de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique (au sein du chapitre relatif à l'état d'urgence sanitaire), et non pas sur le pouvoir de réglementer ou d'interdire la circulation des personnes et des véhicules (prévu aussi bien par le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire). Voir la décision du Conseil constitutionnel n° 2020-803 DC du 9 juillet 2020, cons. 15, et l'avis du Conseil d'État sur le projet de loi, § 7.

* 16 Aux termes de l'article L. 1110-4 du code de la santé publique : « Toute personne prise en charge (...) a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant. Excepté dans les cas de dérogation expressément prévus par la loi, ce secret couvre l'ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel, de tout membre du personnel de ces établissements, services ou organismes et de toute autre personne en relation, de par ses activités, avec ces établissements ou organismes. Il s'impose à tous les professionnels intervenant dans le système de santé. »

* 17 Voir la décision n° 2020-800 DC du 11 mai 2020, Loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions. Selon le considérant de principe énoncé par le Conseil constitutionnel : « Il résulte du droit au respect de la vie privée que la collecte, l'enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d'intérêt général et mis en oeuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif. Lorsque sont en cause des données à caractère personnel de nature médicale, une particulière vigilance doit être observée dans la conduite de ces opérations et la détermination de leurs modalités ».

* 18 Il ne semble, en revanche, pas nécessaire d'étendre expressément à ces territoires la prorogation de l'état d'urgence sanitaire prévue à l'article 2 du projet de loi, le décret du 14 octobre 2020 l'ayant déclaré sur l'ensemble du territoire de la République. La loi de prolongation du 14 novembre 2020 était également muette sur ce point.

* 19 L'intitulé, après avoir été modifié une première fois en commission des lois, l'a été une seconde fois en séance publique, par l'adoption d'un amendement du rapporteur. Le texte transmis s'intitule donc simplement : projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire .

* 20 Selon l'expression du rapporteur dans son précédent rapport, n° 540 (2019-2020), sur le projet de loi organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire .

* 21 Le Conseil constitutionnel a seulement énoncé que le pouvoir d'« ordonner la fermeture provisoire et réglementer l'ouverture, y compris les conditions d'accès et de présence, d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion », prévu au 5° du I de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, ne s'étendait pas aux lieux de réunions. Cette considération, parmi d'autres, l'a fait conclure à la constitutionnalité de cette disposition. Voir la décision du Conseil constitutionnel n° 2020-800 DC du 11 mai 2020, cons. 22.

* 22 Décret n° 2020-858 du 10 juillet 2020 relatif aux prix de vente des gels et solutions hydro-alcooliques et des masques de type ou de forme chirurgicale à usage unique .

* 23 Le rapporteur renvoie aux travaux de la mission « flash » sur le régime juridique de l'état d'urgence sanitaire instaurée par la commission des lois de l'Assemblée nationale et dont les co-rapporteurs étaient MM. Philippe Gosselin et Sacha Houlié.

* 24 Dans ces communautés de communes, si la compétence n'est pas transférée à la communauté de communes, elle est en effet transférée à la région.

* 25 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 26 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 27 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 28 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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