II. LA TAXONOMIE VERTE : UNE RÈGLEMENTATION COMPLEXE
Telle que proposée par le règlement du 18 juin 2020, la taxonomie verte est une règlementation complexe .
Le rapporteur retient de cette règlementation (voir encadré) quatre points d'attention majeurs.
En premier lieu, le champ d'application de la taxonomie est large , puisqu'il englobe :
- les États membres et l'Union européenne , dans la définition des exigences imposées aux acteurs financiers ou aux émetteurs mettant à disposition des produits financiers ou des obligations d'entreprise qualifiés de durables ;
- les acteurs des marchés financiers mettant à disposition de tels produits financiers ;
- les entreprises 21 ( * ) soumises à l'obligation de publier une déclaration de performance non financière, le cas échéant consolidée.
En deuxième lieu, les objectifs environnementaux poursuivis par la taxonomie sont nombreux, puisqu'ils consistent en :
- l' atténuation du changement climatique ;
- l' adaptation au changement climatique ;
- l'utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines ;
- la transition vers une économie circulaire ;
- la prévention et la réduction des pollutions ;
- la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes .
En troisième lieu, la classification des activités économiques par la taxonomie est multiple, plusieurs catégories existant :
- les
activités durables
, qui poursuivent
au moins l'un des objectifs environnementaux précités, ne causent
aucun préjudice aux autres
- ce principe étant
appelé
« do no significant harm »
(DNSH) -, et respectent des garanties minimales et des critères
techniques ;
- les activités transitoires , pour lesquelles il n'existe aucune solution de remplacement, sous réserve que ces activités présentent des niveaux d'émissions de gaz à effet de serre (GES) performants, n'entravent pas le développement ou le déploiement de telles solutions de remplacement et n'entraînent aucun verrouillage d'actifs ;
- les activités habilitantes , qui permettent à d'autres activités de poursuivre directement l'un des objectifs environnementaux susvisés, dès lors que ces activités présentent un impact environnemental positif significatif et qu'elles n'entraînent aucun verrouillage d'actifs.
En dernier lieu, l'élaboration de la taxonomie est largement du ressort de la Commission européenne : le règlement du 18 juin 2020 a notamment prévu qu'elle adopte, avant le 30 décembre 2020, un acte délégué pour fixer les critères permettant de déterminer si une activité contribue à l'atténuation du changement climatique et si elle cause un préjudice aux autres objectifs environnementaux, pour une application le 1 er janvier 2022.
Que dit le règlement sur la taxonomie verte du 18 juin 2020 ? L' article 1 er applique le règlement sur la taxonomie aux États membres et à l'Union européenne dans la définition des exigences imposées aux acteurs financiers ou aux émetteurs en ce qui concerne les produits financiers ou les obligations d'entreprise mis à disposition comme durables, aux acteurs de marché mettant à disposition de tels produits financiers ainsi qu'aux entreprises soumises à l'obligation de publier une déclaration de performance non financière, le cas échéant consolidée. L 'article 3 prévoit de classer les activités économiques comme durables si elles contribuent substantiellement à un ou plusieurs des objectifs environnementaux, ne portent préjudice à aucun d'entre eux, sont exercées selon des garanties minimales - issues de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), de l'Organisation internationale du travail (OIT) et de l'Organisation des Nations unies (ONU) - et sont conformes à des critères d'examen technique. Définis à l' article 9 , les objectifs environnementaux ainsi poursuivis sont : l'atténuation du changement climatique, l'adaptation au changement climatique, l'utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines, la transition vers une économie circulaire, la prévention et la réduction des pollutions, la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes. L' article 10 prévoit de classer les activités économiques comme contribuant à l'atténuation du changement climatique si elles concourent de manière substantielle à stabiliser les concentrations de GES, en évitant ou en réduisant ces émissions ou en améliorant leur absorption 22 ( * ) . Un acte délégué doit définir, avant le 31 décembre 2020, les critères d'examen technique permettant de déterminer si une activité contribue de manière substantielle à cet objectif d'atténuation et si elle cause un préjudice aux autres objectifs environnementaux, pour une application le 1 er janvier 2022. L'article 23 habilite la Commission à prendre de tels actes délégués et l' article 24 prévoit qu'elle soit accompagnée par un groupe d'experts des États membres. Outre les activités durables, deux autres catégories sont prévues. L 'article 10 permet de classer les activités économiques comme transitoires lorsqu'il n'existe pas de solution de remplacement sobre en carbone sur le plan technologique et économique, dès lors que ces activités présentent des niveaux d'émission correspondant aux meilleurs performances du secteur de l'industrie, n'entravent pas le développement ou le déploiement de telles solutions de remplacement et n'entraînent par un verrouillage d'actifs à forte intensité en carbone compte tenu de leur durée de vie économique. L'article 16 prévoit de classer les activités économiques comme habilitantes si elles permettent directement à d'autres activités d'apporter une contribution substantielle à l'un des objectifs environnementaux, dès lors que ces activités ont un impact environnemental positif significatif sur la base de considérations relatives au cycle de vie et n'entraînent pas un verrouillage d'actifs compromettant les objectifs environnementaux à long terme compte tenu de leur durée de vie économique. Plusieurs obligations s'imposent aux acteurs publics comme privés. L' article 4 prévoit que les États membres et l'Union européenne recourent aux critères de durabilité prévus pour déterminer si les activités sont durables. Les articles 5 à 7 définissent les obligations de transparence applicables aux informations financières et l'article 8 à celles non financières. Tout produit financier doit comprendre les informations relatives à l'un ou aux objectifs environnementaux ainsi qu'une description de la manière et de la mesure dans laquelle les investissements sous-jacents à ce produit sont effectués dans des activités durables. Il doit préciser la part des dépenses d'investissement réalisés pour le produit concerné, dans des activités durables, habilitantes ou transitoires. Toute déclaration non financière, le cas échéant consolidée, doit préciser la manière et la mesure dans laquelle les activités de l'entreprise sont associées à des activités durables. Elle doit préciser la part du chiffre d'affaires provenant de produits ou de services associés à des activités durables ainsi que les parts des dépenses d'investissement ou de fonctionnement associées à de telles activités. |
* 21 En l'espèce les entreprises, ou les entreprises mères d'un groupe, dépassant 500 salariés.
* 22 Notamment en produisant, transportant, stockant, distribuant ou utilisant des énergies renouvelables ; en améliorant l'efficacité énergétique ; en développant une mobilité propre ou neutre ; en passant à l'utilisation de matières renouvelables issues de sources durables ; en accroissant l'utilisation de technologies de captage et d'utilisation du carbone (CCU) et de captage et de stockage du carbone (CCS) ; en renforçant les puits de carbone terrestres ; en mettant en place les infrastructures énergétiques nécessaires à la décarbonation des systèmes énergétiques ; en produisant des combustibles propres et efficaces à partir de sources renouvelables ou neutres ; en facilitant l'une des activités précitées.