N° 25

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 11 octobre 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise,

Par Mme Frédérique PUISSAT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Mouiller, président ; Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale ; Mme Pascale Gruny, M. Jean Sol, Mme Annie Le Houerou, MM. Bernard Jomier, Olivier Henno, Xavier Iacovelli, Mmes Cathy Apourceau-Poly, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge, vice-présidents ; Mmes Viviane Malet, Annick Petrus, Corinne Imbert, Corinne Féret, Jocelyne Guidez, secrétaires ; Mmes Marie-Do Aeschlimann, Christine Bonfanti-Dossat, Corinne Bourcier, Céline Brulin, M. Laurent Burgoa, Mmes Marion Canalès, Maryse Carrère, Catherine Conconne, Patricia Demas, Chantal Deseyne, Brigitte Devésa, M. Jean-Luc Fichet, Mme Frédérique Gerbaud, M. Khalifé Khalifé, Mmes Florence Lassarade, Marie-Claude Lermytte, Monique Lubin, Brigitte Micouleau, M. Alain Milon, Mmes Laurence Muller-Bronn, Solanges Nadille, Anne-Marie Nédélec, Guylène Pantel, M. François Patriat, Mmes Émilienne Poumirol, Frédérique Puissat, Marie-Pierre Richer, Anne-Sophie Romagny, Laurence Rossignol, Silvana Silvani, Nadia Sollogoub, Anne Souyris, MM. Dominique Théophile, Jean-Marie Vanlerenberghe.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) :

1272, 1404 et T.A. 149

Sénat :

816 (2022-2023) et 26 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

Pour un développement effectif et adapté du partage de la valeur, qui associe les salariés aux résultats de l'entreprise, il convient de traduire les demandes formulées par les représentants des salariés et des employeurs.

La commission des affaires sociales a donc adopté le projet de loi en recentrant ses dispositions sur les mesures législatives qui assurent une transposition fidèle de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise.

I. ASSURER UNE TRANSPOSITION FIDÈLE DE L'ACCORD CONCLU ENTRE LES PARTENAIRES SOCIAUX

Sur le fondement de l'article L. 1 du code du travail, le Gouvernement a invité les partenaires sociaux à négocier sur le partage de la valeur au sein de l'entreprise, en leur transmettant le 16 septembre 2022 un document d'orientation qui posait trois axes de négociation :

· généraliser le bénéfice de dispositifs de partage de la valeur pour les salariés, notamment dans les plus petites entreprises ;

· renforcer, simplifier et veiller à l'articulation des différents dispositifs de partage de la valeur ;

· orienter l'épargne salariale vers les grandes priorités d'intérêt commun.

À l'issue de la négociation, les partenaires sociaux sont parvenus à la conclusion d'un accord national interprofessionnel (ANI), signé le 10 février 2023 par les trois organisations représentatives des employeurs1(*) et par quatre des cinq organisations représentatives des salariés2(*).

Cet accord, qui comprend 36 articles, est structuré en cinq chapitres :

· poursuivre le travail engagé sur les politiques de rémunérations et de valorisation du travail ;

· mettre en lumière le partage de la valeur au sein des entreprises ou des branches professionnelles ;

· encourager le recours aux dispositifs de partage de la valeur pour faciliter leur généralisation ;

· faciliter le développement et la sécurisation de l'actionnariat salarié dans les entreprises dont la forme juridique le permet ;

· améliorer les dispositifs d'épargne salariale.

Le Gouvernement s'est engagé à assurer une transposition fidèle et complète des mesures de l'ANI. Pour celles qui nécessitent une transposition législative, il a présenté un projet de loi le 24 mai 2023, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture le 29 juin dernier.

Dans le respect du dialogue social, le projet de loi doit assurer une transposition fidèle et complète des mesures de l'ANI qui nécessitent des modifications législatives

La commission a modifié le projet de loi en poursuivant deux objectifs :

· assurer une transposition fidèle de l'ANI afin de respecter la parole des partenaires sociaux, en modifiant les dispositions du projet de loi qui s'écartaient des mesures demandées par les signataires de l'accord ;

· transposer les seules stipulations de l'accord qui nécessitent une modification de la loi, en supprimant celles qui relèvent du règlement, et qu'il appartiendra au Gouvernement de prendre par décret, et celles pour lesquelles l'ANI peut être directement appliqué sans mesure de transposition.

 

des branches n'ont pas révisé leurs grilles de classification depuis plus de cinq ans3(*)

II. INCITER LES BRANCHES À NÉGOCIER SUR LES CLASSIFICATIONS

Dans un contexte d'inflation, de tensions de recrutement dans de nombreux secteurs d'activité et d'évolution du marché du travail, les classifications de branche revêtent une importance particulière. C'est à ce titre que les signataires de l'ANI ont rappelé que les branches sont tenues d'examiner au moins tous les cinq ans la nécessité de réviser leurs classifications et qu'ils ont demandé aux branches n'ayant pas respecté cette obligation de s'y conformer avant la fin de l'année 2023.

Afin de transposer cette mesure dans la loi, l'article 1er propose qu'une négociation en vue de l'examen de la nécessité de réviser les classifications soit ouverte avant le 31 décembre 2023 au sein des branches n'ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans.

La commission a donc adopté cet article, qui assure une transposition fidèle des stipulations de l'accord, en revenant sur les modifications apportées par l'Assemblée nationale qui s'en écartaient.

Toutefois, la commission a supprimé l'article 1er bis qui prévoit que les branches professionnelles établissent, avant le 31 décembre 2024, un bilan de leur action en faveur de la promotion et de l'amélioration de la mixité des emplois. Elle a considéré que le droit actuellement en vigueur et les stipulations de l'ANI constituent une base suffisante pour que les branches engagent les travaux sur la mixité des emplois demandés par les signataires de l'accord.

III. FACILITER LE PARTAGE DE LA VALEUR DANS LES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES

A. INSCRIRE LE PRINCIPE DE NON-SUBSTITUTION DE LA PARTICIPATION AUX SALAIRES

Les signataires de l'ANI ont souhaité rappeler, en son article 1er, le principe de non-substitution entre salaire et dispositifs de partage de la valeur. Ce principe implique que l'employeur ne peut s'acquitter de son obligation de paiement du salaire de ses employés par ces dispositifs.

L'article 2 A pose ce principe dans la loi pour la participation, seul dispositif pour lequel la non-substitution ne disposait pas de fondement légal.

B. DÉVELOPPER LE PARTAGE DE LA VALEUR DANS LES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES

Les outils de partage de la valeur peinent à se diffuser dans les petites et moyennes entreprises, en particulier celles de moins de 50 salariés. Outre que ces entreprises ne sont pas tenues d'instituer un régime de participation, la mise en place de ces outils est souvent complexe pour des entreprises qui ne sont pas dotées de services financiers et de ressources humaines conséquents.

Part des entreprises couvertes par un accord de participation ou d'intéressement

 

Entreprises ayant un accord de participation

Entreprises ayant un accord d'intéressement

 

2019

2020

2019

2020

10 à 49 salariés

4,9 %

4,8 %

10,1 %

10,9 %

50 à 99 salariés

35,5 %

36,9 %

22,4 %

24,5 %

100 à 249 salariés

59,8 %

61,3 %

33,5 %

34,8 %

250 à 499 salariés

64,9 %

68,1 %

50,3 %

47,7 %

500 à 999 salariés

67,5 %

68,4 %

56,4 %

54,2 %

1 000 salariés et plus

69,0 %

70,7 %

58,6 %

60,1 %

Source : Commission des affaires sociales d'après les données de la Dares (2022)

Les signataires de l'ANI ont donc souhaité que ces entreprises puissent mettre en place plus facilement et plus systématiquement des dispositifs de partage de la valeur au profit de leurs salariés.

? Dans cette logique, l'article 2 permet à titre expérimental aux entreprises de moins de 50 salariés de recourir à une formule de calcul de la réserve spéciale de participation dérogatoire lorsqu'elles mettent volontairement en place un dispositif de participation, qui est obligatoire pour les entreprises d'au moins 50 salariés. Cette formule, qui peut mener à un montant de mise en réserve inférieur au droit commun, permet de prendre en compte la spécificité de ces entreprises - et notamment les contraintes de trésorerie qu'elles peuvent rencontrer - et d'y encourager le recours à la participation.

? Conformément au souhait des partenaires sociaux, l'article 3 prévoit qu'à titre expérimental, pour une durée de 5 ans, les entreprises de 11 à 49 salariés qui réalisent durant trois exercices consécutifs un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % de leur chiffre d'affaires instituent, au cours de l'exercice suivant, un régime de participation ou d'intéressement, ou abondent un plan d'épargne salariale ou versent la prime de partage de la valeur.

L'article 3 bis étend ce dispositif aux structures de l'économie sociale et solidaire d'au moins 11 salariés qui réalisent durant trois exercices consécutifs un résultat excédentaire au moins égal à 1 % de leurs recettes. Elles devront instituer un régime d'intéressement ou abonder un plan d'épargne salariale ou verser la prime de partage de la valeur.

Alors que l'ANI prévoit explicitement que « cette obligation entrera en vigueur au 1er janvier 2025 », l'Assemblée nationale l'a rendue applicable aux exercices ouverts après le 31 décembre 2023. Afin de retenir la date choisie par les partenaires sociaux, la commission a prévu que l'obligation s'applique aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024.

? Afin de favoriser le développement de la participation dans les entreprises qui atteignent le seuil de 50 salariés, la commission a adopté l'article 4 qui supprime le report de trois ans de l'obligation de mettre en place la participation pour les entreprises qui appliquent déjà un accord d'intéressement.

L'article 5 transpose la volonté exprimée dans l'ANI de mettre en place nouveau dispositif de partage de la valeur en cas d'augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal de l'entreprise. Cet article prévoit ainsi d'imposer aux entreprises d'au moins 50 salariés, qui disposent d'un délégué syndical, de définir, par le biais de leurs accords de participation ou d'intéressement, une augmentation exceptionnelle du bénéfice ainsi que les modalités du partage de la valeur qui en découlera le cas échéant. La commission a approuvé la précision apportée par l'Assemblée nationale concernant les critères qui peuvent être retenus dans la définition d'une augmentation exceptionnelle du bénéfice (taille de l'entreprise, secteur d'activité, bénéfice des années précédents), en ce qu'ils permettent de sécuriser juridiquement ce dispositif.

? L'instauration de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat puis de la prime de partage de la valeur a permis à de nombreux salariés de bénéficier d'une redistribution de la valeur créée par les entreprises, en particulier dans les PME. La simplicité de versement de la prime et son régime social et fiscal incitatif ont permis une large diffusion du dispositif qui a contribué au soutien du pouvoir d'achat des salariés, dans un contexte de forte inflation.

La prime de partage de la valeur (PPV) peut être versée une fois par an à chaque salarié, dans la limite de 3 000 euros ou de 6 000 euros si l'entreprise met en oeuvre un accord d'intéressement. Deux régimes d'exonérations distincts sont applicables selon la rémunération du bénéficiaire et le moment du versement de la prime. Elle est exonérée, dans la limite des plafonds :

· des cotisations sociales ainsi que de l'impôt sur le revenu, de la CSG, de la CRDS, du forfait social et de la taxe sur les salaires lorsqu'elle est versée entre le 1er juillet 2022 et 31 décembre 2023 aux salariés percevant une rémunération inférieure à 3 Smic sur les 12 mois précédant le versement de la prime ;

· des seules cotisations sociales lorsqu'elle est versée à compter du 1er juillet 2022 aux salariés dont la rémunération excède 3 Smic et à compter du 1er janvier 2024 à l'ensemble des salariés quel que soit leur niveau de rémunération. Elle est donc soumise dans ce cas à la CSG, à la CRDS, à l'impôt sur le revenu, à la taxe sur les salaires et au forfait social pour les entreprises de plus de 250 salariés.

Distribution de la prime de partage de la valeur (2022-2023)

Période

Montant de PPV versé

Nombre d'établissements ayant versé une PPV

Nombre de bénéficiaires d'une PPV

Montant moyen de PPV par bénéficiaire

2022

4,4 Md €

464 000

5 500 000

789 €

2022-janvier à juillet 2023

2,3 Md €

272 000

3 500 000

770 €

Source : Réponses de la direction de la sécurité sociale au questionnaire du rapporteur

Conformément à l'ANI, l'article 6 propose que la prime de partage de la valeur puisse être attribuée deux fois par année civile, que son montant puisse être affecté aux plans d'épargne salariale et que le régime temporaire d'exonérations sociales et fiscales soit prolongé jusqu'à la fin de l'année 2026 pour les entreprises de moins de 50 salariés.

Le contexte actuel de forte inflation justifie que le régime social et fiscal temporaire adossé à la prime soit prolongé pour trois années supplémentaires pour les salariés rémunérés jusqu'à 3 Smic, en restreignant son application aux entreprises de moins de 50 salariés. Ces entreprises sont celles qui ne sont pas tenues de mettre en place un régime de participation et qui développent peu l'intéressement. Leurs salariés bénéficient donc moins des dispositifs de partage de la valeur que ceux qui sont employés par des entreprises de plus de 50 salariés. En outre, les ajustements proposés par les signataires de l'accord, qui permettront de verser deux primes au titre d'une même année et d'affecter les sommes versées aux plans d'épargne salariale, contribueront à inscrire la prime dans les outils de partage de la valeur à la disposition des entreprises.

La commission a donc adopté l'article 6, qui assure une transposition fidèle de l'accord.

L'article 7 concrétise la volonté exprimée dans l'ANI de mettre en place un nouveau dispositif de partage de la valeur permettant d'intéresser les salariés à la valorisation de leur entreprise. À la différence de l'actionnariat-salarié, la prime de partage de la valorisation de l'entreprise (PPVE) vise un public plus large, incluant notamment les salariés des entreprises non cotées. Mise en place via un accord spécifique, elle permet de verser aux salariés une prime qui reflète l'augmentation de la valeur de l'entreprise sur les trois dernières années, en bénéficiant d'un traitement fiscal et social incitatif. La commission a adopté l'article 7, qui transpose fidèlement l'ANI.

? La commission a adopté l'article 8 qui prévoit que les sommes perçues au titre de la prime de partage de la valeur et de la prime de partage de la valorisation de l'entreprise pourront être affectées à un plan d'épargne d'entreprise ou à un plan d'épargne retraite.

IV. SIMPLIFIER LES MODALITÉS D'ATTRIBUTION DES OUTILS DE PARTAGE DE LA VALEUR

? La commission a adopté l'article 9, qui permet d'étendre aux accords de participation la possibilité existante pour l'intéressement consistant à prévoir le versement d'avances en cours d'exercice sur les sommes dues.

? L'article 10 du projet de loi vise à sécuriser la possibilité de fixer des salaires plancher et plafond en cas de choix d'une répartition de l'intéressement en fonction du salaire. La fixation de ces bornes permet une répartition des primes d'intéressement plus favorable aux bas salaires.

La commission a approuvé l'inscription de cette possibilité dans la loi, au même titre que ce qui est déjà prévu pour les accords de participation.

? L'article 11 propose de simplifier la procédure de révision du contenu des plans d'épargne interentreprises, notamment en accélérant l'entrée en vigueur de la version modifiée du plan. Cet article, qui transpose fidèlement l'ANI, a été adopté par la commission.

? L'article 12, adopté par la commission, propose que pour l'attribution de l'intéressement et de la participation, un accord étendu de la branche professionnelle du travail temporaire puisse prévoir une durée d'ancienneté requise pour les salariés temporaires différente de celle des autres salariés, dans la limite de quatre-vingt-dix jours. Un tel accord pourra ainsi rehausser, pour les salariés temporaires, la durée d'ancienneté requise pour bénéficier de l'intéressement et de la participation et concentrer ainsi leur versement vers les salariés qui contribuent le plus aux performances de l'entreprise.

? En revanche la commission a supprimé les articles 9 bis et 10 bis qui ne relèvent pas de la loi ou s'écartent des stipulations de l'ANI.

D'une part, elle a supprimé l'article 9 bis qui prévoit que lorsque la déclaration des résultats d'un exercice est rectifiée par l'administration ou par le juge de l'impôt, le montant de la participation des salariés au bénéfice de cet exercice fasse l'objet d'un nouveau calcul tenant compte des rectifications apportées. Cet article relève manifestement du domaine réglementaire et il ne transpose aucune des stipulations de l'ANI.

D'autre part, elle a supprimé l'article 10 bis, qui précise que les critères de performance retenus dans le calcul de l'intéressement collectif des salariés peuvent contenir des critères de responsabilité sociale et environnementale de l'entreprise (RSE). Cette possibilité est déjà permise par le droit en vigueur, et employée par des entreprises qui prennent par exemple en compte la performance énergétique ou la réduction des déchets dans le calcul de l'intéressement.

V. DÉVELOPPER L'ACTIONNARIAT SALARIÉ

L'article 13 transpose fidèlement l'ANI, en ce qu'il rehausse les plafonds globaux d'attribution gratuite d'actions aux salariés, les portants respectivement à 15 %, 20 % et 40 % pour les ETI, les PME et les attributions dites démocratiques. Il introduit également un principe de rechargement du plafond individuel de détention au bout de 7 ans, afin de favoriser les salariés actionnaires dans le temps long. Aussi la commission a choisi d'adopter cet article sans modification.

L'article 14 a été adopté par la commission, puisqu'il transposait la volonté exprimée par l'ANI que les plans d'épargne salariale proposent aux salariés au moins un fonds dit « engagé » (financement de la transition énergique et écologique ou investissement socialement responsable).

L'article 14 bis propose que certaines dépenses liées à la transition énergétique ou à l'activité de proche aidant puissent constituer des motifs de déblocage anticipé de l'épargne salariale. La commission a supprimé cet article, car la liste des situations ouvrant droit à un déblocage anticipé de l'épargne salariale relève d'un décret en Conseil d'État. La transposition des stipulations de l'ANI devra donc être assurée, sur ce point, par le pouvoir réglementaire.

La commission a également adopté l'article 15, qui modifie les règles de gouvernance des fonds communs de placement d'entreprise (FCPE) afin de renforcer l'information des salariés sur la politique d'engagement actionnarial du fond. Dans le cas où le droit de vote du FCPE a été délégué à une société de gestion, elle devra désormais rendre compte de sa politique de vote, chaque année, devant le conseil de surveillance du fonds.

Enfin, la commission a supprimé l'article 16 qui propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant les effets de l'article 11 de la loi « Pacte » sur la mise en oeuvre de l'obligation relative à la participation en entreprise. L'ANI constitue une base suffisante pour que le Gouvernement engage ces travaux d'évaluation.

***

Réunie le mercredi 11 octobre 2023 sous la présidence de Philippe Mouiller, la commission des affaires sociales a adopté le projet de loi modifié par 23 amendements du rapporteur.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER : RENFORCER LE DIALOGUE SOCIAL
SUR LES CLASSIFICATIONS

Article 1er
Négociation de branche visant à réviser les classifications

Cet article propose qu'une négociation en vue de l'examen de la nécessité de réviser les classifications soit ouverte avant le 31 décembre 2023 au sein des branches n'ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans.

La commission a adopté cet article en supprimant la possibilité que la négociation s'engage à la demande d'une organisation syndicale représentative à défaut d'initiative de la partie patronale.

I - Le dispositif proposé

Les classifications permettent d'organiser, au sein d'une branche professionnelle, les différents types d'emplois en catégories, selon la nature des emplois, le niveau de qualification requis ou encore les tâches confiées aux salariés. À ces catégories sont associés des niveaux de rémunération, calculés par un système de points ou de coefficients. Les entreprises se réfèrent ainsi aux grilles de classification de la branche dont ils relèvent pour déterminer les salaires, hiérarchiser les postes et organiser le déroulement des carrières.

Les classifications de branche ne sont pas définies par le code du travail et la méthode de classification des emplois peut varier d'une branche à une autre, selon les spécificités des secteurs d'activité.

Les branches professionnelles ont toutefois pour obligation de définir une classification afin que leurs conventions collectives soient étendues. L'article L. 2261-22 du code du travail prévoit ainsi que pour pouvoir être étendue, une convention de branche doit contenir des clauses portant notamment sur « les éléments essentiels servant à la détermination des classifications professionnelles et des niveaux de qualification » et sur « le salaire minimum national professionnel des salariés sans qualification et l'ensemble des éléments affectant le calcul du salaire applicable par catégories professionnelles, ainsi que les procédures et la périodicité prévues pour sa révision4(*). »

En matière de classification, les stipulations des conventions de branche priment sur l'accord d'entreprise et sur le contrat de travail, sauf stipulations plus favorables5(*). L'employeur est donc tenu de se conformer à la classification de la convention collective qui lui est applicable en prenant en compte les fonctions réellement exercées par le salarié6(*).

Les conventions collectives de branche comportent ainsi des grilles de classification des emplois au sein de la branche et précisent la méthodologie de hiérarchisation des emplois et de calcul des salaires selon le niveau de responsabilité et de qualification.

À titre d'illustration, sont reproduits ci-après des extraits des stipulations de la convention collective nationale de l'architecture relatives à la classification.

Objectifs et spécificités de la grille de classification définie
dans la convention collective nationale des entreprises d'architecture

Article V. 1.1 de la convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003, modifié par l'avenant du 14 décembre 2017 relatif à la classification

Objectifs et spécificités de la nouvelle grille de classification

Les objectifs essentiels de la présente classification à critère classant sont les suivants :

- favoriser l'emploi et l'évolution de carrière du salarié en valorisant les compétences qu'il acquiert ;

- inciter au recours à la formation professionnelle ;

- reconnaître et prendre en compte la polyvalence ;

- définir le niveau de qualification du salarié dans son emploi, pour adapter au mieux son classement pour un poste donné ;

- valoriser les métiers.

La nouvelle grille de classification propose un classement des emplois existants dans la branche.

Elle définit cinq filières :

- filière 1 : emplois de conception en architecture ;

- filière 2 : emplois de conception spécialisés (urbanisme, architecture d'intérieur, paysage, conception scénographique, design ...) ;

- filière 3 : emplois de conception techniques (ingénierie, économie ...) ;

- filière 4 : administration et gestion (administration, gestion, relations clients ...) ;

- filière 5 : entretien et maintenance (technique, informatique ...).

Les cinq filières sont à consulter à l'article V. 1.10.

Chacune de ces filières est divisée en catégories d'emploi et chaque catégorie d'emploi comporte un ou deux niveaux.

Chacune de ces filières est plus ou moins spécialisée, mais contient des typologies d'emploi faisant appel à des savoirs et savoir-faire spécifiques.

Grille de classification des emplois de conception en architecture établie par la convention collective des entreprises d'architecture (extrait)

Source : Convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003 (avenant du 14 décembre 2017 relatif à la classification)

Afin que les grilles de classification s'adaptent aux évolutions des métiers, des qualifications et des rémunérations, le code du travail impose aux branches professionnelles d'examiner au moins une fois tous les cinq ans la nécessité de réviser les classifications.

Article L. 2241-15 du code du travail

Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent, au moins une fois tous les cinq ans, pour examiner la nécessité de réviser les classifications.

Ces négociations prennent en compte l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois.

Lorsqu'un écart moyen de rémunération entre les femmes et les hommes est constaté, les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels font de sa réduction une priorité.

À l'occasion de l'examen mentionné au premier alinéa, les critères d'évaluation retenus dans la définition des différents postes de travail sont analysés afin d'identifier et de corriger ceux d'entre eux susceptibles d'induire des discriminations entre les femmes et les hommes et afin de garantir la prise en compte de l'ensemble des compétences des salariés.

Malgré cette obligation faite aux branches, les classifications conventionnelles sont peu fréquemment actualisées, compte tenu de la complexité du processus d'actualisation des classifications. Cet exercice suppose notamment d'évaluer les mutations économiques d'un secteur d'activité, leur conséquences sur le travail et l'évolution des métiers.

Les services du ministère du travail ont ainsi indiqué7(*) que ces évolutions imposent l'élaboration d'un système de classement à la fois lisible, équitable et attractif, la promotion des déroulements de carrière et la valorisation de la formation professionnelle. Par ailleurs, lors d'une refonte de la grille de classification, les partenaires sociaux se fixent généralement comme principe que la nouvelle hiérarchie n'entraîne pas de perte de revenus pour les salariés, ce qui n'est pas sans impact sur la masse salariale globale.

En outre, il est à noter que le code du travail n'impose pas aux branches de réviser leurs classifications, mais simplement d'examiner, tous les cinq ans, la nécessité de réviser les classifications.

Selon l'étude d'impact du projet de loi8(*), au 5 avril 2023, 35 % des 171 branches suivies par le ministère du travail, couvrant plus de 5 000 salariés, ont révisé leurs grilles de classification durant ces cinq dernières années mais seulement 13,5 % d'entre elles ont procédé à une refonte totale de leurs grilles de classification. Parmi les branches du secteur général :

- 65 % n'ont pas révisé leurs grilles de classification depuis plus de cinq ans.

- 46 % n'ont pas révisé leurs grilles de classification depuis plus de dix ans ;

- 13 % n'ont pas révisé leurs grilles de classification depuis plus de vingt ans.

Dans ce contexte, les signataires de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023 ont souhaité que les branches qui n'avaient pas procédé à l'examen de la nécessité de réviser leurs classifications depuis plus de cinq ans, comme le prévoit l'article L. 2241-15 du code du travail, engagent une discussion sur l'opportunité de réviser leur classification avant la fin de l'année 2023.

Article 3 de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023

Les classifications sont un levier important dans la valorisation des parcours des salariés et de reconnaissance des qualifications : fort d'un principe de classement objectif, elles favorisent une meilleure lisibilité des possibilités de progression professionnelle des salariés au sein de l'entreprise. Elles peuvent ainsi contribuer à l'évolution de leur rémunération.

Les grilles de classification sont également des outils essentiels pour accompagner l'entreprise dans l'organisation du déroulement de carrière des salariés, notamment dans les PME et les TPE.

Il est rappelé que les organisations liées par une convention de branche, ou à défaut, par des accords professionnels se réunissent, au moins une fois tous les 5 ans pour examiner la nécessité de réviser les classifications, en prenant en compte l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois.

Les organisations signataires demandent aux partenaires sociaux dans les branches n'ayant pas procédé à cet examen depuis plus de 5 ans d'engager une discussion sur l'opportunité de réviser leur classification avant la fin de l'année 2023.

Poursuivant l'objectif de transposer l'article 3 de l'ANI, le présent article prévoit qu'une négociation en vue de l'examen de la nécessité de réviser les classifications en prenant en compte l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois est ouverte avant le 31 décembre 2023 au sein des branches n'ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

? En commission, les députés ont adopté cet article sans modification.

? En séance publique, les députés ont adopté un amendement de M. Matthias Tavel visant à ce que la négociation en vue de l'examen de la nécessité de réviser les classifications permette d'assurer l'égalité professionnelle et d'améliorer la mixité des emplois, alors que ces enjeux ne devaient être, dans la rédaction initiale, que « pris en compte ».

Un amendement de M. Michel Castellani a également été adopté : il prévoit qu'à défaut d'initiative de la partie patronale, la négociation s'engage dans les quinze jours suivant la demande d'une organisation syndicale représentative dans la branche.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

? Dans un contexte d'inflation, de tensions de recrutement dans de nombreux secteurs d'activité et d'évolution du marché du travail, les classifications de branche revêtent une importance particulière. Disposer de grilles de classification actualisées et adaptées aux réalités du marché du travail permet de favoriser l'attractivité des métiers, notamment par l'évolution des rémunérations, de mieux valoriser les parcours professionnels et d'accompagner les entreprises dans leur gestion des ressources humaines.

C'est à ce titre que les signataires de l'accord national interprofessionnel ont rappelé, à l'article 3 de l'accord, que les branches sont tenues d'examiner au moins tous les cinq ans la nécessité de réviser leurs classifications et qu'ils ont demandé aux branches n'ayant pas respecté cette obligation de s'y conformer avant la fin de l'année 2023.

Le rapporteur partage pleinement les objectifs poursuivis par les signataires de l'ANI. Si le code du travail prévoit déjà que les branches doivent examiner au moins tous les cinq ans la nécessité de réviser leurs classifications, le présent article impose à celles qui n'ont pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans d'ouvrir à cette fin une négociation avant le 31 décembre 2023.

Le rapporteur soutient donc le dispositif proposé, qui assure une transposition fidèle des stipulations de l'accord et qui imposera aux branches de se saisir à court terme de l'enjeu des classifications.

? Toutefois, le rapporteur considère que les modifications apportées par l'Assemblée nationale s'écartent des stipulations de l'ANI.

D'une part, ni l'article L. 2241-15 du code du travail relatif aux classifications ni les stipulations de l'ANI ne prévoient qu'à défaut d'initiative de la partie patronale, la négociation s'engage dans les quinze jours suivant la demande d'une organisation syndicale représentative dans la branche.

D'autre part, ce même article L. 2241-15 prévoit que les négociations « prennent en compte l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois ». Cette prise en compte est rappelée à l'article 7 de l'ANI. Il convient donc que le présent article reprenne ces termes, comme le prévoyait sa rédaction initiale.

En conséquence, le rapporteur a proposé de rétablir la rédaction initiale du présent article par les amendements COM-11 et COM-12, que la commission a adoptés.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 1er bis
Bilan de l'action des branches en faveur de la mixité des emplois

Cet article propose que les branches professionnelles établissent, avant le 31 décembre 2024, un bilan de leur action en faveur de la promotion et de l'amélioration de la mixité des emplois.

La commission a supprimé cet article.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

? Les signataires de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023 ont tenu à rappeler les outils à la disposition des acteurs du dialogue social en faveur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

L'article 4 de l'ANI énumère ainsi les obligations de négociation sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes posées par le code du travail, tant au niveau de la branche que de l'entreprise, et prévoit que « afin d'avancer sur les questions d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, les branches professionnelles lanceront, en lien avec leurs observatoires prospectifs des métiers et des qualifications de branche ou inter-branches lorsqu'ils existent, des travaux sur la mixité de leurs métiers pour favoriser une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans l'ensemble des métiers de leur champ, afin d'accompagner les entreprises de leur secteur pour mieux prendre en compte ces enjeux. Les organisations signataires considèrent qu'il convient d'apprécier les niveaux de rémunérations au regard non seulement des classifications mais aussi des métiers repères. »

? Le présent article entend transposer dans la loi cet article 4 de l'ANI. Il a été introduit par l'adoption de trois amendements identiques de Mmes Michèle Peyron, Anne Bergantz et M. François Gernigon lors de l'examen du projet de loi en commission. Il a été modifié en séance publique par deux amendements rédactionnels du rapporteur.

Il dispose que les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels établissent, avant le 31 décembre 2024, un bilan de l'action de la branche en faveur de la promotion et de l'amélioration de la mixité des emplois, prévu à l'article L. 2232-9 du code du travail, assorti de propositions d'actions visant notamment à améliorer l'accompagnement des entreprises dans l'atteinte de cet objectif. Ce bilan et les propositions associées sont élaborés en lien avec l'observatoire prospectif des métiers et des qualifications mentionné à l'article L. 2241-12 du même code.

? Le présent article s'appuie ainsi sur les dispositions de l'article L. 2232-9 du code du travail, qui prévoit que les commissions paritaires permanentes de négociation et d'interprétation instituées dans chaque branche établissent un rapport annuel d'activité qui comprend notamment « un bilan de l'action de la branche en faveur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment en matière de classifications, de promotion de la mixité des emplois et d'établissement des certificats de qualification professionnelle, des données chiffrées sur la répartition et la nature des postes entre les femmes et les hommes ainsi qu'un bilan des outils mis à disposition des entreprises pour prévenir et agir contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. »

Il propose en outre, comme le prévoit l'article 4 de l'ANI, que les travaux des branches soient conduits en lien avec les observatoires prospectifs des métiers et des qualifications. Aux termes de l'article 31-3 de l'accord national interprofessionnel du 22 février 2018 relatif à l'accompagnement des évolutions professionnelles, l'investissement dans les compétences et le développement de l'alternance, « l'observatoire prospectif des métiers et des qualifications (OPMQ) constitue un outil technique paritaire d'information, de connaissance et d'analyse des besoins prioritaires des entreprises permettant aux branches professionnelles de conduire une politique d'emploi et de formation professionnelle. Il permet également d'anticiper les évolutions de l'emploi et des métiers, et d'alimenter les politiques nationales d'emploi et de formation. » Cet observatoire est placé sous l'autorité de la commission paritaire nationale emploi et formation professionnelle ou, à défaut, de l'instance paritaire politique désignée par la branche professionnelle.

II - La position de la commission

La loi prévoit déjà que les branches professionnelles, par l'intermédiaire de leurs commissions paritaires permanentes de négociation et d'interprétation, établissent un rapport annuel d'activité qui comprend un bilan de leur action en faveur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment en matière de classifications, de promotion de la mixité des emplois et d'établissement des certificats de qualification professionnelle.

En outre, la disposition du présent article selon laquelle ce bilan doit être assorti de propositions d'actions visant à améliorer l'accompagnement des entreprises n'apparait pas nécessaire. En effet, les commissions paritaires permanentes de négociation et d'interprétation ont pour mission de représenter la branche dans l'appui aux entreprises, en vertu de l'article L. 2232-9 du code du travail. Elles peuvent donc déjà assortir leurs bilans de propositions d'actions pour accompagner les entreprises.

Enfin, dans le cadre de leurs travaux, les branches professionnelles peuvent déjà s'appuyer sur l'expertise des observatoires prospectifs des métiers et des qualifications placés auprès d'elles, sans qu'il soit nécessaire de le rappeler dans la loi.

Dès lors, le droit actuellement en vigueur et les stipulations de l'ANI constituent une base suffisante pour que les branches engagent les travaux sur la mixité des emplois demandés par les signataires de l'accord. L'article 4 de l'accord ne nécessite donc pas de transposition législative pour pouvoir être appliqué.

Pour ces raisons, la commission a adopté l'amendement COM-13 du rapporteur tendant à supprimer le présent article.

La commission a supprimé cet article.

TITRE II : FACILITER LA GÉNÉRALISATION DES DISPOSITIFS DE PARTAGE DE LA VALEUR

Article 2 A
Non-substitution des dispositifs de participation

Cet article propose d'inscrire le principe de non-substitution entre les sommes apportées à la réserve spéciale de participation (RSP) et les éléments de salaire.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

A. Le droit en vigueur

Le principe de non-substitution entre salaires et dispositifs ayant trait au partage de la valeur, initialement consacré pour le seul intéressement des salariés9(*), a progressivement été étendu à d'autres dispositifs tels que le plan d'épargne entreprise (PEE).

· Il consiste à exclure des éléments de rémunération entendue au sens de la Sécurité sociale10(*), c'est-à-dire constituant les assiettes de cotisations de sécurité sociale, tout abondement d'un dispositif d'intéressement ou de participation par l'employeur. Cela implique notamment que « l'employeur ne peut pas s'acquitter de son obligation de paiement de tout ou partie du salaire sous [cette] forme »11(*).

Dans le cas où l'employeur procède à une substitution, même partielle, de l'intéressement à un élément de salaire existant préalablement supprimé, la totalité des exonérations fiscales et sociales qui y sont attachées sont remises en cause, et peuvent donc être reprises12(*).

Le principe de non-substitution trouve un tempérament dans le cas où douze mois se sont écoulés entre le dernier versement de l'élément de rémunération en tout ou partie supprimé et la date d'effet de l'accord13(*).

· La justification du principe de non-substitution en matière de partage de la valeur au sein de l'entreprise est double :

du point de vue des salariés, en ce qu'il permet de sanctuariser la rémunération de base dont ils bénéficient sans les exposer aux fluctuations de l'activité économique ;

- du point de vue de la collectivité, en ce qu'il participe à préserver l'équilibre financier des régimes de Sécurité sociale, en évitant de substituer aux rémunérations existantes, donc chargées, des primes de participation ou d'intéressement afin de profiter de leur statut fiscal et social avantageux.

· Ce principe trouve à ce jour à s'appliquer pour l'essentiel des dispositifs relatifs au partage de la valeur :

- les sommes attribuées aux bénéficiaires en application de l'accord d'intéressement ou au titre du supplément d'intéressement14(*) ;

- les abondements de l'employeur au PEE15(*) ;

- la prime de partage de la valeur, anciennement dite prime Macron ou prime de pouvoir d'achat16(*).

En revanche les sommes apportées par l'employeur à la réserve spéciale de participation (RSP) ne sont pas concernées par ce principe : dans la mesure où la participation est obligatoire pour l'essentiel des entreprises qui y recourent, le risque de substitution est moindre.

Évaluer la substitution réelle entre les dispositifs
de partage de la valeur volontaires et les salaires

Dans une étude du conseil d'analyse économique (CAE) parue en juillet 202317(*), les dispositifs de partage de la valeur font l'objet d'une revue de littérature et d'analyses économétriques afin d'estimer l'effet qu'ils ont sur la rémunération totale des salariés, et ainsi évaluer le niveau de substitution qui peut exister de fait.

Ainsi, l'adoption d'un accord d'intéressement n'aurait pas entraîné de hausse significative de la rémunération totale des salariés entre 1997 et 2007 en France18(*), ce qui suggère une substitution quasi complète entre salaires et dispositifs de partage de la valeur.

Plus récemment, l'Insee a cherché à évaluer l'effet de la prime exceptionnelle pour le pouvoir d'achat (PEPA) sur les salaires selon plusieurs méthodes19(*) :

- par une approche microéconomique : en comparant de manière contrôlée les salaires dans les entreprises recourant à la PEPA avec ceux des entreprises n'y recourant pas. L'Insee aboutit alors à ce qu'un euro de PEPA versée entraîne une baisse de salaire de 15 centimes ;

- par une approche macroéconomique : en comparant de manière contrôlée l'évolution des salaires moyens entre 2018 et 2019 avec celle observée entre 2017 et 2018. Dans ce cas l'Insee estime qu'un euro de PEPA versé entraîne une baisse du salaire de 40 centimes.

En définitive, la littérature économique semble indiquer que seuls les dispositifs de participation obligatoire ne se substituent pas aux salaires, que l'ensemble des dispositifs de partage de la valeur ne réduisent pas l'investissement, mais qu'ils n'améliorent pas non plus la productivité des entreprises.

B. L'extension proposée

L'article premier de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise rappelle l'attachement des partenaires sociaux au principe de non-substitution pour l'ensemble des dispositifs ayant trait au partage de la valeur.

Traduisant cette volonté, l'Assemblée nationale a adopté en séance quatre amendements identiques insérant le présent article, proposés par le rapporteur et M. François Gernignon, Mmes Michèle Peyron et Anne Bergantz.

Le premier alinéa du présent article propose de remplacer le second alinéa de l'article L. 3325-1 du Code du travail, dans le but d'étendre le principe de non-substitution à la réserve spéciale de participation.

Son deuxième alinéa précise que les sommes portées à la RSP n'ont pas le caractère d'élément de salaire pour l'application de la législation du travail et de la sécurité sociale.

Son troisième alinéa étend à la participation le principe de non-substitution valable pour l'intéressement, ainsi que le tempérament relatif au délai de douze mois entre le dernier versement d'un élément de rémunération et la date d'effet de l'accord de participation.

II - La position de la commission

Les études économiques citées précédemment semblent indiquer que la participation, du fait de son caractère obligatoire, constitue le dispositif de partage de la valeur le moins sujet à substitution avec les éléments de salaires.

Cependant, l'énonciation du principe de non-substitution à l'article premier de l'ANI en souligne l'importance pour l'ensemble des partenaires sociaux. De plus, seule la participation ne se voyait pas consacrer ce principe dans le code du travail, là où la mention existe pour l'intéressement et les différents dispositifs d'épargne salariale.

Le rapporteur considère donc que cet ajout réalisé par l'Assemblée nationale contribue à traduire fidèlement l'équilibre qui se dégage de l'ANI.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 2
Dispositif de participation dérogatoire
pour les entreprises de moins de 50 salariés

Cet article propose, à titre expérimental, de permettre aux entreprises de moins de cinquante salariés de recourir à une formule de calcul de la réserve spéciale de participation (RSP) dérogatoire lorsqu'elles mettent en place un dispositif de participation volontaire, afin de prendre en compte leur situation particulière.

La commission a adopté cet article modifié par des amendements recentrant son objet sur ses dispositions qui relèvent du domaine de la loi.

I - Le dispositif proposé

A. La formule légale de calcul de la RSP constitue un frein au développement de la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés

Le recours aux dispositifs de participation demeure avant tout facteur de la taille des entreprises, et reste donc particulièrement faible dans les entreprises de moins de 50 salariés. D'après la Dares20(*), en 2020, seuls 2,5 % des salariés des entreprises de 9 salariés au plus en bénéficient tandis qu'ils sont 5,6 % dans les entreprises de 10 à 49 salariés, ce qui est à mettre en regard avec les 70 % rencontrés dans les entreprises de plus de 1 000 salariés.

Le moindre recours aux dispositifs de participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés s'explique en partie par le fait qu'opter pour un tel dispositif revient à se voir imposer le droit commun de la participation, qui ne prend par définition pas en compte la spécificité de leur activité. En effet :

pour les entreprises d'au moins 50 salariés : la participation est obligatoire lorsque le seuil est atteint sur une période de cinq années civiles consécutives21(*). Cette participation est mise en place par un accord de participation22(*), ou à défaut par un régime dit d'autorité mis en place par l'inspection du travail23(*). Il conduit à la constitution d'une réserve spéciale de participation (RSP), dont l'abondement est défini par une formule légale, qui est répartie au terme de chaque exercice entre les bénéficiaires. Ces sommes sont soumises à un régime social privilégié24(*).

Pour les entreprises de moins de 50 salariés : la participation peut être mise en place de façon volontaire sur le fondement de l'article L. 3323-6 du code du travail, qui renvoie aux règles de droit commun pour les modalités de mise en place de l'accord de participation, mais aussi de calcul de la RSP.

C'est particulièrement le calcul de la RSP qui semble limiter le recours à la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés. À cet égard, la conclusion d'un rapport commun de l'inspection générale des finances et de celle des affaires sociales de 201325(*) semble toujours d'actualité : « la formule de réserve spéciale de participation est perçue comme trop complexe, inadaptée, obsolète, [...] elle constituerait une difficulté pour les entreprises souhaitant mettre en place un accord de participation sur une base volontaire ».

La formule légale de calcul de la réserve spéciale de participation (RSP)

a) L'article L. 3324-1 du code du travail fixe la formule légale de calcul

Avec :

- B : le bénéfice net fiscal ;

- C : les capitaux propres ;

- S : la masse salariale ;

- VA : la valeur ajoutée.

Explication : cette formule peut se comprendre comme traduisant la volonté d'attribuer à la participation une quote-part (0,5) du bénéfice fiscale après impôt après avoir rémunéré les capitaux propres

et en proportion du poids des salaires dans la valeur ajoutée de l'entreprise

.

Cependant la fixation de ces paramètres semble largement dépassée :

la quote-part de 0,5 renvoie au taux d'impôt sur les sociétés de 1967, qui était de 50 % alors qu'il est aujourd'hui de 25 % ou 15 % selon la taille de l'entreprise ;

le facteur de 0,05 imputé au capital représente le coût financier des capitaux propres, autrement dit le rendement attendu du capital qu'il faut rémunérer aux propriétaires de l'entreprise. Mais ce taux n'a jamais été révisé, et il est probablement plus élevé pour les petites et moyennes entreprises (PME) compte tenu du risque plus élevé qui y est adossé.

b) L'article L. 3324-2 du code du travail permet de retenir une formule différente au bénéfice des salariés

Une formule alternative peut être retenue par l'accord de participation, à condition qu'elle respecte le principe d'équivalence des avantages consentis aux salariés.

La base de calcul peut ainsi être le tiers du bénéfice net fiscal, ou la RSP peut prendre en compte l'évolution de la valeur des actions ou parts sociales de l'entreprise ou du groupe lors du dernier exercice clos.

Dans ce cas l'accord n'ouvre droit au régime social et fiscal privilégié que si la RSP n'excède pas le plafond retenu parmi ceux listés dans le même article.

B. La possibilité pour les entreprises de moins de 50 salariés, à titre expérimental, de mettre en place un dispositif de participation dérogatoire

Le présent article transpose l'article 6 de l'ANI, qui doit permettre de faciliter le recours volontaire à la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés.

Le I du présent article autorise les entreprises de moins de 50 salariés, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi, à instituer un dispositif de participation fondé sur une formule de calcul de la RSP dérogatoire au droit commun. Cette formule peut le cas échéant s'affranchir du principe d'équivalence des avantages consentis aux salariés, c'est-à-dire aboutir à un résultat moins favorable pour les salariés. Le dispositif peut être institué par un accord de participation conclu au niveau de la branche26(*), ou au niveau de l'entreprise27(*).

Le II précise que seuls les accords de participation conclus au niveau de l'entreprise dans les conditions prévues à l'article L. 3322-6 du code du travail permettent de déroger à la règle d'équivalence des avantages consentis aux salariés concernant la RSP.

Le III impose aux branches d'ouvrir d'ici le 30 juin 2024 une négociation visant à mettre en place un tel régime de participation pour les entreprises de moins de 50 salariés. Faute d'initiative de la partie patronale, la négociation s'engage dans les quinze jours à compter de la demande d'une organisation salariale représentative de la branche.

Le IV impose au Gouvernement, d'une part, de remettre un rapport d'évaluation de l'expérimentation au Parlement au plus tard six mois avant son terme et, d'autre part, de fournir aux organisations syndicales et patronales représentatives un suivi annuel de l'application du présent article.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En commission trois amendements rédactionnels et un amendement reformulant la rédaction de l'alinéa 3 ont été adoptés, ainsi qu'un amendement proposé par la rapporteure Félicie Gérard précisant que le rapport d'évaluation de l'expérimentation devra permette d'engager une réflexion sur les modifications susceptibles d'être apportées aux modalités de calcul de la RSP.

En séance l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

L'objectif de développement de la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés énoncé par les signataires de l'ANI est fidèlement transposé par le biais de cet article. Il répond ainsi à un frein majeur, qui voyait les entreprises volontaires se voir imposer un régime qui n'avait pas été pensé pour elles. Plus généralement, le rapporteur partage le souci exprimé par les partenaires sociaux de voir la formule de calcul de la RSP évoluer, afin d'être moins complexe, et surtout de mieux correspondre aux contraintes rencontrées par les acteurs de la vie économique.

Cependant, et conformément à la tradition sénatoriale, le rapporteur a proposé de restreindre la demande de rapport de l'alinéa 7 à la seule évaluation de l'expérimentation (amendement COM-14). Il lui semble que la réflexion autour de l'évolution de la formule de calcul de la RSP doit faire l'objet d'un travail plus large, en impliquant les organisations syndicales et patronales. De même, le suivi annuel de l'application de l'article qui est proposé à l'intention des partenaires sociaux à l'alinéa 8 ne paraît pas nécessiter d'inscription dans la loi pour être assuré, ni même relever de son domaine. En conséquence, l'amendement COM-15 l'a supprimé.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3
Expérimentation de la généralisation des dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises de 11 à 49 salariés

Cet article propose qu'à titre expérimental, pour une durée de 5 ans, les entreprises de 11 à 49 salariés qui réalisent durant trois exercices consécutifs un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % de leur chiffre d'affaires instituent, au cours de l'exercice suivant, un régime de participation ou d'intéressement, ou abondent un plan d'épargne salariale ou versent la prime de partage de la valeur.

La commission a adopté cet article en prévoyant que l'obligation d'instituer un dispositif de partage de la valeur s'applique aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024, conformément aux stipulations de l'accord national interprofessionnel.

I - Le dispositif proposé

A. Des dispositifs de partage de la valeur peu développés dans les petites entreprises

1. Plusieurs outils permettent le partage de la valeur en entreprise

Le partage de la valeur créée par l'entreprise peut se traduire par la mise en place de la participation, de l'intéressement, par l'abondement d'un plan d'épargne salariale ou le versement de la prime de partage de la valeur.

? Obligatoire pour les entreprises d'au moins 50 salariés, la participation a pour objet de garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l'entreprise et concourt à la mise en oeuvre de la gestion participative dans l'entreprise. Elle prend la forme d'une participation financière à effet différé, calculée en fonction du bénéfice net de l'entreprise, constituant la réserve spéciale de participation28(*).

La participation est mise en place :

- par convention ou accord collectif de travail ;

- par accord entre l'employeur et les représentants d'organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ;

- par accord conclu au sein du comité social et économique ;

- à la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d'un projet de contrat proposé par l'employeur. S'il existe dans l'entreprise une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ou un comité social et économique, la ratification est demandée conjointement par l'employeur et une ou plusieurs de ces organisations ou ce comité29(*).

? Institué par l'entreprise à titre facultatif, l'intéressement30(*) a pour objet d'associer collectivement les salariés aux résultats ou aux performances de l'entreprise. Il présente un caractère aléatoire et résulte d'une formule de calcul liée à ces résultats ou performances. Toute entreprise qui satisfait aux obligations incombant à l'employeur en matière de représentation du personnel peut instituer, par voie d'accord ou par décision unilatérale de l'employeur, un intéressement collectif des salariés.

? Le plan d'épargne d'entreprise (PEE)31(*) est un système d'épargne collectif ouvrant aux salariés de l'entreprise la faculté de participer, avec l'aide de celle-ci, à la constitution d'un portefeuille de valeurs mobilières.

Le plan d'épargne d'entreprise peut être établi dans l'entreprise à l'initiative de celle-ci ou par un accord avec le personnel, notamment en vue de recevoir les versements effectués au titre de l'intéressement et de la participation. L'employeur peut abonder le plan d'épargne pour le salarié par le versement annuel de sommes pouvant être majorées sous certaines conditions. Les sommes versées sur un plan d'épargne d'entreprise sont bloquées pour une durée de cinq ans, sauf dans certains cas particuliers fixés par décret en Conseil d'État32(*).

En outre, un plan d'épargne pour la retraite collectif (Pereco)33(*) peut être mis en place à l'initiative de l'entreprise ou par accord collectif. Sous réserve de certaines règles spécifiques, les dispositions relatives au PEE sont applicables au Pereco. Les sommes ou valeurs inscrites aux comptes des participants sont détenues jusqu'au départ à la retraite. Toutefois, dans des cas liés à la situation ou au projet du participant, ces sommes ou valeurs peuvent être exceptionnellement débloquées avant le départ en retraite.

Ces dispositifs bénéficient d'un régime social et fiscal incitatif, tant pour les entreprises que pour les salariés, résumé dans les tableaux ci-dessous.

Régime social et fiscal des dispositifs de partage de la valeur
applicable aux entreprises

 

Régime social

Régime fiscal

Participation

- exonération des cotisations sociales
- forfait social de 20 % qui peut, dans certaines conditions, être supprimé ou être réduit à 10 % ou à 16 %

- déduction du bénéfice imposable
- exonération de taxes (salaires, apprentissage) et participations (formation continue, construction)

Intéressement

- exonération des cotisations sociales
- forfait social de 20 % qui peut, dans certaines conditions, supprimé ou être réduit à 10 % ou à 16 %

- déduction du bénéfice imposable
- exonération de taxes (salaires, apprentissage) et participations (formation continue, construction)

Abondement d'un

PEE / PEI

- exonération des cotisations sociales
- forfait social de 20 % avec possibilité d'un taux réduit

- déduction du bénéfice imposable
- exonération de taxes (salaires, apprentissage) et participations (formation continue, construction)

Abondement

d'un Per(eco)

- exonération des cotisations sociales
- forfait social de 20 % avec possibilité d'un taux réduit

- déduction du bénéfice imposable
- exonération de taxes (salaires, apprentissage) et participations (formation continue, construction)

Source : Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion

Régime social et fiscal des dispositifs de partage de la valeur applicable
aux salariés

 

Régime social

Régime fiscal

Participation

- exonération des cotisations sociales
- assujettissement CSG et CRDS (sans abattement pour frais professionnels)
- assujettissement des produits générés par la participation à la CSG et à la CRDS (sans abattement), au prélèvement de solidarité 7,5%, soit un taux global de 17,2 %

- non imposable si versement dans un plan d'épargne salariale (sauf intérêts des comptes courants bloqués perçus annuellement et non réinvestis)

Intéressement

- exonération des cotisations sociales
- assujettissement CSG et CRDS (sans abattement pour frais professionnels)

  - non imposable dans la limite d'un montant égal aux trois quarts du plafond annuel moyen retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale (32 994 € en 2023) si versement dans un plan d'épargne salariale

PEE / PEI

- abondement de l'entreprise exonéré des cotisations sociales dans la limite de 300 % des versements du salarié et de 3 519,36 € en 2023 - soit 8 % du plafond annuel de la sécurité sociale (6 334,84 € en cas de majoration)
- assujettissement de l'abondement à la CSG et à la CRDS (sans abattement pour frais professionnels)
- assujettissement des revenus et plus-values produits par l'ensemble des avoirs détenus dans le plan à la CSG et à la CRDS (sans abattement), au prélèvement de solidarité de 7,5 %, soit un taux global de 17,2 %

- abondement non-imposable dans la limite de 300 % des versements du salarié et de 3 519,36 € en 2023 - soit 8 % du plafond annuel de la sécurité sociale - (6 334,84 € en cas de majoration)

Per(eco)

- abondement de l'entreprise exonéré des cotisations sociales dans la limite de 300 % des versements du salarié et de 7 038,72 € en 2023, soit 16 % du plafond annuel de la sécurité sociale
- assujettissement de l'abondement à la CSG et à la CRDS
- assujettissement des revenus et plus-values produits par l'ensemble des avoirs détenus dans le plan à la CSG et à la CRDS (sans abattement), au prélèvement de solidarité de 7,5 %, soit un taux global de 17,2 %

- abondement non imposable dans la limite de 300 % des versements du salarié et de 7 038,72 € en 2023, soit 16 % du plafond annuel de la sécurité sociale
- à la sortie : non imposable dans le cas d'une sortie en capital

Source : Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion

? Instituée par la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, la prime de partage de la valeur (PPV) a succédé à la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat (Pepa) créée en 2018.

Elle peut être versée par l'employeur une fois par an à chaque salarié, dans la limite de 3 000 euros par salarié ou de 6 000 euros si l'entreprise met en oeuvre un accord d'intéressement, et bénéficie d'un régime social et fiscal incitatif34(*).

2. Malgré des mesures de simplification, les outils de partage de la valeur sont peu développés dans les petites entreprises

Afin de favoriser le développement des outils de partage de la valeur dans les petites et moyennes entreprises, plusieurs mesures de simplification et d'incitation sont entrées en vigueur ces dernières années.

Depuis le 1er janvier 2019, le forfait social n'est pas dû par les entreprises de moins de 50 salariés sur les sommes réparties au titre de la participation. En outre, les entreprises de moins de 250 salariés sont exonérées de forfait social sur les sommes versées au titre de l'intéressement35(*).

Concernant la participation, la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP)36(*) a notamment permis aux entreprises de moins de 50 salariés d'appliquer un accord de participation conclu au niveau de la branche professionnelle, si cet accord le prévoit. Elle a prévu les même modalités pour l'adhésion des entreprises de moins de 50 salariés à un plan d'épargne d'entreprise ou interentreprises en application d'un accord de branche.

En matière d'intéressement, la loi du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire37(*) a permis à l'employeur d'une entreprise de moins de onze salariés dépourvue de délégué syndical ou de membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique de mettre en place, par décision unilatérale, un régime d'intéressement pour une durée comprise entre un et trois ans, à la condition qu'aucun accord d'intéressement ne soit applicable ni n'ait été conclu dans l'entreprise depuis au moins cinq ans avant la date d'effet de sa décision.

La loi ASAP du 7 décembre 2020 a simplifié l'adhésion à un accord d'intéressement de branche pour les entreprises de moins de 50 salariés, en leur accordant la possibilité de l'appliquer par une décision unilatérale de l'employeur. Puis, la loi du 16 août 2022 pour la protection du pouvoir d'achat38(*) a prévu que lorsque l'entreprise de moins de cinquante salariés n'est pas couverte par un accord de branche agréé, l'employeur peut mettre en place un accord d'intéressement par décision unilatérale si l'entreprise est dépourvue de délégué syndical et de comité social et économique ou si, au terme d'une négociation conduite avec les représentants du personnel, aucun accord n'a été conclu.

Malgré ces mesures incitatives, les outils de partage de la valeur peinent à se diffuser dans les petites et moyennes entreprises, en particulier celles de moins de 50 salariés, comme le montrent les tableaux ci-après.

Outre que ces entreprises ne sont pas tenues d'instituer un régime de participation, la mise en place de ces outils est souvent complexe pour des entreprises qui ne sont pas dotées de services financiers et de ressources humaines conséquents. À cet égard, la prime de partage de la valeur, dont la mise en place est plus simple, s'avère plus largement diffusée que les autres dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Part des entreprises couvertes par un accord de participation ou d'intéressement

 

Entreprises ayant un accord de participation

Entreprises ayant un accord d'intéressement

 

2019

2020

2019

2020

10 à 49 salariés

4,9 %

4,8 %

10,1 %

10,9 %

50 à 99 salariés

35,5 %

36,9 %

22,4 %

24,5 %

100 à 249 salariés

59,8 %

61,3 %

33,5 %

34,8 %

250 à 499 salariés

64,9 %

68,1 %

50,3 %

47,7 %

500 à 999 salariés

67,5 %

68,4 %

56,4 %

54,2 %

1 000 salariés et plus

69,0 %

70,7 %

58,6 %

60,1 %

Source : Commission des affaires sociales d'après les données de la Dares (2022)

Part des salariés ayant reçu de la participation, de l'intéressement
ou un abondement sur un plan d'épargne salariale selon la taille de l'entreprise en 2020

 

Participation

Intéressement

Plan d'épargne entreprise

Plan d'épargne retraite collectif

10 à 49 salariés

3,6 %

7,9 %

3,9 %

0,7 %

50 à 99 salariés

25,4 %

16,6 %

6,0 %

1,9 %

100 à 249 salariés

41,5 %

26,0 %

7,5 %

2,7 %

250 à 499 salariés

44,8 %

37,0 %

13,6 %

4,7 %

500 à 999 salariés

45,8 %

41,9 %

16,4 %

8,3 %

1 000 salariés et plus

52,9 %

51,7 %

32,6 %

18,0 %

Source : Commission des affaires sociales d'après les données de la Dares (2022)

Part des entreprises ayant versé une prime exceptionnelle de pouvoir d'achat
en 2021-2022 selon la taille des entreprises

0 à 9 salariés

16 %

 

100 à 249 salariés

19 %

10 à 19 salariés

23 %

 

250 à 499 salariés

22 %

20 à 49 salariés

21 %

 

500 à 1 999 salariés

19 %

50 à 99 salariés

20 %

 

2 000 salariés et plus

29 %

Source : Commission des affaires sociales d'après les données de l'Urssaf caisse nationale (2022)

B. Imposer, à titre expérimental, aux entreprises de 11 à 49 salariés de mettre en place au moins un outil de partage de la valeur lorsqu'elles réalisent un bénéfice d'au moins 1 % pendant trois années consécutives

Afin de développer les outils de partage de la valeur au sein des petites entreprises, les signataires de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023 ont souhaité expérimenter l'obligation, pour les entreprises de 11 à 49 salariés, de mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur lorsqu'elles réalisent un bénéfice net fiscal d'au moins 1 % de leur chiffre d'affaires pendant trois années consécutives.

Article 7 de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023

Les entreprises de 11 salariés ou plus, et de moins de 50 salariés mettent en place au moins un dispositif légal de partage de la valeur (participation, intéressement, prime de partage de la valeur, abondement à un PEE, PEI ou PER) dès lors qu'elles remplissent les conditions suivantes :

- être constituées sous forme de société ;

- réaliser un bénéfice net fiscal positif au moins égal à 1 % du chiffre d'affaires pendant 3 années consécutives ;

- ne pas être couvertes par un dispositif de partage de la valeur (participation, intéressement, abondement à un PEE, PEI ou PER) au moment où la condition précisée à l'alinéa précédent est remplie.

Cette obligation entrera en vigueur au 1er janvier 2025. Pour l'appréciation du respect de la condition relative à la réalisation du bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % du chiffre d'affaires pendant 3 années consécutives, seront prises en compte les années antérieures à cette date d'entrée en vigueur, soit les années 2022, 2023 et 2024. Pour répondre à cette obligation, les entreprises de 11 salariés ou plus et de moins de 50 salariés ont la possibilité de mettre en place les dispositifs prévus à l'article 6.

Les sommes versées dans ce cadre ouvrent droit au régime social et fiscal de la participation.

Les dispositions prévues aux articles 6 et 7 du présent accord sont mises en place à titre expérimental pour une durée de 5 ans à compter de la signature du présent accord. Un bilan paritaire de sa mise en oeuvre sera conduit au plus tard 6 mois avant la fin de cette période, notamment afin de mesurer l'impact de cette mesure sur la couverture des entreprises et des salariés des entreprises de moins de 50 salariés par un accord de participation, un accord d'intéressement, le versement d'une PPV ou la mise en place de PEE et de PER. Afin de faciliter la réalisation de ce bilan qualitatif et quantitatif, il est demandé aux services du Ministère du Travail de réaliser un suivi annuel des accords dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Le présent article entend ainsi transposer l'article 7 de l'accord.

Le I du présent article prévoit qu'à titre expérimental et pendant une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi, les entreprises d'au moins onze salariés qui ont réalisé un bénéfice net fiscal39(*) au moins égal à 1 % du chiffre d'affaires pendant trois exercices consécutifs et qui ne sont pas tenues de mettre en place un régime de participation40(*), c'est-à-dire celles de moins de 50 salariés, doivent au cours de l'exercice suivant :

- soit mettre en place un dispositif de participation41(*) ou d'intéressement42(*) ;

- soit abonder un plan d'épargne salariale43(*) ;

- soit verser la prime de partage de la valeur44(*).

Le II prévoit que ne seront pas soumises à cette obligation les entreprises qui mettent en oeuvre et appliquent, au cours de l'exercice considéré, l'un des outils de partage de la valeur mentionné au I.

Il exclut également du champ d'application de l'obligation les entreprises individuelles45(*).

Le III prévoit que l'obligation introduite par le présent article entre en vigueur pour les exercices ouverts postérieurement au 31 décembre  2024. Les trois exercices précédents seront pris en compte pour l'appréciation du respect de la condition relative à la réalisation du bénéfice net fiscal.

Enfin, le IV propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport d'évaluation des dispositions prévues par le présent article au plus tard six mois avant le terme de l'expérimentation. Un suivi annuel de l'application des dispositions du présent article devra être transmis aux organisations syndicales et patronales représentatives au niveau national interprofessionnel.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En commission, les députés ont adopté deux amendements identiques du rapporteur et de Mme Eva Sas tendant à avancer d'un an l'entrée en vigueur du présent article. L'obligation pour les entreprises de moins de cinquante salariés de mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur serait ainsi applicable à compter du 1er janvier 2024, au lieu du 1er janvier 2025.

Un amendement du rapporteur a également été adopté afin de préciser, par la modification de références au code du travail, que les dispositifs d'intéressement et de participation mis en place par les entreprises pour satisfaire à l'obligation posée par le présent article pourront être instituées selon les modalités prévues par le droit commun (par accord ou par décision unilatérale) ainsi que par l'article 2 du présent projet de loi, qui vise à développer la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Les députés ont en outre adopté un amendement du rapporteur qui ajoute le plan d'épargne retraite d'entreprise collectif (Pereco) interentreprises à la liste des plans d'épargne salariale qui pourront être abondés par l'employeur au titre de l'obligation posée par le présent article.

Enfin, six amendements rédactionnels du rapporteur ont été adoptés.

Lors de la discussion en séance publique, les députés ont adopté un amendement de M. Dominique Potier, sous-amendé par deux sous-amendements identiques de M. Arthur Delaporte et Mme Eva Sas, qui exclut les sociétés anonymes à participation ouvrière (SAPO) du champ de l'obligation posée par le présent article.

En outre, un amendement de Mme Véronique Louwagie a été adopté, précisant que le rapport d'évaluation de l'expérimentation instituée par le présent article, devra donner une ventilation sur cinq années des dispositifs choisis et mis en place par les entreprises.

Un amendement rédactionnel du rapporteur a également été adopté, ainsi qu'un amendement de levée de gage déposé par le Gouvernement.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Les données disponibles montrent que les outils de partage de la valeur sont trop peu développés dans les petites et moyennes entreprises (PME), en particulier celles de moins de 50 salariés. Si l'institution récente de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat puis de la prime de partage de a valeur a permis de renforcer le partage de la valeur créée par les PME, les salariés de ces entreprises continuent à moins bénéficier de ces dispositifs.

Le rapporteur partage donc l'objectif poursuivi par les signataires de l'accord national interprofessionnel qui entendent développer les outils de partage de la valeur dans les entreprises de moins de 50 salariés. Le dispositif proposé, qui traduit fidèlement les stipulations de l'accord, laissera aux entreprises le choix entre différents outils de partage de la valeur, afin que chaque entreprise puisse retenir le dispositif le plus adapté à sa situation, en tenant compte des demandes des représentants des salariés. En outre, le caractère expérimental du dispositif permettra d'évaluer les effets de l'obligation posée par le présent article et d'en tirer les conséquences sur les moyens d'assurer une plus large diffusion des outils de partage de la valeur dans les PME.

Cependant, alors que l'article 7 de l'accord prévoit explicitement que « cette obligation entrera en vigueur au 1er janvier 2025 », l'Assemblée nationale a avancé d'un an l'entrée en vigueur de l'obligation posée par le présent article, en prévoyant qu'elle s'appliquera aux exercices ouverts après le 31 décembre 2023.

Le rapporteur considère que le projet de loi doit assurer une transposition fidèle de l'ANI, et qu'il convient de retenir la date d'entrée en vigueur choisie par les partenaires sociaux signataires de l'accord.

En conséquence, la commission a adopté l'amendement COM-18 du rapporteur qui prévoit que l'obligation s'appliquera aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024, ainsi que le proposait le texte initial.

En outre, la commission a adopté l'amendement COM-19 du rapporteur qui supprime la disposition selon laquelle « un suivi annuel de l'application du présent article est transmis aux organisations syndicales et patronales représentatives au niveau national et interprofessionnel », considérant que cette précision ne relève pas de la loi. L'accord national interprofessionnel, qui demande ce suivi, constitue une base suffisante pour que le Gouvernement informe les partenaires sociaux de la mise en oeuvre de l'expérimentation.

La commission a également adopté deux amendements COM-16 et COM-17 de précision rédactionnelle déposés par le rapporteur.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3 bis
Expérimentation de la généralisation des dispositifs de partage
de la valeur dans le secteur de l'économie sociale et solidaire

Cet article propose qu'à titre expérimental, pour une durée de 5 ans, lorsqu'un accord de branche étendu le prévoit, les employeurs de l'économie sociale et solidaire d'au moins 11 salariés qui réalisent durant trois exercices consécutifs un résultat excédentaire au moins égal à 1 % de leurs recettes instituent un régime d'intéressement ou abondent un plan d'épargne salariale ou versent la prime de partage de la valeur.

La commission a adopté cet article en prévoyant que l'obligation d'instituer un dispositif de partage de la valeur s'applique aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024, conformément aux stipulations de l'accord national interprofessionnel.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article a été introduit en séance publique à l'Assemblée nationale par l'adoption d'un amendement de Mme Fanta Berete et de sept sous-amendements du rapporteur.

Il vise à transposer l'article 7 de l'ANI dans le champ de l'économie sociale et solidaire car les employeurs de ce secteur ne déclarant pas de bénéfice net fiscal n'entreront pas dans le champ d'application de l'article 3. Le présent article entend donc créer un régime analogue à celui prévu à l'article 3, sous réserve des adaptations nécessaires à son application aux employeurs de l'économie sociale et solidaire

Le I du présent article prévoit qu'à titre expérimental et pendant une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi, lorsqu'un accord de branche étendu le permet, les entreprises de l'économie sociale et solidaire qui emploient au moins onze salariés, qui ne déclarent pas de bénéfice net fiscal et qui ont réalisé un résultat excédentaire au moins égal à 1 % de leurs recettes pendant trois exercices consécutifs doivent, au cours de l'exercice suivant :

- soit mettre en place un dispositif d'intéressement ;

- soit abonder un plan d'épargne salariale ;

- soit verser la prime de partage de la valeur.

Sont visées « les entreprises au 1° du II de l'article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire » : personnes morales de droit privé constituées sous la forme de coopératives, de mutuelles ou d'unions relevant du code de la mutualité ou de sociétés d'assurance mutuelles relevant du code des assurances, de fondations ou d'associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ou, le cas échéant, par le code civil local applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

Définition de l'économie sociale solidaire

Article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014
relative à l'économie sociale et solidaire (extrait)

L'économie sociale et solidaire est un mode d'entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l'activité humaine auquel adhèrent des personnes morales de droit privé qui remplissent les conditions cumulatives suivantes :

1° Un but poursuivi autre que le seul partage des bénéfices ;

2° Une gouvernance démocratique, définie et organisée par les statuts, prévoyant l'information et la participation, dont l'expression n'est pas seulement liée à leur apport en capital ou au montant de leur contribution financière, des associés, des salariés et des parties prenantes aux réalisations de l'entreprise ;

3° Une gestion conforme aux principes suivants :

a) Les bénéfices sont majoritairement consacrés à l'objectif de maintien ou de développement de l'activité de l'entreprise ;

b) Les réserves obligatoires constituées, impartageables, ne peuvent pas être distribuées. Les statuts peuvent autoriser l'assemblée générale à incorporer au capital des sommes prélevées sur les réserves constituées au titre de la présente loi et à relever en conséquence la valeur des parts sociales ou à procéder à des distributions de parts gratuites. La première incorporation ne peut porter que sur la moitié, au plus, des réserves disponibles existant à la clôture de l'exercice précédant la réunion de l'assemblée générale extraordinaire ayant à se prononcer sur l'incorporation. Les incorporations ultérieures ne peuvent porter que sur la moitié, au plus, de l'accroissement desdites réserves enregistré depuis la précédente incorporation. En cas de liquidation ou, le cas échéant, en cas de dissolution, l'ensemble du boni de liquidation est dévolu soit à une autre entreprise de l'économie sociale et solidaire au sens du présent article, soit dans les conditions prévues par les dispositions législatives et réglementaires spéciales qui régissent la catégorie de personne morale de droit privé faisant l'objet de la liquidation ou de la dissolution. [...]

Le II prévoit que ne seront pas soumises à l'obligation instituée au présent article les entreprises qui, au titre de l'exercice considéré, mettent déjà en oeuvre et appliquent l'un des dispositifs de partage de la valeur énumérés au I ou qui mettent en application un régime de participation.

Aux termes du III, l'obligation de mettre en place l'un des dispositifs de partage de la valeur s'appliquera aux exercices ouverts après le 31 décembre 2023. Les trois exercices précédents seront pris en compte pour l'appréciation du respect de la condition relative à la réalisation du résultat excédentaire.

Enfin, le IV prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement un rapport d'évaluation de l'expérimentation au plus tard six mois son terme.

II - La position de la commission

Dans le prolongement du dispositif proposé à l'article 3 et conformément au souhait des signataires de l'accord national interprofessionnel, il apparait justifié que les salariés du secteur de l'économie sociale et solidaire bénéficient plus largement des dispositifs de partage de la valeur.

L'obligation faite aux employeurs de ce secteur qui comptent au moins 11 salariés de mettre en place, à titre expérimental, au moins un outil de partage de la valeur est donc soutenue par le rapporteur.

Son champ d'application aux employeurs d'au moins 11 salariés, sans limite maximale d'effectifs, est cohérente avec le fait que ces employeurs ne sont pas des entreprises soumises à l'obligation de participation dès lors qu'elles atteignent le seuil de 50 salariés. L'application de l'obligation à condition qu'un accord de branche le prévoie permettra d'adapter le dispositif à la diversité des structures de l'économie sociale et solidaire, dans le cadre de la négociation collective.

Le rapporteur émet toutefois des réserves sur les conséquences de la mesure proposée pour le financement des structures de l'économie sociale et solidaires qui bénéficient de fonds publics octroyés par l'État, les collectivités territoriales et les caisses de la sécurité sociale. Le caractère expérimental du dispositif proposé devra permettre d'évaluer, au terme de l'expérimentation, les effets du présent article sur les finances publiques et sur la viabilité financière des structures concernées.

Au même titre que pour l'article 3, le rapporteur considère que l'objectif d'une transposition fidèle de l'ANI impose de retenir la date d'entrée en vigueur choisie par les partenaires sociaux signataires de l'accord.

Dès lors, la commission a adopté l'amendement COM-22 du rapporteur qui prévoit que l'obligation prévue au présent article s'appliquera aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024, au lieu du 31 décembre 2023.

La commission a également adopté les amendements rédactionnels COM-20 et COM-21 du rapporteur.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 4
Suppression du report de trois ans de l'obligation de mise en place
de la participation pour les entreprises d'au moins 50 salariés
appliquant un régime d'intéressement

Cet article propose de supprimer le report de trois ans de l'obligation de mettre en place la participation pour les entreprises qui appliquent déjà un accord d'intéressement.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

? Une obligation d'instituer un régime de participation pour les entreprises d'au moins 50 salariés, lorsque ce seuil d'effectif est franchi pendant cinq années consécutives

Aux termes de l'article L. 3322-2 du code du travail, les entreprises employant au moins cinquante salariés garantissent le droit de leurs salariés à participer aux résultats de l'entreprise. Il en va de même pour les entreprises constituant une unité économique et sociale et composée d'au moins cinquante salariés.

En application de l'article L. 3322-1 du code du travail, cette obligation s'applique à compter du premier exercice ouvert postérieurement à une période de cinq années civiles consécutives au cours desquelles le seuil d'effectif a été atteint ou dépassé.

? Une obligation différée de trois ans supplémentaires lorsque l'entreprise a préalablement conclu un accord d'intéressement

L'article L. 3322-3 du code du travail prévoit toutefois que lorsqu'une entreprise ayant conclu un accord d'intéressement vient à employer au moins cinquante salariés, les obligations de mise en place de la participation ne s'appliquent qu'au troisième exercice clos après le franchissement du seuil d'assujettissement à la participation, si l'accord est appliqué sans discontinuité pendant cette période.

En conséquence, une entreprise de moins de 50 salariés mettant en oeuvre un accord d'intéressement et qui franchit le seuil de 50 salariés en année N n'est tenue de mettre en place un régime de participation qu'à compter de l'année N+8, si son effectif demeure supérieur ou égal à 50 salariés pendant cette période et si elle applique l'accord de participation pendant cette même période.

? Supprimer le report de trois ans de l'obligation de mettre en place la participation pour les entreprises qui appliquent déjà un accord d'intéressement

L'article 8 de l'ANI du 10 février 2023 stipule que « pour déclencher l'obligation de participation, les règles actuelles nécessitent que les effectifs de l'entreprise aient été supérieurs à 50 salariés chaque année sur une période de 5 ans consécutifs. Une variation de l'effectif sur une année remet donc le compte des années à zéro. Par ailleurs, la présence d'un accord d'intéressement préalable reporte de 3 ans la mise en place de la participation. Afin de permettre une généralisation plus rapide du dispositif de participation, les organisations signataires proposent de supprimer la règle reportant l'obligation de participation en présence d'un accord d'intéressement. »

Le présent article transpose dans la loi cet article 8 de l'accord.

Son I abroge l'article L. 3322-3 du code du travail.

Son II introduit un régime transitoire pour les entreprises qui appliqueront le report de trois ans au moment de l'entrée en vigueur de la loi. Il prévoit que les entreprises qui ne sont tenues d'appliquer un régime de participation qu'à compter du troisième exercice clos après le franchissement du seuil d'assujettissement à la participation conserveront le bénéfice de cette disposition jusqu'au terme du report.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Les députés ont adopté un amendement rédactionnel du rapporteur lors de l'examen du texte en commission.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

La mesure proposée permettra de réduire les délais de mise en place de la participation au sein des entreprises qui atteignent le seuil de 50 salariés et qui appliquent un accord d'intéressement. Il contribue donc à développer la diffusion des outils de partage de la valeur dans les petites et moyennes entreprises, ainsi que l'ont souhaité les signataires de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023.

Le présent article assure une transposition nécessaire et fidèle des stipulations de l'article 8 de l'ANI. En conséquence, le rapporteur a proposé à la commission de l'adopter.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 5
Partage de la valeur en cas d'augmentation exceptionnelle du bénéfice

Cet article propose d'imposer aux entreprises d'au moins cinquante salariés qui disposent d'un délégué syndical de négocier sur les conséquences d'un bénéfice exceptionnel de l'entreprise dans le cadre du partage de la valeur.

La commission a adopté cet article modifié par un amendement rédactionnel.

I - Le dispositif proposé

A. Après suppression d'un premier dispositif jugé trop complexe, les possibilités de partage des bénéfices exceptionnels demeurent contraintes

Dans un contexte de reprise économique et d'inflation forte se révélant particulièrement favorable à certains secteurs, la question du partage de la valeur dans l'entreprise retrouve périodiquement une actualité politique et médiatique, a fortiori concernant les « bénéfices exceptionnels ».

L'échec de la prime de partage des profits (2011-2015)

Après la crise financière, dans un contexte analogue de reprise, le législateur a souhaité mettre en place en 2011 une prime de partage des profits dite « prime dividende »46(*). Le dispositif consistait pour les entreprises d'au moins cinquante salariés à être tenue de mettre en place une prime au profit de l'ensemble de leurs salariés lorsque leurs dividendes par action ou part sociale étaient en hausse par rapport à la moyenne des dividendes des deux années précédentes.

Cette prime a été supprimée par un amendement du sénateur Olivier Cadis47(*) lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2015, avec un avis favorable du Gouvernement. En effet, en plus d'une complexité substantielle des modalités de calcul, la prime a connu un faible recours : seuls 1,6 million de salariés en ont bénéficié contre un objectif initial de 4 millions, avec un montant moyen de 256 euros contre 700 euros d'objectif.

· Au titre de l'article L. 2242-1 du code du travail, les entreprises pourvues d'un représentant syndical doivent engager tous les quatre ans une négociation sur la rémunération, « notamment les salaires effectifs, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée dans l'entreprise ». Cependant la situation des augmentations exceptionnelles du bénéfice n'est pas directement prise en compte, puisqu'elle ne génère pas systématiquement un accroissement de la réserve spéciale de participation (RSP) à hauteur des bénéfices réalisés.

La définition d'un « bénéfice exceptionnel » est complexe et peu consensuelle au sein de l'entreprise. Cette recherche de caractérisation de « l'exceptionnel » trouve un écho dans d'autres notions de comptabilité ou de fiscalité :

les revenus exceptionnels dans le cadre de l'imposition sur le revenu48(*) (IR). L'administration fiscale les définis ainsi comme (i) des revenus qui ne sont pas appelés à se renouveler et qui dépassent la moyenne des revenus imposables des trois années précédentes ; ou (ii) certains revenus exceptionnels par nature49(*) ;

le résultat exceptionnel d'une entreprise, qui est un indicateur comptable couramment utilisé. Il correspond au résultat des opérations qui se sont déroulées pendant le cycle d'exploitation mais qui ne sont pas liées à l'activité normale ou récurrente de l'entreprise : il se calcule en ajoutant au résultat courant avant impôt les produits ou charges exceptionnels. Un produit exceptionnel peut par exemple être lié à la cession d'un bien, à la rentrée d'une créance considérée comme irrécouvrable ou aux pénalités de retard perçues.

Cependant ces notions ne permettent pas de dégager une définition univoque du « bénéfice exceptionnel », ce qui a incité les partenaires sociaux à lui préférer l'idée « d'augmentation exceptionnelle du bénéfice ».

· Dès lors, une entreprise qui souhaite associer ses salariés à la réalisation de bénéfices dits exceptionnels a alors trois solutions :

retenir une formule de calcul dérogatoire de la RSP, plus favorable aux salariés50(*) : cela ne concerne que 8 % des entreprises concernées par la RSP, et 25 % de ces entreprises qui ont plus de 1 000 salariés ;

opérer le versement d'un supplément de RSP au titre de l'exercice clos51(*) : dans le respect des plafonds fixés à l'article L. 3324-5 du code du travail. Cette possibilité semble néanmoins peu employée, et la direction générale du travail ne dispose pas de chiffrage à ce sujet52(*) ;

opter pour un dispositif d'intéressement des salariés53(*) avec une formule de calcul qui repose sur les résultats de l'entreprise ou ses bénéfices.

B. Les négociations relatives à la mise en place d'un régime de participation ou d'intéressement devront porter sur la définition d'une « augmentation exceptionnelle du bénéfice  »

Le présent article transpose l'article 9 de l'ANI qui vise à mieux prendre en compte le partage de la valeur en cas d'augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal.

Le I du présent article crée un nouveau chapitre après le chapitre V du titre IV du livre III de la troisième partie du code du travail intitulé « Partage de la valeur en cas d'augmentation exceptionnelle du bénéfice fiscal ». Il est composé d'un article unique L. 3346-1.

Le I de l'article L. 3346-1 nouvellement créé impose aux entreprises d'au moins cinquante salariés qui disposent d'un délégué syndical de négocier sur les conséquences d'une augmentation exceptionnelle du bénéfice de l'entreprise dans le cadre des dispositifs de partage de la valeur.

Les 1° à 3° du I de l'article L. 3346-1 précisent que ce partage de la valeur peut respectivement être mis en oeuvre :

- par un versement d'un supplément de participation prévu à l'article L. 3324-9 du code du travail ;

- le cas échéant par le versement d'un supplément d'intéressement prévu à l'article L. 3314-1 du même code ;

- par l'ouverture d'une nouvelle négociation visant à mettre en place un dispositif d'intéressement défini à l'article L. 3312-1, à abonder un des plans d'épargne concernés54(*) ou de verser la prime de partage de la valeur définie à l'article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

Le II de l'article L. 3346-1 précise que ces dispositions ne s'appliquent pas aux entreprises qui ont mis en place un accord de participation ou d'intéressement comprenant une clause spécifique prenant en compte ces augmentations exceptionnelles, ou un régime de participation fondé sur une base de calcul mieux distante par rapport à la formule de droit commun de l'article L. 3324-1.

Le II du présent article précise que les entreprises qui disposent déjà d'un accord d'intéressement ou de participation applicable au moment de l'entrée en vigueur de la loi engagent une négociation sur ce même thème avant le 30 juin 2024.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En commission, trois amendements rédactionnels ont été adoptés, ainsi qu'un amendement du rapporteur élargissant l'objet du renvoi à une négociation ultérieure du 3° du I de l'article L. 3346-1 au cas du versement d'un supplément d'intéressement ou de participation.

En séance l'Assemblée nationale a adopté un amendement de cohérence rédactionnelle, et cinq amendements identiques du rapporteur, de MM. Stéphane Viry et François Gernigon et de Mmes Michèle Peyron et Anne Bergantz, visant à préciser les critères pris en compte dans la définition de l'augmentation exceptionnelle du bénéfice lors de la négociation, il s'agit notamment de la taille de l'entreprise, son secteur d'activité, ses bénéfices des années précédents ou les éléments exceptionnels externes à l'entreprise intervenus avant réalisation du bénéfice. Cette liste de critères vise à répondre au risque constitutionnel d'incompétence négative souligné par l'avis rendu par le Conseil d'État sur le projet de loi55(*).

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le présent article transpose fidèlement la volonté exprimée dans l'ANI à l'article 9. Il permet d'inviter les entreprises de plus de cinquante salariés à procéder à la caractérisation d'une « augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal » et, le cas échéant, à en définir le partage lors des négociations relatives aux dispositifs de partage de la valeur.

Le rapporteur estime notamment que la fixation de critères à retenir lors de la définition de l'augmentation exceptionnelles des bénéfices, qui a été ajoutée par l'Assemblée nationale, bien que n'étant pas strictement envisagée par l'ANI, ne trahit pas son intention. En effet, elle concilie de manière satisfaisante le besoin de sécurisation juridique du dispositif au regard du risque d'incompétence négative, et la volonté de conserver des marges de manoeuvres au dialogue social afin d'adapter le dispositif à la nature de l'entreprise et de l'activité concernées.

Dans ces conditions, le rapporteur propose de simplement de procéder à une précision rédactionnelle (amendement COM-23).

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 6
Ajustement de la prime de partage de la valeur et prolongation
de son régime social et fiscal temporaire
pour les entreprises de moins de 50 salariés

Cet article propose que la prime de partage de la valeur puisse être attribuée deux fois par année civile, que son montant puisse être affecté aux plans d'épargne salariale et que le régime temporaire d'exonérations sociales et fiscales soit prolongé jusqu'à la fin de l'année 2026 pour les entreprises de moins de 50 salariés.

La commission a adopté cet article modifié par un amendement de coordination.

I - Le dispositif proposé

A. La prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, exonérée d'impôt et de cotisations sociales, applicable entre 2019 et 2021

Afin de lutter contre les difficultés économiques et sociales d'une partie de la population qui ont émergé lors de la crise dite des « gilets jaunes » puis de l'épidémie de covid-19, la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat (Pepa) a été instituée par la loi du 24 décembre 2018 portant mesures d'urgence économiques et sociales56(*), puis reconduite par la loi du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 202057(*) et par la loi du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 202158(*). Le dispositif s'est appliqué de 2019 à mars 2022 et permettait aux employeurs de verser à leurs salariés un prime exonérée de l'ensemble des impositions, cotisations et contributions assises sur la rémunération, tant pour l'employeur que pour le salarié, sous réserve de respecter les conditions suivantes :

- rémunération des salariés inférieure à 3 Smic ;

- non substitution de la prime aux autres éléments de rémunération ;

- versement dans le délai fixé par la loi.

Le montant de la prime exonérée était plafonné à 1 000 euros et a pu être porté, à compter de 2020, à 2 000 euros sous réserve de respecter l'une des conditions suivantes, qui ont varié selon l'année de versement :

- mise en oeuvre d'un accord d'intéressement ;

- conclusion d'un accord qui identifiait les salariés qui avaient contribué à la continuité de l'activité économique et au maintien de la cohésion sociale pendant l'état d'urgence sanitaire ;

- effectif inférieur à 50 salariés.

Entre 2019 et mars 2022, 8,3 milliards d'euros ont été distribués aux salariés pour un montant moyen de prime de 542 euros par bénéficiaire.

Distribution de la Pepa entre 2019 et 2022

Année

Montant de Pepa versé

Nombre d'établissements ayant versé la Pepa

Nombre de bénéficiaires d'une Pepa

Montant moyen de Pepa par bénéficiaire

2019

2,26 Md €

470 158

4 907 813

402 €

2020

3,21 Md €

585 806

5 214 619

593 €

2021

1,94 Md €

431 785

3 384 058

545 €

2022

0,89 Md €

145 742

1 800 694

494 €

Total

8,3 Md €

1 633 491

15 307 184

542 €

Source : Étude d'impact du projet de loi, pp. 68-69.

Si le dispositif a permis de soutenir significativement le pouvoir d'achat des salariés concernés, son application s'est néanmoins caractérisée par d'importantes disparités.

Les travaux conduits en 2022 par la commission des affaires sociales lors de l'examen du projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat59(*) ont permis de montrer que, dans sa version applicable entre 2021 et 2022, la Pepa avait été distribuée par 17 % des établissements susceptibles de la verser, avec d'importantes variations selon les secteurs d'activité. La distribution de la prime a été observée dans toutes les entreprises, quel que soit l'effectif, même si des écarts ont été constatés selon la taille des entreprises : 16 % des entreprises de moins de 10 salariés l'ont versée ; 29 % des entreprises d'au moins 2 000 salariés l'ont versée. En outre, 13 % des bénéficiaires ont perçu une prime dont le montant s'est élevé au plafond de 1 000 euros et 5 % des bénéficiaires ont reçu un montant égal à 2 000 euros.

B. La prime de partage de la valeur instituée en 2022

La loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat60(*) a créé une nouvelle prime au caractère pérenne, la prime de partage de la valeur (PPV) qui reprend un certain nombre de caractéristiques de la Pepa.

Cette prime peut être versée une fois par an à chaque salarié, dans la limite de 3 000 euros par salarié ou de 6 000 euros si l'entreprise met en oeuvre un accord d'intéressement.

Son montant peut différer selon les bénéficiaires en fonction de la rémunération, du niveau de classification, de l'ancienneté dans l'entreprise, de la durée de présence effective pendant l'année écoulée ou de la durée de travail prévue au contrat de travail. Elle ne peut se substituer à aucun des éléments de rémunération qui sont versés par l'employeur, aux augmentations de rémunération et aux primes prévues par un accord salarial, par le contrat de travail ou par les usages en vigueur dans l'entreprise. Le montant de la prime ainsi que, le cas échéant, le niveau maximal de rémunération des salariés éligibles et les conditions de modulation du niveau de la prime selon les bénéficiaires font l'objet d'un accord d'entreprise ou d'une décision unilatérale de l'employeur. Le versement de la prime peut être réalisé en une ou plusieurs fois, dans la limite d'une fois par trimestre, au cours de l'année civile.

Deux régimes d'exonérations distincts, l'un temporaire et l'autre pérenne, sont applicables selon la rémunération du bénéficiaire et le moment du versement de la prime. Elle est exonérée, dans la limite des plafonds de 3 000 et 6 000 euros :

- des cotisations sociales61(*) ainsi que de l'impôt sur le revenu, de la contribution sociale généralisée (CSG), de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), du forfait social et de la taxe sur les salaires lorsqu'elle est versée entre le 1er juillet 2022 et 31 décembre 2023 aux salariés percevant une rémunération inférieure à 3 Smic sur les 12 mois précédant le versement de la prime ;

- des seules cotisations sociales lorsqu'elle est versée à compter du 1er juillet 2022 aux salariés dont la rémunération excède 3 Smic et à compter du 1er janvier 2024 à l'ensemble des salariés quel que soit leur niveau de rémunération. Elle est donc soumise dans ce cas à la CSG, à la CRDS, à l'impôt sur le revenu, à la taxe sur les salaires et au forfait social pour les entreprises de plus de 250 salariés.

De juillet 2022 à juillet 2023, la prime de partage de la valeur a été versée à 9,5 millions de salariés pour un montant total de près de 6,4 milliards d'euros. Le montant moyen de prime versée était de 730 euros, soit un montant supérieur à ceux versés en moyenne au titre de la Pepa62(*).

Distribution de la prime de partage de la valeur (2022-2023)

Période

Montant de PPV versé

Nombre d'établissements ayant versé une PPV

Nombre de bénéficiaires d'une PPV

Montant moyen de PPV par bénéficiaire

2022

4,4 Md €

464 000

5 500 000

789 €

2022-janvier à juillet 2023

2,3 Md €

272 000

3 500 000

770 €

Source : Réponses de la direction de la sécurité sociale au questionnaire du rapporteur

Distribution de la prime de partage de la valeur selon la taille de l'entreprise (2022-2023)

Effectifs de l'établissement verseur

Montants cumulés de primes versées

Nombre d'établissements ayant versé

Part des établissements sur le total des établissements verseurs

0 à 9

1 205 541 041

324 297

57 %

10 à 19

600 219 399

59 012

10 %

20 à 49

756 787 798

46 377

8 %

50 à 99

427 059 605

20 529

4 %

100 à 249

596 052 449

22 654

4 %

250 à 499

465 204 314

16 597

3 %

500 à 1 999

855 600 469

33 374

6 %

2000 et plus

1 534 451 663

42 346

7 %

inconnu

40 418 380

6 341

1 %

Total

6 481 335 118

571 527

100 %

Source : Réponses de la direction de la sécurité sociale au questionnaire du rapporteur

C. Ajuster certaines règles applicables à la prime et prolonger le régime temporaire d'exonération pour les entreprises de moins de 50 salariés

Après avoir affirmé que la prime de partage de la valeur « ne doit pas se développer au détriment des dispositifs d'intéressement et de participation, et ce dans le respect du principe de non-substitution avec le salaire » les signataires de l'ANI du 10 février 2023 ont demandé, à l'article 10 de l'accord, les évolutions suivantes du cadre légal et réglementaire de la prime :

- ouvrir la possibilité de placer la PPV dans un plan d'épargne entreprise et/ou d'épargne retraite ;

- permettre l'octroi d'au plus deux PPV chaque année dans la limite du plafond et du nombre de versements actuellement prévus ;

- à compter du 1er janvier 2024, maintenir le régime fiscal et social en vigueur au 1er janvier 2023 pour les entreprises de moins de 50 salariés ; pour les entreprises de plus de 50 salariés, le cadre prévu par la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat est maintenu.

Le présent article a pour objet de transposer dans la loi les stipulations de l'article 10 de l'ANI, en modifiant l'article 1er de la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

? Possibilité de verser deux primes au titre d'une année civile

Le modifie le IV de l'article 1er de la loi du 16 août 2022 afin de prévoir que deux primes de partage de la valeur peuvent être attribuées au titre d'une même année civile.

Le modifie le V afin que, lorsque deux primes sont versées au cours d'une même année civile, leurs montants cumulés soient exonérés dans la limite globale de 3 000 euros ou de 6 000 euros si l'entreprise est couverte par un accord d'intéressement.

? Création de nouveaux régimes d'exonérations

Le insère, après le VI du même article 1er, trois paragraphes VI bis, VI ter et VI quater.

Le VI bis prévoit que les primes de partage de la valeur versées entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026 par une entreprise de moins de 50 salariés à ceux de ses salariés ayant perçu au cours des douze mois précédent le versement une rémunération inférieure à 3 Smic sont exonérées des mêmes cotisations, contributions et impositions que pour la PPV temporaire en vigueur jusqu'à fin 2023, soit :

- des cotisations également exonérées dans le cadre du régime pérenne (cf. supra) ;

- de l'impôt sur le revenu ;

- de la CSG et de la CRDS.

Le VI ter prévoit que lorsqu'un bénéficiaire a adhéré à un plan d'épargne salariale ou à un plan d'épargne retraite d'entreprise et qu'il affecte à la réalisation de ce plan tout ou partie des sommes qui sont attribuées au titre de la ou des PPV qu'il perçoit, dans un délai défini par décret, ces sommes sont exonérées d'impôt sur le revenu dans les limites de 3 000 ou 6 000 euros prévues pour les exonérations de cotisations.

Le VI quater prévoit que les primes exonérées sont incluses dans le montant du revenu fiscal de référence

En conséquence, le modifie le I de l'article 1er de la loi du 16 août 2022 afin de préciser que la prime bénéfice de l'exonération prévue au VI bis, inséré par le 5° du présent article. Par ailleurs, le supprime le deuxième alinéa du VI, qui prévoit que la prime exonérée est incluse dans le montant du revenu fiscal de référence, cette disposition étant reprise au VI quater inséré par le 5° du présent article.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Les députés ont adopté cinq amendements rédactionnels du rapporteur lors de l'examen du texte par la commission des affaires sociales.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

L'instauration de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat puis de la prime de partage de la valeur a permis à de nombreux salariés de bénéficier d'une redistribution de la valeur créée par les entreprises, en particulier dans les petites et les moyennes entreprises, dans lesquelles l'intéressement et la participation sont moins développés.

La simplicité de versement de la prime et son régime social et fiscal incitatif ont permis une large diffusion du dispositif qui a contribué au soutien du pouvoir d'achat des salariés, dans un contexte de forte inflation.

Si le régime fiscal et social de la prime représente un perte de recettes pour les finances publiques comparativement à des hausses de salaires, il convient de souligner que la situation économique des entreprises depuis 2020, marquée par la crise sanitaire puis par une forte inflation et des tensions d'approvisionnement, n'aurait pas permis à de nombreuses entreprises de procéder à d'importantes hausses de salaires, qui engagent à long terme les employeurs. En conséquence, bien que certaines études estiment qu'il existe un effet de substitution entre la PPV et les salaires, l'ampleur et la réalité de cet effet demeure difficile à mesurer, puisque le nombre d'entreprises qui auraient procédé à des revalorisations salariales en l'absence de prime ne peut être estimé. En conséquence, le rapporteur considère que la prime contribue au développement du partage de la valeur dans les entreprises et au soutien du pouvoir d'achat de ménages, sans faire obstacle aux négociations salariales qui ont cours au sein des branches et des entreprises.

Le contexte actuel, qui demeure marqué par une forte inflation, justifie que le régime social et fiscal temporaire adossé à la prime soit prolongé pour trois années supplémentaires pour les salariés rémunérés jusqu'à 3 Smic, en restreignant son application aux entreprises de moins de 50 salariés. Ces entreprises sont celles qui ne sont pas tenues de mettre en place un régime de participation et qui développent peu l'intéressement. Leurs salariés bénéficient donc moins des dispositifs de partage de la valeur que ceux qui sont employés par des entreprises de plus de 50 salariés.

Le dispositif proposé introduit ainsi une incitation du même ordre que de précédentes mesures dont l'objectif était d'inciter les petites et moyennes entreprises à développer l'intéressement et la participation, telles que l'exonération de forfait social, instituée depuis le 1er janvier 2019, pour les entreprises de moins de 50 salariés sur les sommes réparties au titre de la participation et pour celles de moins de 250 salariés sur les sommes versées au titre de l'intéressement.

Pour ces raisons, le rapporteur soutient les mesures demandées par les signataires de l'accord national interprofessionnel concernant la prolongation du régime social et fiscal temporaire adossé à la prime.

En outre, les ajustements proposés par les signataires, qui permettront de verser deux primes au titre d'une même année et d'affecter les sommes versées aux plans d'épargne salariale, contribueront à inscrire la prime dans les outils de partage de la valeur à la disposition des entreprises.

Au total, le présent article assure donc une transposition fidèle et nécessaire des stipulations de l'article 10 de l'ANI et recueille le soutien du rapporteur.

La commission a adopté l'amendement COM-24 du rapporteur qui tire les conséquences de la possibilité de verser deux primes au cours d'une même année civile pour les primes qui seront versées aux titre de l'année 2023 dans le cadre du régime d'exonération temporaire en vigueur jusqu'à la fin de cette année.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 7
Prime de partage de la valorisation de l'entreprise

Cet article propose de créer un nouveau plan de partage de la valorisation de l'entreprise permettant, le cas échéant, de verser aux salariés une prime de partage de la valorisation de l'entreprise (PPVE) en cas de progression de la valorisation sur une période de trois ans, tout en bénéficiant d'un traitement fiscal et social incitatif.

La commission a adopté cet article, modifié par un amendement rédactionnel, en supprimant une demande de rapport au Gouvernement.

I - Le dispositif proposé

A. Des possibilités de partage de la valorisation de l'entreprise avec les salariés limitées à l'actionnariat salarié

Parmi les nombreux dispositifs de partage de la valeur, ceux qui relèvent de l'actionnariat salarié présentent la particularité de faire reposer ce partage sur la valorisation de l'entreprise. Cette forme d'intéressement permet d'inciter et de valoriser l'implication des salariés à long terme, mais également de répondre à la situation de certains secteurs ou de certaines entreprises pour lesquelles la valorisation peut évoluer plus sensiblement que les résultats (start-up, etc.).

· Chaque année plus de 600 000 salariés bénéficient d'un tel dispositif63(*), tandis que 3,5 millions de salariés étaient actionnaires de leur entreprise en 202064(*). Ces « salariés actionnaires » ont principalement bénéficié d'un des régimes prévus par la loi :

- les options de souscription ou d'achat d'actions par les salariés65(*) (stock-options) ;

- l'attribution gratuite d'action (AGA) aux salariés66(*) ;

- l'augmentation de capital réservé aux adhérents de plan d'épargne d'entreprise (PEE)67(*) ;

- les bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE)68(*).

· Cependant ces dispositifs souffrent de façon structurelle de freins à la diffusion au sein des entreprises :

- la forme même de la société par action limite l'accès des salariés à ces dispositifs, et notamment concernant les salariés des petites et moyennes entreprises (PME) et très petites entreprises (TPE) puisque les opérations de cotation demeurent complexes et couteuses. Cette difficulté est attestée par les statistiques produites par la Dares :

Opérations d'actionnariat salarié en 2020 selon la taille des entreprises

 

Part d'entreprises concernées

Part des salariés potentiellement couverts

1 à 9 salariés

0,5 %

0,01 %

10 à 49 salariés

0,8 %

0,4 %

50 à 99 salariés

1,6 %

0,8 %

100 à 249 salariés

3,9 %

2,0 %

250 à 499 salariés

5,9 %

2,7 %

500 à 999 salariés

9,1 %

4,4 %

1 000 salariés ou plus

17,2 %

10,5 %

Source : Dares, Quelle place occupe l'actionnariat salarié en 2020 ?, Focus n°7, 2 février 2023

l'actionnariat salarié dépasse également la seule association à la progression de la valorisation de l'entreprise, puisque la part du capital social détenue confère également un droit de vote proportionnel lors des assemblées générales, et plus largement un pouvoir de contrôle sur l'entreprise. Cette association à la gouvernance constitue un des intérêts de l'actionnariat salarié, mais peut également décourager certains dirigeants d'y recourir.

Les phantom stocks : intéresser les salariés
sur le cours d'une société sans déformer l'actionnariat

Apparus pour la première fois à la fin des années 1950 aux Etats-Unis69(*), les phantom stocks se sont depuis développés dans les pays anglo-saxons, et présentent une alternative aux stock-options en matière d'intéressement des salariés.

Les phantom stock plan permettent de doter les salariés des avantages du statut d'actionnaire, à commencer par celui procuré par l'appréciation de la valeur de la société, sans pour autant leur accorder une détention du capital social de l'entreprise :

- attribution : les salariés se voient donc attribuer des actions virtuelles, « units », qui peuvent avoir être gratuites ou bien avoir une valeur « notionnelle » correspondant au cours théorique de l'action à la date de l'attribution ;

- période d'attente : les actions fantômes ne deviennent matures qu'après une période d'attente, « vesting period », et à condition de remplir certains critères définis par le plan, à commencer par le maintien de la relation de travail. Cette période est généralement comprise entre deux et cinq ans, et est parfois échelonnée ;

divident equivalent : un mécanisme peut, le cas échéant, permettre aux actionnaires fantômes de bénéficier d'un dividende virtuel similaire à celui versé aux actionnaires réels ;

- maturité : à l'expiration de la période d'attente, le salarié se voit verser une somme basée sur la valeur de l'action sous-jacente à ce moment. Cette somme correspond au cours de l'action si l'action fantôme était gratuite, ou bien à la différence entre le cours actuel et le cours d'attribution en cas d'action à valeur notionnelle.

La littérature afférente souligne les différents avantages des phantom stocks :

- faire bénéficier les salariés de l'accroissement de la valeur du capital, sans nécessairement supporter les coûts d'une cotation ;

- ne pas déformer la structure de l'actionnariat, ni diluer les actionnaires historiques : notamment en cas d'actionnariat fermé, familial par exemple ;

- particulièrement correspondre aux contraintes des start-up, dans lesquelles les stock-options peuvent envoyer un signal négatif aux investisseurs qui craignent de voir leur participation être diluée.

B. La mise en place d'une prime de partage de la valorisation de l'entreprise

1. Une retranscription de l'article 21 de l'ANI en deux temps afin de satisfaire aux exigences de la loi organique

L'article 21 de l'ANI invitait à la mise en place d'un nouveau dispositif de partage de la valeur permettant d'intéresser les salariés via un plan et une prime « qui reflète[nt] (...) la valorisation de l'entreprise ». Cette idée, qui se réfère aux phantom stocks, propose une alternative à l'attribution gratuite d'action (AGA) pour les entreprises qui ne peuvent y prétendre.

L'ANI précise que les salariés devraient recevoir une prime bénéficiant d'un traitement fiscal et social incitatif dans l'hypothèse où la valorisation de l'entreprise aurait augmenté sur une période de trois ans à compter de la mise en oeuvre du plan.

La transposition de cet article par le vecteur législatif ordinaire se heurte à une difficulté soulevée par l'avis du Conseil d'État70(*). L'article L.O. 111-3-16 du code de la sécurité sociale prévoit qu'une mesure temporaire d'exonération de cotisations sociales affectées aux régimes obligatoires de base ayant un effet sur les recettes de ces régimes ne peut être inscrite en loi ordinaire à deux conditions :

- l'exonération doit être compensée aux régimes obligatoires de base par le budget de l'État ;

- l'exonération doit « être établie pour une durée inférieure à trois ans ».

L'étude d'impact prévoit ainsi d'instaurer la prime de partage de la valorisation de l'entreprise en deux temps afin de répondre à cette contrainte organique :

- dans un premier temps en inscrivant l'exonération sociale et fiscale des primes pour les années 2026 à 2028 en loi ordinaire, par le biais de l'article 7 du présent projet de loi ;

- dans un second temps seulement, en pérennisant le dispositif par le biais d'une disposition en loi de financement de la sécurité sociale pour 202471(*).

2. Le dispositif proposé

a) Entreprises et bénéficiaires concernés

· Le I précise le champ d'application du plan de partage de la valorisation de l'entreprise, qui est ouvert à tous les employeurs de droit privé, aux établissements publics à caractère industriel et commercial, et aux établissements publics administratifs lorsqu'ils emploient du personnel de droit privé. Le II ouvre également cette possibilité aux groupes d'entreprises juridiquement indépendantes ayant établi des liens financiers et économiques72(*), et aux groupes constitués par des sociétés régies par le statut de la coopération73(*).

· Le III restreint le bénéfice du plan de partage de la valorisation de l'entreprise aux salariés répondant aux conditions suivantes :

- condition d'ancienneté : par défaut le plan ne bénéficie qu'aux salariés bénéficiant d'une ancienneté d'au moins douze mois dans l'entreprise, entendue de manière cumulative à la date à partir de laquelle court le délai de trois ans. L'accord peut néanmoins fixer de manière dérogatoire cette condition d'ancienneté à une durée inférieure ;

- condition de continuité : la prime de partage de la valorisation de l'entreprise ne bénéficie pas aux salariés qui quittent définitivement l'entreprise pendant la durée de trois ans, de même que ceux qui atteignent l'ancienneté requise au cours cette même durée.

b) Le plan de partage de la valorisation

Le IV permet aux salariés qui sont concernés par le plan de bénéficier d'une prime de partage de la valorisation de l'entreprise (PPVE) dans le cas où la valeur de l'entreprise a augmenté au cours des trois années suivant la date arrêtée. Son montant est égal à la multiplication du montant de référence qui est fixé pour chaque salarié par le taux de variation de la valeur de l'entreprise. Si ce taux de variation est nul ou négatif, le salarié ne bénéficie pas de la PPVE.

Le V ouvre la possibilité de moduler le montant de référence qui est fixé pour chaque salarié salariés en fonction de la rémunération, du niveau de classification, ou de la durée de temps de travail.

Le VI définit le taux de variation de la valeur de l'entreprise comme mesurant la différence de valeur de l'entreprise entre la date initiale retenue et trois ans après.

La valeur de l'entreprise est obtenue différemment selon la nature de l'entreprise :

- pour les entreprises cotées, il s'agit de la moyenne mobile de la capitalisation boursière de l'entreprise sur les trente jours précédant la date de début et de fin de la durée de trois ans ;

- pour les autres entreprises, la formule de valorisation de l'entreprise est déterminée par l'accord. Cette formule doit être identique au début et à la fin de la période de trois ans, s'appliquer sur des bases consolidées ou, à défaut, en tenant compte des éléments financiers issus des filiales significatives. Elle s'adapte à la situation de l'entreprise, au besoin à l'aide de comparaison avec d'autres entreprises du secteur, et tient compte de la situation nette comptable, de la rentabilité et des perspectives d'activité.

À défaut de formule de valorisation de l'entreprise, ou si elle se révèle inadaptée, la valorisation de l'entreprise correspond alors au montant de l'actif net réévalué, sur la base du bilan le plus récent disponible.

Les différentes méthodes de valorisation des entreprises

La valorisation d'une entreprise vise à établir la valeur financière d'une entreprise, ce qui revient à la fois à prendre en compte sa performance passée et son potentiel de développement. Cet exercice prend une importance particulière dans le cas d'une recherche de financement, mais aussi dans l'éventualité d'une cession.

Compte tenu de la variabilité des secteurs et des types d'entreprises, les analystes recourent à différentes méthodes de valorisation, qui peuvent se regrouper en trois familles :

· les méthodes d'évaluation patrimoniales, qui consistent à évaluer le patrimoine de l'entreprise en évaluant les actifs dont elle dispose avant de leurs soustraire la valeur de ses dettes. Cela permet notamment de cerner la valeur de liquidation de l'entreprise ;

· les méthodes comparatives, qui cherchent à rapprocher la valeur de l'entreprise des entreprises qui lui sont similaires (taille, secteur, etc.) et dont la valeur vénale a été révélée lors d'une transaction ;

· les méthodes de rendement, qui déduisent la valeur de l'entreprise de sa capacité future à dégager des bénéfices. La valorisation est alors égale à la somme à perpétuité des résultats projetés pour l'entreprise, actualisée par un taux qui prend en compte la préférence pour le présent et le risque encouru sur les résultats futurs.

c) La prime de partage de la valorisation de l'entreprise (PPVE)

Le VII fixe un plafond au montant des primes distribuées à un même salarié qui ne peut dépasser, au titre d'un même exercice, les trois quarts du montant du plafond de la sécurité sociale (Pass)74(*).

Le VIII limite à sept mois le délai pour arrêter les sommes dues aux salariés à l'issue du délai de trois ans, et permet de réaliser le versement en une ou plusieurs fois dans les douze mois.

Le IX applique le principe de non-substitution à la PPVE, il précise en effet que la non-substitution s'entend :

au sens classique75(*), entre les éléments de rémunérations pris en compte pour la détermination de l'assiette des cotisations sociales76(*) et les sommes versées au titre de la prime. En précisant que ces éléments de rémunérations concernés sont ceux existants lors de la mise en place du dispositif, mais également ceux qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales, contractuelles ou d'usage (augmentations de rémunération, primes prévues par accord salarial, par le contrat de travail ou l'usage) durant la période des trois ans ;

mais aussi au sens de la substitution entre la prime instituée et les autres dispositifs d'épargne salariale ou de partage de la valeur.

En cohérence, le deuxième alinéa du IX exclut la PPVE de l'assiette prise en compte pour l'application de la législation du travail.

d) La mise en oeuvre par accord

Le X fixe les modalités de mise en place du plan de partage de la valorisation par accord. Cet accord s'institue :

- par convention ou accord collectif de travail ;

- par accord entre l'employeur et les représentants d'organisations syndicales représentations dans l'entreprise ;

- par accord conclu au sein du comité social et économique ;

- par ratification aux deux tiers du personnel d'un projet d'accord proposé par l'employeur.

L'accord dont il est question est établi sur rapport spécial du commissaire aux comptes de l'entreprise, ou à défaut par un commissaire aux comptes désigné à cet effet par l'organe compétent de l'entreprise.

Le XI précise le contenu de l'accord, qui définit :

- le montant de référence par salarié ;

- le cas échéant les conditions de modulation du montant de référence entre salariés ;

- la formule de valorisation retenue dans le cas des entreprises non cotés ;

- les dates d'appréciation initiale de la valeur de l'entreprise et de fin du délai de trois ans ;

- la ou les dates de versement de la prime.

La reconduction du plan peut être prévue dans le même accord, auquel cas il précise également les modalités énoncées qui s'appliquent pour la reconduction.

e) Le traitement fiscal et social de la prime

Le XII permet au salarié bénéficiant de la PPVE d'affecter, dans un délai défini par décret, tout ou partie des sommes versées à un dispositif d'épargne salarial auquel il a adhéré77(*). Dans ce cas, les sommes affectées bénéficient d'une exonération d'impôt sur le revenu dans la limite de 5% du montant maximum d'attribution de prime pour un exercice, soit à titre d'exemple 29 328 € en 202378(*).

L'employeur est tenu d'informer spécifiquement le salarié des sommes et du délai pour permettant d'opter pour cette affectation de la PPVE.

Le XIII prévoit que la PPVE bénéficie d'une exonération de :

- l'ensemble des cotisations sociales d'origine légale ou conventionnelle79(*) à la charge du salarié et de l'employeur ;

- des participations, taxes et contributions prévues à l'article 235 bis du code général des impôts ;

- des contributions au titre de la formation professionnelle et de l'alternance prévue à l'article L. 6131-11 du code du travail.

En revanche la PPVE est soumise à une contribution patronale de 20 % au profit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse sur le modèle de la contribution prévue pour dispositifs d'attribution d'option de souscription, d'achat d'action et d'attribution gratuite d'actions pour les salariés80(*).

L'alinéa 3 du XIII précise qu'il n'est applicable qu'aux primes versées au cours des exercices 2026 à 2028, conformément à la disposition de l'article L.O. 111-3-16 du code de la sécurité sociale, qui prévoit qu'une mesure d'exonération de cotisations sociales affectées aux régimes obligatoires de base ne peut être établie par une loi ordinaire pour une durée de plus de trois ans.

Le XIV prévoit un mécanisme de sécurisation juridique pour l'employeur des exonérations sociales et fiscales énoncées aux XII et XIII. Il prévoit pour cela le dépôt de l'accord auprès de l'autorité administrative dans des conditions déterminées par décret.

En l'absence d'observation des organismes de recouvrement81(*) ou des caisses de sécurité sociale82(*), ces exonérations sont réputées acquises.

f) Application et évaluation de la mesure

Le XV renvoie à un décret les modalités d'application du présent article.

Le XVI étend l'application du présent article aux seules collectivités de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon parmi celles relevant du principe d'identité législative83(*), en remplaçant les références du code de la sécurité sociale par les références aux dispositions applicables localement.

Le XVII prévoit que le Gouvernement remette au Parlement un rapport d'évaluation de la mise en oeuvre des dispositions du présent article avant le 30 septembre 2025.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En commission, l'Assemblée nationale a adopté vingt-et-un amendements rédactionnels proposés par le rapporteur, ainsi qu'un amendement du même auteur précisant explicitement que la contribution patronale de 20 % versée à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) par l'employeur sur les sommes dues au titre de la PPVE était exclusive du forfait social, au même titre que l'attribution d'actions gratuites.

En séance, l'Assemblées nationale a adopté trois amendements rédactionnels proposés par le rapporteur, ainsi qu'un amendement du Gouvernement visant à lever le gage introduit à l'occasion de l'exclusion du forfait social portant sur la PPVE en Commission.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le présent article transpose fidèlement la volonté de l'ANI, exprimée à son article 21, de mettre en place un dispositif d'intéressement lié à la valorisation de l'entreprise à l'intention d'un public plus large que l'actionnariat salarié, qui permettrait notamment de bénéficier aux salariés des entreprises non cotées.

Les conditions d'ancienneté et de continuité assorties au versement de la PPVE en font un dispositif efficace pour valoriser la fidélité et l'engagement des salariés dans le long terme au sein de l'entreprise. En outre, la PPVE permet également d'intéresser les salariés à la valorisation de l'entreprise sans pour autant déformer la structure de l'actionnariat, ce qui peut s'avérer dirimant dans le cas des start-up ou des entreprises dites familiales.

Pour l'ensemble de ces raisons, le rapporteur est convaincu de l'intérêt de ce dispositif. Cependant, et conformément à la doctrine du Sénat, le rapporteur propose de supprimer le XVII du présent article, qui constitue une demande de rapport d'évaluation d'un dispositif qui n'est pas expérimental (amendement COM-27). Il propose également d'apporter des modifications d'ordre rédactionnelles afin d'améliorer l'intelligibilité du dispositif (amendements COM 25 et COM-26).

Enfin, le rapporteur constate que la pérennisation du régime social favorable de la PPVE mentionnée dans l'étude d'impact n'a, à ce jour, pas fait l'objet d'une disposition dans le projet de loi de finance de la sécurité sociale (PLFSS) déposé par le Gouvernement. Cette disposition fera peut-être l'objet d'un ajout par voie d'amendement de la part du Gouvernement, mais cette manière de procéder, qui n'est pas isolée, est de nature à réduire la bonne information des parlementaires ainsi que la sincérité du débat sur la loi de financement de sécurité sociale.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 8
Affectation des primes de partage et la valeur et de valorisation de l'entreprise à des plans d'épargne salariale

Cet article tire les conséquences des dispositions proposées aux articles 6 et 7 du projet de loi, en prévoyant que les sommes perçues au titre de la prime de partage de la valeur et de la prime de partage de la valorisation de l'entreprise pourront être affectées à un plan d'épargne d'entreprise ou à un plan d'épargne retraite collectif.

La commission a adopté cet article modifié par un amendement rédactionnel.

I - Le dispositif proposé

Les signataires de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023 ont souhaité rapprocher la prime de partage de la valeur (PPV) des autres dispositifs de partage de la valeur en permettant notamment que les sommes versées puissent être affectées à des plans d'épargne salariale. Ainsi, l'article 10 de l'accord prévoit d' « ouvrir la possibilité de placer la PPV dans un plan d'épargne entreprise et/ou d'épargne retraite lorsqu'il(s) existe(nt). La PPV a en effet vocation à être intégrée à l'épargne salariale. Son régime social et fiscal sera ainsi parfaitement identique à celui de l'intéressement à partir de 2024. Cette mesure permettra aux salariés qui le souhaitent de verser tout ou partie de la prime de partage de la valeur dans un dispositif d'épargne salariale ou d'épargne retraite dans les mêmes conditions que pour le versement d'une prime d'intéressement. Les entreprises ont la possibilité d'abonder le cas échéant selon les modalités en vigueur pour l'intéressement. »

Par ailleurs, les signataires de l'accord ont souhaité créer un nouveau dispositif de partage de la valeur, le plan de partage de la valorisation de l'entreprise (PPVE). Ils ont précisé, à l'article 21 de l'accord, qu'au titre de ce dispositif, « les sommes versées peuvent être placées sur un dispositif d'épargne salariale comme les autres dispositifs de partage de la valeur. »

Ces mesures sont transposées aux articles 6 et 7 du projet de loi84(*).

Le présent article tire les conséquences des dispositions proposées à ces articles en assurant les coordinations nécessaires à l'affectation possible des sommes versées au titre de ces deux primes à des plans d'épargne d'entreprise ou à des plans d'épargne retraite collectifs.

Le du I modifie l'article L. 3332-3 du code du travail afin d'ajouter la PPV et la PPVE parmi les dispositifs de partage de la valeur dont les sommes peuvent être affectées à un plan d'épargne d'entreprise.

Le du I modifie l'article L. 3333-4 du code du travail afin de préciser que le plan d'épargne interentreprises peut recueillir les sommes provenant de la PPV et de la PPVE.

Le du I modifie le premier alinéa de l'article L. 3334-6 du code du travail pour que les sommes issues de la PPV et de la PPVE puissent être placées dans un plan d'épargne pour la retraite collectif.

Le du II modifie le 2° de l'article L. 224-2 du code monétaire et financier pour que les sommes versées dans un plan d'épargne retraite puissent provenir des sommes versées au titre de la PPV et de la PPVE.

Le du II modifie l'article L. 224-26 du code monétaire et financier pour rendre obligatoire l'institution d'un comité de surveillance d'un plan d'épargne retraite obligatoire lorsque ce plan est alimenté par des fonds issus de la PPV et de la PPVE, au même titre que lorsqu'il est alimenté par l'intéressement et la participation.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En commission, les députés ont adopté un amendement du rapporteur qui modifie l'article L. 3332-11 du code du travail afin de permettre à l'employeur d'abonder les sommes issues de la prime de partage de la valeur affectées à un plan d'épargne d'entreprise ou à un plan d'épargne retraite, transposant ainsi l'article 10 de l'accord national interprofessionnel.

En séance publique, les députés ont adopté un amendement de levée de gage, déposé par le Gouvernement.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le rapporteur soutient le dispositif proposé, qui assure une transposition fidèle des stipulations des articles 10 et 21 de l'ANI, en complément des mesures proposées aux articles 6 et 7 du projet de loi qui portent respectivement sur la prime de partage de la valeur et sur le plan de partage de la valorisation de l'entreprise. Le présent article n'appelle pas d'autres observations que celles émises par le rapporteur sur les articles 6 et 7 du projet de loi.

La commission a adopté l'amendement rédactionnel COM-28 du rapporteur.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

TITRE III : SIMPLIFIER LA MISE EN PLACE DES DISPOSITIFS DE PARTAGE DE LA VALEUR

Article 9
Versement d'avances sur l'intéressement et la participation des salariés

Cet article propose d'ouvrir la possibilité aux accords d'intéressement et de participation de prévoir le versement d'avances en cours d'exercice.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le versement d'avances sur les sommes dues n'est possible que dans le cadre des dispositifs d'intéressement

· Les modalités de versement des sommes dues au titre de l'intéressement ou de la participation sont respectivement fixées par la loi et le règlement. Le code du travail85(*) prévoit en effet que le versement intervient au plus tard le dernier jour du cinquième mois qui suit la clôture de l'exercice, et à défaut les sommes concernées produisent un intérêt de retard égal à 1,33 fois le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées (TMO)86(*).

La destination de ces versements dépend alors de la situation du salarié et de sa décision :

si le salarié ne dispose que d'un accord d'intéressement : il perçoit immédiatement la somme due ;

- si le salarié dispose également d'un plan d'épargne salariale : il ne perçoit immédiatement la somme due qu'à la condition d'en faire la demande dans les quinze jours après avoir été informé du calcul des sommes dues87(*) ; à défaut elles sont affectées à un plan d'épargne salariale et bloquées durant la durée légale88(*).

Les modalités d'information des bénéficiaires sur le régime mis en place

L'accord d'intéressement comme l'accord de participation doivent prévoir les modalités d'information de chaque bénéficiaire, ainsi que la date à laquelle le bénéficiaire est présumé avoir été informé.

Pour l'accord d'intéressement89(*), l'information porte sur :

- les sommes qui sont attribuées au titre de l'intéressement ;

- le montant dont le bénéficiaire peut demander le versement ;

- le délai dans lequel il peut formuler sa demande ;

- l'affectation des sommes au plan d'épargne d'entreprise (PEE) ou au plan d'épargne interentreprises (PEI), lorsqu'ils existent, en cas d'absence de demande de sa part.

Pour l'accord de participation90(*), l'information porte sur :

- les sommes qui sont attribuées au titre de la participation ;

- le montant dont le bénéficiaire peut en tout ou partie demander le versement ;

- le délai dans lequel il peut formuler sa demande ;

- l'affectation d'une quote-part des sommes au plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) ou au plan d'épargne retraite d'entreprise collectif (Pereco) en cas d'absence de réponse de sa part.

· Le versement d'avances sur les sommes dues au titre de l'intéressement ou de la participation n'est pas envisagé par le code du travail. Cependant une circulaire91(*) encadre cette possibilité dans le seul cas de l'intéressement ; compte tenu du caractère aléatoire de ce dernier, elle précise notamment que :

- lorsque les avances versées au cours de l'année dépassent l'enveloppe totale de l'intéressement, le trop perçu est intégralement reversé par les salariés92(*) ;

- lorsque l'accord d'intéressement comporte une clause de versement d'avances, il doit également comporter une clause de reversement des trop-perçus dans le but d'assurer une bonne information des salariés ;

- les clauses prévoyant l'acquisition définitive d'avances par les salariés en cas de trop-perçu sont considérées comme illégales.

Concernant la participation, le versement d'avances est exclu par la jurisprudence : la Cour de cassation a jugé que « l'ensemble des dispositions légales et réglementaires étant d'ordre public absolu, il ne peut y être dérogé qu'avec l'autorisation expresse de la loi »93(*).

B. La sécurisation du versement d'avance sur intéressement et participation lors de la mise en place de l'accord afférent

Le présent article transpose l'article 12 de l'ANI, dans le but d'inscrire dans la loi la possibilité pour les accords d'intéressement ou de participation de prévoir le versement d'avances, en cours d'exercice, sur les sommes dues au titre du dispositif correspondant.

Son 1er alinéa crée un nouveau chapitre après le chapitre V du titre IV du livre III de la troisième partie du code du travail intitulé « Avances sur intéressement et participation ». Il est composé d'un article unique L. 3348-1 qui reprend la solution juridique ménagée par la circulaire précitée pour l'intéressement en l'étendant aux accords de participation.

Son 2e alinéa prévoit que, le cas échéant, les avances seront versées après que le bénéficiaire ait donné son accord, et selon une périodicité qui ne peut être inférieure au trimestre. Cette périodicité plancher vise à diminuer le risque d'une substitution de ces avances avec les éléments de rémunération.

Son 3e alinéa dispose que, lorsque le cumul des avances au titre de l'intéressement ou de la participation dépasse les droits définitifs attribués au terme de l'exercice, le trop-perçu est intégralement reversé à l'employeur par le biais d'une retenue sur salaire, dans les conditions prévues à l'article L. 3251-3 du même code.

Son 4e alinéa précise que lorsque le trop-perçu a été versé sur un plan d'épargne salariale, il est alors considéré comme versement volontaire du bénéficiaire, et n'ouvre pas droit au traitement fiscal et social attaché à l'intéressement et à la participation94(*).

Son 5e alinéa article renvoie à un décret la détermination des conditions d'information des bénéficiaires.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté trois amendements rédactionnels proposés par le rapporteur au stade de la commission, ainsi qu'un amendement du même auteur énumérant les exonérations remises en cause lorsqu'une avance versée sur un plan d'épargne salariale conduit à l'existence d'un trop-perçu.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le présent article transcrit fidèlement la demande de sécurisation juridique des avances sur intéressement ou participation exprimée dans l'ANI.

Cette possibilité permet en effet de laisser plus de souplesse aux employeurs, afin d'anticiper le versement des sommes dues au titre de la participation ou de l'intéressement. Cela se justifie notamment dans les cas où les résultats de l'entreprise, constatés au cours de l'exercice ou attendus, ne laissent pas de doute quant à l'existence prochaine de sommes dues au titre des dispositifs de partage de la valeur.

Sur le plan juridique, la jurisprudence de la Cour de cassation ayant considéré que les dispositions qui se rapportent à la participation étaient d'ordre public, la mise en place d'avances sur ce dispositif nécessitait de recourir à un vecteur législatif. Si la mesure équivalente pour l'intéressement était valablement encadrée par de seules dispositions règlementaires, le rapporteur considère que, dans un souci de cohérence et d'intelligibilité de la norme pour les acteurs, une inscription dans le domaine de la loi se justifie.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 9 bis
Nouveau calcul de la participation en cas de rectification
des résultats de l'entreprise

Cet article propose d'inscrire dans la loi des dispositions figurant dans la partie réglementaire du code du travail et qui prévoient que lorsque la déclaration des résultats d'un exercice est rectifiée par l'administration ou par le juge de l'impôt, le montant de la participation des salariés au bénéfice de cet exercice fait l'objet d'un nouveau calcul tenant compte des rectifications apportées.

La commission a supprimé cet article.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article a été introduit à l'Assemblée nationale lors de la discussion du texte en séance publique, par l'adoption d'un amendement de Mme Eva Sas et d'un sous-amendement du rapporteur.

? L'article D. 3324-40 du code du travail, qui figure dans sa partie réglementaire, est ainsi rédigé :

« Lorsque la déclaration des résultats d'un exercice est rectifiée par l'administration ou par le juge de l'impôt, le montant de la participation des salariés au bénéfice de cet exercice fait l'objet d'un nouveau calcul, compte tenu des rectifications apportées.

« Le montant de la réserve spéciale de participation est modifié en conséquence au cours de l'exercice pendant lequel les rectifications opérées par l'administration ou par le juge de l'impôt sont devenues définitives ou ont été formellement acceptées par l'entreprise. Ce montant est majoré d'un intérêt dont le taux est égal au taux mentionné à l'article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération et qui court à partir du premier jour du sixième mois de l'exercice qui suit celui au titre duquel les rectifications ont été opérées. »

? Le présent article propose d'insérer un article L. 3326-1-1 au sein du code du travail pour y reproduire les dispositions figurant à l'article D. 3324-40 du même code, en ajoutant la précision selon laquelle le nouveau calcul du montant de la participation doit s'effectuer « que la rectification donne lieu ou non à l'application de majorations, à des poursuites pénales ou à une convention judiciaire d'intérêt public ».

? Le présent article ne transpose aucune des stipulations de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023.

II - La position de la commission

D'une part, les dispositions du présent article relèvent manifestement du domaine réglementaire puisqu'elles reproduisent dans la loi le contenu d'un décret.

Si la précision ajoutée à ces dispositions par le présent article s'avérait nécessaire, il appartiendrait au Gouvernement de l'apporter par décret, en modifiant l'article D. 3324-40 du code du travail.

D'autre part, le présent article ne transpose aucune des stipulations de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023. Il contrevient donc à l'objectif de circonscrire le projet de loi à la seule transposition fidèle et complète des stipulations de l'accord qui relèvent de la loi.

Pour ces raisons, la commission a adopté l'amendement COM-29 du rapporteur tendant à supprimer le présent article.

La commission a supprimé cet article.

Article 10
Salaires plancher et plafond dans la répartition
de l'intéressement en fonction du salaire

Cet article propose d'instaurer la possibilité de fixer un salaire plancher et un salaire plafond en cas de répartition de l'intéressement en fonction du salaire.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le droit en vigueur

· La répartition entre les bénéficiaires des sommes perçues au titre de l'intéressement et de la participation est effectuée selon des critères qui sont limitativement énumérés par la loi.

Le code du travail prévoit ainsi, à l'article L. 3314-5 pour l'intéressement et à l'article L. 3324-5 pour la participation, que cette répartition peut s'opérer de manière :

- uniforme ;

- ou proportionnelle à la durée de présence dans l'entreprise au cours de l'exercice ;

- ou proportionnelle aux salaires.

La répartition peut également s'effectuer en retenant conjointement ces différents critères.

· Lorsque l'accord d'intéressement ou de participation retient plusieurs des critères ci-dessus, le calcul de la répartition des sommes doit être fait en distinguant plusieurs sous-masses afin de respecter le principe de proportionnalité.

La Cour de cassation a en effet exclu que la réduction de la prime individuelle d'intéressement soit plus que proportionnelle à la durée des absences constatées au cours de l'exercice95(*).

Or, à défaut de cette clé de répartition par sous-masses, le risque est en d'aboutir à une formule qui discriminerait de façon disproportionnée l'absentéisme. La pondération des salaires perçus par un coefficient de présence revient de fait à pénaliser deux fois les bénéficiaires concernés : l'absence venant à la fois diminuer les salaires perçus, et minorer leur pondération.

Exemple de répartition en sous-masses des sommes
dues au titre de l'intéressement ou de la participation

Uniforme

Proportionnelle à la présence

Proportionnelle aux salaires

0 %

50 %

50 %

· Afin de prévoir une répartition des primes plus favorables aux bas salaires, les accords de participation ou d'intéressement peuvent fixer :

- un salaire plancher : qui sert de base de calcul minimale à la part individuelle de tout bénéficiaire lorsque la répartition se fait en fonction du salaire ;

- un salaire plafond : qui permet en cas de répartition en fonction du salaire de caper le salaire du bénéficiaire dans le calcul de la part individuelle. Le plafond est ainsi égal à trois fois le plafond annuel de la sécurité sociale pour les accords de participation.

La conjonction de ces deux seuils peut permettre de concentrer la distribution des primes et d'obtenir un écart plus réduit entre les bénéficiaires.

Cette fixation de salaire plancher et plafond se fonde sur différentes sources :

- pour l'accord de participation : le code du travail prévoit explicitement la possibilité d'un salaire plancher et fixe un salaire plafond d'autorité96(*) à l'article L. 3324-5 ;

- pour l'accord d'intéressement : le code du travail ne prévoit pas de disposition adéquate, mais cette possibilité a été encadrée par deux circulaires ministérielles successives97(*), et réexposée dans le guide interministériel de l'épargne salariale de juillet 2014.

B. L'évolution proposée

Le présent article transpose l'article 13 de l'ANI, et vise à sécuriser au niveau législatif la possibilité de fixer un salaire plancher et plafond en cas de choix d'une répartition de l'intéressement en fonction du salaire.

Il complète l'article L. 3314-5 du code du travail, en précisant que « l'accord peut fixer un salaire plancher, un salaire plafond, ou les deux, servant de base de calcul de la part individuelle ».

Cette disposition porte au niveau législatif la formulation retenue dans les circulaires précitées, dans lesquelles est indiqué que « La définition du salaire peut également intégrer un plancher et/ou un plafond [destiné à atténuer la hiérarchie des rémunérations.] ».

En revanche, la détermination du salaire plancher comme du salaire plafond est libre, contrairement à la disposition miroir concernant la participation. L'article L. 3324-5 du même code plafonne en effet les salaires pris en compte pour le calcul de la répartition à trois fois le plafond de la sécurité sociale.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission

Le présent article répond au souci de sécurisation exprimée par les signataires de l'ANI au sujet de la fixation de salaires plancher et plafond dans le calcul de la répartition de l'intéressement.

Le rapporteur souligne que cette possibilité est déjà encadrée par deux circulaires et un guide ministériel, sans que les auditions des partenaires sociaux n'aient fait état de difficultés particulières dans l'application de ces mesures. Cependant, compte tenu de l'inscription d'une mesure analogue pour la participation dans la partie législative du code du travail, le présent article trouve sa justification dans un souci de cohérence et d'intelligibilité de la norme pour les acteurs. Ce d'autant plus alors que la diffusion des dispositifs d'intéressement cherche à être amplifiée, a fortiori auprès des petites et moyennes entreprises (PME).

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 10 bis
Mention des critères de responsabilité sociale et environnementale
dans le calcul de l'intéressement

Cet article propose de préciser que les critères de performance retenus dans le calcul de l'intéressement collectif des salariés peuvent contenir des critères de responsabilité sociale et environnementale de l'entreprise (RSE).

La commission a supprimé cet article.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

A. L'intéressement bénéficie d'exonérations dans les conditions fixées par la loi

· L'article L. 3312-1 du code du travail caractérise le régime juridique de l'intéressement par trois principes cumulatifs :

- le caractère collectif : l'ensemble des salariés doivent pouvoir en bénéficier, sous réserve éventuelle de l'ancienneté nécessaire ;

- le caractère aléatoire : il doit traduire l'évolution des résultats de l'entreprise. Cela implique notamment qu'un aléa, même faible, doit exister le concernant98(*) ;

- le caractère facultatif : c'est ce qui le différencie de la participation.

· L'article L. 3314-2 du code du travail dispose plus précisément des conditions permettant de respecter le principe d'aléa de l'intéressement collectif. La formule de calcul de l'intéressement peut ainsi être liée :

aux résultats ou aux performance de l'entreprise, observés au cours d'une année ou d'un nombre de mois au moins égal à trois ;

aux résultats d'une ou des filiales99(*) de l'entreprise situées en France, à condition qu'au moins deux tiers des salariés de ces filiales soient couverts par un accord d'intéressement ;

- le cas échéant, la formule de calcul d'une entreprise peut être complétée d'un objectif pluriannuel lié aux résultats ou aux performances.

· Le respect des conditions exposées permet à l'intéressement de bénéficier d'un régime fiscal et social incitatif, qui présente des avantages similaires à ceux de la participation.

Tableau synthétique du régime fiscal et social de l'intéressement

 

Pour les salariés

Pour les entreprises

Impôt sur le revenu (IR)

- Si affectées à un plan d'épargne entreprise (PEE) : exonération dans la limite de trois quarts du plafond de la sécurité sociale (Pass)100(*)

- Sinon : soumises à l'IR au titre de l'année en cours

Déductibles de l'assiette de l'IR le cas échéant101(*).

Impôt sur les sociétés (IS)

X

Forfait social

- Jusqu'à 249 salariés : exonération102(*) ;

- À partir de 250 salariés : forfait social de 20%, ou 16% sur les produits d'épargne fléchés vers les petites et moyennes entreprises (PME) et entreprises de taille intermédiaires (ETI)103(*).

Cotisations de la sécurité sociale

Les sommes sont exclues des assiettes de la sécurité sociale104(*).

Contribution sociales généralisée (CSG) et contribution pour le remboursement de la dette sociale

Les sommes sont soumises à la CSG105(*) et CRDS106(*).

B. Le rappel de la possibilité pour les les accords d'intéressement de prévoir des critères de performance en matière de responsabilité sociale et environnementale (RSE)

· L'article 15 de l'ANI énonce l'attachement des partenaires sociaux à l'intégration de critères de RSE dans les accords d'intéressement afin de « mobiliser collectivement l'ensemble des acteurs de l'entreprise ». Pour cela, ils appellent à la mise en place d'un « cadre juridique clair et sécurisé », qui viserait notamment à préciser la notion de critère aléatoire.

· L'Assemblée nationale a adopté en séance deux amendements identiques déposés par le rapporteur et M. Thomas Cazenave, qui ont inséré le présent article dans le texte en navette.

Le présent article complète ainsi l'article L. 3314-2 du code du travail, en précisant que la formule de calcul de l'intéressement mentionnée à au 1° du même article peut prendre en compte des critères de performance relevant de la RSE.

Cette disposition est à croiser avec le premier alinéa du même article, qui impose que l'intéressement collectif des salariés « présente un caractère aléatoire ».

II - La position de la commission

Le désir de sécurisation, et plus largement de mise en lumière, des critères RSE dans les accords d'intéressement a effectivement été exprimé dans l'ANI. Cependant, la formulation même du titre de l'article 15 de l'ANI, « Faciliter le choix de critères RSE dans les accords d'intéressement », souligne que certains accords d'intéressement prennent déjà en compte des critères RSE.

En effet, cette pratique est d'ores et déjà permise, puisqu'elle rentre dans le champ couvert par les « performances de l'entreprise » au 1° de l'article L. 3314-2 du code du travail, ce dont convient l'auteur même de l'amendement portant article cet article additionnel107(*).

Ces critères doivent cependant répondre à la condition générale de « caractère aléatoire » : ce qui est, par exemple, le cas de la performance énergétique, de la réduction des déchets, de la diminution de la consommation d'eau ou d'électricité, ou encore de l'amélioration du bien-être des salariés.

Or cet ajout ne participe pas à sécuriser l'insertion de critères RSE dans les accords d'intéressement, puisque le caractère aléatoire de ces derniers n'est pas précisé. Le rapporteur considère que cette sécurisation pourrait plus efficacement être effectuée au niveau règlementaire, en détaillant les critères valables, ainsi que les modalités de contrôle permettant d'apprécier leur caractère aléatoire.

Par conséquent, le rapporteur propose de supprimer cet article qui ne comporte pas, en l'état, de portée normative ayant le caractère de nouveauté (amendement COM-30).

La commission a supprimé cet article.

Article 11
Simplifier la procédure de révision du contenu des plans interentreprises

Cet article propose de simplifier la procédure de révision du contenu des plans d'épargne interentreprises (PEI) en accélérant l'entrée en vigueur de la version modifiée du plan.

La commission a adopté l'article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques est venue simplifier la procédure de modification du plan interentreprises

Institué par un accord collectif dans les conditions prévues au livre II de la deuxième partie du code du travail, le plan d'épargne interentreprises (PEI) doit être approuvé par l'ensemble des entreprises adhérentes au plan, et fait l'objet d'un règlement qui détermine son contenu et ses modalités108(*).

Article L. 3333-3 du code du travail : le contenu du règlement du PEI

« 1° Les entreprises signataires ou le champ d'application professionnel et géographique ;

2° La nature des sommes qui peuvent être versées ;

3° Les différentes possibilités d'affectation des sommes recueillies, en particulier le nombre, l'orientation de gestion et le profil de risque des fonds utilisés ;

4° Les conditions dans lesquelles les frais de tenue de compte sont pris en charge par les employeurs ;

5° La liste de différents taux et plafonds d'abondement parmi lesquels les entreprises souhaitant effectuer des versements complémentaires à ceux de leurs salariés pourront opter ;

6° Les conditions dans lesquelles sont désignés les membres des conseils de surveillance des fonds communs de placement prévus par le règlement du plan et les modalités de fonctionnement des conseils. »

· La révision du PEI était initialement particulièrement lourde, puisque réalisée dans les mêmes conditions que le plan initial. L'article L. 3333-7 du code du travail, dans sa version en vigueur jusqu'au 7 août 2015, précisait ainsi :

la procédure de droit pour les avenant relatif aux modalités d'alimentation, de gestion et d'abondement du PEI (2°, 3° et 5° ci-dessus) : ratification expresse par une majorité des entreprises parties du plan ;

- la procédure simplifiée pour les seules modifications du règlement du PEI visant à l'adapter aux dispositions législatives ou réglementaires postérieures à son institution : après information des entreprises parties prenantes, la modification s'appliquait sous réserve que la majorité de ces entreprises ne s'y opposent pas dans un délai d'un mois passé la date d'information.

· La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a cherché à simplifier cette procédure de révision du PEI en alignant les avenants relatifs à l'alimentation, à la gestion et à l'abondement du PEI sur la procédure simplifiée (absence d'opposition d'une majorité des entreprises parties prenantes dans un délai d'un mois).

· Cependant, la simplification de la procédure n'a pas accéléré l'entrée en vigueur des règlements adossés aux PEI qui sont modifiés. Le cas échéant, les nouvelles modalités commencent à s'appliquer aux entreprises parties prenantes à compter du premier exercice suivant la date d'envoi de l'information. Ce délai incompressible constitue un frein à l'adaptabilité des PEI.

B. Le dispositif proposé

Le présent article transpose l'article 19 de l'ANI, en modifiant l'article L. 3333-7 du code du travail.

Le du présent article supprime la mention de l'entrée en vigueur de la modification à compter du « premier exercice suivant la date de l'information de l'entreprise ». Par conséquent la modification du règlement du PEI intervient à l'échéance du seul délai de un mois.

Le ajoute un alinéa qui précise en outre que, de manière dérogatoire, lorsque la modification du règlement du PEI porte sur de nouvelles possibilités d'affectation des sommes recueillies, l'entrée en vigueur est immédiate dès l'information des entreprises parties prenantes.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission

Le présent article répond à la volonté exprimée par les signataires de l'ANI de simplifier la modification du règlement d'un PEI, mais également que cette modification soit plus rapidement effective.

L'assouplissement de la procédure de modification du règlement d'un PEI est en effet un critère important de leur attractivité pour les entreprises adhérentes. C'est également le cas pour les modifications qui permettent de nouvelles possibilités d'affectation des sommes versées, qui seront désormais effectives dès information des entreprises adhérentes, notamment.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 12
Aménagement de la condition d'ancienneté applicable aux salariés temporaires pour l'attribution de l'intéressement et de la participation

Cet article propose que pour l'attribution de l'intéressement et de la participation, un accord étendu de la branche professionnelle du travail temporaire puisse prévoir une durée d'ancienneté requise pour les salariés temporaires différente de celle des autres salariés, dans la limite de quatre-vingt-dix jours.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

? Aux termes de l'article L. 3342-1 du code du travail, tous les salariés d'une entreprise compris dans le champ des accords d'intéressement et de participation ou des plans d'épargne salariale bénéficient de leurs dispositions.

Toutefois, peut être exigée une condition d'ancienneté dans l'entreprise ou dans le groupe d'entreprises, qui ne peut excéder trois mois. Pour la détermination de l'ancienneté éventuellement requise, sont pris en compte tous les contrats de travail exécutés au cours de la période de calcul et des douze mois qui la précèdent.

Cet article L. 3342-1 prévoit une disposition dérogatoire pour les salariés temporaires : ils sont réputés compter trois mois d'ancienneté dans l'entreprise ou dans le groupe qui l'emploie s'ils ont été mis à la disposition d'entreprises utilisatrices pendant une durée totale d'au moins 60 jours au cours du dernier exercice. Cette durée est entendue comme une période de 60 jours calendaires.

? Les entreprises de travail temporaire emploient deux types de salariés :

- les salariés temporaires qui sont mis à la disposition d'entreprises utilisatrices ;

- les salariés permanents qui exécutent leur contrat de travail au sein de l'entreprise de travail temporaire.

Ces deux catégories de salariés bénéficient des dispositifs de partage de la valeur mis en place par l'entreprise de travail temporaire, avec laquelle ils sont liés par un contrat de travail.

Cette spécificité a des conséquences sur la distribution de l'intéressement et de la participation au sein des entreprises de travail temporaire.

Selon Prism'emploi109(*), chaque année, près de 2,9 millions de salariés intérimaires sont mis à disposition d'entreprises utilisatrices pour des missions d'une durée variable comprise entre quelques heures et 18 mois. La durée moyenne des missions est de 2 semaines et la durée cumulée d'emploi annuelle est d'environ 3 mois.

La règle d'ancienneté applicable aux salarié temporaires a pour conséquence de rendre éligibles au bénéfice de l'intéressement et de la participation un grand nombre de salariés des entreprises de travail temporaire.

Il en résulte une forte dilution des sommes versées aux salariés, ce qui fragilise la capacité de ces entreprises à fidéliser ceux ayant une ancienneté plus importante. Ainsi, Prism'emploi a établi que près de 30 % des intérimaires en contrat de travail temporaire sont concernés par une participation inférieure à 50 euros et 10 % par un montant inférieur à 30 euros au titre d'une année.

Les niveaux moyens des sommes perçues au titre de la participation par les salariés de la branche du travail temporaire (111 euros) sont ainsi nettement inférieur à la moyenne générale (1 409 euros en 2020110(*))

Montants moyen de participation perçus par les salariés
des entreprises de travail temporaire selon leur type de contrat

Salariés en contrat de travail temporaire

105 €

Salariés en CDI intérimaire

134 €

Salariés permanents

242 €

Moyenne

111 €

Source : Enquête Prism'emploi

En outre, si 90 % des salariés permanents de ces entreprises bénéficient de la participation, ils ne représentent que 3,1 % de l'ensemble des salariés bénéficiaires, 96,9 % d'entre eux étant des salariés intérimaires111(*).

? Reprenant ces constats, les signataires de l'accord national interprofessionnel ont souhaité que les règles qui régissent actuellement la distribution de l'intéressement et de la participation dans le secteur du travail temporaire puissent être aménagées.

Ainsi, l'article 20 de l'accord stipule que « les modalités actuelles de calcul de la participation et de l'intéressement sont peu adaptées au secteur du travail temporaire. Elles conduisent d'une part, à un très fort effet de dilution des sommes, et d'autre part, désincitent les entreprises du secteur de s'engager dans la négociation d'accords d'intéressement. Les signataires souhaitent que soit donnée la possibilité aux partenaires sociaux de la branche du travail temporaire d'aménager les modalités d'attribution de l'intéressement et de la participation, afin de tenir compte de la nature de la relation qui lie le salarié à son entreprise. »

? Le présent article entend traduire les stipulations de l'ANI en permettant à la branche du travail temporaire d'aménager la condition d'ancienneté aujourd'hui prévue pour les salariés temporaire.

À cette fin, le présent article complète l'article L. 3342-1 du code du travail afin de prévoir que, par dérogation à la règle d'ancienneté de soixante jours, un accord étendu de la branche professionnelle du travail temporaire pourra prévoir une durée d'ancienneté différente pour les salariés temporaires, dans la limite de 90 jours.

Cette disposition permettra ainsi, par accord de branche, d'allonger au-delà de 60 jours la durée d'ancienneté requise pour que les salariés intérimaires soient éligibles à la participation et à l'intéressement. Elle permettra en outre de fixer des conditions d'ancienneté différentes entre salariés temporaires et salariés permanents au sein des entreprises du travail temporaire, en considérant que leur situation au regard de leur employeur est suffisamment différente pour justifier une différence de traitement.

La limite fixée à 90 jours par le présent article permet ainsi au législateur d'exercer pleinement sa compétence et de donner un cadre suffisamment précis à la négociation de branche qu'il propose. C'est ce qu'a souligné le Conseil d'État112(*) dans son avis rendu sur le projet de loi : « Le Conseil d'État considère qu'en fixant un plafond à la durée maximale d'ancienneté que les partenaires sociaux sont susceptibles de retenir pour les salariés temporaires, le législateur définit avec suffisamment de précision les mesures d'application qu'il confie à la négociation collective et apporte la garantie que la différence de traitement qui en résultera avec les salariés permanents ne sera pas disproportionnée. »

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission

La mesure proposée permettra à la branche du travail temporaire de rehausser, pour les salariés temporaires, la durée d'ancienneté requise pour bénéficier de l'intéressement et de la participation. Une telle disposition limitera la dilution des sommes versées dans les entreprises de ce secteur et concentrera l'octroi de la participation et de l'intéressement sur les salariés qui contribuent le plus aux performances de l'entreprise. Le présent article laisse à la négociation collective de branche le soin de fixer une durée adaptée aux besoins du secteur en posant une durée maximale qui ne créera pas de différence de traitement disproportionnée entre salariés temporaires et salariés permanents au sein d'une même entreprise.

Le présent article assure une transposition répondant à l'objectif poursuivi par les signataires de l'accord national interprofessionnel qui ont souhaité aménager les modalités de distribution de l'intéressement et de la participation pour limiter les effets de dilution des sommes versées dans le secteur du travail temporaire.

En conséquence, le rapporteur a proposé à la commission d'adopter le présent article.

La commission a adopté cet article sans modification.

TITRE IV : DÉVELOPPER L'ACTIONNARIAT SALARIÉ

Article 13
Rehausser les plafonds globaux d'attribution gratuite d'actions
et permettre le rechargement du plafond individuel

Cet article propose de rehausser les plafonds globaux d'attribution gratuite d'actions (AGA) aux salariés, et d'introduire un principe de rechargement de ces plafonds à compter d'un délai de sept ans.

La commission a adopté l'article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le droit en vigueur

L'attribution gratuite d'actions (AGA) est un des dispositifs de l'actionnariat salarié, qui a pour but d'associer plus étroitement les salariés au capital de l'entreprise qui les emploie. Elle bénéficie ainsi à 95,5 % des salariés des entreprises cotées113(*).

· Instituée par la loi de finances pour 2005114(*), l'AGA est par nature réservée aux seuls salariés des sociétés par action. Elle est mise en place par le biais d'une décision de l'assemblée générale extraordinaire, qui définit quelles catégories des salariés pouvant en bénéficier115(*).

L'AGA visant à garantir un lien durable entre le salarié et son entreprise, elle repose sur un double délai dont « la durée cumulée [...] ne peut être inférieure à deux ans »116(*) :

- une période d'acquisition, qui ne peut être inférieure à un an, et avant le terme de laquelle l'AGA n'est pas définitive ;

une période facultative de conservation des actions par les bénéficiaires, qui court à partir de l'attribution définitive des actions.

· L'article L. 225-197-1 du code de commerce plafonne le pourcentage maximal du capital social qui peut être attribué gratuitement :

10 % du capital pour les grandes entreprises (GE) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ;

- 15 % du capital social pour les micros, petites et moyennes entreprises (PME) ;

- de manière dérogatoire, 30 % du capital quelle que soit la taille de l'entreprise lorsque l'AGA est dite « démocratique », c'est-à-dire qu'elle bénéficie à l'ensemble du personnel salarié de l'entreprise.

Ces plafonds sont appréciés à la date de la décision d'attribution, et au regard de l'ensemble des actions gratuites attribuées durant la vie de la société. La loi « Pacte » du 22 mai 2019117(*) est venue préciser que les actions qui n'ont pas été définitivement attribuées au terme de la période d'acquisition et celles qui ne sont plus soumises à obligation de conservation ne comptaient pas dans la définition de ce taux.

· Par ailleurs un plafond maximal de détention individuelle du capital social de l'entreprise fait obstacle à ce qu'un salarié détienne à lui seul plus de 10 % du capital social118(*).

B. Le dispositif proposé

Le présent article transpose l'article 24 de l'ANI, d'une part en augmentant les plafonds de détention de l'AGA, et d'autre part en mettant en place une faculté de rechargement de ces plafonds passé un certain temps de détention.

· Les a et b du du présent article modifie l'article L. 225-197-1 du code de commerce afin de rehausser les seuils maximaux du capital social qui pouvant faire l'objet d'AGA de la sorte :

- 15 % du capital pour les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ;

- 20 % du capital social pour les micros, petites et moyennes entreprises (PME).

Par ailleurs le c du même modifie le seuil dérogatoire dans le cas des attributions d'actions dites « démocratiques » :

- le seuil de 30 % du capital quelle que soit la taille de l'entreprise peut être atteint lorsque l'AGA répond à la double condition : (a) de bénéficier à au moins 50 % du personnel salarié ; (b) qui représentent au moins 25 % du total des salaires bruts119(*) de la société ;

- un seuil de 40 % quelle que soit la taille de l'entreprise est créé lorsque l'AGA est dite démocratique, c'est-à-dire qu'elle bénéficie à l'ensemble des salariés.

Enfin, lorsque les seuils de droit commun prévus (15 % et 20 %) sont dépassés dans les cas énumérés au c), l'écart entre le nombre d'actions distribuées à chaque salarié ne peut être supérieur à un rapport de un à cinq.

· Le b du du présent article modifie l'article L. 225-197-2 du code monétaire et financier, en introduisant une possibilité de rechargement du capital plafond maximal de détention du capital social par un salarié. Ainsi seuls les titres détenus depuis moins de sept ans sont désormais concernés.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En commission, l'Assemblée nationale a adopté quatre amendements rédactionnels.

En séance, un amendement de Mme Marie Guévenoux a étendu la possibilité de mettre en place une AGA au bénéfice des membres de la direction120(*) des groupes non cotés. Cette disposition rétablit un traitement similaire avec les membres de la direction des groupes côtés.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le présent article opère une transcription fidèle de l'intention exposée par les signataires de l'ANI à son article 24.

Le rehaussement des seuils de l'AGA permet d'offrir plus de latitude aux entreprises qui souhaitent mieux associer leurs salariés au succès de l'entreprise, mais également à sa gouvernance.

Par ailleurs, l'instauration d'un seuil intermédiaire (30 %) pour les AGA qui concernent plus de la moitié des salariés permet de répondre à une des limites des AGA dites « démocratiques », c'est-à-dire son absence de modulation selon les mérites et les situations de chacun.

De même, la mise en place d'une faculté de rechargement, au bout de sept ans, dans la prise en compte du plafond maximal de détention individuelle de capital par le salarié (10 %) permettra de récompenser l'inscription durable de certains salariés dans la vie de l'entreprise, voire d'accompagner la transmission de certaines PME et TPE.

Enfin la mesure introduite en séance à l'Assemblée nationale permet d'établir un traitement équivalent pour les membres de la direction des entreprises non cotées, ce qui participe ainsi à la diffusion de l'actionnariat salarié dans ces entreprises.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 14
Mieux orienter l'épargne salariale vers des fonds d'investissements
à visées sociale ou environnementale

Cet article propose d'imposer aux plans d'épargne entreprise (PEE) et aux plans d'épargne retraite d'entreprise (PER) la présence d'au moins un fonds satisfaisant à des critères de financement de la transition énergique et écologique ou d'investissement socialement responsable dans l'offre de placement qu'ils donnent aux salariés.

La commission a adopté cet article modifié par un amendement de coordination.

I - Le dispositif proposé

A. Le droit en vigueur

Les plans d'épargne salariale121(*) représentent des dispositifs particulièrement souples, puisqu'ils proposent un cadre collectif défini au niveau de l'entreprise, dans lequel les salariés peuvent choisir de s'inscrire, en restant décisionnaires sur l'intensité et le choix des placements réalisés. Alimentés par les dispositifs d'intéressement ou de participation, par des versements du salarié ou par l'aide de l'entreprise, ces plans permettent de placer ces sommes dans des fonds communs de placement d'entreprise (FCPE) en bénéficiant d'un traitement fiscal et social favorable.

· Le législateur a souhaité que les règlements des différents plans d'épargne salariale prévoient la possibilité pour les salariés de consacrer une partie des sommes versées à l'acquisition de parts de fonds investis dans les entreprises solidaires, dits « fonds solidaires ». Il a pour cela agit en deux temps :

la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie122(*) a ainsi prévu cette possibilité à l'article L. 3332-17 du code du travail pour les plans d'épargne d'entreprise ;

la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises123(*), dite « Loi Pacte », l'a étendue à l'ensemble des dispositifs d'épargne retraite d'entreprise en modifiant l'article L. 224-3 du code monétaire et financier.

Les Fonds solidaires, dits « 90-10 »

Créés par la loi du 19 février 2001 sur l'épargne salariale124(*), ces fonds sont régis par l'article L. 214-164 du code monétaire et financier. Afin d'être considérés comme fonds solidaires, ils doivent notamment respecter les critères suivants  :

5 à 10 % de leur actif doit soutenir les entreprises solidaires, et pour cela être composé de parts ou de titres émis par :

des entreprises solidaires au sens de l'article L. 3332-17-1 du code du travail ;

- des sociétés de capital-risque qui respectent les critères125(*) fixés par le I de l'article 1er de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier ;

- des fonds communs de placements à risques mentionnés à l'article L. 214-18 du code monétaire et financier à condition qu'ils soient composés au moins à 40 % part des parts et titres émis par des entreprises solidaires ;

Les 90 à 95 % restant de leur actif doit respecter les conditions particulières d'investissement socialement responsable (ISR).

· Ces obligations concourent à ce que l'épargne salariale soit aujourd'hui la première contributrice à l'économie solidaire, elle y contribue ainsi à hauteur de 15,3 milliards d'euros126(*), soit près de 58 % des sommes collectées.

B. Le dispositif proposé

Le présent article transpose l'article 32 de l'ANI, en ce qu'il impose aux règlements des plan d'épargne salariale (PEE, PER et Pereco) de proposer, en plus du fonds solidaire, au moins un fonds satisfaisant à des critères de financement de la transition énergétique et écologique ou d'investissement socialement responsable.

Le I du présent article modifie le premier alinéa de l'article L. 3332-1 du code du travail, en précisant que le règlement du PEE prévoit qu'une partie des sommes recueillies peut être affectée à l'acquisition de parts de fonds investis :

- dans des entreprises solidaires au sens de l'article L. 3332-17-1 du code du travail [droit existant] ;

- dans un fonds labélisé au titre du financement de la transition énergétique et écologique ou de l'investissement socialement responsable.

Le II modifie dans les mêmes conditions l'article L. 224-3 du code monétaire et financier concernant l'allocation d'actifs possibles dans le cadre des PER ou Pereco.

Le III précise que ces dispositions entreront en vigueur au 1er juillet 2024.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En commission, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur.

En séance, un amendement de Mme Bergantz a été adopté, qui renvoie à un décret l'établissement de la liste des labels satisfaisant à des critères de financement de la transition énergique et écologique ou d'investissement socialement responsable, à la suite duquel deux amendements identiques de précision de la même auteure et du rapporteur ont également été adoptés.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le présent article transpose fidèlement l'article 32 de l'ANI, et permet ainsi de proposer une offre de supports d'investissement solidaire ou engagé aux salariés épargnants.

Cette disposition permet à la fois de proposer aux salariés épargnants une offre de supports financiers répondants, le cas échéant, à leur préoccupation pour la transition environnementale et énergétique, et de renforcer le financement des entreprises et des projets qui s'engagent dans cette transition. L'importance du soutien de l'épargne salariale aux entreprises solidaires permet d'espérer que les salariés s'approprieront cette faculté nouvelle

Afin d'assurer la cohérence du dispositif, le rapporteur propose un amendement de coordination (amendement COM-31).

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 14 bis
Déblocage anticipé de l'épargne salariale pour des dépenses liées à la transition énergétique ou à l'activité de proche aidant

Cet article propose que certaines dépenses liées à la transition énergétique ou à l'activité de proche aidant puissent constituer des motifs de déblocage anticipé de l'épargne salariale.

La commission a supprimé cet article.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

A. Le déblocage avant cinq ans des sommes placées sur un plan d'épargne entreprise est aujourd'hui possible sous conditions

Les sommes perçues par les salariés au titre de l'intéressement et de la participation aux résultats de l'entreprise peuvent être placées sur différents produits d'épargne salariale : plan d'épargne entreprise (PEE)127(*), plan d'épargne interentreprises (PEI)128(*), plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco)129(*).

Les droit ou sommes affectés aux PEE et PEI ne sont exigibles par leur bénéficiaire qu'à l'expiration d'un délai de cinq ans130(*), sauf dans les cas suivants, fixés par décret en Conseil d'État131(*) :

- mariage ou conclusion d'un pacte civil de solidarité (pacs) ;

- naissance ou adoption d'un enfant, à partir du troisième enfant ;

- divorce, séparation, dissolution d'un pacs, avec la garde d'au moins un enfant ;

- violences conjugales ;

- invalidité du salarié ou de son conjoint, de son partenaire de pacs ou de l'un de ses enfants ;

- décès du salarié, de son conjoint ou de son partenaire de pacs ;

- rupture du contrat de travail, cessation d'activité de l'entrepreneur individuel, fin du mandat social, perte du statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé ;

- surendettement ;

- création ou reprise d'entreprise par le salarié, le conjoint, le partenaire de pacs, ou ses enfants ;

- acquisition d'une résidence principale, ou travaux d'agrandissement ou remise en état à la suite d'une catastrophe naturelle.

La demande du salarié de liquidation anticipée est présentée dans un délai de six mois à compter de la survenance du fait générateur, sauf dans les cas de rupture du contrat de travail, décès, invalidité et surendettement pour lesquels elle peut intervenir à tout moment. La levée anticipée intervient sous forme d'un versement unique qui porte, au choix du salarié, sur tout ou partie des droits susceptibles d'être débloqués132(*).

B. L'ajout dans la loi de nouvelles situations ouvrant droit au déblocage anticipé

Le présent article a été inséré à l'Assemblée nationale par l'adoption, en séance publique, d'un amendement de la rapporteure pour avis de la commission des finances.

Il modifie l'article L. 3324-10 du code du travail afin d'inscrire dans la loi que certaines dépenses liées à la transition énergétique ou à l'activité de proche aidant pourront constituer des motifs de déblocage anticipé de l'épargne salariale.

Le dispositif vise ainsi à transposer les stipulations de l'article 33 de l'ANI, aux termes duquel « les organisations signataires demandent aux pouvoirs publics d'ouvrir trois nouveaux cas de déblocage anticipé : pour les dépenses liées à la rénovation énergétique des résidences occupées à titre principale et d'autre part ; pour faire face aux dépenses engagées en tant que proche aidant sous réserve de fournir les justificatifs [...] ; pour l'acquisition d'un véhicule dit « propre » (neuf ou d'occasion). »

II - La position de la commission

La loi prévoit actuellement que les situations ouvrant droit à un déblocage anticipé de l'épargne salariale sont fixées par un décret en Conseil d'État, sans préciser les types de situations ou de dépenses éligibles.

La transposition des stipulations de l'article 33 de l'ANI, qui prévoient d'ouvrir trois nouveaux cas de déblocage anticipé de l'épargne salariale, relèvent donc du décret en Conseil d'État.

L'inscription dans la loi que certaines dépenses liées à la transition énergétique ou à l'activité de proche aidant permettraient un déblocage anticipé de l'épargne salariale n'est donc ni nécessaire, ni souhaitable.

Cette inscription créerait un régime légal pour certains types de dépenses quand d'autres seraient de niveau réglementaire, distinction qui ne semble ni justifiée ni contribuer à la clarté du droit. Enfin, elle ne dispenserait pas le pouvoir réglementaire de devoir prendre un décret en Conseil d'État pour préciser l'application du présent article.

Pour ces raisons, la commission a adopté l'amendement COM-32 du rapporteur tendant à supprimer le présent article.

La commission a supprimé cet article.

Article 15
Améliorer la gouvernance des fonds communs de placement d'entreprise

Cet article modifie les règles de gouvernance des fonds communs de placement d'entreprise afin de renforcer l'information des salariés sur la politique d'engagement actionnarial du fond.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le droit en vigueur

Les fonds communs de placement d'entreprise133(*) (FCPE) permettent de confier à une société de gestion les sommes provenant de l'épargne salariale d'une entreprise afin de les faire fructifier.

La spécificité des FCPE par rapport aux autre fonds communs de placements réside dans leur gouvernance, définie à l'article L. 214-164 du code monétaire et financier.

· Le conseil de surveillance : institué par le règlement du fond, il compte au moins une moitié de représentants des porteurs de parts choisis parmi les salariés épargnants, et doté d'un président élu parmi ces salariés. Il assure principalement deux missions :

- exercer les droits de vote attachés aux valeurs du fonds, et décider de l'apport des parts ou titres134(*). Cette mission peut être déléguée par le règlement du fonds à la société de gestion constitutive du fond ;

examiner la gestion financière, administrative et comptable du fonds, au besoin en auditionnant de droit la société de gestion, le dépositaire et le commissaire aux comptes du fonds. Il peut également décider des fusions, scissions ou liquidations, ou agir en justice pour défendre les droits ou intérêts des porteurs.

· Le devoir d'information des salariés-épargnants135(*) : le conseil de surveillance adopte un rapport annuel mis à la disposition de chaque porteur de parts et dont le contenu est précisé par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers. Il s'assure de la diffusion régulière par l'entreprise de l'information aux porteurs de parts, afin notamment de leur permettre de suivre le rendement et de décider de vendre leurs parts.

B. Une meilleure information des salariés sur la politique d'engagement actionnarial du fond

Le présent article transpose l'article 34 de l'ANI, qui invitait à mettre en place une meilleure information de l'épargnant salarié.

Pour cela, il complète le sixième alinéa du I de l'article L. 214-164 du code monétaire et financier. Dans l'hypothèse où le règlement du FCPE a délégué à une société de gestion l'exercice du droit de vote pour le compte des épargnants salariés, la société de gestion doit rendre compte de sa politique de vote, chaque année, devant le conseil de surveillance du fonds.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En séance, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision rédactionnelle de M. Viry.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le présent article transpose fidèlement la volonté exprimée par les signataires de l'ANI à son article 34.

Compte tenu du grand nombre de FCPE dans lesquels les droits de vote sont délégués à la société de gestion, le rapporteur considère que ce compte-rendu annuel de la politique actionnariale suivie par la société de gestion concourt à une meilleure information des salariés-actionnaires, et in fine, à une plus grande attractivité de l'épargne salariale.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 16
Rapport au Parlement sur le calcul des seuils d'effectifs applicables
pour la participation en entreprise

Cet article propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant les effets de l'article 11 de la loi « Pacte » sur la mise en oeuvre de l'obligation relative à la participation en entreprise.

La commission a supprimé cet article.

I - Le dispositif adopté à l'Assemblée nationale

Le présent article a été inséré à l'Assemblée nationale par l'adoption, en séance publique, d'un amendement de M. Jérôme Guedj. Il prévoit qu'au plus tard le 31 décembre 2024, le Gouvernement remette au Parlement un rapport faisant un bilan de l'impact de l'article 11 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises sur la mise en oeuvre de l'obligation relative à la participation.

Le présent article vise à transposer les stipulations de l'article 8 de l'ANI qui prévoient que « les organisations signataires demandent aux services du ministère du travail de réaliser d'ici la fin de l'année 2024 un bilan de l'impact des dispositions de la loi Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (Pacte) du 22 mai 2019 ayant modifié les règles de calcul des effectifs pour la mise en oeuvre de l'obligation relative à la participation. »

Crée par l'article 11 de la loi dite Pacte136(*), l'article L. 130-1 du code de la sécurité sociale a fixé de nouvelles modalités de calcul et de prise en compte des seuils d'effectifs dans les entreprises.

Article L. 130-1 du code de la sécurité sociale

I - Au sens du présent code, l'effectif salarié annuel de l'employeur, y compris lorsqu'il s'agit d'une personne morale comportant plusieurs établissements, correspond à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l'année civile précédente.

Par dérogation au premier alinéa du présent I, pour l'application de la tarification au titre du risque “accidents du travail et maladies professionnelles”, l'effectif pris en compte est celui de la dernière année connue.

L'effectif à prendre en compte pour l'année de création du premier emploi salarié titulaire d'un contrat de travail dans l'entreprise correspond à l'effectif présent le dernier jour du mois au cours duquel a été réalisée cette première embauche.

Un décret en Conseil d'État définit les catégories de personnes incluses dans l'effectif et les modalités de leur décompte.

II - Le franchissement à la hausse d'un seuil d'effectif salarié est pris en compte lorsque ce seuil a été atteint ou dépassé pendant cinq années civiles consécutives.

Le franchissement à la baisse d'un seuil d'effectif sur une année civile a pour effet de faire à nouveau courir la règle énoncée au premier alinéa du présent II.

En conséquence, l'article 155 de la loi Pacte a prévu, en modifiant l'article L. 3321-1 du code du travail, que les seuils d'effectifs et les franchissements de seuils applicables en matière de participation aux résultats de l'entreprise137(*) seraient déterminés selon les modalités prévues à l'article L. 130-1 du code du la sécurité sociale.

Cet article 155 a également modifié les articles L. 3322-1 et L. 3322-2 du code du travail afin de préciser que « les entreprises employant au moins cinquante salariés garantissent le droit de leurs salariés à participer aux résultats de l'entreprise » et que « l'obligation s'applique à compter du premier exercice ouvert postérieurement à la période des cinq années civiles consécutives mentionnées au premier alinéa du II de l'article L. 130-1 du code de la sécurité sociale. »

II - La position de la commission

Selon une position constante, la commission n'est pas favorable aux dispositions consistant à demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement. Elles sont dépourvues de portée normative, souvent inappliquées et superflues, le Parlement pouvant demander des informations au Gouvernement dans le cadre de ses missions constitutionnelles de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques.

En outre, l'article 8 de l'ANI, aux termes duquel les organisations signataires demandent aux services du ministère du travail de réaliser un bilan de l'impact des dispositions de la loi Pacte du 22 mai 2019, constitue une base suffisante pour que le Gouvernement engage ces travaux d'évaluation et les transmette aux partenaires sociaux. Il ne nécessite donc pas de transposition dans la loi.

En conséquence, la commission a adopté l'amendement COM-33 du rapporteur qui propose de supprimer le présent article.

La commission a supprimé cet article.

EXAMEN EN COMMISSION

___________

Réunie le mercredi 11 octobre 2023, sous la présidence de M. Philippe Mouiller, président, la commission examine le rapport de Mme Frédérique Puissat, rapporteur, sur le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise.

M. Philippe Mouiller, président. - Nous en venons à l'examen du rapport et du texte de la commission sur le projet de loi portant transposition de l'accord national interprofessionnel (ANI) relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise, adopté par l'Assemblée nationale le 29 juin dernier, après engagement de la procédure accélérée.

Ce texte sera examiné en séance publique les mardi 17 et mercredi 18 octobre ; 33 amendements ont été déposés sur ce texte.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Pour le premier texte que notre commission examine à l'issue du renouvellement sénatorial, nous devons nous livrer à un exercice particulier : la transposition dans la loi d'un accord national interprofessionnel, conclu par les organisations syndicales et patronales.

Le Gouvernement a invité les partenaires sociaux à négocier sur le partage de la valeur au sein de l'entreprise, en leur transmettant le 16 septembre 2022 un document d'orientation qui leur proposait de généraliser le bénéfice de dispositifs de partage de la valeur pour les salariés, notamment dans les plus petites entreprises ; de renforcer, simplifier et veiller à l'articulation des différents dispositifs de partage de la valeur ; et d'orienter l'épargne salariale vers les grandes priorités d'intérêt commun.

À l'issue de la négociation, les partenaires sociaux sont parvenus à la conclusion d'un ANI, signé le 10 février 2023 par l'ensemble des organisations représentatives d'employeurs et de salariés, à l'exception de la Confédération générale du travail (CGT).

Cet accord, qui comprend 36 articles, a pour objectif de poursuivre le travail engagé sur les politiques de rémunération et de valorisation du travail. Il souhaite mettre en lumière le partage de la valeur au sein des entreprises et des branches professionnelles et encourager son développement. Il comporte également des mesures visant à faciliter le développement et la sécurisation de l'actionnariat salarié et à améliorer les dispositifs d'épargne salariale.

Alors que le dialogue social a souvent été difficile, et parfois même escamoté ces dernières années - je pense à la formation professionnelle, à l'assurance chômage ou encore aux retraites -, nous devons nous féliciter de la conclusion de cet accord et de l'engagement pris par le Gouvernement d'assurer sa transposition fidèle et complète.

Trop souvent, les délais donnés aux partenaires sociaux sont contraints et le cadre de négociation corseté, ce qui empêche le dialogue social de réellement s'exercer.

Dans l'esprit de l'article L.1 du code du travail, issu de la loi Larcher du 31 janvier 2007, une part prépondérante doit être accordée à la négociation collective. Les partenaires sociaux sont les mieux placés pour proposer des évolutions du droit du travail dans l'intérêt des salariés et des employeurs. Le législateur doit ainsi fixer un cadre dans lequel la démocratie sociale a la place de s'exprimer.

Il me semble donc essentiel de respecter la parole des signataires de l'accord, en s'assurant que le projet de loi opère une transposition fidèle et complète des stipulations de l'ANI qui nécessitent des modifications législatives.

Poursuivant cet objectif, je vous proposerai, d'une part, de modifier les dispositions du projet de loi qui s'écartent des mesures demandées par les signataires de l'accord, et, d'autre part, de transposer les seules stipulations de l'accord qui nécessitent une modification de la loi. Certaines mesures demandées par les partenaires sociaux relèvent du domaine réglementaire ; il appartient au Gouvernement de les prendre par décret. D'autres mesures sont d'application directe et ne nécessitent pas de transposition : elles n'ont donc pas à figurer dans la loi.

Nous devrons ensuite être attentifs au suivi de l'application de l'ANI et de ses normes de transposition, dont les entreprises devront se saisir.

J'en viens au contenu du projet de loi, dont je considère qu'il doit permettre, dans l'esprit de l'ANI, de simplifier le recours au partage de la valeur par les entreprises, au profit des employeurs et des salariés. Le texte comporte, tout d'abord, un volet relatif aux classifications et à la mixité des emplois.

Dans un contexte d'inflation, de tensions de recrutement et d'évolution du marché du travail, les classifications de branche revêtent une importance particulière. Elles permettent de classer, dans chaque branche, les différents types d'emplois selon leur nature, le niveau de qualification ou encore les tâches confiées aux salariés. À ces catégories sont associés des minima de rémunération auxquels se réfèrent les employeurs.

Les signataires de l'ANI ont rappelé que la loi impose aux branches d'examiner au moins tous les cinq ans la nécessité de réviser leurs classifications. Ils ont demandé aux branches n'ayant pas respecté cette obligation de s'y conformer avant fin 2023. L'article 1er prévoit donc qu'une négociation en vue de l'examen de la nécessité de réviser les classifications soit ouverte avant le 31 décembre 2023 au sein des branches n'ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans. Je vous proposerai d'adopter cet article, en revenant sur les modifications apportées par l'Assemblée nationale qui s'écartent de l'accord.

En revanche, je vous inviterai à supprimer l'article 1er bis qui prévoit que les branches établissent, avant le 31 décembre 2024, un bilan de leur action en faveur de la promotion et de l'amélioration de la mixité des emplois. Le droit en vigueur et les stipulations de l'ANI constituent une base suffisante pour que les branches engagent ces travaux, sans besoin de transposition législative.

Un second volet du texte vise à faciliter la diffusion des outils de partage de la valeur dans les petites et moyennes entreprises : intéressement, participation, épargne salariale et prime de partage de la valeur.

Les signataires de l'accord ont souhaité rappeler, en son article 1er, le principe de non-substitution entre salaire et dispositifs de partage de la valeur. L'article 2A pose ce principe dans la loi pour la participation, seul dispositif pour lequel la non-substitution ne disposait pas de fondement légal.

Alors que les outils de partage de la valeur peinent à se diffuser dans les entreprises de moins de 50 salariés, les partenaires sociaux ont souhaité qu'ils soient plus facilement et plus systématiquement mis en place dans ces entreprises.

Suivant cette logique, l'article 2 permet à titre expérimental aux entreprises de moins de 50 salariés de recourir à une formule de calcul de la réserve spéciale de participation dérogatoire lorsqu'elles mettent volontairement en place un dispositif de participation. Cette formule, qui peut mener à un montant de mise en réserve inférieur au droit commun, permet de prendre en compte la spécificité de ces entreprises, et d'y encourager le recours à la participation, qui n'est obligatoire que pour les entreprises de 50 salariés ou plus.

L'article 3 prévoit qu'à titre expérimental, pour une durée de cinq ans, les entreprises de 11 à 49 salariés qui réalisent durant trois exercices consécutifs un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % de leur chiffre d'affaires instituent, au cours de l'exercice suivant, un régime de participation ou d'intéressement, ou abondent un plan d'épargne salariale ou versent la prime de partage de la valeur.

L'article 3 bis étend ce dispositif expérimental aux structures de l'économie sociale et solidaire d'au moins 11 salariés qui réalisent durant trois exercices consécutifs un résultat excédentaire au moins égal à 1 % de leurs recettes. Elles devront instituer un régime d'intéressement ou abonder un plan d'épargne salariale ou verser la prime de partage de la valeur.

Alors que l'ANI prévoit explicitement que « cette obligation entrera en vigueur au 1er janvier 2025 », l'Assemblée nationale l'a rendue applicable aux exercices ouverts après le 31 décembre 2023. Afin de retenir la date choisie par les partenaires sociaux, je vous proposerai que l'obligation posée aux articles 3 et 3 bis s'applique aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024.

Afin de favoriser le développement de la participation dans les entreprises qui atteignent le seuil de 50 salariés, je vous proposerai d'adopter l'article 4, qui supprime le report de trois ans de l'obligation de mettre en place la participation pour les entreprises qui appliquent déjà un accord d'intéressement.

L'article 5 met en place un nouveau dispositif de partage de la valeur en cas d'augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal de l'entreprise. Cet article prévoit ainsi d'imposer aux entreprises d'au moins 50 salariés de définir par accord ce qu'est une augmentation exceptionnelle de bénéfice, ainsi que les modalités du partage de la valeur qui en découleront, le cas échéant. Afin de sécuriser le dispositif, l'Assemblée nationale a utilement précisé les critères pouvant être retenus dans la définition d'une augmentation exceptionnelle du bénéfice : taille de l'entreprise, secteur d'activité, bénéfice des années précédentes.

Les partenaires sociaux ont également souhaité modifier le cadre légal applicable à la prime de partage de la valeur. L'instauration de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, en 2018, puis de la prime de partage de la valeur, en 2022, a permis à de nombreux salariés de bénéficier d'une redistribution de la valeur créée par les entreprises, en particulier dans les PME. Grâce à la simplicité de son versement et à son régime social et fiscal incitatif, son large déploiement a soutenu le pouvoir d'achat des salariés, dans un contexte de crise sanitaire puis de forte inflation.

La prime peut être versée une fois par an à chaque salarié, dans la limite de 3 000 euros, ou de 6 000 euros si l'entreprise met en oeuvre un accord d'intéressement. À titre temporaire, jusqu'à la fin 2023, les primes versées aux salariés rémunérés jusqu'à 3 Smic sont exonérées de toutes cotisations sociales, de contribution sociale généralisée (CSG), de contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) et d'impôt sur le revenu. Pour les autres primes et à titre pérenne, seules les cotisations sociales sont exonérées.

On ne peut nier le risque d'une substitution entre le salaire et la prime, et les effets qu'elle emporte pour les salariés et pour les finances publiques. Pour autant, le contexte économique justifie ce dispositif, alors que les hausses de salaire sont parfois difficiles à assumer pour les employeurs. En outre, l'ampleur et la réalité de cette substitution sont difficiles à mesurer, puisque le nombre d'entreprises qui auraient procédé à des revalorisations salariales en l'absence de prime ne peut être précisément estimé.

Conformément à l'ANI, l'article 6 prévoit que la prime de partage de la valeur puisse être attribuée deux fois par année civile et que son montant puisse être affecté aux plans d'épargne salariale. Ces ajustements contribueront à inscrire la prime dans les outils de partage de la valeur à la disposition des entreprises.

En outre, il est proposé que le régime temporaire d'exonérations sociales et fiscales soit prolongé jusqu'à la fin de l'année 2026 pour les entreprises de moins de 50 salariés.

Le contexte actuel de forte inflation justifie que ce régime soit prolongé pour trois années supplémentaires, pour les salariés rémunérés jusqu'à 3 Smic, en ciblant les entreprises de moins de 50 salariés. Ces entreprises sont celles qui ne sont pas tenues de mettre en place un régime de participation et qui développent peu l'intéressement. Leurs salariés bénéficient donc moins des dispositifs de partage de la valeur que ceux des entreprises de plus de 50 salariés.

Je vous proposerai donc d'adopter l'article 6, qui assure une transposition fidèle de l'accord.

L'article 7 tend à créer un nouveau dispositif permettant d'intéresser les salariés à la valorisation de leur entreprise. À la différence de l'actionnariat salarié, la prime de partage de la valorisation de l'entreprise viserait un public plus large, incluant notamment les salariés des entreprises non cotées. Mise en place via un accord spécifique, elle permettrait de verser aux salariés une prime qui reflète l'augmentation de la valeur de l'entreprise sur les trois dernières années, en bénéficiant d'un traitement fiscal et social incitatif. Ce dispositif comporte l'avantage de proposer un nouvel outil d'association des salariés aux performances de l'entreprise, sans pour autant déformer la structure du capital : ce qui est particulièrement préjudiciable pour les petites et moyennes entreprises (PME) familiales et les start-up.

Je vous inviterai en outre à adopter l'article 8, qui permet d'affecter les sommes perçues au titre de la prime de partage de la valeur et de la prime de partage de la valorisation de l'entreprise à un plan d'épargne entreprise ou à un plan d'épargne retraite.

Une troisième série de dispositions visent à simplifier les modalités d'attribution des outils de partage de la valeur.

L'article 9 permet d'étendre aux accords de participation la possibilité existante pour l'intéressement de prévoir le versement d'avances en cours d'exercice sur les sommes dues. Je vous propose d'adopter cette disposition, rendue nécessaire par la jurisprudence de la Cour de cassation.

Je vous proposerai en revanche de supprimer l'article 9 bis, qui prévoit que lorsque la déclaration des résultats d'un exercice est rectifiée par l'administration ou par le juge, le montant de la participation fait l'objet d'un nouveau calcul tenant compte des rectifications apportées. Cet article relève manifestement du domaine réglementaire et ne transpose aucune des stipulations de l'ANI.

L'article 10 vise à sécuriser la possibilité de fixer un salaire plancher et plafond en cas de choix d'une répartition de l'intéressement en fonction du salaire, ce qui permet une répartition des primes d'intéressement plus favorable aux bas salaires. Je vous propose d'approuver l'inscription de cette possibilité dans la loi, au même titre que ce qui est déjà prévu pour les accords de participation.

En revanche, je vous invite à supprimer l'article 10 bis ajouté par l'Assemblée nationale et qui précise que les critères de performance retenus dans le calcul de l'intéressement collectif des salariés peuvent contenir des critères de responsabilité sociale et environnementale de l'entreprise. Cette possibilité est déjà permise par le droit en vigueur. Elle est, en outre, employée par des entreprises qui prennent en compte, par exemple, la performance énergétique ou la réduction des déchets dans le calcul de l'intéressement. Afin d'encourager cette pratique et de sécuriser les employeurs qui y recourent, il serait plus utile que le pouvoir réglementaire précise le contrôle de ces critères par l'administration.

L'article 11 vise à simplifier la procédure de révision du contenu des plans d'épargne interentreprises, notamment en accélérant l'entrée en vigueur de la version modifiée du plan. Cet article, qui transpose fidèlement l'ANI, peut être adopté sans modification.

L'article 12 dispose que, pour l'attribution de l'intéressement et de la participation, un accord étendu de la branche professionnelle du travail temporaire puisse prévoir une durée d'ancienneté requise pour les salariés temporaires différente de celle des autres salariés, dans la limite de quatre-vingt-dix jours. Un tel accord pourra rehausser, pour les salariés temporaires, la durée d'ancienneté requise et concentrer ainsi le versement de l'intéressement et de la participation vers les salariés qui contribuent le plus aux performances de l'entreprise.

Cet article me semble assurer une transposition répondant à l'objectif des signataires de l'ANI, lesquels ont souhaité aménager les modalités de distribution de l'intéressement et de la participation pour limiter les effets de dilution des sommes versées dans le secteur du travail temporaire.

Enfin, un volet du texte vise à développer l'actionnariat salarié et à faciliter sa diffusion auprès des employeurs et des salariés.

L'article 13 rehausse les plafonds globaux d'attribution gratuite d'actions aux salariés, les portant respectivement à 15 % pour les entreprises de taille intermédiaire (ETI), 20 % pour les PME et 40 % pour les attributions dites démocratiques, c'est-à-dire celles qui concernent l'ensemble des salariés. Il introduit un principe de rechargement du plafond individuel de détention, pour permettre aux salariés actionnaires qui détiennent des actions depuis plus de sept ans de ne pas se voir opposer cette limitation de détention.

L'article 14 impose aux plans d'épargne salariale de proposer aux salariés au moins un fonds dit « engagé », c'est-à-dire participant au financement de la transition énergique et écologique ou investissement socialement responsable.

L'article 14 bis prévoit que certaines dépenses liées à la transition énergétique ou à l'activité de proche aidant puissent constituer des motifs de déblocage anticipé de l'épargne salariale. Je vous proposerai de le supprimer, car la liste des situations ouvrant droit à un déblocage anticipé relève d'un décret en Conseil d'État.

L'article 15 porte sur la modification des règles de gouvernance des fonds communs de placement d'entreprise, afin de renforcer l'information des salariés sur la politique d'engagement actionnarial du fonds en imposant, le cas échéant, à la société de gestion de rendre compte de sa politique de vote aux salariés.

Enfin, je vous inviterai à supprimer l'article 16, qui propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant les effets de l'article 11 de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte) sur la mise en oeuvre de l'obligation relative à la participation en entreprise.

Au total, je vous invite à adopter ce projet de loi, modifié par les amendements que je vous soumets. Ils visent à garantir une transposition fidèle de l'accord conclu par les partenaires sociaux, pour les mesures nécessitant l'intervention du législateur. Nous donnerons ainsi toute sa force au dialogue social, dans l'intérêt des salariés et des employeurs.

Pour terminer, il me revient de vous proposer un périmètre pour l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution. Je rappelle que la recevabilité des amendements s'apprécie au regard des dispositions du texte initial. Les amendements sont donc recevables s'ils présentent un lien, même indirect, non pas avec les stipulations de l'accord national interprofessionnel, mais avec le projet de loi déposé par le Gouvernement.

Je considère que ce périmètre comprend des dispositions relatives au dialogue social de branche en matière de classifications, à l'intéressement, à la participation, à l'épargne salariale, à la prime de partage de la valeur, à la définition et au partage des augmentations exceptionnelles de bénéfice, à la distribution d'une prime de partage de la valorisation de l'entreprise, à l'attribution gratuite d'actions et, enfin, aux fonds communs de placement d'entreprise.

En revanche, ne me semblent pas présenter de lien, même indirect, avec le texte déposé, et seraient donc considérés comme irrecevables des amendements relatifs au contrat de travail, aux congés, à la durée du travail et à la détermination du salaire, à la gouvernance des entreprises, aux règles financières et comptables applicables aux entreprises, aux prélèvements obligatoires assis sur d'autres éléments que ceux relevant du partage de la valeur des entreprises ou, enfin, à l'emploi et à la formation professionnelle.

Il en est ainsi décidé.

Mme Raymonde Poncet Monge. - Nous avons un désaccord sur ce que vous appelez la « transposition fidèle » de l'ANI. Il y a la lettre et il y a l'esprit de l'ANI. Contrairement aux syndicats patronaux, les organisations syndicales de salariés ne demandent absolument pas au législateur de transposer l'ANI en l'état.

Je rappelle que les amendements adaptés à l'Assemblée nationale ont été validés par les organisations signataires, patronat compris. Ces dernières ont estimé que les précisions proposées étaient intéressantes et qu'elles respectaient l'esprit de l'accord. Aussi, le détricotage des apports de l'Assemblée nationale que vous nous proposez a-t-il suscité l'étonnement des organisations syndicales. Cette transposition ne peut, en outre, être qualifiée de fidèle dans la mesure où des articles de l'ANI sont absents du projet de loi.

Le législateur n'est pas passif. À titre d'exemple, toutes les organisations syndicales de salariés disent que, pour rendre effectif le principe de substitution, il est absolument indispensable de dissocier la réunion de négociation annuelle obligatoire sur les salaires de la réunion de négociation sur le partage de la valeur. À défaut, on crée une sorte de pot-pourri : d'un côté des rémunérations récurrentes, soumises aux cotisations et à la fiscalité et qui, à ce titre, ouvrent des droits aux salariés, et, de l'autre, des rémunérations qui ne le sont pas. Or cette distinction relève bien, d'après les cinq organisations syndicales rencontrées, du rôle du législateur.

Par ailleurs, nous sommes ici en présence d'un nombre extraordinaire d'exonérations non compensées. Quant à l'effet de substitution, madame le rapporteur, il peut très bien - avec difficulté certes -, être évalué. Il l'a ainsi été par l'Insee, à hauteur de 30 %, et par le Conseil d'analyse économique (CAE), qui donne une fourchette de 15 % à 40 %, selon que l'on considère les données microéconomiques ou macroéconomiques. Au total, un tiers du montant des primes de partage de la valeur s'est substitué aux salaires et aurait du être soumis à cotisations. L'effet de substitution est donc massif, sauf dans un seul cas, celui de la participation.

Enfin, vous semblez souhaiter supprimer l'article 9 bis pour la simple raison qu'il a été ajouté par l'Assemblée nationale. Le Medef lui-même est d'accord pour le maintenir, considérant que l'imposition d'un nouveau calcul de la participation en cas de déclaration des résultats rectifiée peut figurer dans ce texte.

Entendez les partenaires sociaux. Maintenez les dispositions ayant obtenu leur aval dans le cadre d'un travail législatif intelligent.

Mme Cathy Apourceau-Poly. - Ce projet de loi sur le partage de la valeur est un nouveau trompe-l'oeil. Une fois de plus, vous nous proposez, pour lutter contre l'inflation, des solutions centrées uniquement sur les primes ou l'intéressement, sans jamais aborder la question centrale et cruciale de l'augmentation des salaires. Ce faisant, vous renforcez les difficultés des salariés, qui, pour nombre d'entre eux, peinent à obtenir un prêt. Nous le savons : les primes sont aléatoires et dépendent du bon vouloir du patron. Surtout, elles ne sont pas pérennes.

Dans la mesure où, comme l'intéressement, la prime de partage de la valeur n'est pas assujettie aux cotisations sociales, il s'agit une fois encore d'une exonération non compensée.

Par ailleurs, le Président de la République a proposé de verser la prime sur le plan d'épargne entreprise ou sur le plan d'épargne retraite. Cela revient à ce que le salarié lui-même contribue, par le fruit de son travail, à une épargne par capitalisation.

Il est tout de même assez inquiétant que l'on n'aborde plus jamais la question des hausses de salaire et qu'on ne prévoie que des primes ou des chèques, soumis au bon vouloir des entreprises.

Pour notre part, nous considérons que l'indexation des salaires sur l'inflation constituerait une réponse adaptée aux problèmes que rencontrent les salariés. L'augmentation des salaires installe en effet une rémunération dans la durée et garantit des droits pour la retraite.

Nous voterons évidemment contre ce texte et déposerons toute une série d'amendements, quand bien même nous savons par avance qu'ils seront frappés d'irrecevabilité au titre des articles 40 ou 45, comme chaque fois que nous proposons un projet alternatif, ce que nous regrettons fortement.

Mme Monique Lubin. - Je voudrais rappeler le cadre contraint dans lequel les négociations se sont déroulées. L'ANI a été rendu possible par la volonté du Gouvernement, qui souhaitait absolument aboutir à un accord, tout en occultant d'entrée toute disposition concernant les salaires. Les organisations syndicales ont certes signé cet accord, mais elles l'ont fait en raison des quelques avancées qu'il contient pour les salariés. Elles ont rappelé que la négociation salariale, autrement dit le nerf de la guerre, n'avait absolument pas été prise en compte. Elles ne sont donc ni convaincues ni totalement satisfaites.

Dans ce contexte, le rôle des parlementaires vient suppléer celui des partenaires sociaux. Notre groupe ne souhaite pas obérer les chances de voir se concrétiser certaines avancées, notamment pour les salariés des entreprises de moins de cinquante salariés. Il est toujours possible, cependant, d'améliorer les choses et il nous paraît inacceptable d'adopter un projet de loi qui serait moins-disant que l'accord signé par les partenaires sociaux.

Nous retenons de cet ANI qu'on y parle de tout, sauf de salaires. Nous ne croyons pas à la volonté inébranlable du patronat de les augmenter. Nous savons aussi que, comme nous, une partie du patronat est attachée au dialogue social. Si nous voyons dans ce projet de loi et cet accord des améliorations de certains pans du partage de la valeur, celui-ci ne contient absolument aucune disposition sur une augmentation des salaires, qui serait adaptée à toutes les entreprises.

Certes, et comme toujours, les entreprises qui réalisent les plus gros bénéfices pourront mieux partager leur valeur avec leurs salariés. En dépit des faibles avancées entrevues à l'article 2, je ne me fais en revanche aucune illusion pour les très petites entreprises : il n'y aura pas de partage de la valeur. La seule possibilité pour les travailleurs de voir leur situation s'améliorer réside dans la négociation salariale. Or on sait que dans les très petites entreprises, la négociation salariale est quasi inexistante.

En l'état actuel de la discussion, nous ne sommes donc pas totalement satisfaits du contenu de l'ANI, qui a été signé dans un cadre trop contraint. A minima, nous nous abstiendrons.

M. Daniel Chasseing. - Je vous félicite, madame  le rapporteur, pour votre présentation détaillée de ce projet d'une grande technicité.

Le partage de la valeur dans l'entreprise permet de concilier les apports du capital et du travail, renforcer la rémunération, lier la performance de l'entreprise au travail des salariés, accroître le pouvoir d'achat, en assurant une meilleure répartition des richesses. Ce projet de loi, issu de l'ANI de février 2023, s'inscrit dans la suite du projet du général de Gaulle. Il favorise la mise en place de dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Je veux rappeler, s'agissant de l'existence d'exonérations, que les entreprises doivent faire des bénéfices pour pouvoir verser des primes, et nous avons tout intérêt, au regard du système social, de disposer d'entreprises performantes, ayant un nombre élevé de cotisants. Or les exonérations permettent d'éviter un coût horaire du travail bien plus élevé en France que dans les autres pays européens.

Par ailleurs, des mesures telles que le partage de la valeur en cas de bénéfices exceptionnels, les modifications des modalités de versement de la prime, la mise en place d'un nouveau partage de la valorisation de l'entreprise, l'avance sur intéressement prévue à l'article 9 et la possibilité de calculer différemment l'intéressement pour les bas salaires vont toutes dans le bon sens.

Je suis donc tout à fait favorable à l'adoption de ce projet de loi transposant fidèlement les résultats de la négociation entre partenaires sociaux.

M. Olivier Henno. - Je salue moi aussi votre travail, madame le rapporteur, dans un contexte contraint sur les plans temporel et technique.

Partageant de nombreux points exprimés par Daniel Chasseing, je souhaite simplement revenir sur le principe retenu pour ce texte. Souvent, dans cette enceinte, nous avons déploré la faiblesse du dialogue social, la crise du paritarisme et le non-respect des corps intermédiaires. Voici un parfait exemple de concrétisation des résultats obtenus par le dialogue social !

Certes, pour assurer l'efficience du paritarisme, le législateur doit faire preuve d'un certain lâcher-prise et, comme dans le modèle rhénan, il faut accepter le fait qu'un tel accord reflète un équilibre. Si l'on s'arrête aux points de vue des uns et des autres, on va forcément se retrouver à détricoter l'ANI !

Il me semble donc important de respecter cet accord. Parce que nous l'aurons respecté, parce que nous aurons matérialisé les fruits du paritarisme et, ainsi, affirmé l'importance à nos yeux du dialogue social, nous serons plus forts au moment d'engager les discussions budgétaires à venir, notamment au vu des évolutions envisagées pour l'Agirc-Arrco.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Effectivement, il est parfois important, en tant que législateurs, de s'effacer... Goûtons d'abord notre plaisir de voir que les partenaires sociaux ont trouvé un accord - ce n'était pas gagné ! - et, dès lors que nous parlons d'accord, acceptons l'idée qu'il s'agit d'un équilibre.

Je le dis, car le terme « détricoter » me semble un peu fort. Que s'est-il passé ? Une fois que l'accord a été trouvé, certaines organisations patronales ou syndicales sont venues frapper à la porte pour demander que l'on ajoute tel ou tel point. J'ai refusé, considérant qu'il fallait respecter l'équilibre trouvé.

Le ministre, voilà une semaine, nous indiquait que les partenaires sociaux avaient été consultés sur un certain nombre d'amendements déposés à l'Assemblée nationale. Non seulement ceux-ci n'ont pas confirmé au cours des auditions que cette consultation avait été systématique , mais ils ont même indiqué que cette allégation était fausse s'agissant de la date d'entrée en vigueur de l'expérimentation prévue à l'article 3.

Pour ma part, je souhaite respecter l'accord national interprofessionnel. Simplement ; ayant travaillé dans le privé, je sais l'importance de rendre les dispositions du code du travail lisibles pour les directeurs des ressources humaines. Je propose donc de ramener au domaine réglementaire les éléments qui en relèvent. Ce n'est pas, me semble-t-il, en les érigeant en dispositions législatives que leur application sera plus aisée. Au contraire, ce sera encore moins lisible.

Je conteste donc la critique concernant un « détricotage » du texte et j'ai prévenu mon collègue rapporteur de l'Assemblée nationale que je souhaitais procéder à des réajustements entre domaines réglementaire et législatif.

Par ailleurs, le principe de la substitution peut constituer un sujet. Mais force est de constater que les salaires ont un peu augmenté, même si ce n'est pas à la hauteur espérée. Il faut aussi saluer le versement de primes dans un contexte contraint et, comme l'a souligné Daniel Chasseing, avec un coût du travail assez élevé par rapport au reste de l'Europe. Je précise, à cet égard, que nous parlons de primes très encadrées, impliquant un dialogue social au sein des branches et des entreprises.

Cela étant dit, nous avons quelques rendez-vous... Le Gouvernement s'est ainsi engagé à voir, à la fin de l'année 2024, si d'éventuels phénomènes de substitution n'auraient pas entraîné des pertes pour le budget de la sécurité sociale, ce qui pourrait amener des mesures compensatoires. Je rappelle également, sans me faire pour autant le porte-parole du Gouvernement, l'ouverture lundi prochain de la conférence sociale sur les bas salaires. Nous y serons particulièrement attentifs.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Mon amendement  COM-11 tend à revenir aux termes retenus dans le cadre de l'ANI, lequel se réfère à l'article L.2241-15 du code du travail.

L'amendement COM-11 est adopté.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. -Mon amendement  COM-12 vise à supprimer la possibilité donnée aux organisations syndicales, à défaut d'initiative de la partie patronale, d'engager des négociations de branche. Ce n'est pas conforme à l'ANI.

L'amendement COM-12 est adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 1er

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet amendement vise à distinguer les thèmes du partage de la valeur et des salaires dans le cadre de la négociation obligatoire en entreprise. Les organisations syndicales et patronales n'étaient pas claires sur ce qu'elles entendaient précisément et les contraintes s'imposant au dialogue social ne permettent pas toujours la multiplication des réunions. Avis défavorable.

L'amendement COM-5 n'est pas adopté.

Article 1erbis (nouveau)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Le dispositif de l'article 1er bis est déjà prévu dans la loi. Je propose donc la suppression de l'article.

L'amendement COM-13 est adopté.

L'article 1er bis est supprimé.

Article 2 A (nouveau)

L'article 2 A est adopté sans modification.

Article 2

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'amendement COM-6 vise à supprimer le recours à une formule de calcul de la réserve spéciale de participation dérogatoire moins-disante pour les entreprises de moins de 50 salariés. Il n'est pas conforme à l'ANI.

L'amendement COM-6 n'est pas adopté.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'amendement  COM-14 tend à supprimer un alinéa de l'article 2, prévoyant la remise d'un rapport par le Gouvernement.

L'amendement COM-14 est adopté.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Il n'y a pas besoin d'inscrire dans la loi le principe de transmission aux organisations syndicales et patronales d'un suivi annuel. Son inscription dans l'ANI suffit. Mon amendement  COM-15 supprime donc cette disposition.

L'amendement COM-15 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3

L'amendement de précision rédactionnelle COM-16 est adopté.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'article 3 prévoit une expérimentation pour les entreprises employant de 11 à 49 salariés et réalisant durant trois exercices un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % de leur chiffre d'affaires. Les auteurs de l'amendement  COM-7 ne souhaitent pas que le versement d'une prime de partage de la valeur soit possible dans un tel cadre, ce qui est contraire à l'ANI. Avis défavorable.

L'amendement COM-7 n'est pas adopté.

L'amendement de précision rédactionnelle COM-17 est adopté.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Mon amendement  COM-18 porte sur une question déjà évoquée. Nos collègues députés ont estimé pouvoir déroger à l'ANI, en modifiant la date d'entrée en vigueur du dispositif prévu à l'article 3. L'accord fixe un démarrage au 1er janvier 2025, avec prise en compte, pour le calcul du bénéfice, des exercices 2022, 2023 et 2024. En avançant cette date, il faudrait considérer les bénéfices sur les exercices 2021, 2022 et 2023. Or, comme l'ont indiqué les partenaires sociaux, l'exercice 2021 a été marqué par la crise sanitaire. Je propose donc de revenir aux termes de l'ANI.

L'amendement COM-18 est adopté.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Mon amendement  COM-19 a pour objet la suppression de l'alinéa 10, qu'il ne semble pas nécessaire de transcrire dans la loi ; l'ANI suffit.

L'amendement COM-19 est adopté.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3 bis (nouveau)

Les amendements rédactionnels COM-20 et COM-21 sont adoptés.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - De même qu'au précédent article, je propose, avec l'amendement  COM-22, de revenir à une date d'entrée en vigueur au 1er janvier 2025 pour les employeurs de l'économie sociale et solidaire.

L'amendement COM-22 est adopté.

L'article 3 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 4

L'article 4 est adopté sans modification.

Article 5

L'amendement de précision rédactionnelle COM-23 est adopté.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 6

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'article 6 prévoit une prolongation temporaire au-delà de 2023 des exonérations fiscales et sociales sur la prime de partage de la valeur pour les entreprises de moins de 50 salariés. L'amendement  COM-8 vise à assujettir cette prime aux cotisations d'assurance vieillesse. Ce n'est pas conforme à l'ANI, d'où un avis défavorable.

Mme Raymonde Poncet Monge. - Nous sortons d'un débat sur les retraites, dans lequel ce qui a été sanctionné, c'est un déficit lié non pas à une dynamique de dépenses, mais à un déficit de recettes. Il me semble particulièrement osé, juste après avoir imposé un report de deux ans de l'âge de la retraite pour alimenter les recettes, de proposer des dispositifs, exempts de toute cotisation ou forfait social, qui vont cannibaliser l'intéressement et la participation.

Par ailleurs, lorsque l'on retire l'inflation et les primes non récurrentes, les salaires n'ont absolument pas augmenté.

Nous demandons donc, au moins, des cotisations d'assurance vieillesse, ou alors que l'État compense ! Il ne peut pas mettre les caisses en déficit pour, derrière, réaliser ses réformes structurelles.

L'amendement COM-8 n'est pas adopté.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Dans la logique de mon commentaire précédent, l'avis est défavorable à l'amendement  COM-9, visant à supprimer les exonérations de CSG et de CRDS sur la prime de partage de la valeur.

L'amendement COM-9 n'est pas adopté.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'amendement  COM-10 est déjà satisfait. Je le rappelle, l'évaluation mise en oeuvre d'ici à la fin de l'année 2024 devra permettre d'examiner s'il y a eu substitution et, le cas échéant, mettre en place des compensations. Avis défavorable.

L'amendement COM-10 n'est pas adopté.

L'amendement de coordination COM-24 est adopté.

L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 7

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - D'après Michel Canévet, auteur de l'amendement  COM-3, le dispositif de partage de la valorisation de l'entreprise créé à l'article 7 est assez proche du dispositif de partage des plus-values de cession introduit dans la loi Pacte et nécessite donc une articulation. Sa proposition de modification est loin de l'ANI, d'où un avis défavorable.

L'amendement COM-3 n'est pas adopté.

Les amendements rédactionnels COM-25 et COM-26 sont adoptés.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'amendement  COM-27 tend à supprimer une demande de rapport au Gouvernement.

L'amendement COM-27 est adopté.

L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 8

L'amendement rédactionnel COM-28 est adopté.

L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 8

L'amendement COM-1 rectifié est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

Article 9

L'article 9 est adopté sans modification.

Article 9 bis (nouveau)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avec l'article 9 bis, qui permet un nouveau calcul de la participation en cas de rectification des résultats de l'entreprise, nos collègues de l'Assemblée nationale ont repris dans le projet de loi une disposition réglementaire. Cela ne me semble pas souhaitable, d'autant que la disposition ne figure pas dans l'ANI. Mon amendement  COM-29 tend donc à supprimer l'article 9 bis.

L'amendement COM-29 est adopté.

L'article 9 bis est supprimé.

Article 10

L'article 10 est adopté sans modification.

Article 10 bis (nouveau)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Il est déjà possible de mentionner des critères relevant de la responsabilité sociale et environnementale (RSE) de l'entreprise dans le calcul de l'intéressement. Les partenaires sociaux ont demandé, dans le cadre de l'ANI, que puisse être précisée la notion de « caractère aléatoire », à laquelle, je le rappelle, est soumis l'intéressement. L'article 10 bis, tel qu'il est rédigé, ne répond pas à ces attentes. Je propose donc de renvoyer cette question à un décret et, par l'amendement  COM-30, de supprimer l'article.

L'amendement COM-30 est adopté.

L'article 10 bis est supprimé.

Articles 11 et 12

Les articles 11 et 12 sont successivement adoptés sans modification.

Article 13

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'article 13 vise à rehausser les plafonds globaux d'attribution gratuite d'actions et à permettre le rechargement du plafond individuel de détention d'un capital social. L'amendement  COM-2 vise à ramener le délai du rechargement de 7 ans à 3 ans. Rien n'est spécifié dans l'ANI, mais l'établissement par nos collègues de l'Assemblée nationale d'un délai à sept ans n'a pas donné lieu à des réactions de la part des organisations syndicales ou patronales. Je propose donc d'en rester là.

L'amendement COM-2 n'est pas adopté.

L'article 13 est adopté sans modification.

Après l'article 13

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'amendement  COM-4 est un amendement technique, visant une extension de l'avantage fiscal dont bénéficient les apports de titres consécutifs aux seules attributions gratuites d'actions dites « démocratiques », c'est-à-dire profitant à tous les salariés, à celles qui concernent au moins 50 % des salariés de l'entreprise. L'ANI comprend bien un dispositif pour généraliser cette neutralisation fiscale à l'ensemble des apports de titres des salariés. Mais, le Gouvernement n'ayant pas répondu à notre interrogation sur ce point, nous ne savons pas si la rédaction assurerait une transposition nécessaire de l'ANI et fidèle au souhait des partenaires sociaux. J'émets donc, à ce stade, un avis défavorable, en proposant à l'auteur de l'amendement de le présenter à nouveau en séance pour connaître l'avis du Gouvernement.

Mme Raymonde Poncet Monge. - En réalité, la distribution gratuite d'actions bénéficie actuellement à peu de salariés, et surtout à ceux qui perçoivent les salaires les plus élevés. Il est, en quelque sorte, « anti-redistributif », ce qui explique la volonté des syndicats d'en améliorer le caractère démocratique.

L'amendement COM-4 n'est pas adopté.

Article 14

L'amendement de coordination COM-31 est adopté.

L'article 14 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 14 bis (nouveau)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'article 14 bis vise à permettre le déblocage anticipé de l'épargne salariale en cas de dépenses liées à la transition énergétique ou à une activité de proche aidant. J'y suis défavorable, car les situations ouvrant droit au déblocage anticipé sont énumérées dans un décret en Conseil d'État. Je propose donc, avec l'amendement  COM-32, de supprimer l'article.

L'amendement COM-32 est adopté.

L'article 14 bis est supprimé.

Article 15

L'article 15 est adopté sans modification.

Article 16 (nouveau)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'amendement  COM-33 tend à supprimer l'article 16 proposant la remise d'un rapport par le Gouvernement.

L'amendement COM-33 est adopté.

L'article 16 est supprimé.

Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

TABLEAU DES SORTS

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

TITRE Ier : RENFORCER LE DIALOGUE SOCIAL SUR LES CLASSIFICATIONS

Article 1er
Négociation de branche visant à réviser les classifications

Mme PUISSAT, rapporteur

11

Rétablissement de la prise en compte de l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois dans le cadre du dialogue social de branche sur les classifications

Adopté

Mme PUISSAT, rapporteur

12

Suppression de la possibilité que la négociation s'engage dans les quinze jours suivant la demande d'une organisation syndicale à défaut d'initiative de la partie patronale

Adopté

Articles additionnels après l'article 1er

Mme PONCET MONGE

5

Distinction des thèmes du partage de la valeur et des salaires dans le cadre de la négociation obligatoire en entreprise

Rejeté

Article 1er bis (nouveau)
Bilan de l'action des branches en faveur de la mixité des emplois

Mme PUISSAT, rapporteur

13

Suppression de l'article

Adopté

TITRE II : FACILITER LA GÉNÉRALISATION DES DISPOSITIFS DE PARTAGE DE LA VALEUR

Article 2
Dispositif de participation dérogatoire pour les entreprises de 50 salariés

Mme PONCET MONGE

6

Suppression du recours à une formule de calcul de la réserve spéciale de participation moins-disante ouverte pour les entreprises de moins de cinquante salariés qui optent volontairement pour un régime de participation

Rejeté

Mme PUISSAT, rapporteur

14

Suppression d'une demande de rapport

Adopté

Mme PUISSAT, rapporteur

15

Suppression de la demande de suivi annuel de l'application de la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés

Adopté

Article 3
Expérimentation de la généralisation des dispositifs de partage
de la valeur dans les entreprises de moins de 11 à 49 salariés

Mme PUISSAT, rapporteur

16

Précision rédactionnelle

Adopté

Mme PONCET MONGE

7

Impossibilité de verser la prime de partage de la valeur dans le cadre de l'obligation faite aux entreprises de 11 à 49 salariés de mettre en place au moins un outil de partage de la valeur

Rejeté

Mme PUISSAT, rapporteur

17

Précision rédactionnelle

Adopté

Mme PUISSAT, rapporteur

18

Application aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024 de l'obligation faite aux entreprises de 11 à 49 salariés de mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur

Adopté

Mme PUISSAT, rapporteur

19

Suppression de la disposition selon laquelle un suivi annuel de l'application de l'article est transmis aux organisations syndicales et patronales

Adopté

Article 3 bis (nouveau)
Expérimentation de la généralisation des dispositifs de partage
de la valeur dans le secteur de l'économie sociale et solidaire

Mme PUISSAT, rapporteur

20

Précisions rédactionnelles

Adopté

Mme PUISSAT, rapporteur

21

Précisions rédactionnelles

Adopté

Mme PUISSAT, rapporteur

22

Application aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024 de l'obligation faite aux employeurs de l'économie sociale et solidaire d'instituer au moins un dispositif de partage de la valeur

Adopté

Article 5
Partage de la valeur en cas d'augmentation exceptionnelle du bénéfice

Mme PUISSAT, rapporteur

23

Précision rédactionnelle

Adopté

Article 6
Ajustement de la prime de partage de la valeur et prolongation de son régime social et fiscal temporaire
pour les entreprises de moins de 50 salariés

Mme PONCET MONGE

8

Assujettissement de la prime de partage de la valeur aux cotisations d'assurance vieillesse

Rejeté

Mme PONCET MONGE

9

Suppression des exonérations de cotisations sociales et de CSG-CRDS sur la prime de partage de la valeur

Rejeté

Mme PONCET MONGE

10

Compensation intégrale par le budget de l'État des exonérations de cotisations de sécurité sociale sur la prime de partage de la valeur

Rejeté

Mme PUISSAT, rapporteur

24

Coordination tirant les conséquences de la possibilité de verser deux primes au cours d'une même année civile pour les primes qui seront versées au titre de l'année 2023 dans le cadre du régime d'exonération temporaire 

Adopté

Article 7
Prime de partage de la valorisation de l'entreprise

M. CANÉVET

3

Modification du régime applicable au partage des plus-values de cession aux salariés

Rejeté

Mme PUISSAT, rapporteur

25

Précision rédactionnelle

Adopté

Mme PUISSAT, rapporteur

26

Précision rédactionnelle

Adopté

Mme PUISSAT, rapporteur

27

Suppression d'une demande de rapport au Gouvernement

Adopté

Article 8
Affectation des primes de partage et la valeur et de valorisation de l'entreprise à des plans d'épargne salariale

Mme PUISSAT, rapporteur

28

Rédactionnel

Adopté

Articles additionnels après l'article 8

Mme PAOLI-GAGIN

1 rect.

Présentation des actions de mécénat territorial dans la déclaration de performance extra-financière des entreprises

Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution

TITRE III : SIMPLIFIER LA MISE EN PLACE DES DISPOSITIFS DE PARTAGE DE LA VALEUR

Article 9 bis (nouveau)
Nouveau calcul de la participation en cas de rectification des résultats de l'entreprise

Mme PUISSAT, rapporteur

29

Suppression de l'article

Adopté

Article 10 bis (nouveau)
Mention des critères de responsabilité sociale et environnementale dans le calcul de l'intéressement

Mme PUISSAT, rapporteur

30

Suppression de l'article

Adopté

TITRE IV : DÉVELOPPER L'ACTIONNARIAT SALARIÉ

Article 13
Rehausser les plafonds globaux d'attribution gratuite d'actions et permettre le rechargement du plafond individuel

M. CANÉVET

2

Abaissement du délai de rechargement du plafonnement individuel de détention de capital de l'entreprise à 3 ans

Rejeté

Articles additionnels après l'article 13

M. CANÉVET

4

Extension de l'avantage fiscal dont bénéficient les apports de titres consécutifs aux seules attributions gratuites d'actions dites démocratiques à celles qui bénéficient à au moins 50 % des salariés de l'entreprise.

Rejeté

Article 14
Mieux orienter l'épargne salariale vers des fonds d'investissements
à visées sociale ou environnementale

Mme PUISSAT, rapporteur

31

Coordination

Adopté

Article 14 bis (nouveau)
Déblocage anticipé de l'épargne salariale pour des dépenses liées à la transition énergétique
ou à l'activité de proche aidant

Mme PUISSAT, rapporteur

32

Suppression de l'article

Adopté

Article 16 (nouveau)
Rapport au Parlement sur le calcul des seuils d'effectifs applicables pour la participation en entreprise

Mme PUISSAT, rapporteur

33

Suppression de l'article

Adopté

COMPTE RENDU DES AUDITIONS

Audition de M. Olivier Dussopt, ministre du travail,
du plein emploi et de l'insertion

(Jeudi 5 octobre 2023)

M. Philippe Mouiller, président. - Nous recevons M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Cette audition fait l'objet d'une captation vidéo retransmise en direct sur le site du Sénat et disponible en vidéo à la demande.

Monsieur le ministre, le Sénat est saisi du projet de loi portant transposition de l'accord national interprofessionnel (ANI) relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise, adopté par l'Assemblée nationale le 29 juin 2023 après engagement de la procédure accélérée. Notre commission devrait l'examiner dès la semaine prochaine, mercredi 11 octobre, avant son passage en séance qui pourrait intervenir les mardi 17 et mercredi 18 octobre si la conférence des présidents en décidait ainsi.

Je rappelle que chemine en parallèle à l'Assemblée nationale le projet de loi pour le plein emploi, adopté par le Sénat le 11 juillet dernier. Il est donc probable que des commissions mixtes paritaires seront convoquées au cours des prochaines semaines afin d'essayer d'élaborer une version commune de chacun de ces textes.

Je vous laisse la parole, monsieur le ministre, pour un propos introductif, après quoi notre rapporteur, Mme Frédérique Puissat, et les autres commissaires qui le souhaiteront vous interrogeront.

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. -Permettez-moi, monsieur le président, madame la rapporteure générale, de vous féliciter pour votre élection, ainsi que l'ensemble des nouvelles sénatrices et nouveaux sénateurs.

Le calendrier de l'examen du projet de loi portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise est très serré, car nous souhaitons que ce texte puisse entrer en vigueur le 1er janvier 2024. Le temps nous est donc compté.

La méthode retenue pour l'examen du projet de loi à l'Assemblée nationale a été respectueuse de l'accord signé par les trois organisations patronales représentatives et par quatre des cinq organisations syndicales représentatives - CFDT, CFTC, Force ouvrière, CFE-CGC. J'ai veillé, avec mon équipe, à ce que chaque amendement déposé, par le Gouvernement ou par les députés, fasse l'objet d'un accord unanime des sept organisations signataires de cet accord, afin d'assurer l'intégralité et la fidélité de la transposition.

Ce texte s'inscrit dans la droite ligne de ceux que nous avons portés dans le domaine de l'intéressement et de la participation. Je pense à la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite « loi Pacte », qui a notamment simplifié la mise en place des accords d'intéressement et de participation dans les PME en rendant ces dispositifs attractifs pour les petites entreprises, et à la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, qui a facilité le recours à l'intéressement dans les PME et instauré une nouvelle prime de partage de la valeur (PPV). En 2022, cette prime - un bon outil dont les entreprises se sont saisies - a profité à plus de 5,5 millions de salariés, pour un montant total de près de 4,4 milliards d'euros. Contrairement à ce que d'aucuns craignaient, le montant moyen de la prime est plus important dans les petites entreprises que dans les grandes, ce qui démontre l'attrait de ce dispositif pour les premières. De manière générale, les dispositifs de partage de la valeur fonctionnent bien dans notre pays. En 2020, la prime moyenne dans les entreprises de plus de dix salariés, tous dispositifs confondus, était de 2 440 euros, pour un total de 19 milliards d'euros au niveau national.

En vue de la négociation, nous avons rappelé aux partenaires sociaux quels sont les dispositifs existants et insisté sur un certain nombre de principes - en particulier, les dispositifs de partage ne sauraient se substituer au salaire. D'ailleurs, parallèlement aux discussions menées sur cet accord, il existe des outils comme l'indexation du Smic sur l'inflation, laquelle a conduit à opérer plusieurs revalorisations successives, permettant d'assurer une dynamique des salaires : ceux-ci ont connu une revalorisation globale de 12,4 % en trois ans. En 2022, nous avons renforcé l'obligation de négociation des branches dès lors qu'un minimum conventionnel passe en deçà du niveau du Smic.

Nous voulons donc transposer cet accord dans la loi, dans l'objectif de développer l'intéressement et la participation dans toutes les entreprises, y compris celles qui comptent moins de 50 salariés. Actuellement, ces dispositifs fonctionnent mieux dans les grandes entreprises que dans les petites : 70 % des salariés ont accès à la participation dans les entreprises de plus de 100 salariés, contre 3 % dans les entreprises de moins de 10 salariés et 6 % dans les entreprises de 10 à 49 salariés. Sur la base de ces constats, en septembre 2022, nous avons saisi les partenaires sociaux en vue d'une négociation. Leurs discussions ont abouti le 10 février 2023 à la signature de l'accord interprofessionnel.

Le projet de loi comporte des mesures concrètes visant à revaloriser le travail et à associer les salariés.

Les signataires de l'accord ont accordé une grande importance à la question des classifications. En effet, si les organisations représentatives de branche doivent en principe se réunir tous les cinq ans afin d'examiner la nécessité de réviser lesdites classifications dans le cadre des conventions collectives, il s'avère que tel n'est pas toujours le cas. Au 30 septembre 2023, 63 % des branches du secteur général n'avaient pas procédé à la révision des grilles de classification depuis plus de cinq ans, 43 % d'entre elles ne l'avaient pas fait depuis plus de dix ans et 9 % depuis plus de vingt ans. L'enjeu est d'éviter que les rémunérations ne soient trop « plates ».

Tout d'abord, et c'est un point essentiel, le projet de loi prévoit l'obligation, pour les branches n'ayant pas procédé à l'examen de la révision des classifications depuis cinq ans, d'engager d'ici au 31 décembre 2023 une négociation dans ce domaine.

Ensuite, il s'agit de développer le partage de la valeur, en particulier dans les petites et moyennes entreprises. Nous voulons encourager la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés, celles qui ne sont pas soumises à l'obligation de mise en place de ce dispositif. Le texte permet de négocier, par accord de branche ou par accord d'entreprise, des formules de participation dérogatoires à la formule légale, laquelle constitue parfois un frein au développement du partage de la valeur dans ces entreprises.

Parallèlement, l'article 2A introduit un principe de non-substitution, afin que le projet de loi soit aussi équilibré que l'accord conclu.

Le texte prévoit aussi que les entreprises de 11 à 50 salariés devront mettre en place un dispositif de partage de la valeur dès lors que leur bénéfice net fiscal positif sera supérieur à 1 % de leur chiffre d'affaires pendant trois années consécutives. Cet outil a pour objectif de rendre le dispositif obligatoire lorsque ces entreprises sont durablement bénéficiaires. L'Assemblée nationale a prévu, à la demande des partenaires sociaux concernés et avec l'accord des organisations signataires, que cette nouvelle obligation s'applique aussi aux structures de l'économie sociale et solidaire (ESS).

Sur l'initiative de M. Louis Margueritte, rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, il a été prévu d'avancer d'un an la date d'entrée en vigueur de cette disposition. Ce choix me paraît proportionné, puisque les entreprises peuvent satisfaire cette obligation par la mise en place du seul dispositif de la PPV ; mais nous aurons l'occasion de continuer d'en débattre.

Les entreprises de plus de 50 salariés qui seront soumises à l'obligation de mise en place d'un dispositif de participation auront jusqu'au 30 juin 2024 pour engager une négociation sur les conséquences que doivent emporter d'éventuels bénéfices exceptionnels sur le partage de la valeur. La rédaction de l'article 5 est désormais juridiquement sécurisée : nous avons repris les recommandations du Conseil d'État en précisant les critères pour la définition de l'augmentation exceptionnelle du bénéfice.

L'accord signé par les partenaires sociaux renvoyait la définition du caractère exceptionnel du résultat à la seule entreprise, donc au chef d'entreprise. Or nous étions convaincus - nous l'avons indiqué aux partenaires sociaux - qu'il y aurait là un cas flagrant d'incompétence négative. Aussi le Conseil d'État nous a-t-il signalé que la difficulté soulevée était bien réelle. Nous avons donc corrigé le texte avant son passage devant l'assemblée générale du Conseil d'État, en plein accord avec les partenaires sociaux signataires de l'ANI. Ladite assemblée générale a malgré tout émis un avis très réservé sur le sujet et formulé en conséquence des propositions et recommandations de sécurisation qui ont donné lieu à des amendements présentés à l'Assemblée nationale, là encore avec l'accord des signataires.

Par ailleurs, l'exonération fiscale applicable aux primes de partage de la valeur versées aux salariés dont la rémunération est inférieure à trois Smic sera prolongée jusqu'au 31 décembre 2026 dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Enfin, le projet de loi crée de nouveaux outils en vue d'améliorer l'actionnariat salarié et de rénover certains dispositifs existants. Il crée ainsi un « plan de partage de la valorisation de l'entreprise », pour une durée de trois ans. Mis en place pour l'ensemble des salariés et par accord d'entreprise, il permet aux salariés de bénéficier d'une prime lorsque la valeur de l'entreprise a augmenté sur les trois années de la durée du plan. Cet outil innovant permet de développer le partage de la valeur et la valorisation de l'entreprise ainsi que de fidéliser les salariés dans un contexte de tensions de recrutement.

Ce projet de loi facilite également l'utilisation de la prime de partage de la valeur. Les entreprises pourront par exemple verser jusqu'à deux primes par an au lieu d'une seule, notamment sur un plan d'épargne salariale, ce qui permettra aux salariés de bénéficier d'une exonération fiscale pour les sommes bloquées.

Enfin - je l'ai évoqué -, le texte développe l'actionnariat salarié par l'ouverture d'une plus grande portion du capital aux salariés actionnaires : augmentation des plafonds de versement d'actions gratuites ; promotion d'une épargne verte, solidaire et responsable via les plans d'épargne entreprise (PEE) et les plans d'épargne retraite entreprise (Pere) - il sera obligatoire de proposer au moins un fonds finançant la transition écologique et sociale ; amélioration de la gouvernance des fonds d'actionnariat salarié en vue d'une transparence accrue.

Les autres dispositions du projet de loi sont des articles de simplification, extrêmement techniques. Je souhaite évidemment que cet accord bénéficie de toute la force législative nécessaire à son entrée en vigueur.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Je commencerai, monsieur le ministre, par vous faire part de notre inquiétude. Nous comprenons qu'il faille aller vite sur ce texte. Pour autant, nous avons commencé à procéder aux auditions avant que la commission des affaires sociales ne soit constituée : un certain nombre de commissaires n'ont pu y assister, et nous n'avions pas de président. Il ne faut pas confondre vitesse et précipitation !

Un point nous a satisfaits. Vous aviez demandé aux partenaires sociaux, en septembre 2022, d'engager des discussions, dans un contexte difficile, marqué par des enjeux forts de pouvoir d'achat pour les salariés et par une grande incertitude économique pour un certain nombre d'entreprises. Or les organisations syndicales et professionnelles, pourtant entrées à reculons dans ces discussions, sont parvenues à un accord national interprofessionnel (ANI). Nous pouvons en être fiers, car le coeur du réacteur, dans l'entreprise, ce sont les salariés et les employeurs, que représentent lesdites organisations. Le législateur doit parfois savoir s'effacer au profit d'un ANI ; c'est précisément ce que je vous proposerai dans ce texte, dont nous souhaitons qu'il respecte l'ANI à la lettre, afin de respecter la parole des partenaires sociaux et le travail qui a été fait.

J'en viens à quatre questions.

Vous avez évoqué les travaux menés par les députés et confirmé que des amendements avaient été soumis pour avis aux organisations syndicales et patronales. Le Sénat sera-t-il logé à la même enseigne ? Nous souhaitons nous aussi être en phase avec la parole des partenaires sociaux.

Certaines mesures de l'accord relèvent du législatif et d'autres du réglementaire, ce qui imposera de procéder à quelques ajustements au cours de nos discussions afin d'assurer la lisibilité de ces outils. Pouvez-vous nous donner le calendrier d'adoption des textes réglementaires ? Comment pourrons-nous suivre l'application de cet ANI ?

Concernant le travail temporaire, autrement dit l'intérim, un certain nombre de règles ont été adaptées, mais les représentants du secteur nous disent que nous n'allons pas assez loin. Pourrons-nous adapter cet outil, dans le respect de l'ANI ?

Nous avons déjà échangé, monsieur le ministre, à propos de l'économie sociale et solidaire. Il s'agit d'un champ très vaste, qui concerne aussi les collectivités locales, dont les subventions jouent un rôle crucial. Bien sûr, nous souhaitons que l'ESS développe les dispositifs de partage de la valeur, mais nous sommes aussi tous attachés à ce qu'aucune pression ne s'exerce à ce propos sur les collectivités territoriales. Nous pourrions envisager un aménagement du texte en ce sens : qu'en pensez-vous ?

M. Olivier Dussopt, ministre. - Pour ce qui est du calendrier, nous devons aller vite, vu les dates négociées par les partenaires sociaux. Il s'agit qu'ils puissent ouvrir les négociations avant le 31 décembre 2023 sur la base d'un texte publié. Mais, comme à chaque début de session parlementaire, l'examen des textes budgétaires fait qu'il n'y a pas beaucoup de créneaux disponibles. La configuration actuelle de l'Assemblée nationale conduira peut-être à accélérer les choses, mais le Sénat, quant à lui, aura tout loisir de discuter des textes financiers, ce qui occupera un certain nombre de semaines.

Je réponds quatre fois « oui » à vos quatre questions ! Chaque avis favorable que j'émettrai sur un amendement déposé par des sénateurs sera conditionné à l'accord des sept partenaires sociaux. Et chaque amendement que je déposerai, le cas échéant, au nom du Gouvernement le sera aussi. Pour que cette mécanique fonctionne, je souhaite travailler en lien étroit avec vous, madame le rapporteur, et avec l'ensemble des sénateurs qui le souhaitent.

Sur le travail temporaire, vous avez mon approbation, dès lors que les partenaires sociaux sont d'accord et qu'il est tenu compte de l'avis du Conseil d'État - j'ai en tête un certain nombre de risques que cette institution a soulignés. À ces deux nuances près, je ne vois pas de difficulté pour que nous avancions.

Nous avons bel et bien évoqué ensemble l'ESS il y a deux jours, et il demeure une difficulté dans la méthode. Je vous propose que nous y travaillions de concert d'ici l'examen du texte en séance publique. Nous ne disposons pas de données consolidées sur le total des subventions perçues par les entreprises en général, et celles de l'ESS en particulier. Or nous avons besoin de connaître les subventions perçues de la part de l'État, des collectivités locales et de la sécurité sociale. Continuons donc le travail d'expertise sur ce sujet, comme nous en étions convenus, pour éviter d'adopter une mesure inapplicable.

Sur la répartition entre législatif et réglementaire, je connais vos réserves. Vous considérez qu'un certain nombre de dispositions adoptées par l'Assemblée nationale relèvent du domaine réglementaire. Certes ; j'ajoute que d'autres mesures du texte peuvent sembler satisfaites par le droit existant. Je pense à l'article 2 A, sur le principe de non-substitution, principe qui est prévu de manière explicite dans le code du travail. C'est que les signataires de l'ANI sont attachés à ce que le projet de loi soit représentatif de l'équilibre qu'ils ont trouvé.

Nous sommes en train d'élaborer le calendrier de publication des textes réglementaires nécessaires, et nous le partagerons avec vous sans aucune difficulté.

Mme Monique Lubin. - Monsieur le ministre, il s'agit ici de transposer un ANI sur le partage de la valeur au sein de l'entreprise, qui a été signé par la quasi-totalité des syndicats, à l'exception notable, tout de même, de la CGT.

Si cet accord apporte quelques améliorations, je souhaite en préambule rappeler le résultat des travaux sur le sujet de l'organisation non gouvernementale Oxfam, qui dénonce le déséquilibre croissant du partage de la valeur en faveur des actionnaires au détriment des salariés.

J'ai par ailleurs quelques questions. Dans la lettre de cadrage envoyée aux partenaires sociaux en amont des négociations de l'ANI, le choix du Gouvernement s'est porté non sur des discussions sur les salaires, mais sur le partage de la valeur. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de ce choix ? Disposons-nous d'une évaluation des dispositifs visant à éviter la substitution des primes et dispositifs de partage de la valeur au salaire ? Le cas échéant, quels ont été les résultats de ces évaluations lorsqu'elles ont eu lieu ?

Le versement de primes de partage de la valeur exonérées de cotisations sociales risque d'occasionner un manque à gagner pour les assurances sociales, du fait de la substitution aux salaires. Avez-vous évalué le montant de ce manque à gagner ? Comment envisagez-vous de le combler le cas échéant ?

Cet ANI passe quasiment sous silence les toutes petites entreprises, où il n'existe le plus souvent pas de syndicat. Certaines d'entre elles ont réalisé des gains de productivité incontestables ces dernières années. Pourtant, elles ne se sentent pas toujours obligées d'augmenter les salaires, malgré l'inflation - nous connaissons tous des exemples concrets d'une telle situation. Que pouvons-nous faire pour améliorer le traitement des salariés dans ces très petites entreprises ?

Mme Raymonde Poncet Monge. - Monsieur le ministre, je crains un effet de substitution. Ce texte nous est soumis alors que nous sortons de la contre-réforme des retraites ; or le déficit qui la motivait était dû non à la dynamique des dépenses, mais à un défaut de ressources - dont font partie les cotisations.

De surcroît, le FMI estime que l'inflation est due à 45 % à la hausse des taux de marge, donc à la boucle prix-profit, comme disent les économistes. Cette proportion atteint même 48 % dans le secteur de l'agroalimentaire en France !

Ce double constat devrait nous pousser à accorder sans plus tarder une attention particulière à l'évolution des salaires en France, afin de ne pas dégrader davantage la situation en matière de partage des richesses, sujet que Monique Lubin vient d'évoquer, et d'apporter de nouvelles ressources à la protection sociale, mais aussi de nouveaux droits aux salariés.

Tel n'est pas ce qui est ici proposé, alors même que l'effet de substitution que j'ai mentionné est d'ores et déjà largement documenté, les derniers dispositifs de primes exonérées de cotisations sociales et de prélèvements fiscaux prospérant au détriment de l'augmentation des salaires.

Depuis la mise en place de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, cette substitution aux salaires a été estimée dans une fourchette de 15 % à 40 %. Avec la prime de partage de la valeur, l'effet de substitution s'est élevé à 30 %, d'après l'Insee, chiffre confirmé par le Conseil d'analyse économique.

Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour imposer le respect du principe de non-substitution, lequel est rappelé dans le projet de loi grâce à l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement en ce sens ? J'espère que tout le monde sera d'accord pour maintenir l'inscription dans le texte de ce salutaire rappel.

Si faire respecter ce principe vous semble impossible, il serait temps d'en tirer les conclusions et de sortir de cette particularité qui fait de la France l'un des seuls pays à exempter intégralement les primes de partage de la valeur de contributions sociales. En outre, dans ce projet de loi, en détruisant l'aspect exceptionnel de la prime de partage de la valeur, vous acceptez de cannibaliser les autres dispositifs de partage de la valeur, dont l'intéressement, qui faisaient au moins l'objet de négociations collectives, là où la PPV relève du bon vouloir discrétionnaire de l'employeur. Cela aussi est documenté...

Ainsi la latitude donnée aux entreprises dans le choix d'un type de dispositif de partage de la valeur risque-t-elle de conduire à une élasticité de substitution encore plus forte au détriment des salaires. Que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour réduire ce risque et pour préserver les finances de la protection sociale et les finances publiques, mais aussi les droits des travailleurs, qui sont attachés, je le rappelle, au salaire socialisé ainsi escamoté ?

Le moyen de contrôler cet effet de substitution serait de séparer la négociation annuelle obligatoire sur les salaires de celle qui s'attache aux dispositifs de partage de la valeur. Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?

M. Olivier Henno. - Je salue cet accord : ne boudons pas notre plaisir ! On ne peut pas se dire attaché au paritarisme et au dialogue social et ne pas se réjouir lorsqu'un accord est signé par sept partenaires sociaux. Cela nous impose d'ailleurs une extrême sobriété pour ce qui est de nos amendements : il s'agit de ne pas détricoter cet accord, à moins de défendre une vision du dialogue social qui n'est pas la mienne.

Je salue aussi, d'ailleurs, l'accord conclu cette nuit entre les partenaires sociaux gérant l'Agirc-Arrco ; il démontre le bon fonctionnement du dialogue social et du paritarisme : les corps intermédiaires ont tout leur rôle à jouer dans notre pays. Comment envisagez-vous les perspectives de négociation qui sont celles des partenaires sociaux pour les semaines et les mois à venir ?

Mme Cathy Apourceau-Poly. - Nous sortons d'une période électorale. Je regrette que nous n'ayons pu participer aux auditions : nous aurions pu laisser le temps aux commissaires des affaires sociales du Sénat de prendre véritablement leur part à l'élaboration de ce texte... Mais vous avez choisi de procéder autrement, à marche forcée.

Sitôt passée la période de la réforme des retraites, qui fut très difficile, en ces temps d'inflation, où les familles voient flamber le prix, entre autres, des denrées alimentaires, de l'électricité ou de l'essence, vous nous proposez ce projet de loi. Évidemment, une prime, la participation aux bénéfices, voilà qui est toujours bon à prendre, compte tenu de ce que les Français et les Françaises vivent actuellement. Mais vous savez comme moi que, malheureusement, les primes ne comptent pas dans le calcul de la retraite, puisqu'elles ne génèrent pas de cotisations sociales supplémentaires.

Je regrette donc l'absence d'une réflexion globale autour des salaires.

On nous dit souvent que le budget de la sécurité sociale va mal et qu'il nous faut faire rentrer plus d'argent dans les caisses. L'augmentation des salaires permettrait précisément d'y injecter plusieurs milliards d'euros, tout en ouvrant davantage de droits à la retraite pour les salariés.

Certes, sept organisations syndicales et patronales ont signé l'ANI. Mais une importante organisation syndicale, la CGT, ne l'a pas signé - or elle compte un peu dans le paysage politique français...

Je regrette donc que vous n'ayez pas travaillé la question des salaires. Nous vous ferons des propositions alternatives en séance publique. Vous ne touchez pas aux 80 milliards d'euros de dividendes qui ont été versés aux actionnaires du CAC 40, par exemple.

M. Daniel Chasseing. - Je salue à mon tour cet ANI, signé par sept organisations syndicales. Depuis 2019, plusieurs lois ont permis de développer l'intéressement, la participation et d'instituer de nouvelles primes ; 4,4 milliards d'euros versés en 2022 au titre de la prime de partage de la valeur, cela fait 800 euros en moyenne par salarié.

Ce texte s'inscrit dans l'héritage d'un projet du général de Gaulle, élaboré en plusieurs temps en 1948, 1956 et 1967, et qui était de définir les fondements du partage de la valeur : que chacun participe directement aux résultats de l'entreprise.

Il vise à aller plus loin, 6 % seulement des entreprises de moins de 50 salariés ayant instauré un dispositif de partage de la valeur. L'exonération fiscale aidera. Nous devons aussi améliorer l'actionnariat des salariés et faciliter l'utilisation de la PPV. Certes, ces rémunérations ne constituent pas un salaire. Mais ce texte entérine un accord noué entre organisations syndicales et patronales dans l'objectif d'améliorer le pouvoir d'achat. Nous devons respecter le travail des partenaires sociaux tout en aidant les très petites entreprises à mettre en place cet accord.

M. Olivier Dussopt, ministre. - En effet, le document d'orientation que nous avons adressé aux partenaires sociaux en septembre 2022 était concentré sur les questions de partage de la valeur et non sur les questions salariales. Eussions-nous inscrit ces dernières, c'est-à-dire les questions relatives à l'indexation ou à d'éventuelles augmentations générales, dans le champ de la négociation, nous n'aurions pas d'accord aujourd'hui.

Nous défendons depuis plusieurs années l'idée que la définition du niveau des salaires, dans notre pays, passe par l'indexation du Smic sur l'inflation au 1er janvier, avec des revalorisations intermédiaires lorsque l'inflation constatée est supérieure à 2 % pendant une période donnée. C'est ainsi que le Smic a augmenté de 12,6 % depuis janvier 2021.

Cette indexation a pour conséquence qu'un certain nombre de minima conventionnels passent en dessous du Smic. Aussi avons-nous ramené le délai applicable à l'obligation de négocier de 90 à 45 jours en septembre 2022. Cela fonctionne plutôt bien. Ainsi, au 1er mai dernier, date de la dernière revalorisation du Smic, nous avons constaté que 146 ou 147 des 170 branches observées avaient un minimum conventionnel inférieur au Smic. À l'heure où je vous parle - ce chiffre date de vendredi dernier -, elles n'étaient plus que 60. C'est encore trop, certes, mais le travail est engagé dans la plupart d'entre elles ; surtout, cela signifie que 85 branches ont fait un travail de remise à niveau conventionnel depuis le 1er mai.

Il se trouve - j'admets qu'un tel résultat peut paraître contre-intuitif, les négociations de branche étant généralement critiquées pour leur apathie - que le nombre de branches ayant durablement un niveau conventionnel inférieur au Smic est actuellement deux fois moindre par rapport à ce que l'on constate habituellement sur le temps long. Sur 15 à 20 ans, il est classique de constater qu'une vingtaine de branches ont un minimum conventionnel inférieur au Smic depuis plus d'un an ou plus de 18 mois. Aujourd'hui, seules sept ou huit branches ont un niveau conventionnel inférieur au Smic depuis plus de 18 mois, ce qui est plutôt le signe d'une dynamique de négociation.

Les dispositions adoptées par le Parlement en juillet 2022 faisant de l'apathie du dialogue social au sujet du salaire minimum conventionnel dans une branche un motif de restructuration sont mises en oeuvre : j'ai adressé à la Fédération des casinos de France un courrier lui notifiant sa très prochaine restructuration, puisque nous sommes dans une situation à la fois de durabilité de la non-conformité et de blocage du dialogue social. Cette branche sera donc la première à expérimenter ce nouveau dispositif, qui prévoit que la restructuration peut être engagée de manière autoritaire et unilatérale dès lors qu'il y apathie du dialogue social en matière de rémunération.

Dire qu'il n'y aurait aucun effet de substitution des primes aux augmentations de salaire serait prononcer une contre-vérité. Néanmoins, l'étude citée du Conseil d'analyse économique n'engage pas le Gouvernement - cette institution, bien que rattachée au Premier ministre, est indépendante : ses études n'engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Certaines de ses hypothèses s'avèrent d'ailleurs insatisfaisantes ; sur ce sujet, l'Insee a aussi réalisé une étude récente, qui donne des résultats différents.

Reste qu'il faut que soit assuré le contrôle de légalité en matière de prévention de l'effet de substitution. L'Urssaf exerce ce contrôle entreprise par entreprise, sanctionnant la volonté délibérée de substituer aux salaires des éléments de prime. En tout état de cause, nous ne partageons pas l'idée qu'il faudrait dissocier les deux négociations.

Les entreprises de moins de 10 salariés n'entrent pas dans le champ de l'accord - il s'agissait d'ailleurs d'une des conditions de l'équilibre dudit accord -, ce qui n'empêche pas d'activer les outils d'intéressement disponibles. Nous avons la volonté d'accompagner les TPE dans ce sens : le maintien de l'exonération applicable aux primes de partage de la valeur versées dans les entreprises de moins de 50 salariés concerne bien sûr les TPE, où ces primes peuvent être importantes.

J'indique à Mme Apourceau-Poly que le Gouvernement est ouvert aux amendements dès lors qu'ils recueillent l'assentiment des organisations signataires de l'accord...

Mme Laurence Rossignol. - Vous donnez très rarement un avis favorable à nos amendements...

M. Olivier Dussopt, ministre. - Je m'engage à donner un avis favorable à ceux de vos amendements qui auront le soutien des sept organisations signataires de l'accord...

Quelles sont les prochaines échéances de la concertation sociale ? Le 16 octobre, veille de l'examen du texte par votre assemblée, se tiendra la conférence sociale annoncée par le Président de la République ; la question des bas salaires y sera abordée, conformément à l'engagement pris par la Première ministre auprès des partenaires sociaux en juillet dernier. Nous préparons par ailleurs un document d'orientation qui sera adressé aux partenaires sociaux à la fin du mois d'octobre sur trois sujets dont nous espérons qu'ils donneront lieu chacun à un ANI : premièrement, le compte épargne-temps universel ; deuxièmement, l'emploi des seniors, l'idée étant de reprendre des mesures censurées de la réforme des retraites et d'aller bien au-delà dans le maintien en emploi des seniors ; troisièmement, les parcours professionnels, les carrières et les reconversions, domaine auquel nous avons adjoint la question des transitions collectives et des transitions professionnelles : si cette question a été abordée selon une logique défensive lors de la crise sanitaire, il faut désormais aller vers davantage d'accompagnement - je pense bien sûr à la transition numérique et à la transition environnementale.

Avec la Première ministre, nous nous sommes engagés à déposer devant le Parlement des projets de loi de transposition fidèle et intégrale des ANI qui interviendraient sur ces trois sujets, comme nous le faisons, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que vous allez bientôt examiner, pour la « faute inexcusable de l'employeur » telle qu'elle a été définie dans l'ANI du 15 mai 2023 portant sur la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP).

M. Philippe Mouiller, président. - Merci pour ces réponses.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS, ALINÉA 3,
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

PROJET DE LOI N° 816 (2022-2023) PORTANT TRANSPOSITION DE L'ACCORD NATIONAL INTERPROFESSIONNEL RELATIF AU PARTAGE DE LA VALEUR AU SEIN DE L'ENTREPRISE

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 138(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie139(*).

Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte140(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial141(*).

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des affaires sociales a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 11 octobre 2023, le périmètre indicatif du projet de loi n° 816 (2022-2023) portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise.

Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives :

- au dialogue social de branche en matière de classifications ;

- à l'intéressement, à la participation et à l'épargne salariale ;

- à la prime de partage de la valeur ;

- à la définition et au partage des augmentations exceptionnelles de bénéfice ;

- à la distribution d'une prime de partage de la valorisation de l'entreprise ;

- à l'attribution gratuite d'actions ;

- aux fonds communs de placement d'entreprise.

En revanche, la commission a estimé que ne présentaient pas de lien, même indirect, avec le texte déposé, des amendements relatifs :

- au contrat de travail, aux congés, à la durée du travail et à la détermination du salaire ;

- à la gouvernance des entreprises ;

- aux règles financières et comptables applicables aux entreprises ;

- aux prélèvements obligatoires assis sur d'autres éléments que ceux relevant du partage de la valeur des entreprises ;

- à l'emploi et à la formation professionnelle.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES ET
CONTRIBUTIONS ÉCRITES

___________

· Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME)

Stéphanie Pauzat, vice-présidente déléguée

Gwendoline Delamare-Deboutteville, directrice des affaires sociales

Eliott Demouy, juriste

Adrien Dufour, responsable des affaires publiques

· Confédération française démocratique du travail (CFDT)

Luc Mathieu, secrétaire national en charge de la politique des salaires, de pouvoir d'achat, d'épargne salariale et d'ISR

Sandrine Lambert, secrétaire confédérale en charge de la politique des rémunérations et du pouvoir d'achat

· Confédération générale du travail (CGT)

Sandrine Mourey, chargée au bureau confédéral de la négociation collective et démocratie sociale

Maé Geymond, conseillère confédérale, économiste

· Force ouvrière (FO)

Karen Gournay, secrétaire confédérale en charge de la négociation collective et des salaires

Alexia Zaregradsky, conseillère technique

· Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC)

Nicolas Blanc, délégué national secteur transition économique

Marielle Mangeon, déléguée nationale à l'économie

Louis Delbos, chargé d'études économie

· Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC)

Imane Harraoui, membre du bureau, secrétaire générale de la fédération Communication

Julie Bestel, attachée de groupe

Lamia Zikikout, conseillère technique dialogue social

· Auteurs de la note du Conseil d'analyse économique (CAE), « Que faut-il attendre des mécanismes de partage de la valeur ? »

Camille Landais, professeur d'économie à la London School of Economics and Political Science

David Sraer, professeur d'économie et de finance à l'Université de Berkeley

· Ambassadeurs au partage de la valeur

François Perret

Agnès Bricard

· Union des entreprises de proximité (U2P)

Pierre Burban, secrétaire général

Thérèse Note, conseillère technique chargée des relations avec le Parlement

· Direction générale du travail (DGT)

Aurore Vitou, sous-directrice des relations du travail

Éva Jallabert, adjointe à la sous-directrice des relations du travail

· Direction de la sécurité sociale (DSS)

Paul-Antoine Georges, sous-directeur du financement de la sécurité sociale

· Mouvement des entreprises de France (Medef)

Hubert Mongon, négociateur

France Henry-Labordère, responsable du pôle social

François Gonord, directeur de mission au pôle économie

Adrien Chouguiat, directeur de mission affaires publiques

CONTRIBUTIONS ÉCRITES

· Prism'emploi

· Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (UDES)

LA LOI EN CONSTRUCTION

___________

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl22-816.html


* 1 Medef, CPME et U2P

* 2 CFDT, FO, CFE-CGC et CFTC. La CGT n'est pas signataire de l'accord.

* 3 Sur les 171 branches suivies par le ministère du travail. Source : étude d'impact du projet de loi.

* 4 3° et 4° du II de l'art. L. 2261-22 du code du travail.

* 5 Art. L. 2253-1 et L. 2254-1 du code du travail.

* 6 Voir notamment Cass., ch. soc., 6 oct. 2016, 15-17-119 ; Cass., ch. soc., 23 nov. 2017, 16-13.429.

* 7 Réponses de services du ministère du travail au questionnaire du rapporteur.

* 8 Étude d'impact, page 21.

* 9 Ordonnance n° 86-1134, du 21 octobre 1986, relative à l'intéressement et à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise et à l'actionnariat des salariés.

* 10 Art. L.242-1 du code de la sécurité sociale pour le régime général, L. 131-6 du même code pour travailleurs indépendants non agricole et L. 731-14, L. 731-15 et L. 741-10 du code rural et de la pêche pour les personnes respectivement non salariées et salariées des professions agricoles.

* 11 Cass. soc., 10 mai 2007, n° 05-45.676, M. Doh Appelinto Tomety c/ Association du Foyer nancéien du jeune travailleur, FS-P+B, à propos de l'abondement du plan d'épargne entreprise.

* 12  Cass. 2e civ., 8 octobre 2009, nº 08-16.970.

* 13 Art. L. 3312-4 du code du travail.

* 14 Art. L. 3312-4 du code du travail.

* 15 Art. L. 3332-13 du code du travail.

* 16 Art. 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

* 17 Guadalupe, Maria, Camille Landais, et David Sraer. « Que faut-il attendre des mécanismes de partage de la valeur ? », Notes du conseil d'analyse économique, vol. 79, no. 4, 2023, pp. 1-12.

* 18 Noélie Delahaie et Richard Duhautois, « L'impact des dispositifs collectifs de partage des bénéfices sur les rémunérations en France. Une analyse empirique sur la période 1999-2007 », 2013.

* 19 Etienne Frel-Cazenave et Fabien Guggemos, « Prime exceptionnelle de pouvoir d'achat en 2019 : entre hausse des salaires et aubaine pour les entreprises », Insee, Insee Références, juillet 2020

* 20 Dares, Participation, intéressement et épargne salariale en 2020, n° 19, avril 2022, p.2.

* 21 Article L. 3322-1 du code du travail.

* 22 Article L. 3322-6, L. 3322-7 et L. 3322-9 du code du travail.

* 23 Article L. 3323-5 du code du travail.

* 24 Article L. 3325-1 et L. 3325-4 du code du travail.

* 25 Inspection générale des finances et inspection générale des affaires sociales, Mission d'évaluation - diagnostic sur les dispositifs d'épargne salariale, décembre 2013.

* 26 Article L. 3322-9 du code du travail.

* 27 Article L. 3322-6 du code du travail.

* 28 Art. L. 3322-1 du code du travail.

* 29 Art. L. 3322-6 du code du travail.

* 30 Art. L. 3311-1 à L. 3315-5 du code du travail.

* 31 Art. L.3332-1 à L. 3332-28 du code du travail.

* 32 Art. L. 3324-10 et R. 3324-22 du code du travail

* 33 Art. L. 3334-1 à L. 3334-16 du code du travail

* 34 Les caractéristiques de ce dispositif sont détaillées dans le commentaire de l'article 6.

* 35 Loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.

* 36 Loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique.

* 37 Loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.

* 38 Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat

* 39 Défini selon les modalités prévues au 1° de l'article L. 3324-1 du code du travail.

* 40 En application des articles L. 3322-1 à L. 3322-5 du code du travail.

* 41 Mentionné à l'article L. 3323-6 du code du travail.

* 42 Mentionné à l'article L. 3312-1 du même code

* 43 Mentionné aux articles L. 3332-1, L. 3333-2, L. 3334-2 et L. 3334-4 du code du travail ou à l'article L. 224-13 du code monétaire et financier selon les modalités prévues aux articles L. 3332-11 et L. 3334-6 du code du travail et L. 224-20 du code monétaire et financier.

* 44 Mentionnée à l'article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, modifié par l'article 6 du présent projet de loi.

* 45 Entreprises individuelles créées sur le fondement de l'article L. 526-5-1 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l'activité professionnelle indépendante, ou de l'article L. 526-22 du code de commerce.

* 46 Art. 1er de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale du 28 juillet 2011.

* 47 Amendement n° 270 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, devenu article 19 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

* 48 Art. 163-0 A du code général des impôts.

* 49 C'est le cas par exemple d'une indemnité de rupture de contrat, d'une prime de mobilité, etc. La liste précise est déclinée au Bofip-impôts n°BOI-IR-LIQ-20-30-20 relatif à l'imposition des revenus exceptionnels ou différés selon le système du quotient.

* 50 Art. L. 3324-2 du code du travail.

* 51 Art. L. 3324-9 du code du travail.

* 52 Réponse accordée à la suite de l'audition conduite par le rapporteur.

* 53 Art. L. 3314-2 du code du travail.

* 54 Art. L.3332-1, L. 3333-2, L. 3334-2 et L.3334-4 du code du travail, correspondant respectivement au plan d'épargne entreprise (PEE), au plan d'épargne interentreprises (PEI), au plan d'épargne retraite collectif (Perco) et au plan d'épargne retraite collectif interenterprise.

* 55 Avis du Conseil d'État du 17 mai 2023 sur le projet de loi portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise, n° 407.057, p.5.

* 56 Art. 1er de la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d'urgence économiques et sociales.

* 57 Art. 7 de la de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

* 58 Art. 4 de la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021.

* 59 Rapport n° 827 (2021-2022) de Mme Frédérique Puissat, fait au nom de la commission des affaires sociales, sur le projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, déposé le 25 juillet 2022.

* 60 Art. 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

* 61 Cotisations (employeurs et salariés) de sécurité sociale ; cotisations (employeurs et salariés) aux régimes de retraite complémentaire ; cotisations (employeurs et salariés) aux régimes d'assurance chômage ; cotisation d'assurance maladie prévue au L. 131-9 du code de la sécurité sociale ; contribution solidarité autonomie ; contribution de versement mobilité ; contribution au dialogue social ; contributions dues au Fnal ; taxe d'apprentissage et contribution supplémentaire à l'apprentissage, contribution unique à la formation professionnelle et à l'alternance ; contribution dédiée au financement du compte personnel de formation pour les titulaires d'un contrat à durée déterminée ; participations des employeurs à l'effort de construction ; le cas échéant, contributions résultant d'accords conventionnels de branche.

* 62 D'après les réponses de la direction de la sécurité sociale au questionnaire du rapporteur.

* 63 Dares, Quelle place occupe l'actionnariat salarié en 2020 ?, Focus n°7, 2 février 2023.

* 64 Direction générale du Trésor, Les dispositifs de partage de la valeur en France et en Europe Trésor-Eco n°286, juin 2021.

* 65 Art. L. 225-177 du code de commerce.

* 66 Art. L. 225-197-1 du code de commerce.

* 67 Art. L. 3332-18 du code du travail.

* 68 Art. 163 bis G du code général des impôts.

* 69 Jacob Rabkin et Mark H. Johnson, Current Legal Forms, 1958.

* 70 Avis du Conseil d'État du 17 mai 2023 sur le projet de loi portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise, n° 407.057, p.7.

* 71 Étude d'impact, p. 84.

* 72 Art. L. 3344-1 du code du travail.

* 73 Art. L. 3344-2 du code du travail.

* 74 L'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale défini un plafond annuel moyen retenu pour le calcul des cotisations, qui est fixé annuellement par un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. En 2023 il est ainsi de 43 992 €, ce qui plafonnerait la PPVE versée à 29 328 €.

* 75 Conformément à ce qui existe pour les autres dispositifs, ce principe ne trouve pas à s'appliquer lorsqu'un délai de douze mois court entre le versement de l'élément de rémunération en tout ou partie supprimé et la date de mise en place du plan.

* 76 Art. L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

* 77 Plan d'épargne salariale de type plan d'épargne d'entreprise (PEE), plan d'épargne interentreprises (PEI) ou plan d'épargne pour la retraite collectif, ou bien un plan d'épargne retraite d'entreprise.

* 78 Cette somme correspond aux trois quarts du montant du plafond de la sécurité sociale (Pass) mentionnées au VII du même article.

* 79 Cotisations parts employeurs et salariés : de sécurité sociale (y compris la cotisation complémentaire au régime local d'Alsace-Moselle le cas échéant), aux régimes de retraites complémentaires (y compris l'Association pour la gestion du fonds de financement et l'association pour l'emploi des cadres), aux régimes d'assurance chômage (y compris l'assurance garantie des salaires).

* 80 Art. L. 137-13 du code la sécurité sociale.

* 81 Art. L. 213-1 du code de la sécurité sociale.

* 82 Art. L. 752-4 du code de la sécurité sociale.

* 83 Art. 73 de la Constitution du 4 octobre 1958.

* 84 Les commentaires de ces articles, qui figurent dans le présent rapport, détaillent les caractéristiques des dispositifs de PPV et de PPVE.

* 85 Art. L. 3314-9 du code du travail pour l'intéressement, D. 3324-21-2 et D. 3324-25 pour la participation, du code du travail.

* 86 Calculé selon une formule définie à l'article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération et publié chaque semestre, il est par exemple de 2,51 % au 10 mars 2023.

* 87 Art. R. 3313-12 du code du travail.

* 88 Hors situation de déblocage exceptionnel, il s'agit d'une durée de cinq ou huit ans dans le cas d'un plan d'épargne d'entreprise (PEE) (suivant si l'entreprise est soumise ou non à un régime d'autorité en raison d'absence de mise en place d'un régime de participation dans le délai légal), ou jusqu'au départ à la retraite dans le cas d'un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) ou plan d'épargne retraite d'entreprise collectif (Pereco).

* 89 Art. R. 3313-12 du code du travail.

* 90 Art. R. 3324-21-1 du code du travail.

* 91 Circulaire du 14 septembre 2005 relative à l'épargne salariale.

* 92 Dans le cas où les versements ont été effectués sur un plan d'épargne entreprise (PEE), le trop-perçu ne peut être sortis du plan, mais constituent alors des versements volontaires, qui ne donnent pas droit à un traitement fiscal et social incitatif.

* 93 C. cass. Soc., 23 mai 2007, n° 04-20157 et suivants.

* 94 Ces exonérations sont prévues aux articles L. 3312-4, L. 3315-1 à L. 3315-3 et L. 3325-1 à L.3325-4 du code du travail.

* 95 C. cass.,soc., 16 décembre 2003, n° 02-30862.

* 96 Il correspond à trois fois le plafond mentionné au premier alinéa de l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale (PASS), ce qui équivaut à 131 976€ en 2023.

* 97 Circulaire du 22 novembre 2001 relative à l'épargne salariale et circulaire du 14 décembre 2005 relative à l'épargne salariale.

* 98 C.cass., soc., 2 juillet 2003, 00-22.101.

* 99 Entendues au sens de l'article L.233-16 du code de commerce.

* 100 Art. L. 3315-2 du code du travail.

* 101 Art. L. 3315-1 du code du travail.

* 102 Art. L. 137-15 du code de la sécurité sociale.

* 103 Art. L. 137-16 du code de la sécurité sociale.

* 104 Art. L. 3312-4 du code du travail.

* 105 Art. L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

* 106 Art. 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

* 107 L'exposé sommaire de l'amendement du rapporteur affirme ainsi que « Rien n'empêche aujourd'hui une formule d'intéressement de prendre en compte ces critères mais cet amendement permet de mettre en exergue cette faculté. »

* 108 Art. L. 3333-1 à L. 3333-8 du code du travail.

* 109 Les éléments mentionnés ont été transmis au rapporteur par Prism'emploi.

* 110 Dares, 2022.

* 111 Étude d'impact, page 121.

* 112 Conseil d'État, avis n° 407.057 du 17 mai 2023.

* 113 Dares, Quelle place occupe l'actionnariat salarié en 2020 ?, Focus n°7, 2 février 2023.

* 114 Art. 83 de la loi n°2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

* 115 Art. L. 225-197-1 du code de commerce : cela peut notamment inclure ses salariés, ses dirigeants, mais également les mandataires sociaux de l'entreprise.

* 116 Alinéa 8 du I de l'article L. 225-197-1 du code de commerce.

* 117 Art. 163 de la loi n°2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

* 118 Alinéa 3 du II de l'article L. 225-197-1 du code de commerce.

* 119 Au sens de l'assiette des cotisations définie à l'article L. 241-1 du code de la sécurité sociale.

* 120 Il s'agit du président du conseil d'administration, du directeur général, des directeurs généraux délégués, du président, des membres du directoire ou du gérant de l'entreprise.

* 121 Il s'agit principalement des plans d'épargne d'entreprise (PEE), des pans d'épargne retraite individuel (PER) ou collectif (Pereco) ou encore du plan PER d'entreprise obligatoire.

* 122 Loi N° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.

* 123 Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

* 124 Loi n 2001-152 du 19 février 2001 sur l'épargne salariale. 

* 125 Il s'agit principalement de détenir au moins une moitié de ses titres auprès d'associations, ou d'entreprises dont les titres ne sont pas admis à la négociation sur un marché réglementé mais qui effectuent une activité à caractère industrielle et commerciale.

* 126 Fair, en partenariat avec La Croix, Baromètre de la finance solidaire, 14 juin 2023.

* 127 Art. L. 3332-1 du code du travail.

* 128 Art. L. 3333-1 du code du travail.

* 129 Art. L. 3334-1 du code du travail.

* 130 Art. L. 3332-25 et L. 3324-10 du code du travail.

* 131 Art. R. 3324-22 du code du travail.

* 132 Art. R. 3324-23 du code du travail.

* 133 Art. L. 214-164 à L. 214-165-1 du code monétaire et financier.

* 134 À l'exception des parts ou titres de l'entreprise ou de toute entreprise qui lui est liée dans les conditions prévues aux articles L. 3344-1 à L. 3344-2 du code du travail.

* 135 Art. L. 214-165 du code monétaire et financier.

* 136 Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

* 137 Titre II du livre III de la troisième partie du code du travail.

* 138 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 139 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 140 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 141 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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