N° 671

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 juin 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur la proposition de loi visant à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires,

Par M. Marc LAMÉNIE,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Sénat :

519 et 672 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

Réunie le 5 juin 2024 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a examiné le rapport de M. Marc Laménie sur la proposition de loi n° 519 (2023-2024) visant à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires, déposée le 8 avril 2024 par M. Philippe Folliot.

Cette proposition de loi, composée d'un article unique, vise à imposer à l'établissement de crédit qui résilie une convention de compte de dépôt - autrement dit qui ferme un compte bancaire - de justifier cette résiliation lorsque le client en fait la demande expresse.

I. HORMIS DANS LE CAS DU DROIT AU COMPTE, L'ÉTABLISSEMENT DE CRÉDIT QUI FERME UN COMPTE BANCAIRE N'A PAS À LE JUSTIFIER, CE QUI PEUT EXPOSER LE CLIENT À DES ABUS

A. LE RÉGIME DE DROIT COMMUN : UNE FERMETURE DU COMPTE BANCAIRE PAR L'ÉTABLISSEMENT DE CRÉDIT QUI DOIT ÊTRE PRÉCÉDÉE D'UN PRÉAVIS DE DEUX MOIS MAIS N'A PAS À ÊTRE JUSTIFIÉE

Dans la relation qui lie un client à sa banque dans le cadre d'une convention de compte, le premier dépend de la seconde pour son accès aux moyens de paiement. Le législateur a souhaité corriger cette asymétrie de fait au profit de la banque par une asymétrie de droit au profit du client.

Ainsi, si le client peut mettre fin à tout moment, et sans délai, à cette convention - on dit plus couramment qu'il ferme ou clôture son compte en banque -, la banque est, quant à elle, tenue de faire précéder la résiliation qu'elle décide d'un délai de deux mois. Ce préavis doit en effet permettre au client de trouver une nouvelle banque auprès de laquelle ouvrir un nouveau compte. Malgré ce préavis, cette recherche peut ne pas être sans difficulté pour les clients, notamment ceux qui résident dans une zone rurale dont le réseau bancaire est peu dense.

Dans ce contexte, la protection du client est également assurée par la procédure du droit au compte, introduite en 1984. Lorsqu'une banque refuse l'ouverture d'un compte en banque à une personne, celle-ci peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte, situé à proximité de son domicile ou d'un autre lieu de son choix, permettant d'accéder aux services bancaires de base.

La fermeture d'un compte bancaire, bien qu'elle soit précédée
d'un préavis de deux mois, se fait à la discrétion de la banque

La fermeture d'un compte se fait à la discrétion de la banque. Elle peut résulter d'une évolution de sa politique de risques la conduisant, par exemple, à se séparer des clients fragiles du fait de ses propres difficultés, ou encore de sa stratégie commerciale, une banque pouvant souhaiter se spécialiser sur certaines catégories de clientèle.

Cette faculté de résiliation accordée aux deux parties du contrat peut exposer le client à une forme d'arbitraire et susciter chez lui une légitime incompréhension. En effet, dans le régime de droit commun, la banque qui, en fermant un compte bancaire, exclut pourtant son client d'un service essentiel qu'elle lui fournissait jusque-là, n'est pas tenue de justifier sa décision de résiliation. Il est loisible à celle-ci de lui clôturer du jour au lendemain son compte pour toute raison qu'elle estimerait valable, y compris au titre des engagements ou des activités de son client, sans jamais avoir à l'expliquer. Le client ne peut donc pas comprendre ni « tirer de leçons » de ce qui a conduit la banque à fermer son compte. Cela est autorisé car l'accès à un compte bancaire ne résulte pas d'un service public, et qu'il est toujours possible, en cas de fermeture du compte, d'avoir au moins accès à des services bancaires de base grâce au droit au compte. Mais cette situation est peu satisfaisante pour le client. La motivation de la résiliation de la convention de compte n'est actuellement obligatoire que dans un cas.

B. SEULS LES TITULAIRES D'UN COMPTE OCTROYÉ DANS LE CADRE DE LA PROCÉDURE DE DROIT AU COMPTE ONT LE DROIT DE CONNAÎTRE SYSTÉMATIQUEMENT LES RAISONS DE SA RÉSILIATION

Depuis 1998, il existe un régime protecteur propre aux bénéficiaires du droit au compte (DAC). Une fois que le client dispose d'un compte dans un établissement de crédit désigné par la Banque de France, la décision de clôture de ce compte prise à l'initiative de la banque doit ainsi être motivée.

Dans le cadre de la transposition, fin 2016, d'une directive du 23 juillet 2014 concernant notamment l'accès à un compte de paiement assorti de prestations de base, ce régime a toutefois fait l'objet d'une limitation, puisque la motivation ne doit pas être communiquée si elle porte atteinte à la sécurité nationale ou au maintien de l'ordre public.

II. SI LE CLIENT EN FAIT LA DEMANDE, LA BANQUE DOIT MOTIVER LA FERMETURE DE SON COMPTE BANCAIRE À CONDITION DE NE PAS AVOIR À DIVULGUER D'INFORMATIONS CONFIDENTIELLES

La proposition de loi vise à imposer à l'établissement de crédit qui résilie une convention de compte de dépôt de fournir gratuitement au client les motifs de cette résiliation lorsqu'il en fait la demande. La série d'objections avancées à l'encontre de ce texte paraissent insuffisamment sérieuses pour ne pas légiférer. Toutefois, sa portée opérationnelle peut être renforcée, et le risque d'injonction contradictoire auquel il pouvait soumettre les banques doit être écarté.

A. UN TEXTE NÉCESSAIRE QUI NE RENCONTRE QUE PEU D'OBJECTIONS SÉRIEUSES

La situation de principe qui permet à une banque d'empêcher l'accès aux services de paiement qu'elle fournit sans avoir jamais à le justifier n'est pas acceptable. Que le problème ne fasse pas l'objet de contestation massive de la part des clients ne doit pas empêcher, ne serait-ce que préventivement, de légiférer. Un accord de place peut certes toujours intervenir, mais cet argument a été trop souvent avancé sans pour autant donner lieu aux évolutions escomptées pour qu'il puisse y être fait droit. Ainsi, en matière de frais bancaires sur les successions, le Gouvernement a longtemps défendu l'option de l'accord de place, mais il a fallu attendre une proposition de loi récente sur le sujet pour que ceux-ci soient en passe de faire l'objet d'un encadrement satisfaisant.

Les banques estiment par ailleurs que le dispositif sera de nature à alourdir les charges administratives qui pèsent sur elles. Outre que cet argument est contradictoire avec le précédent - également mobilisé par les banques - puisque si le problème est inexistant, il ne saurait créer aucune charge administrative, la charge attendue sera très faible par rapport à l'ensemble des obligations qui pèsent déjà sur les établissements de crédit. En effet, la motivation de la fermeture du compte n'est pas systématique et ne doit se faire qu'à la demande du client. Il y a d'ailleurs tout lieu de croire que, si le client comprend, grâce à des explications orales détaillées, les raisons de la fermeture de son compte, il ne recourra pas à la possibilité offerte par la présente proposition de loi. Il ne tient ainsi qu'à l'établissement de crédit de faire en sorte que, de très faible, la charge administrative créée par le texte devienne infinitésimale.

Enfin, les banques revendiquent une certaine liberté contractuelle dans la relation qui les lie à leur client dans le cadre d'une convention de dépôt. Le banquier doit en effet avoir la liberté de rompre son contrat si celui-ci est à durée indéterminée - c'est le cas visé ici -, notamment en raison de la prohibition des engagements perpétuels reconnue par le code civil. Mais rien dans ce texte ne vise à limiter la possibilité pour les banquiers de rompre ces contrats, puisqu'il ne s'agit que d'une obligation de motivation lorsque le client en fait la demande. À titre de comparaison, la résiliation unilatérale de certains contrats d'assurance de particuliers fait obligatoirement l'objet d'une motivation, le Gouvernement souhaitant actuellement, dans le cadre de son projet de loi de simplification de la vie économique, étendre cette disposition aux professionnels.

Il est donc loisible au législateur d'encadrer les conditions dans lesquelles se déploie la liberté contractuelle. Pour mémoire, le Conseil constitutionnel a bien précisé dans une décision de 1999 que, si la liberté contractuelle résultant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen justifie qu'un contrat à durée indéterminée puisse être rompu unilatéralement, l'information du cocontractant doit en revanche être garantie dans des conditions qu'il revient au législateur de déterminer.

B. UNE PORTÉE OPÉRATIONNELLE À RENFORCER ET UN RISQUE D'INJONCTION CONTRADICTOIRE DÛ À L'INTERDICTION DE DIVULGUER DES INFORMATIONS CONFIDENTIELLES QUI DOIT ÊTRE DISSIPÉ

Les travaux menés par le rapporteur l'ont toutefois amené à identifier un risque réel dans la rédaction initiale du texte.

En effet, une relation contractuelle entre l'établissement et son client peut être rompue pour motifs de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Deux cas se présentent alors. D'une part, l'impossibilité d'actualisation des éléments de connaissance du client impose à l'établissement de mettre fin à la relation d'affaires et, dans ce cas, l'établissement de crédit peut faire une déclaration de soupçon à Tracfin. D'autre part, l'établissement de crédit peut mettre fin à la relation d'affaires à sa convenance dans le cadre d'opérations suspectes, auquel cas il lui est imposé de procéder à cette déclaration de soupçon. Or, cette déclaration est confidentielle, et l'établissement de crédit ne doit donc en faire état d'aucune manière.

Les obligations de déclaration et d'information des banques
en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme

L'article L. 561-15 du code monétaire et financier prévoit que, lorsqu'un établissement de crédit sait, soupçonne ou a de bonnes raisons de soupçonner que des sommes inscrites dans ses livres ou des opérations portant sur ces sommes proviennent d'une infraction passible d'une peine privative de liberté supérieure à un an ou sont liées au financement du terrorisme, il est tenu de le déclarer à Tracfin, le service de renseignement compétent du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. On parle de « déclaration de soupçon ». L'article L. 561-8 du même code prévoit que, lorsque la banque ne dispose pas d'une assez bonne connaissance de son client, elle doit mettre fin à la relation d'affaires et peut transmettre à Tracfin cette déclaration.

L'article L. 561-18, transposant l'article 39 de la directive « anti-blanchiment » du 20 mai 2015, lui-même conforme à la recommandation n° 21 du groupe d'action financière (GAFI), prévoit par ailleurs que la déclaration de soupçon est confidentielle et qu'il est interdit de porter à la connaissance du propriétaire des sommes ou de l'auteur de ces opérations suspectes l'existence et le contenu de cette déclaration et de donner des informations sur les suites qui ont été réservées à cette déclaration.

Comme le précise l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans ses principes d'application sectoriels relatifs aux obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme dans le cadre du droit au compte en date du 25 avril 2018, en cas de déclaration de soupçon pour blanchiment ou liée au financement du terrorisme, « la notification du motif de clôture est dans ce cas de nature à contrevenir au maintien de l'ordre public, voire à la sécurité nationale en ce qui concerne le financement du terrorisme ».

Le risque de soumettre l'établissement de crédit à une injonction contradictoire, entre, d'un côté, une obligation de motiver la fermeture du compte à la demande du client et, de l'autre, une interdiction de divulguer toute déclaration de soupçons, n'est donc pas nul.

Pour résoudre cette difficulté, l'amendement COM-1 du rapporteur, adopté par la commission, prévoit que la demande de résiliation ne peut pas faire l'objet d'une motivation lorsque celle-ci contrevient aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public. Ce faisant, il reprend une rédaction éprouvée pour les personnes bénéficiaires du droit au compte (cf. supra). Celle-ci permet par ailleurs d'inclure le cas où la banque a procédé à une déclaration de soupçon, sans pour autant s'y limiter, ce qui constituerait une divulgation en négatif. 

Par ailleurs, le même amendement COM-1 vise à renforcer la portée opérationnelle du dispositif. Il prévoit ainsi que :

- le délai de réponse de l'établissement de crédit est limité à quinze jours ouvrés à compter de la demande ;

- la motivation est effectuée par écrit, sur support papier ou sur un autre support durable.

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXAMEN DE L'ARTICLE

ARTICLE unique

Motivation de la fermeture du compte par la banque
à la demande du client

Le présent article vise à imposer à l'établissement de crédit qui résilie unilatéralement une convention de compte de dépôt de motiver cette résiliation, de façon gratuite, auprès du client qui en fait la demande.

Si la situation de principe qui permet à une banque d'empêcher l'accès aux services de paiement qu'elle fournit sans avoir jamais à le justifier n'est pas acceptable, l'article laissait subsister dans sa rédaction initiale le risque de soumettre l'établissement de crédit à des injonctions contradictoires entre, d'une part, l'obligation de motiver la fermeture d'un compte et, d'autre part, l'interdiction de divulguer la déclaration de soupçon - qui peut précéder la fermeture de ce compte dans le cadre de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

La commission a donc adopté un amendement COM-1 du rapporteur prévoyant que la demande de résiliation ne peut pas faire l'objet d'une motivation lorsque celle-ci contrevient aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public. Ce faisant, il s'appuie sur une rédaction éprouvée pour les personnes bénéficiaires du droit au compte. Celle-ci permet d'inclure le cas où la banque a procédé à une déclaration de soupçon, sans pour autant s'y limiter, ce qui constituerait une divulgation en négatif. 

Par ailleurs, le même amendement vise à renforcer la portée opérationnelle du dispositif. Il prévoit ainsi, d'une part, que le délai de réponse de l'établissement de crédit est limité à quinze jours ouvrés à compter de la réception de la demande et, d'autre part, que la motivation est effectuée par écrit, sur support papier ou sur un autre support durable.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : HORMIS DANS LE CAS DU DROIT AU COMPTE, L'ÉTABLISSEMENT DE CRÉDIT QUI FERME UN COMPTE BANCAIRE N'A PAS À LE JUSTIFIER, CE QUI PEUT EXPOSER LE CLIENT À DES ABUS

A. LE RÉGIME DE DROIT COMMUN : UNE FERMETURE DU COMPTE BANCAIRE PAR L'ÉTABLISSEMENT DE CRÉDIT QUI DOIT ÊTRE PRÉCÉDÉE D'UN PRÉAVIS DE DEUX MOIS MAIS N'A PAS À ÊTRE JUSTIFIÉE

Dans la relation qui lie un client à sa banque dans le cadre d'une convention de compte, le premier dépend de la seconde pour son accès aux moyens de paiement. Le législateur a souhaité corriger cette asymétrie de fait au profit de la banque par une asymétrie de droit au profit du client.

Ainsi, le V de l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier prévoit que si le client peut mettre fin à tout moment, et sans délai, à cette convention1(*) - on dit plus couramment qu'il ferme ou clôture son compte en banque -, la banque est, quant à elle, tenue de faire précéder la résiliation qu'elle décide d'un délai de deux mois. Ce préavis doit en effet permettre au client de trouver une nouvelle banque auprès de laquelle ouvrir un nouveau compte. Malgré ce préavis, cette recherche peut ne pas être sans difficulté pour les clients, notamment ceux qui résident dans une zone rurale dont le réseau bancaire est peu dense.

Dans ce contexte, la protection du client est également assurée par la procédure du droit au compte, introduite par la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit en son article 58, et actuellement codifiée à l'article L. 312-1 du code monétaire et financier. Lorsqu'une banque refuse l'ouverture d'un compte en banque à une personne, celle-ci peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte, situé à proximité de son domicile ou d'un autre lieu de son choix, permettant d'accéder aux services bancaires de base. Il faut noter ici que les services bancaires de base auquel donne accès le droit au compte constituent une sorte de service minimum, de sorte que si une personne voit son compte en banque fermé et obtient l'ouverture d'un nouveau compte par la procédure du droit au compte, il s'agira d'une régression par rapport à sa situation antérieure.

La fermeture d'un compte se fait à la discrétion de la banque. Elle peut résulter d'une évolution de sa politique de risques la conduisant, par exemple, à se séparer des clients fragiles du fait de ses propres difficultés, ou encore de sa stratégie commerciale, une banque pouvant souhaiter se spécialiser sur certaines catégories de clientèle.

Par ailleurs, dans le régime de droit commun prévu à l'article L. 312 1-1 du code monétaire et financier, la banque qui, en fermant un compte bancaire, exclut pourtant son client d'un service essentiel qu'elle lui fournissait jusque-là, n'est pas tenue de justifier sa décision de résiliation. Il est loisible à celle-ci de lui clôturer du jour au lendemain son compte pour toute raison qu'elle estimerait valable, y compris au titre des engagements ou des activités de son client, sans jamais avoir à l'expliquer. Cela est autorisé car l'accès à un compte bancaire ne résulte pas d'un service public, et qu'il est toujours possible, en cas de fermeture du compte, d'avoir au moins accès à des services bancaires de base grâce au droit au compte. Mais cette situation est peu satisfaisante pour le client.

B. SEULS LES TITULAIRES D'UN COMPTE OCTROYÉ DANS LE CADRE DE LA PROCÉDURE DE DROIT AU COMPTE ONT LE DROIT DE CONNAÎTRE SYSTÉMATIQUEMENT LES RAISONS DE SA RÉSILIATION

La loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions a prévu en son article 137 un régime protecteur propre aux bénéficiaires du droit au compte (DAC). Comme en dispose le IV de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier qui l'a codifié, une fois que le client dispose d'un compte dans un établissement de crédit désigné par la Banque de France, la décision de clôture de ce compte prise à l'initiative de la banque doit ainsi être motivée. La motivation est communiquée pour information à la Banque de France.

Ce régime a toutefois fait l'objet d'une limitation, puisque la motivation ne doit pas être communiquée si elle porte atteinte à la sécurité nationale ou au maintien de l'ordre public.

Cette limitation a été instituée par l'ordonnance n° 2016-1808 du 22 décembre 2016 relative à l'accès à un compte de paiement assorti de prestations de base transposant, comme le prévoyait l'article 67 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, la directive 2014/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur la comparabilité des frais liés aux comptes de paiement, le changement de compte de paiement et l'accès à un compte de paiement assorti de prestations de base. En particulier, l'article 2 de l'ordonnance transpose l'article 19 de la directive, dont la substance est reprise au IV de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier.

La rédaction actuelle, qui prévoit que « la décision de résiliation est motivée sauf lorsque cette motivation contrevient aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public », résulte de l'ordonnance n° 2017-1433 du 4 octobre 2017.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA MOTIVATION DE LA FERMETURE DU COMPTE EFFECTUÉE À L'INITIATIVE DE LA BANQUE, LORSQUE LE CLIENT EN FAIT LA DEMANDE

La présente proposition de loi n° 519 (2023-2024), déposée le 8 avril 2024 par Philippe Folliot, vient modifier le V de l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier, de façon à imposer à l'établissement de crédit, qui résilie, à son initiative, une convention de compte de dépôt, de fournir gratuitement au client les motifs de cette résiliation lorsqu'il en fait la demande expresse.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE PROPOSITION DE LOI NÉCESSAIRE MAIS QUI DOIT ÊTRE CONSOLIDÉE POUR ÉVITER TOUT RISQUE D'INJONCTION CONTRADICTOIRE PESANT SUR LES BANQUES

A. UNE PROPOSITION DE LOI NÉCESSAIRE QUI NE RENCONTRE QUE PEU D'OBJECTIONS SÉRIEUSES

La situation de principe qui permet à une banque d'empêcher l'accès aux services de paiement qu'elle fournit sans avoir jamais à le justifier n'est pas acceptable.

Cette faculté de résiliation accordée par l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier aux deux parties du contrat peut exposer le client à une forme d'arbitraire et susciter chez lui une légitime incompréhension.

Sans connaissance de la motivation, le client ne peut donc pas comprendre ni « tirer de leçons » de ce qui a conduit la banque à fermer son compte.

Certes, bien que l'association UFC-Que choisir ait pu confirmer au rapporteur que les fermetures de compte sont souvent mal comprises par les clients et peuvent dans certains cas donner lieu à des abus, il n'existe pas de données permettant de quantifier le nombre de fermetures abusives de comptes bancaires et son évolution dans le temps. Lors des auditions menées par le rapporteur, celui-ci a ainsi pu entendre que la présente proposition de loi n'était pas nécessaire.

Pourtant, que le problème ne fasse pas l'objet de contestation massive de la part des clients ne doit pas empêcher, ne serait-ce que préventivement, de légiférer. Un accord de place peut certes toujours advenir, mais cet argument a été trop souvent avancé sans pour autant donner lieu aux évolutions escomptées pour qu'il puisse y être fait droit. Ainsi, en matière de frais bancaires sur les successions, le Gouvernement a longtemps défendu l'option de l'accord de place, mais il a fallu attendre une proposition de loi récente sur le sujet pour que ceux-ci soient en passe de faire l'objet d'un encadrement satisfaisant2(*).

Les banques estiment par ailleurs que le dispositif sera de nature à alourdir les charges administratives qui pèsent sur elles. Outre que cet argument est contradictoire avec le précédent - également mobilisé par les banques - puisque si le problème est inexistant, il ne saurait créer une charge administrative, la charge attendue sera très faible par rapport à l'ensemble des obligations qui pèsent déjà sur les établissements de crédit. En effet, la motivation de la fermeture du compte n'est pas systématique et ne doit se faire qu'à la demande du client.

Il y a d'ailleurs tout lieu de croire que, si le client comprend, grâce à des explications orales détaillées, les raisons de la fermeture de son compte, il ne recourra pas à la possibilité offerte par la présente proposition de loi. Il ne tient ainsi qu'à l'établissement de crédit de faire en sorte que, de très faible, la charge administrative créée par le texte devienne infinitésimale.

Enfin, les banques revendiquent une certaine liberté contractuelle dans la relation qui les lie à leur client dans le cadre d'une convention de dépôt. Le banquier doit en effet avoir la liberté de rompre son contrat si celui-ci est à durée indéterminée - c'est le cas visé ici -, notamment en raison de la prohibition des engagements perpétuels reconnue par l'article 1210 du code civil3(*). Mais rien dans ce texte ne vise à limiter la possibilité pour les banquiers de rompre ces contrats, puisqu'il ne s'agit que d'une obligation de motivation lorsque le client en fait la demande. À titre de comparaison, la résiliation unilatérale de certains contrats d'assurance de particuliers fait obligatoirement l'objet d'une motivation au titre de l'article L. 113-12-1 du code des assurances. Le Gouvernement souhaite d'ailleurs, par l'article 14 de son projet de loi de simplification de la vie économique n° 550 (2023-2024) déposé au Sénat le 24 avril 2024, étendre cette disposition aux professionnels.

Il est donc loisible au législateur d'encadrer les conditions dans lesquelles se déploie la liberté contractuelle. Pour mémoire, le Conseil constitutionnel a bien précisé dans sa décision n° 99-419 DC du 9 novembre 1999 que, si la liberté contractuelle résultant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen justifie qu'un contrat à durée indéterminée puisse être rompu unilatéralement, l'information du cocontractant doit en revanche être garantie. Il revient au législateur de déterminer dans quelles conditions.

B. UN DISPOSITIF À PRÉCISER, ET UN RISQUE D'INJONCTION CONTRADICTOIRE À DISSIPER

Les travaux menés par le rapporteur l'ont toutefois amené à identifier un risque réel dans la rédaction initiale du texte.

En effet, une relation contractuelle entre l'établissement et son client peut être rompue pour motifs de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Deux cas se présentent alors.

D'une part, l'article L. 561-8 du code monétaire et financier prévoit que, lorsque la banque ne dispose pas d'une assez bonne connaissance de son client, elle doit mettre fin à la relation d'affaires et peut transmettre une déclaration de soupçon à Tracfin, le service de renseignement compétent du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

D'autre part, l'article L. 561-15 du même code prévoit que, lorsqu'un établissement de crédit sait, soupçonne ou a de bonnes raisons de soupçonner que des sommes inscrites dans ses livres ou des opérations portant sur ces sommes proviennent d'une infraction passible d'une peine privative de liberté supérieure à un an ou sont liées au financement du terrorisme, il est tenu de le déclarer à Tracfin.

Or, l'article L. 561-18 dudit code, transposant l'article 39 de la directive « anti-blanchiment » du 20 mai 20154(*), lui-même conforme à la recommandation n° 21 du groupe d'action financière (GAFI)5(*), prévoit par ailleurs que la déclaration de soupçon est confidentielle et qu'il est interdit de porter à la connaissance du propriétaire des sommes ou de l'auteur de ces opérations suspectes l'existence et le contenu de cette déclaration et de donner des informations sur les suites qui ont été réservées à cette déclaration. Comme le précise l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans ses principes d'application sectoriels relatifs aux obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme dans le cadre du droit au compte en date du 25 avril 2018, en cas de déclaration de soupçon pour blanchiment ou liée au financement du terrorisme, « la notification du motif de clôture est dans ce cas de nature à contrevenir au maintien de l'ordre public, voire à la sécurité nationale en ce qui concerne le financement du terrorisme ».

Le risque de soumettre l'établissement de crédit à une injonction contradictoire, entre, d'un côté, une obligation de motiver la fermeture du compte à la demande du client et, de l'autre, une interdiction de divulguer toute déclaration de soupçons, n'est donc pas nul.

Pour résoudre cette difficulté, l'amendement COM-1 du rapporteur, adopté par la commission, prévoit que la demande de résiliation ne peut pas faire l'objet d'une motivation lorsque celle-ci contrevient aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public. Ce faisant, il reprend une rédaction éprouvée pour les personnes bénéficiaires du droit au compte (cf. supra). Celle-ci permet par ailleurs d'inclure le cas où la banque a procédé à une déclaration de soupçon, sans pour autant s'y limiter, ce qui constituerait une divulgation en négatif. 

Par ailleurs, le même amendement COM-1 vise à renforcer la portée opérationnelle du dispositif. Il prévoit ainsi, d'une part, que le délai de réponse de l'établissement de crédit est limité à quinze jours ouvrés à compter de la réception de la demande et, d'autre part, que la motivation est effectuée par écrit, sur support papier ou sur un autre support durable.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 5 juin 2024 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a examiné le rapport de M. Marc Laménie sur la proposition de loi n° 519 (2023-2024) visant à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires.

M. Claude Raynal, président. - Nous examinons, ce matin, le rapport de notre collègue Marc Laménie sur la proposition de loi visant à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires. Je salue la présence parmi nous de notre collègue Philippe Folliot, auteur de ce texte.

M. Marc Laménie, rapporteur. - Il nous revient, en effet, d'examiner la proposition de loi de notre collègue Philippe Folliot. Ce texte vise à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires. Il a été déposé dans le cadre de l'ordre du jour réservé au groupe Union Centriste. Son examen en séance publique aura lieu la semaine prochaine, le mercredi 12 juin.

Cette proposition de loi, composée d'un article unique, vise à imposer à l'établissement de crédit qui résilie une convention de compte de dépôt - autrement dit qui ferme un compte bancaire - de justifier cette résiliation lorsque le client en fait la demande expresse.

Pour bien cerner les enjeux, je dresserai un bref aperçu de la situation actuelle, avant de vous exposer les raisons qui m'ont conduit à déposer un amendement qui, je le crois, consolidera le dispositif.

Dans la relation qui lie un client à sa banque dans le cadre d'une convention de compte de dépôt, le premier dépend de la seconde pour son accès aux moyens de paiement. Le législateur a donc souhaité corriger cette asymétrie de fait au profit de la banque par une asymétrie de droit au profit du client.

Ainsi, si le client peut mettre fin à tout moment, et sans délai, à cette convention - on dit plus couramment qu'il « ferme » son compte en banque -, la banque est, quant à elle, tenue de faire précéder la résiliation qu'elle décide d'un délai de deux mois. Ce préavis doit en effet permettre au client de trouver une autre banque auprès de laquelle ouvrir un nouveau compte. Cette recherche peut pourtant être difficile pour les clients, notamment ceux qui résident en milieu rural, où le réseau bancaire est peu dense.

Dans ce contexte, la protection du client est également assurée par la procédure du droit au compte, introduite en 1984. Lorsqu'une banque refuse l'ouverture d'un compte en banque à une personne, celle-ci peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte, situé à proximité de son domicile ou d'un autre lieu de son choix, permettant d'accéder aux services bancaires de base.

Cela constitue sans conteste un progrès et les conditions d'accès au droit au compte s'améliorent continuellement, avec des délais réduits. Il faut cependant souligner que les services bancaires de base auxquels donne accès le droit au compte constituent une sorte de service minimum, de sorte que, si une personne voit son compte en banque fermé et obtient l'ouverture d'un nouveau compte par la procédure du droit au compte, il s'agira d'une régression par rapport à sa situation antérieure.

Une fois dressé ce tableau, j'en viens au problème traité par la proposition de loi.

La fermeture d'un compte se fait à la discrétion de la banque. Elle peut résulter d'une évolution de sa politique de risques la conduisant, par exemple, à se séparer des clients fragiles du fait de ses propres difficultés, ou encore de sa stratégie commerciale, une banque pouvant souhaiter se spécialiser sur certaines catégories de clientèle.

Cette faculté de résiliation peut exposer le client à une forme d'arbitraire et susciter chez lui une légitime incompréhension. En effet, dans le régime de droit commun, la banque qui, en fermant un compte bancaire, exclut son client d'un service essentiel qu'elle lui fournissait jusque-là n'est pas tenue de justifier sa décision de résiliation. Il est loisible à celle-ci de clore du jour au lendemain son compte pour toute raison qu'elle estimerait valable, y compris au titre des engagements ou des activités de son client, sans jamais avoir à l'expliquer. Le client ne peut donc pas comprendre ni tirer de leçons de ce qui a conduit la banque à fermer son compte. Cette situation est peu satisfaisante pour le client.

Depuis 1998, il existe toutefois un régime protecteur propre aux bénéficiaires du droit au compte. Une fois que le client dispose d'un compte dans un établissement de crédit désigné par la Banque de France, la décision de clôture de ce compte prise à l'initiative de la banque doit ainsi être motivée. Ce régime fait l'objet d'une limitation, puisque la motivation ne doit pas être communiquée si elle porte atteinte à la sécurité nationale ou au maintien de l'ordre public. Force est de reconnaître que l'application de ce régime, qui ne vise que les bénéficiaires du droit au compte, ne concerne donc qu'une très faible minorité de clients.

Sans chercher à étendre ce régime protecteur, la proposition de loi vise néanmoins à imposer à l'établissement de crédit qui résilie une convention de compte de dépôt de fournir gratuitement au client les motifs de cette résiliation lorsqu'il en fait la demande. Il s'agit d'un dispositif qui, assurément, va dans le bon sens.

La situation de principe qui permet à une banque d'empêcher l'accès aux services de paiement qu'elle fournit sans avoir jamais à le justifier n'est en effet pas acceptable. Les associations de consommateurs constatent ainsi que les fermetures de compte sont souvent mal comprises par les clients et peuvent dans certains cas donner lieu à des abus. Que le problème ne fasse pas l'objet d'une contestation massive ne doit donc pas empêcher, ne serait-ce que préventivement, de légiférer. Un accord de place peut certes toujours intervenir, mais cet argument a été trop souvent avancé sans donner lieu aux évolutions escomptées pour qu'il puisse y être fait droit. Souvenons-nous qu'en matière de frais bancaires sur les successions le Gouvernement a longtemps défendu l'option de l'accord de place, mais qu'il a fallu compter sur l'activisme de certains collègues et attendre une proposition de loi récente sur le sujet pour que ces frais soient en passe de faire l'objet d'un encadrement satisfaisant.

Les banques estiment que le dispositif sera de nature à alourdir les charges administratives qui pèsent sur elles. Mais c'est bien sûr excessif pour au moins deux raisons.

La première, c'est que la motivation de la fermeture du compte n'est pas systématique et ne doit se faire qu'à la demande du client. Je propose, dans mon amendement, de prévoir un délai de quinze jours pour répondre au client : tout en garantissant une réponse assez rapide pour le client, le temps laissé à l'établissement de crédit me paraît suffisamment long pour qu'il puisse très facilement encaisser cette charge.

La seconde, c'est qu'il y a tout lieu de croire que, si le client comprend, grâce à des explications orales détaillées, les raisons de la fermeture de son compte, il ne recourra pas à la possibilité offerte par la présente proposition de loi. Il ne tient ainsi qu'à l'établissement de crédit de faire en sorte que, de très faible, la charge administrative créée par le texte devienne infinitésimale.

Enfin, les banques revendiquent une certaine liberté contractuelle dans la relation qui les lie à leur client dans le cadre d'une convention de dépôt. Le banquier doit en effet avoir la liberté de rompre son contrat si celui-ci est à durée indéterminée - c'est le cas visé ici -, notamment en raison de la prohibition des engagements perpétuels reconnue par le code civil. Mais rien dans ce texte ne vise à limiter la possibilité pour les banquiers de rompre ces contrats, puisqu'il ne s'agit que d'une obligation de motivation lorsque le client en fait la demande. À titre de comparaison, la résiliation unilatérale de certains contrats d'assurance de particuliers fait obligatoirement l'objet d'une motivation, le Gouvernement souhaitant actuellement, dans le cadre de son projet de loi de simplification de la vie économique, étendre cette disposition aux professionnels.

Le législateur peut donc encadrer les conditions dans lesquelles se déploie la liberté contractuelle. Pour mémoire, le Conseil constitutionnel a bien précisé dans une décision de 1999 que, si la liberté contractuelle résultant de l'article IV de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen justifie qu'un contrat à durée indéterminée puisse être rompu unilatéralement, l'information du cocontractant doit en revanche être garantie. C'est au législateur qu'il revient de déterminer dans quelles conditions.

Ces objections résolues, je souhaite vous expliquer les raisons qui m'ont poussé à déposer l'amendement que je vais vous présenter.

Lors des travaux que j'ai menés, mon attention a été attirée sur un risque réel dans la rédaction initiale du texte.

En effet, une relation contractuelle entre l'établissement et son client peut être rompue pour motifs de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Deux cas se présentent alors. D'une part, l'impossibilité d'actualisation des éléments de connaissance du client impose à l'établissement de crédit de mettre fin à la relation d'affaires et, dans ce cas, il peut faire une déclaration de soupçon à Tracfin. D'autre part, l'établissement de crédit peut mettre fin à la relation d'affaires à sa convenance s'il observe des opérations suspectes et, dans ce cas, il lui est imposé de procéder à cette déclaration de soupçon.

Or cette déclaration est confidentielle et l'établissement de crédit ne doit donc en faire état d'aucune manière.

Le risque de soumettre l'établissement de crédit à une injonction contradictoire, entre, d'un côté, une obligation de motiver la fermeture du compte à la demande du client et, de l'autre, une interdiction de divulguer toute déclaration de soupçon, n'est donc pas nul.

Pour résoudre cette difficulté, mon amendement prévoit que la demande de résiliation ne peut pas faire l'objet d'une motivation lorsque celle-ci contrevient aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public. Ce faisant, il reprend une rédaction éprouvée pour les personnes bénéficiaires du droit au compte, dont je vous ai déjà parlé. Celle-ci permet d'inclure le cas où la banque a procédé à une déclaration de soupçon sans pour autant s'y limiter, ce qui constituerait une divulgation en négatif.

Par ailleurs, ce même amendement vise à renforcer la portée opérationnelle du dispositif. Comme je l'ai dit, il prévoit que le délai de réponse de l'établissement de crédit est limité à quinze jours ouvrés à compter de la demande. Il précise aussi que la motivation est effectuée par écrit, sur support papier ou sur un autre support durable.

Je tiens à souligner que cet amendement a été soumis au préalable à Philippe Folliot, qui l'a accepté.

Je vous propose donc d'adopter mon amendement et la proposition de loi ainsi modifiée.

M. Philippe Folliot, auteur de la proposition de loi. - Je vous remercie de me permettre de m'exprimer devant la commission des finances.

Je remercie le rapporteur de ses propos et j'approuve les positions qu'il vient de défendre. Nombre de nos concitoyens, victimes d'une fermeture abusive de compte bancaire, ressentent celle-ci comme une forme d'injustice, comme un abus de position de la part des établissements bancaires. En effet, la fermeture d'un compte bancaire est une forme de petite mort sociale : sans accès aux services bancaires, on ne peut pas vivre normalement. Le rapporteur a précisé à juste titre qu'il existait un préavis de deux mois, ainsi qu'une possibilité d'injonction de la Banque de France à une banque pour l'ouverture d'un nouveau compte. Toutefois, ce nouveau compte se caractérise par un mode de fonctionnement dégradé, sans carte bancaire et avec des services restreints.

En outre, les fermetures abusives de compte bancaire touchent en particulier les personnes politiquement exposées. L'obligation faite à la banque d'en justifier les raisons si le requérant en fait la demande est importante et je suis favorable à l'amendement du rapporteur.

La fermeture unilatérale d'un compte bancaire n'a pas forcément le même impact partout. Ainsi, dans un territoire rural, où il n'y a qu'une seule agence bancaire, il peut être difficile de se rendre dans un autre établissement, situé à une dizaine de kilomètres de là, pour ouvrir un autre compte bancaire. D'autant que certains établissements bancaires ont tendance à « stigmatiser » certains comptes professionnels, selon le code APE (activité professionnelle exercée) de l'entreprise. Par exemple, un cafetier, hôtelier-restaurateur, peut subir la fermeture automatique de son compte professionnel, même s'il a toujours respecté ses obligations. Cela vaut aussi dans le cadre associatif. C'est d'ailleurs parce que l'on a fermé sans aucune justification le compte bancaire d'une association culturelle que je présidais, malgré le respect total des obligations liées à ce compte, que j'ai présenté ce texte.

Je remercie le rapporteur de la qualité de son travail et de m'y avoir associé.

M. Claude Raynal, président. - Le rapporteur vous a donc consulté afin que vous approuviez son amendement, et a motivé sa position !

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je remercie notre collègue Marc Laménie de l'examen minutieux qu'il a fait de ce texte. Parfois, le diable se cache dans les détails. L'obligation faite aux banques de motiver la fermeture de tel ou tel compte contribue au respect du droit des usagers et favorise le bon équilibre de la relation commerciale qui lie les banques à leurs clients. Nous pouvons nous étonner de découvrir ces méthodes aujourd'hui, alors qu'on les rencontre aussi dans le secteur des assurances. Le projet de loi de simplification de la vie économique reprend certaines recommandations de notre rapport d'information Garantir une solution d'assurance aux collectivités territoriales sur ce sujet. La proposition de loi que nous examinons devrait prospérer et obtenir un large soutien sénatorial.

M. Michel Canévet. - Je remercie le rapporteur pour la qualité de son rapport. Avez-vous identifié des établissements bancaires qui pratiquent couramment cette fermeture abusive de comptes ? Sans forcément faire de la délation, il peut être utile de distinguer ceux qui mettent en oeuvre de bonnes pratiques de ceux qui ne le font pas.

En outre, concernant les signalements à Tracfin, la réponse du service à la banque est-elle soumise à un délai ? En effet, le fait d'invoquer un impératif de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public ne contribuera-t-il pas à susciter le doute dans l'esprit de ceux qui n'obtiendraient pas de justification de la part de la banque pour motiver la fermeture de leur compte ?

Enfin, le périmètre de l'examen du texte permet-il d'englober la question des prélèvements Sepa (espace unique de paiement en euros, ou Single Euro Payments Area) qui demeurent en activité ? En effet, l'ex-Sfam a récemment déposé le bilan pour avoir opéré des prélèvements indus sur des comptes bancaires parce que le mandat Sepa accordé à une certaine époque n'avait pas été arrêté. Si la banque ne notifie pas à ses clients la liste des mandats actifs, n'importe quel opérateur peut effectuer un prélèvement sans l'accord du client. Ne faudrait-il pas prévoir un amendement visant à ce que la banque liste l'ensemble des mandats Sepa actifs ?

M. Arnaud Bazin. - J'ai deux questions. La première concerne les motivations justifiant la fermeture d'un compte. Les avez-vous examinées ? En effet, si les banques ne sont pas favorables à ce dispositif, c'est sans doute par crainte du contentieux, dans la mesure où en indiquant le motif de la fermeture d'un compte bancaire, elles risquent d'ouvrir la voie à une contestation possible.

La deuxième porte sur l'efficacité de l'amendement. En effet, si le seul cas où la banque sera dispensée de motiver la fermeture d'un compte est celui d'un signalement de soupçon de blanchiment, la suspicion sera évidente et les employés de la banque qui seront à l'oeuvre seront sous la pression de la personne ou de la société dont le compte aura été fermé.

L'intention du rapporteur me paraît excellente, mais il faudrait examiner toutes les conséquences qu'emporte cet amendement.

M. Claude Nougein. - Ce texte est une excellente initiative surtout en cette période où l'on tend vers une concentration des banques. La diminution du nombre d'opérateurs ne peut qu'accroître le problème.

Est-ce que les mesures prévues visent aussi les entreprises, au-delà des particuliers, y compris les autoentrepreneurs et les petites entreprises ?

En outre, il sera très facile de contourner cette loi en bloquant les comptes sans les fermer. Cela arrive très souvent pour des motifs qui peuvent être fallacieux. Ainsi, dans mon département, une banque a bloqué la carte bleue du maire d'une commune parce qu'il n'avait pas répondu à une demande de justificatif de domicile. Il était pourtant client de la banque depuis dix ans. Ce genre de contournement arrive très souvent. Est-il vraiment justifié de bloquer un compte parce que le client n'a pas répondu à une demande concernant son état civil, alors que cet état civil ne change pas forcément d'une année sur l'autre ?

M. Éric Bocquet. - Un client victime d'une fermeture de compte par décision unilatérale de la banque a-t-il des voies de recours et peut-il s'opposer ?

De plus, y a -t-il des critères de rentabilité qui pourraient justifier la fermeture d'un compte par la banque ? Si j'ai bien compris, même un compte toujours actif sans aucun découvert peut faire l'objet d'une fermeture par décision unilatérale, ce qui est pour le moins surprenant.

Enfin, est-ce que la fermeture d'un compte en banque peut entraîner pour le client des difficultés pour en ouvrir un autre dans une autre banque ?

Mme Nathalie Goulet. - Ces fermetures de compte figurent-elles au fichier national des comptes bancaires et assimilés (Ficoba) ? En effet, il peut être utile de ficher, mais compliqué de « déficher ».

Par définition, Tracfin ne répond pas aux déclarations de soupçon. Mais je rejoins M. Arnaud Bazin sur le sujet, je ne pense pas que l'amendement sera très efficace.

M. Christian Bilhac. - Félicitations à l'auteur du texte et à son rapporteur.

Il est prévu que la banque fournisse, si le client en fait la demande, les motifs de la résiliation du compte, sauf dans le cas où la sécurité nationale est en jeu. Pourquoi faut-il que le client en fasse la demande ? Cela ne va pas dans le sens de la simplification. Il faudrait que la banque justifie automatiquement la fermeture d'un compte.

Mme Isabelle Briquet. - Ce texte n'appelle pas de contestation particulière. Il étend le dispositif prévu dans le cadre du droit au compte à l'ensemble des titulaires de compte. A-t-on des éléments quantitatifs sur le nombre de comptes concernés par ce problème ?

M. Bernard Delcros. - Ce texte me paraît tout à fait justifié.

Ferme-t-on de plus en plus de comptes sans justification ? Pour l'instant, le préavis pour une fermeture de compte est de deux mois. Est-ce suffisant, notamment pour effectuer les démarches permettant d'ouvrir un autre compte ?

Je souscris à ce qu'a dit Christian Bilhac sur le fait que la banque qui ferme un compte devrait en donner la raison sans qu'il y ait besoin d'en faire la demande.

M. Hervé Maurey. - Est-il envisageable de prévoir une procédure d'appel de la décision auprès d'une instance bancaire supérieure ? Y a-t-il un moyen de contrôler la raison invoquée pour la fermeture du compte ?

Quant aux règles qui s'appliquent aux personnalités politiquement exposées, ne pourrait-on pas envisager une déclaration centralisée auprès d'un organisme de contrôle pour éviter la multiplication des documents à remplir ?

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. - L'absence de motivation signera le fait qu'il y a eu un signalement de soupçon de blanchiment. Certes, cela vaut aussi pour les bénéficiaires du droit au compte, mais ils ne sont que 30 000. Faut-il vraiment expliciter cette cause d'exonération de motivation dans la loi, d'autant que rien n'interdit de saisir le tribunal en cas de contestation ? Il est gênant que l'intéressé puisse être informé par la banque d'un signalement de soupçon à son encontre.

M. Emmanuel Capus. - Quel est le volume de comptes fermés abusivement ?

Le texte prévoit-il des dispositions sur les frais de clôture de compte ? Nous avons abordé le sujet en séance publique, hier, dans le cadre de l'examen du projet de loi de simplification de la vie économique.

M. Claude Raynal, président. - L'engorgement des tribunaux si les recours se multiplient peut devenir un sujet sensible. Quel lien établir entre un tel risque et cette proposition de loi de bon sens ? En outre, le droit au compte existe. Comment s'articule-t-il avec le texte ? Ne faudrait-il pas prévoir la possibilité d'un appel devant la Banque de France pour éviter une procédure devant les tribunaux, qui risque d'être longue ?

M. Marc Laménie, rapporteur. - Monsieur Canévet, nous avons entendu les représentants de la Fédération bancaire française. Elle ne nous a évidemment pas transmis le nom des banques qui ferment abusivement des comptes. Par ailleurs, Tracfin n'a en effet pas à répondre à la banque en cas de signalement de soupçon. Enfin, dans l'amendement que je propose, l'interdiction de motivation par la banque couvre un périmètre plus large que la seule déclaration de soupçon pour éviter une divulgation en négatif de ce signalement : elle mentionne en effet un problème de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public.

Monsieur Bazin, dans la rédaction actuelle du texte, le seul risque de contentieux intervient si la banque ne fournit pas la motivation demandée. Les motivations principales invoquées à l'appui de fermetures de comptes sont constituées par des raisons commerciales.

Monsieur Bocquet et madame Goulet, le client a une relation contractuelle avec la banque, ce qui l'expose en effet à une fermeture de son compte sans qu'il puisse la contester. Par ailleurs, à ma connaissance, la fermeture de son compte ne l'expose pas à une difficulté pour ouvrir un compte dans une autre banque.

Monsieur Bilhac, une motivation systématique par la banque ne me paraît pas pouvoir intervenir dans le cadre de la relation contractuelle qui lie le client à sa banque. C'est en revanche le cas pour les bénéficiaires du droit au compte. Dans ce cas, la banque ne se situe pas dans une relation contractuelle mais est alors soumise à une obligation légale, ce qui justifie le caractère automatique de la motivation de la décision de résiliation.

Madame Briquet et monsieur Delcros, il n'y a pas d'éléments quantitatifs sur l'étendue du problème et son évolution. La Fédération bancaire française et la direction générale du Trésor n'ont pas d'informations sur ce sujet.

Monsieur Maurey, une procédure d'appel paraît prématurée dans la mesure où le cadre est celui d'une relation contractuelle où la banque peut décider de maintenir ou de rompre le contrat. Les situations sont variables en fonction des interlocuteurs.

Madame Carrère-Gée, invoquer le maintien de l'ordre public et la sécurité nationale permet d'éviter l'écueil que vous mentionnez quant à la divulgation du signalement de soupçon.

Monsieur Capus, je vous ai déjà partiellement répondu sur les frais de clôture de compte.

Enfin, monsieur le président Raynal, cette proposition de loi se limite à ouvrir un droit à la motivation de la fermeture de compte, ce qui devrait éviter la multiplication des contentieux. Par ailleurs, il ne serait pas inintéressant d'inclure la Banque de France dans le dispositif. Cela mérite d'être envisagé.

M. Philippe Folliot. - Aujourd'hui, il n'existe pas de procédure en appel, en cas de fermeture abusive d'un compte bancaire. La seule possibilité est de s'adresser à la Banque de France pour faire valoir le droit au compte et obtenir l'ouverture d'un compte dégradé.

Pour ce qui est de la difficulté d'ouvrir un compte dans une autre banque, une entreprise, en fonction de son domaine d'activité, peut rencontrer certains problèmes. C'est particulièrement le cas pour les restaurateurs-cafetiers.

La fermeture d'un compte peut concerner une personne physique comme morale.

Le texte vise la fermeture abusive des comptes bancaires. Quand un client ne respecte pas les obligations liées à son compte, la banque le ferme et cela ne pose pas de difficultés. En revanche, quand la banque ferme un compte alors que le client a parfaitement respecté les obligations de son contrat, elle doit se justifier. Le risque de contentieux restera limité, car les banques s'« auto-réguleront » dès qu'elles auront l'obligation de justifier la fermeture d'un compte.

Quant aux frais bancaires, ils sont pour l'instant à la charge du client, ce qui crée une forme de double peine.

M. Claude Raynal, président. - En ce qui concerne le périmètre de cette proposition de loi, en application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer qu'il comporte toutes dispositions relatives aux conditions de résiliation d'une convention de compte de dépôt à l'initiative d'un établissement de crédit.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Article unique

M. Marc Laménie, rapporteur. - L'amendement COM-1 vise à ce que la demande de résiliation ne puisse faire l'objet d'une motivation lorsque celle-ci contrevient aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public. L'amendement prévoit aussi que cette motivation sera effectuée par écrit, sur support papier ou sur un autre support durable, d'une part, et qu'elle sera adressée au client dans un délai de quinze jours ouvrés à compter de la réception de la demande, d'autre part.

L'amendement COM-1 est adopté.

L'article unique constituant l'ensemble de la proposition de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie »6(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie7(*).

Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte8(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial9(*).

En application de l'article 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des finances a arrêté, lors de sa réunion du 5 juin 2024, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 519 (2023-2024) visant à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires.

Ce périmètre comprend :

- les conditions de résiliation d'une convention de compte de dépôt à l'initiative d'un établissement de crédit.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

M. Philippe FOLLIOT, sénateur du Tarn (Union Centriste) et auteur de la proposition de loi.

Direction générale du Trésor

- M. Gabriel CUMENGE, sous-directeur des Banques et financements d'intérêt général ;

- M. Jean-Baptiste BERNARD, chef du bureau des Services bancaires et des moyens de paiement ;

- M. Hadrien HADDAK, adjoint au chef du bureau des Services bancaires et des moyens de paiement ;

- Mme Fanny MICHAUD, conseillère parlementaire.

Fédération bancaire française

- M. Dominique ROUQUAYROL DE BOISSE, directeur juridique et conformité ;

- M. Jérôme PARDIGON, directeur du département relations institutionnelles.

Contributions écrites

Banque de France

UFC-Que Choisir

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl23-519.html


* 1 Sauf stipulation contractuelle d'un préavis qui ne peut dépasser un délai de 30 jours.

* 2 Proposition de loi n° 374 (2023-2024) visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession, déposée à l'Assemblée nationale le 16 janvier 2024 par Mme Christine PIRÈS BEAUNE. Voir le rapport n° 575 (2023-2024) de M. Hervé MAUREY, déposé le 7 mai 2024.

* 3 « Les engagements perpétuels sont prohibés. Chaque contractant peut y mettre fin dans les conditions prévues pour le contrat à durée indéterminée ». L'article 1211 du code civil précise que « lorsque le contrat est conclu pour une durée indéterminée, chaque partie peut y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuelle prévu ou, à défaut, un délai raisonnable ».

* 4 Directive (UE) 2015/849 du Parlement Européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission.

* 5 Normes internationales sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et de la prolifération. Les recommandations du GAFI. Mise à jour en novembre 2023.

* 6 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 7 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 8 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 9 Décision n° 2011-637 DC du 28 juillet 2011 - Loi organique relative au fonctionnement des institutions de la Polynésie française, confirmée par les décisions n° 2016-732 DC du 28 juillet 2016 - Loi organique relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu'au Conseil supérieur de la magistrature, et n° 2017-753 DC du 8 septembre 2017 - Loi organique pour la confiance dans la vie politique.

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