C. UNE COMMISSION D'ENQUÊTE PORTANT SUR LA GESTION DES SERVICES PUBLICS AU SENS LARGE
Les auteurs de la proposition de résolution estiment, dans son exposé des motifs, que les dispositifs de lutte contre la délinquance financière, la criminalité organisée et le contournement des sanctions internationales doivent être étudiés, à la suite :
· d'une part, de la révélation de « très nombreuses affaires mises à jour par un consortium de journalistes venus du monde entier, réunis auteur de la lutte contre la délinquance financière, l'ICIJ », telles que « Panama papers, Swiss leaks, Paradise Papers, FinCEN Files, Offshore leaks, Luxleak, [...] Pandora Papers » ;
· d'autre part, des différentes estimations réalisées, citées par les auteurs, relatives à la perte de recettes fiscales potentielles : « entre 30 et 100 milliards d'euros » selon la Cour des comptes16(*) s'agissant de la fraude fiscale des particuliers ou 200 milliards d'euros à l'échelle de l'Union européenne selon le Global Tax Evasion Report 202417(*) s'agissant de l'évasion fiscale pratiquée par les multinationales.
En conséquence, ils estiment nécessaire de prendre acte du travail d'analyse précité et de traduire ce dernier en réglementations, dans l'objectif de renforcer les dispositifs de lutte contre la délinquance financière, la criminalité organisée et le contournement des sanctions internationales.
À cet effet, la commission d'enquête qu'ils proposent de créer viserait à dresser un état des lieux sur la lutte contre la délinquance financière, la criminalité organisée et le contournement des sanctions internationales, qui traiterait notamment de la perte de recettes fiscales induite, qui analyserait de nouveaux enjeux liés aux mutations du secteur financier telles que la « multiplication des nouveaux produits financiers, notamment les cryptoactifs18(*), ainsi que l'extrême rapidité, voire l'immédiateté des échanges », et qui permettrait en outre d'aborder les questions relatives aux pays et territoires non coopératifs à des fins fiscales et aux ports francs « comme il en existe en Suisse ou au Luxembourg ».
Ces éléments devront permettre de proposer des mesures visant à améliorer la lutte contre la délinquance financière, la criminalité organisée et le contournement des sanctions internationales, en France et en Europe.
Il appert que les investigations de cette commission d'enquête devraient donc porter sur la gestion des services publics intervenant dans le domaine du contrôle et de la supervision des acteurs financiers, affectés à la lutte contre les circuits financiers clandestins et contre le blanchiment d'argent et, enfin, participant à l'élaboration des standards internationaux en la matière.
Le champ d'investigation retenu peut bien être regardé comme portant sur la gestion d'un service public au sens large, et non sur des faits déterminés.
Ainsi, la proposition de résolution entre-t-elle bien dans le champ défini à l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 précitée, au titre de la gestion d'un service public, sans qu'il soit nécessaire d'interroger le garde des sceaux aux fins de connaître l'existence d'éventuelles poursuites judiciaires en cours.
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Dès lors, la commission des lois a constaté que la proposition de résolution n° 7 rectifiée bis (2024-2025) est recevable.
Il n'existe donc aucun obstacle à la création de cette commission d'enquête par la procédure du « droit de tirage ».
* 16 Cour des comptes, Rapport public thématique La détection de la fraude fiscale des particuliers, novembre 2023.
* 17 EU Tax Observatory, Global Tax Evasion Report 2024.
* 18 Les « cryptoactifs » sont, selon la définition de l'Autorité des marchés financiers, des actifs numériques virtuels qui reposent sur la technologie de la blockchain à travers un registre décentralisé et un protocole informatique crypté.