- L'ESSENTIEL
- EXAMEN DES ARTICLES
- Article 1er
Allègement de la procédure de mise en place
et de modification des périmètres délimités des abords (PDA)
et possibilité d'adopter un règlement du PDA
- Article 2
Publicité des avis rendus
par les architectes des Bâtiments de France (ABF)
- Article 3
Création d'une commission départementale
d'examen des dossiers litigieux
- Article 4
Ajout de la réhabilitation des constructions existantes
au champ de l'intérêt public associé à l'architecture
- Article 1er
- EXAMEN EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES ET DES CONTRIBUTIONS
ÉCRITES
- RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE
L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU
RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)
- LA LOI EN CONSTRUCTION
L'ESSENTIEL
La proposition de loi relative à l'exercice des missions des architectes des Bâtiments de France (ABF) est issue des travaux de la mission d'information1(*) sur le périmètre d'intervention et les compétences des ABF, dont les conclusions ont été adoptées le 25 septembre 2024.
Faisant le constat d'une incompréhension, par les élus locaux et les administrés, du rôle des ABF dans la protection du cadre de vie et des décisions qu'ils rendent à ce titre, et relevant les difficultés rencontrées par ces fonctionnaires de l'État dans l'accomplissement de leurs missions, cette structure temporaire a formulé 24 propositions visant à créer les conditions d'un dialogue renouvelé entre ABF et acteurs locaux, ainsi que d'une meilleure conciliation des enjeux patrimoniaux, économiques et environnementaux à l'échelle des territoires.
Cette proposition de loi transpartisane constitue la traduction de celles de ces recommandations qui relèvent du domaine législatif et n'ont pas de portée financière.
Elle comporte quatre articles prévoyant une simplification de la procédure d'adoption des périmètres délimités des abords (article 1er), la publicité obligatoire des avis rendus par les ABF (article 2), la mise en place d'un examen collégial des dossiers litigieux à l'échelon départemental (article 3) ainsi que l'extension du champ de l'intérêt public associé à l'architecture aux opérations de réhabilitation du bâti existant (article 4).
À l'initiative de son rapporteur, la commission a adopté cinq amendements permettant de préciser et de compléter les quatre volets du texte. Elle a notamment prévu l'extension à un mois du délai de recours dont disposent les maires contre les décisions des ABF.
I. LES CONDITIONS ACTUELLES DE L'EXERCICE DES MISSIONS DES ABF DONNENT LIEU À DES DIFFICULTÉS RÉCURRENTES
A. LES ABF, ACTEURS CENTRAUX DE L'AMBITION PATRIMONIALE FRANÇAISE
Les architectes des Bâtiments de France (ABF), qui exercent au sein des unités départementales de l'architecture et du patrimoine (Udap), sont des fonctionnaires de l'État dont le rôle est d'assurer la protection du patrimoine architectural et paysager. Experts de haut niveau sur ces sujets, ils constituent le maillon central des politiques de préservation du patrimoine bâti, d'amélioration du cadre de vie de nos concitoyens, de développement touristique des territoires et de maintien des savoir-faire artisanaux et traditionnels dans le domaine de la construction.
Ils sont à ce titre chargés d'une triple mission qui les place au contact direct des élus locaux et des porteurs de projets :
- une mission d'accompagnement et de conseil des collectivités publiques comme des particuliers en matière d'architecture et de paysage ;
- une mission de conservation de certains monuments historiques ;
- une mission de contrôle des autorisations d'urbanisme demandées dans les espaces protégés au titre du code du patrimoine, notamment aux abords des monuments historiques.
Il leur revient ainsi de s'assurer de l'insertion harmonieuse des aménagements projetés dans le milieu environnant, en rendant, selon la nature de l'autorisation, de la zone protégée et l'existence d'une covisibilité avec l'édifice protégé, un avis simple ou un avis conforme, lequel s'impose à l'autorité compétente en matière d'urbanisme. 8 % du territoire national et près d'un tiers des logements français sont soumis à ce contrôle.
Cette dernière mission constitue un pouvoir propre des ABF, qui s'exerce en dehors de toute autorité hiérarchique. Une procédure de recours auprès du préfet de région est cependant ouverte aux élus délivrant les autorisations d'urbanisme ainsi qu'aux pétitionnaires, qui fait intervenir la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA) ; elle intègre, au bénéfice des seuls pétitionnaires, une possibilité de médiation.
B. UN POUVOIR DE CONTRÔLE GÉNÉRANT DE FORTES TENSIONS
Si l'exercice de ce contrôle est largement salué comme permettant la préservation de la physionomie singulière des villes et des paysages français, qui constitue un élément central de l'identité de notre pays et de son agrément, il donne également lieu à des tensions récurrentes sur le terrain.
Quatre principaux points d'achoppement sont régulièrement mis en avant :
- le manque de prévisibilité des avis rendus, qui sont susceptibles de varier d'un ABF et d'un département à l'autre. Cette situation résulte du caractère éminemment subjectif du contrôle opéré, qui s'exerce sur des cas d'espèce et porte sur des questions esthétiques ;
- le coût élevé associé aux décisions des ABF. La moitié des décisions rendues sont en effet des accords assortis de prescriptions qui, touchant notamment aux techniques ou aux matériaux à utiliser, peuvent significativement renchérir les aménagements projetés ;
- le manque de pédagogie dans les avis rendus, qui peuvent apparaître insuffisamment motivés faute d'un accompagnement en amont de la demande d'autorisation ;
- l'insuffisante prise en compte des enjeux liés à la rénovation énergétique du bâti ancien. La conciliation de la protection du patrimoine avec l'isolation des bâtiments ou l'implantation de panneaux photovoltaïques sont en particulier source de difficultés.
C. DES AGENTS FRAGILISÉS PAR L'ALOURDISSEMENT DE LEURS MISSIONS
Ces difficultés s'expliquent en partie par la dégradation des conditions d'exercice des ABF.
La forte augmentation de la superficie des zones protégées au cours des dernières décennies, l'extension du périmètre de compétence des ABF à de nouvelles missions telle que la sécurisation des cathédrales, ainsi que la complexification croissante de la réglementation ont mécaniquement entraîné l'explosion du nombre d'avis rendus (+ 63 % entre 2013 et 2023), tandis que les effectifs des 189 ABF ont quasiment stagné (+ 6 % sur la même période).
La situation de surcharge administrative qui en résulte dans les UDAP ne leur laisse pas le temps d'effectuer les tâches de conseil et d'accompagnement qui, en amont du rendu de leurs décisions, permettraient d'en assurer la lisibilité et l'acceptabilité.
II. LES MESURES DE LA PROPOSITION DE LOI
A. ADAPTER LE PÉRIMÈTRE DE CONTRÔLE DES ABF AUX RÉALITÉS DU TERRAIN
L'article 1er vise à encourager la généralisation des périmètres délimités des abords (PDA).
Les PDA constituent en effet une réponse pertinente aux incohérences suscitées par l'existence de zones de protection automatiques de 500 mètres autour de chaque monument historique, qui ne correspondent pas nécessairement aux besoins de chaque territoire. Alors que tout aménagement qui y est projeté est soumis au contrôle de l'ABF, il en résulte des procédures inutilement longues et parfois infructueuses pour les porteurs de projets.
Les PDA permettent d'adapter le périmètre protégé à l'intensité patrimoniale constatée dans chaque collectivité, en le limitant à la zone dans laquelle le besoin de protection fait consensus. Leur généralisation se heurte cependant aux contraintes procédurales de leur mise en place, qui apparaissent inutilement lourdes et bien souvent coûteuses.
Ces contraintes expliquent le succès relatif rencontré par ces outils, qui, en dépit d'un triplement de leur nombre depuis 2016, n'avaient été déployés que pour 9 % des monuments historiques en 2023.
En l'état actuel du droit, les PDA, contrairement aux sites patrimoniaux remarquables (SPR), ne s'accompagnent par ailleurs d'aucun document réglementaire fixant les attendus des aménagements autorisés, afin d'orienter les pétitionnaires dans la construction de leurs projets.
L'article 1er tend en conséquence à :
- simplifier et alléger la procédure de mise en place des PDA, par la suppression de deux formalités consultatives aujourd'hui obligatoires :
Ø la consultation du propriétaire ou de l'affectataire du monument historique générant le PDA. La suppression de cette consultation apparaît souhaitable tant pour des raisons de principe (la servitude de protection des abords est établie dans l'intérêt général, et non dans l'intérêt particulier des propriétaires) que pour des raisons pratiques (leur identification est chronophage, notamment lorsque le monument est en indivision) ;
Ø la conduite d'une enquête publique lorsque la création du PDA n'est pas concomitante à la mise en place ou à la révision des documents d'urbanisme. En raison de son formalisme et de son coût, l'enquête publique constitue en effet, selon le ministère de la Culture, « le frein le plus évident au déploiement massif de PDA » ;
- renforcer leur sécurité juridique, en prévoyant la possibilité pour les élus qui le souhaitent d'assortir le PDA d'un règlement.
B. ASSURER LA TRANSPARENCE DES DÉCISIONS RENDUES
L'article 2 prévoit la publication systématique des décisions rendues par les ABF dans un registre national gratuitement accessible en ligne, ce qui permettra de renforcer leur prévisibilité.
En l'état actuel du droit, les avis rendus par les ABF ne sont pas publics, contrairement à d'autres documents relatifs aux opérations d'urbanisme et aux ventes immobilières. Alors qu'ils constituent une source d'information précieuse pour les services instructeurs et les porteurs de projet, cette exception fait figure d'anomalie à l'heure des efforts de transparence des autorités administratives.
La même mesure a été adoptée le 5 juin 2024 par la commission des affaires économiques dans le cadre du projet de loi relatif au développement de l'offre de logements abordables, qui n'a pas encore été examiné en séance publique.
C. CRÉER DES ESPACES DE DIALOGUE AVEC LES ÉLUS ET LES PORTEURS DE PROJET
L'article 3 tend à favoriser le règlement des dossiers litigieux en amont des procédures de recours à l'échelon régional, en prévoyant la possibilité pour le préfet de région de réunir, sur simple demande du maire, une commission départementale assurant leur examen collégial.
Dans les départements où cette pratique est mise en oeuvre, on constate que l'engagement d'un dialogue à cette échelle suffit souvent à régler les désaccords.
Il s'agit donc de le généraliser en traçant le cadre de fonctionnement de cette commission, qui serait composée notamment du pétitionnaire, du maire, de l'ABF, du préfet de région, d'élus ou encore d'associations de protection du patrimoine, et qui émettrait un avis consultatif sur le projet de décision d'urbanisme.
D. ÉRIGER LA RÉHABILITATION DU BÂTI ANCIEN EN PRIORITÉ PARTAGÉE
L'article 4 modifie enfin l'article 1er de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture pour ajouter la réhabilitation des constructions existantes aux éléments constitutifs de l'intérêt public associé à l'architecture.
Alors que les aménagements d'urbanisme passent trop souvent par la destruction de constructions existantes et que la rénovation énergétique donne fréquemment lieu à des pratiques délétères pour le bâti ancien, il s'agit d'affirmer que sa réhabilitation relève d'un objectif partagé entre tous les professionnels de l'architecture.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
À l'initiative de son rapporteur, la commission a adopté cinq amendements à la proposition de loi.
À l'article 1er, elle a clarifié le critère de suppression de l'enquête publique préalable au PDA, en prévoyant qu'elle n'est pas nécessaire lorsque le PDA réduit le périmètre automatique de 500 mètres autour du monument historique.
Afin de ne pas multiplier les outils réglementaires, elle a par ailleurs prévu l'inscription du règlement du PDA au sein du plan local d'urbanisme (PLU).
À l'article 2, elle a précisé que la publication des décisions rendues par les ABF s'accompagnera de celle des éléments de nature à favoriser leur compréhension, les décisions des ABF n'étant intelligibles qu'à la lumière des projets d'aménagement qui leur sont soumis.
Elle a procédé à une nouvelle rédaction globale de l'article 3 permettant de resserrer la composition de la commission, renommée commission de conciliation, de prévoir qu'elle fonctionne sous l'égide du préfet de département, et d'articuler sa réunion avec le déclenchement des recours. Elle a à ce titre prévu l'extension à un mois du délai de recours des maires.
Elle a enfin effectué une modification rédactionnelle à l'article 4.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
Allègement de la procédure
de mise en place
et de modification des périmètres
délimités des abords (PDA)
et possibilité d'adopter un
règlement du PDA
Cet article encourage la généralisation des périmètres délimités des abords (PDA), qui recentrent l'intervention des architectes des Bâtiments de France (ABF) sur les zones où elle est la plus nécessaire, en allégeant les formalités nécessaires à leur mise en place. Afin d'améliorer la prévisibilité des décisions des ABF, il donne également la possibilité aux élus de mettre en place un règlement du PDA.
À l'initiative de son rapporteur, la commission a adopté deux amendements à cet article. Le premier modifie le critère de suppression de l'enquête publique, en prévoyant qu'elle n'est pas nécessaire lorsque le PDA réduit le périmètre de protection de 500 mètres autour du monument historique. Le second inscrit le règlement du PDA au sein des dispositions réglementaires du plan local d'urbanisme (PLU) prévues aux articles L. 151-18 et L. 151-19 du code de l'urbanisme.
I. - La situation actuelle
• Le premier paragraphe de l'article L. 621-30 du code du patrimoine prévoit le principe de la protection des abords des monuments historiques, c'est-à-dire des « immeubles ou ensembles d'immeubles qui forment avec un monument historique un ensemble cohérent ou qui sont susceptibles de contribuer à sa conservation ou à sa mise en valeur ». Cette protection au titre des abords a le caractère de servitude d'utilité publique affectant l'utilisation des sols.
Le II du même article détermine les zones dans lesquelles s'applique cette protection. Il s'agit :
- par principe, du périmètre délimité des abords (PDA), qui peut être commun à plusieurs monuments historiques. Créés par la loi dite « SRU » du 13 décembre 20002(*), les PDA ont vu leur régime profondément modifié par la loi dite « LCAP » du 7 juillet 20163(*) ;
- à défaut, de la zone déterminée par l'application d'un double critère géographique (est concerné tout immeuble situé à moins de 500 mètres du monument historique) et de covisibilité (les immeubles situés dans le cercle ainsi tracé sont concernés s'ils sont visibles en même temps que le monument). L'application de ce deuxième critère donne lieu à de fréquentes controverses et à une abondante jurisprudence du conseil d'État.
En application de l'article L. 632-2 du code du patrimoine, l'ensemble des autorisations de travaux (déclaration préalable et permis de construire, de démolir ou d'aménager) demandées dans ces zones des abords sont soumises à l'accord (ou avis conforme) de l'architecte des Bâtiments de France (ABF). Il lui revient à ce titre de s'assurer « du respect de l'intérêt public attaché au patrimoine, à l'architecture, au paysage naturel ou urbain, à la qualité des constructions et à leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant ».
• Ainsi que le souligne le G7 Patrimoine, la zone de protection automatique de 500 mètres présente l'avantage de ne pas préjuger de l'évolution du paysage architectural qu'elle recouvre. L'évolution du besoin de protection résultant des opérations d'urbanisme menées au fil du temps peut ainsi, le plus souvent, être absorbée au sein de cette zone largement définie.
La mise en place d'un PDA présente à l'inverse l'avantage d'adapter la servitude d'urbanisme à la zone dans laquelle le besoin de protection est effectivement constaté, ce qui permet de limiter les contraintes pesant sur les administrés et d'adapter la charge de travail des ABF à l'intensité patrimoniale de chaque collectivité.
La mission d'information sur les ABF a en conséquence préconisé, par ses recommandations n° 6, n° 7 et n° 8, la généralisation des PDA, ce qui doit passer à la fois par la simplification de leur procédure d'adoption et le renforcement de leur sécurité juridique.
• À l'heure actuelle, le déploiement des PDA reste en effet très limité : à la fin de l'année 2023, les 3 090 PDA en vigueur ne couvraient que 9 % des immeubles protégés au titre des monuments historiques.
Cette statistique générale recouvre de fortes disparités entre les départements. Tandis que le Val-de-Marne compte 87 PDA couvrant 88 % des monuments historiques de son territoire, ou que 90 PDA couvrant 31 % des monuments historiques ont été déployés en Lot-et-Garonne, 6 % seulement des monuments historiques de l'Indre-et-Loire sont couverts par les 53 PDA du département. Ces résultats dépendent fortement de la densité des monuments historiques de chaque département : alors que les 177 PDA du Morbihan ne couvrent que 19 % de ses monuments, les 25 PDA du Var en recouvrent 23 %.
Évolution du nombre de
périmètres délimités des abords (PDA)
depuis
2015
NB : Avant 2021, les chiffres sont issus des remontées des directions régionales des affaires culturelles (DRAC) complétées par des extractions de l'Atlas des patrimoines. Après 2021, ils reflètent uniquement les retours des DRAC dans le cadre des campagnes de bilan annuel menées par la direction générale des patrimoines et de l'architecture (DGPA) du ministère de la Culture.
Source : DGPA du ministère de la Culture
• Ce succès relatif résulte principalement du caractère très contraignant de la procédure de mise en place et de modification des PDA actuellement prévue par l'article L. 621-31 du code du patrimoine, qui apparaît inutilement lourde et bien souvent coûteuse, notamment pour les plus petites collectivités.
Cette procédure comporte aujourd'hui plusieurs étapes :
- la création du PDA est proposée par l'ABF ou l'autorité compétente en matière d'urbanisme4(*) (c'est-à-dire notamment le maire) ;
- plusieurs consultations sont obligatoires : celle du propriétaire ou de l'affectataire du monument historique, celle des administrés via une enquête publique ainsi que celle des communes concernées ;
- la décision de création du PDA est prise par le préfet de région, sous condition de l'accord de l'autorité compétente en matière d'urbanisme lorsque la proposition émane de l'ABF, et réciproquement ;
- en cas de désaccord entre l'ABF et l'autorité compétente en matière d'urbanisme, la décision est prise :
§ lorsque le PDA ne dépasse pas le périmètre automatique de 500 mètres, par le préfet après avis de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA) ;
§ lorsque le PDA dépasse la distance de 500 mètres, par décret en Conseil d'État après avis de la commission nationale du patrimoine et de l'architecture (CNPA).
Cette procédure peut être mise en oeuvre à deux moments :
- à l'occasion de l'élaboration, de la révision, de la modification d'un document d'urbanisme (PLU ou PLUi). L'enquête publique est alors mutualisée et porte à la fois sur le PDA et le document d'urbanisme. Il s'agit de la procédure la plus utilisée : 83 % des 117 PDA créés en 2023 l'ont été par ce biais ;
- à tout autre moment, dans le cadre de la procédure dite « État », portée par l'Udap. Le coût de l'ensemble de la procédure, notamment l'organisation d'une enquête publique dédiée, est alors pris en charge par la Drac, sur les crédits de l'action 2 du programme 175 du budget de l'État.
• Les préconisations de la mission d'information portent sur la suppression de deux des formalités consultatives : la consultation du propriétaire ou de l'affectataire du monument historique générant le PDA (recommandation n° 7) ; la conduite d'une enquête publique lorsque le PDA est créé de manière non concomitante à la mise en place ou à la révision des documents d'urbanisme (recommandation n° 6).
En ce qui concerne tout d'abord la consultation du propriétaire ou de l'affectataire du monument historique, il existe un consensus entre les services du ministère de la Culture et l'association nationale des ABF (ANABF) sur le fait qu'elle « alourdit inutilement la procédure de création du PDA », selon la réponse apportée par la direction générale du patrimoine et de l'architecture (DGPA) au questionnaire du rapporteur. Cette constatation générale est justifiée par trois éléments :
- dans la mesure où le propriétaire ou l'affectataire n'est pas lui-même concerné par la servitude des abords, sa consultation apparaît sans fondement ;
- sur le plan des principes, le fait d'accorder une attention particulière à la consultation du propriétaire, alors que la servitude d'utilité publique découlant du PDA est établie pour des raisons d'intérêt général, n'est pas sans poser question ;
- enfin et surtout, cette consultation obligatoire pose d'importantes difficultés pratiques. L'identification des propriétaires peut en effet s'avérer longue et difficile, notamment lorsque le PDA est créé autour de plusieurs monuments et dans les cas où le monument est détenu en indivision. La DGPA cite à cet égard le cas du centre ancien d'Aix-en-Provence, où 120 monuments historiques seraient englobés dans le PDA en cours d'élaboration.
L'enquête publique, ensuite, constitue l'étape la plus délicate de la procédure, en raison du formalisme qui lui est associé, mais aussi la plus coûteuse - les formalités de publicité ainsi que les honoraires du commissaire-enquêteur devant notamment être pris en charge. Selon les termes de la DGPA, elle constitue ainsi « le frein le plus évident au déploiement massif de PDA ».
• La mission d'information a enfin relevé qu'en l'état actuel du droit, aucun document réglementaire d'accompagnement n'est prévu pour les PDA. Les sites patrimoniaux remarquables (SPR), zones protégées dans lesquelles est établi, en application de l'article L. 631-3 du code du patrimoine, un règlement fixant notamment les attendus des travaux susceptibles d'y être effectués, offrent à cet égard un cadre juridique plus sécurisant pour les acteurs concernés par les opérations d'urbanisme.
Par sa préconisation n° 8, la mission a en conséquence recommandé que les élus locaux soient encouragés à adopter un règlement du PDA.
II. - Le dispositif de la proposition de loi
L'article 1er de la proposition de loi traduit ces trois recommandations à l'article L. 621-31 du code du patrimoine.
• Son 1° supprime la consultation du propriétaire ou de l'affectataire du monument historique, ainsi que l'obligation de conduire une enquête publique, dans la procédure générale de mise en place ou de modification d'un PDA prévue par le premier alinéa de l'article L. 631-1.
Une enquête publique mutualisée est cependant maintenue lorsque le PDA est mis en place ou modifié en même temps que les documents d'urbanisme, en application du troisième alinéa de cet article.
• Son 2° et son 3° donnent la possibilité aux élus d'assortir le PDA d'un règlement, en renvoyant au décret le soin de définir les éléments pouvant y figurer. Il s'agit ici de fixer les attendus des travaux touchant par exemple aux matériaux privilégiés pour le remplacement des menuiseries, aux techniques d'isolation autorisées, et plus généralement d'établir des règles communes sur l'aspect général des bâtiments de la zone protégée, dans le but de fluidifier l'intervention des ABF et d'améliorer la prévisibilité de leurs décisions.
En raison de sa portée juridique, ce règlement ne pourrait être adopté qu'au terme d'une enquête publique permettant de garantir son acceptabilité, que le PDA soit mis en place via la procédure « documents d'urbanisme » ou par la procédure « État ».
III. - La position de la commission
À l'initiative de son rapporteur, la commission a adopté deux amendements à l'article 1er.
• Par un amendement COM-1, elle a tout d'abord modifié le critère de suppression de l'enquête publique préalable à l'adoption d'un PDA, en prévoyant qu'elle n'est pas nécessaire lorsque le PDA réduit le périmètre automatique de 500 mètres autour du monument historique - que sa mise en place ou sa modification intervienne de manière concomitante ou non à celle des documents d'urbanisme
L'obligation d'enquête publique est en revanche conservée dans les cas où le PDA étend le périmètre de protection au-delà de 500 mètres, ce qui permettra de préserver le droit à participation des administrés lorsque l'adoption du PDA conduit à alourdir la servitude d'utilité publique qui s'impose à eux.
Il s'agit ainsi de tenir compte des exigences législatives et constitutionnelles en matière d'association du public à l'élaboration des décisions de l'administration.
• Par un amendement COM-2, elle a ensuite remplacé la possibilité donnée aux maires d'élaborer un règlement autonome du PDA par celle d'inscrire un règlement du PDA au sein des dispositions réglementaires du plan local d'urbanisme (PLU) prévues aux articles L. 151-18 et L. 151-19 du code de l'urbanisme pour assurer la protection du paysage architectural et du patrimoine bâti.
Il s'agit ainsi, afin de garantir l'efficacité et la lisibilité de l'action administrative, de ne pas multiplier les outils réglementaires et de s'appuyer sur le PLU, qui est aujourd'hui le mieux identifié par les acteurs locaux.
La rédaction proposée précise que ce règlement devra être élaboré en lien avec l'ABF, ce qui permettra d'éviter toute incohérence entre ses dispositions et les avis conformes qui seront rendus par l'ABF au sein du PDA.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 2
Publicité des avis rendus
par
les architectes des Bâtiments de France (ABF)
Cet article prévoit la publication des décisions des architectes des Bâtiments de France (ABF) dans un registre national gratuitement accessible en ligne.
À l'initiative de son rapporteur, la commission a adopté un amendement prévoyant que la publication de ces décisions s'accompagnera de celle des éléments de nature à favoriser leur compréhension.
I. - Le dispositif de la proposition de loi
• Cet article, qui traduit la recommandation n° 17 de la mission d'information, prévoit, à l'article L. 632-2 du code du patrimoine, la publication systématique des avis rendus par les architectes des Bâtiments de France (ABF) dans un registre national gratuitement accessible en ligne.
Les garanties permettant d'assurer la protection des données personnelles des administrés dans le cadre de ce registre seront prévues par le décret en Conseil d'État qui détermine les conditions d'application de l'ensemble des dispositions de l'article L. 632-2.
• En application du 4° de l'article L. 311-9 du code des relations entre le public et l'administration, la publication des informations en ligne constitue l'une des modalités de l'accès aux documents administratifs, dont le principe est prévu par l'article L. 300-1 du même code.
Les avis rendus par les ABF ne sont cependant pas mis à la disposition du public, contrairement à d'autres documents relatifs aux opérations d'urbanisme et aux ventes immobilières. Les autorisations d'urbanisme délivrées depuis 2013 (permis de construire, déclarations préalables, permis d'aménager et permis de démolir) sont ainsi disponibles sur le site Internet des ministères chargés de l'aménagement du territoire et de la transition écologique, tandis que les prix des ventes immobilières des cinq dernières années sont accessibles sur l'explorateur de données de valeurs foncières de la direction interministérielle du numérique (Dinum).
Or, la publication de ces décisions permettrait aux pétitionnaires d'avoir accès à une source d'information précieuse pour la préparation de leurs projets, et contribuerait plus largement à améliorer la prévisibilité des avis des ABF. L'union des directeurs des directions régionales des affaires culturelles (DRAC) souligne à ce titre que dans la mesure où il « n'existe pas de droit écrit dans les abords de monuments historiques », le souhait largement formulé de « vouloir connaître la règle du jeu qui s'y applique est légitime ».
Afin de répondre à cette préoccupation, les unités départementales de l'architecture et du patrimoine (Udap) ainsi que les services de l'État diffusent déjà des documents pédagogiques, sous forme de fiches-conseils ou encore de guides nationaux5(*). Ces documents de portée générale ne peuvent cependant entièrement remplacer des décisions rendues dans un contexte local bien précis. Ainsi que le souligne la direction générale du patrimoine et de l'architecture (DGPA) du ministère de la Culture, les caractéristiques du patrimoine diffèrent très significativement d'une région à l'autre et les prescriptions applicables sont spécifiques à chaque zone protégée, en ce qui concerne par exemple les matériaux de couverture, les pentes de toit ou encore la forme des fenêtres.
• Il est à noter que la commission des affaires économiques du Sénat a pris une position très proche sur ce sujet en adoptant le 5 juin 2024, lors de l'examen en commission du projet de loi relatif au développement de l'offre de logements abordables6(*), un amendement prévoyant la constitution d'une base de données nationale des avis des ABF, dans l'objectif de constituer un référentiel et une base de jurisprudence pour les porteurs de projet.
III. - La position de la commission
• La commission a relevé l'opposition à cette mesure exprimée, lors des auditions du rapporteur, par le ministère de la Culture ainsi que les représentants des Drac.
Cette opposition repose sur trois arguments :
- les difficultés posées par le caractère identifiant des données qui seraient ainsi mises en ligne au regard du principe de protection des données personnelles. La commission souligne à cet égard que d'autres données d'urbanisme potentiellement identifiantes, notamment celles relatives aux transactions immobilières, sont d'ores et déjà accessibles en ligne de manière anonymisée ;
- la surcharge de travail qui résulterait de cette obligation de publication pour les Udap, qui se trouvent déjà en difficulté pour traiter les quelque 500 000 demandes d'autorisation de travaux qui lui sont soumises chaque année. La commission souligne ici que la dématérialisation de l'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme dans les Udap est déjà largement avancée : les travaux de la mission d'information ont établi que 92 % des travaux d'instruction des Udap sont effectués sur l'application Patronum, et que près des trois quarts des dossiers de demande d'urbanisme sont traités de manière entièrement dématérialisée, de leur enregistrement par la collectivité à la notification de la décision au pétitionnaire ;
- enfin, l'absence de pertinence de la publication du seul avis de l'ABF, qui n'est intelligible qu'à la lumière du projet d'aménagement qui lui est soumis. Ce dernier point a été mis en avant par la plupart des personnes auditionnées.
• À l'initiative de son rapporteur, la commission a en conséquence adopté un amendement COM-3 prévoyant que la publication des décisions des ABF s'accompagnera de celle des éléments de nature à favoriser leur compréhension. Cette rédaction renvoie notamment aux demandes d'autorisation sur lesquelles portent ces décisions, ainsi que sur les projets d'aménagement associés.
Les garanties permettant d'assurer la protection des données personnelles associées à ces documents complémentaires seront également prévues par le décret en Conseil d'État qui détermine les conditions d'application de l'article L. 632-2.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 3
Création d'une commission départementale
d'examen des dossiers litigieux
Cet article crée, à l'échelon départemental et en dehors des procédures de recours, une voie d'examen collégial des avis litigieux rendus par les architectes des Bâtiments de France (ABF).
À l'initiative de son rapporteur, la commission a procédé à une nouvelle rédaction globale de cet article pour préciser le nom de cette commission, devenue commission de conciliation, resserrer la liste de ses membres, recentrer son fonctionnement à l'échelon départemental, supprimer son avis consultatif et articuler sa réunion avec l'engagement des procédures de recours ouvertes au pétitionnaire et à l'autorité compétente en matière d'urbanisme.
I. - La situation actuelle
• En l'état actuel du droit, les possibilités de contestation des décisions rendues par l'architecte des Bâtiments de France (ABF) apparaissent à la fois trop complexes, trop éloignées des contextes locaux et trop restrictives pour les pétitionnaires.
L'avis rendu par l'ABF n'est modifiable ni par son autorité hiérarchique, ni par l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme. Depuis la loi dite « LCAP » du 16 juillet 2016, il est en revanche susceptible de recours administratif dans le cadre tracé par l'article L. 632-2 du code du patrimoine, préalablement à une éventuelle saisine du juge administratif. Il revient alors au préfet de région de confirmer l'avis de l'ABF ou d'y substituer le sien.
La procédure définie par l'article L. 632-2, qui se déroule à l'échelle régionale, est marquée par une forte asymétrie entre les possibilités de contestation respectivement ouvertes à l'autorité compétente en matière d'urbanisme (le plus souvent le maire) et le demandeur de l'autorisation :
- l'initiative de la procédure appartient conjointement à l'autorité compétente et au demandeur, avec d'importantes variations dans la portée du recours et le délai de son introduction :
§ tandis que l'autorité compétente peut contester l'avis de l'ABF quel que soit son sens (accord, accord avec prescription ou refus), le recours du demandeur de l'autorisation ne peut porter que sur une décision négative de l'autorité compétente motivée par un refus de l'ABF. Cette configuration exclut donc la possibilité pour les pétitionnaires de contester les accords assortis de prescriptions coûteuses, qui représentent la majorité des décisions rendues par les ABF ;
§ tandis que les pétitionnaires disposent, à compter de la réception de la notification émise par l'autorité compétente, d'un délai de deux mois pour introduire leur recours, ce délai n'est que de sept jours à compter de la réception de l'avis de l'ABF pour l'autorité compétente ;
- le recours est adressé au préfet de région, qui confirme l'avis de l'ABF ou y substitue le sien dans un délai de deux mois à compter de la date de réception du recours ;
- le recours de l'autorité compétente est obligatoirement examiné par la section 2 de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA), tandis que sa saisine est facultative pour le recours du demandeur. Une possibilité de médiation est par ailleurs offerte au seul demandeur.
• La conjugaison de ces différents éléments explique peut-être que les bénéficiaires de ces possibilités de recours ne s'en soient guère saisis à ce jour. Selon les éléments fournis par la DGPA à la mission d'information, les 930 recours introduits en 2022 ne portaient ainsi que sur 0,2 % des décisions et avis rendus sur des demandes d'autorisation de travaux.
Le nombre des recours présentés a cependant connu une forte augmentation sur les dix dernières années (+ 1 140 % entre 2012 et 2022), avec une accélération depuis 2019. Alors que l'avis de l'ABF a été confirmé dans 80 % des cas environ, cette évolution, qui est la conséquence mécanique de la hausse du nombre d'avis rendus, traduit un besoin croissant d'échanges de la part des demandeurs.
Source : DGPA
• Afin de répondre à ces difficultés, certains préfets de département, dont celui de l'Aisne, ont mis en place des réunions d'échanges sur les dossiers litigieux, qui associent de manière informelle les maires, les ABF et les pétitionnaires. Dans la majorité des situations, le seul engagement d'un dialogue a permis de régler ces situations avant la formation d'un recours.
II. - Le dispositif de la proposition de loi
L'article 3, qui traduit la recommandation n° 1 de la mission d'information, inscrit ces pratiques du terrain dans le cadre tracé par l'article L. 632-2. Il vise à la fois à favoriser le règlement des dossiers litigieux en amont de l'engagement d'une procédure de recours, et à ouvrir aux pétitionnaires une voie de contestation, ou à tout le moins d'échange, sur les décisions prenant la forme d'un accord assorti de prescriptions coûteuses ou techniquement difficiles à mettre en oeuvre.
Il prévoit ainsi la mise en place d'une commission départementale qui se réunirait périodiquement sur l'ensemble des dossiers litigieux du territoire, sur demande du maire de la commune concernée par le projet d'urbanisme et à l'initiative du préfet de région, qui constitue l'autorité compétente en matière patrimoniale.
Cette commission serait composée du pétitionnaire, des maires concernés, de l'ABF, du préfet de région, des élus du département membres de la CRPA et de représentants d'associations de protection du patrimoine. Le maire aurait la possibilité d'ajouter à cette liste toute personne intéressée par le dossier, et notamment le conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE).
À l'issue de sa réunion, la commission émettrait un avis consultatif sur le projet de décision de l'autorité compétente.
Comme l'ensemble des dispositions de l'article L. 632-2 du code du patrimoine, le fonctionnement de cette commission sera précisé par décret en Conseil d'État, notamment en ce qui concerne sa composition et les conditions déclenchant sa réunion.
III. - La position de la commission
• Le rapporteur a relevé l'opposition généralement exprimée, au cours des auditions, à la mise en place de cette commission, en raison principalement de la complexité du paysage procédural déjà existant et du caractère chronophage des travaux qui en découlent, et auquel il serait malvenu d'ajouter une nouvelle instance.
La commission a cependant souscrit à l'observation de son rapporteur selon laquelle l'échelon régional semble trop éloigné des situations du terrain pour apporter une réponse satisfaisante aux difficultés constatées localement dans les échanges entre les ABF, les maires et les pétitionnaires. Elle a estimé que la généralisation d'une instance de dialogue à l'échelle départementale constituait à ce titre une avancée nécessaire.
• À l'initiative de son rapporteur, la commission a procédé à une nouvelle rédaction globale de cet article (amendement COM-4) visant à tenir compte des différentes observations recueillies au cours des auditions.
Elle a tout d'abord précisé le nom de cette commission départementale, qui devient une commission de conciliation. Cette rédaction permet de la distinguer à la fois des instances de recours et des possibilités de médiation ouvertes aux demandeurs.
Elle a ensuite précisé sa composition, en distinguant entre ses membres de droit sous un format resserré (le préfet de département, le demandeur, le maire concerné, l'architecte des Bâtiments de France et des représentants d'élus) et les acteurs qui peuvent y être associés (le CAUE et les associations patrimoniales notamment). Elle a ainsi recentré le fonctionnement de la commission à l'échelon départemental, en excluant l'intervention du préfet de région et de la CRPA, qui agissent dans la procédure de recours à l'échelle régionale.
Elle a également supprimé la mention selon laquelle cette commission rend un avis consultatif, qui soulevait de nombreuses questions alors que cet avis n'avait pas de portée juridique.
Elle a enfin articulé le fonctionnement de cette commission avec les voies de recours ouvertes au maire et au pétitionnaire. Elle a, à ce titre, précisé que la réunion de la commission est sans effet sur les recours prévus par l'article L.632-2 du code du patrimoine pour le demandeur et le maire. Elle a ensuite étendu le délai du recours ouvert à l'autorité compétente en matière d'urbanisme, aujourd'hui fixé à sept jours dans la partie réglementaire du code de l'urbanisme (article R. 423-68), à un mois, conformément à la recommandation n° 4 du rapport de la mission d'information sur les ABF, et prévu en conséquence que la commission de conciliation se réunira avant l'expiration de ce délai. Cette articulation est matérialisée par l'insertion des dispositions relatives à cette commission dans l'article L. 632-2, qui prennent la forme d'un I bis précédant le II relatif aux recours.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 4
Ajout de la réhabilitation des constructions
existantes
au champ de l'intérêt public associé à
l'architecture
Cet article vise à ajouter, à l'article 1er de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture, la réhabilitation des constructions existantes au champ de l'intérêt public associé à l'architecture, au même titre que la qualité des constructions.
À l'initiative de son rapporteur, la commission a adopté un amendement rédactionnel à cet article.
• L'article 4, qui traduit la recommandation n° 23 de la mission d'information, ajoute la réhabilitation des constructions existantes au champ de l'intérêt public associé à l'architecture.
Selon les dispositions de l'article 1er de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture actuellement en vigueur, sont considérés comme d'intérêt public la création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant et le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine. Le respect de cet intérêt est vérifié par les services instructeurs des autorités compétentes dans le cadre de leur examen des demandes d'autorisation d'urbanisme.
• La formulation retenue par la commission, qui a adopté un amendement rédactionnel de son rapporteur ( COM-5), permet de répondre à plusieurs considérations.
La notion de réhabilitation s'entend tout d'abord par opposition à celle de destruction. Alors que les aménagements d'urbanisme passent trop souvent par la démolition du bâti existant, dont l'intérêt patrimonial peut exister sur un territoire indépendamment de son classement au titre des monuments historiques, il s'agit d'affirmer que la réhabilitation des constructions existantes constitue un objectif partagé, au-delà des seuls architectes des Bâtiments de France (ABF), entre tous les professionnels de l'architecture et les services instructeurs.
Cette orientation ainsi que la rédaction retenue sont compatibles avec celles récemment définie par le ministère de la Culture dans sa stratégie nationale pour l'architecture, ce qui permettra de garantir la cohérence d'ensemble des politiques conduites sur le sujet.
La réhabilitation s'oppose ensuite aux dégradations engendrées par des opérations de rénovation mal adaptées au bâti ancien et patrimonial. L'article 4 constitue à ce titre une forme d'aboutissement des travaux menés depuis plusieurs années par la commission sur la rénovation énergétique de ce type de bâti, à l'initiative notamment de sa rapporteure pour les crédits du patrimoine Sabine Drexler. Il s'agit ainsi d'affirmer que la rénovation respectueuse des spécificités du bâti ancien, notamment lorsqu'elle vise à l'adapter aux enjeux climatiques, relève d'une préoccupation partagée entre les professionnels de l'architecture et les services instructeurs.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
*
* *
La commission de la culture, de
l'éducation, de la communication
et du sport a adopté
à l'unanimité la proposition de loi ainsi
modifiée.
EXAMEN EN COMMISSION
12 MARS 2025
_________
M. Laurent Lafon, président. - Nous examinons à présent le rapport de Pierre-Jean Verzelen sur sa proposition de loi relative à l'exercice des missions des architectes des bâtiments de France (ABF), dont nous débattrons en séance le 19 mars prochain.
M. Pierre-Jean Verzelen, auteur de la proposition de loi, rapporteur. - Cette proposition de loi est issue des travaux de la mission d'information sur le périmètre d'intervention et les compétences des ABF, mise en place à la demande du groupe Les Indépendants - République et Territoires, et qui a travaillé au premier semestre de l'année 2024.
Cette mission d'information, qui était présidée par Marie-Pierre Monier et dont j'étais le rapporteur, comptait de nombreux commissaires de la culture parmi ses membres. Ses travaux ont abouti à la formulation de 24 recommandations, adoptées à l'unanimité le 25 septembre dernier. Son rapport a été remis à la ministre de la culture le 22 janvier.
J'ai parallèlement déposé, le 9 décembre, une proposition de loi cosignée par nombre d'entre vous, qui reprend celles de ces propositions qui relèvent du niveau législatif. Le texte sera examiné en séance dans le cadre de la niche transpartisane ; nous inaugurerons ainsi cette nouvelle formule de l'initiative parlementaire avec l'un des sujets les plus clivants sur les bancs de notre assemblée !
Les zones protégées placées sous la compétence des ABF ne couvrent que 8 % du territoire national, mais concernent près d'un tiers des logements. Lorsque nous avons débuté nos travaux, nous avons rapidement constaté que les choses se passent généralement bien dans les grandes villes à fort enjeu patrimonial, où il existe un consensus sur la nécessité d'une protection étendue. Il n'en va pas de même dans certaines petites communes rurales. En tant qu'ancien maire d'une petite ville abritant un bâtiment classé, je peux témoigner des tensions quotidiennement rencontrées avec l'ABF, et de l'incompréhension qu'elles font naître parmi la population.
Permettez-moi de vous rappeler brièvement les principales difficultés identifiées par la mission d'information dans les relations entre les ABF, les administrés et les élus : le manque de prévisibilité des avis rendus et le sentiment d'arbitraire qui en découle ; un niveau de protection uniforme, alors que les territoires ne présentent pas tous la même intensité patrimoniale ; l'insuffisante prise en compte de l'enjeu de rénovation énergétique du bâti ancien dans les avis rendus ; le manque de dialogue dans certains cas, aggravé par l'insuffisance des moyens et de personnels.
Les unités départementales de l'architecture et du patrimoine (Udap), au sein desquelles exercent les ABF, instruisent en effet un nombre croissant de dossiers tandis que leurs effectifs stagnent. Lors de l'examen du projet de loi de finances (PLF), Marie-Pierre Monier avait d'ailleurs déposé un amendement, rejeté en commission mixte paritaire (CMP), en vue du recrutement d'un ABF supplémentaire par département - il est vrai que la situation budgétaire de notre pays ne permet pas d'aller dans ce sens.
Le texte comporte quatre articles, assortis de huit amendements déposés à la suite des auditions tenues au cours des dernières semaines.
L'article 1er encourage la généralisation du périmètre délimité des abords (PDA), qui permet de s'extraire du périmètre de protection arbitraire de 500 mètres et de définir, via une procédure administrative et en lien avec l'ABF, une zone de protection concertée.
En raison de la lourdeur et du coût de ces procédures, ainsi que de l'étendue des compétences à mobiliser, cette formule ne s'est encore que peu développée, notamment dans les petites communes et les zones rurales : il n'existe que 4 000 PDA environ, principalement dans les centres-villes. Pour autant, à chaque fois qu'il est mis en place, ce dispositif est un succès. Il permet à la fois de sensibiliser le conseil municipal aux questions patrimoniales et de recentrer l'intervention de l'ABF sur les zones dans lesquelles elle est pertinente.
L'article 1er vise ainsi à lever les obstacles administratifs à la généralisation des PDA, en supprimant d'une part l'obligation de mener une enquête publique lorsque le PDA n'est pas mis en place en même temps que les documents d'urbanisme, et d'autre part celle de consulter le propriétaire ou l'affectataire du monument historique, qui pose d'innombrables difficultés administratives - surtout quand il s'agit de propriétaires privés.
L'article 1er donne également la possibilité aux maires d'adopter un règlement du PDA pour fixer les attendus des travaux effectués dans la zone protégée.
Je vous proposerai deux amendements sur cet article 1er. Le premier clarifie le critère de suppression de l'enquête publique, en prévoyant qu'elle n'est pas nécessaire dans les cas où le PDA réduit le périmètre de protection automatique. Le second prévoit que le règlement du PDA sera inscrit dans le plan local d'urbanisme (PLU), afin d'éviter l'accumulation des outils réglementaires.
L'article 2 vise à assurer la transparence des décisions rendues par les ABF par leur publication systématique dans un registre national gratuitement accessible en ligne. Alors que d'autres documents relatifs à l'urbanisme et aux ventes immobilières sont déjà mis à la disposition du public, l'absence de transparence sur les décisions des ABF constitue une anomalie. Leur publication permettra d'informer les porteurs de projet et d'améliorer la prévisibilité du contrôle exercé par les Udap.
Cette mesure correspond à un amendement adopté par la commission des affaires économiques en juin 2024 sur le projet de loi relatif au développement de l'offre de logements abordables, dont l'examen a été interrompu par la dissolution de l'Assemblée nationale.
Je vous proposerai sur cet article un amendement prévoyant que les décisions publiées seront accompagnées des documents qui permettent leur compréhension, ce qui renvoie notamment aux projets d'aménagement soumis aux ABF.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet article 2, pour des raisons qui tiennent principalement à la charge de travail supplémentaire qu'il implique ; nous en débattrons en séance.
L'article 3, auquel je tiens particulièrement, crée, à l'échelle départementale, des espaces de dialogue entre les ABF, les élus et les porteurs de projet sur les décisions litigieuses rendues par les ABF.
Je vous le dis sans détour : la totalité des personnes que nous avons auditionnées sont opposées à cette mesure, ce qui me semble résulter d'une incompréhension sur ce que nous entendons mettre en oeuvre. Certains avancent que l'on ne saurait créer une nouvelle commission territoriale sans en supprimer une autre. À chaque renouvellement municipal, nous devons transmettre des listes d'élus pour composer 90 à 100 commissions ; toutes ne sont pas indispensables, loin s'en faut, et il me semble que nous pourrions en supprimer quelques-unes sans difficulté pour permettre le fonctionnement de celle-ci, qui me paraît véritablement utile.
Parmi les oppositions rencontrées figure celle du ministère de la Culture. Il est vrai que le fonctionnement de cette commission représentera une charge de travail. J'entends également qu'il ne soit pas agréable pour les ABF de devoir justifier leurs décisions - leurs représentants, qui soutiennent les deux premiers articles de la proposition de loi, émettent d'ailleurs quelques réserves sur cet article 3. Il me semble néanmoins que si nous voulons enfin répondre au sujet, fantasmé ou non, de la toute-puissance des ABF, nous devons mettre en place cet espace de discussion.
Dans la procédure actuellement prévue par le code du patrimoine, les décisions des ABF peuvent être contestées devant le préfet de région ; elles font alors l'objet d'un examen par les services de la direction régionale des affaires culturelles (Drac), et dans certains cas par la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA). Ce système ne fonctionne pas, car il est mal identifié par les acteurs de l'urbanisme, et parce que l'échelle régionale est trop éloignée des enjeux locaux.
Dans certains départements, les préfets prennent l'initiative de mettre autour de la table les ABF, les maires et les porteurs de projet lorsqu'une difficulté est rencontrée. Dans la grande majorité des cas, le simple fait d'engager un dialogue suffit à régler ces situations et à prévenir l'introduction d'un recours. Je souhaite que cette pratique soit généralisée, en créant par cet article 3 un cadre de fonctionnement minimal pour une commission départementale qui se réunirait sur simple demande du maire.
J'ai déposé plusieurs amendements visant à remanier largement ma rédaction initiale. Je propose notamment que cette commission de conciliation se réunisse sous l'autorité du préfet de département et inclue des représentants d'élus.
L'article 4 ajoute à l'article 1er de la loi 1977 sur l'architecture la notion de « réhabilitation » des constructions existantes, afin qu'elle soit considérée comme relevant de l'intérêt général au même titre que la construction.
Cette notion de réhabilitation a été évoquée tout au long de nos travaux. Si de nombreux professionnels demandent et soutiennent cette mesure, le fait de toucher à la loi de 1977 a cependant suscité quelques crispations et incompréhensions. Je comprends la crainte que l'équilibre fragile établi par la loi de 1977 soit rompu ; il ne s'agit cependant que d'une orientation, et la rédaction que je vous propose a été longuement travaillée avec les ministères de la culture du logement, ainsi qu'avec les représentants des architectes.
J'insiste cependant sur un point : l'équilibre ainsi trouvé ne concerne que l'article 1er de la loi de 1977. Cette proposition de loi ne saurait donc nous conduire à étendre le recours obligatoire à la compétence d'un architecte, prévue à l'article 3 du même texte.
Il me reste à vous présenter le périmètre de la proposition de loi, conformément aux dispositions de l'article 45 de la Constitution. Je vous propose qu'il inclue les dispositions relatives au régime du PDA, à la publicité des décisions rendues par les ABF, au régime de la conciliation et du recours en cas de désaccord avec l'avis de l'ABF et au champ de l'intérêt général associé à l'architecture. En sont notamment exclues les dispositions relatives à l'exercice du métier d'architecte.
M. Pierre Ouzoulias. - Si je comprends bien, les discussions sur l'avis conforme rendu par l'ABF seraient complètement exclues.
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. - Sur le plan politique, je trouverais étonnant que ce sujet ne puisse être débattu.
M. Pierre Ouzoulias. - Dans ce cas, il faudra que les membres de la commission de la culture soient présents dans l'hémicycle lors de l'examen du texte en séance publique !
M. Laurent Lafon, président. - Au travers de cette proposition de loi, la commission s'est efforcée de définir un chemin de crête, afin que nous puissions avancer sur le sujet des ABF sans rouvrir des discussions habituelles.
Il paraît toutefois difficile d'exclure a priori un débat sur l'avis conforme, qui est prévu par l'un des articles modifiés par la proposition de loi. Il sera cependant important que nous fassions valoir notre point de vue en séance, et que chacun se montre raisonnable dans ses prises de parole, le texte étant discuté dans le cadre d'une niche partagée. Surtout, il ne faudrait pas que des discussions nouvelles viennent dénaturer le travail mené depuis plusieurs mois, dont la présente proposition de loi constitue l'aboutissement.
Le périmètre est adopté.
M. Adel Ziane. - Je tiens à saluer le rapporteur pour son travail rigoureux, auquel il a associé l'ensemble des membres de notre commission.
Au fil de nos échanges, nous sommes parvenus à mettre en évidence plusieurs points saillants, à commencer par la dichotomie entre les zones rurales et urbaines. Nous avons également évoqué les moyens mis en oeuvre dans chaque département pour échanger avec les élus et les pétitionnaires afin de faire aboutir les dossiers importants. Nous partageons l'intérêt du rapporteur pour la mise en place d'une commission départementale placée sous l'autorité du préfet et des Udap, prévue par l'article 3.
L'homogénéité des décisions rendues constitue un sujet important, qui doit être mis en lien avec les moyens dévolus à chaque territoire. C'est la raison pour laquelle Marie-Pierre Monier a déposé un amendement au PLF visant à recruter un ABF supplémentaire par département. La période budgétaire n'est pas propice à une telle évolution : cet amendement était surtout un acte symbolique et politique témoignant du travail effectué dans le cadre de notre commission.
Par ailleurs, nous appelons le ministère de la culture à rédiger un guide national des bonnes pratiques.
Nous sommes d'accord avec les propositions formulées sur le PDA.
De manière connexe à l'article 2, je voudrais souligner que la dématérialisation de la procédure d'instruction des demandes d'urbanisme doit faciliter et accélérer le traitement des dossiers. Néanmoins, les avancées en ce domaine ne sont pas les mêmes d'un territoire à un autre, d'où la nécessité d'un accompagnement.
Enfin, nous approuvons la rédaction de l'article 4 telle qu'elle est proposée par le rapporteur. Nous devons cependant nous montrer vigilants sur le risque que des modifications apportées à la loi de 1977 aboutissent à prévoir l'intervention des architectes sur une multitude de chantiers pour lesquels ils n'étaient pas requis jusqu'ici.
Le travail collégial que nous avons mené témoigne de notre préoccupation commune pour la préservation du patrimoine et le renforcement du rôle des ABF. Il s'agit de faciliter leur vie au quotidien et de leur permettre de travailler de manière approfondie et plus fluide avec les collectivités territoriales et les pétitionnaires.
Mme Sabine Drexler. - Les ABF ont un certain nombre de détracteurs parmi les particuliers et les élus, y compris au Sénat, où le sens de leur mission est diversement perçu. Certains maires prétendent qu'ils s'imposent comme des obstacles au développement de la modernisation de leur commune. Il est vrai que leurs décisions peuvent susciter des incompréhensions et des frustrations, d'où l'intérêt de l'amendement voté sur le projet de loi de finances.
La France est reconnue dans le monde entier pour la richesse de ses paysages et de son patrimoine, fruits d'un équilibre qu'il faut perpétuellement trouver entre héritage du passé et évolutions du présent. Tel est, justement, l'objet de la présente proposition de loi.
Nous avons tous été sollicités par nos administrés sur les questions d'urbanisme lorsque nous étions élus locaux ; nous avons tous été contraints, à un moment ou un autre, de refuser la demande d'un propriétaire qui souhaitait modifier l'aspect de sa maison ou transformer le paysage. La proximité des élus avec les citoyens, surtout dans les petites communes, rend les décisions encore plus difficiles. À cet égard, les ABF peuvent jouer un rôle de soutien essentiel pour les élus, en leur apportant une expertise technique et réglementaire. Cela permet d'objectiver les décisions et évite aux élus d'avoir à répondre à des demandes délicates.
Le travail conduit par le rapporteur dans un esprit transpartisan s'est nourri des recommandations formulées par la mission d'information sur les ABF. Il conduira à transformer le regard sur la profession et ouvre la porte à la reconnaissance de la réhabilitation comme une priorité de l'action publique.
Il serait utile d'avoir un débat sur l'intérêt d'associer les architectes aux projets de réhabilitation, dans l'objectif de lutter contre les interventions inadaptées, voire catastrophiques, sur le bâti patrimonial non protégé, qui ne relèvent pas du régime du permis de construire mais de la déclaration préalable de travaux.
Mme Monique de Marco. - Les ABF jouent un rôle fondamental dans la transmission du patrimoine architectural aux générations futures. Or, au cours de nos travaux, nous avons constaté qu'ils n'étaient pas suffisamment nombreux.
En outre, la population a parfois du mal à comprendre leur rôle et leur organisation. Les travaux de la mission d'information nous ont donné l'occasion d'examiner les différentes controverses existant entre les ABF, les élus et les citoyens. Le succès de la consultation des élus locaux menée sur le site internet du Sénat témoigne de l'intérêt qu'ils portent aux ABF et à la préservation du patrimoine sur le territoire de leur collectivité.
Les avis rendus par les ABF sont variables selon les départements. Nous déplorons un manque de pédagogie dans la motivation des décisions prises, qui ne tiennent pas suffisamment compte, par ailleurs, des enjeux de la transition écologique.
Certaines des recommandations de la mission d'information n'ont pu être transcrites dans cette proposition de loi, notamment celles qui ont trait au renforcement de l'attractivité de la profession et à l'amélioration de la formation dispensée aux futurs ABF.
Le texte permettra cependant d'améliorer la protection du patrimoine à plusieurs égards. Les PDA permettront d'alléger le travail des ABF, qui sont bien souvent submergés. La création d'une commission consultative est une bonne chose, pourvu qu'elle se fasse à l'échelle départementale. La Nouvelle-Aquitaine comporte douze départements : imaginez le travail qu'un territoire aussi grand et divers représente à l'échelon régional ! Nous sommes également favorables à la publication des avis rendus par les ABF dans un registre national numérique, alors que les citoyens ont déjà la possibilité de suivre en ligne le cours des ventes immobilières dans leur quartier ou leur territoire.
L'article 4 soulève plusieurs questions. Après de nombreuses consultations, nous nous sommes mis d'accord pour ne modifier que l'article 1er de la loi de 1977. Reste que, pour certains professionnels, le terme « réhabilitation » est trop général. J'ai donc déposé un amendement pour le remplacer par la formulation suivante : « travaux exécutés sur les constructions existantes ». Les architectes restent cependant inquiets que l'on modifie les autres dispositions de la loi de 1977, ce qui, a priori, ne sera pas le cas : nous nous en tenons à la réhabilitation.
J'ai en outre déposé deux amendements visant à améliorer la formation des architectes.
M. Pierre Ouzoulias. - Le consensus auquel nous sommes parvenus au sein de notre commission est essentiel. Lors de la séance publique, il nous permettra de convaincre nos collègues, qui ne sont pas toujours réceptifs aux questions de patrimoine, et de leur dire que nos engagements dépassent le périmètre des groupes. Espérons que, dans ces conditions, nous pourrons aborder de façon plus sereine un éventuel débat sur l'avis conforme de ABF.
Je partage entièrement le point de vue du rapporteur. Les choses se passent bien lorsque les ABF ont la possibilité de travailler avec les élus, leurs services d'architecture et les conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE). Ce n'est pas le cas lorsqu'ils se contentent d'assurer leur mission de police administrative et agissent comme de simples caisses d'enregistrement de permis de construire.
Les élus, notamment ceux des communes de petite taille, n'ont pas la possibilité de faire appel au préfet et aux instances de recours. Il faut absolument simplifier les choses et faire revenir l'État-culture au plus près des élus. La fusion des régions, notamment celles de l'Est de la France, a complètement déstabilisé les Drac, qui se trouvent aujourd'hui très éloignées des élus et du terrain. Les services départementaux de l'architecture étaient à l'origine placés sous la responsabilité du préfet de département ; j'avais eu l'occasion de constater que ce système fonctionnait bien lorsque j'étais conservateur du patrimoine. Or ces services ont été, par la suite, rattachés aux Drac, simplement pour montrer que l'État-culture avait de l'importance dans les régions.
Au demeurant, j'ai du mal à imaginer comment une commission de conciliation placée sous l'autorité du préfet de département peut travailler avec un service placé sous l'autorité du préfet de région. Je me demande s'il ne faudrait pas plutôt retravailler la relation avec les CAUE, comme Anne Ventalon, Sabine Drexler et moi-même l'avons proposé. Il s'agit de discuter d'une décentralisation ou d'une déconcentration des compétences patrimoniales, dans le but de mieux associer les différents échelons, notamment les communes, les départements et l'État.
J'en viens à l'article 4. Deux visions s'affrontent en matière de réhabilitation du bâti ancien : celle du ministère de la culture, qui est patrimoniale, ancienne et fondée sur l'analyse architecturale des bâtiments, et celle du ministère de la transition énergétique, qui repose sur le travail des ingénieurs, lesquels obéissent aux critères fixés par les industriels. Il n'empêche que le ministère de la transition énergétique doit communiquer avec le ministère de la culture, comme nous l'y invitons depuis trois ans.
Dans ma maison de famille, située au sommet du plateau de Millevaches, les murs font un mètre d'épaisseur, ce qui garantit un bon isolement. Elle a néanmoins été classée « G » au titre de diagnostic de performance énergétique (DPE), faute pour l'ingénieur de savoir ce qui se trouvait au milieu des murs. Lors de la séance publique, nous devrons insister pour que le ministère de la culture et celui de la transition énergétique entrent effectivement en relation.
Mme Sonia de La Provôté. - Les auditions que nous avons menées ont été particulièrement utiles et ont permis de définir un dénominateur commun sur tous les sujets du texte.
Les ABF sont un peu comme l'Europe : ils sont bien pratiques, mais, lorsque quelque chose ne fonctionne pas, c'est forcément leur faute ! Beaucoup de maires savent parfaitement que l'avis des ABF les protège et les exonère de leur responsabilité : en cas d'avis négatif, ils évitent d'avoir à refuser la demande qui leur a été adressée. Bref, gardons-nous d'avoir un avis caricatural sur le sujet.
Nous sommes favorables au dialogue et à l'établissement d'un consensus en amont des décisions, car ils permettent d'éviter les écueils d'un avis négatif rendu soit trop vite, soit trop tard.
La constance des avis de l'ABF dans le temps ne va pas sans poser de problèmes, d'autant que les sujets patrimoniaux sont souvent extrêmement précis. Par exemple, la couleur des huisseries décidée par un ABF peut être modifiée par le suivant. C'est typiquement ce genre de contraintes qui met les territoires sous cloche.
En outre, nous devons nous pencher sur les Udap, dont les trop faibles effectifs ne leur permettent pas de faire preuve d'un dialogue suffisant. Dans les territoires, il faudrait pouvoir traiter des questions d'urbanisme en général, de la qualité des paysages, des places publiques et des ensembles. L'ABF peut suivre les questions d'entretien et définir une programmation pluriannuelle très en amont des travaux de mise à niveau ou de la réparation des dommages constatés par un arrêté de péril.
Pour ce qui concerne le PDA, il est important d'alléger le plus possible les procédures. Encore une fois, le travail doit se faire en amont, de façon consensuelle, pour développer l'urbanisme dans les territoires.
La mise en place d'un guichet départemental est indispensable. Il est préférable d'échanger de manière informelle à l'échelon départemental avant de passer par toutes les étapes réglementaires de recours, qui sont souvent longues, laborieuses et contraignantes. Tout ce qui peut faire avancer les dossiers sur le terrain vient nécessairement en aide aux ABF.
J'en viens à l'article 4. Au fond, nous sommes à la croisée des chemins entre l'impératif environnemental et celui de mise aux normes énergétiques. Le diagnostic de performance énergétique (DPE) peut être destructeur pour l'intérêt patrimonial, surtout lorsque la vision réglementaire prime sur la vision politique, pourtant traduite dans les déclarations préalables et les permis de construire. Au bout du compte, c'est l'élu qui décide, et celui-ci doit savoir que l'apposition d'un bardage sur du torchis détruit le bâti. Il n'empêche que la rédaction à laquelle nous sommes parvenus devrait contenter le plus grand nombre.
Mme Catherine Belrhiti. - La préservation du patrimoine historique est un sujet sensible et une source de tensions pour nos élus locaux, qui font face à des procédures de plus en plus complexes et subissent des difficultés pour financer des projets très coûteux pour les petites communes. Le manque de transparence et la rigidité des exigences imposées par les ABF constituent un véritable obstacle à l'initiative locale et à la réhabilitation de certains sites patrimoniaux. Les 35 000 demandes d'autorisation refusées chaque année témoignent d'un échec du dialogue entre les élus locaux et les ABF.
Nous ne pouvons plus ignorer les tensions entre acteurs : impossibilité de prévoir les décisions des ABF, non-prise en compte de la réalité financière des communes, interprétation stricte des textes qui ne laisse aucune place aux projets alternatifs, manque de pédagogie des services instructeurs, etc.
Ainsi, il semble indispensable de repenser notre droit et de mettre en place des procédures plus transparentes à l'échelle nationale, plus claires pour les acteurs concernés et plus adaptées aux réalités locales.
En ce sens, je suis particulièrement favorable à la généralisation du PDA, qui implique d'alléger la procédure existante. Il est en effet indispensable de lever certains obstacles majeurs, tels que l'obligation de consultation du propriétaire ou de l'affectataire domanial du monument historique, mais aussi l'enquête publique, dans certaines circonstances.
Je soutiens également la publication des avis rendus par les ABF : elle renforce la transparence du processus décisionnel. Une telle démarche permet non seulement d'améliorer la lisibilité et la prévisibilité des décisions, mais aussi de renforcer la confiance des citoyens dans nos institutions.
Je défends aussi la création d'une commission départementale de dialogue, afin de faciliter les échanges et d'améliorer la gestion des projets.
Nous l'avons constaté au cours de la mission d'information sur les ABF, de nombreuses frictions sont liées aux enjeux de la transition énergétique. La présente proposition de loi apporte-t-elle des solutions en ce domaine ?
Nombreux sont les élus qui se disent insatisfaits du manque de motivation des avis rendus par les ABF. Comment rendre effective l'obligation de motivation, pourtant primordiale ? Des mécanismes seront-ils prévus pour renforcer la collaboration entre les ABF et les collectivités territoriales, notamment en ce qui concerne l'élaboration de documents d'urbanisme locaux ?
Une modification des délais impartis aux ABF pour rendre un avis sur un projet soumis à leur approbation a-t-elle- été envisagée ? Les élus locaux dénoncent souvent des délais d'instruction bien trop longs.
Du reste, je souhaiterais que l'on puisse harmoniser les pratiques des ABF à l'échelon national. Cela éviterait que des décisions substantiellement différentes soient rendues d'un endroit à un autre.
Enfin, nous avons le souci des bâtiments qui ont été classés il y a plus d'un siècle. Cependant, dans le territoire de ma circonscription, la présence d'une motte castrale impose de respecter des contraintes tout à fait illogiques pour les constructions en hauteur ; je pense à l'interdiction de certaines couleurs et de certains types de volets ou de portes. Serait-il possible de déclasser certains bâtiments qui, aujourd'hui, n'ont plus besoin d'être protégés ?
M. Jean-Gérard Paumier. - Les propositions formulées dans le cadre de la mission d'information sur les ABF visaient à renouveler les conditions du dialogue entre ces professionnels, les élus locaux et nos concitoyens. C'est un vaste sujet !
Tout en reconnaissant le rôle majeur des ABF dans la protection du patrimoine bâti remarquable, notamment historique, de nombreux maires - je pense à ceux que nous avons rencontrés en Indre-et-Loire - dénoncent un dialogue insuffisant et regardent parfois l'ABF comme un censeur.
Les prescriptions formulées par les ABF concernant les choix de matériaux, de clôtures ou de couleurs sont souvent critiquées pour leur subjectivité. En effet, elles peuvent varier d'un territoire à un autre et engendrer des surcoûts pour les collectivités.
Cette proposition de loi contient des évolutions positives : généralisation du PDA, consécration de la réhabilitation et publication des décisions rendues par les ABF. Quant à la mise en place d'une commission départementale de conciliation, elle signe un retour à la proximité. Je suis convaincu que les élus seront assidus au sein de cette commission, car c'est le quotidien de leur commune qui s'y jouera.
Toutefois, ces avancées législatives ne régleront pas l'ensemble des relations entre les ABF et les élus. Il conviendrait, comme cela a été dit lors de notre visite de la Cité de l'architecture et du patrimoine, que la formation des ABF intègre un module sur la vie et la gestion locale, de manière à permettre aux futurs architectes de s'imprégner des contraintes subies par les maires, notamment en milieu rural.
Les guides nationaux d'insertion architecturale et paysagère ne doivent pas être le fruit de la seule réflexion des ABF et des départements, comme ce fut le cas pour la rédaction du guide relatif à l'installation de panneaux solaires dans la région Centre, en décembre 2024. Les guides et référentiels sur les formes architecturales, les matériaux et les couleurs doivent être travaillés en lien avec les collectivités et s'adapter à la diversité des territoires.
Cela suppose un travail conjoint entre les services de l'État, les associations de maires et les CAUE, qui jouent un rôle important auprès des élus et du grand public dans de nombreux territoires.
M. Jacques Grosperrin. - Cette proposition de loi simplifie un certain nombre de procédures, favorise la concertation entre les ABF et les élus locaux et répond à des problématiques identifiées concernant la gestion du patrimoine bâti. Elle devrait apporter plus de clarté aux porteurs de projets, renforcer la transparence au bénéfice de nos concitoyens et satisfaire clairement les attentes des élus locaux, qui dénoncent à juste titre les longueurs administratives pour instruire les dossiers.
À l'heure actuelle, un groupe de travail interne au ministère de la culture travaille sur la généralisation du PDA. Les propositions qu'il a formulées sont-elles en accord avec l'évolution législative que vous appelez de vos voeux ? En ce sens, il est intéressant de favoriser le règlement des dossiers litigieux en amont d'une procédure de recours. Néanmoins, je crains que la création d'une nouvelle commission n'ait pas l'effet escompté.
De nombreux élus se plaignent déjà du manque de transparence de la commission. Comment garantir que son avis sera réellement pris en compte par l'autorité compétente ?
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. - Le débat sur l'avis conforme ne me fait pas peur, même si nous n'aurons pas beaucoup de temps pour l'aborder. Je suis d'autant plus à l'aise sur ce sujet que cette proposition de loi apporte des avancées concrètes dont les élus pourront se saisir ; les opposants à l'avis conforme pourront donc être rassurés. Nous proposons aux communes de revoir le périmètre d'action de l'ABF. Nous créons également une commission au sein de laquelle l'ABF, devant les élus locaux et le préfet, viendra justifier son avis. Ce n'est pas rien !
Le ministère de la culture estime que la numérisation des avis rendus par les ABF prendra du temps. Il me semble cependant que le déploiement du logiciel Patronum dans les Udap a déjà permis d'avancer sur ce sujet.
Avec l'article 4, nous touchons du doigt le sujet de la préservation du bâti patrimonial non protégé. Il est en effet possible, sous le régime de la déclaration préalable, d'isoler la façade d'un bâtiment en la recouvrant de polystyrène sans que personne ne puisse y redire. Ce sujet ne relève cependant pas de la proposition de loi.
Je suis mille fois d'accord avec M. Ouzoulias : il est nécessaire que le ministère de la transition énergétique et celui de la culture se parlent. J'ajouterai même à l'équation le ministère du logement.
Le sujet du déclassement est important, mais, encore une fois, ce n'est pas avec cette proposition de loi que nous allons le régler. Une procédure existe, mais elle est particulièrement lourde et n'aboutit que très rarement.
Enfin, vous êtes plusieurs à demander une évolution de la formation des ABF. Il se trouve que les formateurs de la Cité de l'architecture et du patrimoine, que j'ai rencontrés aux côtés des ABF en formation, entendent intégrer au cursus de l'école un module sur la vie et la gestion locale.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. - L'amendement COM-1 vise à supprimer l'enquête publique dans le cas où le PDA réduit le périmètre automatique des 500 mètres.
L'amendement COM-1 est adopté.
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. - L'amendement COM-2 inscrit le règlement du PDA dans le plan local d'urbanisme (PLU), étant entendu qu'il devra être rédigé en lien avec l'ABF. Il n'y aurait rien de pire que d'élaborer un tel règlement dans un coin et que l'ABF conteste in fine la demande de travaux qui respecte ses dispositions !
L'amendement COM-2 est adopté.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 2
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. - L'amendement COM-3 prévoit que la publication des décisions rendues par les ABF s'accompagne de celle des éléments de nature à favoriser leur compréhension.
L'amendement COM-3 est adopté.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 3
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. - L'amendement COM-4 propose une nouvelle rédaction globale de l'article 3. La commission départementale est renommée « commission de conciliation » et est placée sous l'autorité du préfet de département. Ses membres de droit, à savoir le préfet de département, le demandeur, le maire de la collectivité concernée, l'ABF et des représentants d'élus, sont identifiés de manière resserrée. Les CAUE et les associations patrimoniales peuvent également y être associés.
L'amendement crée par ailleurs une articulation entre la réunion de la commission de conciliation et le recours qui peut être formé auprès du préfet de région contre la décision d'un ABF. Je propose d'allonger le délai de recours ouvert à l'autorité compétente en matière d'urbanisme de sept à trente jours, afin que la commission ait le temps de se réunir.
Mme Sonia de La Provôté. - Il est impératif de prévoir la présence d'un représentant du conseil départemental, dès lors que cet échelon de collectivité soutient fortement le patrimoine sur le plan financier.
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Ce n'est pas le conseiller départemental que je suis qui y sera opposé ! La liste des membres de la commission de conciliation n'est pas limitative.
Mme Catherine Belrhiti. - Ajoutons également un représentant de la région, qui finance les travaux de réhabilitation, en lien avec les ABF.
M. Jean-Gérard Paumier. - Trop élargir la commission est le meilleur moyen de la tuer. Elle doit rester un sous-ensemble de la commission départementale de la nature, des paysages et de sites (CDNPS) et être composée de membres qui se connaissent et savent précisément examiner les questions relatives au patrimoine. Si l'on met en place un comité Théodule, cela ne fonctionnera pas !
L'amendement COM-4 est adopté.
L'article 3 est ainsi rédigé.
Article 4
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. - L'amendement COM-5 vise à ajouter le terme « réhabilitation » à la loi de 1977 sur l'architecture. Cette rédaction finale semble convenir à tout le monde, y compris au Conseil national de l'ordre des architectes (CNOA).
Mme Monique de Marco. - Nous avons rencontré les représentants du CNOA, qui nous ont dit qu'inscrire le mot « réhabilitation » n'aurait pas grand sens et qu'ils préféraient la notion de « travaux exécutés sur les constructions existantes ». Je ne vois pas d'inconvénient à en revenir à la réhabilitation, s'ils acceptent de le faire. Ce qui compte, c'est que l'idée soit inscrite d'une façon ou d'une autre.
La suite de l'article 1er de la loi pose problème lorsqu'elle mentionne l' « autorisation de lotir ». Cette notion n'existe plus en droit depuis la réforme de 2007. Mon amendement COM-6 vise en conséquence à la remplacer par celle d' « autorisation de construire ». Mais il semble que ce ne soit pas non plus la bonne formule et, d'après les personnes que j'ai consultées, il faudrait plutôt utiliser l'expression, plus englobante, d'« autorisation d'urbanisme ». Mieux vaudrait toutefois le vérifier.
M. Laurent Lafon, président. - Je précise que si l'amendement COM-5 est adopté, l'amendement COM-6 de notre collègue Monique de Marco n'aura plus d'objet.
L'amendement COM-5 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-6 devient sans objet.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Après l'article 4
Mme Monique de Marco. - Mes amendements COM-7 et COM-8 traitent du sujet de la formation, dont nous devrons débattre. En effet, les écoles d'architecture ne consacrent pas plus de 3 % de leur enseignement à la réhabilitation. Le problème d'attractivité du métier d'ABF devrait inciter à revoir cette formation en faisant preuve de moins de rigidité et en sortant du carcan. Pourquoi ne pas l'ouvrir à la réhabilitation ou à la lutte contre le changement climatique plutôt que de la cantonner au seul patrimoine ?
M. Laurent Lafon, président. - Même si vos amendements sont irrecevables au titre de l'article 45 de la Constitution, ils ont le mérite d'aborder des sujets intéressants.
Les amendements COM-7 et COM-8 sont déclarés irrecevables en application de l'article 45 de la Constitution.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 1er |
|||
M. VERZELEN, rapporteur |
1 |
Suppression de l'enquête publique préalable à la mise en place d'un périmètre délimité des abords (PDA) lorsque le périmètre de protection est inférieur à 500 mètres |
Adopté |
M. VERZELEN, rapporteur |
2 |
Inscription du règlement du PDA dans le PLU |
Adopté |
Article 2 |
|||
M. VERZELEN, rapporteur |
3 |
Publication des éléments de nature à favoriser la compréhension des décisions des architectes des Bâtiments de France (ABF) |
Adopté |
Article 3 |
|||
M. VERZELEN, rapporteur |
4 |
Précisions sur le nom, la composition et le
fonctionnement de la commission départementale d'examen des dossiers
litigieux |
Adopté |
Article 4 |
|||
M. VERZELEN, rapporteur |
5 |
Amendement rédactionnel |
Adopté |
Mme de MARCO |
6 |
Ajout des travaux sur constructions existantes au champ de l'intérêt général associé à l'architecture Respect de cet intérêt général par les autorisations de construire |
Satisfait ou sans objet |
Articles additionnels après Article 4 |
|||
Mme de MARCO |
7 |
Consultation de l'ordre des architectes sur le contenu des enseignements dispensés aux architectes en matière de réhabilitation |
Irrecevable art. 45, al. 1 C (cavalier) |
Mme de MARCO |
8 |
Extension de la compétence du conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique aux travaux de réhabilitation du bâti existant |
Irrecevable art. 45, al. 1 C (cavalier) |
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES ET DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES
Jeudi 20 février 2025
- G7 Patrimoine : Mme Alexandra PROUST, juriste de la Demeure Historique, MM. Julien LACAZE, président de Sites et Monuments, Gilles ALGLAVE, président de Maisons paysannes de France, Frédéric DIDIER, vice-président, et Philippe GONZALÈS, correspondant de La Sauvegarde de l'Art Français pour le Lot-et-Garonne, ancien ABF.
- Union des directeurs de la Direction régionale des Affaires culturelles (DRAC) : MM. Laurent ROTURIER, président, Hilaire MULTON, DRAC Hauts-de-France, et Jean-Michel KNOP, DRAC Normandie.
Mercredi 26 février 2025
- Direction générale des Patrimoines et de l'Architecture (DGPA) : Mmes Hélène FERNANDEZ, directrice adjointe au directeur général des patrimoines et de l'architecture, chargée de l'architecture, Isabelle CHAVE, sous-directrice des monuments historiques et des sites patrimoniaux, Magali PINON-LECONTE, sous-directrice de l'architecture, de la qualité de la construction et du cadre de vie, et M. Emmanuel ÉTIENNE, chef de service du patrimoine.
- Élus Association des maires ruraux de France (AMRF) : MM. François DESCOEUR, membre du conseil d'administration et maire d'Anglards-de-Salers (15), Maxime MACHURAT, conseiller technique planification urbanisme et logement, Sébastien GOUTTEBEL, président de l'association des maires ruraux du Puy-de-Dôme et maire de Murol (63), et Vincent JOINEAU, membre de la commission culture de l'AMRF et maire de Rions (33).
- Conseil national de l'Ordre des Architectes (CNOA) : MM. Christophe MILLET, trésorier national, Mathieu DE VLIEGER, responsable des affaires publiques, et Léo VARGAFTIG, chargé de mission.
- Syndicat de l'architecture : M. Hugo FRANCK, président.
- L'Union des Architectes (UNSFA) : Mmes Laure-Anne GEOFFROY DUPREZ, présidente, Géraldine CAMARA, déléguée générale, et M. Franck DURAND, secrétaire national.
- Fédération nationale des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (FNCAUE) : Mme Pascale FRANCISCO, directrice du CAUE de Charente-Maritime et ancienne architecte des Bâtiments de France.
- Association nationale des architectes des Bâtiments de France (ANABF) : MM. Fabien SÉNÉCHAL, président, Benjamin ABA-PEREA, secrétaire, et Mme Emmanuelle DIDIER, architecte des Bâtiments de France, cheffe de service de l'unité départementale de l'architecture et du patrimoine du Rhône et de la Métropole de Lyon, architecte urbaniste de l'État en chef.
CONTRIBUTION ÉCRITE
Ø Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN)
Proposition de loi
n° 195 (2024-2025) relative à l'exercice
des missions
des architectes des Bâtiments de France
RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)
Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 7(*).
De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie8(*).
Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte9(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial10(*).
En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.
En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 12 mars 2025, le périmètre indicatif de la proposition de loi relative à l'exercice des missions des architectes des bâtiments de France.
Elle a considéré que ce périmètre incluait les dispositions relatives :
- au régime du périmètre délimité des abords (PDA) ;
- à la publicité des décisions rendues par les ABF ;
- au régime de la conciliation et du recours en cas de désaccord avec l'avis de l'ABF ;
- au champ de l'intérêt général associé à l'architecture.
En revanche, n'entreraient pas dans ce périmètre les dispositions relatives à l'exercice de la profession d'architecte.
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl24-195.html
* 1 La page Internet retraçant les travaux de la mission d'information est accessible à cette adresse.
* 2 Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
* 3 Loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine.
* 4 Ce pouvoir d'initiative, qui avait d'abord été réservé à l'ABF, a été étendu à l'autorité compétente en matière d'urbanisme par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN).
* 5 Voir à ce titre le Guide de l'insertion architecturale et paysagère des panneaux solaires, accessible à cette adresse.
* 6 L'examen de ce projet de loi a cependant été interrompu par la dissolution de l'Assemblée nationale décidée par le Président de la République le 9 juin 2024.
* 7 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.
* 8 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.
* 9 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.
* 10 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.