B. DES DOTATIONS D'INVESTISSEMENT DONT LE NIVEAU ÉVOLUE PEU EN 2024 MAIS QUI PRÉSENTENT TOUJOURS UN NIVEAU PRÉOCCUPANT DE RESTES À PAYER
Le programme 119 comprend des dotations d'investissement de droit commun : il s'agit principalement de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation politique de la ville (DPV), la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et d'une part de la dotation de soutien à l'investissement des départements (part « projet » de la DSID). À ces dotations attribuées à enveloppe fermée, et au sein desquelles l'État flèche certains projets plutôt que d'autres, s'ajoutent des dotations ponctuelles, visant à répondre à une politique publique sur un territoire donné. C'est dans ce dernier cadre que s'inscrivent des opérations comme le plan Marseille en grand.
1. Une relative stabilité en 2024 tout juste perturbée par la résorption de dispositifs de crise
L'année 2024 a vu le maintien du niveau des autorisations d'engagement consommées, les dépenses consacrées aux dotations de soutien à l'investissement s'élevant toujours à 1,7 milliard d'euros. Le principal mouvement observé est une légère baisse de la DSIL (- 37 millions d'euros). Pour mémoire, ces investissements s'élevaient à 2,1 milliards d'euros en 2022, principalement en raison d'un abondement exceptionnel de la DSIL classique provenant de crédits européens (FEDER11(*)) dont l'Union européenne n'avait pas demandé la restitution et qui a permis de soutenir en particulier les collectivités bénéficiaires du programme « Action coeur de ville ».
Quant aux crédits de paiement, ceux-ci retrouvent leur niveau de 2022 soit 1,8 milliard d'euros, après une légère hausse en 2023, due principalement au décalage dans le temps de la consommation des CP permis par l'abondement exceptionnel de la DSIL de 2022 : ceci explique le recul observé en 2024 (de 555 millions d'euros à 512 millions d'euros).
Par ailleurs, la baisse des CP consommés en 2024 provient pour l'essentiel de la résorption des crédits de la DSIL exceptionnelle (105 millions d'euros en 2024 contre 166 millions d'euros en 2023). Pour mémoire, son objectif était d'accompagner la relance des investissements des collectivités du bloc communal pour financer la transition énergétique, la résilience sanitaire et la préservation du patrimoine public historique.
Évolution, pour les dotations
d'investissement,
des AE (à gauche) et des CP (à droite)
consommés entre 2020 et 2024
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après la Cour des comptes
2. D'importants restes à payer qui interrogent sur la soutenabilité de la trajectoire de dépenses du programme 119
Comme le relève la Cour des comptes dans une précédente note d'exécution budgétaire, « les dotations d'investissement relèvent de dépenses discrétionnaires en ce qui concerne les autorisations d'engagement, mais il s'agit de dépenses de guichet pour la consommation des crédits de paiement correspondants : une fois les dotations accordées, les CP sont dus à mesure de la réalisation des projets d'investissement soutenus, le gestionnaire devant effectuer ces paiements dès lors que le service a été fait. » Dans ses conditions, il est normal que des restes à payer existent : ils résultent « de la nature même de ces dotations, caractérisées par un décalage de consommation entre les AE et les CP. »
Toutefois, sur la période 2016-2024, les consommations cumulées d'AE et de CP se sont respectivement élevées à 16,8 milliards d'euros et à 12,9 milliards d'euros conduisant à un reste à payer de 4 milliards d'euros à fin 2024. Ce niveau apparaît d'autant plus important qu'il représente plus de deux fois les sommes des crédits alloués aux dotations d'investissement, et est équivalent aux crédits budgétés en 2024 sur l'ensemble du programme 119.
Évolution cumulée des écarts
entre AE et CP des dotations à l'investissement
sur la période
2016-2024
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après la Cour des comptes
Si le niveau de reste à payer se stabilise depuis maintenant deux ans, avec de nouveau une légère diminution en 2024, la consommation des CP ayant dépassé celle des AE, les restes à payer sur les dotations d'investissement se maintiennent néanmoins à un niveau élevé et constituent toujours, aux yeux des rapporteurs spéciaux, un point de vigilance pour la soutenabilité budgétaire de la mission.
* 11 Le fonds européen de développement régional (FEDER) a pour vocation de renforcer la cohésion économique et sociale dans l'Union européenne en corrigeant les déséquilibres entre ses régions. En France, pour la période 2014-2020, le FEDER représente 8,4 milliards d'euros consacrés à l'objectif « investissement pour la croissance et l'emploi », en vue de consolider le marché du travail et les économies régionales. Il faut ajouter à cela 1,1 milliard d'euros sont consacrés à l'objectif « coopération territoriale européenne », qui vise à soutenir la cohésion dans l'Union européenne grâce à la coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale.