ARTICLE 26 - Relèvement des taux de la taxe de sûreté et de sécurité due par les entreprises de transport public aérien
Commentaire : L'article 26 du projet de loi de finances comporte un relèvement des taux de la taxe de sûreté et de sécurité due par les entreprises de transport aérien.
En 1987, une taxe de sûreté avait été créée au taux de 5 francs pour les vols internationaux et de 3 francs pour les vols domestiques. Le tarif de cette taxe a été doublé en 1990 et, en 1992, la taxe de sûreté est devenue "taxe de sécurité et sûreté". Elle cessait ainsi de financer ce pour quoi elle avait été initialement créée, la réalisation d'équipements affectés à la sûreté dans les aéroports, pour servir de financement à une gamme de dépenses élargies à des actions visant à améliorer la sécurité du trafic.
En son temps, la commission des finances du Sénat avait manifesté sa réprobation à l'égard de ce qu'il faut bien nommer un regrettable mélange des genres.
En effet, autant le recours à une taxe pour financer des dépenses de sûreté correspond à la nature de ces dépenses, autant l'extension de ce financement à un ensemble nébuleux de dépenses de sécurité pouvait sembler n'être qu'un moyen de dégager une ressource de poche, en marge des redevances, destinée à équilibrer le budget annexe.
La taxe comporte deux taux :
- le premier de 10 francs pour les passagers embarquant à destination du territoire français,
- le second de 17 francs pour les autres destinations.
Il est proposé de majorer de 1 franc chacun des deux taux.
Le produit de la mesure est estimé à 50 millions de francs.
Il est précisé, en outre, que le supplément de prélèvement qui en résultera sera compensé par la réduction du prélèvement résultant du dispositif de l'article 27 du projet de loi de finances au titre du fonds de péréquation du transport aérien.
Il est bon de rappeler à ce stade que le produit desdites taxes est passé de 62 à 625 millions de francs entre 1987 et 1995 et qu'en 1995, la taxe représentait 9 % des moyens du BAAC.
Enfin, le relèvement proposé devrait faire passer le produit de la taxe à 728,6 millions de francs en 1996.
La montée en charge des dépenses d'intérêt général dans le budget annexe de l'aviation civile et l'affectation concomitante de recettes fiscales à ce budget annexe suscitent d'abord des doutes juridiques.
L'article 20 de l'ordonnance 59-2 du 2 janvier 1959 dispose : "Les opérations financières des services de l'État que la loi n'a pas dotés de la personnalité morale et dont l'activité tend essentiellement à produire des biens ou à rendre des services donnant lieu au paiement de prix, peuvent faire l'objet de budgets annexes".
Or, il apparaît qu'une partie importante des dépenses du budget annexe de l'aviation civile ne correspond pas à la production de biens ou de services donnant lieu au paiement d'un prix.
Il en va ainsi des dépenses de sûreté qui sont exposées dans l'intérêt général.
La multiplication des dépenses de cette nature s'accompagne donc d'un recours accru à un financement du budget annexe par des affectations de taxes hors, donc, les recettes provenant des redevances.
Cette affectation paraît ne pas respecter la lettre ni l'esprit des articles 16, 18 et 19 de l'ordonnance sus-visée.
Délicate sur le plan juridique, la proposition contenue dans l'article 26 pose également des problèmes du point de vue de l'opportunité.
Le produit de la taxe de sûreté et de sécurité est affecté à la couverture de l'ensemble des dépenses du budget annexe conformément, cette fois, au principe de non-affectation.
Dès lors, elle est susceptible de financer n'importe laquelle des dépenses de ce budget : les dépenses de sûreté, bien sûr, mais aussi les dépenses de rémunération des personnels, par exemple.
Le montant des dépenses de sûreté identifiables s'élève, en 1996, pour les investissements à 190 millions de francs et pour le fonctionnement à 45,6 millions de francs. Le produit de la taxe excède donc de 493 millions de francs le montant des dépenses de sûreté ce qui laisse une marge considérable permettant de financer la mise à niveau nécessaire de la sûreté du transport aérien.
En réalité, la progression des dépenses du budget annexe, en particulier celle des dépenses de personnel, rend indisponible cette marge et la mesure de relèvement proposée provient donc tout autant de la croissance des dépenses de sûreté que de la confiscation du produit de la taxe qui résulte de l'excessive progression des dépenses de fonctionnement du budget annexe de l'aviation civile.
La création d'un fonds de sûreté regroupant les dépenses et les financements de sûreté pourrait constituer un moyen de clarifier la situation.
Les dépenses de sécurité aérienne, dès lors qu'elles participeraient effectivement à un service directement rendu aux usagers devraient être financées par des redevances et non par la taxe de sûreté et de sécurité.
Décision de la commission : Votre commission vous propose d'adopter cet article, tout en attirant l'attention du gouvernement sur :
- l'indispensable clarification du budget annexe de l'aviation civile en ce qui concerne tant ses dépenses que ses recettes,
- et l'importance d'une maîtrise des dépenses, en particulier de fonctionnement des services de la DGAC, afin que l'amélioration de la sûreté du transport aérien ne soit pas le prétexte d'un alourdissement de la pression fiscale subie par les compagnies aérienne.