ARTICLE 12
Modification des règles de compensation maladie
bilatérale entre le régime des clercs et employés de
notaire et le régime général
Commentaire : cet article tend à modifier les
règles de compensation bilatérale entre la caisse de retraite et
de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN) et la
CNAMTS, de manière à accroître de 210 millions de
francs les transferts de la première vers la seconde.
I. LA CAISSE DE RETRAITE ET DE PRÉVOYANCE DES CLERCS ET EMPLOYES DE
NOTAIRES
La caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de
notaires est un régime spécial de sécurité sociale
créé par une loi du 12 juillet 1937. Elle couvre les risques
maladie-maternité et vieillesse-invalidité-décès,
avec une séparation uniquement comptable entre les deux risques. Elle
gère également des oeuvres sanitaires et sociales.
Le régime présente la particularité de percevoir
auprès de ses 54.209 cotisants des cotisations assises sur les
salaires et les retraites dont le taux est global pour l'ensemble des risques,
la répartition par risque étant fixée par
arrêté du ministre chargé de la sécurité
sociale. L'équivalent de la cotisation patronale, qui assure
actuellement le quart des ressources du régime est une cotisation de
4 % assise sur l'ensemble des émoluments et honoraires des
études notariales.
Le taux des cotisations de la CRPCEN est plus élevé que celui
du régime général, puisqu'il s'élèveau 1er
janvier 1997 à 38,4 % sur les revenus d'activité
+ 4 % sur les honoraires, alors qu'il n'est que de 34,6 % dans
le régime général, part salariale et patronale
confondues.
Ce taux de cotisation élevé permet à la CRPCEN de servir
à des ressortissants des prestations plus avantageuses que celles du
régime général. En matière de risque maladie, il
n'y a pas de délai de carence et la prise en charge des frais
médicaux s'effectue avec un ticket modérateur d'un montant
moindre de 10 à 15 % ; en matière de risque vieillesse, les
règles sont similaires à celles de la fonction publique et la
pension peut atteindre 75 % du salaire annuel moyen. Il s'agit donc d'un
régime unique qui inclut à la fois une mutuelle maladie et un
régime complémentaire de retraite.
Outre le financement de ces prestations avantageuses, le taux
élevé des cotisations de la CRPCEN permet surtout à
celle-ci d'être équilibrée
. Selon le rapport de la
commission des comptes de la sécurité sociale, ce régime
spécial devrait, en 1997, couvrir 3,653 milliards de francs
d'emplois par 3,704 millliards de francs de ressources, soit un solde des
opérations courantes positif de 51 millions de francs.
II. LA MESURE PROPOSÉE
L'article L.134-1 du code de la sécurité sociale institue une
compensation généralisée entre le régime
général de la sécurité sociale et les
régimes spéciaux obligatoires. La compensation
"porte sur les
charges de l'assurance maladie et maternité au titre des prestations en
nature et de l'assurance vieillesse au titre des droits propres".
Par ailleurs, des dispositions législatives particulières,
rassemblées dans les articles L.134-3 et suivants du code de la
sécurité sociale, instituent des compensations bilatérales
au titre des risques maladie-maternité et invalidité entre le
régime général et les régimes de la SNCF, des
mineurs, des marins et de la RATP. Cette énumération est
exclusive.
La compensation bilatérale maladie entre le régime
général relève donc uniquement de la partie
réglementaire du code de la sécurité sociale, et figure
aux articles D.134-12 et suivants. Actuellement, le montant de la compensation
est calculée selon des règles qui tiennent compte à la
fois des différences des niveaux de prestations et des
différences des niveaux de cotisations.
Le présent article propose de donner une base légale à
la compensation bilatérale maladie et la CNAMTS et la CRPCEN, en
retenant les mêmes règles que pour la compensation
bilatérale entre le régime général et les autres
régimes spéciaux visés à l'article L.134-3.
Selon ces règles, la base de recettes retenue pour le calcul de la
compensation est constituée en appliquant des cotisations identiques
à celles du régime général à une assiette
comprenant l'ensemble des éléments composant le salaire et les
produits divers affectés au risque. Ainsi, la base de prestations
fictives ne serait plus la prestation moyenne du régime spécial
de la CRPCEN, mais la prestation légale d'assurance maladie
maternité remboursée au taux moyen du régime
général, à partir d'une cotisation de
référence alignée sur les taux de ce régime.
Le présent article vise aussi le régime spécial de la
Banque de France mais cela ne change en rien sa situation, puisque la partie
réglementaire du code de la sécurité sociale fixe
déjà des modalités de compensation analogues à
celles exposées ci-dessus. La mention de la Banque de France a pour seul
effet de donner une base légale au dispositif réglementaire
existant.
L'application de ces règles nouvelles à la CRPCEN aurait pour
effet d'accroître de 210 millions de francs le montant de son
transfert maladie vers le régime général, en le portant de
111 à 321 millions de francs.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Votre commission s'étonne tout d'abord qu'il lui soit demandé,
sans autre explication, de valider le principe du transfert bilatéral
maladie entre le régime général et le régime de la
Banque de France et la CRPCEN, qui n'avait jusqu'à présent
aucune base légale
.
Sur le fond, la justification avancée par le Gouvernement pour cette
mesure, présentée comme un simple retour au droit commun des
transferts de compensation entre le régime général et les
régimes spéciaux, n'apparaît pas sérieuse.
En effet, la CRPCEN, régime entièrement privé, ne peut
aucunement être assimilée aux régimes spéciaux
publics qui, outre des transferts de compensations consistants, sont
directement équilibrés par de subventions budgétaires.
Par ailleurs, la neutralisation des différences entre le
régime général et les régimes spéciaux a
précisément pour but de
limiter le montant des transferts
à la charge du régime débiteur
, le régime
général : dans le cas présent, cette neutralisation
aurait pour
effet inverse
d'accroître le montant des transferts
à la charge du régime débiteur, la CRPCEN.
Enfin, la CRPCEN, qui a choisi d'offrir à ses assujettis un niveau de
couverture maladie légèrement plus favorable que celui du
régime général, assure son équilibre financier
sans faire appel à aucun financement public,
mais uniquement
grâce à un
taux d'effort contributif élevé.
Il n'est pas légitime d'en tirer argument pour accroître le
montant de son transfert de compensation maladie vers le régime
général.
Cela paraît d'autant moins légitime que
le Gouvernement refuse par ailleurs de remettre à plat les avantages de
régimes spéciaux publics massivement subventionnés.
Sur le plan financier, l'application des nouvelles règles de
compensation bilatérale maladie entraînera pour la branche maladie
du régime de la CRPCEN une charge supplémentaire à
laquelle elle ne peut faire face en prenant sur ses seules réserves. Il
serait donc nécessaire de modifier la clé de répartition
des ressources en diminuant la part du risque vieillesse et d'assurer le
financement des prestations de retraite de la CPRCEN par
un
prélèvement sur les réserves de la branche vieillesse
,
qui s'élèvent à 3,2 milliards de francs.
Ainsi, à la seule fin de réduire marginalement le
déficit chronique du régime général, le
Gouvernement se propose d'accroître les transferts de compensation
maladie aux dépens du seul régime spécial qui
s'équilibre par un effort contributif important, et de le contraindre
ainsi à prélever sur les réserves qu'il a
constituées en vue de ses charges de retraite futures.
Cette proposition, dictée par des considérations de pure
opportunité, apparaît d'autant moins responsable que les
perspectives démographiques de la CRPCEN à moyen terme ne sont
pas du tout favorables.
Décision de la commission : votre commission vous propose de
supprimer cet article.