III. L'EFFICACITÉ DU BUDGET

A. LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

1. La dépense d'éducation supérieure en 1996

En 1996, la dépense d'éducation supérieure -mesure de l'effort consenti par la collectivité nationale pour le fonctionnement et le développement du système d'enseignement supérieur en France métropolitaine- est de 100,2 milliards de francs. Cet effort peut être précisé à partir des trois éléments suivants : la dépense d'éducation supérieure est de 1.700 francs par habitant, de 47.200 francs par étudiant et représente 1,3 % du produit intérieur brut en 1996.

De 1989 à 1996, la dépense d'éducation supérieure connaît une forte croissance : elle augmente plus vite que le PIB. De 1 % du PIB en 1989, la dépense d'éducation passe à 1,1 % en 1991, à 1,2 % en 1992, puis à 1,3 % en 1995- niveau auquel elle se maintient en 1996.



La dépense intérieure d'éducation supérieure augmente également plus vite que la dépense intérieure d'éducation. A prix constants, elle croît de 44,1 % entre 1989 et 1996 alors que la dépense intérieure d'éducation croît, sur cette même période, de 25,8 %. La dépense intérieure d'éducation supérieure représente ainsi chaque année une part croissante de la dépense intérieure d'éducation : de 15,1 % en 1989 à 17,3 % en 1996.

Cependant, de 1989 à 1994, ce rythme soutenu de la croissance de la dépense d'éducation supérieure s'est accompagné d'un fort accroissement des effectifs étudiants. Sur cette période, les effectifs d'étudiants ayant crû, en moyenne, annuellement, de 6,2 %, la dépense moyenne par étudiant (aux prix de 1996) est passée de 44.700 francs à 45.400 francs, enregistrant sur cinq ans une hausse limitée à 1,6 %. De 1994 à 1996, on observe un ralentissement de la croissance des effectifs étudiants, avec une moyenne annuelle de 1,1 %. En deux ans, la dépense moyenne par étudiant passe de 45.400 francs à 47.200 francs, enregistrant une hausse de 4 %.

Sur les 100,2 milliards de francs dépensés en 1996, 83,9 milliards de francs (soit 84 %) l'ont été pour des activités d'enseignement. Les 16 % restants sont utilisés à hauteur de 8,3 milliards pour les activités annexes (administration générale, restauration et hébergement, médecine scolaire et universitaire) et de 8 milliards de francs pour l'achat de livres ou matériels nécessités par la fréquentation des établissements d'enseignement supérieur et la rémunération des personnels en formation.

Les dépenses d'enseignement se répartissent ainsi :

19 % pour les activités d'enseignement post-baccalauréat effectuées dans les établissements du second degré, soit les sections de techniciens supérieurs (STS) et les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) ;

74 % pour les activités d'enseignement effectuées dans les autres établissements d'enseignement supérieur (universités, écoles, centres de formation interne des administrations, etc.) ;

les 7 % restants sont consacrés aux autres formes d'enseignement (enseignement à distance, formation professionnelle continue et autre extra-scolaire).

2. La structure de financement

Le financement initial - avant prise en compte des transferts - est assuré essentiellement par l'Etat (77,8 %). Les ménages viennent en deuxième position pour le financement de la dépense intérieure d'éducation supérieure et participent à hauteur de 9,5 % de cette dépense en 1995.

Le ministère de l'Éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, principal financeur de l'ensemble du système éducatif avec 52 % du financement initial total (incluant les charges sociales rattachées, payées sur le budget des charges communes et correspondant aux charges sociales employeur de l'Etat), voit son rôle de principal financeur encore accru pour le système d'éducation supérieure puisqu'il assure 68,6 % du financement initial total (incluant les charges sociales rattachées).

En revanche, alors que les collectivités territoriales participent à hauteur de 20,3 % au financement de la dépense intérieure pour l'ensemble du système éducatif, cette part n'est que de 5,7 % pour le système d'éducation supérieure. Parmi les collectivités territoriales, les régions sont les plus importants financeurs (4,0 %) du système d'éducation supérieure.

3. La dépense moyenne par étudiant

La dépense moyenne par étudiant est passée de 40.500 francs en 1975 à 45.200 francs en 1995, en francs constants (+ 11,5 %) alors que, sur la même période, la dépense moyenne par élève a progressé de 61 %.

En 1996, la dépense moyenne par étudiant s'établit à 47.200 francs.

L'indicateur de dépense moyenne par étudiant ainsi que son évolution recouvrent une grande variété de situations compte tenu de la forte diversité caractérisant les différentes formations de l'enseignement supérieur. Ainsi, en 1996, un élève-ingénieur d'université entraîne une dépense moyenne de 89.200 F, un élève d'IUT de 53.500 F par an, un étudiant dans une autre formation d'université (hors IUT) de 35.500 F. Ces différences sont liées à des différences d'encadrement (personnel enseignant et non enseignant relativement plus nombreux en IUT qu'en université).

La dépense moyenne par étudiant dans le supérieur (en francs)

1996

STS

CPGE

Universités*

Ingénieur universitaire

IUT

Dépense moyenne

64.400

75.500

35.500

89.200

53.500

* Universités hors IUT et hors écoles d'ingénieurs dépendantes des universités. Ces deux dernières catégories apparaissent dans les deux colonnes suivantes. Les trois catégories "Universités", "Ingénieurs universitaires" et "IUT" concernent uniquement les universités publiques ; les effectifs d'étudiants sont ceux des inscrits administratifs en début d'année, ramenés à l'année civile.

Mis à part les Etats-Unis, les dépenses des différents pays sont comprises entre 2.500 et 8.670 équivalents-dollars par étudiant, et leur moyenne s'établit à 6.510 équivalents-dollars. Tout en ayant une dépense par étudiant (6.030 équivalents-dollars) proche de cette moyenne, la France se situe parmi les pays où cette dépense est la plus faible.

* Secteur public

B. L'EFFICACITÉ DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR

Outre des éléments de comparaison internationale (source OCDE), quatre indicateurs sont proposés pour apprécier l'efficacité de l'enseignement supérieur en France :

- niveau de formation et diplôme obtenu par les sortants de l'enseignement supérieur ;

- taux de redoublement et taux d'abandon à l'issue de la première année universitaire

- taux d'accès en second cycle universitaire

- taux de réussite en DEA et doctorats

1. Niveau de formation et diplôme obtenu par les sortants de l'enseignement supérieur

Note importante : les sortants présentés dans les tableaux précédents sont des sortants définitifs de l'enseignement supérieur. Un certain nombre d'étudiants "sortent" en effet plusieurs fois de l'enseignement supérieur, ou, dit autrement, interrompent provisoirement une ou plusieurs fois leurs études ; comme il n'est pas possible d'évaluer chaque année le nombre de sortants "définitifs", les tableaux précédents présentent en fait le nombre de sorties nettes une année donnée, c'est-à-dire le solde entre toutes les sorties recensées et les reprises d'études observées.

2. Taux de redoublement et taux d'abandon à l'issue de la première année dans les principales filières universitaires

Dans l'ensemble, un peu moins d'un quart des nouveaux inscrits en première année ne renouvellent pas leur inscription l'année suivante ; parmi eux, certains avaient en fait engagé un cursus parallèle (classes préparatoires par exemple) et n'avaient pris leur inscription universitaire que par précaution. Le taux d'abandon en première année reste stable au cours des dernières années.

C'est en économie-AES que ce taux d'abandon est le plus fort où il avoisine les 30 % ; le taux de redoublement de la première année y est également particulièrement élevé, le cas de la filière santé devant être mis à part en raison de l'existence d'un numerus clausus : faible taux d'abandon qui conduit à un taux élevé de redoublement, la règle étant de tenter 2 fois sa chance pour franchir la barrière que constitue le passage en deuxième année.

Seule la filière sciences voit son taux d'abandon diminuer régulièrement au cours des trois dernières années, pour s'établir à un niveau sensiblement inférieur à celui des autres disciplines générales.

3. Taux d'accès en second cycle universitaire

Toutes filières générales confondues (c'est-à-dire hors médecine, odontologie et pharmacie), 59 % des étudiants entrés en premier cycle universitaire ont pris une inscription en second cycle universitaire à la rentrée 1996 ; ce même taux était de 51,5 % en 1988. Depuis 1992, il ne progresse plus que faiblement, voire diminue ces deux dernières années.

C'est en sciences que cette proportion est la plus élevée puisqu'elle atteint 62,7 % ; à l'inverse, avec 50,2 %, c'est la filière droit qui enregistre la moins bonne performance.

L'importance de la qualité du parcours effectué dans le second degré apparaît primordiale ; en effet, alors que le taux global d'accès en deuxième cycle est de 59 %, il est de 74,3 % pour les étudiants qui ont obtenu leur baccalauréat à l'heure ou en avance, de 54,3 % pour ceux qui avaient un an de retard et de seulement 34 % pour ceux qui avaient plus de un an de retard lors de leur réussite au baccalauréat.

Enfin, il est important de souligner que les étudiants qui n'accèdent pas en second cycle universitaire ne peuvent pas pour autant être considérés comme ayant échoué dans le supérieur. Ceci tient notamment au fait que certaines inscriptions en DEUG ne sont que des inscriptions de précaution par rapport à une inscription principale prise dans un autre cursus (cas fréquent des étudiants en classes préparatoires), mais aussi au fait que certains étudiants ayant réussi au DEUG continuent leurs études supérieures à l'extérieur de l'université, donc ne sont pas comptabilisés comme accédant en second cycle universitaire.

4. Taux de réussite dans les DEA et doctorats

Après la réforme des doctorats de 1984 qui avait diminué la capacité des établissements universitaires à former des chercheurs, il fallut attendre 1989 pour que le nombre de DEA délivrés retrouve son niveau de 1985. L'augmentation régulière constatée depuis lors se ralentit depuis ces deux dernières années : après une hausse moyenne annuelle de 10 % entre 1988 et 1992 et une augmentation de seulement 4 % en 1993, 1994 s'est soldée par une progression de 3,5 % et 1995 par une hausse de seulement 1,1 %. Le nombre de DEA délivrés approche en 1995 la barre des 27.000.

Les doctorats, après avoir retrouvé une certaine vigueur entre 1992 et 1994, en rupture avec la stagnation qui avait marqué la période 1983-1991, enregistrent un recul en 1995 : 9.522 thèses ont été soutenues avec succès contre 9.901 en 1994. Plus de 63 % l'ont été en sciences.

Ces différentes évolutions se retrouvent dans l'analyse des "taux de rendement".

La progression des maîtrises obtenues par des étudiants français étant plus forte que celle des DEA, le rendement de celles-ci, en termes de prolongement par un DEA, diminue à nouveau cette année ; elle s'établit à 37,5 %, soit près de 2 points de moins que l'an dernier. Cette baisse se retrouve dans toutes les disciplines, tout en étant moins marquée en droit. Les sciences, avec un rendement de 61,2 %, se distinguent toujours des autres disciplines générales où le ratio DEA/maîtrises est plus de deux fois moindre. Toutefois, depuis 1983, les maîtrises de sciences enregistrent un recul de plus de 20 points quant à leur prolongement par un DEA.

Le rendement des DEA, mesuré par le ratio doctorats/DEA, diminue lui-aussi nettement cette année, pour s'établir à 35,1 %, soit un recul de plus de quatre points par rapport à 1994.

Rendement 3ème cycle pour les étudiants français

DEA

1983

1994

1995

Disciplines générales

42,7

39,1

37,5

dont

Droit

22,5

30,5

29,9

Sciences économiques

29,5

26,5

23,7

Lettres & sciences humaines

33,5

29,6

28,6

Sciences

81,6

64,9

61,2

Doctorats

1994

1995

Disciplines générales

ns

39,4

35,1

dont

Lettres & sciences humaines

ns

36,4

27,4

Sciences

ns

52,1

49,5

Indications méthodologiques

Taux de rendement en DEA : les DEA délivrés l'année n sont rapportés aux maîtrises (stricto sensu) délivrées l'année n-1. L'indicateur est calculé pour les principales disciplines générales. Les diplômes délivrés en MASS et AES ne sont pas pris en compte.

Cet indicateur est imparfait, puisque l'accès en DEA ne se fait pas exclusivement à partir de la maîtrise, mais aussi après un diplôme d'ingénieur. La maîtrise représente environ 65 % de l'ensemble des recrutements, mais beaucoup plus, ce qui est le cas ici, si on s'intéresse aux seuls étudiants français inscrits dans une discipline générale, soit une proportion supérieure à 80 %.

Taux de rendement en doctorat : les doctorats de tous régimes (y compris diplômes d'ingénieur) délivrés l'année n sont rapportés aux DEA délivrés l'année n-3 pour les doctorats scientifiques, l'année n-4 pour les autres disciplines.

C. L'INSERTION DES DIPLOMÉS DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR

La période actuelle est marquée par un accroissement important du nombre des sortants de l'enseignement supérieur. Ce nombre était en effet de 367.000 en 1995 représentant un peu plus de 50 % des sortants du système éducatif, traduisant ainsi les effets de la massification des effectifs d'étudiants enregistrée des dernières années. Ce mouvement devrait encore se poursuivre pendant quelques années, notamment pour les formations supérieures à Bac + 2 en raison de l'augmentation continue du taux de poursuite d'études. Selon la direction de l'évaluation et de la prospective (DEP), il y avait 138.000 sortants en 1995, alors qu'ils n'étaient que 128.000 en 1994.

En outre, et sous l'effet du retournement de la conjoncture économique, les conditions d'insertion des diplômés de l'enseignement supérieur qui étaient auparavant très favorables (taux de chômage de 4,5 % en 1991 pour les diplômés de 1988), se sont largement dégradées. On assiste aujourd'hui à une insertion professionnelle de plus en plus différée, à un certain déclassement des emplois trouvés et à un recrutement plus important sur les contrats à durée déterminée. Toutefois, les projections effectuées par le BIPE (Bureau d'Informations et de Prévisions Economiques) et par la DEP montrent que si 510.000 emplois en moyenne se sont libérés chaque année entre 1985 et 1995, il devrait y en avoir 710.000 entre 1995 et 2005.

Enfin, se pose le problème spécifique des sortants non-diplômés de l'enseignement supérieur.

Une enquête du CEREQ en cours de publication sur les diplômés de 1994, montre que l'insertion professionnelle a été caractérisée :

- par un accès à l'emploi un peu moins difficile que pour leurs prédécesseurs : trois ans après leur sortie du système éducatif les diplômés de 1994 s'insèrent mieux que ceux de 1992. Leur taux de chômage est de 9,3 % contre 11,5 % pour les diplômés de 1992. Ils sont plus nombreux à accéder à un contrat de durée indéterminée. Les diplômés de 1994 semblent avoir profité au moment de leur sortie de l'enseignement supérieur d'une "mini-reprise" du marché du travail, la proportion de diplômés de l'enseignement supérieur occupant un emploi temporaire a fortement diminué entre 1994 et 1997 ;

- par des emplois "cadres" aussi nombreux et mieux rémunérés : la part des emplois de cadre obtenus au bout de 3 ans est identique à celle des diplômés de 1992 (41 %), les rémunérations proposées à l'embauche sont plus élevées et retrouvent en francs courants leur niveau de 1991 (au lieu de celui de 87 pour leurs prédécesseurs).

Selon le CEREQ, 50 % des titulaires de licences ou de maîtrises et 70 % des diplômés de troisième cycle s'orientent vers le secteur privé. Il s'agit là d'une traduction des effets du rapprochement des universités avec les entreprises et de la construction de nouveaux cursus de formations professionnalisées (IUT, IUP, DESS). Cependant, les métiers de l'enseignement, qui étaient auparavant les débouchés principaux de l'enseignement supérieur, connaissent encore un engouement lié en partie à la crise du recrutement des cadres.

De même, les compétences nouvelles qui sont désormais demandées aux jeunes diplômés, en raison des mutations technologiques et organisationnelles des entreprises (développement des aptitudes à l'autonomie - élévation du niveau de culture générale - maîtrise de l'informatique ou des langues étrangères...) doivent être prises en compte dans les enseignements, afin de favoriser une meilleure articulation qualitative entre formation et emploi.

Par ailleurs, les enquêtes réalisées par les universités font apparaître un fort taux de diplômés allant rechercher leur premier emploi dans une autre région. Selon l'association pour l'emploi des cadres (APEC), 60 % de recrutements de jeunes diplômés en qualité de cadres en 1993 l'ont été par la région parisienne.

En 1994, 81.000 jeunes sont sortis de l'enseignement supérieur sans obtenir de diplôme autre que le baccalauréat.

L'attention est aujourd'hui attirée sur cette catégorie particulière d'étudiants, qu'il s'agisse de la mise en place des procédures de réorientation prévues par l'arrêté du 9 avril 1997, ou par les dispositions de l'article 54 de la loi quinquennale du 20 décembre 1993 qui offrent à ceux qui le souhaitent une deuxième chance sous forme d'une formation professionnelle organisée en liaison avec les milieux professionnels.

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