EXAMEN EN COMMISSION
La commission des finances du Sénat a
procédé, sur le rapport de
M. Michel Charasse,
à l'examen des
crédits
du budget de la
coopération
pour 1998, le
mercredi 8 octobre 1997
, sous la
Présidence de M. Christian Poncelet, président, puis de
M. Jean Cluzel, vice-président.
Après que le rapporteur spécial a présenté les
grandes orientations du projet de budget pour 1998, ainsi que ses principales
observations, un débat s'est instauré auquel ont participé
M. Alain Lambert, rapporteur général, Mme Paulette
Brisepierre, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires
étrangères, des crédits de la coopération
,
ainsi que
MM. Jacques Oudin, Joël Bourdin, Jacques Chaumont, Henri
Collard, Emmanuel Hamel, François Trucy, René Régnault et
Philippe Marini et Christian Poncelet, président.
M. Alain Lambert, rapporteur général,
après avoir
souligné la complexité du dispositif français d'aide au
développement, évoquant tout à la fois la
prépondérance du ministère de l'économie et des
finances, le très grand nombre de ministères ou d'organismes
publics concernés et l'absence de lisibilité, pour les
parlementaires, de l'effort global d'aide au développement, a
souhaité obtenir des précisions complémentaires sur les
voies et moyens d'une simplification de ce dispositif afin de le rendre plus
lisible, plus efficace et moins coûteux.
Il a ensuite fait état des critiques de la Cour des Comptes relatives
aux modalités d'exécution du fonds d'aide et de
coopération et a interrogé le rapporteur spécial sur le
bien fondé de ces critiques.
En réponse à M. Alain Lambert, rapporteur général,
M. Michel Charasse, rapporteur spécial,
a indiqué que
la complexité du dispositif était effectivement une
spécificité française et que ce dispositif méritait
d'être amélioré, notamment en assurant une plus grande
transparence. A cet égard, il a jugé opportun d'accroître
l'information des parlementaires sur les décisions du Trésor en
matière d'aide au développement, au besoin en mettant en place
une structure inspirée du comité directeur du fonds d'aide et de
coopération. Il a également évoqué
l'hypothèse que le conseil de surveillance de la Caisse française
de développement soit transformé en conseil d'administration,
afin d'accroître le pouvoir des parlementaires qui y siègent.
Concernant les critiques de la Cour des Comptes,
M. Michel Charasse
a
précisé que, d'une part, la Cour avait critiqué le fait
que certaines dépenses de fonctionnement soient imputées sur des
crédits d'équipement et, d'autre part, que des
irrégularités aient été commises dans
l'exécution des dépenses. S'agissant du premier grief, il a
rappelé qu'il ne s'agissait pas là d'une nouveauté et que
si l'on voulait conserver au fonds d'aide et de coopération une certaine
souplesse, il demeurait indispensable d'assurer une certaine fongibilité
des crédits, quitte à prendre quelques libertés avec la
règle de spécialité des crédits. Concernant le
second grief, il a indiqué que les irrégularités
constatées provenaient du fait que la Caisse française de
développement était le payeur du ministère de la
coopération et que les projets de réforme de cette
procédure se heurtaient au fait que nous ne disposions pas de paierie
générale dans tous les pays du champ. Il a regretté que la
solution qu'il avait présentée, consistant à ériger
les payeurs de la Caisse en régisseurs d'avance du Trésor, et
donc à les soumettre au contrôle de la Cour des Comptes, ait
été écartée. Il a encore ajouté que la
modification des procédures en vigueur était actuellement
suspendue à la décision du Premier ministre concernant la
réorganisation du dispositif français d'aide au
développement.
Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis,
a
considéré qu'il était regrettable que les crédits
affectés aux bourses d'études diminuent et jugé d'autant
plus nécessaire d'améliorer la délivrance des visas aux
étudiants sérieux que les pays anglophones renforcent leur
présence en Afrique.
M. Jacques Oudin
a émis le souhait que le rapport fasse un point
particulier sur le nombre exact et l'évolution du nombre des
étudiants étrangers en France. Il a également
indiqué qu'il ne pouvait pas y avoir de véritable
développement de la francophonie si, au-delà des aspects
proprement culturels, les entreprises françaises ne prenaient pas le
relais des instituteurs et des intellectuels. Dans cette perspective, il a
souhaité que le rapport fasse également le point de la situation
des investissements français dans les pays du champ. Il a
également demandé au rapporteur spécial de lui
préciser quel était désormais le ministère
compétent pour la francophonie. S'agissant de la diminution de l'aide
française, il s'est interrogé sur le fait de savoir s'il
n'était pas dans l'intérêt de la France d'aider les pays
africains à mieux s'organiser pour assurer le débouché de
leurs produits de base.
M. Joël Bourdin
a confirmé la diminution du nombre
d'étudiants africains dans nos filières de troisième cycle
et a alerté ses collègues quant aux conséquences de ce
phénomène qui va entraîner un affaiblissement du lien
culturel unissant la France aux pays francophones. Il a également
critiqué la diminution des crédits alloués aux bourses et
aux associations de volontaires.
M. Jacques Chaumont
, tout en soulignant la qualité des
personnels de la Caisse française de développement, a
considéré qu'il était important d'accroître le
contrôle parlementaire de cet organisme, qualifié par lui de "bras
séculier" du Gouvernement en matière de coopération. Aussi
a-t-il exprimé le souhait que la commission des finances du Sénat
auditionne, dans les meilleurs délais, le président et le
directeur général de la Caisse française de
développement. Par ailleurs, il a considéré que la
fidélité des pays africains au moment des votes à l'ONU
avait un prix et a souhaité que l'on s'interroge sur la finalité
de la dépense de coopération, notamment dans des pays comme le
Cameroun ou le Gabon très riches en ressources naturelles.
M. Henri Collard
a souligné l'importance de la
coopération décentralisée. A cet égard, il a
manifesté le souhait que l'aide accordée par les
collectivités territoriales fasse l'objet d'une meilleure
évaluation quant à ses modalités et à ses effets.
M. Emmanuel Hamel
s'est indigné de la diminution des
crédits de la coopération en particulier et de l'aide publique en
général. Il a souhaité que la France ne se laisse pas
enfermer par les considérations budgétaires de Maastricht et
qu'elle continue de montrer la voie en matière d'aide publique au
développement.
M. François Trucy
a approuvé les observations du
rapporteur spécial, d'une part, quant à la
nécessité de réduire les doubles-emplois entre le
ministère de la coopération et la CFD et, d'autre part, quant
à la diminution de l'aide en faveur des pays ayant assuré leur
décollage économique. Il a souligné l'amertume de
certaines familles africaines de ne plus pouvoir envoyer leurs enfants dans les
universités françaises et s'est interrogé sur les raisons
des succès contrastés de la dévaluation du franc CFA. A
cet égard, il a fait état des difficultés auxquelles sont
confrontées les retraités français dont les pensions sont
versées par les caisses de retraite d'Etats africains de la zone franc.
Enfin, il s'est interrogé sur l'intérêt de l'assistance
technique militaire et sur le nombre exact de pays concernés par l'aide
publique française.
M. René Régnault
a souligné l'insuffisante
coordination qui prévaut entre les diverses organisations non
gouvernementales (ONG). Il a également indiqué qu'il était
très difficile de développer la francophonie si, à
côté de l'aspect culturel relatif à l'enseignement du
français, il n'y avait pas un volet économique.
Enfin,
M. Philippe Marini,
tout en reconnaissant l'importance de la
coopération en matière universitaire, a interrogé le
rapporteur spécial sur le taux de retour dans leur pays des
étudiants africains disposant d'un diplôme de troisième
cycle.
En réponse à
M. Jacques Oudin
, le rapporteur
spécial a indiqué que les questions relatives à la
francophonie faisaient désormais partie, pour l'essentiel, des
compétences du secrétariat d'Etat à la coopération.
S'agissant de la présence d'investisseurs, il a cité le cas du
Viêt-nam où, en dépit d'une forte demande des entreprises
françaises, la direction du Trésor avait refusé
l'installation de la Proparco, principale filiale de la CFD
spécialisée dans l'octroi de crédits aux entreprises.
Concernant l'amélioration des débouchés des produits de
base en provenance des pays en voie de développement, il a
indiqué que, au-delà des mécanismes issus des
différentes conventions de Lomé (Stabex, Sysmin...), la meilleure
solution consistait, comme le fait la France, à aider les pays africains
à développer leurs zones de libre-échange.
En écho à
M. Joël Bourdin
, le rapporteur
spécial a regretté la diminution des crédits
alloués aux bourses et aux associations de volontaires. Il a toutefois
indiqué, d'une part, qu'il convenait également de prendre en
considération les crédits transitant par le FAC et, d'autre part,
qu'il ne fallait pas exagérer la diminution des crédits de bourse
(3 millions de francs).
Par ailleurs, le rapporteur spécial s'est déclaré en
parfait accord avec
M. Jacques Chaumont
pour auditionner le
président et le directeur général de la CFD. S'agissant de
la finalité de la politique française il a
considéré qu'il s'agissait là d'une question fondamentale
et que, conformément à sa doctrine, la France s'efforçait
d'aider davantage les pays que les Gouvernements.
En réponse à
M. Henri Collard
, le rapporteur
spécial a indiqué qu'il fallait effectivement améliorer
l'évaluation de la coopération décentralisée.
S'agissant des organisations non gouvernementales (ONG), il a indiqué
que la France, en raison de l'importance de son assistance technique, avait
moins recours aux ONG que beaucoup d'autres pays et que, de ce fait, il
apparaissait moins indispensable d'assurer le suivi de ces organisations, ce
qui pouvait effectivement se traduire par une mauvaise coordination.
En réponse à
M. Emmanuel Hamel
, le rapporteur
spécial a objecté qu'il n'était pas raisonnable de
demander un accroissement des crédits d'aide publique alors que la
situation économique des pays du champ s'améliorait.
En réponse à
M. François Trucy
, il a
précisé que le bilan contrasté de la dévaluation du
franc CFA résultait en grande partie de la différence de
préparation de cet événement par les États
concernés.
En réponse à
M. Philippe Marini
, le rapporteur
spécial a fait observer qu'il ne s'agissait pas d'ouvrir les
universités françaises au "tout-venant", mais de permettre, en
liaison avec les universités africaines, aux étudiants et aux
professeurs sérieux de pouvoir effectuer leur formation dans notre pays.
Partant, il n'a pas jugé illégitime que certains de ces
étudiants puissent être embauchés par des entreprises
françaises. Il a également souligné tout
l'intérêt de la démarche de certains de nos universitaires,
tel le vice-recteur de l'Université catholique du Cameroun, qui
n'avaient pas hésité à se rendre sur place et de
créer des universités dans le but affiché de "fixer" les
élites africaines.
La commission a ensuite décidé de
réserver son vote sur
les crédits de la coopération
jusqu'après l'audition
du président et du directeur général de la Caisse
française de développement.
La commission a procédé à l'
audition de M. Charles
Josselin, secrétaire d'État chargé de la
coopération accompagné de M. François Villeroy de
Galhau
,
directeur du cabinet du ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie et de
M. Antoine Pouillieute
,
directeur général de la
Caisse française de
développement,
sur la
situation
de la
Caisse
française de développement
et ses
perspectives
d'activité
le mardi 18 novembre 1997.
M. Charles Josselin, secrétaire d'Etat à la
coopération,
a tout d'abord rappelé que la France figurait au
premier rang des pays du G7 pour l'effort en faveur de l'aide au
développement. Il a ensuite indiqué que cette action s'inscrivait
dans un impératif ancien de solidarité et participait au
rayonnement culturel de notre pays. Il a dit que le gouvernement entendait
sortir la politique de coopération d'une logique d'assistance et
l'orienter vers un partenariat, offrant plus de transparence et de
responsabilité. Enfin, il a souligné l'importance de la CFD en
tant qu'instrument de la politique française de coopération.
M. François Villeroy de Galhau, directeur du cabinet de Monsieur le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
, a
indiqué que l'action de la Caisse française de
développement s'inscrivait dans le cadre de trois évolutions
stratégiques, au premier rang desquelles, la professionnalisation accrue
des acteurs du développement. Il a souligné que la Caisse
était une institution financière et qu'elle disposait d'un savoir
faire internationalement reconnu en matière bancaire. Il a ajouté
qu'elle jouait un rôle non négligeable dans l'administration de la
zone franc, en collaboration avec les services de la direction du
Trésor. En second lieu, il a indiqué que la Caisse participait
pleinement à la "modernisation de notre pré carré", c'est
à dire l'élargissement de notre action en dehors des pays du
champ. Enfin, il a souligné l'importance de la lutte anti-corruption et
la nécessité de mettre en place des procédures totalement
transparentes d'attribution des marchés.
M. Antoine Pouillieute,
directeur général de la Caisse
française de développement
a, tout d'abord, rappelé
que la Caisse avait une histoire prestigieuse. Créée en 1941 par
le général de Gaulle, elle avait initialement exercé les
missions conjuguées de la Banque centrale et du Trésor, au
service de la France libre. Devenue caisse centrale de coopération
économique en 1958, elle a eu pour mission d'accompagner les jeunes
États africains dans leur indépendance, puis les possessions
d'outre-mer sur la voie de la départementalisation. Il a ensuite
souligné que la Caisse était un outil important au service de la
politique d'aide au développement. A ce titre, il a rappelé que
la caisse avait reçu 4,5 milliards de francs de crédits publics
en 1997 et devrait normalement en recevoir 4,2 milliards en 1998. Sur cette
somme, un quart provient du budget général par
l'intermédiaire des crédits du département
ministériel de la coopération, soixante-cinq pour-cent
proviennent de prêts ou d'emprunts bonifiés par le Trésor
et le solde, soit entre 300 et 400 millions de francs, est emprunté par
la caisse sur les marchés. Il a souligné l'intérêt
pour l'Etat que constituait "l'effet de levier" induit par l'action
de la
caisse : pour cent francs accordés par celle-ci, seulement 40
proviennent de ressources budgétaires.
M. Antoine Pouillieute
a précisé que la Caisse disposait
de 44 agences couvrant plus de 80 pays d'Afrique, des Caraïbes, de
l'Océan indien, du Pacifique et des départements et territoires
d'outre-mer (DOM-TOM) et que 43 % de ses opérations portaient sur des
risques non souverains. S'agissant de l'efficacité de la Caisse, il a
indiqué qu'environ un sixième des 130 projets mis en oeuvre
chaque année à l'initiative des États partenaires
faisaient l'objet d'une évaluation rétrospective.
Il a encore indiqué que sur un encours de crédits de 92,5
milliards de francs, 42,7 milliards représentaient des opérations
effectuées pour le compte de l'État et aux risques de celui-ci,
alors que 49,7 milliards correspondaient à des opérations pour
compte propre de la Caisse et parmi ceux-ci, 37,5 à ses risques. Il a
fait observer que la Caisse réalisait un bénéfice net de
200 millions de francs, certes symbolique en regard des encours, mais qui
signifiait que l'aide au développement ne devait pas forcément
être une activité déficitaire.
Concernant la transparence des opérations de la Caisse,
M. Antoine
Pouillieute
a indiqué que l'institution, qui est à la fois un
établissement public industriel et commercial et une institution
financière relevant de la loi bancaire, était soumise, outre ses
propres commissaires aux Comptes, au contrôle de la Cour des comptes, de
l'Inspection des finances, de la Commission bancaire, de la Commission des
opérations de bourse, d'un commissaire de gouvernement, ainsi que des
commissaires aux comptes du comité central d'entreprise et que ses
décisions faisaient l'objet de délibérations au sein d'un
conseil de surveillance auquel participaient deux députés et un
sénateur. Il a ajouté que la Caisse était soumise à
la quadruple tutelle du ministère de l'économie et des finances,
du ministère des affaires étrangères, du
secrétariat d'État à la coopération et du
secrétariat d'Etat chargé de l'outremer. Enfin, il a dit qu'en
tant qu'institution financière, la Caisse respectait, et bien
au-delà, l'ensemble des ratios prudentiels imposés par la
législation bancaire.
Il a encore précisé que la Caisse pratiquait une politique
active de communication, et qu'outre son rapport annuel elle disposait d'un
site sur Internet et publiait ses projets en cours d'instruction sur la
messagerie minitel du Centre français du commerce extérieur.
Enfin, il a indiqué que, depuis de nombreuses années, la Caisse
s'était efforcé de multiplier les opérations en
cofinancement qui permettent de limiter les erreurs. Il a conclu son
intervention en affirmant que la Caisse fonctionnait plutôt bien et
qu'elle devait être un atout, plutôt qu'un enjeu, de la
réforme en cours de la politique française de coopération.
M. Alain Lambert, rapporteur général
, a demandé au
directeur général de la Caisse de donner son sentiment sur la
superposition des tutelles dont faisait l'objet l'établissement. Il lui
a également demandé de préciser les différentes
participations de la Caisse et son activité dans le secteur bancaire.
En réponse,
M. Antoine Pouillieute
, a indiqué que chacune
des tutelles exerçait pleinement ses responsabilités et que cette
situation ne constituait pas une entrave à la décision.
S'agissant des participations de la Caisse, il a précisé qu'il
fallait distinguer les participations de la Proparco, filiale de la Caisse, qui
sont très nombreuses, en raison de l'activité de capital-risque
de cette filiale consistant à prendre des participations minoritaires et
provisoires dans des entreprises en développement. Il a ajouté
que Proparco intervenait en fonds propres dans 120 entreprises pour un montant
total de 260 millions de francs et pour un seuil maximum de 18 millions de
francs par opération. Pour le reste, la Caisse détient en tout 33
participations en métropole et 43 dans les DOM-TOM soit 76 en tout, dont
la plus importante est la SOCREDOM qui est l'entreprise tête de
réseau des filiales de l'intervention de la Caisse dans les
départements et territoires d'outre-mer. Il a encore indiqué que
l'aide accordée aux entreprises bancaires des pays partenaires
était particulièrement importante dans la mesure où elle
bénéficiait également à des petites et moyennes
entreprises, clientes de ces banques, et à qui il serait
extrêmement difficile de prêter directement sans avoir à
développer des implantations locales très importantes.
M. Jacques Chaumont
,
rapporteur spécial des crédits
des affaires étrangères
, a dénoncé la
"pensée unique" des institutions de Bretton Woods et critiqué
l'alignement de la Caisse sur ces positions. Il a également
critiqué la doctrine actuelle en matière d'aide-projet consistant
à réaliser uniquement de grandes opérations de prestige,
au détriment des projets moins spectaculaires, mais beaucoup plus
importants au profit des micro-entreprises. Il a ensuite demandé au
directeur général de la Caisse de préciser en quoi
consistaient les crédits délégués par le
ministère des affaires étrangères. Il lui a
également demandé des informations sur les relations de la Caisse
avec Air Afrique et s'il était vrai que la caisse entretenait des
relations privilégiées avec un certain nombre de grands
opérateurs privés français.
M. Jacques Chaumont lui a demandé si la Caisse pourrait continuer
à effectuer ses missions dans les mêmes conditions compte tenu du
prélèvement de 2,5 milliards de francs opéré
par l'État. Enfin, il lui a demandé d'indiquer quel était
le coût de la construction du nouveau siège social de la Caisse.
En réponse,
M. Charles Josselin
a déclaré que le
gouvernement actuel avait pour préoccupation constante de prendre en
compte les conséquences sociales des ajustements budgétaires
imposés par les institutions de Bretton Woods. S'agissant de
l'aide-projet, il a indiqué qu'il était bien conscient de la
nécessité de mieux favoriser les micro-projets.
M. François Villeroy de Galhau
a déclaré que pas
une seule opération d'ajustement structurel n'était
envisagée par le Trésor sans que soit évaluées ses
conséquences sociales sur les populations concernées. S'agissant
du prélèvement de 2,5 milliards, il a indiqué qu'il
s'agissait d'une contribution de la Caisse à l'effort national de
maîtrise des finances publiques.
M. Antoine Pouillieute
a indiqué que les opérations
d'ajustement structurel qui représentaient 30 % des interventions de la
Caisse avant la dévaluation du franc CFA en 1994 n'en
représentent plus que 17 % et que le contribuable français
n'avait plus à payer les dettes impayées de certains États
africains. Il a déclaré que la Caisse mettait en oeuvre un nombre
considérable de projets de proximité à destination des
très petites entreprises. Cependant, il a fait observer qu'un grand
projet n'était pas forcément prestigieux ni inutile. Il a
cité à cet égard le projet d'aménagement de la
vallée du Sénégal qui contribue au développement de
l'agriculture et à l'électricité de la sous-région.
S'agissant des relations de la Caisse avec Air Afrique, il a indiqué que
celle-ci était engagée à hauteur de 365 millions de francs
et qu'au total l'État français était engagé
à hauteur d'un milliard de francs. Les pertes de cette compagnie
s'élevaient en 1996 à 24 milliards de francs CFA (240 millions de
francs français). Concernant les soi-disant relations avec des
sociétés "amies",
M. Antoine Pouillieute
a fait
observer que les entreprises françaises présentes au capital de
Proparco à hauteur de 30 % n'avaient bénéficié
qu'à hauteur de 2 % des opérations réalisées
par le groupe. S'agissant des délégations du ministère des
affaires étrangères, il a indiqué que ces
opérations, qui consistaient à intervenir en mandat complet ou
comme simple payeur, ne représentaient que 77 millions de francs en
1996. Enfin, il a indiqué qu'actuellement, la Caisse était
installée dans un immeuble rue Boissy d'Anglas dont la location
coûtait 60 millions de francs par an. C'est la raison pour laquelle la
décision a été prise, avant son arrivée à la
tête de la Caisse, de faire construire un nouveau siège social
dans un terrain beaucoup moins prestigieux, près du ministère de
l'économie et des finances et pour un coût de construction de
26.200 francs hors taxes du mètre carré.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial des crédits de la
coopération
, a dénoncé, tout d'abord, l'absence de
lisibilité de l'action du ministère de l'économie et des
finances en matière d'aide au développement. Il a demandé
combien de projets avaient bénéficié d'opérations
de cofinancement et pourquoi Proparco n'était pas autorisée
à intervenir au Viêt-nam. Il a demandé au ministre de
préciser quels étaient les instruments de la coopération
française dans les nouveaux pays du champ. Il a interrogé le
directeur général de la Caisse sur le fait de savoir si tous les
projet réalisés l'étaient vraiment à l'initiative
des autorités locales. Il a également demandé quelle
était la situation actuelle de la Caisse au Congo et au Zaïre.
Enfin, il a demandé au ministre de préciser les principales
pistes de réflexion concernant la réforme en cours de la
Coopération.
M. Charles Josselin, secrétaire d'État à la
coopération
a tout d'abord indiqué que le manque de
lisibilité de l'action en faveur de la coopération était
évidente et que c'était une des principales raisons justifiant
une réforme du dispositif français. Il a indiqué que le
Viêt-nam était sur le point de bénéficier
d'opérations du fonds d'aide et de coopération (FAC) et qu'il
convenait d'éviter de proposer à nos partenaires des projets tout
fait. S'agissant de la réforme, il a indiqué que, très
probablement, il continuerait d'y avoir une identité
ministérielle compétente en matière de coopération,
mais que la question de savoir si celle-ci continuerait de
bénéficier d'un budget et de services spécifiques
n'était pas tranchée. Il a également fait observer que de
nombreux pays occidentaux s'étaient dotés d'une Agence afin de
mieux identifier les actions en faveur de la coopération.
M. François Villeroy de Galhau
a fait observer que la direction
du Trésor était sous le contrôle politique du ministre et
qu'elle se tenait à la disposition du rapporteur spécial des
crédits de la coopération si celui-ci désirait y effectuer
une mission de contrôle parlementaire sur pièces et sur place.
M. Antoine Pouillieute
a fait observer qu'au premier semestre 1997,
près de 42 % des opérations réalisées par la Caisse
l'avaient été en cofinancement. Il a indiqué que, depuis
1997, Proparco était non seulement autorisée à intervenir
au Viêt-nam, mais aussi au Cambodge et au Laos. Il a encore fait observer
que 46 % des opérations de la Caisse étaient
réalisées dans des pays de la zone franc et 54 % dans des pays en
dehors de cette zone. Précisant le processus décisionnel
aboutissant à la sélection d'un projet, il a indiqué que
dans certains cas, nos interlocuteurs n'avaient pas l'expertise
nécessaire pour formuler des projets correctement articulés et
que l'un des premiers services à leur rendre était de les aider
à se doter d'une véritable capacité de négociation
et de stratégie à moyen terme. S'agissant de la situation au
Zaïre, il a indiqué que la Caisse avait 800 millions de francs
d'impayés souverains et qu'elle avait suspendu toute opération
dans ce pays jusqu'à ce que ces arriérés soient
réglés.
Un débat s'est ensuite ouvert auquel ont participé
Mme
Marie-Claude Beaudeau, M. Emmanuel Hamel, Mme Paulette Brisepierre, rapporteur
pour avis au nom de la commission des affaires étrangères des
crédits de la coopération et M. Christian Poncelet,
président.
En réponse à
Mme Paulette Brisepierre,
qui avait
rendu compte de son récent voyage au Congo et de la situation dramatique
dans laquelle se trouvait sa capitale,
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat à la coopération,
après avoir
lui avoir rendu hommage pour son courage et son dévouement en faveur de
nos compatriotes de l'étranger, a indiqué que le gouvernement
pouvait difficilement décider de transférer la mission de
coopération à Pointe Noire, sans donner l'impression de
préjuger de la décision du gouvernement congolais de
transférer sa capitale dans cette ville.
En réponse
à Mme Marie-Claude Beaudeau
, le directeur
général de la Caisse, a indiqué que l'arrêté
modifiant le statut du personnel de cette Institution, signé avec deux
des trois syndicats de la Caisse, avait été
déféré à la justice par le syndicat du personnel
CGT pour des raisons administratives. Il a ajouté que quatre vingt pour
cent du personnel avait adhéré à la clause de
mobilité du nouveau statut. En réponse au
président
Christian Poncelet
qui s'interrogeait sur le fait que les opérations
de la Caisse étaient très concentrées sur la Côte
d'Ivoire, le Gabon, le Congo Brazzaville et le Mali, il a indiqué que
cette concentration était réelle si l'on prend en compte
l'ensemble des opérations, mais que, hors ajustement structurel, ces
quatre pays ne représentaient que 28 % du total de l'aide-projet
des opérations de la Caisse, ce pourcentage correspondant à leur
poids économique au sein des pays de la zone franc. Il a
également indiqué que la Caisse avait réalisé deux
opérations de garanties de dettes obligataires publiques en Côte
d'Ivoire et au Maroc.
Enfin, la commission
a décidé de proposer au Sénat
d'adopter les crédits de la coopération
.
Réunie le mercredi 18 novembre 1996, sous la présidence de
M. Christian Poncelet, président, la commission des finances,
après avoir entendu son rapporteur spécial, M. Michel
Charasse, a décidé de proposer au Sénat
l'adoption des
crédits de la coopération pour 1998.