B. UNE DIFFICILE RECONSTRUCTION POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE

Quelques mois après le retour progressif au calme et le changement de ses dirigeants politiques, l'Albanie entame un effort de reconstruction qui se heurte à de nombreuses difficultés, dans les domaines de la vie politique, de l'ordre public et de l'économie.

1. Une vie politique très tendue

Loin de s'apaiser après les élections du début de l'été, la vie publique albanaise reste marquée par une atmosphère très tendue, comme en témoigne la violence verbale du débat politique. Le parti démocratique, principale force d'opposition, après avoir contesté le résultat des élections, boycotte les travaux du Parlement, et notamment la commission, composée à la proportionnelle des groupes, chargée d'élaborer un projet de constitution, l'Albanie étant toujours régie par des lois constitutionnelles provisoires adoptées entre 1991 et 1993.

D'une manière générale, et ce fait n'est pas nouveau par rapport au gouvernement précédent, un débat permanent oppose majorité et minorité sur le respect des règles élémentaires de la démocratie pluraliste . Les thèmes d'affrontements sur ce point sont nombreux et concernent notamment le doute systématique émis sur la régularité des consultations électorales, le traitement de l'information par la télévision, la nomination aux emplois de responsabilité dans l'administration et l'armée et les nombreux changements intervenus après l'alternance, l'indépendance du système judiciaire et enfin l'équilibre des pouvoirs, supposé rompu au profit du Président de la République hier et du Premier ministre aujourd'hui.

2. Un retour fragile à l'ordre public

La restauration de l'armée et de la police, qui s'étaient effondrées face aux émeutes de l'hiver dernier, ne peut être immédiate.

Plus des trois-quarts des casernes ont été saccagées, un grand nombre de matériels ont été détruits et une quantité considérable d'armes de toutes natures -on parle d'un million d'armes légères- ont été pillées.

Depuis le mois de février, on compterait plus de 2 000 tués et 10 000 blessés par armes à feu. Si le gouvernement considère avoir démantelé les plus importantes bandes armées, le banditisme et la criminalité demeurent une réalité quotidienne, y compris dans la capitale.

Les appels à la restitution des armes ont pour le moment été faiblement entendus, ce qui laisse peser le risque de nouvelles violences.

La restructuration et la formation des forces de police font l'objet d'un programme de l'UEO alors que dans le cadre du partenariat pour la paix, l'OTAN dépêche des misions d'experts en vue d'aider l'armée albanaise à se relever.

3. Une économie sinistrée qui dépend désormais de l'aide internationale

Les événements de l'hiver 1997, c'est-à-dire à la fois la faillite des sociétés pyramidales et les conséquences des émeutes, ont considérablement affaibli l'économie albanaise.

Alors que les rendements proposés par les pyramides avaient détourné nombre d'Albanais des activités productives, ceux qui avaient tout misé sur ces placements se retrouvent dans des situations précaires.

Les émeutes ont causé des dégâts considérables aux bâtiments publics, aux hôpitaux, aux écoles, aux entreprises et, d'une manière générale, à l'ensemble des infrastructures du pays.

Les recettes fiscales, notamment douanières, ont chuté.

D'après les indications fournies en octobre dernier, lors de la conférence de Bruxelles qui réunissait les principaux donateurs de l'Albanie, l'inflation pourrait atteindre 50 % en 1997, le PIB reculerait de 8 %, le déficit budgétaire grimperait à 17 % du PIB.

Face aux situations d'extrême pauvreté qui se sont multipliées et face aux besoins de reconstruction considérables, l'Albanie dépend désormais de l'aide internationale.

Cette aide a fait l'objet de décisions de principe de la part des institutions multilatérales (FMI, Banque mondiale, Union européenne) et des partenaires de l'Albanie, lors de la conférence de Bruxelles le 22 octobre dernier .

Une aide d'urgence , d' un montant de 185,5 millions de dollars , devait être accordée dans les six mois, dont 100 millions de dollars pour réduire le déficit budgétaire et rééquilibrer la balance des paiements, 79 millions de dollars pour la lutte contre la pauvreté, la stabilisation économique, les réformes structurelles et le fonctionnement des institutions, et enfin 6,5 millions de dollars pour démanteler le système des pyramides.

Par ailleurs, le FMI a fixé au gouvernement albanais un délai de six mois pour mettre en oeuvre un programme d'urgence , un accord de stabilisation macro-économique pouvant être conclu à l'issue de ce délai. Dans cette perspective, le gouvernement albanais a porté la TVA de 12,5 % à 20 % et a entrepris une réduction des postes dans la fonction publique. Ces mesures risquent d'être durement ressenties par une population déjà très appauvrie.

Page mise à jour le

Partager cette page