II. UN DISPOSITIF EN DEBAT
Le pacte de stabilité et de croissance a fait l'objet
d'après discussions. Deux objections ont été
émises, l'une portant sur son principe même, l'autre sur ses
modalités.
Les termes de ce débat sont exposés ci-dessous pour ce qui
concerne, successivement, la surveillance et la coordination des
évolutions et des politiques économiques et la prévention
et la correction des déficits excessifs.
A. LE NECESSAIRE RENFORCEMENT DE LA SURVEILLANCE ET DE LA COORDINATION DES EVOLUTIONS ET POLITIQUES ECONOMIQUES
Le thème de la coordination des politiques
économiques a une longue histoire en Europe. Mais, c'est une histoire
complexe qui superpose deux conceptions au moins.
La première, minimale, consiste à promouvoir un modèle
où le partenaire ne gêne pas l'autre. Minimale certes mais
exigeante au moins pour les pays disposant d'une situation favorable dans un
rapport de forces économiques que tend à atténuer la
coordination mise en oeuvre. On peut estimer que l'union monétaire est
l'exemple même de ce type de coordination.
Une deuxième conception est axée sur l'idée de
coopération. Elle suppose la définition et la mise en oeuvre de
règles au terme desquelles l'inégalité des partenaires
étant constatée, le partenaire le plus fort aide celui qui est en
difficulté. Elle est également invoquée pour
reconnaître que la contribution à la résolution d'un
problème commun aux partenaires peut supposer des efforts inégaux
de la part de chacun d'eux.
Ces deux conceptions peuvent avoir des frontières communes -le
renoncement à un avantage comparatif structurellement nuisible pour les
partenaires peut être rangé dans la catégorie des
comportements coopératifs-, cependant la distinction entre ces deux
formes de coordination conserve une valeur analytique robuste.
Force est de constater que la coordination des politiques économiques en
Europe relève plutôt du premier modèle que du second. Force
est aussi de souhaiter que des progrès soient réalisés
pour promouvoir mieux la coordination en Europe.
1. Une évolution des règles du traité
Le règlement 1466/97 pris sur la base du
paragraphe 5 de l'article 103 a modifié les règles
posées par cet article.
Des règles de fond nouvelles ont en effet été
ajoutées sans que ces modifications trouvent de base légale
évidente dans le traité.
C'est évidemment l'énoncé d'un objectif
budgétaire proche de l'équilibre ou excédentaire,
à rechercher dans le cadre des programmes de stabilité ou de
convergence, qui constitue la novation essentielle du texte.
Cet objectif intangible et non circonstancié -tout au moins si
l'on
se réfère au seul dispositif du règlement-
est plus
rigoureux que celui inscrit à l'article 104 C du traité
qui "admet" l'existence de déficits s'élevant à 3 %
du PIB. Et même s'il est vrai que le défaut de respect de la
règle ainsi posée n'est sanctionné que par
l'édiction d'une recommandation du Conseil -alors que l'apparition d'un
déficit excessif entraînera, en théorie, des sanctions
pécuniaires- il s'agit là d'une contrainte qui ajoute
incontestablement au texte du traité.
Dans ces conditions, une
application nuancée des nouvelles règles s'impose, qui devrait
s'appuyer sur le considérant (4) du règlement nouveau qui se
réfère explicitement aux fluctuations conjoncturelles et
paraît associer l'objectif budgétaire ainsi énoncé
à un environnement économique particulier.
Un second ajout
, de précision cette fois, mérite d'être
cité même s'il ne concerne que les
Etats membres non
participants
. Il s'agit de la
surveillance de la politique
monétaire conduite dans ces Etats
et des éventuelles
distorsions des taux de change réels et des fluctuations excessives des
taux de change nominaux auxquelles elle pourrait donner lieu. Il est peu
douteux que l'objectif recherché consiste principalement à
prévenir l'apparition de "dévaluations compétitives".
Mais, il est également significatif que la surveillance s'exerce sur les
fluctuations des taux de change nominaux. Il y a là probablement la
volonté d'arrimer les Etats non participants -dont le nombre au moment
de la rédaction du texte ne pouvait qu'être supputé-
à la nouvelle monnaie unique. En tout état de cause, outre que ce
texte manifeste une grande confiance dans la capacité de la politique
monétaire à contribuer à la maîtrise des prix et des
parités, il faut souligner son aspect paradoxal.
Il est en effet significatif que soit organisée la surveillance de la
politique monétaire conduite par des Banques centrales
indépendantes.
Cela constitue une reconnaissance claire de la part du
Conseil que le contrôle par lui de la politique monétaire ne pose
pas de difficultés juridiques.
Mais il n'est pas moins significatif que le règlement ne ménage
en revanche aucun contrôle de la politique monétaire de la BCE
alors même qu'il s'inscrit dans le cadre d'une surveillance
multilatérale
des politiques économiques
exercée
par référence à des grandes orientations de politiques
économiques qui, elles, comportent bien diverses mentions à la
politique monétaire.
Il faut cependant concéder que la résolution du Conseil
européen de Luxembourg a été l'occasion de
réaffirmer les compétences du Conseil et la
nécessité d'instaurer le dialogue visé par l'article 109 B
du Traité entre le Conseil et la BCE.