D. AUDITION DE M. JOËL MÉNARD, PRÉSIDENT DE LA CONFÉRENCE NATIONALE DE SANTÉ
Réunie le
jeudi 16 octobre 1997
, sous la
présidence de M. Jean Pierre Fourcade,
président
, la commission a entendu
M. Joël
Ménard, président de la conférence nationale de
santé,
accompagné de
Mme Isabelle Tamalet
et
de
MM. Olivier Joyeux, Claude Bouchet, Jacques Vleminckx
et
Mathieu Méreau
, représentants du bureau de cette
conférence, dans le cadre des
auditions
sur le
projet de loi
de financement de la sécurité sociale pour 1998
.
M. Joël Ménard
a tout d'abord rappelé qu'il avait
rencontré, en 1996 et au début de l'année 1997, le
président Jean-Pierre Fourcade et M. Charles Descours, rapporteur.
Il a indiqué qu'il avait été tenu compte des principaux
points évoqués au cours de ces réunions dans
l'élaboration du rapport de la conférence nationale de
santé.
Il a observé que les problèmes de santé liés
à l'environnement n'avaient pas été évoqués
parmi les priorités retenues par la conférence en 1996 et en
1997, peut-être en raison de sa composition. Il a rappelé que,
l'an dernier, dix priorités de santé avaient été
sélectionnées, car les membres de la conférence voulaient
faire en sorte que rien d'important pour la santé publique ne soit exclu
et parce qu'ils étaient conscients du fait que les priorités
ainsi définies auraient un cadre pluriannuel. Observant que, pour 1998,
la conférence de santé avait retenu, au sein de ces dix
priorités, quatre thèmes principaux, il a affirmé qu'une
telle méthode permettait d'analyser les sujets plus en profondeur.
M. Joël Ménard, président de la conférence
nationale de santé
, a ensuite détaillé les quatre
priorités sélectionnées dans le rapport annuel.
La première priorité concerne la prévention et la
promotion de la santé des enfants, des adolescents et des jeunes. A cet
égard, la conférence recommande d'organiser la prévention
par une loi d'orientation qui définirait les champs de
compétences, les missions et la formation des acteurs et l'organisation
des financements. Elle recommande aussi de développer l'information des
parents et d'instaurer, pour tous les enfants, dans le cadre de la
scolarité dès la maternelle, vingt heures annuelles
d'éducation pour la santé. Elle recommande enfin de prendre en
compte les difficultés rencontrées par les populations les plus
vulnérables, en augmentant le nombre de lits mère-enfant, en
améliorant le soutien des services de protection maternelle et infantile
et de santé scolaire ainsi que l'accueil des adolescents en
difficulté. Il a estimé que de tels outils permettraient de
mettre en place une politique continue de prévention et de promotion de
la santé.
M. Joël Ménard
a ensuite évoqué la
deuxième priorité retenue par la conférence, qui concerne
la prévention et le dépistage des cancers. Il a justifié
le choix de cette priorité par le fait qu'elle concerne à la fois
la prévention et les soins et par l'absence de progrès
médicaux significatifs, depuis plusieurs années, pour traiter les
cancers les plus fréquents. La conférence recommande de
prévenir simultanément les risques de cancer et de maladies
cardio-vasculaires par des incitations portant sur certains choix alimentaires
et encourageant l'abstinence tabagique et la maîtrise de consommation
d'alcool. Il a estimé que, face aux stratégies des industries
agroalimentaires qui contribuent à promouvoir des habitudes alimentaires
défavorables à la santé des adolescents et qui se
traduisent notamment par une augmentation de l'obésité, les
pouvoirs publics devaient développer des politiques appropriées.
La conférence a également estimé qu'il convenait d'offrir
aux malades cancéreux une prise en charge multidisciplinaire
concertée, pour que tous aient accès à des soins de
qualité et de proximité et d'harmoniser les modalités de
prise en charge tarifaire des médicaments anticancéreux entre les
différents secteurs de distribution des soins.
Puis,
M. Joël Ménard
a évoqué la
troisième priorité sélectionnée par la
conférence, la diminution de l'incidence des infections nosocomiales et
des affections iatrogènes. Il a indiqué qu'il convenait de
renforcer les comités de lutte contre les infections nosocomiales,
notamment dans l'hospitalisation privée, d'attribuer des ressources
financières au renforcement de cette lutte, de réaliser des
enquêtes en médecine ambulatoire et d'harmoniser les
procédures de recueil des informations en milieu hospitalier public et
privé.
M. Jean-Pierre Fourcade, président,
a demandé à M.
Joël Ménard si l'on assistait à un développement des
infections nosocomiales ou si le phénomène était
simplement mieux connu.
M. Joël Ménard
a répondu que l'information sur les
infections nosocomiales était plus importante et qu'il existait
aujourd'hui beaucoup de malades à hauts risques, notamment sur le plan
immunitaire.
M. Mathieu Méreau
a également rappelé
que plus la médecine était invasive, plus elle était
confrontée à des germes résistants.
M. Joël Ménard
a enfin évoqué la
réduction des inégalités de santé inter et
intra-régionales qui constitue la quatrième priorité
retenue par la conférence. Il a estimé que les indicateurs
actuels de santé publique n'étaient pas suffisants pour permettre
une analyse pertinente de ces inégalités. Il a fait part du
souhait de la conférence nationale de santé que les
parlementaires réservent un millième de l'objectif national de
dépenses d'assurance maladie pour mettre en place les systèmes
d'information nécessaires.
M. Jean-Pierre Fourcade, président,
a demandé si les
observatoires régionaux de la santé étaient en mesure de
fournir des données homogènes.
M. Mathieu Méreau
a répondu par l'affirmative et a
souligné l'action efficace menée par la fédération
nationale des observatoires régionaux de la santé. Il a cependant
souligné l'absence de prise en considération des facteurs
déterminants de la santé dans les statistiques produites.
M.
Jacques Vleminckx
a estimé que l'importance du travail à
fournir en la matière au niveau régional constituait un argument
supplémentaire pour la mise en place d'un système d'information
performant.
M. Charles Descours, rapporteur,
a demandé à M. Joël
Ménard si l'action des conférences régionales de
santé était satisfaisante. Il a affirmé que les
parlementaires étaient tout à fait disposés à faire
des choix en matière de santé publique, à condition que la
conférence nationale de santé leur fournisse les
éléments indispensables à la détermination de ces
choix. Il a souligné le risque que le débat sur une loi
d'orientation concernant la santé des jeunes se focalise sur la question
de la légalisation des drogues douces. Evoquant enfin la lutte contre le
cancer, il a jugé utile d'améliorer la formation initiale et
continue des médecins.
M. Jean Chérioux
,
faisant référence aux
habitudes alimentaires des adolescents, a estimé qu'il serait utile
d'étudier la publicité en faveur des produits alimentaires
destinés aux jeunes.
Mme Dinah Derycke
a évoqué les questions du suicide des
adolescents et de la médecine du travail.
M. Claude Huriet
a estimé qu'une analyse des
inégalités entre les régions ne serait pleinement
pertinente que si elle débouchait sur la mise en place d'une politique
régionale de santé. Il a observé que la conférence
nationale de santé formulait des priorités de santé
publique et a demandé à M. Joël Ménard de
préciser les notions de santé et de santé publique. Il a
souhaité que l'action du ministère en matière de lutte
contre les infections nosocomiales ne se traduise pas par la seule production
de circulaires.
M. Jean-Louis Lorrain
,
Mmes Gisèle Printz
et
Nicole
Borvo
ont évoqué les insuffisances de la médecine
scolaire.
Enfin,
M. Jean-Pierre Fourcade, président,
a demandé
à M. Joël Ménard quelle était son appréciation
sur l'activité des centres anticancéreux.
Répondant aux orateurs,
M. Claude Bouchet
a rappelé que la
prévention du suicide des jeunes était une des priorités
retenues par un grand nombre de conférences régionales de
santé et que la dimension de la souffrance psychologique des adolescents
avait été prise en compte par la conférence nationale de
santé. Il a estimé qu'il fallait remédier à
l'enchevêtrement des responsabilités en matière de
prévention et définir de nouvelles formes d'organisation et de
financement.
Evoquant la médecine scolaire,
Mme Isabelle Tamalet
a conclu
à la nécessité d'un travail en continu, associant tous les
acteurs et qui intégrerait une dimension de prévention
psychosociale.
M. Jacques Vleminckx
a indiqué que le travail des
conférences régionales de santé était en voie
d'harmonisation.
M. Olivier Joyeux
a rappelé que les centres anticancéreux
ne traitaient qu'environ 20 % des malades et que leur grand mérite avait
été la mise en place de réseaux. Il a souligné la
nécessité de revoir la formation des médecins en
cancérologie.
Enfin,
M. Joël Ménard
a estimé qu'il ne fallait pas
introduire de dichotomie entre les notions de santé et de santé
publique. Evoquant la lutte contre les infections nosocomiales, il a
indiqué que la publication d'une circulaire s'accompagnerait de
l'annonce d'inspections.