PJL loi de finances pour 1999
MARINI (Philippe)
RAPPORT GENERAL 66 (98-99), Tome I - COMMISSION DES FINANCES
Table des matières
- INTRODUCTION
-
CHAPITRE PREMIER
LA CROISSANCE ET LES INCERTITUDES
-
CHAPITRE II
L'ÉQUILIBRE DU PROJET DE LOI
DE FINANCES POUR 1999- I. INTRODUCTION : LES TROIS PRÉSENTATIONS DE L'ÉQUILIBRE BUDGÉTAIRE
-
II. UN EFFORT DE RÉDUCTION DU DÉFICIT INSUFFISANT ET
INCERTAIN
-
A. UN EFFORT INSUFFISANT
- 1. Un déficit globalement réduit mais qui reste à un niveau inacceptable
- 2. Un effort pour parvenir à l'équilibre primaire, insuffisant toutefois pour stabiliser la part de la dette publique dans le PIB
- 3. Une réduction du déficit à l'égard de la loi de finances initiale pour 1998 peut correspondre à une dégradation par rapport à son exécution probable.
-
B. UN EFFORT INCERTAIN
- 1. Un accroissement des dépenses rigides, financé par un surcroît de recettes volatiles, et qui laisse subsister un déficit de fonctionnement important
- 2. Une amélioration du déficit appuyée sur la conjoncture et non sur des réformes : la persistance d'un déficit structurel élevé
- 3. La réduction du déficit de l'ensemble des administrations publiques ne repose pas sur les efforts de l'Etat
-
A. UN EFFORT INSUFFISANT
-
III. UNE ABSENCE DÉLIBÉRÉE DE MAÎTRISE DES
DÉPENSES DU BUDGET GÉNÉRAL
- A. UN OBJECTIF POLITIQUE : ACCROÎTRE LA DÉPENSE PUBLIQUE EN VOLUME
- B. UNE PROGRESSION DES DÉPENSES DU BUDGET GÉNÉRAL DE 36,9 MILLIARDS DE FRANCS
- C. LE RENFORCEMENT DU POIDS DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT
- D. LE SOUCI DU GOUVERNEMENT : FINANCER SES PRIORITÉS
- E. LA POURSUITE DE LA "RIGIDIFICATION" DE LA DÉPENSE PUBLIQUE
-
F. DE SÉRIEUX RISQUES DE DÉRIVE BUDGÉTAIRE POUR
L'AVENIR
-
1. Une montée en charge fortement progressive des projets prioritaires
du gouvernement
- a) la loi contre les exclusions : 9,4 milliards de francs en 2000
- b) le plan " emplois-jeunes " : 32 milliards de francs à compter du 1er janvier 2001
- c) les 35 heures : coût brut budgétaire de 7 milliards de francs en 1999
- d) l'accord salarial dans la fonction publique : 23,3 milliards de francs en 2000
- e) Le plan social étudiant : 7,2 milliards de francs sur quatre ans
- 2. Des projets annoncés mais non financés par le projet de loi de finances pour 1999
-
3. L'explosion programmée des retraites de la fonction publique
- a) La situation démographique du régime de retraite de la fonction publique d'État
-
b) les perspectives d'évolution financière
- (1) D'après les chiffres du Commissariat général au Plan (rapport Briet de 1995), la croissance serait "rapide et cumulative".
- (2) Pour la Direction du Budget (chiffrage de 1997) :
- (3) Pour la Cour des Comptes qui le souligne régulièrement dans ses rapports notamment sur l'exécution des budgets, " l'évolution des charges de pension constitue une hypothèque sérieuse pour les budgets futurs .
- c) un effort de clarification est indispensable
-
1. Une montée en charge fortement progressive des projets prioritaires
du gouvernement
- IV. DES RECETTES EN EXPANSION
-
CHAPITRE III
L'ANALYSE DES FINANCES PUBLIQUES AU REGARD DES ENGAGEMENTS EUROPÉENS DE LA FRANCE- I. LA FRANCE, "MAUVAIS ÉLÈVE" DE L'EUROPE
- II. LE PARI DU RETOUR DE LA SÉCURITÉ SOCIALE A UNE SITUATION EXCEDENTAIRE
-
III. UNE HYPOTHÈSE D'EXCÉDENT DES COLLECTIVITÉS LOCALES
QUI NE TIENT PAS COMPTE DES CHARGES NOUVELLES IMPOSÉES PAR L'ETAT
- A. COMMENT LES COLLECTIVITÉS LOCALES PEUVENT-ELLES DÉGAGER UNE CAPACITÉ OU UN BESOIN DE FINANCEMENT ?
- B. LE GOUVERNEMENT A ÉTABLI SA PROJECTION POUR 1999 EN PROLONGEANT LES TENDANCES DE LA PÉRIODE RÉCENTE
- C. L'ESSOUFFLEMENT DES FACTEURS DE L'ASSAINISSEMENT DE LA SITUATION FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS LOCALES
-
CHAPITRE IV
PROPOSITIONS POUR UN BUDGET DE RESPONSABILITÉ ET DE CONFIANCE- I. CONTRIBUER À STABILISER LA DETTE PUBLIQUE DÈS 1999
-
II. LA NÉCESSAIRE RÉDUCTION DES DÉPENSES PUBLIQUES
- A. LE POSTULAT DU GOUVERNEMENT : "UNE MEILLEURE EFFICACITÉ DE LA DÉPENSE PUBLIQUE"
- B. LA NÉCESSITÉ D'ALLER AU-DELÀ
-
C. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
-
1. Des économies ciblées
- a) La suppression des crédits destinés aux 35 heures
- b) La suppression d'un montant de crédit représentatif des mesures nouvelles concernant les emplois jeunes
- c) Les mesures relatives à l'épargne logement et au logement
- d) Les mesures relatives à la Santé et à la Solidarité
- e) La réduction des crédits d'action sociale figurant au budget des services généraux du premier ministre (SGPM)
- f) La suppression des mesures nouvelles concernant les dépenses accidentelles ou éventuelles
- g) La suppression des mesures nouvelles au titre de l'indemnité compensatrice versée à la RATP
- 2. Des économies forfaitaires
-
1. Des économies ciblées
-
III. ALLÉGER LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
- A. ENGAGER UNE DIMINUTION RÉELLE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
- B. RÉFORMER L'IMPÔT SUR LE REVENU
- C. STABILISER L'IMPOSITION DU PATRIMOINE
- IV. FAIRE CONFIANCE AUX COLLECTIVITÉS LOCALES
- V. RÉNOVER NOS MÉTHODES BUDGÉTAIRES
- EXAMEN EN COMMISSION
N° 66
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès verbal de la séance du 19 novembre 1998.
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1999, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME I
LE BUDGET DE 1999
ET SON CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Alain Lambert,
président
; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude
Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet,
vice-présidents
; Jacques-Richard Delong, Marc Massion,
Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Philippe
Marini,
rapporteur général
; Philippe Adnot, Denis
Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse
Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin,
Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean
Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard,
Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude
Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne,
Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri
Torre, René Trégouët.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1078
,
1111
à
1116
et T.A.
193
.
Sénat
:
65
(1998-1999).
Lois de finances. |
INTRODUCTION
Le
projet de loi de finances pour 1999 est le premier "budget de l'euro" pour la
France. Ce n'est toutefois pas sa dimension principale, car ses
priorités sont d'ordre purement interne.
Fondé sur une hypothèse de croissance optimiste, mais qui n'est
pas en soi très élevée (la fin des années 80 a
été bien meilleure), ce projet de loi de finances encourt deux
reproches.
Le premier est de ne pas permettre, malgré des recettes en forte
expansion, une stabilisation du poids de la dette publique dans le produit
intérieur brut. Certes, la France s'achemine vers cette stabilisation,
mais elle ne l'accomplira pas dès 1999. Or, après presque vingt
ans de progression continue, il aurait été nécessaire de
saisir la première occasion de commencer à lever cette
hypothèque sur les générations futures, ainsi que l'ont
fait la quasi-totalité de nos partenaires européens.
Le deuxième est de fonder exclusivement l'assainissement financier de la
France sur la situation conjoncturelle, et non sur d'indispensables
réformes de structure. A cet égard, ce n'est pas tant
l'hypothèse de croissance qui est en cause, que le fait que le
gouvernement en fasse entièrement dépendre l'amélioration
de nos finances publiques.
Après avoir examiné les hypothèses économiques qui
le sous-tendent, le présent rapport analyse l'équilibre du projet
de loi de finances en solde, en recettes et en dépenses. Il
élargit ensuite son horizon à l'ensemble des administrations
publiques, vision indispensable à l'appréciation de la situation
de la France en Europe. Il formule enfin un certain nombre de propositions sur
les réformes à entreprendre pour assainir durablement nos
finances publiques.
CHAPITRE PREMIER
LA CROISSANCE ET LES INCERTITUDES
La
prévision économique est un art de plus en plus difficile, les
outils du prévisionniste paraissant soumis à une obsolescence
rapide du fait de la survenance de nouvelles réalités
économiques.
Les modèles macro-économiques ont été de
précieux réducteurs d'incertitude. Fondés sur
l'utilisation d'études économétriques aptes à
mettre en relation certaines évolution avec diverses variables
explicatives, ils ont contribué à préciser les
problématiques et à asseoir les prévisions.
Mais, outre que les grands modèles disponibles ont toujours
nécessité qu'on pose, pour les utiliser, des hypothèses
" hors-modèle ", il semble que, sous l'effet
d'évolutions économiques majeures, les relations
économétriques, qui en constituent le squelette, se soient de
plus en plus distendues :
Dans un monde devenu très interdépendant
l'incapacité de la plupart des modèles à dépasser
le cadre national constitue une première infirmité.
Dans un monde où les sphères réelle et
financière, cette dernière en expansion instable,
s'entremêlent, l'absence de capacité à modéliser
avec efficacité les événements financiers est
évidemment un handicap de taille.
Enfin, dans un monde où les comportements évoluent et se
modifient rapidement, le recours à la " série longue "
ne garantit plus contre la contestation de l'instrument.
C'est évidemment lorsque le contexte économique est agité
que le modèle est le plus fragile et la prévision tout
particulièrement difficile. Et c'est bien un tel contexte qui se
présente à l'orée de 1999. Aux crises des pays
émergents, du Japon, de la finance, s'ajoutent le retournement
escompté du cycle américain et un événement
monétaire et financier majeur, l'avènement de l'euro.
Dans ces conditions, il est bien périlleux de prévoir quelle
tournure prendra l'économie française en 1999. Mais il est encore
plus périlleux de faire comme si une prévision donnée
allait se vérifier.
Il est sage de garder à l'esprit les aléas qui pourraient
constituer autant d'écueils sur lesquels viendrait se heurter la
prévision du gouvernement. Nul ne souhaite évidemment que ces
aléas se réalisent. Bien au contraire, la croissance
économique est nécessaire pour résorber les
difficultés du pays. Mais il faut conserver la lucidité
indispensable à la formulation d'une bonne politique économique.
Dans ce contexte, la pertinence de nos outils de politique économique et
tout particulièrement de nos méthodes budgétaires ne
paraît pas établie.
Regards sur 1998
Ressources et emplois de biens et services
en milliards de francs et en pourcentage de variation t/t-1
|
En volume |
En valeur |
||||||
|
1998 |
|
|
1998 |
|
|
||
|
T1 |
T2 |
1997 |
Acquis1998 |
T1 |
T2 |
1997 |
Acquis 1998 |
Produit intérieur brut |
992,4 |
998,8 |
3.889,8 |
|
2.081,1 |
2.102,6 |
8.127,6 |
|
en % t/t-1 |
0,7 |
0,6 |
2,3 |
2,5 |
0,8 |
1,1 |
3,3 |
3,2 |
Importations |
320,7 |
322,2 |
1.206,3 |
|
494,8 |
496,4 |
1.853,3 |
|
en % t/t-1 |
2,5 |
0,5 |
7,7 |
6,7 |
2,3 |
0,3 |
9,5 |
7,0 |
Total des ressources |
1.313,1 |
1.321,0 |
5.096,0 |
|
2.575,0 |
2.598,9 |
9.980,9 |
|
en % t/t-1 |
1,2 |
0,6 |
3,6 |
3,5 |
1,1 |
0,9 |
4,4 |
3,9 |
Consommation finale des ménages |
|
|
|
|
|
|
|
|
en % t/t-1 |
0,7 |
1,0 |
0,9 |
2,9 |
0,7 |
1,2 |
2,0 |
3,2 |
Consommation finale des adm. |
188,3 |
189,1 |
747,3 |
|
404,2 |
408,1 |
1.595,3 |
|
en % t/t-0,3 |
0,3 |
0,4 |
1,2 |
1,1 |
0,3 |
1,0 |
2,3 |
2,1 |
FCBF totale |
194,3 |
196,2 |
756,9 |
|
356,8 |
360,6 |
1.389,0 |
|
en % t/t-1 |
1,9 |
1,0 |
0,0 |
3,4 |
1,6 |
1,1 |
1,2 |
3,6 |
Exportations |
338,0 |
336,7 |
1.287,6 |
|
573,3 |
572,0 |
2.169,2 |
|
en % t/t-1 |
0,8 |
- 0,4 |
12,5 |
4,7 |
0,9 |
- 0,2 |
14,3 |
5,5 |
Variations de stocks |
1,9 |
2,2 |
- 9,3 |
|
- 2,5 |
0,6 |
- 30,9 |
|
Total des emplois |
1.313,1 |
1.321,0 |
5.096,0 |
|
2.575,0 |
2.598,9 |
9.980,9 |
|
en % t/t-1 |
1,2 |
0,6 |
3,6 |
3,5 |
1,1 |
0,9 |
4,4 |
3,9 |
La
croissance du PIB au premier trimestre 1998 a été proche de
3 % en rythme annuel sous l'effet d'un dynamisme à peu près
maintenu de la consommation des ménages et, en voie
d'accélération, de l'investissement des entreprises.
Autrement dit, la demande intérieure compense les effets
défavorables du commerce extérieur sur la croissance. En effet,
les importations ont augmenté sensiblement plus vite que les
exportations au premier semestre même si leur progression se ralentit.
Ces dernières se sont même contractées de 0,2 % au
deuxième trimestre, alors qu'à la même période elles
s'accroissaient en 1997 de 6,6 %. Le tassement du commerce mondial
consécutif à la crise traversée par nombre de pays est
à l'oeuvre dans l'économie française.
A l'issue du premier semestre l'acquis de croissance -qui mesure ce que serait
la croissance annuelle d'une variable économique si celle-ci restait au
cours du reste de l'année à son dernier niveau observé-
s'élève à 2,5 % en volume. La réalisation
d'une croissance de 3,1 % pour l'année en cours suppose donc une
accélération de l'activité au cours du second semestre.
Les prévisions de l'INSEE rendent, de fait, compte d'une
accélération de la croissance au troisième trimestre
suivie d'une légère inflexion à la fin de l'année.
Au quatrième trimestre, le rythme de la croissance annuelle
décélérerait, passant à 2,5 %.
A l'aube de 1999, l'acquis de croissance ne serait plus que de
1 %.
I. LES HYPOTHESES DE CROISSANCE
La prévision de croissance pour 1999 associée par le gouvernement au projet de loi de finances s'élève à 3,8 % en valeur , résultat d'une progression en volume de 2,7 % et d'une augmentation du prix du produit intérieur brut de 1,1 %.
Equilibre des ressources et emplois de biens et services
(en milliards de francs et en indices)
|
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
|||
|
Valeur aux prix courants |
Indice
|
Valeur aux prix courants |
Indice de volume |
Valeur aux prix courants |
Indice de volume |
Valeur aux prix courants |
Ressources |
|
|
|
|
|
|
|
Produit intérieur brut |
7.871,7 |
102,2 |
8.137,1 |
103,1 |
8.495,9 |
102,7 |
8.821,4 |
Importations |
1.692,2 |
107,9 |
1.848,0 |
108,3 |
1.996,1 |
105,2 |
2.130,9 |
TOTAL DES RESSOURCES |
9.663,9 |
103,2 |
9.985,1 |
104,1 |
10.492,0 |
103,1 |
10.952,3 |
Emplois |
|
|
|
|
|
|
|
Consommation finale des ménages |
4.763,5 |
100,7 |
4.857,3 |
103,1 |
5.052,9 |
102,7 |
5.256,8 |
Consommation finale des administrations |
1.559,0 |
101,1 |
1.593,7 |
101,8 |
1.650,7 |
101,7 |
1.704,7 |
Formation brute de capital fixe |
1.372,1 |
100,2 |
1.388,1 |
103,8 |
1.457,5 |
104,2 |
1.534,2 |
dont : |
|
|
|
|
|
|
|
Sociétés et E.I. (1) |
765,6 |
99,9 |
763,6 |
105,7 |
816,9 |
105,7 |
872,1 |
Ménages hors E.I. (1) |
351,1 |
99,8 |
362,2 |
100,4 |
368,0 |
102,0 |
379,1 |
Administrations publiques |
227,5 |
100,1 |
230,1 |
102,3 |
238,2 |
102,8 |
247,3 |
Administrations privées |
5,1 |
101,7 |
5,2 |
102,3 |
5,4 |
102,8 |
5,6 |
Institutions de crédit et assurances |
22,9 |
118,8 |
27,0 |
106,3 |
29,1 |
102,8 |
30,2 |
Variations de stocks |
- 28,3 |
|
- 22,5 |
|
2,2 |
|
6,1 |
Exportations |
1.897,7 |
113,0 |
2.168,5 |
106,8 |
2.328,7 |
104,2 |
2.450,4 |
TOTAL DES EMPLOIS |
9.563,9 |
103,2 |
9.985,1 |
104,1 |
10.492,0 |
103,1 |
10.952,3 |
dont : |
|
|
|
|
|
|
|
Demande totale hors stocks |
9.592,3 |
103,1 |
10.007,6 |
103,8 |
10.489,8 |
103,1 |
10.946,2 |
Demande intérieure totale |
7.666,2 |
100,8 |
7.816,6 |
103,3 |
8.163,3 |
102,8 |
8.501,8 |
Demande intérieure hors stocks |
7.694,6 |
100,7 |
7.839,1 |
103,0 |
8.161,2 |
102,8 |
8.495,8 |
Pour le
Produit Intérieur Brut Marchand :
1996 : Indice de volume : 101,1 - Indice de prix : 101,3
1997 : Indice de volume : 102,4 - Indice de prix : 101,1
1998 : Indice de volume : 103,3 - Indice de prix : 101,2
1999 : Indice de volume : 102,8 - Indice de prix : 101,1
(1) E.I. : Entrepreneurs individuels.
Source : Rapport économique, social et financier. Projet de loi de finances pour 1999
Décomposition du supplément de croissance
prévu pour 1999
|
En milliards de francs |
En % |
Emplois |
|
|
Consommation des ménages |
+ 203,9 |
+ 4 |
Consommation des administrations |
+ 54 |
+ 3,3 |
Formation brute de capital fixe |
+ 76,7 |
+ 5,3 |
dont : |
|
|
Sociétés et E.I. |
+ 55,2 |
+ 6,8 |
Ménages |
+ 11,1 |
+ 3 |
Autres |
+ 10,4 |
+ 3,8 |
Variations de stocks |
+ 4 |
+ 2,8 |
Exportations |
+ 121,7 |
+ 5,2 |
Total |
+ 460,3 |
+ 4,4 |
Ressources |
|
|
PIB |
+ 325,5 |
+ 3,8 |
Importations |
+ 134,8 |
+ 6,8 |
Total |
+ 460,3 |
+ 4,4 |
La
croissance serait soutenue par une forte progression de la demande
intérieure qui augmenterait de 4,1 %. Le PIB s'accroîtrait
sur un rythme un peu inférieur, de 3,8 %, du fait d'une
pénétration accentuée des biens importés avec une
croissance des importations de 6,8 %, plus rapide que celle de la
production nationale. La variation des exportations serait moins importante,
mais toutefois positive. Elles progresseraient de 5,2 % si bien que la
contribution à la croissance du commerce extérieur serait un peu
défavorable.
Le tableau suivant récapitule l'évolution de la structure des
grandes composantes du PIB.
Principales contributions à la croissance du PIB
Taux de croissance annuel moyen en %
|
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Consommation des ménages |
0,9 |
1,1 |
0,4 |
1,9 |
1,6 |
Consommation des administrations |
0,0 |
0,5 |
0,2 |
0,4 |
0,3 |
Formation brute de capital fixe totale |
0,4 |
- 0,2 |
0,0 |
0,6 |
0,7 |
Dont : sociétés et EI |
0,3 |
0,0 |
0,0 |
0,5 |
0,5 |
Variations de stocks |
0,4 |
- 0,6 |
0,1 |
0,3 |
0,0 |
Commerce extérieur |
0,3 |
0,5 |
1,4 |
- 0,1 |
- 0,1 |
Dont : exportations |
1,3 |
1,3 |
3,1 |
1,8 |
1,2 |
importations |
- 1,0 |
- 0,7 |
- 1,7 |
- 1,9 |
- 1,3 |
PIB |
2,0 |
1,3 |
2,2 |
3,1 |
2,7 |
Source : Rapport économique, social et
financier.
Projet de loi de finances pour 1999.
Dans un contexte de ralentissement de l'activité économique
marqué par un infléchissement du rythme de croissance, passant de
3,1 % en 1998 à 2,7 % en 1999, le scénario
économique retenu pour l'an prochain est analogue à celui de 1998
et prolonge la rupture alors constatée par rapport à 1997.
Si, en 1997, l'essentiel de la croissance est venu du commerce extérieur
avec un dynamisme sans précédent des exportations, le relais pris
en 1998 par la demande intérieure continuerait de produire ses effets en
1999 d'une façon très légèrement
atténuée. Symétriquement, la contribution à la
croissance du commerce extérieur faiblement négative en 1998
demeurerait telle en 1999, sans changement.
A. UNE CONTRIBUTION DU COMMERCE EXTÉRIEUR À LA CROISSANCE MODÉRÉMENT NÉGATIVE
Comme en
1998, le scénario économique du gouvernement retient une
contribution à la croissance du commerce extérieur
négative. En un mot, le solde du commerce extérieur, qui
resterait très largement positif, se dégraderait toutefois un peu
sous l'effet d'une progression des importations (+ 6,8 %) plus rapide
que celle des exportations (+ 5,2 %).
Il est instructif de mettre ces données en perspective.
Pour cela, on peut d'abord se reporter aux évolutions récentes
des importations et des exportations.
En ce qui concerne les importations, le tableau ci-après en rappelle les
évolutions depuis 1997 en distinguant les variations de leur volume et
celle de leurs prix.
Variation des importations
(en %)
|
1997 |
1998 |
1999 |
Volume |
7,9 |
8,3 |
5,2 |
Prix |
1,2 |
- 0,3 |
1,5 |
Total |
9,2 |
8 |
6,8 |
On peut
alors souligner qu'en 1999 on attend une nette baisse de la croissance du
volume des importations qui ne progresserait qu'à hauteur des 2/3 de
leur variation en 1998, mais également une progression sensible des prix
des biens importés. Au total, le ralentissement du rythme
d'accroissement des importations en valeur nominale se traduirait par une
augmentation inférieure de seulement 0,15 point par rapport
à celle enregistrée en 1998.
Quant aux exportations, un tableau analogue leur est consacré
ci-après :
Variation des exportations
(en %)
|
1997 |
1998 |
1999 |
Volume |
13 |
6,8 |
4,2 |
Prix |
1,1 |
0,5 |
1 |
Total |
14,2 |
7,3 |
5,2 |
Il en
ressort qu'entre 1997 et 1999 le rythme annuel de progression des exportations
serait divisé par presque trois, mais surtout que la progression
nominale des exportations en 1999, retenue dans la prévision du
gouvernement, proviendrait pour beaucoup d'une hypothèse de prix plus
favorable qu'en 1998.
Moyennant un maintien du rythme de croissance des prix des produits
exportés au niveau atteint en 1998, la progression nominale des
exportations ne serait que de 4,7 % l'an prochain, l'excédent
extérieur s'en trouvant diminué de 11,5 milliards de francs,
soit 0,13 point de PIB en moins.
On peut également mettre en perspective les données du
commerce extérieur avec quelques grandes variables économiques.
S'agissant des importations, il est utile de mettre en rapport la variation de
leur volume et celui du PIB.
|
1997 |
1998 |
1999 |
Variation 99/98 en % |
Variation des importations en volume |
7,9 |
8,3 |
5,2 |
- 37,3 |
Variation du PIB en volume |
2,2 |
3,1 |
2,7 |
- 12,9 |
Dans
l'ensemble, on peut observer une
asymétrie entre les variations des
rythmes de croissance du PIB et des importations
. Autrement dit, il n'y a
pas de parallélisme rigoureux entre les inflexions de l'activité
économique intérieure et les évolutions du volume des
importations qu'on peut constater. La très forte augmentation des
importations en 1997 doit être gardée à l'esprit,
même si elle a pu être considérée comme très
atypique. Elle démontre en tout cas que des "accidents" peuvent
survenir, même si la reprise de l'activité économique en
1997 a pu contribuer à expliquer la variation des importations cette
année là.
En tout cas, on peut relever que
la modération du rythme de
croissance en volume des importations escomptée en 1999 suppose, de leur
part, un infléchissement plus important que celui de l'activité
intérieure.
A son tour, ce résultat est conditionné
par l'exactitude des hypothèses posées sur l'évolution des
prix des importations en 1999 qui, dans le scénario du gouvernement,
passeraient d'une baisse en 1998 (- 0,3 %) à une hausse de
1,5 % en 1999.
S'agissant des exportations, il faut les mettre en rapport avec la demande
étrangère.
|
1997 |
1998 |
1999 |
Variation des exportations en volume |
13 |
6;8 |
4,2 |
Variation du commerce mondial en volume |
10,1 |
7,3 |
5,3 |
Variation de la demande adressée à la France |
9,4 |
7,3 |
5,4 |
La croissance du commerce mondial serait divisée par 2 entre 1997 et 1999 et la demande adressée à la France connaîtrait un sort semblable. La baisse du volume des exportations décrite dans les budgets économiques apparaît cohérente avec ces hypothèses qui restent à évaluer.
B. LA DEMANDE INTÉRIEURE, UN PEU MOINS DYNAMIQUE QU'EN 1998, EXPLIQUE L'INTÉGRALITÉ DE LA CROISSANCE ESPÉRÉE EN 1999
Passage de la croissance en volume du PIB
entre 1998 et
1999
(1)
Croissance du PIB en 1998 |
3,1 |
Ecart entre la consommation des ménages en 1998 et 1999 |
- 0,3 |
Ecart entre la FBCF en 1998 et 1999 |
+ 0,1 |
dont sociétés et entreprises individuelles |
0 |
Ecart entre la contribution au PIB des variations de stocks en 1998 et 1999 |
- 0,2 |
Croissance du PIB en 1999 |
2,7 |
(1)
Les arrondis ont été corrigés sur les variations de
stocks.
Le tableau ci-dessus démontre que la baisse du rythme de la consommation
des ménages en volume et celle de la contribution des stocks à la
croissance expliqueraient le ralentissement de la croissance en 1999 alors que
l'investissement connaîtrait un dynamisme à peu près
inchangé (+ 0,1 point de PIB).
La hausse de la consommation des ménages serait continue.
La croissance de la consommation des ménages passerait de 3,1 %
à 2,7 % en volume de 1998 à 1999. Exprimée en valeur,
la progression de la consommation des ménages resterait stable en 1999.
Le comportement de consommation des ménages serait " grosso
modo " le reflet de l'évolution de leur revenu disponible brut dont
le tableau ci-dessous rappelle l'évolution depuis 1995.
Evolution en termes réels* du revenu disponible des
ménages
(en moyenne annuelle en %)
Taux de croissance annuel |
|
Contribution croissance du RDB |
||||||||
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
|
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2,2 |
0,9 |
1,6 |
3,0 |
2,9 |
Revenus d'activité dont |
1,7 |
0,7 |
1,3 |
2,4 |
2,3 |
2,1 |
1,0 |
1,7 |
3,0 |
2,7 |
Salaires bruts |
1,1 |
0,5 |
0,9 |
1,6 |
1,4 |
2,4 |
0,6 |
1,5 |
3,2 |
3,2 |
EBE 1 des ménages (y compris EI²) |
0,6 |
0,1 |
0,4 |
0,8 |
0,8 |
|
|
|
|
|
Transferts nets dont |
0,1 |
- 0,3 |
0,3 |
- 0,2 |
- 0,3 |
1,7 |
1,7 |
2,0 |
2,1 |
1,2 |
Prestations sociales |
0,6 |
0,6 |
0,7 |
0,8 |
0,4 |
2,4 |
4,1 |
1,7 |
4,3 |
3,1 |
Impôts et cotisations dont |
- 0,5 |
- 0,9 |
- 0,4 |
- 1,0 |
- 0,7 |
2,5 |
3,4 |
- 3,5 |
- 20,8 |
0,9 |
Cotisations sociales |
- 0,3 |
- 0,4 |
0,4 |
2,4 |
- 0,1 |
2,3 |
5,0 |
7,6 |
29,5 |
4,5 |
Impôts y compris CSG et RDS |
- 0,2 |
- 0,5 |
- 0,8 |
- 3,3 |
- 0,6 |
11,5 |
1,0 |
8,1 |
7,2 |
6,6 |
Intérêts, dividendes et div. nets |
0,8 |
0,1 |
0,6 |
0,6 |
0,6 |
2,6 |
0,4 |
2,2 |
2,8 |
2,5 |
Revenu disponible brut |
2,6 |
0,4 |
2,2 |
2,8 |
2,5 |
*Calculé en utilisant le déflateur de la
consommation
des ménages dans les comptes aux prix de l'année
précédente.
1. EBE : Excédent brut d'exploitation
2. EI : Entrepreneurs individuels
Source : INSEE, Direction de la prévision
Les gains de pouvoir d'achat des ménages seraient un peu moins importants en 1999 qu'en 1998 (2,5 % contre 2,8 %). La progression des revenus d'activité serait un peu inférieure au rythme observé l'an passé (+ 2,9 % contre + 3 %). Cela résulterait d'une croissance du pouvoir d'achat du taux de salaire par tête de 1,2 %, contre 1,3 % en 1998, combinée à une croissance du nombre des emplois de 1,3 %.
Evolution du taux de salaire horaire et du salaire moyen par
tête
(entreprises non financières non agricoles)
(en moyenne annuelle en %)
|
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Taux de salaire horaire en valeur |
4,4 |
3,3 |
2,5 |
2,5 |
2,6 |
2,7 |
2,3 |
2,8 |
Salaire moyen par tête : |
|
|
|
|
|
|
|
|
- en valeur |
4,0 |
2,8 |
2,5 |
2,3 |
2,6 |
2,8 |
2,2 |
2,5 |
- en pouvoir d'achat |
1,5 |
0,5 |
0,4 |
0,6 |
0,6 |
1,6 |
1,3 |
1,2 |
Source : INSEE, Direction de la prévision
Evolution de l'emploi (en moyenne annuelle et en milliers)
|
1997 |
1998 |
1999 |
- Emploi marchand salarié |
+ 84 |
+ 229 |
+ 230 |
dont RTT |
|
+ 2 |
+ 54 |
- Emploi non marchand |
+ 26 |
+ 80 |
+ 93 |
- Emploi non salarié |
- 39 |
- 28 |
- 23 |
- Emploi total |
+ 69 |
+ 282 |
+ 300 |
Source : Rapport économique, social et financier.
Projet
de loi de finances pour 1999.
On doit relever l'absence d'effet notable de la réduction du temps de
travail (RTT) sur la variation du salaire par tête, alors que le
scénario du gouvernement fait l'hypothèse d'un effet de la RTT
sur le volume de l'emploi de 54.000 unités l'an prochain, ce qui
suppose qu'une proportion non négligeable des salariés serait
concernée par les accords prévus par la loi.
Si cette hypothèse ne se vérifiait pas, la croissance de l'emploi
marchand salarié serait ramenée à
178.000 salariés contre 229.000 en 1998, soit une inflexion d'un
quart du rythme de progression de l'emploi salarié, un peu
supérieure à celle de la croissance du PIB.
La progression des créations d'emplois non marchands doit être
soulignée : de 26.000 en 1997, leur nombre passerait à
80.000 en 1998 et à 93.000 en 1999.
Ainsi, les effets cumulés
de la RTT et des politiques de subventionnement des emplois non marchands
expliqueraient près de 50 % des créations d'emplois en
1999
, après avoir contribué à la création de
29 % des emplois en 1998.
Hors ces mesures, les créations d'emplois se seraient
élevées en tendance à 200.000 en 1998 et 153.000 en 1999,
soit une évolution à peu près conforme à la
réduction du rythme de croissance attendue l'an prochain.
La formation du pouvoir d'achat du revenu des ménages appelle une
observation pour souligner
l'amplification en 1999 de l'effet
défavorable pour les ménages des "transferts nets" qui illustre
en affichage l'orientation restrictive donnée à la gestion des
finances sociales.
On doit constater la poursuite de la croissance des prélèvements
opérés sur le revenu des ménages qui, après
s'être accrus de 4,3 % en 1998, augmenteraient encore de 3,1 %
en 1999. Cette perspective, au terme de laquelle la pression "fiscalo-sociale"
sur les ménages s'accroîtrait, mais moins que l'an passé,
est elle-même dépendante dans son ampleur de la capacité
à maîtriser le rythme de progression des prestations sociales.
On doit noter qu'en la matière, la prévision du gouvernement
s'accompagne d'une progression du volume des prestations sociales de
1,2 %, qu'on peut utilement rapprocher de la croissance des
dépenses sociales versées par l'Etat qui serait de 3,5 % en
1999. On doit regretter une telle distorsion entre le sort des prestataires de
l'Etat et celui des autres prestataires sociaux.
Pour conclure, il faut enfin noter que le rythme de croissance de la
consommation des ménages tel qu'il est prévu -une augmentation un
peu supérieure, 2,7 % contre 2,5 %, à celle du pouvoir
d'achat de leur revenu- est tributaire d'une légère diminution du
taux d'épargne qui reculerait de 0,2 point, passant de 14,3
à 14,1 %.
En ce qui concerne la demande des entreprises
, la prévision du
gouvernement n'en escompte une légère inflexion en 1999 que du
fait des variations des stocks dont la contribution à la croissance en
1998 serait importante (+ 0,3 point de PIB) pour s'annuler ou presque
en 1999.
Stocks et activité
Dans la
définition qu'en donne le système élargi de
comptabilité nationale, "les stocks comprennent tous les biens autres
que les biens de capital fixe, détenus à un moment donné
par les unités productrices résidentes".
Dans les comptes de patrimoine des secteurs institutionnels, le montant des
stocks est estimé à 1.600,2 milliards de francs pour 1997,
en hausse de 3,4 milliards de francs par rapport à 1996.
Les stocks constituent une production non vendue. Leur niveau résulte
donc d'un décalage entre l'offre et la demande de produits. Lorsque
celle-ci augmente moins que celle-là, le niveau des stocks
s'accroît mécaniquement puis se résorbe à mesure que
les producteurs s'adaptent à la demande.
Mais, si les variations de stocks résultent de la croissance, elles
l'influencent aussi. Les phénomènes de déstockage
amortissent la croissance, elles l'influencent aussi. Les
phénomènes de déstockage amortissent la croissance de
l'activité dès lors que la progression de la demande peut
être satisfaite par la production déjà
réalisée que sont les stocks.
A ces relations mécaniques, il faut ajouter deux
phénomènes qui revêtent une certaine actualité. Le
niveau des stocks ne dépend en effet pas que de réglages
automatiques ; il résulte aussi de comportements des entreprises. A
ce propos il convient de souligner :
- que les entreprises ont adopté ces dernières années un
comportement de plus en plus marqué de réduction de leurs stocks,
popularisé sous la dénomination de politique de "zéro
stock" ou encore de "flux tendus" ; ce comportement structurel pourrait
expliquer la tendance au déstockage observée sur moyenne
période ;
- et, surtout, que le niveau jugé souhaitable des stocks dépend
de l'appréciation que se forment les entreprises d'une série de
variables économiques.
Celles-ci peuvent être objectives : le coût financier de
détention des stocks dépend du niveau du coût de l'argent.
Elles peuvent être plus conjecturales lorsqu'il s'agit d'estimer la
croissance future de la demande ou encore l'évolution prévisible
du prix de vente dans leurs secteurs d'activités.
Les relations entre les stocks et l'activité empruntent donc deux
voies :
- les stocks contribuent, par leur variation, à expliquer le rythme de
croissance ;
- le rythme de croissance escompté et la valeur attendue des biens
expliquent les variations des stocks.
Ni les perspectives des prix, ni les perspectives de croissance en 1999 ne
justifient en effet une augmentation des stocks des entreprises.
L'investissement
des entreprises progresserait, quant à lui, en
1999 comme en 1998, de 5,7 % en volume. La référence
à 1998 est toutefois problématique puisque la probabilité
d'une augmentation de l'investissement des entreprises très
supérieure aux prévisions pour 1998 est grande. L'investissement
des entreprises s'est en effet accru de près de 10 % en rythme
annuel au cours du premier semestre.
Si ce rythme devait se maintenir, l'augmentation des capacités de
production qui en résulterait pourrait déboucher sur une
détente des taux d'utilisation des capacités de production dans
un contexte placé par ailleurs sous le signe d'une inflexion de la
croissance.
L'hypothèse du gouvernement sur l'évolution de l'investissement
des entreprises est en effet fondée sur la bonne orientation des
anticipations de demande et de la profitabilité des entreprises, mais
aussi sur une certaine saturation des capacités
installées.
II. UNE PRÉVISION SOUMISE À D'IMPORTANTS ALÉAS
Les incertitudes qui entourent la prévision du gouvernement sont évidemment liées au contexte international qui pourrait voir s'étendre et s'approfondir les déséquilibres qu'affrontent diverses zones économiques. Mais la prévision du gouvernement qui illustre une certaine incapacité de la France à s'inscrire durablement dans une trajectoire de croissance soutenue est également tributaire d'un desserrement des freins internes à la croissance. Or, les pesanteurs économiques n'ayant pas toutes été levées, l'essor de l'économie française semble sous forte contrainte.
A. L'ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL
1. La croissance dans le monde
a) La crise asiatique et ses prolongements
A l'aube
de l'année 1999, la très forte dégradation de
l'environnement international observée à partir des
événements survenus en Asie en 1997 fait craindre un
approfondissement des crises au terme duquel l'Europe verrait son
redémarrage économique compromis.
La crise asiatique a, en quelque sorte, ouvert le bal suivie par la mise en
évidence d'une série de déséquilibres
économiques touchant divers ensembles régionaux.
Dans le rapport économique, social et financier, seuls les effets de la
crise asiatique ont fait l'objet de la part du gouvernement d'une
évaluation systématique.
Impact international de la crise asiatique
|
|
Crise au Japon |
Total |
Baisse des taux obligataires et détente monétaire |
Impact
global de la crise
|
||||||
|
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
|
Niveau du PIB (en %) |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Etats-Unis |
- 0,5 |
- 0,7 |
- 0,3 |
- 0,7 |
- 0,8 |
- 1,4 |
0,3 |
0,6 |
- 0,4 |
- 0,7 |
|
Union européenne |
- 0,5 |
- 0,8 |
- 0,4 |
- 0,9 |
- 0,9 |
- 1,7 |
0,3 |
0,8 |
- 0,6 |
- 0,8 |
|
Allemagne |
- 0,6 |
- 1,0 |
- 0,5 |
- 1,1 |
- 1,1 |
- 2,1 |
0,4 |
1,0 |
- 0,6 |
- 1,0 |
|
France |
- 0,5 |
- 0,8 |
- 0,3 |
- 0,9 |
- 0,8 |
- 1,7 |
0,2 |
0,7 |
- 0,5 |
- 0,9 |
|
Niveau des prix (en %) |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Etats-Unis |
- 0,8 |
- 1,6 |
- 0,3 |
- 1,3 |
- 1,1 |
- 2,9 |
0,3 |
1,2 |
- 0,9 |
- 1,8 |
|
Union européenne |
- 0,5 |
- 1,0 |
- 0,2 |
- 0,8 |
- 0,7 |
1,8 |
0,0 |
0,3 |
- 0,7 |
- 1,6 |
|
Allemagne |
- 0,3 |
- 1,0 |
- 0,1 |
- 0,6 |
- 0,4 |
- 1,6 |
0,0 |
0,3 |
- 0,3 |
- 1,4 |
|
France |
- 0,2 |
- 0,6 |
- 0,2 |
- 0,7 |
- 0,4 |
- 1,3 |
0,0 |
0,1 |
- 0,5 |
- 1,3 |
Les
effets des crises sur la demande adressée à la France et sur la
compétitivité-prix de la production nationale estimés
à 0,8 point de PIB par an sont compensés partiellement par
la baisse des taux obligataires et monétaires qui est associée
à la réorienation des capitaux consécutive à la
crise.
De 0,2 point de PIB en 1998, cet effet favorable passe à
0,5 point de PIB en 1999.
Faute d'informations détaillées sur cet exercice de variante, il
n'est pas possible d'en faire une lecture totalement satisfaisante.
Au total, la croissance française serait affectée à
hauteur de 0,5 point en 1998 et de 0,4 point en 1999.
L'impact de la crise est donc significatif : il se traduit par une augmentation
du chômage de 0,7 point à l'horizon de 1999 et par une
dégradation du solde public de 0,6 point de PIB à ce
même horizon.
Il faut observer que selon la variante l'impact de la crise se réduirait
un peu en 1999. Ce résultat n'est pas conforme avec celui d'une autre
variante réalisée par l'OFCE à l'aide du modèle
MIMOSA qui met en évidence le maintien en 1999 d'un effet d'ailleurs
plus négatif à son niveau de 1998.
On peut observer aussi que, contrairement à ce qui est souvent dit la
crise asiatique toucherait plus l'Europe que les Etats-Unis, ceux-ci profitant
de la dépréciation du dollar.
Enfin, l'impact de la détente des conditions monétaires, dont la
pérennité reste à démontrer, apparaît
très fort et, curieusement plus élevé en Europe qu'aux
Etats-Unis.
En tout état de cause, la variante doit être étendue
à d'autres crises, celle que traverse la Russie et celle à
l'oeuvre en Amérique centrale et du Sud. D'une variante
réalisée par l'OFCE comportant une croissance nulle en
Amérique latine et une récession contenue en Russie, il ressort
comme le démontre le tableau ci-dessous que la baisse du rythme de la
croissance mondiale associée à un tel scénario aurait des
effets beaucoup plus importants.
Impact de la crise selon le modèle Mimosa
Ecart au compte central
|
1997 |
1998 |
1999 |
PIB en % |
|
|
|
Etats-Unis |
- 0,2 |
- 1,3 |
- 2,3 |
Japon |
- 0,4 |
- 1,8 |
- 2,8 |
Union européenne |
- 0,3 |
- 0,9 |
- 1,7 |
Dragons |
- 0,7 |
- 7,0 |
- 13,4 |
Autre Asie |
- 2,3 |
- 8,6 |
- 12,5 |
Amérique latine |
0,0 |
- 2,2 |
- 4,5 |
Moyen-Orient Maghreb |
- 1,0 |
- 4,5 |
- 7,9 |
CEI |
0,0 |
- 3,0 |
- 6,4 |
Monde |
- 0,5 |
- 2,2 |
- 3,7 |
Prix de la consommation en % |
|
|
|
Etats-Unis |
0,0 |
- 0,6 |
- 1,3 |
Japon |
0,1 |
0,1 |
- 0,2 |
Union européenne |
0,0 |
- 2,2 |
- 3,7 |
Chômage en point |
|
|
|
Etats-Unis |
0,1 |
0,5 |
1,1 |
Japon |
0,1 |
0,5 |
0,9 |
Union européenne |
0,1 |
0,3 |
0,7 |
Solde public en point de PIB |
|
|
|
Etats-Unis |
- 0,1 |
- 0,3 |
- 0,6 |
Japon |
- 0,1 |
- 0,2 |
- 0,4 |
Union européenne |
- 0,1 |
- 0,3 |
- 0,6 |
Taux d'intérêt à court terme en point |
|
|
|
Etats-Unis |
- 0,3 |
- 0,8 |
- 1,0 |
Japon |
- 0,3 |
- 0,6 |
- 0,9 |
Union européenne |
- 0,3 |
- 0,7 |
- 1,0 |
Source : OFCE, modèle Mimosa
b) L'économie américaine à un tournant ?
La
situation économique des Etats-Unis est, depuis trois ans, l'objet de
conjectures sur les modalités du ralentissement de l'activité
américaine. Ces conjectures ont jusqu'alors été toujours
déjouées par la poursuite d'une croissance sur un rythme
dynamique. Mais elles restent cependant plus que jamais en débat.
La question traditionnellement posée est celle de savoir si les
Etats-Unis vont connaître un retournement brutal du cycle haussier
entamé en 1992 ou si, au contraire, ils seront en mesure de
réussir un "atterrissage en douceur", avec un ralentissement de la
croissance autour de 1,5 à 2 % mais sans récession.
Il faut probablement commencer par répondre à une autre question,
celle de savoir ce que signifierait pour le monde une poursuite de l'expansion
américaine par rapport à un scénario de ralentissement
économique.
(1) Une expansion continue depuis 1992, favorable à l'économie des partenaires
Sur cette dernière question, il faut observer que l'essor économique des Etats-Unis s'est accompagné d'un soutien apporté à l'économie mondiale . Celui-ci a emprunté trois canaux principaux : la progression des importations américaines a été beaucoup plus rapide que celle des exportations si bien que, le déficit extérieur des Etats-Unis se creusant, le commerce extérieur américain a provoqué un effet de relance keynésienne sur ses partenaires ; l'appréciation du dollar nourrie d'anticipations favorables a renforcé la compétitivité des partenaires des Etats-Unis et a assis la reprise observée chez eux, et particulièrement en Europe, à partir des échanges extérieurs ; les perspectives de profitabilité des entreprises américaines ont enclenché une appréciation des actifs qui s'est propagée internationalement et a exercé des effets de richesse.
(2) Une expansion fragile
Mais
cette expansion s'est poursuivie dans un contexte d'accumulation des
déséquilibres si bien que son maintien supposerait aujourd'hui
sans doute plus d'inconvénients qu'un freinage maîtrisé.
Le taux d'épargne des agents économiques américains, sauf
l'Etat, est presque nul et, en tout cas, très insuffisant pour couvrir
le financement de la croissance américaine. Il s'ensuit que le "reste du
monde" est, de fait, appelé à financer l'essor américain.
La croissance américaine a donc eu pour effet de divertir
l'épargne des partenaires de leurs propres économies vers
l'économie américaine. Ce phénomène aurait pu se
traduire par une tension sur les taux d'intérêt si l'offre
d'épargne mondiale était restée stable et si les
politiques monétaires avaient été distribuées
autrement. En outre, une telle tension serait sûrement advenue si les
prêteurs n'avaient pas anticipé une amélioration de la
rentabilité de leurs investissements. Jusqu'à présent, ces
tensions qui, compte tenu de l'ampleur des déséquilibres,
pourraient être très vives ne se sont pas produites. Le
financement du déficit extérieur américain par l'Europe et
le Japon a été gagé par les hauts niveaux d'épargne
de ces deux zones. Les politiques monétaires se sont orientées de
telle sorte que la croissance américaine ne soit pas endiguée par
la politique de la Banque centrale des Etats-Unis mais que l'écart de
taux entre les Etats-Unis et le Japon et l'Europe respectivement, favorise le
dollar. La rentabilité des placements aux Etats-Unis s'est nourrie de
cette dernière donnée mais aussi d'un maintien d'une croissance
élevée des profits des entreprises américaines.
Toutefois, les sources d'un déséquilibre profond n'ont pas
été taries
. Le creusement du déficit extérieur
américain s'est poursuivi et accéléré, ce qui a eu
pour conséquence de fragiliser le dollar et de créer les
conditions d'une hausse des taux d'intérêt. Les besoins de
financement associés à la reprise de l'économie
européenne et à la crise du système bancaire japonais ont
fait le reste et pourraient accentuer la dépréciation de la
devise américaine. La perspective d'une érosion de la
profitabilité des entreprises américaines pourrait hâter et
amplifier ce processus. Il est très important de ce point de vue de
rappeler deux faits :
- l'extension éventuelle de la crise en Amérique centrale et du
sud pourrait avoir des effets considérables sur les Etats-Unis en raison
des liens commerciaux qu'ils entretiennent avec les pays de cette zone,
- si, jusqu'à présent, la croissance américaine s'est
déroulée dans un climat combinant forte diminution du
chômage -celui-ci est, aux Etats-Unis, proche de son niveau "naturel"- et
maintien d'une inflation modérée, la hausse des coûts
salariaux pourrait s'accélérer du fait de pénuries
sectorielles de main d'oeuvre ; la profitabilité des entreprises
américaines en serait affectée.
(3) Une correction souhaitable sous certaines conditions
On
peut en conclure que le ralentissement de l'économie américaine
serait plutôt une bonne nouvelle pour le monde
. Certes, il
affecterait, toutes choses égales par ailleurs, la croissance mondiale.
Mais, il débarrasserait l'horizon d'un certain nombre de nuages
très menaçants et il permettrait une allocation des ressources
plus favorables à la croissance en Europe.
Il reste à souligner combien il importe que le ralentissement
américain soit maîtrisé
. Il serait évidemment
très dangereux que survienne une spirale défavorable faite
d'inflation, de hausse des taux monétaires, de
dépréciation du dollar et de récession. Or, une telle
spirale n'est pas à exclure compte tenu de l'instabilité dans
laquelle est entrée l'économie américaine. Des agents
économiques très endettés ont probablement trop
compté sur l'abondance des financements extérieurs et sur la
poursuite de la valorisation de leur patrimoine. Si une correction sensible
devait modifier cette donne, l'on pourrait assister à une contraction
nette de l'activité américaine qui a dans un passé proche
(1991) connu la récession. La question serait alors d'évaluer la
capacité des politiques économiques à contrecarrer un tel
phénomène et les conséquences de celui-ci sur
l'économie mondiale.
Il est à cet égard heureux que les Etats-Unis aient
profité du cycle haussier traversé par leur économie pour
regagner des marges de manoeuvre budgétaires. Cependant, celles-ci ne
doivent pas être surestimées. Selon les données de l'OCDE,
le solde financier des administrations centrales américaines devrait
rester négatif en 1998 (- 1 point de PIB) et se creuser un peu
en 1999 (- 1,3 point de PIB). Si les Etats-Unis ne sont pas
bornés dans leur politique budgétaire par une quelconque limite
institutionnelle, à l'inverse de la situation prévalant en Europe
du fait du "pacte de stabilité et de croissance", ils n'ont pas
regagné des marges telles qu'une relance keynésienne serait
à leur portée.
On peut ajouter que celle-ci pourrait se heurter à un resserrement de
la politique monétaire. Jusqu'à présent, la Banque
centrale américaine s'est montrée plutôt accommodante mais
si les risques inflationnistes s'intensifiaient -ce qui pourrait provenir d'une
inflation importée consécutive à la baisse du dollar ou
d'une inflation par les coûts du fait de goulots d'étranglement-
une autre politique monétaire pourrait s'ensuivre.
Il ne faut donc pas attendre trop des capacités de réaction
des politiques économiques aux Etats-Unis.
Dès lors, il est légitime de s'interroger sur l'impact d'un
fort ralentissement de l'économie américaine, plus accusé
que celui décrit par la prévision du gouvernement associée
au projet de loi de finances (3,4 % de croissance en 1998, puis 1,9 %
en 1999).
Elle se traduirait d'abord par une amplification de la baisse de nos
exportations et donc par une chute de l'excédent de notre commerce
extérieur plus marquée que dans le scénario du
gouvernement.
Même si les exportations françaises vers les Etats-Unis
représentent une proportion faible de l'ensemble (6,6 %), les
effets d'un ralentissement marqué de l'activité économique
aux Etats-Unis affecteraient certains de nos importants partenaires commerciaux.
Dans cette hypothèse, la mesure dans laquelle nous serions
touchés dépendrait de l'évolution de la parité du
dollar. Il faudrait alors surveiller très attentivement la politique
monétaire de la Banque centrale européenne et veiller à
une bonne coordination de ses interventions avec celle de la Banque centrale
américaine.
Mais, l'on doit redouter qu'un autre mécanisme ne s'enclenche avec une
poursuite et une amplification de la correction de la valeur des actifs. Les
effets d'une telle correction sont sans doute moins redoutables en Europe
continentale que dans le monde anglo-saxon du fait d'un moindre
développement des capitalisations boursières. Mais, deux
phénomènes doivent être soulignés :
- D'une part, les crises financières peuvent susciter des
réactions en chaîne imprévisibles.
A cet égard, l'exposition des banques mais aussi des entreprises non
financières aux risques doit être soigneusement
évaluée. De ce point de vue, si, selon les acteurs de
marché, les bilans sont à la fois lisibles et point trop
inquiétants, les engagements "hors-bilan" sont insuffisamment
transparents.
- D'autre part, le développement des capacités de financement des
diverses économies européennes s'est bien entendu
accompagné d'engagements extérieurs qui pourraient se trouver
compromis par un atterrissage non maîtrisé de l'économie
américaine. La profitabilité des entreprises européennes
en serait affectée et leurs plans d'investissement déjà
remis en cause par une inflexion plus marquée des exportations et de
l'activité de leurs filiales étrangères pourraient
pâtir encore d'une dégradation anticipée de leurs
profits.
2. La parité du dollar
La
prévision du gouvernement est tributaire d'une hypothèse sur la
parité du dollar, selon laquelle celui-ci vaudrait en moyenne
6 francs au cours de l'année à venir. Compte tenu de la
parité de la devise américaine constatée ces derniers
mois, une telle hypothèse paraît pour le moins incertaine
même si la volatilité des mouvements de capitaux dans un contexte
de déséquilibres financiers en cascade est de nature à
déjouer les perspectives les plus probables.
Néanmoins, plusieurs facteurs pourraient se conjuguer pour amplifier la
baisse de la valeur externe de la monnaie américaine.
L'émergence de l'euro, à partir du 1
er
janvier
prochain, dont la perspective n'est pas pour rien dans l'évolution
récente du dollar, pourrait se traduire par une appréciation de
la monnaie européenne par rapport au dollar. En la matière,
beaucoup dépendra de la politique monétaire européenne qui
sera conduite par la Banque centrale européenne (BCE) et, notamment, du
rôle que seront en mesure de jouer les gouvernements pour influencer les
orientations de la politique de change de la BCE.
Il reste cependant clair que le sort de la parité de l'euro demeure pour
une part entre les mains des prêteurs internationaux, privés ou
institutionnels, qui pourraient pratiquer des arbitrages de nature à
accroître la valeur de la monnaie européenne. On songe en
particulier à un possible réaménagement des
réserves de change des banques centrales au détriment du dollar.
L'adoption de l'euro est, il ne faut pas en douter, un événement
considérable susceptible de modifier profondément le
système monétaire international.
Cette observation est tout particulièrement vrai dans l'horizon court.
La crédibilité économique de la zone euro est, pour les
financiers, très supérieure à celle des Etats-Unis au
moment même où la monnaie unique européenne se
constitue :
les perspectives de croissance paraissent meilleures en Europe qu'aux
Etats-Unis que les observateurs jugent en phase de retournement de leur cycle
économique ;
la balance extérieure de la zone euro est excédentaire alors que
les Etats-Unis doivent financer un déficit considérable ;
la stabilité des prix semble acquise en Europe alors que l'écart
entre la croissance effective et le potentiel de croissance aux Etats-Unis
continue d'y entretenir la crainte d'une certaine résurgence de
l'inflation.
L'impact d'une dépréciation du dollar est présenté
dans le tableau suivant à partir d'une simulation réalisée
à l'aide du modèle Mimosa de l'Observatoire français des
conjonctures économiques.
Dépréciation de 5 % du dollar
(Ecart en % au compte central)
|
1999 |
2000 |
PIB en % |
|
|
Etats-Unis |
0,3 |
0,6 |
Japon |
- 0,4 |
- 0,8 |
Union européenne |
- 0,5 |
- 0,7 |
Prix de la consommation en % |
|
|
Etats-Unis |
0,2 |
0,3 |
Japon |
0,0 |
0,0 |
Union européenne |
- 0,2 |
- 0,6 |
Balance courante en point de PIB |
|
|
Etats-Unis |
- 0,1 |
0,0 |
Japon |
0,1 |
0,0 |
Union européenne |
- 0,1 |
0,0 |
Chômage en taux |
|
|
Etats-Unis |
- 0,1 |
- 0,2 |
Japon |
0,1 |
0,2 |
Union européenne |
0,2 |
0,3 |
L'hypothèse d'une dépréciation du dollar
de
5 % se traduit par une réduction du taux de croissance d'environ
½ point dès 1999. Ces effets peuvent être multipliés
par 2 si la baisse de la valeur du dollar devait atteindre 10 % et ainsi
de suite, linéairement.
Compte tenu de l'hypothèse retenue dans le cadre des "budgets
économiques", un dollar à 6 francs et des perspectives
rappelées ci-dessus, il y a tout lieu de redouter une évolution
significative défavorable à la croissance devant entraîner
une correction des estimations en cours d'année.
B. LES ALÉAS INTERNES
C'est la
vigueur de la demande intérieure qui, dans le scénario du
gouvernement, justifie une croissance de 2,7 %.
Compte tenu du climat international, cette prévision peut
apparaître optimiste. Mais, un paradoxe doit être
souligné:
située dans une perspective de moyen terme et
confrontée aux difficultés économiques et sociales
rencontrées par notre pays, une croissance de 2,7 % apparaît
très insuffisante et doit être considérée comme un
assez piètre résultat.
Elle traduit le maintien d'un certain nombre de freins internes au dynamisme
économique, dont chacun est susceptible, s'il se resserre même
faiblement, d'exercer un effet défavorable sur le rythme de croissance
effectif.
1. Une performance en réalité moyenne
L'économie française, comme d'ailleurs la
quasi-totalité des économies de l'Europe continentale, a
accumulé ces dernières années un retard de croissance dont
les origines sont à trouver dans de multiples facteurs, certains
conjoncturels, d'autres, probablement les plus influents, structurels.
Ces retards se sont traduits par des déséquilibres financiers -le
"solde conjoncturel" des finances publiques a été négatif-
et par des problèmes sociaux avec un maintien du chômage à
un très haut niveau.
Il est nécessaire de combler les déficits de croissance
observés dans le passé en installant l'économie sur une
tendance dynamique durable.
Dans cette perspective, la prévision d'une croissance de 2,7 % l'an
prochain, si du fait des désordres internationaux mais aussi de la
vulnérabilité des fondements économiques internes peut
apparaître optimiste, constitue en fait un résultat
médiocre. L'espoir d'une croissance durablement élevée
lié aux perspectives pour 1998 ne paraît pas résister
à l'essoufflement de la croissance dans le reste du monde.
Cette situation est d'autant plus préoccupante que l'environnement
formé par la combinaison des politiques monétaire et
budgétaire est "a priori" plutôt favorable à une
accélération de l'activité. La réduction du
déficit budgétaire qui doit être poursuivie et peut
l'être dans un meilleur climat qu'hier a suscité les effets
attendus : l'adoption de l'euro qui lève bien des
hypothèques si elle ne résout pas tous les problèmes et,
surtout, la détente si longtemps attendue des conditions
financières et monétaires.
Dans ce contexte, la diminution du taux de croissance en 1999 est une mauvaise
nouvelle. Elle vient conforter le diagnostic selon lequel des freins existent
à une forte croissance en France qui font obstacle à une
amplification du cycle haussier de l'activité.
Les diagnostics portés par les économistes sur le niveau de la
croissance potentielle dans notre pays apportent un éclairage
théorique utile.
La croissance potentielle
Le taux
de croissance potentielle est celui qui serait atteint sans poussée
inflationniste si les facteurs de production -le travail et le capital pour
l'essentiel- étaient normalement utilisés.
La mesure de la croissance potentielle suppose que soient résolues des
questions importantes, comme celle du niveau normal d'utilisation des facteurs
ou encore celle du niveau de leur productivité.
S'agissant par exemple du facteur travail, la mesure de la croissance
potentielle dépend de l'idée qu'on se fait d'une utilisation
normale du facteur travail disponible. La population active détermine
quantitativement
les disponibilités. Mais la question des
facteurs déterminant
qualitativement
l'utilisation "normale'" de
la population active doit aussi être réglée. La
réponse donnée à cette question suppose en
général des études économétriques
approfondies qui dévoilent le moment où l'utilisation de la
population active commence à engendrer des tensions inflationnistes ou
des tensions salariales.
On remarquera en incidente que l'une et l'autre de ces deux conditions ne sont
pas entièrement assimilables -tensions salariales et inflationnistes ne
vont de pair qu'à partage inchangé des gains de
productivité entre profits et salaires.
Mais, surtout, ayant observé que l'évaluation du taux de
chômage nécessaire pour que lesdites tensions soient contenues est
variable en fonction de multiples paramètres, le coût du travail
bien sûr mais aussi la qualité de la main d'oeuvre ou encore
l'organisation des relations de travail, on en conclura qu'
un bas niveau de
croissance potentielle est synonyme de viscosités
économiques
. Or, les différentes études disponibles
paraissent démontrer que, dans ce domaine, notre pays bute sur une
croissance potentielle de l'ordre de 2,5 % l'an pour le
ministère de l'économie et des finances et d'un niveau encore
très inférieur pour l'OCDE (1,9 %) et le FMI
(2,2 %).
Dans ces conditions, il ne serait guère étonnant que
l'économie française ne puisse s'inscrire sur une trajectoire
durablement dynamique. Il s'ensuivrait que, sauf à s'en donner vraiment
les moyens, nous ne pourrions à l'avenir rattraper rapidement les pertes
de croissance accumulées dans un passé récent sous l'effet
de chocs conjoncturels et de la nécessité de rétablir
notre situation financière.
2. La dynamique de l'emploi en question
L'un des
adjuvants importants de la croissance serait une nouvelle dynamique de
l'emploi. De fait, les "budgets économiques" retiennent comme
perspective la poursuite du phénomène d'enrichissement de la
croissance en emplois. Sa tendance spontanée toutefois s'affaiblirait.
Mais, le compte économique pour 1999 retrace les effets de la RTT et des
emplois-jeunes qui lui permettent de se poursuivre et de s'amplifier.
Ainsi, chaque point de croissance représenterait 111.000 emplois en 1999
contre 91.000 en 1998. Hors créations d'emplois non marchands et effets
supposés de la RTT, l'enrichissement de la croissance en emplois se
retournerait un peu, le nombre d'emplois créés par point de
croissance revenant de 64.516 en 1998 à 56.666 en 1999. Ces
estimations ne doivent pas être considérées comme exactes
à l'unité près mais elles délivrent un message
clair : malgré le ralentissement des gains de productivité
du travail, la dynamique de l'emploi dans le secteur marchand demeure
faible.
Cette situation appelle des réformes centrées sur la
question de l'emploi marchand alors que jusqu'à présent le
gouvernement s'est contenté de promouvoir l'emploi non-marchand et un
partage du travail à risques.
On ne sait encore quelle sera l'efficacité de la démarche du
gouvernement. Jusqu'à présent, elle a rencontré un certain
succès avec les emplois-jeunes. Mais ce succès est trompeur car
les coûts de ces emplois ont été dissimulés. Ils
seront pleinement ressentis lorsque, sous la pression, ces emplois devront
être soit pérennisés avec les coûts financiers et
économiques que cela suppose, soit simplement abandonnés avec les
coûts sociaux que cela entraînera.
Quant aux effets de la réduction du temps de travail, les travaux de la
commission d'enquête du Sénat en ont clairement
démontré l'ambiguïté, ce que confirme
l'expérimentation en cours, voire sous certaines hypothèses, la
nocivité.
Il est donc tout à la fois simplificateur et hasardeux de
présenter comme un succès et un fait acquis l'augmentation des
créations d'emplois qui jusqu'à présent résulte
essentiellement de la progression des emplois non-marchands.
En revanche, l'essoufflement de la progression des créations d'emplois
marchands doit être souligné. L'enrichissement de la croissance en
emplois est venu pour beaucoup du développement du travail à
temps partiel et des emplois plus ou moins précaires prenant la forme de
l'intérim ou des contrats à durée déterminée.
Population active occupée : le nombre d'intérimaires augmente de moitié en deux ans
|
Mars 1994 |
Mars 1995 |
Mars 1996 |
Mars 1997 |
Mars 1998 |
Population active occupée (milliers) |
|||||
Ensemble |
22.022 |
22.344 |
22.482 |
22.430 |
22.705 |
Hommes |
12.396 |
12.561 |
12.611 |
12.552 |
12.661 |
Femmes |
9.626 |
9.793 |
9.881 |
9.878 |
10.064 |
Population d'actifs occupés à temps partiel (en %) |
|||||
Ensemble |
14,7 |
16,5 |
15,6 |
16,6 |
17,1 |
Hommes |
4,5 |
5,0 |
6,2 |
5,4 |
5,6 |
Femmes |
27,8 |
28,8 |
29,6 |
30,9 |
31,0 |
Statut des emplois (milliers) |
|||||
Non salariés |
3.057 |
3.005 |
2.902 |
2.864 |
2.802 |
Salariés |
18.965 |
19.339 |
19.561 |
19.586 |
19.904 |
dont
:
|
210
|
267
|
273
|
330
|
413
|
Durée habituelle de travail des salariés (heures par semaine) |
|||||
Temps complet |
39,9 |
39,9 |
39,8 |
39,9 |
39,7 |
Temps partiel |
22,4 |
22,6 |
22,7 |
22,6 |
22,9 |
On peut sans doute se féliciter de l'amélioration du nombre des emplois mais on doit souligner la fragilité du phénomène et ne pas dissimuler qu'il engendre l'insatisfaction d'un grand nombre des salariés comme en témoigne le tableau ci-dessous.
Taux de sous-emploi parmi les emplois à temps partiel
(en %)
|
Mars 1994 |
Mars 1995 |
Mars 1996 |
Mars 1997 |
Mars 1998 |
Ensemble |
37,4 |
37,5 |
38,2 |
39,5 |
38,5 |
Hommes |
47,5 |
51,0 |
50,9 |
51,6 |
51,5 |
Femmes |
35,3 |
34,9 |
35,3 |
36,8 |
35,6 |
Près de 40 % des salariés à temps partiel s'estiment
en situation de sous-emploi : 1.475.000 salariés
employés à temps partiel ont le sentiment d'être
sous-employés. C'est sans doute parce que le temps partiel est pour
beaucoup subi mais aussi parce que le gouvernement y est défavorable que
les budgets économiques n'en retracent pas la poursuite de l'essor.
En tout cas, ce tableau de l'emploi n'oppose pas seulement les chômeurs
aux personnes employées. Il offre une gradation beaucoup plus subtile
avec au moins trois strates : le chômage, le sous-emploi et le plein
emploi.
Ce panorama qui pourrait être enrichi de la population des emplois
aidés ou subventionnés et administrés donne une image plus
fidèle du marché du travail à la française que les
statistiques sur le taux de chômage.
Il est donc urgent d'apporter à ce marché du travail
les
réformes nécessaires. Ce qu'avait proposé avec pertinence
le président Christian Poncelet en proposant
une diminution du
coût du travail non qualifié doit être à la fois
salué et suivi d'effet
.
On sent bien par ailleurs que le retour à la confiance des
ménages qui conditionne beaucoup leur consommation à travers leur
comportement d'épargne pourrait se ressentir d'un retournement,
même marginal, de l'emploi et être affecté par l'absence de
traitement en profondeur de la précarité de l'emploi. Or, un tel
traitement suppose au préalable des réformes structurelles
destinées à assurer une meilleure "employabilité" de la
population active.
C'est de cette façon que serait soutenue une dynamique de
création d'emplois marchands qui est seule à même de
résoudre durablement le problème du chômage en
France.
CHAPITRE II
L'ÉQUILIBRE DU PROJET DE
LOI
DE FINANCES POUR 1999
Le
gouvernement prévoit pour 1999, 74,5 milliards de francs de
recettes supplémentaires, qui seraient engendrées par la
croissance de l'économie. La ventilation prévue par le
présent projet en serait la suivante :
37 milliards de francs de dépenses supplémentaires,
16,1 milliards de francs d'aménagement de droits sur les recettes
fiscales pour réduire les prélèvements obligatoires,
21,3 milliards de francs de réduction du déficit
budgétaire.
Votre commission prend acte de la volonté du gouvernement de
réduire le déficit.
Le déficit serait ainsi ramené de 257,9 milliards de francs
dans la loi de finances 1998, à 236,5 milliards de francs en 1999.
Toutefois, l'expérience des années passées montre que le
déficit se creuse très fortement lorsque la croissance ralentit
ou que survient la récession, et qu'il n'est pas réduit avec
assez de fermeté dans les périodes de croissance. Le
présent projet de loi ne déroge pas à cette règle
qui est en fait celle de la facilité.
En outre, cet effort est entouré d'aléas importants. En effet,
d'une part, l'équilibre proposé se fonde sur un surcroît de
recettes volatiles, sensibles à la conjoncture, alors que les
dépenses en augmentation sont, le plus souvent, de lourdes charges de
structures, difficiles, voire impossibles à réduire en cas de
besoin. D'autre part, selon une tendance poursuivie depuis 1997, l'Etat fonde
ses espoirs de rééquilibrage des finances publiques sur les
autres administrations publiques (collectivités locales,
sécurité sociale, organismes divers d'administration
centrale).
I. INTRODUCTION : LES TROIS PRÉSENTATIONS DE L'ÉQUILIBRE BUDGÉTAIRE
Une
bonne compréhension de l'équilibre proposé
nécessite sa présentation sous trois formes :
- celle de l'article d'équilibre
- celle, synthétique, de l'ordonnance de 1959
- celle, détaillée, qui met en évidence les
dépenses réelles du budget de l'Etat.
1. La présentation de l'article d'équilibre
Sous forme simplifiée, l'article d'équilibre résulte du tableau suivant :
(en millions de francs)
|
Ressources brutes |
Dépenses brutes ou plafonds de charges |
Soldes |
Budget
général
|
1.752.213
|
1.991.879
|
|
Total opérations définitives |
1.907.460 |
|
|
Solde opérations définitives (A) |
|
2.143.683 |
- 236.223 |
Total opérations temporaires (C.S.T.) |
380.029 |
380.358 |
|
Solde opérations temporaires (B) |
|
|
- 329 |
Total général |
2.287.489 |
2.524.041 |
|
Solde général (A + B) |
|
|
- 236.552 |
L'article d'équilibre fait apparaître les
opérations définitives (budget général, budgets
annexes, comptes spéciaux du Trésor) et leur solde, puis les
opérations temporaires des comptes spéciaux du Trésor et
leur solde.
L'intérêt de cette présentation est de montrer le volume
total des flux transitant par l'Etat, que ce soit de façon temporaire
(opérations d'une durée infra-annuelle et prêts), ou
définitive. L'Etat encaissera 2.287 milliards de francs en 1999, et
décaissera 2.524 milliards de francs, soit 28,6 % du
PIB.
2. La présentation synthétique
Cette
présentation révèle trois différences essentielles
avec la précédente :
- les opérations définitives des comptes d'affectation
spéciale ne sont présentées qu'en solde (ce qui minore le
"volume" du budget) ;
- les opérations des budgets annexes ne sont retracées ni dans le
total des ressources ni dans celui des dépenses puisqu'elles sont, par
construction, équilibrées en ressources et en emplois ;
- les dépenses du budget général sont
présentées nettes des dépenses d'ordre et des recettes
d'ordre, liées à la gestion de trésorerie de l'Etat ainsi
que des remboursements et dégrèvements d'impôts.
|
LFI
1998
|
PLF
1999
|
Variation
|
A. Titre I (hors dépenses et recettes d'ordre) |
238,3 |
240,7 |
+ 1,0 |
B.
Budgets civils
|
4,4
|
4,5
|
+ 2,4
|
C.
Défense
|
157,3
|
157,5
|
+ 0,1
|
D. Total des charges du budget général A+B+C) |
1.586,7 |
1.669,2 |
+ 5,2 |
E. Solde des comptes spéciaux du Trésor |
+ 4,6 |
- 3,1 |
n.s |
F. Total des Charges (D+E) |
1.591,3 |
1.666,1 |
+ 4,7 |
G Recettes nettes |
1.333,4 |
1.429,5 |
+7,2 |
H. Solde général (G-F) |
- 257,9 |
- 236,6 |
n.s. |
Cette
présentation laisse apparaître une hausse sensible du budget de
l'Etat, en recettes (+ 7,2 %) comme en dépenses (+ 4,7 %).
Ceci est en grande partie lié à la réintégration
dans le budget général de recettes et de dépenses qui
auraient dû y figurer mais n'y figuraient pas (pensions de la Poste,
certaines rémunérations des services du ministère de
l'économie et des finances), ou provenant de comptes spéciaux du
trésor (prêt à taux zéro). Certaines
dépenses, présentées comme des rebudgétisations,
sont toutefois entièrement nouvelles, comme la compensation de la
suppression de la part régionale des droits de mutation à titre
onéreux (8,6 milliards de francs) au ministère de
l'intérieur(dotation générale de décentralisation).
La présentation du gouvernement peut être jugée
tendancieuse sur ce dernier point.
Également présentée comme une rebudgétisation,
l'abaissement de l'avantage résultant du quotient familial procure une
recette en réalité nouvelle, de 3,9 milliards de francs. On
ne peut en effet qualifier de "rebudgétisation" ce qui n'est que la
contrepartie (non homothétique d'ailleurs)
1(
*
)
de la suppression d'une pénalisation aussi
récente que la mise sous condition de ressources des allocations
familiales.
3. Les dépenses réelles
Charges budgétaires avant correction des changements
de
périmètre :
les agrégats et leur taux
d'évolution
(en milliards de francs)
|
|
|
|
PLF 1999 à structure constante |
|
Evolution 1999/1998 |
1.- Dépenses nettes du budget général |
1.582,00 |
1.590,96 |
1.600,48 |
1.639,60 |
1.685,21 |
+ 5,29 % |
2.- Pour mémoire : dépenses d'ordre relatives à la dette |
|
|
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|
Opérations définitives des comptes d'affectation spéciale : |
|
|
|
|
|
|
3.-dépenses |
53,29 |
87,28 |
61,02 |
51,33 |
45,56 |
|
4.-charge nette |
- 3,47 |
- 1,98 |
0,04 |
0,50 |
- 3,44 |
|
5.- Charges définitives (=1+3) |
1.635,29 |
1.678,24 |
1.661,51 |
1.690,93 |
1.731,77 |
+ 4,23 % |
6.-Charge nette des opérations temporaires |
2,77 |
- 0,34 |
4,56 |
0,33 |
0,33 |
|
Charges du budget de l'Etat (présentation du tableau d'équilibre) |
|
|
|
|
|
|
A.-Budget général + charge nette des comptes spéciaux du Trésor (=1+4+6) |
|
|
|
|
|
|
B.-Charges définitives + charge nette temporaire (=1+3+6) |
|
|
|
|
|
|
Charges du budget de l'Etat (en termes de dette nette) |
|
|
|
|
|
|
C.-
Budget général - dépenses d'ordre + charge nette des
comptes spéciaux du Trésor
|
|
|
|
|
|
|
D.- Charges définitives - dépenses d'ordre + charge nette temporaire (=1-2+3+6) |
|
|
|
|
|
|
* Hors FMI et hors fonds de concours (égaux
à
64,5 milliards de francs en 1997). Dépenses nettes du budget
général y compris fonds de concours :
1.655,44 milliards de francs.
Cette présentation, développée par la commission des
finances de l'Assemblée nationale depuis plusieurs années, permet
de mettre en évidence les divers agrégats qui reflètent,
tous, l'ensemble des dépenses de l'Etat.
II. UN EFFORT DE RÉDUCTION DU DÉFICIT INSUFFISANT ET INCERTAIN
A. UN EFFORT INSUFFISANT
1. Un déficit globalement réduit mais qui reste à un niveau inacceptable
Depuis
1992, la France s'est habituée à un déficit de l'Etat
excédant chaque année les 200 milliards de francs. Il
conviendrait pourtant de se souvenir du choc qu'avait provoqué le
dépassement de cette somme lors de l'exécution 1992. Votée
en déficit de 91 milliards de francs, la loi de finances
s'était exécutée à -236,3 milliards de francs.
Depuis, aucun déficit n'est redescendu sous ce montant, et le
déficit prévu pour 1999 (à -236,5 milliards de
francs) n'est pas inférieur à celui de 1992.
Depuis 1980, la tendance au creusement du déficit dans les
périodes de conjoncture difficile a rarement été
contrebalancée par une ferme réduction dans les périodes
plus favorables. Le présent projet de budget est conforme à cette
politique de la facilité.
2. Un effort pour parvenir à l'équilibre primaire, insuffisant toutefois pour stabiliser la part de la dette publique dans le PIB
Pour la
première fois depuis 1991, l'Etat retrouve une situation
d'équilibre primaire
2(
*
)
, à un
niveau toutefois beaucoup plus élevé, puisqu'en 1991
l'équilibre primaire s'était établi à environ
135 milliards de francs tandis qu'il s'établirait en 1999 à
environ 235 milliards de francs (soit 100 milliards de francs de
plus) : le retour à cet équilibre s'est largement fait par
une hausse des charges de la dette.
Sur le graphique suivant, l'écart entre les deux courbes figure le
déficit primaire de l'Etat :
Mais, si l'équilibre primaire est indispensable pour stabiliser la dette
publique, il n'est toutefois pas toujours suffisant. C'est le cas en
1999 : l'effort de réduction du déficit proposé ne
suffira pas à stabiliser le poids de la dette publique dans le produit
intérieur brut, à l'inverse des politiques budgétaires
menées par la quasi-totalité de nos partenaires de l'Union
européenne
3(
*
)
. Pour parvenir à ce
résultat, il aurait en effet été nécessaire de
réduire le déficit des administrations publiques à
2,2 % (et non 2,3 %), et donc le déficit de l'Etat à
2,6 % (et non 2,7 %)
4(
*
)
.
De fait, et en retenant comme réalistes les hypothèses du
gouvernement, le déficit budgétaire prévu pour 1999,
236,5 milliards de francs, aggraverait légèrement le poids
de la dette publique, de 0,54 point de PIB. Les hypothèses du
gouvernement pour l'ensemble des administrations publiques conduisent à
un accroissement de la dette publique de 58,2% à 58,7% du PIB (voir
encadré), ce qui est, du reste, une amélioration par rapport aux
hypothèses du DOB (de 58,3 à 58,8%).
Toutefois, l'objectif de
stabilisation de la dette publique à terme, qui était au coeur du
discours du gouvernement pour le débat d'orientation budgétaire a
disparu des objectifs du projet de loi de finances.
La
dérive de la dette publique en 1999
telle qu'elle résulte du
projet de loi de finances
Le
gouvernement évalue pour 1998 le poids de la dette publique à
58,2 % du PIB, soit, pour un PIB de 8.496 milliards de francs, une
dette de 4.944,67 milliards de francs.
Il évalue la croissance en valeur à 325 milliards de francs,
le PIB passant de 8.496 milliards de francs à 8.821 milliards
de francs en 1999.
Les hypothèses de déficit des administrations publiques qu'il se
fixe sont dans la ligne du débat d'orientation budgétaire,
soit :
Etat =
|
-
2,38 % du PIB =
|
-
236,5 milliards de francs
|
Administrations publiques = |
- 2,28 % du PIB = |
201,3 milliards de francs |
Comme le
poids des déficits publics dans la croissance nominale en 1999 serait
supérieur à celui de la dette publique dans le PIB en 1998, le
poids de la dette dans le PIB 1999 s'aggraverait. En effet, les déficits
publics 1999 représenteraient 61,9 % de la croissance nominale,
alors que le poids initial de la dette publique serait de 58,2 % du PIB en
1998.
Il en résulterait un léger alourdissement de la dette publique
(au sens du traité sur l'Union européenne), qui passerait de
58,2 % à 58,34 % du PIB, de la façon
suivante :
Dette 1999 = |
dette 1998 + |
intérêts dette 1998 5( * ) + |
déficit primaire, soit : |
5.145,97 = |
4.944,67 + |
316,5 + |
(201,3 - 316,5) |
Dans son
dossier de presse, le gouvernement se fixe toutefois un objectif de poids de la
dette publique dans le PIB en 1999 de 58,7 %, résultat qui ne
semble pas cohérent avec le calcul précédent.
L'écart entre l'aggravation de la dette résultant des seuls
déficits publics et l'aggravation totale estimée en 1999 est de
31,96 milliards de francs. Il s'explique par des flux de créances/dettes
des administrations, comptabilisés en trésorerie et non dans le
budget. En effet, la dette publique au sens du traité sur l'Union
européenne est une dette brute : si par exemple le Trésor ou les
collectivités locales émettent un emprunt en 1999, il sera
comptabilisé dans la dette, même si la somme correspondante reste
dans les caisses des administrations. La direction de la prévision a
observé par le passé que ces flux de trésorerie
aggravaient en fin d'année la dette brute d'environ 30 milliards de
francs. Mais cette somme ne correspond pas à un endettement net.
La dette pourrait être considérée comme stabilisée
dès 1999 en négligeant cet effet, donc si la dérive de
0,14 points de PIB liée aux déficits était
neutralisée. La suppression de cet écart équivaudrait
à une
réduction supplémentaire des déficits
publics de 12,35 milliards de francs, ce qui parait possible compte-tenu du
surcroît de recettes réelles
(hors inflation)
attendu en
1999 pour l'Etat par le gouvernement : 53 milliards de francs.
En réduisant cet écart, les déficits publics atteindraient
environ
189 milliards de francs, soit 2,14% du PIB.
Ce chiffre
correspond à peu près au solde stabilisant la dette publique de
2,2 % pour 1999, déterminé par la direction de la
prévision en vue du débat d'orientation budgétaire.
Ce renoncement à stabiliser la dette publique alors que les
hypothèses du gouvernement rendraient possible un telle politique est
fortement critiquable, car chacun sait que la dynamique de l'endettement est
très difficile à endiguer lorsque la conjoncture est difficile.
Votre commission rappelle qu'en 1980, l'Etat n'était pas endetté
et que les administrations publiques l'étaient peu.
Alors que le vieillissement de la population et les charges de retraites qui en
découlent alourdissent considérablement le fardeau des
générations futures, est-il admissible de ne pas tout faire pour
stabiliser, puis réduire, la dette publique ?
3. Une réduction du déficit à l'égard de la loi de finances initiale pour 1998 peut correspondre à une dégradation par rapport à son exécution probable.
Enfin
l'effort de réduction du déficit proposé pour 1999 doit,
en novembre 1998, être apprécié au regard de
l'exécution probable de la loi de finances actuellement en vigueur et
non plus, comme ce pouvait être le cas en avril dernier, uniquement au
regard de la loi telle qu'elle a été votée.
En effet, comme en 1997, l'exécution de la loi de finances
bénéficie des facilités offertes par la bonne tenue de
l'économie française, situation inconnue de 1991 à 1996
sous des gouvernements de sensibilités diverses. Pour le projet de loi
de finances, le gouvernement a révisé ses prévisions de
recettes pour 1998 de 16,6 milliards de francs. Les surprises pourraient
être meilleures encore.
Ainsi, le 15 octobre dernier, le ministère de l'économie,
des finances et de l'industrie a fait état d'une exécution
budgétaire très convenable, avec des dépenses
maîtrisées (même si, comme souvent, cette maîtrise
s'obtient au détriment des dépenses en capital) et des recettes
en augmentation sensible.
La situation budgétaire au 31 août 1998
Le solde
budgétaire
Le solde budgétaire s'établit à -293,5 milliards de
francs à la fin août 1998, soit une amélioration de
24,8 milliards de francs par rapport à celui enregistré
l'année dernière à la même date
(- 318,3 milliards de francs).
Les recettes du budget général
Sur les huit premiers mois de l'année, les recettes nettes du budget
général s'élèvent à 887,2 milliards de
francs. Par rapport à la même période de 1997, la
croissance des recettes fiscales nettes s'établit à 3,6 %.
Les dépenses du budget général
A la fin août 1998, les dépenses du budget général
s'établissent à 1.077,9 milliards de francs contre
1.068,8 milliards de francs à la fin août 1997, soit une
augmentation de 0,9 %.
Situation à fin août
|
Août 1997 |
Août 1998 |
Evolution (%) |
Dépenses ordinaires |
963,4 |
986,3 |
+ 2,4 |
Dépenses en capital |
105,4 |
91,6 |
- 13,1 |
Dépenses du budget général |
1.068,8 |
1.077,9 |
+ 0,9 |
Recettes fiscales nettes |
891,9 |
924,2 |
+ 3,6 |
Recettes non fiscales |
77,2 |
95,7 |
+ 24,0 |
Recettes du budget général (hors fonds de concours) |
797,2 |
849,8 |
+ 6,6 |
Solde
des CST*
|
- 88,0
|
- 102,8
|
- 9,4 |
Solde général d'exécution |
- 318,3 |
- 293,5 |
|
*
Solde tendant à s'annuler en fin d'année.
Fonds de concours compris, les recettes progressent de 5,8 %, tandis
que les dépenses sont relativement stables à 0,9 %.
Le profil d'exécution du budget ayant tendance à être le
même d'année en année, on peut considérer que, hors
nouvelles mesures discrétionnaires (allégements d'impôt,
dépenses nouvelles), la tendance observée d'amélioration
du déficit va se poursuivre jusqu'à la fin de l'année.
La loi de finances pour 1998 prévoyait un déficit de
257,9 milliards de francs, en amélioration de 9,8 milliards de
francs par rapport à l'exécution 1997 (-267,7 milliards de
francs).
Or, à fin août, l'écart est de
24,8 milliards
de francs
(soit 15 milliards de francs de
mieux). A politique inchangée, si on suppose que le solde des comptes
spéciaux du Trésor prévu est respecté, le
déficit d'exécution pourrait s'établir à
-208,35 milliards de francs.
Extrapolation de l'exécution budgétaire
1998
en
fonction des tendances relevées fin août
|
Exécution 1997 |
A fin août 1998 |
Extrapolation 1998 |
Dépenses du budget général |
1.654,4 |
+ 0,9 % |
1.669,3 |
Solde des CST |
+ 1,5 |
- |
- 4,6 |
Recettes nettes du budget général |
1.385,2 |
+ 5,8 % |
1.465,5 |
Déficit |
- 267,7 |
- |
- 208,4 |
Cette
hypothèse n'a rien d'absurde. En effet, en 1997, les dépenses du
budget général ont progressé de 0,8 % par rapport
à 1996. Or, à fin août, l'exécution faisait
apparaître une progression de 0,7 %. De la même façon,
les recettes ont progressé de 3 % par rapport à 1996. A fin
août, elles progressaient de 2,6 % ; une bonne partie du
surcroît final étant imputable à l'effet de la loi portant
mesures urgentes à caractère fiscal et financier.
Votre rapporteur général rappelle que les prévisions
associées au projet de loi de finances font d'ores et déjà
état :
d'une progression de 16,6 milliards de francs de recettes nettes
totales par rapport à la loi de finances initiale ;
d'une réduction de 2,6 milliards de francs de la charge nette
de la dette, par rapport à la prévision de 234,8 milliards
de francs.
Dans ces conditions, la réalisation en 1999 d'un déficit de
236,5 milliards de francs ne peut apparaître comme un effort
significatif, sous réserve, naturellement, que le gouvernement ne
dépense pas dès 1998 une partie des plus-values fiscales
attendues
6(
*
)
.
B. UN EFFORT INCERTAIN
Bien qu'insuffisant, l'effort proposé par le gouvernement pour réduire le déficit n'en demeure pas moins incertain, car il repose sur plusieurs paris qui doivent tous être gagnés pour réussir.
1. Un accroissement des dépenses rigides, financé par un surcroît de recettes volatiles, et qui laisse subsister un déficit de fonctionnement important
Les principales augmentations de recettes sont les suivantes (PLF 1999/LFI 1998 révisée)
TVA nette |
+ 23,0 milliards de francs |
impôt sur le revenu |
+ 16,2 milliards de francs |
impôt sur les sociétés |
+ 12,4 milliards de francs |
TIPP |
+ 4,7 milliards de francs |
ISF |
+ 3,6 milliards de francs |
recettes non fiscales |
+ 19,9 milliards de francs |
En contrepartie, les principaux postes de dépenses en augmentation sont les suivants (PLF 1999/LFI 1998)
charges liées à la fonction publique civile et militaire |
+ 20,9 milliards de francs 7( * ) |
emplois-jeunes |
+ 7,5 milliards de francs |
accroissement de la charge de la dette |
+ 2,4 milliards de francs |
Si
l'impôt sur le revenu est une recette relativement peu sensible à
la croissance de l'année de sa perception, cela est déjà
moins vrai de l'impôt sur les sociétés. Et il n'en est pas
de même de la TVA ou de la TIPP. Ces deux impôts, très
sensibles à l'état de la demande intérieure du moment,
forment 60 % des recettes de l'Etat L'ISF est, quant à lui,
très sensible à la valeur des patrimoines à la fin de
l'année précédente.
Or, la situation des valeurs mobilières a été très
contrastée au cours des derniers mois.
Face à des augmentations de recettes relativement sensibles à la
situation économique, le gouvernement devra financer des augmentations
de dépenses souvent très rigides, pratiquement impossibles
à comprimer dans un délai rapide, notamment les charges de la
fonction publique.
C'est pourquoi il ne pourrait pas ajuster les augmentations de dépenses
qu'il a prévues aux augmentations réelles des recettes qui seront
constatées en 1999.
Cette rigidité aggravée de la structure des dépenses
transparaît dans la présentation du budget sous la forme
appliquée aux collectivités locales, et qui laisse
apparaître un
déficit de fonctionnement élevé,
quoiqu'en réduction sensible
(à 68,7 milliards de francs
en 1999 contre 98,8 milliards de francs en 1998).
Tableau du budget en actions de fonctionnement et d'investissement
(en milliards de francs)
|
Dépenses |
|
Recettes |
||
Section de fonctionnement |
LFI 1998 |
PLF 1999 |
Section de fonctionnement |
LFI 1998 |
PLF 1999 |
1. Charges à caractère général |
63,1 |
64,5 |
1. Produits de gestion courante (recettes non fiscales) |
|
|
- Matériel et fonctionnement civils |
39,8 |
43,3 |
|
|
|
- Fonctionnement des armées |
23,3 |
21,1 |
|
|
|
2. Charges de personnel |
610,7 |
652,1 |
2. Impôts et taxes (recettes fiscales) |
1.448,2 |
1.533,3 |
- RCS civiles |
372,8 |
389,4 |
|
|
|
- RCS militaires |
80,5 |
82,8 |
|
|
|
- Pensions civiles et militaires |
157,5 |
179,9 |
|
|
|
3. Autres charges de gestion courante |
|
|
|
|
|
- Pouvoirs publics |
4,4 |
4,5 |
|
|
|
- Subventions aux EPA |
52,8 |
48,2 |
|
|
|
- Interventions |
464,1 |
495,2 |
|
|
|
- Subventions d'investissement |
17,0 |
18,6 |
|
|
|
- Garanties (titre I) |
1,6 |
1,5 |
|
|
|
- Divers (titre I) |
1,9 |
2,0 |
|
|
|
- CST (hors affectation des recettes de privatisation |
|
|
|
|
|
4. Charges financières |
248,7 |
253,3 |
3. Produits financiers |
20,3 |
22,0 |
- Intérêts bruts de la dette |
248,7 |
253,3 |
- Recettes liées à la dette |
13,8 |
16,0 |
|
|
|
- Intérêts sur prêts du Trésor |
6,5 |
6,0 |
5 Charges exceptionnelles |
0,0 |
0,0 |
4. Produits exceptionnels |
0,0 |
0,0 |
6. Dotations aux amortissements et provisions |
|
|
5. Reprises sur amortissements et provisions |
|
|
7. Reversements sur recettes |
233,1 |
248,5 |
|
|
|
- Prélèvements CEE |
91,5 |
95,0 |
|
|
|
- Prélèvements collectivités locales |
141,6 |
153,5 |
|
|
|
|
|
|
Déficit section de fonctionnement |
98,8 |
68,7 |
TOTAL |
1.702,0 |
1.785,2 |
|
1.702,0 |
1.785,2 |
|
Dépenses |
|
Recettes |
||
Section d'investissement |
LFI 1998 |
PLF 1999 |
Section d'investissement |
LFI 1998 |
PLF 1999 |
1. Dépenses d'investissement |
159,1 |
167,9 |
Déficit section de fonctionnement |
- 98,8 |
- 68,7 |
- Equipement civil |
78,1 |
81,9 |
|
|
|
- Equipement militaire |
81,0 |
86,0 |
|
|
|
|
|
|
Cessions d'immobilisations financières |
|
|
2. Dépenses opérations financières |
375,0 |
299,7 |
Ressources d'emprunt |
604,9 |
518,8 |
- Remboursements d'emprunts (et autres charges en trésorerie) |
|
|
|
|
|
- Participations (dotations en capital) |
28,0 |
17,5 |
|
|
|
- Autres immobilisations financières (désendettement) |
|
|
|
|
|
TOTAL |
534,1 |
476,6 |
|
534,1 |
467,6 |
Source : Direction du budget
La
pertinence de la distinction entre section de fonctionnement et section
d'investissement laisse apparaître une différence importante de
conception budgétaire entre le gouvernement français et certains
Etats européens ou non.
Ainsi, le gouvernement considère que :
"
La distinction entre dépenses de fonctionnement et dépenses
d'équipement ne repose aujourd'hui sur aucune base juridique s'imposant
au gouvernement, ni sur aucun fondement méthodologique validé par
les comptables nationaux. Cette présentation purement comptable et sans
portée réelle n'est donc pas reprise par le gouvernement, qui
souligne que, pour la première fois depuis des années, le budget
de l'Etat sera en excédent hors charges de la dette
."
Si l'on peut admettre qu'il n'existe aucune méthodologie validée
aujourd'hui pour une présentation de cette nature, on ne peut toutefois
pas affirmer de façon radicale qu'elle ne repose sur aucune base
juridique. En effet, s'il n'existe pas de prescription contraignante en la
matière, le paragraphe 3 de l'article 104 C du traité
sur l'Union européenne prévoit que dans sa grille d'analyse
relative au déficit et dette publics excessifs, la Commission examine
notamment "
si le déficit public excède les dépenses
publiques d'investissement
". Cela suppose naturellement que les Etats
membres présentent des comptes de nature à fournir cette
information.
En outre, l'exemple de certains pays étrangers montre que la France
souffre d'un certain retard méthodologique, lié au vieillissement
de l'ordonnance organique de 1959.
Ainsi,
en Allemagne
, l'article 115 de la loi fondamentale
prévoit que l'endettement contracté au cours d'une année
ne doit pas excéder l'investissement. Le budget 1999,
élaboré par le précédent gouvernement,
prévoyait le respect de cette "règle d'or" (57,5 milliards
de deutschmark d'investissements pour 56,2 milliards de deutschmark de
déficit).
Au Royaume-Uni
, le gouvernement travailliste a
déposé un projet de "code pour la stabilité
budgétaire et fiscale" (code for fiscal stability), sorte de loi de
finances programmatique pour les cinq prochaines années.
Les prévisions budgétaires des années 1997-1998 à
2003-2004 y sont présentées en section de fonctionnement et
section d'investissement (dépenses courantes et dépenses en
capital), la section courante devant connaître un excédent
croissant de 5 milliards de livres en 1998-1999 à 14 milliards
de livres en 2003-2004.
Deux principes sont sous-jacents à cette méthode :
- "
la règle d'or : au cours du cycle économique
prévu par la loi le gouvernement n'empruntera que pour investir et non
pour financer les dépenses courantes ; et
- la dette publique appréciée en proportion du revenu
national sera maintenu à un niveau stable et prudent
"
8(
*
)
.
Dans sa présentation sur internet du budget 1998/1999, le ministre
des finances du
Québec
se réjouit que :
"
Le gouvernement cesse d'emprunter pour "l'épicerie" :
- Il y a quatre ans, le gouvernement devait emprunter pour payer
4,1 milliards de dollars de dépenses courantes ou "dépenses
d'épicerie". Aujourd'hui, toutes les dépenses courantes sont
payées comptant et le gouvernement enregistre un premier surplus depuis
vingt ans.
- Fini de reporter sur les jeunes le fardeau des dépenses
actuelles
."
2. Une amélioration du déficit appuyée sur la conjoncture et non sur des réformes : la persistance d'un déficit structurel élevé
Le
maintien de charges de structure trop lourdes par rapport au potentiel de
recettes à moyen terme se lit aussi dans la persistance d'un
déficit structurel encore trop élevé (1,8 % du PIB),
soit 159 milliards de francs.
1. Méthode de calcul du solde structurel
Le solde structurel des administrations publiques est calculé en
retranchant du solde effectif un solde "conjoncturel", mesurant l'impact
mécanique du cycle conjoncturel sur l'évolution des
dépenses et des recettes.
Le calcul du solde conjoncturel repose sur une estimation de l'écart
entre le PIB effectif et son niveau potentiel ("output gap"). Pour corriger les
recettes des effets de la conjoncture, on retient des élasticités
au PIB de moyen terme, pour la plupart proches de l'unité. Au sein des
dépenses publiques, seules sont corrigées les dépenses
induites par le chômage (dépenses d'indemnisation +
RMI + dépenses liées à l'emploi hors
allégements de charges)
9(
*
)
.
2. Le solde structurel selon les organisations internationales
La plupart des institutions intéressées par le suivi des
politiques budgétaires (gouvernements, OCDE, Commission
européenne, FMI) ont développé leurs propres outils.
Quelle que soit la méthode choisie, le "solde structurel" est toujours
calculé de façon indirecte, et constitue un résidu. La
démarche revient en effet à déduire du solde effectif des
administrations publiques une correction (le "solde conjoncturel") mesurant
l'impact sur les recettes et sur les dépenses publiques de
l'écart entre le niveau effectif du PIB et son niveau potentiel (ou
tendanciel).
a) Calcul d'output gap
La première source d'écarts entre les estimations de solde
structurel réside dans le calcul de l'output gap. Les soldes structurels
calculés par l'OCDE, le FMI ou par la Direction de la prévision
sont basés sur la détermination d'un potentiel d'activité
estimé à partir d'une fonction de production. La Commission
européenne se distingue en utilisant une technique de filtrage.
b) Détermination du solde conjoncturel
Une fois choisie la situation conjoncturelle de référence, il
reste à déterminer le périmètre des recettes et des
dépenses publiques qui doivent être corrigées de l'impact
"mécanique" des fluctuations cycliques de l'activité.
En ce qui concerne les recettes des administrations publiques, le FMI corrige
la conjoncture de l'ensemble des postes, tandis que la Commission
européenne, l'OCDE
(1)
et la Direction de la prévision
excluent les recettes non fiscales de cette correction. La plupart des
institutions internationales se réfèrent aux
élasticités des recettes au PIB calculées en 1990 par
l'OCDE (Chouraqui et alii, 1990). Ces estimations ont été
partiellement remises à jour par l'OCDE en 1995, et sont depuis reprises
par les services de la Commission européenne.
Le champ des dépenses publiques censées répondre
automatiquement aux fluctuations conjoncturelles est nettement plus
restreint : seules les dépenses d'indemnisation du chômage
(soit 2,4 % des dépenses publiques françaises en 1996) font
l'objet d'une correction par les organisations internationales. La charge
retenue par le Direction de la prévision est légèrement
plus large, incluant certaines dépenses de la politique de l'emploi.
Pour calculer un taux de chômage cohérent avec le sentier de
croissance pris comme référence et déterminer la part
conjoncturelle des dépenses de chômage, l'OCDE, la Commission et
la Direction de la prévision recourent à la méthode dite
du "coefficient d'Okun" dont les estimations varient d'une institution à
l'autre. Le FMI retient, quant à lui, comme référence le
taux de chômage structurel (NAWRU) cohérent avec son
scénario de croissance potentielle.
(1)
Cependant, avant 1995, l'OCDE retenait pour le poste
(autres recettes" une élasticité unitaire (Chouraqui et alii,
1990).
Le solde structurel des administrations publiques met en quelque sorte en
balance des recettes et des dépenses permanentes, hors de l'influence de
la conjoncture.
L'existence d'un déficit structurel témoigne
de ce que l'Etat "vit au-dessus de ses moyens".
Le rapport économique, social et financier (page 143),
synthétise parfaitement l'alternative qui se présente pour
réduire le déficit structurel :
"
Pour diminuer durablement le besoin de financement des administrations
publiques, ce qui correspond à une amélioration du solde
structurel, il est nécessaire, soit d'augmenter de manière
permanente les recettes (mais ceci alourdit encore le taux des
prélèvement obligatoires), soit de freiner les dépenses
par rapport à la croissance moyenne de la richesse nationale. Le solde
structurel est par exemple amélioré lorsque le montant des
intérêts payés par l'Etat diminue du fait de la
réduction de la part de la dette dans le PIB. De la même
façon, une maîtrise forte des dépenses liées
à la sécurité sociale améliore le solde structurel
des administrations publiques
."
Pour 1999, le solde structurel des administrations publiques françaises
s'améliorerait de 0,2 point, à 1,8 % du PIB,
ce qui
représente un excès de dépenses de 159 milliards de
francs
.
La lente amélioration du déficit structurel depuis 1997
|
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Déficit structurel |
- 4,6 |
- 4,0 |
- 2,6 |
- 2,2 |
- 2,0 |
- 1,8 |
Déficit conjoncturel |
- 1,1 |
- 0,9 |
- 1,5 |
- 0,8 |
- 0,9 |
- 0,5 |
Alors
que de 1994 à 1997, le déficit structurel s'était
réduit en moyenne de 0,8 point par an, le gouvernement n'a pas
poursuivi cette tendance, ne réduisant ce déficit que de
0,2 point par an depuis.
En revanche, alors que la composante conjoncturelle du déficit
était restée assez mal orientée de 1994 à 1997
(plus d'1 % du PIB en moyenne) ; elle est en voie
d'amélioration sensible depuis.
Ce constat témoigne de l'appui excessif que le gouvernement prend sur
l'amélioration de la situation économique, et de l'insuffisance
de l'effort d'adaptation des dépenses au potentiel de recettes
publiques
(un relèvement des prélèvements obligatoires
étant exclu).
Ceci entache la réduction du déficit
d'une forte sensibilité à la conjoncture.
3. La réduction du déficit de l'ensemble des administrations publiques ne repose pas sur les efforts de l'Etat
Une
incertitude supplémentaire provient du pari que prend le gouvernement
sur le résultat des administrations publiques autres que l'Etat.
Contrairement à la tendance poursuivie jusqu'en 1996, l'assainissement
de l'ensemble de nos finances publiques repose en grande partie sur les
équilibres, voire les excédents, des collectivités
locales, de la sécurité sociale et des organismes divers
d'administration centrale (en particulier la CADES).
Cette tendance s'accentue pour 1999, puisque la réduction à
- 2,3 % du PIB du déficit public au sens du traité sur
l'Union européenne repose sur un excédent de 0,4 % des
administrations publiques autres que l'Etat.
Objectifs de solde des administrations publiques en 1999 (% du PIB)
Solde des administrations publiques (total) |
- 2,3 % |
Etat |
- 2,7 % |
Collectivités locales |
+ 0,15 % |
Sécurité sociale |
+ 0,1 % |
Organismes divers d'administrations centrales |
+ 0,15 % |
Ce pari
est risqué. Si d'aventure la sécurité sociale, les
collectivités locales et les ODAC connaissaient en 1999, non pas un
léger excédent, mais un léger déficit
(0,1 point de PIB chacun), ce qui est plausible,
la France se
retrouverait en situation de déficit public excessif (3 %) au
regard du traité sur l'Union européenne.
Une très légère évolution de la situation
(détérioration de la conjoncture, dérapage des
dépenses de maladie, excès de charges des collectivités
locales...) porterait ainsi un coup très dur à
l'échafaudage du gouvernement.
A cet égard, il convient de rappeler que l'article 5 du
règlement n° 2466/97 du Conseil du 7 juillet 1997,
relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires
ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques
économiques, prescrit que le Conseil examine "
si l'objectif
budgétaire à moyen terme [...] offre une marge de
sécurité pour assurer la prévention d'un déficit
excessif
." Pour 1999, ce ne semble pas être le cas. Pour que cela le
soit "à moyen terme", le gouvernement devra proposer des efforts
supplémentaires pour l'Etat.
III. UNE ABSENCE DÉLIBÉRÉE DE MAÎTRISE DES DÉPENSES DU BUDGET GÉNÉRAL
Partie
intégrante de la stratégie du gouvernement avec la
réduction du déficit de l'Etat et la diminution du poids des
prélèvements obligatoires, la progression de la dépense
publique, fixée à 36,9 milliards de francs, est
destinée, en principe, à contribuer au financement des
priorités affichées par celui-ci :
" l'emploi, la
justice sociale et l'amélioration de la vie quotidienne ".
Cette augmentation se décompose en :
•
20,9 milliards de francs, résultant mécaniquement
de la hausse des prix estimée en moyenne annuelle, hors tabac, par le
gouvernement à 1,3 %
10(
*
)
;
• 16 milliards de francs correspondant à la croissance des
dépenses de 1 % en volume voulue par le gouvernement afin de
financer lesdites priorités.
Cette progression contribuera à rigidifier la structure de la
dépense publique et comporte par ailleurs de sérieux risques de
dérive.
Les priorités ainsi définies se traduisent en
effet par une montée en charge fortement progressive qui pèsera
inévitablement sur l'élaboration de la loi de finances pour
2000.
A. UN OBJECTIF POLITIQUE : ACCROÎTRE LA DÉPENSE PUBLIQUE EN VOLUME
1. L'accroissement de 1% en volume de la dépense publique
Dans
l'exposé général des motifs du projet de loi de finances
pour 1999, le gouvernement indique que
" les dépenses du budget
général se montent à 1.623,6 milliards de francs
à structure constante soit une progression en volume de 1%, compte tenu
d'une évolution prévisionnelle des prix estimée à
1,3 % ".
L'augmentation des dépenses est au total de 2,3 %, soit
prés de deux fois le niveau de l'inflation prévue en 1999.
Par ailleurs, il apparaît d'ores et déjà prévisible
que l'augmentation des prix sera en 1999 inférieure à ce chiffre
de 1,3 %, et cela dans une proportion de 0,2 à 0,3 point.
Par voie de conséquence, la progression en volume des dépenses du
budget général risque d'en être d'autant augmentée
et supérieure au chiffre de 1% avancé par le
gouvernement.
2. Un choix qui ne semble pas susciter l'enthousiasme de la commission des finances de l'Assemblée nationale
Par
delà les querelles quant à l'appréciation du niveau
réel de la progression des dépenses du budget
général en fonction de l'indicateur retenu, c'est
l'appréciation que la commission des finances de l'Assemblée
nationale porte sur l'évolution de la dépense publique en 1999
qui retient l'attention.
En effet, la volonté du gouvernement d'accroître les
dépenses du budget général de 1% en volume
n'apparaît pas totalement partagée par celle-ci, et notamment son
rapporteur général qui, nonobstant les affirmations du
gouvernement tient à y déceler une
" augmentation
contenue des charges de l'Etat "
au terme d'une démonstration
particulièrement précise et argumentée
11(
*
)
.
Celle-ci lui permet de conclure que
" compte tenu d'une
prévision d'inflation établie à 1,3%, dans le
présent projet de loi de finances, le montant des charges de l'Etat en
1999
12(
*
)
, considéré dans le
périmètre de 1998, serait quasiment stabilisé, avec une
progression limitée à 0,2 % . Ce constat objectif et
indiscutable conduit à relativiser quelque peu les appréciations
tendancieuses qui courent ça et là sur un prétendu
dérapage, voire une supposée explosion de la dépense
publique.".
Ce jugement semble traduire de la part de l'Assemblée
nationale
13(
*
)
une moindre dilection pour la
dépense publique que celle affichée par le
gouvernement.
B. UNE PROGRESSION DES DÉPENSES DU BUDGET GÉNÉRAL DE 36,9 MILLIARDS DE FRANCS
1. A structure constante une augmentation de 36,9 milliards de francs
A
structure constante, les dépenses du budget général
s'élèvent dans le projet de loi de finances pour 1999 à
1.623,6 milliards de francs contre 1.586,7 milliards de francs en
1998. Cette progression de 36,9 milliards de francs représente une
hausse de 2,3 % qui est presque deux fois supérieure à
l'inflation.
Par ailleurs, si l'on prend en compte le solde des comptes spéciaux du
Trésor qui est passé d'une charge nette de 4,6 milliards
à un produit net de 3,1 milliards
14(
*
)
, la hausse totale des charges est de
29,2 milliards, soit une progression de 1,83 %.
|
LFI 1998 |
PLF
1999
|
|
PLF
1999
|
A/Dette publique et garanties |
238.308 |
240.729 |
1,0 % |
|
dont dette publique nette |
234.842 |
237.247 |
1,0 % |
|
B/Budgets civils |
|
|
|
|
Pouvoirs publics |
4.395 |
4.502 |
2,4 % |
|
Moyens des services |
569.371 |
581.690 |
2,2 % |
607.200 |
Interventions publiques |
464.117 |
481.146 |
3,7 % |
495.200 |
Dépenses civiles en capital |
72.211 |
72.004 |
- 0,3 % |
78.000 |
Total |
1.110.094 |
1.139.342 |
2,6 % |
|
C/Budget militaire |
|
|
|
|
Dépenses ordinaires (y compris pensions) |
157.264 |
157.524 |
0,2 % |
|
Dépenses militaires en capital |
81.003 |
86.000 |
6,2 % |
|
Total |
238.267 |
243.524 |
2,2 % |
|
Total budget général (A+B+C) |
1.586.670 |
1.623.595 |
2,3 % |
|
D/Solde des comptes spéciaux du Trésor |
4.600 |
- 3.114 |
|
|
Total des charges (A+B+C+D) |
1.591.270 |
1.620.481 |
n.s. |
1.666.091 |
Recettes nettes totales |
1.333.387 |
1.396.882 |
|
1.429.539 |
Solde général |
- 257.882 |
|
|
- 236.552 |
2. 45,6 milliards de francs de rebudgétisations
Outre
ces dépenses calculées à structure constante, il convient
également de prendre en compte 45,6 milliards de charges
rebudgétisées (auxquelles s'imputent 37,2 milliards de
recettes) qui correspondent principalement aux fonds de concours alimentant les
services financiers, aux pensions des fonctionnaires de la Poste ou à
des dépenses qui figuraient dans la loi de finances pour 1998 au sein de
comptes spéciaux du Trésor.
Cette intégration présentée par le gouvernement comme une
volonté de transparence, correspond en réalité aux
" recommandations
"
formulées en ce sens par le
Conseil constitutionnel, notamment dans sa décision du
30 décembre 1997 relative à la loi de finances pour
1998
15(
*
)
.
Dans ce cadre, les dépenses civiles du titre III progressent de
6,6 % (607,2 milliards) en raison de l'intégration de
14,8 milliards de francs au titre des pensions de La Poste, et celles du
titre IV de 6,7 %, notamment du fait de la "rebudgétisation"de
l'allocation de parent isolé (4,2 milliards de francs).
De même, en raison de 6 milliards de francs de
rebudgétisations sur les dépenses civiles en capital
(titre V), celles-ci augmentent de 8,3 %. Cette augmentation ne
compense cependant que partiellement la forte baisse des dépenses en
capital des comptes d'affectation spéciale : - 34,8 %,
soit 27 milliards de francs contre 41,4 milliards de francs en 1998.
Les " opérations exceptionnelles " du projet de Loi de Finances pour 1999
(en millions de francs)
|
Total des opérations exceptionnelles |
|
|
|
|
Environnement |
1.768 |
|
145 |
|
1.623 |
|
|
|
|
|
|
Charges communes |
15.372 |
14.822 |
550 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Services communs et finances |
11.249 |
10.720 |
|
529 |
|
|
|
|
|
|
|
Industrie |
447 |
|
4 |
|
443 |
|
|
|
|
|
|
Santé et solidarité |
4.233 |
|
4.233 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Urbanisme et logement |
3.940 |
|
510 |
|
3.430 |
|
|
|
|
|
|
Intérieur et décentralisation |
8.600 |
|
8.600 |
|
|
Total des budgets civils |
45.609 |
25.542 |
14.042 |
529 |
5.496 |
(Source : Ministère de l'Economie)
C. LE RENFORCEMENT DU POIDS DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT
1. Une apparente stabilité
L'examen des principaux postes de dépenses et de leur évolution semble refléter une très légère diminution du poids relatif des dépenses ordinaires 16( * ) par rapport aux dépenses en capital, rompant en cela avec une tendance lourde des budgets de ces dernières années.
2. Une analyse par titre plus nuancée
La
comparaison à structure constante des différents titres
démontre cependant la fragilité d'une telle évolution. En
effet :
•
la progression limitée à 2,4 milliards de francs des
charges financières issues de la dette (+ 1 %) est liée
au bas niveau des taux d'intérêt
17(
*
)
, soit à des raisons exogènes,
indépendantes de la volonté du gouvernement ( " effet prix
") ; a contrario, le financement du déficit budgétaire et
de divers engagements de l'Etat contribue à accroître
mécaniquement les charges de 12,5 milliards de francs (" effet
volume ") ;
Réponse au questionnaire de la commission des finances :
la
charge de la dette en 1999
L'estimation de la charge de la dette pour 1999 de 237,2 milliards de
francs tient compte de plusieurs paramètres :
1.
Un effet volume
, lié au financement du déficit
de l'exercice (236,6 milliards de francs) et de divers engagements de
l'Etat pour 9 milliards de francs :
les émissions
correspondantes entraînent une progression tendancielle des charges de la
dette de près de 12,5 milliards de francs.
2. Des effets prix :
il faut d'une part prendre en compte
les gains de refinancement des titres
longs
: la dette à taux fixe arrivant à
échéance en 1998 est refinancée à des conditions de
taux plus avantageuses
ce qui permet d'engranger en 1999 une économie
nette de plus de 7,5 milliards de francs ;
a contrario la hausse anticipée de taux courts devrait se traduire par
un surcoût net de 1,7 milliard de francs en 1999 de la charge des
intérêts des BTF.
3. De la politique de gestion active de la dette
: à travers
des opérations de rachats et d'échanges,
elle permet
également de dégager des économies en tirant profit des
opportunités qu'offre l'orientation des marchés financiers
. A
titre d'exemple, l'opération d'échange sur l'Ecu conduite le
15 avril 1998, sur une enveloppe de plus de 60 milliards de francs,
permet de dégager une économie nette de 17,7 milliards de
francs en 1999.
Au total la progression des charges de la dette est de 2,4 milliards de
francs par rapport à la loi de finances initiale pour 1998.
(Source : Ministère de l'économie).
•
les charges de personnel civil hors rebudgétisations progressent de
3,6 % contre 2,2 % pour l'ensemble du titre III,
en raison du
coût de l'accord salarial dans la fonction publique (14,8 milliards
de francs en 1999) ; les crédits de fonctionnement des services
n'augmentent en conséquence que de 1,1 % ;
• l'augmentation de 3,7 % des dépenses civiles du titre
IV
résulte de la mise en oeuvre des priorités politiques du
gouvernement notamment en matière sociale ou
économique ;
elles se révéleront
particulièrement lourdes pour les finances publiques dans les prochaines
années ;
• les dépenses civiles en capital baissent de 0,3 %
tandis
que la progression des dépenses militaires en capital de 6,2 %,
soit 86 milliards de francs ne correspond qu'au strict respect des
dispositions de la loi de programmation ;
par ailleurs il convient de
rappeler que ces dépenses militaires en capital sont très
régulièrement affectées en cours d'année par des
mesures de régulation budgétaire
. Ainsi le décret
d'avance du 21 août 1998 a fait financer la hausse de
3,8 milliards de francs des rémunérations militaires au sein
du titre III par l'annulation de 3,85 milliards de crédits
militaires sur les titres V et VI.
D. LE SOUCI DU GOUVERNEMENT : FINANCER SES PRIORITÉS
1. La diversité des priorités du gouvernement
Comme
l'indique le gouvernement, il s'agit d'une
" augmentation
maîtrisée des dépenses lui permettant par ailleurs de
financer ses priorités ".
Les budgets ainsi déclarés prioritaires sont au nombre de
onze !
18(
*
)
- Ville
|
+ 32,4 %
|
La
diversité et le nombre de ces ministères
" prioritaires " conduisent cependant à relativiser l'effort
entrepris en la matière par le gouvernement.
Ainsi les deux budgets connaissant en 1999 la plus forte augmentation, celui de
la ville et celui de l'environnement, représentent respectivement 0,06%
et 0,13% de l'ensemble des dépenses du budget général
tandis que l'accroissement de leurs crédits budgétaires,
fixé à 526 millions de francs, correspond à seulement 1,4%
de la hausse totale des dépenses du budget général pour
1999.
2. Les véritables priorités budgétaires: les interventions sociales et les rémunérations publiques
L'examen des principaux postes de dépenses du budget général conduit à avoir une autre approche des priorités du gouvernement. Celles-ci sont en réalité de deux ordres et représentent un montant de dépenses de près de 50 milliards de francs.
a) les priorités en matière d'interventions : 25 milliards de francs
•
la loi sur les 35 heures
: le " coût brut
budgétaire " de cette loi est estimé à 7 milliards
par le gouvernement dont 3,5 milliards à la charge de l'Etat ; le
reliquat est financé par les régimes de Sécurité
sociale selon des modalités qui restent encore à définir.
A cette somme s'ajoutent 200 millions de francs de crédits
destinés aux aides au conseil.
• le dispositif des "emplois-jeunes".
Le gouvernement évoque
un coût total de 14,3 milliards de francs en 1999. Celui-ci est en
réalité de 15,932 milliards au total, compte tenu des sommes
également prises en charge par les budgets de l'éducation
nationale, de l'outre-mer et de l'intérieur.
• la loi relative à la lutte contre l'exclusion
. Le
coût budgétaire en 1999 est de 5,4 milliards conformément
au chiffrage effectué par votre commission
19(
*
)
.
b) les rémunérations publiques : 26,25 milliards de francs
•
le coût de l'accord salarial du 10 février 1998
est en 1999
de 14,8 milliards pour le budget de l'Etat.
• les mesures catégorielles
, les transformations d'emploi,
le " GVT-solde " : 5,6 milliards de francs.
• la dérive spontanée des pensions de la fonction
publique
: 5,85 milliards de francs.
On peut ainsi relever que le coût en 1999 de l'accord salarial dans la
fonction publique, soit 14,8 milliards de francs est supérieur au
montant des crédits consacrés par le budget de l'emploi au plan
"emplois-jeunes" pour cette même année
(14,3 milliards).
E. LA POURSUITE DE LA "RIGIDIFICATION" DE LA DÉPENSE PUBLIQUE
1. La position contradictoire du gouvernement
Dans le
rapport préparatoire au débat d'orientation budgétaire de
juin 1998, le gouvernement avait en effet regretté que
" la
structure des dépenses publiques de l'Etat se soit rigidifiée au
fil des ans "
. A l'appui de cette affirmation il avait cité les
trois principaux postes de dépenses de l'Etat (fonction publique,
intérêts de la dette et interventions pour l'emploi).
Il avait relevé que ceux-ci représentaient en 1998 88% des
recettes fiscales nettes, contre 57% en 1990.
Or ces postes de
dépenses ne sont en 1999 aucunement concernés par une
éventuelle limitation de la progression de la dépense publique,
notamment pour ce qui concerne les rémunérations
publiques
20(
*
)
qui passent de 56,4
%
des recettes fiscales nettes de l'Etat en 1998 à 56,8 % pour 1999.
Part des recettes fiscales nettes consacrées aux charges de la dette, aux dépenses de fonction publique et aux interventions pour l'emploi
(source : Ministère de l'économie)
2. L'analyse de la progression des dépenses par la commission des finances
Le
projet de loi de finances pour 1999 n'infléchit pas le mouvement de
rigidification de la dépense publique naguère
dénoncé par le gouvernement.
En effet, si l'on examine l'augmentation de 36,9 milliards de francs des
dépenses du budget général au vu des trois postes de
dépenses jugés particulièrement rigides par le
gouvernement,
on constate que, arithmétiquement,
l'intégralité de la progression correspond à la hausse des
dépenses d'intervention en matière d'emploi, de la charge de la
dette ainsi qu'à la progression des rémunérations
publiques. C'est-à-dire des dépenses de structure.
Les véritables priorités du gouvernement
L'accroissement de la charge nette de la dette |
+ 2,4 milliards de francs |
La dérive spontanée des pensions |
+ 5,85 milliards de francs |
L'accord salarial dans la fonction publique |
+ 9,5 milliards de francs |
coût 1998 : 5,3 milliards de francs ;
|
|
Les mesures catégorielles , les transformations d'emploi, le " GVT-solde " |
+ 5,6 milliards de francs |
L'exclusion |
+ 4,3 milliards de francs |
crédits en 1998 ; 1,1 milliard de francs ;
|
|
Les 35 heures |
+ 0,7 milliard de francs |
crédits en 1998 : 3 milliards de francs (provision
prélevée sur les crédits de la ristourne dégressive
fusionnée qui ont été sous évalués et
devront être complétés en collectif 1998) ;
|
|
Les emplois-jeunes |
+ 7,582 milliards de francs |
crédits en 1998 ; 8,35 milliards de francs ;
|
|
Le plan étudiant |
+ 0,9 milliard de francs |
Au total |
36,8 milliards de francs |
F. DE SÉRIEUX RISQUES DE DÉRIVE BUDGÉTAIRE POUR L'AVENIR
1. Une montée en charge fortement progressive des projets prioritaires du gouvernement
Les projets prioritaires du gouvernement se caractérisent, au plan budgétaire, par une montée en charge rapide qui jouera pleinement lors de l'élaboration des prochains budgets :
a) la loi contre les exclusions : 9,4 milliards de francs en 2000
Son
coût est en 1998 de 5,4 milliards de francs.
Il augmentera de 4 milliards de francs d'ici l'année prochaine.
Cela
représente un coût en année pleine de 10 milliards de
francs
ainsi que votre commission l'avait démontré lors de
l'examen de ce projet de loi.
Le financement du projet de loi d'orientation
relatif à la lutte
contre les exclusions.
Dans
l'avis n°478 (1997-1998) présenté au nom de la Commission
des finances, notre collègue Jacques Oudin a rappelé qu'en
dépit du consensus existant sur la nécessité d'agir plus
efficacement contre les exclusions, la contrainte financière s'imposait
dans ce domaine comme ailleurs.
A ce titre il a tenu à procéder à un chiffrage
précis et détaillé de ce texte :
son coût
budgétaire est de 15,9 milliards de francs sur trois ans
pour
l'Etat et se caractérise par une montée en charge fortement
progressive :
1,1 milliard en 1998, 5,4 milliards en 1999 et
9,4 milliards en 2000 ;
soit un coût en année pleine
de prés de 10 milliards de francs.
Il a également relevé les incertitudes tenant à son mode
de financement
qui doit en principe, d'après le ministre de
l'emploi et de la solidarité, s'effectuer dans le cadre d'un
redéploiement général sur l'ensemble du budget de l'Etat.
Compte tenu cependant, du coût en année pleine de ce texte, ainsi
que du caractère potentiellement inflationniste d'un certains nombre de
ses dispositions, il a été conduit à douter
sérieusement de la réalité ainsi que du caractère
effectif de ces redéploiements :
"
ce raisonnement
repose sur un pari dont on ne peut que souhaiter le succès mais qui
reste à nos yeux assez audacieux
".
b) le plan " emplois-jeunes " : 32 milliards de francs à compter du 1er janvier 2001
Ce
coût est calculé sur la base d'un objectif fixé par le
gouvernement de 350.000 emplois crées, d'un coût unitaire à
la charge du budget de l'emploi de 92 000 FF par an.
A ce titre, votre commission tient à relever que le coût de ce
projet pour 1999 est d'ores et déjà minoré par le
gouvernement.
Les crédits figurant au budget de l'emploi pour 1999,
soit 13 ,8 milliards de francs (hors 380 millions de francs
transférés vers le budget de l'outre-mer) ne permettent de
financer que le " stock " qui existera au 1
er
janvier
1999
21(
*
)
.
L'enveloppe budgétaire actuelle telle qu'elle figure dans le projet
de loi de finances ne permettra pas de financer à compter du
1
er
janvier prochain le recrutement des 100.000 nouveaux
emplois-jeunes qui correspondent à l'objectif que s'est fixé le
gouvernement pour 1999.
Il y a en effet pour 1999 une sous-évaluation du coût de ce
dispositif que l'on peut estimer à près de 4,5 milliards de
francs
sur la base d'une montée en charge linéaire et
progressive de ces 100.000 nouveaux emplois-jeunes.
Coût budgétaire des emplois-jeunes dans le
projet de loi de finances pour 1999
(en millions de francs)
Budget |
Montant (en millions de francs) |
Observations |
Emploi (chapitre 44-01) |
13.795 |
Crédits de rémunération |
|
125 |
Mesures d'accompagnement |
|
13.920 |
|
Enseignement scolaire |
|
|
Chapitre 36-71 |
976,5 |
Financement de 56.600 emplois-jeunes (moyens nouveaux) |
Chapitre 36-10 |
8 |
Formation des emplois-jeunes (CNED)(moyens nouveaux) |
Chapitre 43-02 |
78,6 |
Financement de 3.000 emplois-jeunes (moyens nouveaux) |
|
1.063,1 |
|
Enseignement supérieur (chapitre 36-11 |
|
Rémunération de 400 emplois jeunes-docteurs (moyens nouveaux) |
Outre-Mer (chapitre 44-03) |
445 |
dont 380 millions de francs en provenance du budget de l'emploi |
Intérieur |
|
|
Chapitre 31-96 |
275,8 |
8.250
adjoints de sécurité
|
Chapitre 34-41 |
221,8 |
et 7.600 en PLF 1999 |
|
497,6 |
|
TOTAL |
15.932,6 |
|
c) les 35 heures : coût brut budgétaire de 7 milliards de francs en 1999
Ce
coût brut a été déterminé par le gouvernement
sans que celui-ci n'en fournisse les éléments de calcul.
Par ailleurs, la moitié de cette dépense a été
mise à la charge des régimes de Sécurité sociale de
façon arbitraire et sans aucun fondement légal,
puisque tout
allégement de charges sociales doit, conformément à la loi
du 25 juillet 1994, être intégralement compensé par l'Etat.
En l'espèce, cela n'est pas le cas.
De même, on peut continuer à s'interroger sur les conditions
de financement de ce dispositif en loi de finances pour 1998
: la
provision prévue pour un montant de 3 milliards de francs avait alors
été prélevée, ainsi que l'avait
dénoncé votre commission, sur les crédits consacrés
au financement de la " ristourne dégressive fusionnée "
qui avaient alors été manifestement sous-évaluées.
De ce fait, nonobstant les déclarations contraires du gouvernement
à l'époque, il lui appartiendra de pallier cette sous-estimation
volontaire, et cela lors du prochain collectif budgétaire de 1998. En
effet, le gouvernement prévoit, au titre du financement de cette
ristourne, des dépenses à hauteur de 41,5 milliards de
francs alors que seulement 38,77 milliards de francs de crédits
avaient été prévus dans le projet de loi de finances
initiale
22(
*
)
.
Par ailleurs, votre rapporteur tient à rappeler que la Commission des
affaires sociales avait estimé le coût brut des 35 heures
à 13,5 milliards
en première année
et à
36 milliards en deuxième année et cela sur la base de
450.000 emplois crées
23(
*
)
.
d) l'accord salarial dans la fonction publique : 23,3 milliards de francs en 2000
Le
coût annuel total de l'accord salarial dans la fonction publique sera
pour l'Etat de 23,3 milliards de francs en 2000,
en progression de
8,5 milliards de francs par rapport à 1998.
Il aura par ailleurs des effets induits sur la fonction publique territoriale
et hospitalière estimés à 7,7 milliards de francs en
1999.
Le coût de l'accord salarial du 10 février 1998
(En milliards de francs)
|
Coûts annuels supplémentaires par rapport à l'année précédente |
Coûts annuels totaux |
||||
|
en 1998 |
en 1999 |
en 2000 |
en 1998 |
en 1999 |
en 2000 |
I - Fonction publique de l'Etat |
|
|
|
|
|
|
Revalorisation du point |
4,3 |
6,7 |
5,8 |
4,3 |
11 |
16,8 |
Mesures d'accompagnement (dont points uniformes et points différenciés) |
1,0
|
2,8
|
2,7
|
1,0
|
3,8
|
6,5
|
Total |
5,3 |
9,5 |
8,5 |
5,3 |
14,8 |
23,3 |
II -
Fonction publique territoriale
|
2,2 |
4,3 |
3,5 |
2,2 |
6,5 |
10,0 |
III -
Fonction publique hospitalière
|
1,8 |
3,4 |
2,8 |
1,8 |
5,2 |
8,0 |
Total trois fonctions publiques |
9,3 |
17,2 |
14,8 |
9,3 |
26,5 |
41,3 |
Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF 1999
Cet accord se traduit en effet par un accroissement du pouvoir d'achat des fonctionnaires qui vient ainsi conforter une tendance lourde de ces dernières années ainsi que le relève d'ailleurs lui-même le gouvernement : " Entre 1990 et 1998 , la rémunération moyenne 24( * ) des fonctionnaires de l'Etat a progressé en moyenne de 5,0 % par an, soit, compte tenu de l'inflation hors tabac, 3,2 % de gains de pouvoir d'achat en moyenne par an, soit plus de 28 % de gain cumulé sur huit ans. Pour 1998, la progression prévue est de 4,2 %, soit une augmentation de 3,4 % en francs constants ".
e) Le plan social étudiant : 7,2 milliards de francs sur quatre ans
Ce plan
consiste en 1999 à abonder les crédits du budget de
l'enseignement supérieur de 833,27 millions de francs principalement au
titre de la revalorisation des bourses.
Il doit être mis en place pour une durée de quatre ans, et son
coût total est évalué à plus de 7 milliards de
francs.
2. Des projets annoncés mais non financés par le projet de loi de finances pour 1999
On peut
en outre s'interroger sur la mise en place et, partant, l'impact
budgétaire de la création du
fonds exceptionnel
d'aménagement des lycées
qui prévoit d'accorder sur
4 ans une somme de 4 milliards de francs de prêts à taux
zéro aux régions. Par ailleurs il est également
envisagé de recruter 14.000 adultes supplémentaires dans ces
établissements selon des modalités encore inconnues.
De même le ministère de la santé a annoncé la mise
en place au cours de l'année 1999
du projet de loi instaurant une
couverture médicale universelle (CMU
). Or son coût
était estimé par le gouvernement à 5 milliards de
francs par an : à défaut de figurer dans le présent
projet de loi de finances, il devra donc être nécessairement
financé par un collectif budgétaire en 1999.
3. L'explosion programmée des retraites de la fonction publique
Cette
réflexion a déjà été entamée à
l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 1998, au cours duquel
votre rapporteur général avait souligné que
" les
charges de pension sont amenées à progresser, au cours des
années à venir, dans des proportions
considérables "
. De même lors du Débat
d'orientation budgétaire de juin 1998 votre commission avait tenu
à ce que soient prises
" rapidement les mesures
nécessaires pour faire face au choc démographique des
années à venir, c'est à dire réformer les
régimes de retraite, en particulier les régimes
publics. "
Il est en effet urgent que le gouvernement agisse en ce domaine. Plus
l'action à entreprendre sera réalisée tôt, plus elle
sera efficace et moins elle sera douloureuse.
Dans cette perspective les réflexions actuellement menées en ce
domaine par le Commissariat Général au Plan devraient contribuer
à la clarification du débat, notamment en ce qui concerne
l'intérêt pour les régimes publics d'un allongement de la
durée de cotisation ainsi que son utilité pour les consolider
financièrement.
a) La situation démographique du régime de retraite de la fonction publique d'État
Dès 2000, et surtout à compter de 2005 la situation démographique du régime de retraite de la fonction publique se dégrade fortement.
Evolution du rapport démographique
Années |
1995 |
2000 |
2005 |
2010 |
2015 |
Taux de croissance |
Retraités de droit direct |
828.308 |
956.711 |
1.126.718 |
1.318.503 |
1.491.840 |
+ 80,1 % |
Cotisants 1 |
2.081.689 |
2.081.689 |
2.081.689 |
2.081.689 |
2.081.689 |
|
Rapport démographique |
2,51 |
2,18 |
1,85 |
1,58 |
1,40 |
- 44,6 % |
Régime général |
1,75 |
1,69 |
1,72 |
1,57 |
1,37 |
- 21,7 % |
1. Par convention la population active est considérée comme stable sur la période considérée,
Source : Direction du budget
b) les perspectives d'évolution financière
Les différents constats existant en la matière insistent tous sur la question de la soutenabilité budgétaire de ces évolutions et, partant, sur leurs implications en terme d'équité et de solidarité intra-générationnelle.
(1) D'après les chiffres du Commissariat général au Plan (rapport Briet de 1995), la croissance serait "rapide et cumulative".
|
1995 |
2005 |
2015 |
Montant des prestations retraite (en milliards, à francs constants) |
108 |
153 |
226 |
Hausse des taux de cotisation nécessaire pour maintenir l'équilibre du régime des fonctionnaires |
+ 1,3 |
+ 10,7 |
+ 20,6 |
Hausse nécessaire pour équilibrer le régime général |
+ 0,6 |
+ 0,9 |
+ 4 |
(2) Pour la Direction du Budget (chiffrage de 1997) :
Le surcoût est estimé en 2010 à 79 milliards de francs, en francs constants, et serait financé à moins de 10 % par la croissance des cotisations. Le reliquat soit près de 90 % serait à la charge de l'Etat .
(3) Pour la Cour des Comptes qui le souligne régulièrement dans ses rapports notamment sur l'exécution des budgets, " l'évolution des charges de pension constitue une hypothèque sérieuse pour les budgets futurs .
c) un effort de clarification est indispensable
Il est
indispensable avant de procéder à toute réforme en ce
domaine de disposer d'un " état des lieux " précis
et incontestable faisant notamment apparaître pour mieux les distinguer
les versements de l'Etat en sa qualité d'employeur ainsi que la
subvention d'équilibre que, de fait, celui-ci verse en tant que garant
de l'équilibre financier du système et, partant, de sa
pérennité.
Il serait opportun, dans le respect des dispositions organiques applicables en
ce domaine, de pouvoir disposer au sein du budget de l'Etat d'un compte
spécifique des pensions. Une première étape semble avoir
été franchie avec la présentation dans le rapport sur les
rémunérations publiques joint au projet de loi de finances pour
1999 d'un compte simplifié des pensions en 1997.
Ce compte simplifié contribue à faire ressortir deux
éléments, d'une part que
" les recettes sont
principalement composées de contributions venant des employeurs qui
assurent 84,23 % de l'ensemble des recettes, dont prés de 71 %
à la charge du seul budget de l'Etat ".
Et d'autre part, il met en évidence
" l'effort budgétaire
de l'Etat. On peut calculer un taux de cotisation patronale implicite en
rapportant cet effort budgétaire net à la masse salariale
indiciaire. En 1997, ce taux s'établit à 39,01 % pour les
fonctionnaires civils et à 101,71 % pour les militaires, soit
47,15 % pour l'ensemble des ressortissants du code des pensions civiles et
militaires de retraite de l'Etat. Il devrait atteindre, dès 1998,
47,62 % et s'établirait à 51,2 % à l'horizon
2002 ".
Compte simplifié 1997
|
En millions de francs |
Evolution par rapport à 1996 |
I. Emplois |
|
|
Pensions |
164.494 |
+ 3,48 % |
-dont civils hors PTT |
97.621 |
+ 4,37 % |
- dont La Poste |
13.626 |
+ 3,58 % |
- dont France Télécom |
8.356 |
+ 3,85 % |
- dont militaires |
44.891 |
+ 1,46 % |
Transferts |
22.030 |
+ 0,43 % |
- dont compensation généralisée |
12.848 |
+ 5,34 % |
- dont compensation spécifique |
8.752 |
- 6,30 % |
- dont titulaires sans droits |
430 |
- 9,31 % |
Total emplois |
186.524 |
+ 3,12 % |
II. Ressources |
|
|
Cotisations salariales (retenues pour pension) |
29.416 |
+ 1,83 % |
Contributions employeurs (hors Etat) |
25.549 |
+ 2,20 % |
- dont contribution établissements publics |
4.520 |
- 3,98 % |
- dont remboursement La Poste |
12.883 |
+ 1,30 % |
- dont contributions au titre des pensionnés de France Télécom |
8.146 |
+ 6,89 % |
Sous-total (hors contribution Etat) |
54.965 |
+ 2,02 % |
Solde : charge nette pour l'Etat |
131.559 |
+ 3,60 % |
Total ressources |
186.524 |
+ 3,12 % |
La
reconstitution des ressources et des emplois du régime des
fonctionnaires civils de l'Etat et des militaires permet de mettre en
évidence
l'effort budgétaire net de l'Etat
. On peut
calculer un
taux de cotisation patronale implicite
en rapportant cet
effort budgétaire net à la masse salariale indiciaire. En 1997,
ce taux s'établit à 39,01 % pour les fonctionnaires civils
et à 101,71 % pour les militaires, soit 47,15 % pour
l'ensemble des ressortissants du code des pensions civiles et militaires de
retraite de l'Etat.
Il devrait atteindre, dès 1998, 47,62 % (39,78 % pour les
fonctionnaires civils et 98,90 % pour les militaires) et
s'établirait à 51,2 % à l'horizon 2002, soit
44,5 % pour les seuls fonctionnaires civils et 92,1 % pour les
militaires.
(source : rapport sur les rémunérations publiques-PLF 1999)
IV. DES RECETTES EN EXPANSION
A. LA CROISSANCE ATTENDUE DES RECETTES POUR 1999 DONNE UNE MARGE DE MANOEUVRE AU GOUVERNEMENT
1. D'importants surcroîts de recettes attendus
Le
projet de loi de finances pour 1999 est élaboré dans des
conditions très favorables
, tenant à la fois aux recettes
supplémentaires acquises en 1998 et à des prévisions de
croissance relativement optimistes au regard des évolutions
prévisibles de la conjoncture internationale.
La loi de finances pour 1998 prévoyait une augmentation des recettes
totales du budget de l'Etat de 43 milliards de francs, soit une progression de
3,5 % par rapport aux estimations révisées de 1997, dont
3,1 % d'augmentation pour les recettes fiscales nettes. Cette anticipation
était fondée sur une prévision de croissance de
l'économie française plus élevée, estimée
à 4,2 % en valeur.
Selon les évaluations révisées, les recettes du budget
général
25(
*
)
s'élèveraient à 1.350,1 milliards de francs en 1998,
soit 16,7 milliards de francs de mieux que les prévisions de
recettes de la loi de finances
26(
*
)
.
Le projet de loi de finances pour 1999 intègre ces prévisions de
recettes supplémentaires.
Par ailleurs, la prévision de croissance de l'économie
française est estimée à 3,8 % en valeur pour 1999,
soit 2,7 % en volume et 1,1 % en évolution des prix du PIB
(1,3 % pour les prix à la consommation).
Au total, l'évolution "spontanée" des recettes fiscales
expliquera donc l'essentiel de l'évolution des recettes du budget
général en 1999.
Par rapport à la loi de finances pour 1998, les recettes fiscales nettes
devraient en effet progresser de 85,1 milliards de francs, dont
11,6 milliards de francs supplémentaires du fait de la
révision de recettes en 1998 et 73,5 milliards de francs en 1999
dont 71,1 milliards de francs du fait de l'évolution
"spontanée" des recettes. Les recettes fiscales nettes devraient donc
progresser de 5 % en 1999.
En dehors de ces évolutions, les modifications seront
réduites
: divers facteurs (incidence en 1999 de mesures prises dans
des lois de finances précédentes) réduiront les recettes
fiscales de 2,7 milliards de francs alors que les mesures du projet de loi de
finances pour 1999 alourdiront les recettes fiscales de 8 milliards de francs.
Les recettes du budget général : de la loi de finances pour 1998 au projet de loi de finances pour 1999
|
1998 (LFI) |
1998 (révisé) |
PLF1999 |
Ecart de recettes de PLF99/révisé 98 |
Ecart de recettes de PLF99/LFI 98 |
recettes fiscales nettes |
1448,2 |
1459,8 |
1533,3 |
73,5 |
85,1 |
dont rebudgétisation 27( * ) |
0 |
0 |
10,9 |
10,9 |
10,9 |
recettes non fiscales (hors recettes d'ordre) |
141,2 |
144,9 |
167,2 |
22,3 |
26 |
dont rebudgétisation |
0 |
0 |
21,7 |
21,7 |
21,7 |
prélèvements sur recettes |
-256 |
-254,6 |
-271 |
-16,4 |
-15 |
recettes totales |
1333,4 |
1350,1 |
1429,5 |
79,4 |
96,1 |
recettes totales (hors rebudgétisation) |
1333,4 |
1350,1 |
1396,9 |
46,8 |
63,5 |
Les
recettes totales du budget général devraient progresser de 96
milliards de francs par rapport aux estimations de la loi de finances pour 1998
(+ 7,2%) et de 79,4 milliards de francs par rapport aux estimations
révisées (+5,8%).
Recettes supplémentaires en 1999 par rapport au budget
révisé de 1998 (hors rebudgétisations): 55,6 milliards de
francs dont
71,1 milliards de francs de surcroît de recettes fiscales
nettes dû à la croissance
28(
*
)
TVA nette |
+ 30 milliards de francs |
Impôt sur les sociétés net |
+ 16,3 milliards de francs |
Impôt sur le revenu |
+ 13,3 milliards de francs |
Autres impôts directs |
+ 7,7 milliards de francs |
Enregistrement |
+ 5 milliards de francs |
TIPP |
+ 2 milliards de francs |
Remboursements et dégrèvements |
-3,2 milliards de francs |
TOTAL évolution spontanée des recettes fiscales |
+71,1 milliards de francs |
Autres facteurs et aménagements de droits |
+2,36 milliards de francs |
Rebudgétisations de recettes fiscales |
-2,1 milliards de francs |
Recettes non fiscales |
+0,6 milliards de francs |
Prélèvements sur recettes |
-16,4 milliards de francs |
TOTAL GENERAL |
+55,6 milliards de francs |
2. Une évaluation risquée
L'accroissement des recettes fiscales en 1998 et 1999 est la
condition
sine qua non
de la réalisation des objectifs
fixés par le projet de loi de finances. Or, les incertitudes pesant sur
la croissance sont facteurs d'inquiétude en ce domaine.
Au delà des pronostics sur la réalisation de la croissance,
qui sont par définition hasardeux, il est utile de rappeler des facteurs
certains, tirés des expériences passées.
Et ces expériences d'exécution budgétaire sont
éclairantes :
depuis 1990, seules les années 1994 et 1997 ont
connu un écart positif entre les recettes fiscales attendues et les
recettes effectivement réalisées
. A contrario, les
années 1985 à 1989 avaient constamment enregistré des
plus-values de recettes.
Tableau n° 1 : Ecart entre prévisions et
réalisations
pour
les recettes fiscales nettes
de
l'Etat
29(
*
)
Prévision LFI |
1985 |
1986 |
1987 |
1988 |
1989 |
|||
recettes fiscales nettes attendues |
910 534 |
954 932 |
1 010 964 |
1 058 848 |
1 142 174 |
|||
recettes fiscales nettes effectives |
915 779 |
978 622 |
1 042 910 |
1 099 788 |
1 167 136 |
|||
|
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
recettes fiscales nettes attendues |
1 211 456 |
1 293 860 |
1 335 386 |
1 321 142 |
1 236 603 |
1 305 876 |
1 401 100 |
1 395 200 |
recettes fiscales nettes effectives |
1 205 606 |
1 228 315 |
1 215 609 |
1 209 102 |
1 254 434 |
1 301 681 |
1 359 578 |
1 416 600 |
Il
résulte clairement de ce tableau qu'une césure s'est
instaurée à partir de 1990 quant à la réalisation
des prévisions de la loi de finances en recettes.
Ce changement s'explique essentiellement par
la modification de la situation
économique de la France, modification bien plus structurelle que
conjoncturelle
: la diminution de l'inflation ne permet plus de voir
gonfler artificiellement les recettes et se déprécier les
dépenses, d'autre part la croissance ralentit depuis le début des
années 1990, ce que les gouvernements n'ont pas toujours pris en compte.
Par ailleurs, seule l'année 1995 a vu ses moins-values de recettes
fiscales compensées par des recettes non fiscales et la
surévaluation des prélèvements sur recettes en loi de
finances initiale.
Tableau n° 2
: Ecarts entre prévisions et
réalisations de recettes totales de 1991 à 1997
|
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Recettes nettes totales attendues |
1 209 501 |
1 244 742 |
1 212 917 |
1 171 299 |
1 228 173 |
1 281 037 |
1 296 400 |
recettes nettes totales effectives (hors fonds de concours) |
1 169 303 |
1 161 698 |
1 149 190 |
1 217 664 |
1 231 441 |
1 276 079 |
1 320 700 |
Augmentation de recettes réelle (hors fonds concours) |
2,39% |
-0,65% |
-1,08% |
5,96% |
1,13% |
3,62% |
3,50% |
Croissance attendue |
5,4% |
5,05% |
5,5% |
3,4% |
5,1% |
4,9% |
3,5% |
Croissance réalisée |
4,1% |
3,3% |
1,1% |
4,4% |
3,7% |
2,7% |
3,4% |
Ce tableau montre clairement que depuis 1991, les prévisions de croissance ont toujours été supérieures à la réalité, sauf en 1994, ce qui explique en grande partie les moins-values de recettes du budget général.
B. L'INCIDENCE DES MESURES DU PROJET DE LOI DE FINANCES SERA LIMITEE
1. Dans le souci d'afficher une stabilité de la pression fiscale, le gouvernement a surévalué le montant des "rebudgétisations"
Afin de
ne pas confondre la hausse très importante du produit fiscal entre la
loi de finances pour 1998 et le projet de loi de finances pour 1999
(+ 85 milliards de francs) avec un alourdissement de la pression
fiscale, il faut mettre en valeur la progression spontanée des recettes
et raisonner à structure constante.
Ce raisonnement à structure constante doit toutefois être
particulièrement rigoureux.
D'après les documents annexés à la loi de finances, hors
effet des "rebudgétisations", 63,5 milliards de francs de recettes
supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale pour
1998 se répartiront comme suit :
- 74,2 milliards de francs de recettes fiscales nettes
supplémentaires,
- 4,3 milliards de francs de recettes non fiscales supplémentaires
- les prélèvements sur recettes progresseraient en revanche de
15 milliards de francs dont 11,5 milliards de francs au profit des
collectivités locales (10,8 milliards au titre de la compensation
de la réforme de la taxe professionnelle) et 3,5 milliards de
francs au profit de l'Union européenne.
Au total, le montant des "rebudgétisations" annoncées
(10,9 milliards de francs)
conduirait à des recettes fiscales
nettes à 1522,4 milliards de francs, soit une diminution de
200 millions de francs par rapport à l'évolution
spontanée des recettes fiscales
.
Un examen plus précis des "rebudgétisations" doit toutefois
être réalisé.
En effet, un certain nombre de "rebudgétisations"
30(
*
)
correspondent effectivement à la
transformation d'une recette affectée à un compte spécial
du trésor en recette du budget général (ex :
rebudgétisation du fonds de soutien aux hydrocarbures) ou à la
réintégration de recettes d'un fonds de concours (ex:
rebudgétisation des charges de pension de la Poste) ou encore à
la budgétisation de recettes affectées à un
ministère (ex : compte de rémunérations accessoires du
cadastre, compte de rémunérations accessoires des
hypothèques).
Ces modifications s'expliquent essentiellement par le souhait de se conformer
à des décisions du Conseil constitutionnel
(réintégration de fonds de concours) et aux observations de la
Cour des Comptes (rémunérations accessoires), dans un souci de
sincérité budgétaire.
Cependant, deux opérations de "rebudgétisation" sont
abusivement qualifiées comme telles.
En effet,
la baisse du plafond par demi-part de l'avantage fiscal
procuré par le quotient familial
devrait accroître le produit
de l'impôt sur le revenu de 3,9 milliards de francs. Bien que cette
augmentation de la pression fiscale pesant sur les ménages soit
réelle, elle est qualifiée de "rebudgétisation" car elle
serait la contrepartie de deux décisions : la fin de la mise sous
condition de ressources des allocations familiales (6,7 milliards de
francs de dépenses supplémentaires pour la sécurité
sociale) et la prise en charge par l'Etat de l'allocation de parent
isolé (4,2 milliards de francs).
Il va de soi que toutes ces actions n'ont rien de commun : il ne s'agit pas
d'un transfert de prélèvements (ce qui aurait pu être le
cas s'il s'était agi de compenser une diminution des cotisations
familiales par le plafonnement du quotient familial), mais bien d'une
augmentation des prélèvements obligatoires, que celle-ci soit
"compensée" ou non par des dépenses supplémentaires en
faveur des familles
31(
*
)
.. On ne saurait en
outre confondre le budget général et celui de la
Sécurité sociale...
D'autre part,
le relèvement de 1 à 4,8 % de la taxe sur
les cessions de droits sociaux pour les sociétés à
prédominance immobilière
, pour 4,9 milliards de francs
serait la contrepartie partielle de la prise en charge par l'Etat de
l'allégement des droits de mutation à titre onéreux
(8,6 milliards de francs) qui étaient versés au profit des
collectivités locales. Or, il s'agit de deux mesures fiscales
très différentes, qui ne touchent pas les mêmes
contribuables et qui augmentent
in fine
la pression fiscale de
l'Etat.
2. La pression fiscale sera légèrement alourdie en 1999 mais l'essentiel de la progression des impôts proviendra d'une évolution spontanée des recettes
Compte tenu de ces observations, il est possible de rectifier la présentation des recettes du projet de loi de finances.
Les recettes du budget général : de la loi de finances pour 1998 au projet de loi de finances pour 1999 (après rectification)
|
1998 (LFI) |
1998 (révisé) |
PLF1999 |
Ecart de recettes de PLF99/révisé 98 |
Ecart de recettes de PLF99/LFI 98 |
recettes fiscales nettes |
1448,2 |
1459,8 |
1533,3 |
73,5 |
85,1 |
dont rebudgétisation |
0 |
0 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
recettes non fiscales (hors recettes d'ordre) |
141,2 |
144,9 |
167,2 |
22,3 |
26 |
dont rebudgétisation |
0 |
0 |
21,7 |
21,7 |
21,7 |
prélèvements sur recettes |
-256 |
-254,6 |
-271 |
-16,4 |
-15 |
recettes totales |
1333,4 |
1350,1 |
1429,5 |
79,4 |
96,1 |
recettes totales (hors rebudgétisation) |
1333,4 |
1350,1 |
1405,7 |
55,6 |
72,3 |
Ce
tableau laisse apparaître que hors "rebudgétisations", les
recettes fiscales nettes seront de 1.531,2 milliards de francs dans le
projet de loi de finances
. Or, les recettes fiscales nettes avant prise en
compte des aménagements de droits s'élèvent à
1.525,2 milliards de francs.
Les mesures du projet de loi de finances
aboutissent donc à un léger accroissement de la pression fiscale
de l'Etat (+ 6 milliards de francs)
contrairement à la
présentation initialement faite par le gouvernement, qui
annonçait une stabilisation totale des prélèvements
fiscaux par rapport à 1998.
Cette progression de la fiscalité est toutefois très modeste
en pourcentage du PIB (moins de 0,1 %).
La plupart des impôts connaissent une évolution "spontanée"
significative en raison des anticipations de croissance, alors que les mesures
de la loi de finances portent sur des montants modestes.
•
L'impôt sur le revenu
passe de 299,5 milliards de
francs en évaluation révisée à 315,7 milliards
de francs dans le projet de loi de finances pour 1999, soit une progression de
5,4 %.
Cependant les mesures de la loi de finances pour 1999
alourdiront l'impôt de 1,3 milliard de francs seulement
(+0,4 %).
Le reste de l'augmentation résulte pour
13,2 milliards de francs de l'évolution spontanée des
recettes et pour 1,6 milliard de francs de divers facteurs intervenant en
1999 (suppression de réductions d'impôts, instauration d'un
crédit d'impôt pour les dépenses d'entretien dans les
résidences principales).
A la suite de l'examen par l'Assemblée nationale, l'impôt sur le
revenu a été allégé de 300 millions de francs
(200 millions de francs de crédit d'impôt pour l'entretien de
la résidence principale et 100 millions de francs pour la demi-part
de quotient pour les invalides, anciens combattants et personnes seules ayant
un enfant majeur de moins de 27 ans). La progression, hors effet
spontané des recettes, est donc réévaluée à
1 milliard de francs.
L'impôt sur les sociétés brut
passe de 223 milliards
de francs en évaluation révisée à 232,4 milliards
de francs dans le projet de loi de finances pour 1999.
L'impôt
net
progresse de 182 milliards de francs (évaluation
révisée pour 1998) à 194,4 milliards de francs, soit une
progression de 6,8%. Cependant, les effets de la loi de finances pour 1999
seront limités à une progression de 900 millions de francs.
Toutefois, à la suite de l'examen par l'Assemblée nationale,
l'impôt sur les sociétés est alourdi de 1.450 millions de
francs en raison d'un durcissement du régime des sociétés
mères-filles pour 1.550 millions de francs (rétablissement
de la taxation des dividendes de la fille à la mère
supprimée en 1993) et d'un allégement de 100 millions de
francs pour les sociétés d'assurance mutuelle. Au total,
l'impôt est donc alourdi de 2,3 milliards de francs, hors
progression spontanée des recettes.
Par ailleurs :
•
Le principal allégement, s'agissant des impôts d'Etat,
concerne la TVA
, qui devrait toutefois progresser de 808 milliards de
francs en 1998 à 830,9 milliards de francs en 1999, soit une hausse
de 2,8 % (la hausse est particulièrement significative si on la
compare aux estimations de la loi de finances pour
1998 : + 6,8 %). Les allégements portent sur
4,8 milliards de francs, alors que les effets de l'évolution
spontanée sont évalués à 27,2 milliards de
francs.
Suite à l'examen par l'Assemblée nationale, la TVA est
allégée de 910 millions de francs (dont 710 millions de
francs pour les achats de terrains à bâtir, 100 millions de
francs pour les opérations de collecte séparative et
100 millions de francs pour certains établissements touristiques).
Les allégements sont donc portés à 5,7 milliards de
francs.
•
Les augmentations d'impôts prévues par la loi de
finances sont relativement ciblées :
L'impôt de solidarité sur la fortune
progresse de 32 %
par rapport à l'évaluation révisée de 1998, pour
atteindre 14,9 milliards de francs. Les mesures de la loi de finances pour
1999 comptent pour la moitié de cette augmentation (2 milliards de
francs).
La taxe intérieure sur les produits pétroliers
progresse
de 3,4 % pour atteindre 160,1 milliards de francs. Les mesures du
projet de loi de finances entraînent un alourdissement de l'impôt
de 1,6 %, soit 2,6 milliards de francs. L'examen à
l'Assemblée nationale n'a permis d'alléger
la TIPP
que de
33 millions de francs en raison de diverses mesures sur les carburants
propres.
Les droits d'enregistrement
progressent de 3,7 %
(5,7 milliards de francs) au titre des mesures du projet de loi de
finances pour 1999, pour atteindre 160,6 milliards de francs. Cette
progression résulte pour l'essentiel (4,9 milliards de francs) du
relèvement de la taxe sur les cessions de droits sociaux pour les
sociétés à prépondérance immobilière.
Cette mesure est présentée comme une contrepartie de la
suppression de la taxe régionale pour l'acquisition d'immeubles
d'habitation.
Suite à l'examen par l'Assemblée nationale, les mutations
à titre gratuit par décès seront toutefois
allégées de 200 millions de francs en raison de la
majoration de l'abattement pour les droits de succession entre conjoints . Par
ailleurs, la suppression de la mesure gouvernementale sur l'assurance-vie (+
500 millions de francs) est intégralement compensée par le
prélèvement sur les compagnies d'assurance-vie. En revanche les
prélèvements sur les bons anonymes sont majorés de
250 millions de francs.
Les recettes non-fiscales
progresseront de 26 milliards de francs
par rapport à la loi de finances pour 1998, mais de 4,3 milliards
de francs hors rebudgétisations (pensions de La Poste, suppression du
prélèvement au profit des fonds de concours au titre de l'article
6 de la loi du 31 juillet 1949). Cette progression correspond approximativement
à l'évaluation révisée des recettes non-fiscales
pour 1998. L'évaluation pour 1999 traduit une stabilité globale
résultant de mouvements en sens contraire des recettes non fiscales.
Les prélèvements sur recettes
atteindront
271 milliards de francs en 1999, soit 15 milliards de francs de plus
que dans la loi de finances pour 1998.
Les prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des
collectivités locales
atteindront 176 milliards de francs. Hors
effet de l'évolution spontanée, elles progresseront de
10,8 milliards de francs, résultant d'une diminution de
2 milliards de francs au titre de la dotation de compensation de la taxe
professionnelle et de la dotation globale de fonctionnement et d'un
prélèvement nouveau de 11,8 milliards de francs au titre de
la compensation de la suppression de la part salariale de taxe professionnelle.
Suite à l'examen par l'Assemblée nationale, les
prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des
collectivités locales augmentent de 250 millions de francs
supplémentaires (dont 240 millions de francs pour l'indexation des
concours aux collectivités locales), soit une progression totale de
11,25 milliards de francs.
Les prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des
communautés européennes
atteindront 95 milliards de
francs, soit une progression de 3,5 milliards de francs par rapport
à la loi de finances pour 1998, résultant entièrement
d'une évolution spontanée.
C. UNE BAISSE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES ?
Le
gouvernement annonce une réduction progressive du taux des
prélèvements obligatoires, interrompue depuis 1993. Pour cela, il
part d'un point "haut", le taux de prélèvements en 1997.
(en points de PIB)
Impôts et cotisations perçus par |
1997 |
1998 |
1999 |
Etat |
15,7 |
15,4 |
15,3 |
dont impôts |
15,2 |
15,0 |
14,9 |
ODAC |
0,6 |
0,6 |
0,5 |
Administrations de sécurité sociale |
21,6 |
21,7 |
21,8 |
dont cotisations sociales |
18,7 |
16,8 |
16,7 |
Administrations publiques locales |
7,2 |
7,1 |
7,0 |
Union européenne |
1,1 |
1,1 |
1,1 |
Total prélèvements obligatoires |
46,1 |
45,9 |
45,7 |
Ce
tableau laisse supposer une diminution progressive des
prélèvements obligatoires depuis 1997.
Cependant,
le rapport économique, social et financier attaché
au projet de loi de finances omet d'indiquer les conséquences des
dispositions portant mesures urgentes à caractère fiscal et
financier décidées par le gouvernement dès juillet
1997
. D'après le rapport de la Cour des comptes sur
l'exécution du budget pour 1997, l'effet de ces dispositions peut
être estimé à 22,8 milliards de francs en 1997, soit 0,28
points de PIB. Il apparaît donc que, hors effet des mesures
d'alourdissement de la pression fiscale décidées en cours
d'année, le taux de prélèvements obligatoires aurait
été de 45,82% du PIB en 1997.
La réduction des
prélèvements obligatoires en 1998 n'a donc de
réalité qu'en faisant abstraction des alourdissements
d'impôts en 1997.
De surcroît, en 1998, le gouvernement a choisi d'abandonner la
réforme de l'impôt sur le revenu engagée par la loi de
finances pour 1997. Cet abandon lui a permis de conserver un supplément
de produit de 16,14 milliards de francs.
La loi portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier : un contre-exemple
L'effet
de la loi du 10 novembre 1997 portant mesures urgentes à
caractère fiscal et financier s'élève à
22,8 milliards de francs
sur les 27,3 milliards de francs de
produit fiscal supplémentaire pour l'impôt sur les
sociétés.
Sans cette loi, les recettes fiscales auraient
été très légèrement inférieures aux
prévisions de la loi de finances (-1,5 milliard de francs).
En l'absence de relèvement de l'impôt sur les
sociétés,
le solde d'exécution des recettes de l'Etat
aurait également été satisfaisant
, car très
supérieur à l'exécution de 1996 et très proche des
prévisions de la loi de finances initiale.
Ce constat est bien différent de celui fait par l'audit des finances
publiques remis le 21 juillet 1997, qui chiffrait à 17 milliards de
francs les pertes de recettes fiscales nettes pour l'Etat en fin
d'année.
L'amélioration du solde budgétaire s'est faite au prix d'une
forte croissance des recettes (+ 40,7 milliards de francs) qui a plus que
compensé la croissance des dépenses (+13,3 milliards de
francs).
Ainsi, l'amélioration du solde budgétaire n'est pas
due à une contraction des dépenses mais à un
alourdissement significatif des recettes alimentant le budget
général
.
Dans un contexte de reprise de la croissance économique
(la
croissance réalisée s'élève à 3,4% contre
2,7% en 1996),
le choix d'accroître les prélèvements
obligatoires a été fait au détriment d'une plus forte
maîtrise de la dépense
. Or, cette maîtrise, difficile en
période de ralentissement économique, du fait du rôle
contra-cyclique des dépenses, est tout à fait souhaitable lorsque
la conjoncture s'améliore.
C'est ce raisonnement simple et logique
qui sous-tend les propositions de votre rapporteur général pour
le présent projet de loi de finances.
La réduction annoncée des prélèvements obligatoires
pour 1999 n'est pas entachée des mêmes approximations que celle de
1998
.
Il est exact de dire que les prélèvements vont baisser
.
Toutefois, cette diminution est modeste
dans le contexte de forte
croissance économique attendue par le gouvernement et relativement
à la situation des cinq dernières années:
le taux de
prélèvements obligatoires ne fera que rejoindre exactement le
taux de 1996 (45,7%) et donc annuler la forte hausse de 1997.
De plus, la baisse des prélèvements ne résulte que
très partiellement du projet de loi de finances pour 1999.
Les mesures du PLF 1999
aboutissent en effet aux modifications suivantes
:
- la
pression fiscale
de l'Etat
progresse de 6 milliards de
francs (cf. supra) ;
- les
recettes non-fiscales de l'Etat
progressent de 5,45 milliards de
francs ;
- les
prélèvements sur recettes
progressent de 10,8
milliards de francs.
Pour mesurer les diminutions effectives d'impôts, il faut tenir compte
de
l'allégement de 8,6 milliards de francs des droits de
mutation à titre onéreux
perçus par les
collectivités locales. Cet allégement se traduit en
dépense par une augmentation à due concurrence de la dotation
globale de décentralisation (5,3 milliards de francs pour les
régions et 3,3 milliards de francs pour les départements).
Au total, les
impôts locaux sont donc allégés de
15,8 milliards de francs
en 1999, correspondant à un
allègement de 7,2 milliards de francs de la taxe professionnelle et
à un allègement de 8,6 milliards de francs des droits de
mutation à titre onéreux.
Les allégements d'impôts décidés par la loi de
finances pour 1999 s'élèvent donc à environ
10 milliards de francs
correspondant à un allégement de
la fiscalité locale de 15,8 milliards de francs et à un
alourdissement de la pression fiscale de l'Etat de 6 milliards de francs.
Les allégements d'impôts effectifs en 1999
,
c'est-à-dire prenant en compte les mesures antérieures ayant un
impact sur l'année 1999,
s'élèvent à près
de 16 milliards de francs
correspondant à cet allégement
d'impôts de 10 milliards et à l'effet de décisions
antérieures pour 5,7 milliards de francs.
Il serait donc faux de présenter la loi de finances pour 1999 comme
ayant pour incidence, à elle seule, de diminuer de 16 milliards de
francs les prélèvements obligatoires.
CHAPITRE III
L'ANALYSE DES FINANCES PUBLIQUES AU
REGARD DES ENGAGEMENTS EUROPÉENS DE LA FRANCE
Le
projet de loi de finances pour 1999 se place dans un contexte juridique
nouveau : celui de la mise en circulation de la monnaie unique, l'euro, et
de l'entrée en vigueur des stipulations du traité sur l'Union
européenne qui en découlent pour les politiques des finances
publiques.
Loin de restaurer des marges de manoeuvre de gestion budgétaire, la
mise en place de la monnaie unique renforce les contraintes d'une discipline
indispensable à sa réussite.
Celle-ci nécessite ainsi que chaque Etat fournisse, avant le
1er mars, un programme de stabilité conforme au pacte de
stabilité et de croissance signé à Amsterdam en juin 1997.
Votre rapporteur général rappelle que le Sénat a
voté, le 23 avril 1998, a une très forte
majorité
32(
*
)
, une résolution de
votre commission aux termes de laquelle il est notamment demandé au
gouvernement
33(
*
)
:
"-
d'élaborer et mettre en oeuvre un programme de
stabilité pleinement conforme à nos engagements européens
et au rôle de notre pays en Europe ;
- ... de produire à l'appui du projet de loi de finances de
l'année le programme de stabilité notifié par lui et, au
moins une fois par an, une présentation des programmes des autres Etats
membres
".
Pour 1999, ce programme de stabilité ne sera rendu public qu'à la
fin de l'année 1998, ce qui peut paraître une anomalie
34(
*
)
, dans la mesure où, tout en ayant
débattu du financement de la sécurité sociale, de celui de
l'Etat et, dans une large mesure, de celui des collectivités locales
dans le cadre du débat sur la loi de finances,
le Parlement n'aura eu
en fait aucun débat synthétique sur
l'ensemble des
finances publiques,
ni
a fortiori
sur le programme de
stabilité que le gouvernement notifiera à la Commission.
Or
tout dans les progrès de l'intégration européenne indique
que les gouvernements seront bien davantage liés par leurs engagements
à l'égard de leurs partenaires de l'euro qu'ils ne le sont
à l'égard des majorités parlementaires qui les
soutiennent
.
Un tel débat est donc désormais capital.
I. LA FRANCE, "MAUVAIS ÉLÈVE" DE L'EUROPE
A. UNE POLITIQUE DES FINANCES PUBLIQUE SOUS SURVEILLANCE
L'union
monétaire européenne impose aux Etats adoptant la monnaie unique,
en particulier les onze -dont la France- qui la mettront en commun dès
1999, une discipline budgétaire forte, à laquelle la France a
adhéré, à Maastricht en 1991, puis à Amsterdam en
1997. Il convient d'en rappeler les dispositifs principaux pour comprendre dans
quel cadre normatif s'insèrent le présent projet de loi de
finances et ses successeurs.
L'encadré ci-après rappelle les éléments relatifs
à cette question figurant dans le rapport de votre commission sur le
passage à la troisième phase de l' Union économique et
monétaire.
35(
*
)
Un
renforcement des contraintes encadrant la politique budgétaire : de
l'article 104 C du traité au règlement 1467/97 du
7 juillet 1997
L'article 104 C et l'une des dispositions importantes
introduites par le traité sur l'Union européenne puisqu'il a
posé
une règle communautaire d'encadrement des politiques
budgétaires conduites
par les Etats membres. Cet article vise
fondamentalement à
combattre les déficits publics excessifs et
à fonder la discipline budgétaire imposée aux Etats
membres
au nom de l'Union économique et monétaire.
Destiné à entrer en vigueur de façon progressive à
mesure que se déroulerait le cheminement de l'union monétaire,
l'article 104 C a été complété par le
règlement 1467/97 du 7 juillet 1997 qui constitue l'un des trois
piliers du pacte de stabilité et de croissance.
1. L'article 104 C du traité sur l'Union
européenne
a) Une application par étapes
L'article 104 C organise la surveillance et la lutte contre ce que l'usage
a désigné du nom de "
déficits excessifs
".
Divisé en 14 chapitres, son application a été
conçue comme évolutive dans le temps à mesure des
progrès réalisés sur la voie de l'unification
monétaire en Europe. L'article 109 E du traité
prévoit ainsi que l'article 104 C, à l'exception des
paragraphes 1, 9, 11 et 14 s'applique
dès le début de la
deuxième phase
de l'Union économique et monétaire qui
a commencé le 1er janvier 1994 et que les paragraphes 1, 9, et 11
s'applique
dès le début de la troisième phase
,
c'est-à-dire le 1er janvier 1999 lors de l'instauration de l'euro.
Il faut souligner que les paragraphes 9 et 11 ne s'appliqueront qu'aux Etats
ayant adopté l'euro, les Etats "hors euro" étant cependant soumis
au paragraphe 1 dès cette date.
Le paragraphe 1
de l'article 104 C comporte une injonction aux
Etats membres d'éviter les déficits publics excessifs.
Les paragraphes 9 et 11
complètent la procédure de
l'article 104 C en introduisant deux nouvelles étapes.
Le paragraphe 9
introduit la faculté laissée au
Conseil de l'Union européenne de
mettre en demeure
un Etat en
déficit excessif de prendre des mesures correctrices.
Le paragraphe 11 donne au Conseil la faculté de prononcer une
série de sanctions contre un Etat qui ne se serait pas conformé
à cette mise en demeure.
Il faut aussi souligner que c'est le traité sur l'Union
européenne lui-même qui a organisé le renforcement des
pouvoirs du Conseil sur la politique budgétaire des Etats membres
après l'adoption de la monnaie unique et non pas le "pacte de
stabilité et de croissance" signé à Amsterdam.
Le renforcement de la discipline budgétaire résulte donc, pour
l'essentiel, de l'adoption de la monnaie unique, et n'est pas suspendu à
l'approbation du traité d'Amsterdam.
b) L'édiction de règles de "discipline
budgétaire"
Les règles posées par l'article 104 C et
précisées par le protocole n° 5 annexé au
traité concernent la situation globale des finances publiques
appréhendée à travers les dettes publiques et les besoins
de financement des administrations publiques.
Aux termes du dispositif de l'article 104 C, paragraphe 2, la
discipline budgétaire est censée avoir été
respectée
en tant qu'elle intéresse les déficits
publics
si le rapport entre ceux-ci, qu'ils soient prévus ou
effectifs, ne dépasse pas 3 % du PIB. Si tel n'est pas le cas, un
manquement à la discipline budgétaire n'est pour autant pas
nécessairement établi. Autrement dit,
le dépassement de
la valeur de 3 % du PIB ne constitue pas automatiquement un fait
"d'indiscipline budgétaire"
. Deux cas de figure alternatifs sont
envisagés. Ils permettent tous deux de décerner un label de bonne
conduite budgétaire, même si le critère quantitatif
évoqué ci-dessus n'est pas atteint :
si le rapport entre le déficit public et le PIB a diminué
de manière
substantielle
et
constante
et
atteint un
niveau proche de 3 % du PIB
;
si le dépassement de la valeur de référence n'est
qu'
exceptionnel
et
temporaire
et que
le rapport entre le
déficit public et le PIB reste proche de 3 %.
On peut donc énoncer qu'un déficit public excessif est, au sens
du traité, un déficit public excédant 3 % du PIB ou
un déficit public d'une valeur éloignée de 3 % du
PIB, ou encore un déficit public un peu supérieur à
3 % du PIB si le dépassement de cette valeur ne peut être
considéré comme exceptionnel et temporaire ou comme s'inscrivant
dans un processus de diminution substantielle et constante du rapport du
déficit public dans le PIB.
Lorsque le déficit public d'un Etat ne dépasse pas 3 % du
PIB, il est réputé respecter la norme de discipline
budgétaire relative au niveau de son déficit public.
Toutefois, même si un Etat membre respecte ce critère, la
Commission est habilitée à élaborer un rapport et à
transmettre son avis au Conseil si elle estime qu'il y a un
risque
de
déficit excessif dans cet Etat membre (article 104 C,
paragraphe 3, second alinéa).
En ce cas, le Conseil ne pouvant que décider s'il y a ou non
déficit public excessif, le paragraphe 6 de
l'article 104 C ne lui ouvrant pas la faculté de
décider qu'il y a un
risque
de déficit public excessif,
l'avis de la Commission ne peut que servir de support à une
décision du Conseil constatant l'inexistence d'un déficit public
excessif.
Une incertitude subsiste sur le
fait de savoir si un Etat membre qui
respecte strictement la règle des 3 % obtient de ce fait la
garantie d'être considéré comme budgétairement
discipliné.
L'article 104 C organise la surveillance communautaire des
déficits publics
des Etats membres mais aussi du montant de leur
dette publique
(paragraphe 2 de l'article 104 C). Il
indique en effet que
la discipline budgétaire suppose le respect des
critères précisés ci-dessus relatif au rapport du
déficit public dans le PIB, mais aussi des critères suivants qui
concernent la dette publique
. La discipline budgétaire est
respectée si le rapport entre la dette publique dans le PIB ne
dépasse pas une valeur de référence fixée à
60 % par le protocole n° 5 annexé au traité. Dans
le cas contraire, la discipline budgétaire n'est pas respectée
à moins que ledit rapport "ne diminue
suffisamment
et
approche
de 60 % à un rythme satisfaisant
".
Cependant, la question se pose de savoir quelles sont les
conséquences du non-respect de critère relatif à la dette
publique.
Précisons qu'elle se pose dans le cadre d'une lecture
littérale du traité mais que la coutume ne semble ni infirmer ni
confirmer cette lecture.
L'article 104 C du traité énonce en effet que si un Etat
membre ne satisfait pas les critères relatifs au déficit public
et (ou) à la dette publique, la Commission élabore un rapport
(paragraphe 3). En revanche, lorsque le même article donne mission
à la Commission d'adresser un avis au Conseil (paragraphe 5) sur la
base duquel celui-ci décide s'il y a ou non déficit excessif
(paragraphe 6), il ne vise pas autre chose que l'existence d'un
déficit excessif (ou d'un risque de déficit excessif).
Or, un déficit excessif n'est pas une dette excessive
. Dans ces
conditions,
il apparaît loisible de considérer que sans que cet
Etat soit réputé budgétairement discipliné
-la
Commission peut (paragraphe 3) élaborer un rapport à ce
sujet-
un Etat qui connaîtrait une dette excessive ne pourrait
être l'objet de la part du Conseil d'aucune autre décision prise
dans le cadre de l'article 104 C
. Seule, dans ce cadre là, la
Commission pourrait agir en élaborant un simple rapport.
Cette interprétation à la lettre n'est évidemment pas la
seule possible. Mais il faut admettre qu'elle s'inscrit dans un contexte d'une
pratique communautaire où le critère de dette publique
n'apparaît pas comme le plus fondamental des deux critères de
finances publiques.
Un débat s'est ouvert opposant les tenants d'une appréciation
stricte des règles de discipline budgétaire à ceux
favorables à une interprétation souple de ces règles. Si
la lettre même du traité donne plutôt raison à ces
derniers en ce qu'elle admet quelques écarts par rapport aux valeurs
arithmétiques fixées dans le protocole n° 5
annexé au traité, force est de reconnaître que celui-ci ne
laisse pourtant que de faibles marges aux Etats membres.
Si le déficit public d'un Etat membre peut dépasser la valeur de
référence de 3 % du PIB sans pour autant être
considéré comme excessif, il n'en doit pas moins, pour
échapper à cette qualification, satisfaire des critères
exigeants.
D'abord, le traité impose qu'il prenne
une valeur proche
de
3 % du PIB. Aucune définition précise de ce qu'est une
valeur proche de 3 % du PIB n'est donnée par le texte. Mais, on
peut inférer de la pratique récente de la Commission suivie par
le Conseil que cette valeur ne saurait être éloignée de
plus de quelques dixièmes de points de PIB de la valeur de 3 %.
Ensuite, il faut que ce dépassement soit, soit exceptionnel et
temporaire, soit inscrit dans un processus d'ajustement budgétaire
caractérisé par une réduction substantielle et constante
du rapport du déficit public dans le PIB.
Une source d'assouplissement aurait pu provenir de la rédaction du
paragraphe 6 de l'article qui prévoit que pour décider s'il
y a ou non déficit excessif le Conseil entreprend une "évaluation
globale".
Il est toutefois difficile de concilier cette marge d'appréciation
laissée au Conseil avec la rigueur des règles posées par
le paragraphe 2 de l'article. On doit en outre indiquer que manquent des
indications sur la méthode d'évaluation globale que devrait
suivre le Conseil.
Sans doute s'agit-il de prendre en considération
tous les éléments pertinents pour juger de la situation des
finances publiques d'un Etat et, en particulier, leur évolution sur
moyenne période. Mais on conviendra que cela est un peu vague.
Peut-être alors pourrait-on considérer que le paragraphe 3 de
l'article est susceptible d'apporter un peu de précision quant à
la méthode d'évaluation globale que devrait suivre le Conseil. Il
y est en effet indiqué que lorsqu'elle élabore un rapport en cas
de déficit ou de dette excessifs, la Commission examine "
si le
déficit public excède les dépenses publiques
d'investissement
" et "
tient compte de tous les autres facteurs
pertinents, y compris la position économique et budgétaire
à moyen terme de l'Etat membre
".
Si tel était le cas, le Conseil bénéficierait d'une
marge d'appréciation tout à fait considérable.
Car, si
l'élaboration d'un rapport par la Commission suppose que celle-ci ait au
préalable pris acte que l'Etat membre se trouve en situation de
déficit ou de dette publics excessifs, le Conseil pourrait lui, à
la lumière d'une évaluation globale conduite sur les bases
indiquées ci-dessus, requalifier le déficit public de cet Etat
et, en un mot, l'absoudre.
Dans les faits, le Conseil n'a jusqu'à présent pas usé
de cette marge d'appréciation.
2. La troisième phase de réalisation de l'Union
monétaire : la mise en oeuvre complète de l'article
104 C et le règlement 1467-97 du 7 juillet 1997
a) La mise en oeuvre complète de l'article 104 C
La troisième phase de réalisation de l'Union monétaire qui
commencera le 1
er
janvier 1999 sera caractérisée
par l'entrée en vigueur des paragraphes 1, 9 et 11 de
l'article 104 C et du règlement 1467-97 du 7 juillet 1997.
Le
paragraphe 1
de l'article 104 C édicte une
obligation faite à tous les Etats membres,
celle d'éviter
à compter du 1
er
janvier 1999 les déficits
excessifs.
Le
paragraphe 9
permet au Conseil de mettre en demeure un Etat qui
ne donnerait pas suite à ses recommandations de prendre, dans un
délai déterminé, les mesures visant à la
réduction du déficit.
Le
paragraphe
11
pose le principe de
sanctions
en précisant que le Conseil peut décider d'appliquer à un
Etat qui ne respecterait pas ses mises en demeure -celles du paragraphe 9-
les mesures suivantes :
la publication d'informations supplémentaires avant l'émission
de titres publics ;
inviter la Banque européenne d'investissement -BEI- à revoir sa
politique de prêts à l'égard de cet Etat ;
effectuer des dépôts sans intérêt auprès de
la Communauté ;
imposer des amendes d'un montant approprié.
Ces clauses entrent en vigueur dès le 1
er
janvier 1999.
Les paragraphes 9 et 11 s'appliquent aux Etats ayant adopté l'euro.
b) Le règlement 1467/97 du 7 juillet 1997 :
deuxième pilier du pacte de stabilité et de croissance
Il en va de même pour les dispositions du
règlement 1467-97
qui viennent préciser ces derniers paragraphes tandis que les autres
dispositions de ce règlement s'appliquent à l'ensemble des Etats
membres.
Ce règlement forme
l'un des trois piliers du pacte de
stabilité et de croissance
décidé lors du Conseil
européen d'Amsterdam de juin 1997 vise à
"accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la
procédure concernant les déficits excessifs"
. Ses
dispositions doivent être appréciées au regard du
troisième pilier du pacte que constitue la résolution du Conseil
européen relative au pacte de stabilité et de croissance
adoptée le 17 juin 1997 lors du sommet d'Amsterdam.
Le règlement qui entrera en vigueur le 1
er
janvier
1999 a d'abord pour objet d'accélérer la procédure dite
des déficits excessifs.
Mais l'accélération de la procédure n'est pas le seul
objet d'un règlement qui ambitionne aussi de la clarifier
.
Deux éléments sont concernés : la définition
de ce qu'est un déficit excessif et le mécanisme des sanctions.
L'article 2
précise en effet d'abord à
quelles
conditions un déficit peut n'être pas excessif s'il est
considéré comme exceptionnel et temporaire
. Il faut pour cela
qu'il résulte "d'une circonstance inhabituelle indépendante de la
volonté de l'Etat membre concerné et ayant des effets sensibles
sur la situation financière de ses administrations publiques" ou qu'il
soit "consécutif à une grave récession économique".
Le paragraphe 2
de l'article précise qu'une récession
se produit lorsque le PIB réel de l'Etat membre "enregistre une baisse
annuelle d'au moins 2 %".
Le paragraphe 3
du même article apporte une certaine
atténuation à la rigueur de la règle
précédente. Il invite en effet le Conseil à tenir compte
"
dans son évaluation globale, des observations éventuelles de
l'Etat membre concerné, lui indiquant qu'une baisse annuelle du produit
intérieur brut de moins de 2 % en termes réels est
néanmoins exceptionnelle, eu égard à d'autres
éléments d'information allant dans le même sens
...".
Ceux-ci sont, en particulier, "
le caractère soudain de la
récession ou la baisse cumulative de la production par rapport à
l'évolution constatée dans le passé
".
Cependant, dans la résolution d'Amsterdam citée plus haut, les
Etats se sont engagés à ne pas invoquer le bénéfice
de cette dernière disposition lorsque la baisse annuelle du PIB
réel serait inférieure à 0,75 %.
En ce qui concerne les sanctions
, dont on rappelle qu'elles ne
s'appliquent qu'aux Etats ayant adopté la monnaie unique
européenne, l
'article 11
indique que lorsque des sanctions sont
décidées contre un Etat membre, le Conseil doit, "en principe",
exiger avant tout que cet Etat "effectue un dépôt non porteur
d'intérêts".
L'article 12
encadre le pouvoir du Conseil en précisant les
règles de calcul des dépôts.
Le montant du premier dépôt comprend un
élément
fixe
égal à 0,2 % du PIB et un
élément
variable
égal à un dixième de la différence
entre le déficit exprimé en points de PIB et la valeur de
référence (3 % du PIB).
Les dépôts supplémentaires sont, quant à eux,
égaux à cette différence.
En tout état de cause, les dépôts annuels ne peuvent
excéder 0,5 % du PIB de l'Etat concerné.
L'article 13
précise que ces dépôts sont, "en
principe" convertis en amende" dans les deux années suivant la
décision d'imposer la constitution du dépôt "si le
déficit excessif n'a pas été corrigé.
L'article 14 et l'article 15
prévoient des mesures
d'abrogation par le Conseil de ses décisions de sanction.
Pour ce qui est des sanctions des premier et deuxième tirets du
paragraphe 11
36(
*
)
, le Conseil peut les
abroger si l'Etat a accompli des progrès sensibles même s'ils sont
insuffisants pour corriger son déficit excessif.
Ce n'est que s'il est décidé que le déficit excessif a
été corrigé que le Conseil peut, et doit, lever toutes les
sanctions prononcées par lui. Il est cependant prévu qu'en ce cas
les amendes ne sont pas remboursées à l'Etat fautif.
L'article 16
précise enfin le sort des dépôts
et des amendes infligés aux Etats. Les dépôts sont
constitués auprès de la Commission. En outre, il précise
que les intérêts sur ces dépôts et les amendes font
partie des ressources du budget général des Communautés
européennes.
Ils sont répartis entre les Etats membres n'étant pas en
situation de déficit excessif, au prorata de leur part dans le PNB des
Etats membres éligibles.
B. UNE SITUATION D'APPARENCE FLATTEUSE
La
situation des finances publiques françaises est saine lorsqu'on l'aborde
d'un double point de vue :
- celui de l'évolution du déficit public, qui se
réduit plus vite que celui de nos partenaires ;
- celui du niveau de la dette publique dans le PIB, inférieure aux
60 % prévus par le traité, avec 58,7 % prévus
pour 1999.
L'évolution des déficits publics prévus
par
les gouvernements de l'Union européenne
(sauf
Luxembourg)
|
1998 |
1999 |
Variation/1998 |
France |
- 2,9 % |
- 2,3 % |
+ 0,6 |
Allemagne |
- 2,5 % |
- 2,0 % |
+ 0,5 |
Autriche |
- 2,3 % |
- 2,2 % |
+ 0,1 |
Italie |
- 2,5 % |
- 2,0 % |
+ 0,5 |
Grèce |
- 2,2 % |
- 2,1 % |
+ 0,1 |
Portugal |
- 2,2 % |
- 2,0 % |
+ 0,2 |
Espagne |
- 2,2 % |
- 2,0 % |
+ 0,2 |
Belgique |
- 1,7 % |
- 1,7 % |
0 |
Pays-Bas |
- 1,6 % |
- 1,2 % |
+ 0,4 |
Royaume-Uni |
- 0,6 % |
- 0,3 % |
+ 0,3 |
Finlande |
0,3 % |
0,3 % |
0 |
Suède |
0,5 % |
0,5 % |
0 |
Danemark |
1,1 % |
0,9 % |
- 0,2 |
Irlande |
- 1,5 % |
- 1,1 % |
+ 0,4 |
C. UNE RÉALITÉ PLUS CONTESTABLE AU REGARD DE L'ESPRIT DE NOS ENGAGEMENTS
Certes,
la France n'est en situation de déficit excessif ni au regard du
critère de déficit, ni au regard du critère de dette.
Toutefois, la présentation du gouvernement qui fait état d'un
côté de la variation de la variation (l'évolution du
déficit) et de l'autre du stock (la dette), est assez spécieuse.
Mieux vaut simplement observer la variation du stock, raisonnement tout de
même plus solide.
La situation se présente alors différemment, quelle que soit la
source d'information
37(
*
)
.
La
dérive des dettes publiques dans l'Europe des quinze
(sauf
Luxembourg) selon l'OCDE (1998/1999) % du PIB
|
1998 |
1999 |
Evolution |
Finlande |
53,4 |
54,6 |
+ 1,2 |
France |
58,9 |
59,5 |
+ 0,6 |
Allemagne |
60,7 |
60,5 |
- 0,2 |
Autriche |
64,8 |
64,4 |
- 0,4 |
Pays-Bas |
69,5 |
68,9 |
- 0,6 |
Espagne |
68,5 |
67,5 |
- 1,0 |
Royaume-Uni |
52,1 |
50,5 |
- 1,6 |
Portugal |
63,4 |
61,9 |
- 2,5 |
Italie |
118,5 |
116,0 |
- 2,5 |
Grèce |
108,2 |
105,6 |
- 2,6 |
Belgique |
118,4 |
115,4 |
- 3,0 |
Suède |
74,5 |
71,1 |
- 3,4 |
Danemark |
57,3 |
53,2 |
- 4,1 |
Irlande |
57,0 |
50,3 |
- 6,7 |
Moyenne |
72,5 |
71,4 |
- 1,1 |
La
France est l'un des six pays de l'Union européenne à satisfaire
le critère de dette publique issu du traité de Maastricht (dette
publique brute inférieure à 60 % du produit intérieur
brut).
Toutefois, elle fait partie des deux seuls Etats (de l'Union comme des 11
premiers participants à la monnaie unique) à conserver une
dérive positive de sa dette.
Seule la Finlande selon l'OCDE, pays ayant intégré l'Union
récemment, se place plus mal que la France. Et encore, le poids de la
dette publique en Finlande est-il sensiblement inférieur à ce
qu'il est en France. Selon la Commission (tableau ci-dessous), seul le
Luxembourg se place moins bien, à un niveau de dette
considérablement inférieur toutefois.
Cette situation témoigne que la France a adopté une gestion
laxiste et peu convergente de ses finances publiques. Cette attitude est
d'autant moins acceptable pour ses partenaires que les efforts à
accomplir par les Etats les plus endettés sont particulièrement
importants, alors que les marges de manoeuvre d'un pays comme la France sont
relativement plus grandes.
Penser que la France puisse se singulariser longtemps de cette façon est
un leurre. Elle sera rappelée à l'ordre par ses partenaires, car
le respect de la discipline commune en matière de finances publiques est
une des conditions essentielles de la réussite de l'Euro, cette
réussite conditionnant elle-même le bien-fondé des
hypothèses de prospérité préservée que
formule le gouvernement pour notre pays.
Cette situation témoigne également que la France a adopté
une gestion imprudente du budget de l'Etat. Car ce mauvais résultat en
matière de dette serait encore pire s'il ne reposait pas sur
l'hypothèse d'une gestion très rigoureuse (et
excédentaire) des finances sociales et locales. Si d'aventure les
résultats de la sécurité sociale et des
collectivités territoriales n'étaient pas aussi bons que
prévu en 1999, la dangerosité de la gestion de l'Etat
apparaîtrait dans toute son ampleur.
Besoin
ou capacité de financement des administrations publiques
de l'Union
européenne
(en % du PIB)
|
1999 |
2000 à politiques inchangées |
Irlande |
+ 3,4 |
+ 4,6 |
Danemark |
+ 2,6 |
+ 2,9 |
Luxembourg |
+ 2,0 |
+ 2,0 |
Finlande |
+ 1,8 |
+ 2,1 |
Suède |
+ 1,4 |
+ 2,3 |
Royaume-Uni |
+ 0,1 |
- 0,2 |
Belgique |
- 1,2 |
- 1,0 |
Pays-Bas |
- 1,4 |
- 0,6 |
Espagne |
- 1,6 |
- 1,3 |
Portugal |
- 2,0 |
- 1,8 |
Autriche |
- 2,1 |
- 1,9 |
Grèce |
- 2,1 |
- 1,9 |
Allemagne |
- 2,2 |
- 2,2 |
France |
- 2,3 |
- 1,9 |
Italie |
- 2,3 |
- 2,0 |
Union européenne |
- 1,4 |
- 1,2 |
Euro 11 |
- 1,9 |
- 1,7 |
La
dérive des dettes publiques dans l'Europe des quinze
selon la
Commission européenne (1998-2000)
(% PIB-points de PIB)
|
1998 |
1999 |
2000 |
Ecart |
Luxembourg |
7,1 |
7,5 |
7,7 |
+ 0,6 |
France |
58,3 |
58,6 |
58,3 |
0 |
Allemagne |
61,3 |
61,0 |
60,7 |
- 0,6 |
Autriche |
64,0 |
63,6 |
62,8 |
- 1,2 |
Royaume-Uni |
51,5 |
49,9 |
48,5 |
- 3,0 |
Portugal |
57,4 |
55,3 |
53,7 |
- 3,7 |
Espagne |
67,7 |
66,0 |
63,6 |
- 4,1 |
Grèce |
108,7 |
107,0 |
104,2 |
- 4,5 |
Finlande |
52,9 |
50,2 |
48,3 |
- 4,6 |
Pays-Bas |
68,6 |
66,6 |
63,7 |
- 4,9 |
Belgique |
117,2 |
113,7 |
110,1 |
- 7,1 |
Italie |
118,8 |
115,3 |
111,7 |
- 7,1 |
Danemark |
58,8 |
54,3 |
49,8 |
- 9,0 |
Suède |
74,0 |
69,5 |
63,8 |
- 10,2 |
Irlande |
53,3 |
44,1 |
34,4 |
- 18,9 |
Union européenne |
70,3 |
69,0 |
67,3 |
- 3,0 |
Euro 11 |
73,8 |
72,5 |
70,9 |
- 2,9 |
II. LE PARI DU RETOUR DE LA SÉCURITÉ SOCIALE A UNE SITUATION EXCEDENTAIRE
A. UN RÉTABLISSEMENT SPONTANÉ DES COMPTES SOCIAUX
L'équilibre emploi-ressources de l'ensemble des
régimes obligatoires de base entrant dans le champ des lois de
financement de la sécurité sociale fait apparaître un
excédent des opérations courantes de 3,4 milliards de francs
pour 1999. Cet excédent fait suite à un déficit de
- 11,2 milliards de francs en 1998 et à un déficit de
- 33,9 milliards de francs en 1997.
La participation du régime général de
sécurité sociale à ce redressement apparaît
décisive, compte tenu de son importance relative. En effet, ce
régime sert 100 % des prestations familiales, 79 % des prestations
d'accidents du travail, 82 % des prestations d'assurance maladie et
45 % des prestations de retraite.
Le régime général de sécurité sociale,
qui n'a plus connu de situation excédentaire depuis 1989, reviendrait
d'un déficit maximal de - 67,4 milliards de francs en 1995
à un léger excédent de 352 millions de francs en
1999
.
Cette
amélioration tendancielle résulte d'un effet de ciseaux entre les
recettes et les dépenses, qui a déjà permis une
amélioration du fonds de roulement du régime
général de 20 milliards de francs en 1997, comme en 1998.
L'an prochain, les recettes évolueraient globalement de
+ 2,7 % et les dépenses de 1,6 %. Cet écart de
1,1 point, appliqué à une masse de 1.300 milliards de
francs, ramène le déficit de 13,3 milliards de francs en
1998 à l'équilibre pour 1999.
Toutefois, ainsi que le souligne le rapport de la commission des comptes de la
sécurité sociale, "
la prudence oblige toutefois à
relativiser la signification de ce solde précis de
+ 352 millions de francs, compte tenu des masses en jeu.
Le solde
reste obligatoirement entaché d'une marge d'incertitude importante, bien
supérieure à celle propre aux recettes d'une part, aux
dépenses d'autre part
. Une erreur de prévision de un
millième sur les recettes et sur les dépenses (une
prévision aussi précise est déjà un très bon
résultat), conduit ainsi à une variation du solde de plus ou
moins 2.600 millions de francs
."
Au-delà de cette réserve d'ordre statistique, la
sincérité des comptes tendanciels du régime
général appelle des critiques plus graves.
B. DES HYPOTHÈSES AUDACIEUSES
Essentielle pour l'évolution du produit des
cotisations, la
prévision d'une croissance de la masse salariale de + 4,3 % en
1999 apparaît optimiste. Cette croissance résulterait d'une
progression de l'emploi égale à celle de 1998, soit
+ 1,8 %, et d'une accélération de la hausse du salaire
par tête, soit + 2,5 % en 1999 contre + 2,2 % en
1998. L'amélioration de l'emploi suppose la réalisation de la
prévision de croissance de l'économie. Quant à la hausse
du salaire moyen par tête, elle apparaît compromise par la
réduction du temps de travail. Si l'impact final de cette réforme
reste controversé, il ne fait guère de doute qu'elle se traduira
dans l'immédiat par une modération salariale de la part des
entreprises.
Pour fixer les idées, précisons qu'un point de
masse salariale en moins entraîne un manque à gagner de l'ordre de
9 milliards de francs pour le régime général
.
Le point le plus contestable de la projection tendancielle
présentée par le Gouvernement est l'hypothèse
d'évolution des dépenses d'assurance maladie. En effet, le compte
tendanciel table sur un retour de ces dépenses en 1999 à un taux
de croissance modéré de + 2,6 % et non pas sur la
prolongation du taux de + 3,4 % désormais prévu pour
1998.
Le taux d'évolution spontané des dépenses de la
branche maladie se trouve ainsi, par construction, identique au taux
d'évolution volontairement fixé par la loi de financement de la
sécurité sociale pour l'objectif national des dépenses
d'assurance maladie (ONDAM) de 1999
. Cette hypothèse aboutit
à vider de son sens la notion même de compte tendanciel.
Le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale
souligne ce fait : "
C'est pour la maladie que ce compte a clairement la
nature d'un objectif ambitieux
.
Il est difficile d'en apprécier
la validité tant que ne sont pas connues les mesures destinées
à permettre de l'atteindre.
On peut cependant rappeler les ordres de grandeur suivants. Les comptes de 1998
présentent un dérapage des dépenses maladie à
hauteur de 6 milliards de francs environ par rapport aux objectifs de
l'ONDAM voté.
La poursuite à l'identique de ce
dérapage, en 1999, porterait les dépenses 12 milliards de
francs au-dessus du niveau retenu dans le compte 1999 présenté
dans ce rapport, soit un total à résorber de 18 milliards de
francs sur les 15 mois qui restent à courir.
Ainsi, en confondant objectif d'évolution et évolution
tendancielle, le gouvernement minimise l'effort de maîtrise des
dépenses nécessaire.
C. UNE CONTRIBUTION DÉTERMINANTE DES RÉGIMES COMPLÉMENTAIRES DE RETRAITE
Le
rapport économique, social et financier annexé au projet de loi
de finances fait état d'un excédent de l'ensemble des
administrations de sécurité sociale de 0,15 point de PIB en 1999.
Ce pourcentage correspond à un montant de 13 milliards de francs,
sensiblement supérieur à la somme des soldes de trésorerie
des régimes obligatoires de base inclus dans le champ du projet de loi
de financement de la sécurité sociale, soit 3,4 milliards de
francs.
Le champ des administrations de sécurité sociale en
comptabilité nationale inclut, outre les régimes obligatoires de
base, les régimes complémentaires, les régimes d'assurance
chômage et les "organismes dépendant des assurances sociales",
c'est-à-dire essentiellement les établissements hospitaliers.
Le détail des prévisions qui conduisent le Gouvernement à
avancer un excédent des administrations de sécurité
sociale de 0,15 point de PIB en 1999 n'a pas été
communiqué à votre rapporteur général.
Toutefois, l'UNEDIC a récemment rendu publique la prévision d'un
excédent de 1 milliard de francs pour l'an prochain. Par ailleurs, le
rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale du
mois de septembre prévoit en 1999 un déficit de 1,7 milliard de
francs pour l'AGIRC, mais un excédent de 14,2 milliards de francs pour
l'ARRCO.
L'excédent prévu de 13 milliards de francs en 1999 pour
l'ensemble des administrations de sécurité sociale paraît
donc
a priori
cohérent avec ces diverses prévisions. Il
repose principalement sur le rétablissement financier des régimes
complémentaires de retraite, à la suite des accords du 25 avril
1996 qui ont réduit les prestations et accru les cotisations.
III. UNE HYPOTHÈSE D'EXCÉDENT DES COLLECTIVITÉS LOCALES QUI NE TIENT PAS COMPTE DES CHARGES NOUVELLES IMPOSÉES PAR L'ETAT
A. COMMENT LES COLLECTIVITÉS LOCALES PEUVENT-ELLES DÉGAGER UNE CAPACITÉ OU UN BESOIN DE FINANCEMENT ?
Le champ
des administrations publiques prises en compte pour le calcul des
critères de convergence du traité sur l'Union européenne
comprend les collectivités locales.
Pourtant, les budgets locaux sont votés "à l'équilibre".
Dès lors, comment les collectivités locales peuvent-elle
être en mesure de dégager soit un besoin, soit une capacité
de financement ?
En premier lieu, il convient de rappeler que ce sont les "
administrations
publiques locales
" qui sont recensées. Leur définition ne se
limite pas aux collectivités locales. Elle englobe également,
d'une part, les
organismes qui émanent des départements et
des communes
, tels que les syndicats communaux et départementaux ou
les régies et, d'autre part, les
organismes divers d'administration
locale
, les ODAL, dont la longue liste comprend par exemple les caisses des
écoles, les crèches, les chambres de commerces et d'industrie ou
encore les lycées et collèges.
Ainsi,
l'ensemble des administrations publiques locales n'est pas lié
par l'impératif d'équilibre des budgets locaux.
En second lieu, selon les information recueillies par votre rapporteur
général auprès du ministère de l'économie et
des finances,
l'INSEE et la direction de la prévision "retraitent"
les dépenses et les recettes des collectivités locales pour
passer du système comptable local aux normes de la comptabilité
nationale.
Dans le système comptable local, le montant des "recettes
réelles" (produit de la fiscalité directe locale, dotation de
l'Etat, produit des emprunts, etc.) est égal au montant des
"dépenses réelles" (frais de personnel, investissements directs,
remboursements d'emprunts, etc.). En revanche, pour l'Etat, les remboursements
de dette et les emprunts interviennent uniquement comme modalités de
financement du déficit budgétaire.
Pour passer de la comptabilité locale à la comptabilité
nationale, chaque dépense ou recette est considérée soit
comme une "opération non financière" (frais de personnel,
recettes fiscales, etc.), soit comme une "opération financière"
(remboursement et produit des emprunts, flux nets de créances et de
trésorerie, etc.). Le solde des opérations financières,
égal au solde des opérations non financières, est
appelé "capacité de financement".
Par conséquent,
une collectivité locale est
réputée dégager une capacité de financement
dès lors que ses "ressources non financières" sont
supérieures à ses "dépenses non financières" ou, ce
qui est équivalent, dès lors que ses "dépenses
financières" sont supérieures à ses "ressources
financières"
38(
*
)
.
B. LE GOUVERNEMENT A ÉTABLI SA PROJECTION POUR 1999 EN PROLONGEANT LES TENDANCES DE LA PÉRIODE RÉCENTE
La
situation financière des collectivités locales s'est
considérablement améliorée depuis le milieu des
années 90. Alors qu'elles dégageaient un besoin de financement en
1995 et 1996 (- 15 et - 17,2 milliards de francs), elles sont
devenues excédentaires de 17,4 milliards de francs en 1997, soit
0,22 % du produit intérieur brut.
Les prévisions du gouvernement envisagent une consolidation de cette
situation excédentaire en 1998 et en 1999, à 0,15 % du
produit intérieur brut.
L'amélioration de la situation financière des
collectivités locales est attribuée par le gouvernement au
contexte macro-économique favorable
, marqué par le
ralentissement de l'inflation, la baisse des taux d'intérêt, la
reprise du marché immobilier et donc des droits de mutation à
titre onéreux et la modération salariale.
Dans ce contexte, c'est principalement le dynamisme des recettes qui est
à l'origine de la situation très favorable des
collectivités locales
. En effet, celles-ci ont cru plus vite que les
dépenses. Alors que ces dernières augmentent en moyenne de
2,4 % par an depuis 1990 (3,4 % en 1997, 1,6 en 1996), les recettes
ont progressé de plus de 5 % par an ces dernières
années (5,6 % en 1996, 5,7 % en 1997, 2,8 % en moyenne
depuis 1990).
Au sein des recettes, les recettes fiscales ont
été particulièrement dynamiques
.
En fait, le résultat, retraité en comptabilité nationale,
de la gestion des administrations locales traduit tout simplement le fait
qu'elles dégagent un autofinancement substantiel, affecté
à la couverture partielle de leurs investissements, principe de base
d'une saine gestion que l'Etat ne s'applique pas à
lui-même...
C. L'ESSOUFFLEMENT DES FACTEURS DE L'ASSAINISSEMENT DE LA SITUATION FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS LOCALES
Les
facteurs de l'assainissement de la situation financière des
collectivités locales identifiés par le gouvernement atteignent
leurs limites
aujourd'hui.
En conséquence, il n'est pas exclu
que la situation financière des collectivités locales traverse
une nouvelle zone de turbulences :
-
la baisse des taux d'intérêt atteint un palier
. Une
poursuite de la baisse des taux français n'est en outre pas
forcément possible car elle rendrait plus difficile la convergence des
participants à l'euro chez lesquels les taux restent à des
niveaux élevés ;
-
la modération des dépenses de ces dernières
années touche à sa fin
. S'agissant des dépenses de
fonctionnement, les conséquences des accords salariaux dans la fonction
publique du 10 février 1998 seront redoutables.
Coût de l'accord salarial dans la fonction publique du
10
février 1998
s'agissant de la fonction publique territoriale
(en milliards de francs)
|
Fonction publique territoriale |
|||||
|
Coûts annuels
supplémentaires
|
Coûts annuels totaux |
||||
|
en 1998 |
en 1999 |
en 2000 |
en 1998 |
en 1999 |
en 2000 |
Revalorisation du point |
1,5 |
2,4 |
2,0 |
1,5 |
3,9 |
5,9 |
Mesures
d'accompagnement
|
0,6
|
1,9
|
1,5
|
0,6
|
2,5
|
4,0
|
Total |
2,2 |
4,3 |
3,5 |
2,2 |
6,5 |
10,0 |
Quant
à l'investissement, son redressement aurait du se confirmer en 1999.
Toutefois, la hausse des traitements des agents des collectivités
locales ne permettra pas aux collectivités locales de
bénéficier pleinement de leurs efforts d'assainissement et de
gestion active de leur dette. Sauf à se résigner à
recourir à nouveau à l'endettement ou à accroître la
pression fiscale, le dynamisme de l'investissement pourrait connaître un
coup d'arrêt.
-
la tendance au tassement des recettes devrait se confirmer
car les
taux des impôts directs locaux connaissent une évolution
modérée. Depuis 1990, la baisse continue du rythme de croissance
du produit de la fiscalité locale tient plus à la baisse du
rythme d'évolution des taux d'imposition qu'à celui des bases
imposables, qui ont elles augmenté entre 1996 et 1997.
Source : Rapport Bourdin, Observatoire des finances locales, 8 juillet 1998
De plus,
l'augmentation des concours budgétaires de l'Etat aux
collectivités locales ne permettra vraisemblablement pas de compenser
les effets de l'accroissement des dépenses et de la baisse du produit de
la fiscalité directe.
Les mesures relatives aux finances locales contenues dans le projet de loi
de finances pour 1999 tendent à montrer que le gouvernement n'a pas pris
la mesure de l'importance de la contribution des collectivités locales
au respect des critères de convergence du traité sur l'Union
européenne et, plus largement, à la croissance de
l'économie française.
CHAPITRE IV
PROPOSITIONS POUR UN BUDGET DE
RESPONSABILITÉ ET DE CONFIANCE
Votre
commission ne propose pas de rejeter le présent projet de loi de
finances, car il n'est pas tel qu'il ne puisse être
amélioré. Au fond, il encourt deux reproches fondamentaux :
- il ne réduit pas le déficit suffisamment pour commencer
à stabiliser la dette publique et amorcer sa décrue ;
- il s'appuie de façon excessive sur les espérances
conjoncturelles, en ne proposant pas les mesures d'ajustement structurel de
nature à prévenir les dérapages (et par voie de
conséquence, il ne peut entamer de véritable réforme
fiscale, notamment relative à l'impôt sur le revenu, bien que le
gouvernement soit lui-même conscient de sa nécessité).
Les propositions de votre commission tendent à redresser ces deux
travers, qui peuvent avoir tendance à s'entretenir l'un l'autre.
Ces propositions s'articulent en cinq points :
- réduire le déficit pour stabiliser la dette publique et
préserver les générations futures ;
- porter l'effort sur les dépenses de structure récurrentes,
à savoir les dépenses de fonctionnement et d'intervention ;
- proposer une réduction raisonnable des prélèvements
pour 1999, et amorcer une réforme pour les années
ultérieures ;
- conserver aux collectivités locales leur rôle de moteur de
l'investissement public, par une préservation de leur autonomie ;
- enfin, en synthèse de cet ensemble, rénover nos
méthodes budgétaires pour accroître la
crédibilité de la loi de finances dans le cadre des engagements
européens de la France.
I. CONTRIBUER À STABILISER LA DETTE PUBLIQUE DÈS 1999
A. UNE RÉDUCTION DU DÉFICIT BUDGÉTAIRE DE 14 MILLIARDS DE FRANCS
L'entrée en vigueur de l'euro, le 1er janvier 1999
pour
la France, conduit votre rapporteur général à rappeler les
engagements que le présent gouvernement a souscrits à Amsterdam
en juillet 1997. Le programme de stabilité de la France devra notamment
prévoir
"l'objectif à moyen terme d'une position
budgétaire
proche de l'équilibre ou excédentaire
ainsi que la trajectoire d'ajustement qui doit conduire à la
réalisation de cet objectif concernant l'excédent, le
déficit des administrations publiques et l'évolution
prévisible du ratio d'endettement de l'Etat".
Un déficit de l'Etat de plus de 230 milliards de francs et de
2,7 % du PIB ne peut convaincre d'une telle orientation à moyen
terme.
En particulier, il apparaît impératif d'amorcer la décrue
du poids de la dette publique dans le PIB, décrue qui peut engager une
diminution du poids des charges d'intérêt dans le budget.
Pour ce qui concerne la part de l'Etat dans l'augmentation de la dette
publique, et en tenant pour acquis les bons résultats prévus pour
les autres administrations publiques, une réduction d'une douzaine de
milliards de francs du déficit proposé pourrait suffire
39(
*
)
. Votre commission vous propose, par
sécurité, de porter cette réduction supplémentaire
à 14 milliards de francs
,
cette somme correspondant
à l'affectation au déficit public de l'effet d'un point de
croissance nominale
40(
*
)
(sur les 3,8
prévus) sur les recettes de l'Etat.
B. UNE RÉDUCTION MODÉRÉE DES PRÉLÈVEMENTS EN PREMIÈRE PARTIE
Votre
commission souhaite maintenir sa confiance dans l'économie
française, et ne propose donc pas de réestimer l'évolution
spontanée des recettes dans l'article d'équilibre.
En revanche, elle ne pourra accepter un certain nombre de
prélèvements nouveaux proposés par le gouvernement ou par
l'Assemblée nationale. Il en est ainsi par exemple du
prélèvement de 5 milliards de francs sur les fonds propres
des caisses d'épargne alors que leur réforme n'a pas encore
été discutée, de l'abaissement du plafond des effets du
quotient familial sur l'impôt sur le revenu, de l'aggravation des
prélèvements sur les sociétés ou de certaines
mesures d'accompagnement de la taxe professionnelle.
Au total, sous réserve de l'examen détaillé par votre
commission puis par le Sénat de cette première partie, la
dégradation des recettes liée au refus de certaines mesures
nouvelles pourrait atteindre une douzaine de milliards de francs.
Bien que l'objectif de réduction des prélèvements
obligatoires reste au coeur des préoccupations de votre commission,
celle-ci ne proposera pas d'aller au-delà pour l'exercice 1999, par
esprit de responsabilité. La réduction des
prélèvements doit succéder à l'assainissement de
nos finances publiques et non pas le précéder. Les conditions ne
sont pas encore réunies, notamment en termes de possibilités de
réduction des dépenses, pour proposer dès 1999 une vaste
réforme fiscale.
C. UNE RÉDUCTION DES CHARGES DE STRUCTURE
Pour
atteindre l'objectif de réduction du déficit proposé de
14 milliards de francs, compte tenu d'une diminution prévisonnelle
des recettes de l'ordre de 12 milliards de francs, une réduction
des dépenses d'environ 26 milliards de francs est nécessaire.
Cette proposition n'a rien de déflationniste. Le gouvernement propose en
effet une augmentation des dépenses de 37 milliards de francs.
Votre commission ne propose donc pas de réduire leur niveau par rapport
à l'exercice en cours, mais d'y affecter une moindre proportion des
fruits de la croissance prévus pour 1999.
Evolution
spontanée des recettes par rapport à la
loi de finances pour 1998
|
Ventilation des
augmentations de recettes par rapport à la
loi de finances pour 1998
|
|||
|
|
|
Propositions |
|
|
|
|
du gouvernement |
de votre commission |
Recettes |
74,5 |
Dépenses |
36,9 |
10,8 |
|
|
Réduction du déficit |
21,3 |
35,3 |
|
|
Allégements de prélèvements |
10,6 |
22,6 |
|
|
Effet 1999 de mesures d'allé-gements décidées antérieurement |
5,8 |
5,8 |
Total |
74,5 |
Total |
74,5 |
74,5 |
Votre
commission ne propose pas au Sénat un exercice aisé de
réduction des dépenses budgétées.
En effet, le plus facile est de pratiquer une réduction des
dépenses d'investissement, car elles sont flexibles. Ce type de
réduction, auquel les gouvernements procèdent par annulations de
crédits, est le plus habituel. Or votre commission souhaite
préserver l'investissement public, de l'Etat comme des
collectivités locales, car il est porteur d'avenir, et seul justiciable
d'un financement par endettement.
L'analyse de notre situation budgétaire montre qu'il est
nécessaire de s'attaquer au déficit structurel et au
déficit de fonctionnement, ce qui passe par une réduction des
dépenses de fonctionnement et d'intervention, dépenses plus
rigides, structurelles. Les alléger nécessite des réformes
en profondeur.
Sur ce thème aussi, il est possible d'invoquer les travaux d'Amsterdam
de juillet 1997. Le gouvernement y a souscrit une recommandation du
Conseil
41(
*
)
, où il est notamment
précisé :
"dans la plupart des Etats membres, il est
souhaitable que la préférence soit donnée à une
réduction des dépenses plutôt qu'à une augmentation
de la pression fiscale globale, en tenant compte, le cas échéant,
des relations entre les systèmes de transferts sociaux et le
système fiscal. Dans ces Etats membres, il convient de
privilégier les mesures structurelles pour mieux maîtriser les
dépenses relatives à la consommation publique, aux pensions des
régimes publics, aux soins de santé, aux mesures passives
relatives au marché du travail et aux subventions".
Bien entendu, la France pourrait se considérer hors de la "plupart
des Etats membres", mais la situation de ses déficits publics par
rapport à ses partenaires ne plaide pas en ce sens.
Votre commission proposera donc une réduction des dépenses de
structure (titres III et IV) témoignant de sa volonté de
voir aboutir une réforme de l'Etat, qui passe par une meilleure gestion
des effectifs publics et la mise en oeuvre urgente d'une réforme des
retraites publiques destinée à en alléger le poids sur les
générations futures.
II. LA NÉCESSAIRE RÉDUCTION DES DÉPENSES PUBLIQUES
La
stabilisation en francs constants des dépenses de l'Etat, pour en
réduire le poids dans la richesse nationale, reste plus que jamais un
impératif de saine gestion des finances publiques.
En effet, ainsi que votre rapporteur général l'a
déjà rappelé, afin d'inverser la dérive de la dette
publique, il est indispensable d'améliorer le solde primaire du budget
de l'Etat et, partant, d'opérer une action forte sur les dépenses.
Une tentative en ce sens avait été entamée en 1997 mais
elle n'a malheureusement pas été reconduite en 1998 et ne le sera
pas pour 1999. Le gouvernement affiche en effet un objectif de
"
progression maîtrisée des dépenses de l'Etat de
1 % en volume "
qui correspond à une progression de 2,3%
en valeur soit un niveau presque deux fois supérieur à
l'inflation.
A. LE POSTULAT DU GOUVERNEMENT : "UNE MEILLEURE EFFICACITÉ DE LA DÉPENSE PUBLIQUE"
1. Un objectif affiché de 31 milliards de francs d'économies
Le
gouvernement réalise en effet des économies et des
redéploiements estimés à 30,9 milliards de
francs
42(
*
)
soit au total une " marge de
manoeuvre " de 31 milliards.
Les économies, principalement au titre de la révision des
services votés, s'élèvent à 14,5 milliards de
francs et portent à hauteur de 11,1 milliards de francs sur les
services civils. Les redéploiements sous forme d'ajustements
négatifs ou de mesures non-reconduites, représentent
16,4 milliards de francs dont 14,3 milliards de francs pour les
budgets civils.
Le montant des économies et des redéploiements
(30,9 milliards de francs) que le gouvernement déclare avoir
réalisé est supérieur à la progression des
dépenses résultant de la simple hausse des prix, soit
20,9 milliards de francs. Cela signifie que le gouvernement a
réduit de 9 milliards de francs dans le projet de loi de finances
pour 1999 les crédits issus de la simple reconduction de
décisions prises dans le précédent projet de loi de
finances.
2. Deux exemples d'économies ponctuelles
a) Le " recentrage " de certains dispositifs d'aide à l'emploi
Les crédits du budget de l'emploi consacrés aux contrats-emploi-solidarité (CES) ont été " recentrés " selon la formule de Madame le Ministre de l'emploi, c'est à dire en réalité diminués de 1,7 milliard de francs et ceux destinés aux contrats initiative emploi (CIE) réduits de 3,6 milliards de francs. Par ailleurs les crédits consacrés aux préretraites sont passés de 11,3 à 6,8 milliards de francs.
b) La baisse des effectifs du Ministère de l'économie
Si les
effectifs budgétaires civils de la fonction publique restent en 1999
à un niveau identique à 1998 (1.681.577) c'est en raison de
2.358 créations de postes compensées par autant de
suppressions.
Il est donc possible, en allant au delà, de réduire les effectifs
nets de la fonction publique sans pour autant perturber le bon fonctionnement
des services publics, comme le Ministère de l'économie en donne
lui-même l'exemple : "
les efforts de rationalisation,
certaines mesures de simplification fiscale et administrative, et la
réorganisation des services permettent une baisse de 0,4 % des
effectifs budgétaires, soit 695 emplois, qui traduisent les
progrès de productivité du ministère (budget des services
communs et financiers)
"
43(
*
)
.
Sur le plan des principes et de la méthode, le gouvernement ne peut donc
plus s'opposer systématiquement à la réduction des
dépenses et affirmer qu'elles correspondent à des
économies que le Ministre de l'économie qualifie un peu
familièrement et hâtivement de " café du
commerce "
44(
*
)
. En effet, il en
réalise lui-même, pour des montants significatifs et cela
même sur des budgets réputés " sensibles ".
Il n'y a donc pas de fatalité de la hausse de la dépense
publique.
3. Une nécessité : la réduction de la masse des rémunérations publiques
Les
dépenses de rémunération publique représenteront en
1999 le premier poste de dépenses de l'Etat et s'établissent
au-dessus du seuil de 650 milliards de francs, soit le tiers des
dépenses du budget général (32,7 %). Elles
représentent par ailleurs 85,27 % des des dépenses de
fonctionnement du titre III.
Une diminution de la dépense publique passe donc nécessairement
par une action forte sur ce poste de dépenses et cela de deux
manières différentes :
a) une action globale sur les départs à la retraite ou les rémunérations
Une
simulation réalisée à la demande de votre commission
montre en effet l'impact budgétaire important et rapide d'une telle
action.
Quelles seraient les économies budgétaires à attendre
pour 1999 et les cinq années suivantes de mesures telles que :
- le non-remplacement total des départs à la retraite,
- le remplacement d'un départ sur deux,
- le gel des effectifs,
- le gel des salaires (hors GVT) au niveau de 1998 ?
Economies budgétaires par rapport à un scénario de stabilité des effectifs (en Mds F de dépenses en moins par rapport à l'année précédente) |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
Cumul
|
Non remplacement total des départs à la retraite pendant 5 ans |
10,6 |
10,9 |
11,3 |
11,6 |
12 |
166 |
Remplacement d'un départ sur deux pendant 5 ans |
5,3 |
5,4 |
5,7 |
5,8 |
6 |
83 |
Gel des effectifs |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
Gel des salaires hors GVT (*) au niveau de 1998 |
4,3 |
7,9 |
- |
- |
- |
53,1 |
(*)
Gel des mesures de nature salariale de l'accord du 10 février sauf
les mesures prises en 1998. Aucune hypothèse de revalorisation salariale
au-delà de 1999.
(Source : ministère de l'économie)
b) Un exemple sectoriel : le cas de l'éducation nationale
Il
ressort des informations communiquées par le Ministère de
l'éducation nationale, s'agissant des dépenses de
rémunération publique pour 1999 :
*qu'il serait possible de réaliser des économies au sein
de
l'enseignement scolaire
, par la diminution des recrutements de
moitié: en cette hypothèse, 12.288 recrutements de
personnels stagiaires ne seraient pas effectués, soit une
économie d'environ
530 millions de francs ;
De même si l'on ne procédait au remplacement que d'un
départ à la retraite sur deux, pour les personnels enseignants
comme non enseignants, 607 emplois d'enseignants et 675 emplois de
non enseignants seraient en 1999 ainsi supprimés (1.282 emplois au
total),
soit une économie de 225,5 millions de francs en
année pleine.
*que s'agissant de l'enseignement supérieur,
seul un départ
à la retraite sur deux de personnels enseignants et non enseignants
pourrait être remplacé. Cela représenterait
16.078 emplois : 5.628 de personnels enseignants du premier
degré, 5.250 personnels enseignants du second degré,
3.630 personnels non enseignants et 1.570 enseignants du secteur
privé. L'économie ainsi réalisée serait de
949,15 millions de francs.
La commission d'enquête sur la situation et la gestion des personnels
enseignants et non enseignants de l'Education nationale dont le Sénat
vient de prendre l'initiative, permettra d'étudier la faisabilité
de tels efforts, en analysant l'évolution des besoins selon la courbe
des effectifs scolarisés aux différents niveaux, et selon le taux
d'encadrement effectif des élèves ou
étudiants.
c) L'exemple américain
Confrontée à une situation similaire,
l'administration
fédérale américaine a mis en oeuvre une politique
drastique de réduction des effectifs de l'administration.
" Le Vice-président Al Gore a mené un effort sans
précédent de réduction de la taille du gouvernement
fédéral afin de le rendre plus efficace et productif s'inspirant
pour cela de l'expérience du secteur privé. Grâce aux
efforts ainsi entrepris, l'administration a économisé 137
milliards de dollars au cours des cinq dernières années.
Ainsi le gouvernement a réduit le nombre des employés civils de
316.000 le portant à un effectif le plus faible jamais atteint depuis
35 ans. Presque tous les 14 départements ministériels ont
réduit leurs effectifs : seul le ministère de la Justice a
accru ses effectifs, en raison de la politique de lutte renforcée contre
la criminalité et le trafic de drogue ; de même en raison du
recensement décennal le ministère du Commerce intérieur a
été épargné par ledit mouvement. "
(source : site Internet de l'administration fédérale
américaine)
Bien entendu, chaque pays est confronté à ses contraintes
propres, mais il faut rappeler que l'expérience de l'administration
démocrate a été réalisée de manière
empirique et ne manifeste aucun a priori idéologique...
B. LA NÉCESSITÉ D'ALLER AU-DELÀ
1. Une volonté exprimée lors du débat d'orientation budgétaire
A
l'occasion du débat d'orientation budgétaire de juin 1998,
M. Alain Lambert alors rapporteur général avait
déjà souhaité
" réduire les dépenses
pour libérer l'avenir "
et fait à ce titre un certain
nombre de recommandations visant à stabiliser les dépenses
à leur niveau de 1998. Il souhaitait concentrer
" l'effort sur
les composantes les plus rigides: fonction publique, interventions publiques et
indirectement, charges de la dette publique, en préservant
l'investissement et les budgets régaliens ".
Il avait également tenu à souligner les risques existant en
matière de retraite
45(
*
)
et
proposé à ce titre d'allonger la durée de cotisation afin
de mieux garantir les droits à retraite des fonctionnaires.
2. L'existence pour 1999 de sérieux risques de dérive budgétaire
Le gouvernement ne s'est pas attaqué aux composantes les plus rigides de la dépense publique. De plus, les projets prioritaires du gouvernement connaissent une montée en charge fortement progressive qui pèsera pleinement sur l'élaboration du prochain budget ainsi que votre rapporteur général l'a souligné lors de l'examen de la progression pour 1999 des dépenses du budget général.
3. L'accroissement de la rigidité de la dépense publique
Dans son
rapport préparatoire au débat d'orientation budgétaire de
juin 1998 le gouvernement regrettait que
" la structure des
dépenses de l'Etat se soit rigidifiée au fil des
ans
"
Il est cependant surprenant de voir le gouvernement ne rien faire pour lutter
contre ce phénomène. En effet les trois principaux postes de
dépenses du budget général ne sont en aucune façon
concernés par une éventuelle limitation de la progression de la
dépense publique. Or ces dépenses qui présentent un
caractère structurel, représentent en 1998, 88 % des
recettes fiscales nettes, contre 57 % en 1990.
A elles seules ces trois composantes contribuent en outre à expliquer,
arithmétiquement, la totalité de la hausse de
36,9 milliards de francs pour 1999 de la dépense
publique.
C. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Dans ce
cadre, votre commission des finances a souhaité proposer un effort
significatif de réduction
des dépenses civiles
46(
*
)
d'un montant de 26 milliards de francs
environ, en répartissant cette baisse entre :
*
des économies ciblées
au refus de certains
dispositifs proposés par le gouvernement ou à la
nécessité de les financer par redéploiement ;
* des économies forfaitaires
à hauteur de 1 % des
dépenses des titres III et IV des budgets civils et de 5 % sur les
parties 4 à 7 du Titre III (" train de vie de l'Etat " :
subventions de fonctionnement, matériel, entretien et charges diverses
de fonctionnement ).
Ces dernières invitent le gouvernement à faire preuve de
volontarisme dans l'effort de réduction des dépenses, en les
diminuant de façon significative mais dans une proportion
réaliste.
1. Des économies ciblées
a) La suppression des crédits destinés aux 35 heures
Les
3,5 milliards de francs de crédits figurant dans le projet de loi
de finances pour 1999 n'apparaissent pas réalistes. Le gouvernement
n'indique pas en effet la manière dont ils ont été
calculés et ceux-ci apparaissent par ailleurs mal calibrés.
Non seulement la provision de 3 milliards de francs figurant dans la loi
de finances pour 1998 n'a pas été entièrement
consommée
47(
*
)
mais eu égard au
faible nombre d'accords signés et à la difficulté
d'obtenir des chiffres précis s'agissant des emplois sauvés ou
préservés, la dotation prévue pour 1999 apparaît
inadaptée.
Votre commission tient également à rappeler son étonnement
devant la façon dont le montant de la dotation avait été
fixée en 1998. Elle avait été prélevée sur
les crédits relatifs à la ristourne dégressive
fusionnée rendant de ce fait nécessaire leur abondement en loi de
finances rectificative pour 1998, malgré les déclarations
initiales en sens contraire du gouvernement.
En outre, votre commission tient à relever que si ce dispositif devait
produire des effets à la hauteur de l'ambition du gouvernement, la
charge budgétaire en serait accrue de manière très
substantielle. La commission des affaires sociales en avait ainsi
évalué le coût sur la base de 450.000 emplois crées
à 13,5 milliards de francs la première année et
à 36 milliards de francs la deuxième année.
Au demeurant, la majorité du Sénat a montré son
hostilité au caractère contraignant de ce dispositif de
réduction du temps de travail.
b) La suppression d'un montant de crédit représentatif des mesures nouvelles concernant les emplois jeunes
Cette
mesure proche de celle préconisée l'année dernière
consisterait à gager la progression des crédits correspondant aux
nouveaux emplois-jeunes par un effort d'économie sur les titres
concernés (principalement le titre IV du budget du travail,
" interventions en faveur de l'emploi " ).
Si le gouvernement tient à financer les 100.000 nouveaux
emplois-jeunes,
qui figurent au sein du budget de l'emploi, mais
également des DOM-TOM ou de l'enseignement scolaire et
supérieur
48(
*
)
,
il doit selon votre
commission, réexaminer les dispositifs préexistants et
procéder par redéploiement au sein d'une enveloppe globale des
aides à l'emploi qui atteint 150 milliards de francs.
Récapitulation des économies proposées au
titre
des emplois-jeunes
Budget et imputation |
Montant (en millions de francs) |
Observations |
Emploi (chapitre 44-01) |
5.114,5 |
100.000 nouveaux emplois jeunes |
Enseignement scolaire public (chapitres 36-71 et 36-10) |
|
|
Enseignement scolaire privé (chapitre 43-02) |
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Enseignement supérieur (chapitre 36-11) |
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c) Les mesures relatives à l'épargne logement et au logement
Il s'agit, d'une part, de reconduire la mesure de réduction à hauteur de 2,1 milliards de francs des primes d'épargne logement qui figurent au budget des charges communes pour protester, comme en 1998, contre le fait que ces primes ne servent plus à financer le logement mais à subventionner un produit d'épargne concurrent de l'épargne contractuelle de moyen terme (assurance-vie notamment). Il s'agit également de conduire une opération de révision des services votés au sein du budget de l'urbanisme et du logement sur les aides personnelles au logement à hauteur de 500 millions de francs, comme le gouvernement l'avait lui-même proposé pour 1998.
d) Les mesures relatives à la Santé et à la Solidarité
Ces
mesures visent à " recentrer " les crédits
destinés à l'Allocation de parent isolé qui viennent
d'être rebudgétisés à hauteur 4,2 milliards. En
effet, la Cour des Comptes
49(
*
)
et la Caisse
nationale d'allocations familiales estiment que la notion d'isolement est
appréciée de façon trop extensive : elle est
versée en fait à de nombreux couples. Ce recentrage pourrait se
traduire par une économie estimée forfaitairement à
5 % soit 210 millions de francs.
De même les crédits destinés au RMI (26,4 milliards de
francs soit + 4,2 %) seraient réduits forfaitairement de
5 %, soit un montant de 1,32 milliards de francs correspondant
à des économies de gestion, à la lutte contre la fraude et
à la prise en compte des effets bénéfiques de la
croissance dont se prévaut le gouvernement. Par ailleurs, le ministre de
l'Emploi a déclaré au cours de son audition par la commission des
finances du Sénat qu'il existait " marginalement " des fraudes
et que le nombre de bénéficiaires devrait se stabiliser en 1999.
Naturellement, ces économies doivent être
réalisées sans porter atteinte aux droits résultant de la
législation en vigueur.
e) La réduction des crédits d'action sociale figurant au budget des services généraux du premier ministre (SGPM)
255 millions de francs de crédits figurent au titre V de ce budget sans aucune explication ni justification : ils ont été transférés en provenance du titre III et étaient destinés à accompagner l'accord salarial dans la fonction publique, qui a été signé le 10 février 1998.
f) La suppression des mesures nouvelles concernant les dépenses accidentelles ou éventuelles
Les crédits inscrits au budget des charges communes passent de 545 millions de francs en 1998 à 1,2 milliard de francs en 1999 sans aucune justification. Dans le projet de loi de finances pour 1996 ils représentaient 295 millions de francs et 445 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 1997. Cette dérive ne fait l'objet d'aucune explication crédible.
Exécution en lois de finances (en millions de francs)
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PLF 1996 |
PLF 1997 |
PLF 1998 |
PLF 1999 |
Chapitre 37-94 |
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Crédits initiaux |
85 |
245 |
285 |
600 |
Exécution |
141,5 |
244,4 |
31,6 1 |
- |
Chapitre 37-95 |
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Crédits initiaux |
210 |
200 |
260 |
600 |
Exécution |
50,7 |
45,4 |
17 1 |
- |
1. Au 30 juin 1998
Source - Direction du budget
g) La suppression des mesures nouvelles au titre de l'indemnité compensatrice versée à la RATP
Les
crédits concernant cette indemnité compensatrice
s'élèvent dans le projet de loi de finances pour 1999 à
4,56 milliards de francs en progression de 2 ,8% par rapport à
1998. Il importe de lui conserver son caractère d'indemnité
compensatrice et non de la transformer, de fait, en subvention
d'équilibre. La suppression ainsi opérée devrait permettre
à cette entreprise qui bénéficiera par ailleurs de la
croissance prévue pour 1999 du trafic en Ile de France de
réaliser des progrès de productivité. On peut
également considérer que les recettes commerciales de la RATP
seraient augmentées si le gouvernement concentrait ses efforts sur la
sécurité plutôt que sur des subventions à
l'entreprise publique.
A ce titre, votre rapporteur général tient à rappeler
le jugement porté sur ladite augmentation par le rapporteur
spécial des crédits des transports terrestres à
l'Assemblée nationale :
" Cette majoration est
malheureusement plus due à un laxisme budgétaire qu'à un
financement maîtrisé ".
2. Des économies forfaitaires
a) les modalités de calcul de ces économies forfaitaires
Ces
économies portent sur les seuls titres III et IV des budgets civils afin
de préserver les dépenses en capital.
Seuls seraient épargnés les ministères de
souveraineté, dits parfois "régaliens"
(outre la
Défense, il s'agit de l'Intérieur, des Affaires
étrangères et de la Coopération et de la Justice),
ainsi que ceux en diminution à structure constante,
soit six
budgets
:
l'agriculture, l'aménagement du territoire,
les anciens combattants, les routes, les transports aériens et les
services généraux du premier ministre.
Le taux de la réduction forfaitaire serait modulé :
*5 % pour le " train de vie de l'Etat
" soit les parties 4
à 7 du titre III (entretien, dépenses de fonctionnement quotidien
etc.);
*1 % pour les autres dépenses du titre III ainsi que pour
l'ensemble du titre IV.
S'agissant du titre III, cette diminution de 1 % correspond à la
volonté de votre commission d'inciter le gouvernement à
poursuivre plus avant la réforme de l'Etat et à donner plus de
souplesse à ses méthodes de gestion de la fonction publique.
En effet, par comparaison, on peut rappeler qu'une diminution de 1 % des
crédits de la masse salariale correspondrait à une
réduction pour les budgets civils de 16.816 emplois budgétaires,
soit un peu plus du quart des départs annuels à la retraite, qui
sont estimés à environ 50.000 à 60.000.
Votre commission souhaite par ailleurs que le gouvernement s'engage dans une
révision systématique des structures administratives
. Pour ne
prendre que cet exemple, faut-il faire éternellement coexister les
agences régionales de l'hospitalisation avec les directions
départementales mais aussi régionales des affaires sanitaires et
sociales, est-il nécessaire de maintenir des échelons
départementaux et régionaux de la jeunesse et des sports, est-il
utile de conserver des échelons déconcentrés de certains
ministères (comme le tourisme) dont les compétences ont
été largement transférées aux collectivités
territoriales ?
Une poursuite déterminée de la réforme de l'Etat devrait
permettre aux gestionnaires de l'administration de mieux utiliser les moyens
qui leur sont alloués, et de répartir aux échelons les
plus appropriés les crédits de rémunérations, par
un pilotage plus fin des embauches, le recours au travail à temps
partiel, etc..
Il faut entrer dans une autre logique et faire prévaloir une
véritable gestion des ressources humaines de l'Etat, comme l'a
demandé votre commission à plusieurs reprises au cours des
années passées.
Il s'agit enfin d'inciter à la réalisation d'une réforme
urgente : celle des retraites de la fonction publique.
b) Le montant des économies forfaitaires
(1) Les économies forfaitaires au taux de 5 % représenteront plus de 3 milliards de francs
La base taxable est constituée des dépenses de " train de vie " des titres III (c'est à dire hors dépenses de rémunération ou de pension ) soit les parties 4 à 7.
(2) Les économies forfaitaires au taux de 1 % s'élèveront à plus de 8 milliards de francs
La base
taxable comprend les dépenses de rémunération (titre III
hors " train de vie "), soit les parties 1 à 3, et l'ensemble
des dépenses du titre IV.
Il y a donc lieu d'amender les budgets concernés en faisant
prévaloir cette logique. Votre commission souligne que ce
procédé est le seul qui soit à sa disposition pour
manifester sa volonté de voir enfin s'engager une politique de
réformes structurelles au sein des administrations civiles.
III. ALLÉGER LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
A. ENGAGER UNE DIMINUTION RÉELLE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
La
France connaît l'un des taux de prélèvements obligatoires
les plus élevés de l'Union européenne (46,1 % du PIB
en 1997). Des actions volontaristes doivent donc être entreprises :
L'impôt sur le revenu
Il est certain que la combinaison des relèvements d'impôt sur le
revenu et du taux de la CSG pour 1998 a conduit à aggraver les
prélèvements directs sur les revenus des ménages de plus
de 11 milliards de francs en 1998.
La réduction programmée de l'impôt sur le revenu reste
donc une priorité.
Or, hors effet de l'évolution spontanée, les mesures du
présent projet de loi de finances, revues très
légèrement à la baisse suite au vote de l'Assemblée
nationale, aboutiront tout de même à un alourdissement d'un
milliard de francs de cet impôt.
De surcroît, la baisse du plafond par demi-part de l'avantage fiscal
procuré par le quotient familial
(3,9 milliards de francs) sera une
nouvelle mesure d'aggravation de la fiscalité pesant sur les familles,
après la mise sous condition de ressources des allocations familiales en
1998 (mesure sur laquelle, d'ailleurs, le gouvernement a été
contraint de revenir).
L'impôt sur les sociétés
Comme cela a été vu, la loi portant mesures urgentes à
caractère fiscal et financier (MUFF) a considérablement accru les
charges fiscales directes des entreprises. Elle a porté le taux de
l'impôt sur les sociétés à 41,66 %,
plaçant la France au troisième rang européen
derrière l'Italie et l'Allemagne.
Cet alourdissement a rompu avec la réforme engagée depuis 1985 et
qui avait conduit à diminuer l'impôt pesant sur les
bénéfices des sociétés de 50 % à
33,1/3 % en 1993.
Il crée un désavantage compétitif pour les entreprises
françaises alors que, dans le même temps, la fiscalité des
bénéfices distribués et non distribués est
allégée en Allemagne et le taux marginal d'imposition est
diminué en Grande-Bretagne.
De même, la taxation au taux de droit commun des plus-values à
long terme va à contre-courant des législations fiscales de nos
principaux partenaires économiques.
Il ne serait donc pas admissible que les nouveaux prélèvements
portent encore sur le potentiel économique de notre pays, potentiel qui
est, quoi qu'on en dise, un élément clef des prévisions de
croissance.
Or, force est de constater que certaines dispositions du présent projet
de loi de finances poursuivent l'aggravation de la fiscalité pesant sur
les entreprises, notamment la réduction du taux de l'avoir fiscal ou le
nouveau régime de cessions de parts de sociétés à
prépondérance immobilière. Cette aggravation, qui ne
pouvait qu'être modeste compte tenu des hausses antérieures, a
toutefois été amplifiée par le passage à
l'Assemblée nationale (et notamment le rétablissement de la
taxation des dividendes de la fille à la mère supprimée en
1993).
Alléger l'imposition du patrimoine et favoriser l'épargne
L'imposition du patrimoine nuit à la compétitivité de
notre pays.
L'ensemble des mesures fiscales présentées dans le projet de loi
de finances et le projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 1998 (élargissement de l'assiette des
prélèvements sociaux, augmentation de la CSG, imposition de
l'assurance-vie, plafonnement envisagé de l'avoir fiscal)
correspondaient à 23 milliards de francs supplémentaires
pesant sur les épargnants.
Cette politique de surtaxation de l'épargne méconnaît ses
caractéristiques, et notamment le risque de freiner l'investissement et
d'assister à des délocalisations de capitaux.
Enfin, le patrimoine lui-même, et notamment le patrimoine "productif",
subit une fiscalité déstabilisante : à titre d'exemple, la
fiscalité des transmissions d'entreprises est quatre fois plus
élevée en France qu'en Allemagne ou en Italie.
De surcroît, l'insécurité juridique devient une
caractéristique forte de la politique fiscale en matière de
patrimoine et d'épargne, soit exactement le contraire du souhaitable,
s'agissant de l'argent mis de côté par les ménages
français pour assurer leur avenir.
Le présent projet de loi de finances est un modèle en ce domaine,
puisqu'il revient sur toute une série de dispositions fiscales
jugées "acquises", notamment en matière d'impôt de
solidarité sur la fortune et de droits de mutation à titre
gratuit. La suppression de la disposition relative au régime fiscal de
l'assurance-vie et son remplacement montre toutefois que cette
instabilité fiscale a des limites qu'il convient de ne pas
dépasser.
Diminuer le coût du travail en allégeant les charges sur les
bas salaires
Le poids des prélèvements obligatoires sur l'économie
française ne se limite pas à la seule pression fiscale.
Ainsi, les prélèvements sociaux ont augmenté de
manière significative depuis 20 ans (21,6 % du PIB en 1997
contre 18,1 % en 1980) et pèsent particulièrement sur la
masse salariale.
Selon une enquête Eurostat
50(
*
)
sur les
coûts du travail dans l'industrie, le coût du travail est nettement
plus élevé en France qu'aux Etats-Unis et dans les autres pays
européens : pour une base 100 en France, le coût est de 61,5 en
Grande-Bretagne, 76,3 aux Etats-Unis et 76,8 en Italie. Grâce à la
diminution de leur pression fiscale et sociale, des pays dont le coût du
travail était plus élevé que celui de la France en 1980,
comme les Pays-Bas, sont désormais plus compétitifs.
De plus, les charges patronales sont particulièrement
élevées et non dégressives en France. L'effet
dégressif des cotisations patronales n'est pertinent que pour les
salaires très élevés, proches de 100.000 francs par mois.
La situation des salariés les moins qualifiés s'est
aggravée, puisque dans la loi de finances pour 1998, le gouvernement a
choisi de restreindre le dispositif d'allégement de charges pour les bas
salaires en limitant le mécanisme de la ristourne dégressive aux
salaires inférieurs à 1,3 smic et en plafonnant son montant
à 1.213 francs.
Il est parfois objecté que les diverses mesures d'allégement
prises ces dernières années n'ont pas eu d'effet sur l'emploi.
Mais il faut se placer sur moyenne période et d'un point de vue global :
les arbrisseaux d'allégements ponctuels ne doivent pas cacher la
forêt d'une tendance à l'alourdissement des
prélèvements sur le travail depuis un quart de siècle.
Il est donc urgent de revenir à une politique volontariste
d'allégement du coût du travail ainsi que le préconise la
proposition de loi du Président Christian Poncelet, votée par le
Sénat le 29 juin dernier
.
B. RÉFORMER L'IMPÔT SUR LE REVENU
Le
ministre de l'Économie et des Finances admet la nécessité
d'une réforme de l'impôt sur le revenu. En septembre dernier, il a
déclaré sur France Inter, "
Dans les années qui
viennent
", il faut que
" la réflexion soit non seulement
avancée mais que l'action soit mise en oeuvre. Il y a une mise à
plat [ ] qui est certainement nécessaire et il me semble que c'est un
chantier auquel il faut qu'aujourd'hui les parlementaires, notamment,
s'attaquent et réfléchissent ".
C'est en vain que l'on chercherait dans le présent projet de budget des
traces de cette préoccupation pourtant, semble-t-il, encouragée
par le Premier Ministre, lorsqu'il affirme que "
notre fiscalité
souffre autant de sa structure déséquilibrée que de son
niveau excessif
".
La conjoncture est pourtant favorable. L'occasion était bonne de
" remettre à plat " un système fiscal, à la fois
dissuasif pour l'effort et les compétences, et de moins en moins
cohérent.
1. Une fiscalité qui décourage
Le poids
de l'impôt sur le revenu ne peut simplement être
apprécié par des chiffres bruts, qu'il s'agisse de son produit ou
du prélèvement qu'il représente en pourcentage du produit
national.
Les valeurs absolues doivent être mises en perspective avec les valeurs
relatives. La France a fait le choix de l'Union européenne ; elle a
fait le pari de l'Euro. Le poids de l'impôt s'évalue donc aussi,
relativement, par comparaison à la situation chez nos principaux
partenaires et concurrents.
a) L'alourdissement de l'impôt sur le revenu
Le
projet de budget prévoit, afin d'éviter un accroissement de la
pression fiscale qui serait lié à des hausses purement nominales
de revenus, de relever les tranches de la hausse des prix ( hors tabac)
prévue pour 1998, soit 0,8 %.
Cette opération traditionnelle ne suffit pas, lorsqu'elle intervient
dans un contexte de reprise économique, à empêcher
l'alourdissement de la pression fiscale : une simple indexation sur les
prix permet à l'État, par le jeu de la progressivité de
l'impôt, de toucher les dividendes de l'augmentation de pouvoir d'achat
des Français.
Telle est bien la raison par laquelle s'explique la hausse attendue du produit
de l'impôt sur le revenu, indépendamment de la hausse de la
pression fiscale qui résulte du solde net des mesures
discrétionnaires, effectivement défavorable du fait de la
modification du régime du quotient familial.
L'impôt sur le revenu devrait rapporter en 1999
315,7 milliards de
francs
, soit un
surcroît de recettes de 16,2 milliards de
francs
par rapport aux estimations du produit révisé de
l'impôt pour 1998.
Cette croissance de 5,4% doit être comparée aux quelque 3,8% de
croissance du PIB en valeur prévue par le gouvernement. Dès lors
que l'impôt sur le revenu croît presqu'une fois et demie plus vite
que la production, on doit s'attendre à une augmentation de sa part dans
le produit national, qui passe de 3,52 à 3,58% du PIB.
Certes, si l'on retranche les 3,9 milliards de francs résultant de la
modification du régime du quotient familial, le produit de l'impôt
sur le revenu n'est plus que de 311,8 milliards de francs mais le taux de
croissance reste avec 4,1%, supérieur à celui de la croissance en
valeur du PIB.
Certains se félicitent du caractère " fortement
dynamique " de l'impôt sur le revenu en période de reprise de
la croissance économique ; mais on peut aussi s'inquiéter,
et tel est le cas de votre commission, de cette volonté de faire jouer
à plein ce mécanisme de dividende fiscal, alors que le niveau de
prélèvements obligatoires a déjà atteint dans notre
pays un des niveaux les plus élevés de l'Union
Européenne.
b) Des effets dissuasifs persistants
Au
handicap que constitue ce poids, globalement trop lourd, de l'impôt
à tous les niveaux, il faut ajouter les effets pervers d'un
barème trop progressif à ses deux extrémités.
La progressivité est trop forte à l'entrée du
barème : les taux marginaux effectifs des
prélèvements affectant les personnes disposant de faibles
ressources ne peuvent que décourager la reprise de l'activité.
Longtemps, la perte de certaines allocations a rendu la reprise d'un emploi peu
intéressante pour le salarié bénéficiaire du RMI.
La situation actuelle, sans doute plus satisfaisante que celle décrite
par le rapport de la commission présidée par M. Ducamin à
la fin de 1995, n'est pas encore optimale, ne serait-ce que parce que le
maintien de la décote aboutit, inévitablement, à une zone
de progressivité très élevée.
Le rapport de la commission d'études des prélèvements
obligatoires présidée par M. Ducamin déjà
cité, souligne, à cet égard, qu'une
" réforme d'ensemble de l'impôt sur le revenu, qui repose
sur une baisse des taux moyens et un élargissement corrélatif de
l'assiette, doit inclure une diminution significative du taux marginal
le plus élevé "
Au moment où le nouveau Chancelier allemand entreprend une
réforme conduisant à une baisse de l'impôt à tous
les niveaux du barème, il faut se demander si l'on peut, durablement,
avoir, dans notre pays, un barème plus progressif que chez nos
partenaires européens. Trappe à chômage à
l'entrée du barème, compte tenu des effets des prestations
sociales sous conditions de ressources, possible exode des cerveaux pour les
tranches les plus élevées, pourraient bien constituer des
handicaps graves pour l'économie et la société
françaises.
2. Un système de moins en moins cohérent
Le code
des impôts ne s'est pas fait en un jour et les incohérences que
votre commission veut souligner, ne datent pas d'aujourd'hui.
Mais force est toutefois de constater que le
gouvernement n'a pas seulement
interrompu le processus d'allégement du barème mais aussi celui
de rationalisation et de simplification entrepris, courageusement, par son
prédécesseur.
Les mesures contenues dans le présent projet de loi de finances ne
peuvent prétendre relever d'un processus de rationalisation.
L'élimination des niches qu'il propose, au nom d'une justice abstraite,
est-elle vraiment équitable ? On solde un passé, certes
contestable, mais sans préparer l'avenir.
Car ce ne sont pas quelques
niches ponctuelles qu'il faut éliminer, mais le système fiscal
lui-même
, avec ses poisons et ses délices
, qu'il faut
réformer
.
a) Le jeu de la règle et des exceptions
Toujours plus de contraintes, toujours plus
d'exceptions
.
Telle semble être la
fatalité du système fiscal
français
et, en particulier, du régime de l'impôt sur
le revenu.
Au début des années 70, un sociologue, M. Michel Crozier, avait,
considérant les dérives bureaucratiques de l'administration
française, parlé du
jeu de la règle et du
passe-droit
, en faisant observer que le rôle du chef dans
l'administration était précisément de savoir
écarter l'application de la règle pour accorder le
" passe-droit ".
Sur ce plan, les choses ont - au moins faut-il l'espérer - dû
changer. En revanche, on peut se demander si la même logique ne se
retrouve pas,
mutatis mutandis
, dans notre système fiscal.
Comment ne pas constater que, surtout lorsqu'il s'agit d'impôt sur le
revenu, on ne fixe une règle que pour y apporter, parfois
immédiatement, une multitude d'exceptions.
Ce jeu de la règle et des exceptions ne résulte pas seulement de
la volonté de soigner des populations dignes
d'intérêt ; il procède, également, d'une
préférence de structure pour les régimes fiscaux
combinant règles rigoureuses et exceptions nombreuses
.
(1) Le souci constant de traiter les cas particuliers
La
complexité que chacun regrette dans notre système fiscal, et qui
explique à la fois l'épaisseur du code des impôts et son
caractère peu lisible, tient largement de la propension, bien
française, à ne voir que des cas particuliers.
Il ne s'agit pas seulement de volonté de satisfaire tel ou tel groupe,
telle ou telle clientèle, par une sorte d'infinie sollicitude pour les
cas particuliers ; la logique est plus profonde et résulte
plutôt d'un certain
perfectionnisme fiscal
: chaque situation
est particulière et mérite un
traitement sur mesure
.
D'où cette tendance à préférer les costumes fiscaux
sur mesure aux cotes mal taillées, et donc à multiplier les
exceptions à la règle.
Un certain nombre de mesures contenues dans la présente loi de finances
constitue une manifestation caractéristique de penchant pour la
différenciation des régimes. A la limite, on se trouve sans
points de repères pour apprécier la légitimité du
statu quo
ou du changement de la situation relative de telle ou telle
catégorie de contribuables.
On ne peut qu'être perplexe devant les argumentations de casuistique
fiscale développées par le rapport de la commission des finances
de l'Assemblée nationale au sujet des deux " mesures
d'accompagnement " de l'actualisation du barème : le
régime des déductions supplémentaires pour frais
professionnels des journalistes rebaptisées " allocation pour frais
d'emploi " et la situation des bénéficiaires de demi-parts
à caractère non familial au regard de l'abaissement du plafond de
l'avantage fiscal conféré par leur régime particulier de
quotient familial.
Où finit la distinction légitime fondée sur des
critères objectifs et rationnels, où commence la discrimination
attentatoire au principe d'égalité devant la loi, dont la
méconnaissance est régulièrement sanctionnée par le
juge constitutionnel ? L'importance prise au cours de cette
première lecture à l'Assemblée par les supputations des
uns et des autres sur ce que pourrait être l'attitude de Conseil
Constitutionnel face au texte, est très significative de cette
focalisation du débat sur la question des exceptions
légitimes
.
A force de vouloir opérer des distinctions de plus en plus fines de
façon à coller à chaque situation particulière, les
assemblées ont paradoxalement réduit leur liberté de
manoeuvre dans le vote de l'impôt. La problématique des exceptions
s'étant constitutionnalisée, le Parlement ne dispose plus que
d'une compétence conditionnelle, sous la haute surveillance du Conseil
Constitutionnel.
Dans le cas présent, les risques de censure ne sont pas
négligeables, sans que, pourtant, les discriminations proposées
soient, a priori, illégitimes. Mais, si votre commission relève
ces difficultés comme autant de signes de l'impasse dans laquelle s'est
engagé notre système fiscal, elle estime, compte tenu de sa
position favorable au
statu quo
, tant en matière de quotient
familial que de déductions professionnelles supplémentaires,
qu'elle n'a pas à entrer dans le débat.
Les deux novations évoquées plus haut lui paraissent en effet
inopportunes ou sans objet .
Votre commission des finances est vigoureusement opposée
pour des
raisons qu'elle va exposer,
à toute diminution des avantages
actuellement accordés aux familles et votre rapporteur
général demandera de maintenir le plafond à son niveau
actuel de 16.380 francs
.
D'autre part, en ce qui concerne les
déductions
supplémentaires pour frais professionnels des journalistes
, votre
rapporteur général
estime que, compte tenu des risques
juridiques que comporte le dispositif du projet de loi de finances,
étant donné, également, l'insatisfaction des principaux
intéressés face à la solution qui leur est
proposée, le plus sage est de
reconduire un dispositif analogue
à celui adopté l'année dernière, reportant d'un an
le début du processus d'abaissement du plafond.
On trouverait
ainsi
le temps de trouver une solution réellement satisfaisante
ou, espérons le sans y croire, de concevoir une vraie réforme de
l'impôt sur le revenu.
(2) La préférence pour les systèmes sous haute pression fiscale nominale
D'une
façon générale, on sent bien que pour les auteurs du
présent budget, le
code des impôts
n'est pas seulement le
moyen de rassembler des ressources mais également
un instrument
privilégié d'interventionnisme économique
. Sans doute
ne sont-ils, à cet égard, ni les premiers ni les seuls.
Selon la commission d'étude des prélèvements obligatoires
déjà citée, "
le niveau jugé
élevé des taux d'imposition a entraîné la floraison
de mécanismes en tous genres ( ..)qui entachent gravement la
progressivité, provoquent des ruptures d'égalité entre les
contribuables car seuls les plus avertis bénéficient de ces
mécanismes et peuvent avoir des effets pervers sur le fonctionnement de
l'économie
". Sans aller jusqu'à proscrire tout
mécanisme d'incitation fiscale, votre commission n'en considère
pas moins que, dans la perspective d'une baisse générale des
prélèvements, leur objet doit être réservé
à quelques situations très spécifiques en évitant
l'arbitraire et de trop nombreuses distorsions.
Tels ne sont manifestement pas les principes qui inspirent la politique que
traduit le présent budget. A la différence de la plupart de ses
prédécesseurs, ce gouvernement préfère
prélever plus ; soit, et il l'affiche volontiers, c'est pour
redistribuer plus, soit, et ceci n'est pas toujours explicitement
revendiqué, c'est pour, en accordant des avantages fiscaux,
faire
bénéficier ses mesures interventionnistes de l'effet de levier
dû au différentiel de pression fiscale.
La tentation est forte
, alors, selon les objectifs du moment, de manipuler
les boutons et
de modifier constamment les paramètres, au
détriment de la nécessaire stabilité de la règle
fiscale.
Bref, plus de changements et, surtout, plus de prélèvements pour
plus de redistribution ; pourtant, les uns pénalisent l'effort et
les autres peuvent , au delà d'un certain niveau, sinon
décourager du moins provoquer des transferts occultes,
éventuellement critiquables sur le plan de la justice ou de
l'efficacité.
Le projet de loi de finances pour 1999 nous offre un nouvel exemple de cette
attitude qui fait préférer un barème élevé
assorti de possibilités d'exonération à un
allégement du barème :
le doublement du crédit
d'impôt mis en place l'année dernière pour les travaux
à domicile. Votre commission des finances, évidemment favorable
aux objectifs poursuivis, aurait préféré que les quelque 2
milliards de francs au moins, que va coûter cette mesure, soient
affectés à des baisses d'impôts plutôt qu'à un
crédit d'impôt
. On remarque que l'alternative à cette
mesure n'est pas un allégement du barème mais une baisse - qu'il
n'est pas facile de négocier à Bruxelles - de la TVA sur les
travaux à domicile. Pour bien montrer, s'il en était besoin, que
le Gouvernement et sa majorité ne peuvent pour l'instant du moins se
résoudre à diminuer le poids de l'impôt sur le
revenu.
b) Un décalage croissant avec nos principaux concurrents
La
nouvelle coalition au pouvoir en Allemagne vient d'annoncer une vaste
réforme fiscale qui souligne encore si besoin était le
décalage existant entre le système fiscal français et
celui de ses principaux concurrents.
Plus encore que les modalités elles-mêmes, c'est la méthode
et la priorité politique accordée à la question de
l'impôt sur le revenu qu'il faut considérer, de la part d'un
gouvernement idéologiquement proche de celui aujourd'hui aux affaires en
France...
Le premier geste de M. Schroeder a été d'annoncer une
réforme de l'impôt sur le revenu. Il y a là un signe
politique,
qui témoigne de l'importance de la question en Allemagne.
Au demeurant, pendant la campagne, l'ancienne majorité avait
également promis des réformes fiscales de grande ampleur,
comportant un allégement net de 30 milliards de DM.
Le plan de M. Schroeder, qui s'étale en 1999 et 2002 prévoit
54 milliards de DM d'allégement bruts compensés
partiellement par 40 milliards de DM de recettes consécutives
à la suppression de régimes fiscaux dérogatoires
.
Deux points méritent d'être soulignés :
1. il comprend, en contrepartie de l'élévation du seuil
d'imposition et d'une diminution des taux,
58 mesures de financement dites
" d'élargissement des bases de calcul fiscales ", qui s'apparentent
à des mesures d'élimination de " niches
fiscales "
: l'on retrouve donc la démarche globale du
plan du gouvernement de M. Juppé ;
2. il associe mesures fiscales et familiales, puis que les allocations
familiales sont sensiblement augmentées.
LA
RÉFORME FISCALE ALLEMANDE :
L'ÉLARGISSEMENT DES BASES DE CALCUL FISCALES
I. MESURES CONCERNANT LES RÈGLES RÉGISSANT L'IMPÔT SUR LE REVENU ET L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS (33.788 MILLIONS DE DM)
A. MESURES POUR LIMITER LES RECETTES EXONÉRÉES
(2.129 MILLIONS DE DM)
Ex : suppression de l'exonération des indemnités allant
jusqu'à 36.000 DM suite à la rupture du contrat de travail
par l'employeur (900 millions de DM)
B. MESURES POUR RÉINTÉGRER DANS LA BASE IMPOSABLES
LES GAINS RÉSULTANT D'OPÉRATIONS D'ALIÉNATION
(780 MILLIONS DE DM)
Ex : allongement des délais de 2 à 5 ans pendant lesquels
les gains réalisés suite à la vente d'un terrain sont
considérés comme spéculatifs (500 millions de DM)
C. MESURES VISANT L'OBJECTIVATION DES CONSTATS DE GAINS
(19.135 MILLIONS DE DM)
Ex : Suppression des déductions spécifiques pour
amortissement en faveur des PME et de la déduction pour
l'amortissement-épargne en faveur des PME (1.313 millions de DM)
Ex : limitation de la déduction des pertes par leur report
(600 millions de DM)
D.
MESURES VISANT À SUPPRIMER LES RÈGLES
SPÉCIFIQUES RELATIVES À DES REVENUS PARTICULIERS
(4.636 MILLIONS DE DM)
Pour les revenus d'exploitations agricoles et forestières
(381 millions de DM)
Ex : suppression de l'exonération pour les exploitants agricoles et
forestiers de la somme forfaitaire de 2.000 DM pour les célibataires et
de 4.000 DM pour les couples (250 millions de DM)
Pour les revenus tirés de l'exploitation commerciale et industrielle
(315 millions de DM)
Ex : suppression de l'exonération pouvant aller jusqu'à
60.000 DM des gains liés à l'aliénation
d'exploitation (250 millions de DM)
Pour les travailleurs indépendants (340 millions de DM)
Ex : suppression de l'exonération pouvant aller jusqu'à
60.000 DM des gains liés à l'aliénation
d'exploitation (140 millions de DM)
Pour les revenus des capitaux (3.600 millions de DM)
Ex : division par deux du montant de la tranche exonérée en
faveur des épargnants (3.600 millions de DM)
E. MESURES POUR LIMITER L'AVANTAGE FISCAL LIÉ AUX DÉPENSES
PARTICULIÈRES (943 MILLIONS DE DM)
Ex : diminution de l'aide à l'accession à la
propriété (763 millions de DM)
F. MESURES TARIFAIRES (6.285 MILLIONS DE DM)
Ex : suppression de la taxation à un taux égal à la
moitié du taux moyen qui résulterait d'une application de
l'impôt à l'ensemble des revenus concernant des ressources
extraordinaires (comme les revenus tirés de l'aliénation )
II. LES MESURES CONCERNANT L'IMPÔT SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES
(1.220 MILLIONS DE DM)
Ex : suppression de la déduction par les employeurs des frais de
voyage et de déménagement de leurs salariés
(450 millions de DM)
III. MESURES AFIN DE RENFORCER L'EFFICACITÉ DE LA
PROCÉDURE D'IMPOSITION (5.000 MILLIONS DE DM)
Programme d'action contre la criminalité économique et la fraude
fiscale (5.000 millions de DM)
|
Première phase
|
Deuxième phase
|
Troisième phase
|
Allocations familiales (Kindergeld) |
passe de 220 DM à 250 DM |
- |
de 250 DM
|
IR : tranche exonérée |
passe de 12.360 DM à 13.020 DM |
de 13.020
DM à
|
de 13.500
DM
|
IR : taux d'impôt minimal |
passe de 25,9 % à 23,9 % |
de 23,9 % à 22,9 % |
de 22,9 % à 19,9 % |
IR : taux maximal |
- |
passe de 53 % à 51 % |
de 51 % à 48,5 % |
IS des PME : taux maximal |
passe de 47 % à 45 % |
de 45 % à 43 % |
- |
Allègement total |
14 Mrd DM intégralement compensés |
16 Mrd DM intégralement compensés |
24 Mrd DM dont 14 compensés et 10 "d'allègement net" |
On note que si le taux très élevé de la première
tranche diminue de deux points passant de 25,9 à 19,9%, celui de la
tranche la plus élevée passerait de 53 à 48,5%.
La comparaison partielle de deux systèmes fiscaux est toujours
délicate ; mais la tendance est incontestable : un
gouvernement social - démocrate fait de la baisse de l'impôt sur
le revenu sa priorité.
Le gouvernement français peut-il ne pas en tenir compte ? Sa
réponse mérite d'être exposée : "
Nous avons
la même volonté d'abaisser les impôts sur les ménages
pour soutenir la croissance, mais chacun prend l'impôt qui est le plus
adéquat en la matière
" , a déclaré, fin
octobre, sur LCI, le secrétaire d'État au budget, Christian
Sautter.
Pour le gouvernement, la situation d'un pays à l'autre n'est pas la
même. En Allemagne, l'impôt sur le revenu pèse aussi
lourdement que la TVA dans les prélèvements obligatoires, alors
qu'en France il ne devrait rapporter que 315 milliards contre 830 milliards de
francs pour la TVA. Il estime donc logique que, dans le même souci, celui
d'aider les ménages, l'Allemagne commence à alléger
l'impôt sur le revenu, alors que la France compte d'abord faire un effort
de baisse de TVA.
Votre commission insiste sur le fait que le déséquilibre, n'est
pas si important, si l'on prend en compte toutes les composantes de
l'imposition du revenu.
En additionnant le produit de l'impôt sur le
revenu à ceux de la CSG et du RDS - qui font partie de l'impôt sur
le revenu même si ces contributions sont prélevées à
la source, ce qui est, d'ailleurs, également le cas de l'impôt sur
le revenu en Allemagne - on arrive à des montants moins
déséquilibrés, puisque le total de la fiscalité du
revenu atteint presque 629 milliards de francs.
Au demeurant, la baisse de la TVA en reste au niveau des pieuses
intentions et fait partie des " figures obligées " auxquelles
le gouvernement se sent tenu pour ne pas sembler tourner le dos trop vite
à ses engagements électoraux.
De toute façon,
ce qui importe, c'est la méthode et la
tendance
:
lier
, d'une part,
la réduction des niches
fiscales à l'allégement
et donc à la simplification du
barème, pour la méthode
; accepter de diminuer les taux de
toutes les tranches
, y compris, celui de la tranche la plus
élevée qui passe nettement en dessous de 50%, pour la tendance.
En l'état actuel des choses, ce plan semble effectivement un bel exemple
de cohérence, dont l'on ferait bien de s'inspirer de ce coté du
Rhin.
c) Fiscalité et prestations sociales : la transparence nécessaire
Lorsque les revenus de transfert et de remplacement
représentent plus de 35% contre 23% en 1970, on ne peut plus
considérer notre système fiscal indépendamment du
régime des prestations sociales.
Une vision d'ensemble est donc nécessaire notamment du point de vue des
seuils - actuellement uniquement fondés sur le critère
d'imposabilité - et du problème plus général de la
non imposition des prestations sociales.
Votre commission estime que cette situation, sans doute dans l'ensemble
justifiée, doit néanmoins être examinée de
près dans la mesure où le jeu combiné des règles
fiscales et sociales peut aboutir à des discriminations non
justifiées.
Sur ce point, il semble nécessaire de procéder à un
recensement des aides existantes, qui constitue le préalable à
l'effort de réflexion auquel invite, notamment, le Comité central
d'enquête sur le coût et le rendement des services publics. Cet
organisme, que préside le premier président de la Cour des
comptes, souligne le caractère "
à la fois complexe,
injustifié et injuste
" , de l'appréciation des conditions de
ressources.
Il existe, ainsi, quatre prestations familiales versées sous conditions
de ressources : l'allocation jeune enfant (APJE), le complément familial
(CF), l'allocation parent isolé (API) et l'allocation de rentrée
scolaire (ARS). "
or,
selon le rapport
, pour ces seules quatre
prestations, on ne compte pas moins de deux plafonds de ressources, deux
systèmes différents pour la prise en compte des ressources et
deux systèmes pour la prise en compte de la taille du foyer
", une
variété de seuils qui "
rend le dispositif d'aides illisible
pour les bénéficiaires
" et qui, en outre est "
injustifié
" .
Le comité souhaite dans cette perspective l'unification du mode
d'évaluation des ressources, la création d'un " revenu social
référent unique ". Mais il va plus loin. Pour lui, "
les
prestations sociales et notamment les prestations familiales constituent bien
un revenu au sens civiliste classique (une somme d'argent provenant d'une
source permanente d'une manière périodique) : rien ne justifie
donc leur exclusion du champ de l'impôt
51(
*
)
"
Votre commission considère que, si cette position est manifestement trop
abrupte, la question mérite d'être soulevée et qu'elle
n'est actuellement sans solution satisfaisante que parce que le système
actuel est trop progressif à l'entrée dans le barème.
La fiscalisation des allocations familiales est inconcevable dans les
conditions actuelles car elle entraînerait un surcroît d'imposition
pour un nombre considérable de familles modestes : quelque 2,1
millions de foyers, it 7 % dans la seule métropole, perdraient en
moyenne 0,7 % de leur revenu disponible, indique le rapport Thélot
susmentionné. En outre, jusqu'à 320.000 foyers qui ne le
sont pas deviendraient imposables, ce qui leur ferait perdre " du
même coup un certain nombre d'avantages lorsqu'ils sont salariés
dans certaines grandes entreprises, ou lorsqu'ils accèdent à
certains services publics locaux ". L'avis de non-imposition est devenu un
passeport pour l'attribution ou le niveau de nombreuses prestations sociales.
Ce qui est certain, selon votre commission des finances, c'est que, "compte
tenu des initiatives prises au plan local, personne, comme le faisait remarquer
le rapport La Martinière ne peut prétendre en détenir un
état complet et à jour. Elles comportent des conséquences
perverses au point de vue social : l'existence de trappes à
pauvreté leur est due dans une très large mesure. "
En termes à la fois macro que micro économiques, fiscalité
et prestations sociales sont étroitement interdépendantes. La
question est maintenant qu'après la multiplication des prestations et la
diversification de leur origine à laquelle on a assisté, on
puisse clarifier la situation et établir une transparence sans laquelle
il n'est pas de vraie justice.
3. Les impératifs : une vue d'ensemble et une vision d'avenir
L'impôt sur le revenu doit être
réformé
en profondeur. Le Gouvernement le reconnaît mais ne le fait pas dans ce
budget
. Or le contexte favorable actuel, - dont on souhaite qu'il perdure
mais qui est soumis à de nombreuses incertitudes -, était
l'occasion d'engager la modernisation tant attendue de notre système
fiscal.
Sans perspective d'ensemble s'agissant des mesures strictement fiscales, ce
budget est aussi dépourvu de vision d'avenir. Prendre aux familles dites
riches pour donner aux familles modestes, est une politique à courte vue
contraire aux besoins démographiques du pays. On ne peut sur ce sujet
que rejoindre les propos du président de la République, lorsqu'il
a déclaré, à la fin de juin dernier devant l'UNAF :
"
La politique familiale ne saurait être de droite ou de
gauche ; elle doit être familiale ... elle cesse d'être
familiale quand elle commence à dépendre d'une redistribution
entre les familles
".
a) Un budget sans vision d'ensemble de l'impôt sur le revenu
La
commission ne voit d'abord dans certaines mesures relatives à
l'impôt sur le revenu contenues dans le présent projet de loi de
finances que la
juxtaposition de mesures ponctuelles éminemment
contestables, dès lors qu'elles ne prennent pas place dans un plan
général de modernisation de l'impôt sur le revenu
.
Le démantèlement des " niches " fiscales est
légitime, mais seulement dans le cadre d'une réforme
générale. Il se conçoit comme un des aspects d'un
processus de modernisation, dont l'autre volet est la clarification d'un
système fiscal particulièrement opaque. Le Gouvernement en fait
un moyen d'augmenter le rendement de l'impôt ; il devrait en faire
le résultat d'une vaste opération de simplification, qui tendrait
à rapprocher l'architecture de notre fiscalité des personnes de
celle existant chez nos principaux partenaires de la zone Euro.
Il y a des situations acquises, qui sans constituer des droits, doivent
être respectées ; il peut être légitime d'y
porter atteinte mais, progressivement, dans le contexte d'un
réaménagement de structure. Votre commission ne prend pas parti
sur le fond, car c'est d'abord une question de méthode.
Votre rapporteur général, cohérent avec sa position de
principe, vous propose par un amendement en seconde partie de la loi de
finances de reprendre le processus interrompu pour 1997 et 1998 en
prévoyant, sur le modèle du plan établi par le
Gouvernement de M. Juppé, un aménagement du barème et la
décote pour l'imposition des revenus des années 1999, 2000, 2001
et 2002.
La réforme proposée comporte :
- un
relèvement progressif de la tranche à taux
zéro
qui passerait de 26.100 F pour les revenus de 1998 à
29.000F pour les revenus de 1999, montant qui serait porté
progressivement à 40.000 F pour les revenus de 2002.
- un abaissement du plafond de la troisième tranche de
146.320 francs à 135.000 francs, pour les revenus de 1999,
montant qui serait progressivement porté à 101.000 francs pour
les revenus de 2002 ;
- un élargissement de la quatrième tranche qui irait pour les
revenus de 1999, de 135.000 à 211.000 francs (le plafond pour 1998 est
de 238.080 francs), montant progressivement porté à 143.500
francs revenus de 2002 ;
- un abaissement du plafond de la cinquième tranche, de
293.600 francs à 275.000 francs, montant progressivement
porté à 233.000 francs pour les revenus de 2002
Par ailleurs, à l'issue de la réforme, c'est à dire pour
les revenus de 2002,
les taux des trois premières tranches sont
allégés d'un point, les taux des trois suivantes étant
allégés de deux points
.
Le montant de la décote est abaissé à 2500 francs pour
les revenus de 1999 (contre 3.300 francs pour les revenus de 1998) et
progressivement diminué pour être supprimé pour les revenus
de 2002.
b) Les familles ponctionnées
Cette
politique de suppression des " niches " est d'autant plus critiquable
qu'elle se double de la remise en cause brutale du régime actuel du
quotient familial.
En 1997, le Gouvernement avait décidé la mise sous conditions de
ressources les allocations familiales. La mesure a pris effet pour les
versements de mars 1998.
Cette nouvelle politique a eu pour conséquence de priver quelque
386.000 familles, qui toutes n'étaient pas " aisées ",
de tout ou partie de leurs allocations.
Les protestations auxquelles a donné lieu la mesure, ont conduit le
Gouvernement à un
revirement radical dans la méthode mais
l'objectif reste le même.
Les sommes prélevées sur certaines familles ne leur sont pas
rendues : la suppression de la condition de ressources et donc le
rétablissement des allocations familiales pour tous sont en effet
compensés par l'abaissement du plafond de l'avantage fiscal
résultant de la demi-part de 16.380 à 11.000 francs
On note, également, que la recette de 3,9 milliards de francs provient
d'une part, du prélèvement supplémentaire sur les familles
ayant des enfants à charge à concurrence de 3,2 milliards de
francs et, d'autre part, pour le solde, des effets de la réduction du
plafond de la déduction des pensions versées aux enfants majeurs
ou de celle de l'abattement auquel donnent droit les enfants mariés ou
ayant eux-mêmes des enfants et rattachés au foyer fiscal des
parents.
Pour votre commission des finances, la mesure est, d'abord, critiquable dans
son principe.
Il est certain que l'on assiste à un
virage
capital
dans la
politique française de la famille
. Au delà du
procédé employé - mise sous conditions de ressources ou
abaissement du plafond du quotient familial -, on cesse de faire de la famille
l'objet d'une politique de redistribution horizontale, entre contribuables avec
et sans charges de famille.
Désormais, il est clair que
l'on prend à certaines familles
pour donner à d'autres les moyens dont elles ont besoin pour
élever leurs enfants
. Ce changement pourrait se
révéler funeste aussi bien pour la démographie que pour
l'économie françaises
Certes, la plupart des pays n'accordent pas d'avantages fiscaux proportionnels
au revenu et se contentent d'offrir des abattements nettement moins avantageux
que le système du quotient familial. Mais, la comparaison suppose que
soient pris en compte tous les paramètres et, en particulier, la
progressivité de l'ensemble du barème.
La nouvelle politique familiale n'est pas seulement une redistribution entre
familles " riches " et familles " pauvres " ; elle
doit s'interpréter aussi comme une
moindre redistribution entre
foyers avec et sans enfants
. Enfin, indirectement, cette politique doit
s'analyser comme un
alourdissement de la fiscalité pesant sur les
cadres
et donc comme un facteur supplémentaire de
pénalisation des " capacités ", de ceux qui par leur
compétence et leurs efforts sont à l'origine d'une bonne part du
dynamisme de l'économie française.
Globalement, votre commission des finances tient à souligner, sur un
plan technique, au-delà des questions de principe évoquées
plus haut :
1. que, si le nouveau régime
atténue largement les effets de
seuil
, et peut donc être considéré comme techniquement
préférable, il entérine une
diminution des ressources
consacrées à la famille, q
ui se traduit par une
hausse du
poids et de la progressivité de l'impôt pour les cadres ;
2. qu'il y aura, à l'issue de cette réforme, selon les
indications fournies par le rapport de l'Assemblée nationale,
presque
deux fois plus de " perdants " - 425.000 - que de
" gagnants " qui sont au nombre de 225.000
;
3. que le nouveau dispositif
renforce les avantages reconnus aux parents
isolés
, au risque de favoriser encore la situation des couples non
mariés par rapport à ceux qui le sont.
4. qu'il y a, en quelque sorte, une
double peine pour les familles
,
puisque, pour les familles pénalisées, ce sont les revenus de la
même année 1998, qui supporteront à la fois le
surcroît d'impôt et l'arrêt dix mois sur douze des
allocations familiales ;
5. qu'il y a des
"
perdants "
absolus qui sont les
couples avec un enfant
ne percevant pas d'allocations familiales et les
couples avec des enfants compris entre 20 et 26 ans
, c'est à dire
entre les âges auxquels prennent respectivement fin les allocations
familiales et le bénéfice de la demi-part supplémentaire.
En définitive, il faut se poser des questions de fond - notre politique
familiale est-elle bien orientée et a-t-on raison de ne pas aider et
même de moins aider le premier enfant ? - mais aussi des questions
de technique : les mécanismes fiscaux comme le quotient familial -
auxquels les Français sont à juste titre attachés -
n'ont-ils pas des limites voire des effets pervers ? Dans un monde
où la famille est devenue, hélas, éminemment mobile, se
décompose et heureusement quelquefois se recompose, ne faut-il pas
examiner sans a priori d'autres solutions, qui seront d'autant plus facile
à trouver qu'elles s'inscriront dans le processus d'allégement de
la pression fiscale sur le revenu que souhaite ardemment votre commission des
finances ?
*
* *
" Less is more ",
[" Moins, c'est
plus "]
cet aphorisme d'un architecte de la première moitié de ce
siècle mériterait d'être médité en
matière de fiscalité, en général, et d'impôt
sur le revenu, en particulier.
Le minimalisme est aujourd'hui en vogue, certes ; mais s'il y a une
vérité profonde dans cette formule, ce n'est pas seulement parce
que les Français veulent payer moins d'impôts, ce qui serait trop
simple ; le sens réel de la formule est qu'il faut un
système fiscal plus simple, plus fonctionnel, moins sophistiqué.
Trop d'impôt tue l'impôt,
on le sait
; mais trop
d'exceptions, dissout la règle, qui perd alors efficacité et
légitimité
. Il faut savoir en revenir aux choses simples
affirmait en substance une publicité. En matière fiscale, c'est
sans doute impossible. Soit. La complexité du code des impôts est
le reflet de la diversité des situations réelles.
Maintenant, les gouvernements successifs n'ont-ils pas cédé trop
facilement aux
démons du perfectionnisme fiscal
? Au fil du
temps, le code des impôts n'est-il pas devenu une sorte
d'usine
à gaz fiscale
, dont le rendement diminue au fur et à mesure
que l'on rajoute des tuyaux ? La pression fiscale est nominalement forte
mais elle diminue à mesure que l'on multiplie les dérivations.
Plus les circuits sont compliqués, plus les " pertes en
ligne " sont importantes, plus le système devient opaque et donc
comporte des risques d'injustices.
Une " mise à plat " est indispensable. Le gouvernement le dit
aujourd'hui après avoir interrompu celle qu'avait engagée son
prédécesseur. On aimerait le croire. Si le processus reprend,
tant mieux ; mais, peut-on prélever mieux quand on ne veut pas
prélever moins ?
C. STABILISER L'IMPOSITION DU PATRIMOINE
" La taxe ou portion d'impôt que chaque individu
est tenu
de payer doit être certaine et non arbitraire ". Cette maxime d'Adam
Smith
52(
*
)
reste la condition du bon
fonctionnement des sociétés, dans lesquelles chaque citoyen doit
être en mesure d'appréhender la teneur des règles qui vont
déterminer l'étendue de ses obligations.
Pourtant, l'évolution des finalités de la règle de droit
tend à remettre en cause la sécurité juridique et le
projet de loi de finances pour 1999 en est une illustration évidente.
Non seulement il confirme la tendance à la multiplication des textes, ce
qui rend la norme de moins en moins accessible, mais il introduit de nombreuses
modifications, dont certaines sont rétroactives, aggravant ainsi le
sentiment d'insécurité juridique.
Or, cette situation a deux effets pervers : d'une part, elle altère
l'esprit d'entreprise des contribuables, d'autre part, elle remet en cause le
consentement à l'impôt et favorise la fraude fiscale.
C'est pourquoi votre rapporteur général propose non seulement
l'adoption de certaines dispositions visant à remédier aux
dispositions les plus contestables du projet de loi de finances pour 1999, mais
également une réflexion d'ensemble sur les moyens de lutter
durablement contre l'insécurité juridique.
1. La sécurité juridique est remise en cause par l'évolution des finalités du droit fiscal
a) Les composantes de la sécurité juridique
La
sécurité juridique peut être définie comme une
garantie ou une protection tendant à exclure du champ juridique, le
risque d'incertitude ou de changement brutal dans l'application du droit.
Matériellement, elle implique que la norme juridique présente
plusieurs caractères.
D'une part, la norme juridique doit être accessible. Cette exigence
suppose que les destinataires potentiels de la norme soient à même
de l'appréhender afin d'envisager toutes les conséquences de
leurs actes. A défaut, les sujets de droit seraient soumis à des
normes dont ils ignoreraient la vocation à régir leur situation.
En matière fiscale, la mauvaise lisibilité de la loi peut
entraîner, pour certains contribuables, de se voir imposer alors qu'ils
pensaient ressortir d'un autre dispositif plus favorable.
D'autre part, la norme juridique doit être prévisible. Cela
signifie que les contribuables connaissent le montant des impositions mises
à leur charge de telle manière que chacun d'entre eux puisse
prendre des engagements en toute clarté. La structure et la formulation
de la norme doivent permettre une interprétation rigoureuse des faits,
qui ne puisse être remise en cause rétroactivement.
Or, la norme, et particulièrement la norme fiscale, souffre d'un manque
de lisibilité et d'une instabilité croissante liée
à l'évolution des finalités poursuivies par l'Etat.
b) La remise en cause de la sécurité juridique
En
effet, la conception actuelle du droit fiscal en France est difficilement
conciliable avec la notion de sécurité juridique. Initialement
destinée à couvrir les charges d'un Etat gendarme, elle est
progressivement devenue un instrument de politique économique et sociale
en constante évolution. Désormais, le rôle imparti à
la fiscalité consiste à modifier le comportement des agents
économiques par dissuasion ou par incitation.
Or, l'interventionnisme complique la législation fiscale avec la
multiplication des régimes dérogatoires.
En outre, la politique gouvernementale doit s'adapter sans discontinuer
à une conjoncture économique et sociale en perpétuelle
évolution. Dans la mesure où la fiscalité sert à
mettre en application la politique du pouvoir exécutif, elle doit
être sans cesse modifiée.
Enfin, on assiste à une remise en cause croissante des dispositions
introduites dans le but d'influencer les décisions des contribuables. En
effet, deux objectifs orientent la politique des gouvernements :
l'interventionnisme fiscal et la recherche d'un rendement plus
élevé de l'impôt. Ces principes contradictoires dans leurs
objectifs contribuent à l'instabilité de la loi fiscale puisque,
dès que l'incitation fiscale est efficace et donc utilisée
par un grand nombre de contribuables, le gouvernement est tenté de
revenir en arrière afin de récupérer une partie des sommes
désormais exonérées.
Cette politique du yoyo s'avère d'autant plus dangereuse que, dans ces
cas là, le gouvernement fait voter une loi fiscale rétroactive
qui ne se contente pas de modifier la situation juridique pour l'avenir mais
remet en cause des effets juridiques créés par une loi fiscale
ancienne.
2. Le projet de loi de finances pour 1999 accentue l'insécurité juridique, ce qui entraîne des effets pervers.
a) L'aggravation de l'insécurité juridique touchant les règles applicables à l'imposition du patrimoine
Le
projet de loi de finances pour 1999 aggrave l'insécurité
juridique en renforçant l'illisibilité et
l'imprévisibilité du droit fiscal et en se plaçant sur le
terrain de la morale et non de la légalité.
Le renforcement du caractère peu lisible des règles
régissant l'imposition du patrimoine
Le projet de loi de finances pour 1999 ne contient pas moins de six
modifications des dispositions applicables à l'impôt de
solidarité sur la fortune et trois modifications des règles
régissant les droits de mutation.
Par ailleurs, son article 24 constitue la cinquième remise en cause de
l'exonération générale des contrats d'assurance vie depuis
1996
53(
*
)
.
La première est intervenue lors de l'institution en février 1996
d'une contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).
Une deuxième exception à l'exonération
générale des contrats d'assurance vie est intervenue du fait de
la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 qui a
opéré une réforme de la contribution sociale
généralisée (CSG) et l'a élargie aux produits
défiscalisés de l'épargne.
Le projet de loi de finances pour 1998 a introduit une troisième
exception puisque les produits des contrats d'assurance vie nouveaux ne sont
exonérés qu'à concurrence d'un plafond de 30.000 francs
pour un célibataire et 60.000 francs pour un couple marié,
en subissant au-delà un prélèvement libératoire au
taux de 7,5 %.
Quant à la loi de financement de la sécurité sociale pour
1998, elle a fixé le taux de la CSG à 7,5 % et a
élevé ainsi le total des prélèvements sociaux
à 10 %.
Enfin, l'article 24 du projet de loi de finances pour 1999 voté par
l'Assemblée nationale remet en cause l'exonération de droits de
mutation à titre gratuit dont bénéficiaient jusqu'à
présent les contrats d'assurance vie. En effet, il soumet les sommes
reçues par chaque bénéficiaire d'une assurance vie
à raison du décès de l'assuré à un
prélèvement de 20 % sur la part des sommes excédant
1.000.000 francs.
Concernant l'article 10 du présent projet, celui-ci tend à
renverser la présomption irréfragable pesant sur l'usufruitier
pour l'intégration dans le patrimoine de ce dernier des biens
grevés d'usufruit pour leur valeur en pleine propriété en
cas de démembrement, conformément à l'article 885 G
du code général des impôts. Désormais, la taxation
en pleine propriété des biens démembrés
interviendra "
dans le patrimoine de la personne qui a constitué
sur ces biens un usufruit, un droit d'usage ou d'habitation accordé
à titre personnel
".
Or, cette sédimentation des mesures affectant l'imposition du
patrimoine nuit à la clarté des textes.
Le renforcement du caractère peu prévisible de la loi
fiscale
La sécurité fiscale permet aux contribuables d'élaborer
des plans à long terme. Elle s'avère d'autant plus
nécessaire que la fiscalité n'est plus neutre, mais se veut
incitative. Ainsi, lorsqu'un contribuable évalue le rendement
économique de telle opération, il inclut dans ses
considérations le volet fiscal. Si ce dernier est modifié alors
que l'opération est engagée, ses calculs économiques sont
remis en cause et ce qu'il considérait comme une opération
rentable peut devenir un placement médiocre, voire inintéressant.
Or, le projet de loi de finances pour 1999 comporte plusieurs articles aux
effets rétroactifs.
L'article 10 précité renverse la présomption
antérieurement établie pour l'ISF. Or, il est prévu que la
nouvelle présomption s'applique à compter de 1999, quelle que
soit la date à laquelle le démembrement de
propriété a été décidé. L'application
de cette disposition risque d'avoir des conséquences financières
importantes pour les contribuables qui avaient procédé à
une donation de l'usufruit et qui voient le bien grevé de l'usufruit
réintégré dans leur patrimoine. En outre, s'ils
désirent récupérer l'usufruit afin de pouvoir payer l'ISF,
il leur faut obtenir le consentement du donataire qui se verra non seulement
privé de l'usufruit, mais devra payer les droits de mutation à
titre gratuit.
L'article 14 relatif à la modification des règles de
territorialité en matière de droits de mutation à titre
gratuit devrait également s'appliquer aux donations ou legs
réalisés ou aux successions ouvertes à partir du
1
er
janvier 1999, quelle que soit la date à laquelle le
testament a été enregistré.
L'article 16 relatif à l'imposition de plus-values "constatées"
et des plus-values en report d'imposition en cas de transfert du domicile hors
de France s'appliquerait aussi de manière rétroactive aux
contribuables ayant transféré leur domicile hors de France depuis
le 9 septembre 1998, date de la présentation du projet de loi de
finances en conseil des ministres. Le motif d'intérêt
général invoqué par le gouvernement pour justifier la
rétroactivité de cette disposition semble être la
" moralisation " de la fiscalité pour les gros patrimoines et
les placements financiers. En outre, cela devrait dissuader les
éventuels candidats à la délocalisation d'agir dans la
précipitation entre l'annonce de la mesure et le 31 décembre
1998.
Enfin, l'article 24 initial remettait en cause l'exonération des droits
de mutation à titre gratuit dont bénéficient les contrats
d'assurance vie lorsque la somme des valeurs de rachat des contrats rachetables
et des primes versées sur les contrats non rachetables au jour de
décès de l'assuré excède 1.000.000 francs ou
30 % de cette somme. En outre, il était prévu que cette
disposition s'applique aux successions ouvertes à la suite du
décès d'assurés survenus à compter de 1999 quelle
que soit la date à laquelle les contrats d'assurance vie auraient
été signés.
La moralisation de la règle de droit
L'article 24 a été présenté par le gouvernement
comme une
" moralisation des avantages liés à la
transmission des patrimoines par le biais de l'assurance vie ".
En utilisant cette formulation, le gouvernement s'est engagé sur une
pente dangereuse. Les enjeux du problème doivent être
clairs : alors que le gouvernement se sert largement de l'outil fiscal
afin d'influencer l'activité économique, il n'admet pas que cet
instrument puisse être utilisé légalement par les
contribuables de manière à satisfaire au mieux leurs
intérêts. Ne pouvant contester l'utilisation faite de la
fiscalité au niveau de la légalité, le gouvernement
justifie la remise en cause des règles fiscales existantes en faisant
référence à la morale.
L'imposition du patrimoine constitue un terrain privilégié pour
cette moralisation de la règle de droit. Tout d'abord, le gouvernement
sait qu'il peut utiliser la méfiance spontanée de l'opinion
publique et des médias vis-à-vis des gros patrimoines
et faire régner un véritable esprit de suspicion à
l'égard de cette catégorie de contribuables. Ensuite, ce sont par
essence les contribuables imposés à l'ISF qui recourent le plus
à l'optimisation fiscale puisque les avantages de cette dernière
sont d'autant plus grands que le montant du patrimoine est élevé.
En outre, leur patrimoine les autorise à faire appel aux conseils
fiscaux les plus expérimentés.
Or, cette moralisation s'avère doublement dangereuse.
D'une part, en se plaçant non plus sur le terrain de la
légalité mais sur celui de la morale, la frontière entre
l'optimisation fiscale et l'évasion fiscale s'efface et l'administration
fiscale se voit reconnaître le droit de contester l'opposabilité
de schémas au seul prétexte qu'ils occasionnent, en plus de leur
intérêt économique, familial ou financier, une
conséquence fiscale favorable.
C'est la raison pour laquelle le gouvernement, plutôt que de demander une
utilisation plus large de la procédure de répression des abus de
droit prévue à l'article L.64 du livre des procédures
fiscales, préfère faire voter de nouvelles dispositions
légales.
En effet, dans le cadre de la procédure d'abus de droit,
l'administration doit démontrer que l'opération litigieuse a pour
seul objectif la réalisation d'une économie fiscale. Or, parce
que dans la plupart des cas l'abus de droit ne peut pas être mis en
oeuvre, le gouvernement propose autoritairement de revenir sur la situation de
droit existante, sous prétexte de moralisation des règles
fiscales.
D'autre part, cette moralisation n'aborde pas les vrais problèmes du
droit fiscal, à savoir le développement parallèle de
l'insécurité juridique et de l'évasion fiscale à
cause d'un interventionnisme croissant et d'un alourdissement constant de la
fiscalité. Au contraire, cette moralisation des règles fiscales
risque de faire perdurer le cercle vicieux suivant : en raison d'une
imposition trop lourde et trop changeante, les tentatives d'évasion
fiscale se multiplient et entraînent un nouveau durcissement et une
nouvelle modification des règles fiscales.
A cet égard, il est intéressant de rapporter les
considérations du Conseil d'Etat sur la sécurité
juridique
54(
*
)
:
" Or, par un
étrange paradoxe, plus on croit traquer le fraudeur, plus on incite
à la fraude : d'abord parce que le juge et le contrôleur,
débordés, n'arrivent plus à se tenir au courant, et que
leur efficacité diminue à mesure que croît la production du
législateur ; ensuite parce que la loi dont on change à
chaque saison, la loi " jetable ", n'est pas respectable :
pourquoi ne pas frauder si l'on peut supposer que, de changement en changement,
ce qui est illicite aujourd'hui sera licite demain ? "
b) Cette aggravation de l'insécurité juridique a de nombreux effets pervers
D'une
part, le développement de l'insécurité juridique
altère l'esprit d'entreprise des contribuables. En effet, la
société capitaliste repose sur le calcul et sur le risque, mais
il s'agit d'un risque évalué en fonction de règles
juridiques stables aux effets prévisibles. Si l'environnement juridique
de l'entreprise ou du patrimoine devient instable, toute prévision tend
à devenir impossible et les agents économiques ne sont plus
encouragés à développer leurs activités.
D'autre part, l'instabilité des règles a pour effet
d'entraîner un manque d'adhésion à celles-ci. En effet,
l'acte d'imposition résulte de l'application d'une règle de droit
comportant un présupposé et un effet juridique. Cette
règle a pour objet d'exclure toute incertitude sur le produit qui en
résulte. La sécurité juridique ainsi procurée aux
contribuables assure le consentement à l'impôt. A l'inverse,
l'instabilité des règles de droit fiscal se traduit par des
suppléments d'imposition perçus comme purement arbitraires. Ces
revirements bouleversent les prévisions que ces derniers ont
effectuées sur le fondement des règles précédemment
établies et réduisent leur adhésion au système
fiscal.
3. Les propositions de votre commission
Ces propositions visent à apporter une solution à deux séries de difficultés. Tout d'abord, il s'agit de remédier aux dispositions les plus contestables contenues dans le projet de loi de finances pour 1999. Pour autant, votre rapporteur général est conscient que des réformes plus structurelles doivent être envisagées afin de mettre un terme à l'insécurité juridique qui caractérise notre fiscalité.
a) Les propositions visant à remédier aux dispositions les plus contestables du projet de loi de finances pour 1999
Deux
principes ont guidé votre rapporteur : le refus de toute
disposition rétroactive afin d'assurer la prévisibilité de
la règle de droit ; le refus de toute mesure visant des cas
particuliers d'évasion fiscale qui peuvent en réalité
être combattus par la procédure d'abus de droit, et ce afin de ne
pas nuire à la lisibilité de la règle de droit.
Le refus de toute disposition rétroactive en matière
d'épargne et de gestion de patrimoine.
Votre rapporteur général propose ainsi de supprimer
l'article 10 relatif à l'imposition à l'ISF des biens ou
droits dont la propriété est démembrée dans la
mesure où le renversement de la présomption s'appliquerait au
titre de 1999 quelle que soit la date à laquelle le démembrement
de propriété a été décidé.
De même, si l'article 24 n'avait pas été modifié par
l'Assemblée nationale qui a supprimé son caractère
rétroactif, votre rapporteur général aurait proposé
cette modification.
Le refus de toute mesure visant à lutter contre des cas particuliers
de fraude fiscale qui peuvent être combattus par la procédure de
répression des abus de droit.
L'article 9 tend à limiter l'exonération d'ISF au titre des biens
professionnels aux seuls loueurs en meublés professionnels qui retirent
de leur activité plus de 50.000 francs de recettes annuelles et
plus de 50 % des revenus professionnels de leur foyer fiscal.
Jusqu'à présent, la part des revenus professionnels tirés
de l'activité de la location de meublés était
comparée aux seuls revenus de la personne exerçant cette
activité.
Cette nouvelle disposition présente plusieurs inconvénients qui
sont développés dans le commentaire dudit article dans le
tome II du présent rapport. Au regard de la sécurité
juridique, elle est dangereuse dans la mesure où elle s'immisce dans les
foyers fiscaux et donne à l'administration le pouvoir de contester la
répartition des activités professionnelles au sein du couple sous
prétexte que ce dernier pourrait en tirer un avantage fiscal. Votre
rapporteur général refuse cette suspicion
généralisée et proposera donc un amendement de suppression
de cet article.
La lutte contre l'évasion et la délocalisation fiscales
serait facilitée par un allégement de la pression.
Votre commission peut difficilement ne pas souscrire, dans leurs grandes
lignes, aux dispositions du présent projet tendant à lutter
contre les délocalisations fiscales.
Elle rappelle toutefois d'une part, que cette lutte doit s'inscrire dans le
cadre d'une coopération et d'une harmonisation accrues sur le plan
communautaire, et d'autre part
que le meilleur moyen de lutter contre les
délocalisations est d'alléger l'impôt.
Une des décisions les plus préjudiciables en la matière,
proposée par le précédent gouvernement, fut de
déplafonner la somme "impôt sur le revenu + impôt
sur la fortune" par rapport au revenu (avant la loi de finances pour 1996 ce
plafond était fixé à 85 %). Ce déplafonnement
peut conduire les contribuables à payer davantage d'impôt qu'ils
n'ont de revenu, encouragement certain au départ vers un ciel fiscal
plus clément.
b) Les propositions visant à lutter durablement contre l'insécurité juridique
Votre
rapporteur estime que la sécurité juridique ne pourra pas
être assurée sans le retour à une plus grande
stabilité de l'impôt et sans la reconnaissance officielle du
principe de sécurité juridique.
Le retour à une plus grande stabilité fiscale
Votre rapporteur général ne peut que répéter le
plaidoyer constant de votre commission en faveur de la stabilité
fiscale. Le caractère erratique de notre fiscalité est
particulièrement nuisible à des comportements rationnels en
matière de patrimoine, car les épargnants ont besoin d'une
visibilité à long terme.
la reconnaissance solennelle du principe de sécurité
juridique
La rétroactivité des lois n'est pas considérée
comme anticonstitutionnelle en France. Ainsi, son interdiction n'a jamais
figuré ni dans les constitutions successives ni dans leur
préambule
55(
*
)
. Seul y figure le principe
de la sûreté que, en dehors du domaine pénal, le Conseil
constitutionnel n'a pas interprété, jusqu'à
présent, comme interdisant aux lois de revenir sur des situations
apparemment acquises et d'aggraver, a posteriori, les conditions juridiques de
l'activité des citoyens.
LA RÉTROACTIVITÉ DES LOIS FISCALES : JURISPRUDENCE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
Le
législateur est libre de déroger au principe de valeur
législative de la non-rétroactivité. Le Conseil
constitutionnel a toutefois apporté un certain nombre de limites
à cette liberté.
I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE :
1- Le CC a admis le principe de lois rétroactives en matière
fiscale :
L'article 2 du Code civil stipule : " la loi ne dispose que pour
l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif ". Le Conseil
constitutionnel considère que ce principe n'a qu'une valeur
législative
56(
*
)
: le
législateur est donc libre d'y déroger et d'édicter des
lois rétroactives
57(
*
)
.
2- Le CC a posé des conditions à ce principe :
La rétroactivité des lois est une entorse à la
sécurité juridique. Dans les cas de lois fiscales
rétroactives moins favorables
58(
*
)
, le
Conseil constitutionnel a posé un certain nombre de conditions :
1-
Non-rétroactivité pour les sanctions fiscales :
Le Conseil constitutionnel a reconnu que les sanctions fiscales étaient
soumises aux principes généraux du droit pénal (CC 29
décembre 1989, n° 89-268 DC). Le principe de
non-rétroactivité des lois pénales a donc
été étendu à toutes les sanctions ayant le
caractère de punition, même si elles sont infligées par une
autorité de nature non judiciaire (CC 30 décembre 1982, n°
82-155 DC).
CC 29 décembre 1986, n° 86-223 DC :
" conformément au principe de non-rétroactivité des
lois répressives posé par l'article 8 de la Déclaration
des droits de l'Homme et du citoyen, elle ne saurait permettre d'infliger des
sanctions à des contribuables à raison d'agissements
antérieurs à la publication des nouvelles dispositions qui ne
tombaient pas légalement sous le coup de la loi ancienne ".
Cas particulier
: La suppression d'une exonération n'a pas le
caractère d'une sanction (CC 29 décembre 1989, n° 89-268
DC).
2-
Une loi ne saurait porter préjudice au contribuable dont les
droits ont été reconnus par une décision de justice
passée en force de chose jugée :
Les lois fiscales rétroactives ne peuvent porter préjudice aux
droits que les contribuables tiennent des décisions de justice
passées en force de chose jugée (CC 29 décembre 1986,
n° 86-223 DC, CC 29 décembre 1988, n° 88-250 DC, CC 29
décembre 1989, n° 89-268 DC).
CC 29 décembre 1986, n° 86-223 DC : " l'application
rétroactive de la loi fiscale ne saurait préjudicier aux
contribuables dont les droits ont été reconnus par une
décision de justice passée en force de chose
jugée ".
3-
La rétroactivité doit être fondée sur des
raisons d'intérêt général :
Si le législateur peut modifier rétroactivement la loi fiscale,
par exception aux dispositions de valeur législative de l'article 2 du
Code civil, ce doit être " pour des raisons d'intérêt
général " ; celui-ci ne se limitant pas à la
seule considération d'un intérêt financier (CC 29
décembre 1986, n° 86-223 DC).
CC 29 décembre 1986, n° 86-223 DC :
" Considérant que, par exception aux dispositions de valeur
législative de l'article 2 du Code civil, le législateur peut,
pour des raisons d'intérêt général, modifier
rétroactivement les règles que l'administration fiscale et le
juge de l'impôt ont pour mission d'appliquer "
En outre, le Conseil constitutionnel semble dégager une autre
condition : l'exigence de proportionnalité entre les mesures
adoptées et l'objectif poursuivi (CC 29 décembre 1988,
n° 88-250 DC, CC 29 décembre 1989, n° 89-268 DC).
Exemples
:
- dans le cas d'une loi de validation rétroactive des rôles,
l'intérêt des finances publiques mais aussi le principe
d'égalité devant les charges publiques remplissaient la condition
des raisons d'intérêt général (CC 29 décembre
1988, n° 88-250 DC).
- le Conseil constitutionnel a sanctionné les dispositions d'un article
visant à valider les titres de perception répartissant entre les
entreprises de transport aérien les dépenses afférentes au
contrôle technique d'exploitation et aux conditions
générales de l'équilibre financier du budget annexe de
l'aviation civile qui n'étaient pas susceptibles d'être
affectées en l'espèce ; en effet, il a estimé que la
seule considération d'un intérêt financier lié
à l'absence de remise en cause des titres de perception concernés
ne constituait pas un motif d'intérêt général
autorisant le législateur à faire obstacle aux effets d'une
décision de justice déjà intervenue (CC 28 décembre
1995, n° 95-369 DC).
4-
La rétroactivité ne se présume pas :
Il semble acquis qu'une mesure fiscale rétroactive est
anticonstitutionnelle lorsque les travaux préparatoires de cette
disposition font apparaître que le caractère rétroactif de
la mesure n'a pas été invoqué ou justifié.
II. LES DIFFÉRENTES FORMES DE RÉTROACTIVITÉ :
1- Les lois de finances :
Le principe général, concernant l'assiette de l'impôt, est
celui de l'application des règles en vigueur au moment du fait
générateur de l'imposition.
• Les lois fiscales
entrent en vigueur
un jour franc après
la date de leur publication au J.O. sauf disposition expresse fixant cette
entrée en vigueur à une date différente ; c'est le
cas, depuis 1981, de la plupart des lois de finances initiales.
• La détermination du
fait générateur
est plus
complexe :
- En matière de TVA et d'une manière générale de
droits indirects, le principe n'aboutit à aucun retour sur le
passé, puisque le fait générateur est un
événement ou une situation constatée à une date
donnée.
- Mais en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les
sociétés, le fait générateur est constitué
par la clôture de la période de réalisation des revenus ou
des profits imposables
59(
*
)
.
Combinée aux principes régissant l'entrée en vigueur des
lois de finances initiales, cette définition du fait
générateur se traduit, pour l'impôt sur le revenu et
l'impôt sur les sociétés, par un phénomène de
rétroactivité.
Cette rétroactivité n'est pas inévitable : il arrive
fréquemment que les lois de finances reportent à l'année
suivante l'application d'un certain nombre de dispositions.
Cette situation semble une originalité française. Les Etats-Unis,
par exemple, appliquent à cet égard une règle pragmatique
appelée règle du " fair announce " : les lois
fiscales rétroagissent à la date à laquelle
l'administration a annoncé les nouvelles dispositions qui allaient
être soumises au Congrès. Une telle réserve n'est pas
inconnue du législateur français qui en a fait application
à plusieurs reprises.
Exemple
: La prise d'effet au 1
er
janvier des
dispositions de la loi de finances promulguée en fin d'année
constitue une application rétroactive de la loi et se trouve donc
soumise au respect des conditions mises à la rétroactivité
des lois (CC 29 décembre 1989, n° 89-268 DC).
Cas particulier : l'abrogation anticipée d'une
exonération ou d'une réduction d'impôt :
Le Conseil constitutionnel n'exerce presque aucun contrôle dans ce cas
sur l'appréciation faite par le législateur de revenir sur
l'exonération (CC 29 décembre 1983, n° 83-164 DC).
Dans le cas d'une suppression rétroactive de la réduction
d'impôt sur le revenu pour les versements afférents à
certains contrats d'assurance-vie (CC 28 décembre 1995,
n° 95-369 DC), le Conseil constitutionnel a estimé que la
disposition rétroactive n'édictant pas une sanction
60(
*
)
(elle ne faisait que limiter les effets dans le temps
des réductions fiscales), elle n'était pas anticonstitutionnelle.
2-Les lois de validation :
Le Conseil constitutionnel a admis la possibilité pour le
législateur de valider des actes administratifs aux conditions
présentées plus haut.
la " validation implicite " de dispositions législatives
illégalement codifiées
:
Il peut arriver que l'administration, dans sa mission de codification, ajoute
à la loi. Le texte résultant de cette codification
illégale est sans valeur, le juge fait prévaloir la loi
effectivement adoptée sur cette codification. Si le Gouvernement fait
adopter par le Parlement une disposition qui fait référence
à l'article codifié ou qui en modifie quelques mots, le
législateur semble alors valider implicitement l'article du Code
auparavant dépourvu de base légale.
Rien n'exclut que cette validation rétroagisse si l'intention du
législateur est de ratifier le décret de codification.
la validation de règlements, d'actes de procédure ou
d'impositions
:
1- Les validations législatives de règlements en matière
fiscale sont devenus obsolètes.
2- Les validations d'impositions ou d'actes de procédures demeurent
courants. Le Conseil constitutionnel refuse de censurer ces validations droit
(CC 29 décembre 1988, n° 88-250 DC). Mais il souligne que la
validation législative doit avoir pour objet de purger un vice
déterminé : tout ce que peut faire le législateur,
c'est " modifier rétroactivement les règles que
l'administration fiscale et le juge de l'impôt ont pour mission
d'appliquer ".
3- Les lois dites interprétatives :
Une loi interprétative doit se borner à reconnaître sans
rien innover un droit préexistant qu'une définition imparfaite a
rendu susceptible de controverse. Par nature une loi interprétative est
rétroactive. Mais se sont développées depuis les
années 1980, des lois dites interprétatives qui avaient pour
objet, par exemple, de faire obstacle à la jurisprudence du juge de
l'impôt.
Il est vrai que les différentes formes de rétroactivité ne
comportent pas toutes les mêmes inconvénients. Ainsi, il arrive
que l'intérêt général commande la validation de
certains actes administratifs lorsque les difficultés pratiques
créées par les annulations prononcées par le juge sont
inextricables.
Il n'en reste pas moins qu'une faculté aussi dangereuse pour la
sécurité des sujets de droit ne devrait être
utilisée qu'avec modération et discernement, notamment en
matière fiscale.
En outre, la construction européenne nous incite à un plus grand
respect de la sécurité juridique. En effet, la Cour de justice
des communautés européennes a érigé la
sécurité juridique en principe général du droit.
Selon la Cour, la législation européenne doit être
"
certaine et son application prévisible
"
61(
*
)
. En cas d'adoption d'une disposition
législative rétroactive, un contribuable français pourrait
également attaquer la décision devant la Cour européenne
des droits de l'Homme.
En droit fiscal, on peut distinguer trois sortes de dispositions
rétroactives :
- les dispositions rétroactives liées au mode de
détermination de certains impôts. Ainsi, en matière
d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés, la
loi de finances initiale votée le 31 décembre de chaque
année comporte toujours, du fait des principes régissant le fait
générateur de l'impôt, des effets rétroactifs au
1
er
janvier de l'année écoulée ;
- les dispositions rétroactives visant à remettre en cause avant
le terme prévu un avantage fiscal consenti à l'origine pour une
période déterminée ;
- les dispositions rétroactives liées à la validation
législative des conséquences de contentieux fiscaux.
Si l'on peut admettre la rétroactivité de l'impôt sur le
revenu et l'impôt sur les sociétés (même s'il
convient de noter qu'en matière de taxes locales, de TVA ou
d'impôt de solidarité sur la fortune, la loi de finances annuelle
ne dispose que pour l'avenir), en revanche, les deux autres catégories
de dispositions rétroactives sont beaucoup plus contestables.
Dans son rapport public pour 1991, le Conseil d'Etat considère qu'il
faudrait restreindre la rétroactivité en matière
fiscale
62(
*
)
, "
une telle restriction ne
nuirait pas nécessairement à l'efficacité de
l'administration fiscale ; trop souvent, en effet, la
rétroactivité fiscale constitue, pour les fabricants de textes,
un moyen facile -et tentant- d'échapper à leur
responsabilité : on peut écrire n'importe quoi, puisqu'on
" rattrapera " toujours ses erreurs. S'interdire la
rétroactivité obligerait à réfléchir plus
longuement aux conséquences des textes qu'on propose ; à
terme, il en résulterait une amélioration de leur qualité
juridique.
"
En tout état de cause, votre rapporteur général
considère qu'il serait nécessaire de mettre un terme aux
dispositions fiscales nouvelles de nature à remettre en cause, dans un
sens préjudiciable aux épargnants, l'équilibre de contrats
fondés sur des dispositifs fiscaux et dont la durée est
généralement moyenne ou longue.
IV. FAIRE CONFIANCE AUX COLLECTIVITÉS LOCALES
Responsables des trois quarts de l'investissement public en
France,
les collectivités locales veulent pouvoir choisir leur mode de
développement. La perspective d'une adaptation de la législation
relative aux interventions économiques des collectivités locales
laisse espérer de nouvelles marges de manoeuvre.
Les dispositions relatives aux collectivités locales figurant dans le
projet de loi de finances pour 1999 ne se situent pas dans cette perspective :
elles placent les collectivités locales dans une situation de
dépendance accrue à l'égard de l'Etat et ne les incitent
pas se comporter en acteurs économiques responsables et
ambitieux.
A. LES RESSOURCES DES COLLECTIVITÉS LOCALES : NE PAS HYPOTHÉQUER L'AVENIR
L'article 34 de la Constitution dispose que c'est la loi qui
détermine les principes fondamentaux de "
la libre
administration des collectivités locales, de leurs compétences et
de leurs ressources
".
C'est le rôle du Parlement, et notamment du Sénat,
"
maison des collectivités locales
", de
veiller
à ce que la loi permette aux collectivités locales de
s'administrer librement, en s'assurant que leurs ressources leur permettent
d'exercer pleinement leurs compétences.
Les trois exemples présentés ci-après, le " contrat
de croissance et de solidarité " proposé en remplacement du
pacte de stabilité, les mésaventures de la CNRACL et la
réforme de la taxe professionnelle montrent que les solutions
émanant du gouvernement ne sont guère satisfaisantes.
1. Un contrat de croissance et de solidarité trop timide
Les
concours de l'Etat aux collectivités locales sont votés chaque
année à l'occasion de la loi de finances et prennent la forme
soit de prélèvements sur recettes, soit de subventions
budgétaires, retracées dans le fascicule du ministère de
l'intérieur. Néanmoins, en dépit de la règle de
l'annualité budgétaire et dans un souci de lisibilité et
de prévisibilité, le précédent gouvernement avait
choisi de fixer un cadre pluriannuel, le " pacte de
stabilité " s'étalant sur trois ans, aux relations
financières entre l'Etat et les collectivités locales.
Le pacte de stabilité
prévoyait une indexation sur
l'indice des prix à la consommation, hors tabac, du montant des concours
de l'Etat aux collectivités locales, regroupés au sein de l'
" enveloppe normée ". Ce dispositif rigoureux était
l'une des conséquences du contexte macro-économique
déprimé dans lequel il avait été
élaboré en 1995. Il
traduisait la participation des
collectivités locales à l'effort de redressement des finances
publiques.
Aujourd'hui, les perspectives de croissance sont meilleures, et
les
collectivités locales ont su convaincre le gouvernement de prendre en
compte une fraction du taux de croissance du PIB dans l'indice de progression
de l'enveloppe normée
, comme c'est d'ailleurs le cas s'agissant de
la principale composante de l'enveloppe, la dotation globale de fonctionnement
(DGF).
Toutefois,
les modalités de la détermination de l'enveloppe
normée proposées par le gouvernement ne sont pas
satisfaisantes
. Le projet de loi de finances envisage un dispositif en
trois ans prenant en compte 20% du taux de croissance du PIB en 1999
63(
*
)
, 25% en 2000 et 33% en 2001. Ces taux sont
insuffisants pour permettre aux collectivités locales de jouer
pleinement leur rôle de soutien de la croissance.
Les facteurs du redressement de la situation financière des
collectivités locales tendent à s'essouffler
Dans son état des lieux des finances des collectivités locales,
présenté le 8 juillet 1998 au nom de l'Observatoire des finances
locales, notre collègue Joël Bourdin insiste sur la volonté
du secteur local de se reconstituer une marge de manoeuvre financière
dans un contexte de progression limitée des recettes (due notamment,
autre preuve de bonne gestion, à une évolution
modérée des taux de la fiscalité directe locale).
M. Bourdin note particulièrement une progression ralentie des
dépenses de gestion courante et un mouvement prononcé de
désendettement, attribué à la baisse des taux
d'intérêt mais également à une politique de gestion
active de la dette. Ces évolutions sont de nature à favoriser
l'autofinancement des investissements des collectivités locales.
Toutefois,
ces facteurs positifs sont en train d'atteindre leurs
limites
. La baisse des taux d'intérêt ne pourra plus jouer un
rôle aussi important que par le passé. Les efforts de
rationalisation des dépenses de fonctionnement sont, quand à eux,
remis en cause par un alourdissement des charges imposées aux
collectivités locales.
Le tassement des recettes se produit dans un contexte d'alourdissement des
charges
Les recettes de fonctionnement des collectivités locales sont
composées, d'une part, du produit de la fiscalité directe et
indirecte et, d'autre part, des concours de l'Etat. Si la politique de
modération des taux menée par les collectivités
64(
*
)
, qui coïncide avec un contexte de faible
progression des bases, n'est pas soutenue par un dynamisme des concours de
l'Etat,
les collectivités courent le risque de ne pouvoir faire face
à l'ensemble des charges qu'elles devront supporter dans les
années à venir :
-
les collectivités vont devoir prendre en charge les
conséquences pour la fonction publique territoriale du protocole
salarial du 10 février 1998
. Devant le comité des finances
locales du 8 septembre 1998, le ministre de l'intérieur par interim a
estimé le coût de ces mesures à 2,2 milliards de francs
pour 1998.
En 1999, la charge supplémentaire est estimée à 4,1
milliards de francs et à 3,2 en 2000. Ainsi, les
rémunérations engloutiront en 1999 la fraction de l'augmentation
de l'enveloppe normée attribuable à la prise en compte de la
croissance, qui s'élève à 4,1 milliard de francs
65(
*
)
.
- parallèlement aux effets du protocole salarial,
les
collectivités locales doivent également se préparer
à absorber le coût total des emplois-jeunes
, aujourd'hui
subventionnés, car, ainsi que le soulignait notre collègue Michel
Mercier dans son rapport spécial sur le projet de loi de finances pour
1998, "
il leur sera difficile de résister à
l'intégration d'une partie, au moins, de ces
" employés " dans les cadres de la fonction publique
territoriale.
" Au 30 juin 1998, aux termes des conventions
signées entre l'Etat et les collectivités locales, les
établissements publics et les associations, 50.130 emplois avaient
été créé et 29.090 recrutements
réalisés, dont 36% au sein des collectivités locales.
-
l'accroissement des dépenses de personnel, incompressibles, dans un
contexte de faible dynamisme des recettes pourrait se traduire par une
éviction de certaines dépenses d'investissement
. D'un point
de vue patrimonial, il n'est jamais souhaitable que des dépenses de
fonctionnement prennent le pas sur l'effort d'investissement.
S'agissant de la situation actuelle des collectivités locales, une telle
éventualité serait véritablement préoccupante. En
effet, la reprise de l'investissement des collectivités locales,
réelle depuis 1997, est due en partie à la
nécessité de mettre certaines infrastructures en
conformité avec de nouvelles normes, nationales ou européennes,
dans des domaines tels que l'eau, l'assainissement et le traitement des ordures
ménagères.
Il serait dommage que les efforts consentis par les collectivités
locales pour améliorer leur épargne ne leur permettent pas
d'autofinancer au moins une partie de leurs nouveaux investissements.
La reprise de l'investissement public local est une condition
nécessaire d'une croissance soutenue
Au final,
la réduction programmée de l'épargne des
collectivités locales pourrait ralentir le redémarrage des
investissements amorcé depuis un an, avec les conséquences sur le
taux de croissance de l'économie nationale que l'on peut imaginer
compte tenu de l'influence de la dépense publique locale sur le taux de
croissance de l'économie nationale.
Dans une étude intitulée
Les collectivités locales et
l'économie nationale
66(
*
)
, Jacques
Méraud souligne en effet que "
dans le cas des administrations
locales, ce sont les variations de
l'investissement
qui influent le plus
sur la croissance nationale, et cela dans un sens positif : " plus
l'investissement public local augmente, plus le PIB est
stimulé ".
67(
*
)
En somme, plutôt que d'en appeler à un emprunt européen
pour financer des infrastructures dont la réalisation, au vu des
tentatives précédentes, reste hypothétique, c'est
l'investissement des collectivités locales, aux effets plus certains sur
le taux de croissance de l'économie nationale, que le gouvernement doit,
sinon encourager, au moins ne pas décourager.
D'autant plus que
les créations d'emplois que le gouvernement compte
obtenir par la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle
dépendent au moins autant du niveau d'investissement des
collectivités locales que de la suppression d'un tiers de l'assiette
d'un impôt représentant 2 % du coût du
travail.
2. La CNRACL : en finir avec l'absurde
Le
projet de loi de finances pour 1999 ne comporte pas de dispositions relatives
à la caisse nationale des agents des collectivités territoriales,
qui regroupe en réalité les agents des fonctions publiques locale
et hospitalière.
Pourtant, il est impossible de raisonner sur les ressources des
collectivités locales, ainsi que sur les relations financières
entre ces dernières et l'Etat, sans avoir en mémoire le
précédent de la CNRACL, qui constitue un contre-exemple notoire
en ces matières.
Les faits sont connus.
La CNRACL bénéficie
d'un rapport
démographique plus favorable que la plupart des autres régimes,
avec 2,76 actifs pour un retraité contre 1,75 pour le régime
général, 2,5 pour les fonctionnaires de l'Etat et 0,8 pour la
SNCF. Toutefois, le rapport démographique de la CNRACL se
dégrade. En 1982, il était de 4,5. Il s'établissait encore
à 3,62 en 1995.
La CNRACL étant structurellement excédentaire, elle devrait
être en mesure de faire face à ce choc démographique
.
Or, en raison des mécanismes dits de " compensation " et de
" surcompensation ", elle reverse une partie de ces ressources
à des régimes moins bien lotis, ou moins bien
gérés.
La péréquation entre régimes de
sécurité sociale prend des proportions non négligeables
puisqu'en 1997, la CNRACL y a consacré 32% de la totalité de ses
emplois
, soit 19 milliards de francs pour une ressource de 60 milliards de
francs. Les pensions versées représentaient 40,5 milliards
de francs, soit à peine deux fois plus.
Cette situation serait choquante mais pas dramatique si les
mécanismes de péréquation n'avaient pas pour effet
d'engendrer des déficits de plusieurs milliards de francs
dans ce
régime démographiquement dynamique. En 1997, le déficit
n'a pu être évité qu'au prix du transfert exceptionnel de
4,5 milliards de francs de l'allocation temporaire d'invalidité. La
conséquence directe de ces déficits est le tarissement des
réserves.
La direction générale des
collectivités locales n'exclut pas "
à structure
constante, l'épuisement des réserves en 1999
".
Tout
est dit.
Les réserves de la CNRACL
(en milliards de francs)
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
14,618 |
13,896 |
9,596 |
3,355 |
1,511 |
0,949 |
4,441* |
* En
1997, la CNRACL a bénéficié d'un transfert de 4,5
milliards de francs en provenance du fonds de l'allocation temporaire
d'invalidité (ATI)
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999
contient pour la deuxième année consécutive une
disposition autorisant la CNRACL à s'endetter. Cette logique de
" fuite en avant " doit être dénoncée. Car, comme
l'exprimait l'année dernière notre collègue Michel Mercier
dans son rapport spécial, cela revient à "
faire assumer
par un régime structurellement excédentaire des charges
d'emprunts destinées à financer des régimes
structurellement déficitaires
".
Par ailleurs, le gouvernement a fait savoir qu'une réflexion sur la
CNRACL figurait au cahier des charges de la mission sur les régimes de
retraite confiée au commissaire au Plan. Le comité des finances
locales a également décidé de la mise en place d'un groupe
de travail consacré à cette question.
Reste une impression de gâchis
. Les mésaventures de la
CNRACL, un régime fondamentalement sain et autosuffisant, illustrent la
tentation permanente pour l'Etat de puiser dans les ressources des
collectivités locales.
De plus, ironie du sort, la CNRACL voit ses réserves disparaître
à l'heure de la probable évolution des régimes de retraite
vers une " répartition-provisonnée ", dont elle aurait
pu tirer parti plus que tout autre régime.
3. La réforme de la taxe professionnelle : une remise en cause de l'autonomie fiscale des collectivités locales ?
La
réforme de la taxe professionnelle proposée par le gouvernement,
dont l'impact sur l'emploi est incertain, conduit, notamment, à
réduire d'environ un sixième le pouvoir fiscal des
collectivités locales
(un tiers de l'assiette d'un impôt
constituant la moitié de leurs ressources fiscales).
Cette évolution constitue un précédent fâcheux car :
Le pouvoir fiscal des collectivités locales est une composante
essentielle de leur autonomie
Les collectivités locales françaises disposent, c'est vrai, d'une
importante " marge de décision fiscale ".
Leurs recettes
fiscales provenant d'impôts dont les taux sont fixés par elles
constituaient 54% de leurs recettes hors emprunt en 1995
68(
*
)
. Au sein de l'Union européenne, seule la
Suède faisait mieux avec 60%
69(
*
)
. En
Allemagne, pays fédéral, ce ratio était de 20%.
Malgré tout, la France n'est pas encore un pays très
décentralisé
. Les ratios financiers de la
décentralisation élaborés par l'OCDE montrent que la
France se situe dans la moyenne basse des pays membres de l'organisation, tant
du point de vue de la décentralisation des impôts que de la
décentralisation des dépenses.
Les ratios financiers de la décentralisation dans les pays de l'OCDE (1995)
0,80-
0,70-
0,60-
0,50-
0,40-
0,30-
0,20-
0,10-
Décentralisation des impôts
|
|||||
|
|
|
|
Décentralisation des dépenses : dépenses des gouvernements locaux/dépenses de l'Etat et des gouvernements locaux |
Japon
Suède
Canada
All.
Suisse Décentralisation des impôts : impôts locaux/Impôts nationaux et locaux (hors sécurité sociale |
Aust
Finl.
Danemark La distance d'un point à la droite équidistante reflète le déséquilibre entre le montant de dépenses locales et le montant de recettes fiscales locales. |
UK
Port.
Grèce
France
Plus cette distance est importante plus les transferts de l'Etat central dans les ressources locales sont importants. |
|
0,10 0,20 0,30 0,40 0,50 0,60 0,70 |
|
Décentralisation des dépenses |
Source : OCDE
En
outre, les collectivités locales subissent une forte contrainte sur
leurs dépenses, une grande partie d'entre elles étant
obligatoires.
Dans ce contexte encadré, la principale garantie de l'autonomie des
collectivités locales réside en leur pouvoir fiscal
. Le
Conseil constitutionnel a d'ailleurs établi
70(
*
)
que "
les règles posées par la
loi ne sauraient avoir pour effet de restreindre les ressources fiscales des
collectivités territoriales au point d'entraver leur libre
administration
", prévue à l'article 72 de la
Constitution.
Dès lors, tout est question de dosage.
Or, dans le cas
présent, la suppression d'un sixième du pouvoir fiscal des
collectivités locales ne saurait être prise à la
légère.
La réforme porte en germe la "
démolition
programmée
" du principal impôt local
La taxe professionnelle est en train de se transformer en une subvention de
l'Etat aux collectivités locales
. Après la réforme, et
compte tenu des dégrèvements et compensations, l'Etat acquittera
environ 60% de la taxe professionnelle perçue par les
collectivités locales. Dès lors, même si la taxe
professionnelle est un impôt légitime en raison des services
rendus à leurs redevables par les collectivités qui le
perçoivent, la fraction marginale de l'assiette de l'impôt pesant
sur les entreprises sera contestée et deviendra, selon l'expression
employée par le président Christian Poncelet devant
l'Assemblée des présidents de conseils généraux
"
un impôt discriminatoire sur l'investissement
".
A cet égard, il est révélateur de constater
qu'aucun
des grands pays de l'Union européenne ne retient les seules
immobilisations comme assiette de l'impôt local pesant sur les
entreprises
:
Eléments retenus dans l'assiette de l'impôt
local
sur les activités économiques selon les
pays
|
Bénéfices |
Masse salariale |
Nombre de personnes employées |
Immobilisations |
Autres |
Allemagne |
oui |
non |
non |
oui |
non |
Belgique
|
non
|
non
|
non
|
non
|
moteurs |
Espagne |
non |
non |
oui |
non |
surface, secteur d'activité, puis-sance électrique |
France |
non |
oui |
non |
oui |
non |
Italie |
oui |
non |
non |
non |
secteur d'acti-vité, superficie |
Luxembourg |
oui |
non |
non |
non (1) |
non |
Portugal |
oui |
non |
non |
non |
non |
(1)
Depuis le 1er janvier 1997
Notre collègue Jean-Pierre Fourcade, président du comité
des finances locales, a considéré que la réforme
proposée portait en germe une "
démolition
programmée
" de la taxe professionnelle. Ce risque est bel et
bien réel, et il est inquiétant.
B. LA DEPENDANCE FINANCIÈRE N'INCITE PAS AU DYNAMISME ECONOMIQUE
La
réforme de la taxe professionnelle constitue un allégement des
charges pesant sur les entreprises. Considérée sous ce seul
angle, elle n'est pas critiquable.
Cependant,
il est regrettable que cet allégement soit
opéré par le biais d'une réforme aboutissant, dans sa
rédaction actuelle, à une réduction probable des
ressources des collectivités locales
71(
*
)
à partir de l'an 2000
. En effet, la réforme de la taxe
professionnelle se traduit par l'augmentation des prélèvements
qui alimentent le budget général, notamment les cotisations
minimale et de péréquation. En revanche, le mode compensation aux
collectivités locales retenu dans le projet de loi de loi de finances
pour 1999 est défavorable à celles-ci.
Le gouvernement avait le choix entre deux méthodes pour compenser la
perte de recette des collectivités locales :
- le
dégrèvement
, qui consiste maintenir l'assiette
salaire dans les déclarations fiscales des entreprises, cette part de
l'assiette de la taxe professionnelle étant prise en charge par l'Etat
et non plus par les entreprises. Cette solution permet aux collectivités
locales de continuer à voter des taux et à percevoir le produit
correspondant.
- la
compensation
, dont la base de calcul est déconnectée
de l'évolution des taux votés par les collectivités.
Le gouvernement a choisi de recourir à la méthode de la
compensation. Il a décidé que
les sommes versées aux
collectivités locales seraient calculées en fonction des taux de
taxe professionnelle de 1998 et des bases de 1999
. Pour 1999, ces bases de
calcul sont celles qu'auraient retenues les entreprises pour acquitter leur TP.
La compensation se fera donc " au franc le franc ".
Entre 1999 et 2003
, le montant de la compensation sera obtenu en
appliquant à la compensation de l'année précédente
l'indice d'évolution de la dotation globale de fonctionnement (DGF).
A partir de 2004
, la compensation sera fondue dans la DGF.
La
réforme se traduira vraisemblablement par une perte de
ressource pour les collectivités locales
car l'évolution
de la masse salariale est nettement plus dynamique que celle de la DGF
. En
1999, la première progressera de 4,3 % contre 2,78 pour la seconde.
En outre, au bout de quelques années, la compensation ne reposera plus
du tout sur des données correspondant à la réalité
économique des communes.
Il est donc à craindre que la réforme de la taxe professionnelle
ne conduise les collectivités locales à
augmenter les
impôts pesant sur les ménages
pour compenser la
réduction du produit de leur taxe professionnelle.
Mais surtout,
un allégement des charges sur les entreprises par
transformation d'une ressource fiscale locale directe en concours
budgétaire témoigne d'une conception contre-productive du
rôle des collectivités locales en tant qu'acteurs
économiques
, qu'il est intéressant d'analyser à la
lumière de l'analyse ci-dessous, tirée d'un document de
l'OCDE
72(
*
)
:
"
La responsabilisation des collectivités locales
- Dans un
contexte décentralisé, les niveaux d'administration locaux
doivent financer leurs actions par des ressources locales, et essentiellement
fiscales. L'obligation de maintenir ou d'augmenter la base fiscale est une
forme d'incitation à la mobilisation locale en faveur du
développement économique. Des attitudes malthusiennes des
collectivités locales face au développement d'activités
économiques, comme par exemple un faible intérêt pour
l'aménagement de zones d'activités et une
préférence pour une activité résidentielle,
cèdent le pas à de véritables stratégies de
croissance économique.
Un élu local dont les ressources se
composent essentiellement de subventions centrales se trouve placé dans
la position d'un quémandeur ; un élu local responsable des
rentrées fiscales devient un acteur du développement.
"
En 1998, les ressources des collectivités locales se
répartissaient de la façon suivante
73(
*
)
:
en millions de francs
1.
Fiscalité directe, dont :
|
306.549
|
56,5 %
|
2. Dotations sous enveloppe*** |
157.713 |
29,1 % |
3. Fiscalité transférée |
44.122 |
8,1 % |
4. Autres (FCTVA, amendes, CST) |
33.149 |
6,1 % |
TOTAL |
541.533 |
100 % |
*Sources
: commission des finances du Sénat (chiffres : rapport Bourdin/DGCL)
** Premières estimations
*** LFI 98 révisée
Le produit des taux votés par les collectivités locales en 1998,
évalué à 306,5 millions de francs par le rapport
Bourdin, représente 56,6 % des ressources des collectivités
locales en 1998. Mais compte tenu des compensations et
dégrèvements à la charge de l'Etat, le pouvoir fiscal
direct des collectivités locales ne porte plus que sur 45 % de
leurs ressources.
Cette tendance va s'accentuer en 1999 du fait de la réforme de la taxe
professionnelle. Dans le projet de loi de finances pour 1999, les compensations
et dégrèvements à la charge de l'Etat
s'élèveront à 81,9 milliards de francs :
Prise
en charge par l'Etat des allégements de fiscalité locale dans le
PLF 99
74(
*
)
Compensation de la réforme fiscale |
20.400 |
Réduction pour embauche et investissement |
1.550 |
Contrepartie de l'exonération de la taxe foncière sur le bâti et le non bâti |
320 |
Compensation de diverses exonérations relatives à la fiscalité locale |
11.990 |
Contrepartie de divers dégrèvements législatifs |
47.666 |
Total |
81.926 |
Le constat du rétrécissement des ressources fiscales directes dans les ressources totales des collectivités locales est indéniable. A ce titre, il est permis de s'interroger sur le décalage entre, d'une part, la volonté du gouvernement de promouvoir la taxe professionnelle d'agglomération comme vecteur de l'intercommunalité de projet et, d'autre part, la restriction de la capacité des collectivités à lever des impôts de manière responsable dans le cadre de véritables stratégies de développement .
C. LA TAXE PROFESSIONNELLE DE FRANCE TELECOM : LE TEMPS DE LA REFORME EST VENU
"
La Poste et France Télécom sont
assujettis,
à partir du 1er janvier 1994 et au lieu de leur principal
établissement, aux impositions directes locales perçues au profit
des collectivités locales et des établissements et organismes
divers
".
Ce principe posé par l'article 21 de la loi du 2 juillet 1990 relative
à l'organisation du service public de la poste et des
télécommunications est assorti de
deux réserves
qui
le rendent inopérant :
- le taux applicable n'est pas celui de la collectivité où les
deux exploitants détiennent une installation mais "
le taux
moyen pondéré national qui résulte des taux
appliqués l'année précédente par l'ensemble des
collectivités locales
" ;
- le produit de cette fiscalité "
est perçu par
l'Etat
".
La fiscalité locale de La Poste et de France Télécom
n'en a donc que le nom
, puisque les collectivités locales ne la
perçoivent pas, pas plus qu'elles n'en votent le montant.
La question du bénéficiaire légitime du produit de la
fiscalité locale des deux entreprises n'est pas qu'un problème
juridique
, compte tenu des montants en jeu : en 1997, l'Etat a perçu
6,219 milliards de francs, dont 5,65 au titre de la seule taxe
professionnelle de France Télécom.
1. Les limites du système actuel
Un
système choquant
Sur le principe, il est choquant qu'un impôt qualifié d'
"
imposition directe locale
" par la loi l'instituant soit
perçu par l'Etat et ne profite pas aux collectivités dans
lesquelles La Poste et France Télécom détiennent des
installations.
Un système qui ne marche pas
La loi du 2 juillet 1990, prenant des libertés avec le principe de non
affectation des recettes figurant à l'article 18 de l'ordonnance
organique du 2 janvier 1959, prévoit que le produit de la
fiscalité locale de La Poste et de France Télécom est
perçu par l'Etat "
qui l'utilise afin de contribuer au
financement des pertes de recettes résultant de l'application de
l'article 6 de la loi de finances pour 1987
", c'est à dire
l'abattement général de 16% des bases de taxes professionnelle.
Ce mécanisme consiste donc à faire financer par une ressource qui
aurait du revenir aux collectivités locales des abattements sur un
impôt local consentis par l'Etat, qui s'engage à les compenser.
En réalité, la compensation de cet abattement s'opère par
le biais de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP), qui
est un concours de l'Etat compris dans l' " enveloppe normée "
des concours aux collectivités locales. Par ailleurs, au sein de
l'enveloppe normée, la DCTP joue le rôle de variable d'ajustement,
si bien que son montant, depuis 1996, est déconnecté de
l'évolution des bases de taxe professionnelle.
Aussi, la fraction de cette dotation résultant de l'abattement
décidé par la loi de finances pour 1987 est impossible à
individualiser. En pratique, aucun gouvernement n'a d'ailleurs mis en
parallèle le produit de la fiscalité locale de La Poste et de
France Télécom et le montant de la DCTP. Le montant de l'une ne
saurait donc être liée au montant de l'autre.
Les collectivités locales bénéficient cependant,
partiellement, du produit de la fiscalité locale des deux
opérateurs par le biais du Fonds national de péréquation
de la taxe professionnelle
(FNPTP). L'article 21 de la loi du 2 juillet
1990 prévoyait que, à partir de 1995, la différence entre
le produit total de la fiscalité locale de La Poste et de France
Télécom et le montant de l'abattement de taxe professionnelle
qu'il était censé compenser était versée au FNPTP.
En réalité, le produit pour 1994 a été versé
au budget général. Depuis 1995, le produit de la fiscalité
locale des deux opérateurs est réparti entre :
- le budget général, pour un montant équivalent à
celui de 1994 indexé sur l'inflation ;
- le FNPTP qui perçoit la différence entre le produit total et
les montant de 1994 indexé. En 1999, la recette supplémentaire du
FNPTP s'établira à 1.733 millions de francs.
Dans l'esprit de la loi du 2 juillet, le produit de la fiscalité locale
de La Poste et de France Télécom était censé
financer, par une ressource théoriquement locale, un abattement sur une
taxe locale accordée aux entreprises par l'Etat. Ce dispositif, à
la logique contestable, n'est même pas appliqué et les sommes
perçues par l'Etat alimentent le budget général.
Un système contesté par ses redevables
La Poste et France Télécom contestent le dispositif de la loi de
1990, et plus particulièrement le régime de taxe professionnelle
qui leur est imposé, en développant des arguments similaires.
Dans un avis adopté le 18 septembre 1998, la commission
supérieure du service public des postes et
télécommunications affirme qu' "
il convient, dès
à présent, de prendre en compte tant le renforcement de la
situation concurrentielle de La Poste que les besoins des collectivités
locales, et d'engager une réflexion sur l'intérêt d'une
modification des règles de perception de la taxe professionnelle
acquittée par l'opérateur
et des modalités
d'affectation du produit de celle-ci aux collectivités locales
,
par un assujettissement progressif de La Poste au
droit commun
de la
fiscalité locale
".
France Télécom, dont la taxe professionnelle représente
environ un sixième du montant total de la fiscalité
acquittée à l'Etat, demande également à être
assujettie au droit commun de la fiscalité.
Versements de France Télécom à l'Etat en 1997
(en millions de francs)
1.
Fiscalité
|
30.285
|
L'argument principal de France Télécom est
celui de
l'ouverture à la concurrence dans le secteur des
télécommunications
, qui justifierait qu'elle soit soumise au
même régime fiscal que ses concurrents privés. L'entreprise
craint que, dans le cadre d'appels d'offre, les collectivités locales ne
penchent pour les opérateurs privés, dont elles perçoivent
l'intégralité de la taxe professionnelle, au détriment de
France Télécom.
En outre, France Télécom considère que le passage au droit
commun de son régime de taxe professionnelle ne serait pas un facteur
d'accroissement des inégalités de richesse entre
collectivités locales puisqu'elle dispose d'installations dans 15.000
communes. Selon l'opérateur, en cas de développement rapide de
l'intercommunalité, le nombre de communes bénéficiant du
produit de la taxe professionnelle de France Télécom
s'accroîtrait encore.
2. Sortir de l'impasse
Un
premier pas : la réforme de la taxe professionnelle de France
Télécom
Une
proposition de loi a été déposée au
Sénat
au mois de novembre 1997
75(
*
)
.
Selon son exposé des motifs, elle est inspirée par "
la
conviction que La Poste et France Télécom n'ont pas à
obéir à un dispositif particulier. Toutefois, La Poste a
été exclue de cette proposition de loi, pour tenir compte de son
statut particulier et du rôle que cet établissement doit continuer
de jouer, par ailleurs, en matière d'aménagement du territoire.
D'ailleurs, le produit est faible puisqu'elle bénéficie d'un
abattement de 85 % de ses bases imposables
".
Le débat qui s'est tenu au Sénat le 25 novembre 1997 sur un
amendement reprenant le texte de la proposition de loi a permis de confirmer
que le transfert aux collectivités locales du bénéfice du
produit de la taxe professionnelle de France Télécom était
un projet qui recueillait l'assentiment d'élus siégeant sur tous
les bancs de notre Assemblée.
Promouvoir un système mixte alliant péréquation et
efficacité économique
La réforme de la taxe professionnelle de France Télécom
devra s'efforcer de
prendre en compte trois paramètres difficilement
conciliables
:
- transférer aux collectivité locales le bénéfice
du produit de l'impôt ;
- maintenir un mécanisme de péréquation, France
Télécom ne disposant d'installations imposables que dans 15.000
communes sur 36.000 ;
- remédier autant que possible à la distorsion de concurrence
entre France Télécom et les opérateurs privés.
A cet effet,
votre rapporteur général préconise la mise
en oeuvre d'une réforme dont les grandes lignes seraient les
suivantes
:
- afin de faire jouer la péréquation entre collectivités,
70 % (et non plus seulement " l'excédent ") du produit de
la taxe professionnelle de France Télécom serait versé au
FNPTP, l'instrument de droit commun ;
- le solde de 30 % bénéficierait directement aux
collectivités d'implantation. En effet, il apparaît
également fondamental de rapprocher les collectivités locales et
leur tissu économique. Ainsi, celles-ci auraient un intérêt
à mettre en oeuvre des stratégies d'attraction des
investissements, et notamment ceux de France Télécom. En outre,
l'implantation des établissements de France Télécom
obéit à la même logique que celle des entreprises. La
réalisation des infrastructures nécessaires à la venue des
entreprises entraîne pour les collectivités des coûts, dont
il est logique qu'ils soient partiellement financés par la
fiscalité payée par ces entreprises ;
- les établissement de France Télécom acquitteraient
l'impôt au taux en vigueur dans la collectivité d'implantation, de
manière à ce que les paramètres pris en comptes par
l'opérateur public dans le choix du lieu d'implantation de ses
installations soient les mêmes que ceux de ses concurrents.
Le système décrit ci-dessus présente une faiblesse
notable
: il ne résout pas le problème de distorsion de
concurrence entre France Télécom et ses concurrents puisque les
collectivités locales continueront de percevoir
l'intégralité de la taxe professionnelle des opérateurs
privés, mais seulement 30 % de celle de France
Télécom.
Néanmoins, ce dispositif est meilleur que le système
actuel
. Et si, du fait de la mise en oeuvre de la loi sur
l'intercommunalité et du développement de la taxe professionnelle
d'agglomération, le nombre de communes n'appartenant pas à une
structure intercommunale bénéficiant de la taxe professionnelle
de France Télécom devait se réduire
considérablement, alors le passage au droit commun intégral
deviendrait non seulement envisageable, mais souhaitable.
V. RÉNOVER NOS MÉTHODES BUDGÉTAIRES
Votre
commission a déjà apporté une contribution à la
réflexion sur l'amélioration de notre méthodologie
budgétaire, par l'élaboration de "7 piliers de la sagesse
budgétaire" destinés à rendre le budget plus lisible.
Ses propositions demandent encore aujourd'hui à être mises en
oeuvre, mais il est nécessaire d'aller plus loin : le budget doit
être également plus crédible.
A. UN BUDGET PLUS LISIBLE
Lors du débat sur le projet de loi de finances pour 1998, votre commission avait formulé sept propositions, qui méritent d'être répétées, tant elles restent d'actualité.
Propositions de la commission des finances pour une modernisation des procédures budgétaires : les sept piliers de la sagesse budgétaire
Rétablir la "sincérité" de la
loi de
finances
Au fil des années, la loi de finances est devenue un document à
rendre perplexe un commissaire aux comptes. Le projet présenté au
Parlement est incomplet (les fonds de concours n'y figurent pas),
contracté (près de 250 milliards de francs de
prélèvements sur recettes sont des charges n'apparaissant pas),
hétérogène (des dépenses identiques sont
traitées différemment selon qu'elles figurent au budget de l'Etat
ou dans des comptes spéciaux du Trésor).
Ainsi, le budget voté pour 1995 prévoyait 1.616 milliards de
dépenses à caractère définitif. En loi de
règlement
76(
*
)
, le montant des charges
s'est en définitive établi à 3.757 milliards de
francs, soit une différence de
2.141 milliards de francs
. Il
est nécessaire de faire apparaître la réalité :
le budget de l'Etat atteint 2.369 milliards en total net des
crédits ouverts, et dépasse le budget social
(2.300 milliards).
Institutionnaliser la distinction entre l'investissement et le
fonctionnement.
Depuis 1992, une part du déficit budgétaire (115 milliards
de francs en 1997) finance des dépenses courantes : l'Etat
s'endette pour vivre au jour le jour. Sans en avoir conscience, nous laissons
ainsi à nos enfants le soin et la charge de régler demain nos
consommations d'aujourd'hui. Cette atteinte aux droits des
générations futures n'est pas admissible. Par analogie avec la
"règle d'or" inscrite dans la Constitution allemande, elle appelle une
réforme de l'ordonnance du 2 janvier 1959, identifiant la section
de fonctionnement de l'Etat et les conditions de son équilibre
obligatoire, s
eul l'investissement étant dorénavant
financé par l'emprunt.
Certifier les méthodes comptables
L'évolution rapide des phénomènes économiques ne
permet pas de comparer des projets de loi de finances à "structure
constante". Cette instabilité inévitable -mais irritante- doit
être corrigée par la présentation au Parlement, sous le
contrôle de la Cour des Comptes, d'une annexe au projet de loi de
finances recensant les modifications de présentation budgétaire.
Inspirée du principe comptable de "permanence des méthodes",
cette réforme préviendra les polémiques sur les
"débudgétisations".
Instaurer une procédure de suivi des dépenses
sociales
Le vote de la loi de financement de la Sécurité sociale implique
que le Parlement puisse en contrôler l'exécution en cours
d'année. Cela suppose la création d'indicateurs mensuels rendus
d'autant plus nécessaires que les comptes sociaux se
caractérisent par leur extrême émiettement et que les
chiffres de l'ACOSS ne sont pas rendus publics.
Accélérer la mise en oeuvre de la comptabilité
patrimoniale
L'appréciation de la fidélité des documents
budgétaires implique une amélioration de la comptabilité
patrimoniale de l'Etat, dans le sens des travaux initiés par Jean
Arthuis. En effet, les déclassements d'opérations
budgétaires en opérations de trésorerie, la mise en jeu de
la responsabilité pécuniaire de l'Etat et les systèmes de
vases communicants entre le budget général et les comptes des
entreprises publiques ne sont finalement retranscrits que dans le compte de la
dette et non dans les lois de finances. Les pertes en capital n'apparaissent
pas, et pas davantage les charges de retraite non provisionnées.
Moderniser les procédures de régulation
budgétaire
Les rapports de la Cour des Comptes fournissent, chaque année, les
exemples d'une "comptabilité créatrice" visant tant à
lisser sur plusieurs exercices, qu'à réguler en cours
d'année les flux de dépenses et de recettes. L'ordonnance de 1959
n'est plus respectée : les conditions mises à la publication
de décrets d'avance, d'arrêtés d'annulation et de textes
créant des dépenses nouvelles
77(
*
)
ne sont plus appliquées. Elles doivent
être adaptées.
En revanche, et malgré quelques améliorations récentes, le
Parlement ne peut accepter d'être mis en permanence devant des faits
accomplis, d'apprendre que des correctifs sont apportés à la loi
de finances dont l'encre est à peine sèche, voire de constater
que des crédits annulés au printemps sont rétablis
à l'automne.
Deux pistes méritent d'être
explorées
. La Cour des Comptes pourrait être saisie pour avis
du projet de loi de finances -à l'image du Conseil d'Etat- et porter un
jugement sur l'adéquation du niveau des dotations inscrites. Les
commissions des finances devraient être appelées à
débattre des régulations mises en oeuvre.
Fixer un nouveau rendez-vous budgétaire
Les grandes entreprises arrêtent des comptes semestriels. L'Etat ne
s'impose pas cette discipline. Il convient donc que le Parlement soit saisi, en
fin de premier semestre, d'un état commenté de l'exécution
des comptes publics, analogue au travail commandé aux deux magistrats de
la Cour des Comptes
78(
*
)
-dont
l'élaboration pourrait être confiée à la Cour dans
l'esprit de l'article 47 de la Constitution. Un jugement politique pourra
alors être porté sur la pertinence de l'exécution de la loi
de finances et de la loi de financement de la sécurité
sociale.
B. UN BUDGET PLUS CRÉDIBLE
La mise
en place de l'euro mettra les finances publiques des Etats participants sous
surveillance mutuelle. Les institutions européennes (Commission,
Conseil), mais aussi chaque Etat membre surveilleront l'évolution des
finances publiques des autres Etats. Cela nécessitera que les budgets
publics soient crédibles, ainsi que la recommandation du Conseil
d'Amsterdam le précise :
"
Il faut que les programmes
d'ajustement budgétaire soient crédibles et durables.
La
charge de l'ajustement devrait être répartie de manière
juste et équitable. Pour être crédibles,
ces programmes
doivent être transparents
. La transparence exige que les
règles comptables et les principes économiques
arrêtés en commun soient strictement appliqués. En outre,
les budgets annuels et les projections budgétaires à moyen terme
devraient indiquer clairement les hypothèses économiques sur
lesquelles ils se fondent. Pour avoir un effet durable, il est primordial que
les mesures de réduction du déficit s'inscrivent dans une
stratégie à moyen terme clairement définie, comportant de
nécessaires réformes structurelles, comme indiqué dans les
programmes de convergence et, dès le début de la troisième
phase, dans les programmes de stabilité ou de convergence. Ces
programmes devraient être étroitement surveillés au niveau
communautaire"
.
Cette crédibilité ne reposera pas seulement sur la vraisemblance
des hypothèses économiques, et des niveaux de recettes et de
dépenses retenus. La quasi-certitude que l'exécution d'un budget
sera conforme à la loi de finances sera également requise, ainsi
que le prescrit le règlement européen du 7 juillet 1997 dans
son article 5 :
"Le Conseil examine si l'objectif
budgétaire à moyen terme fixé par
le programme de
stabilité offre une marge de sécurité pour assurer la
prévention d'un déficit excessif
, si les hypothèses
économiques sur lesquelles se fonde le programme sont réalistes
et si les mesures mises en oeuvre et/ou envisagées sont suffisantes pour
réaliser la trajectoire d'ajustement visée, qui doit conduire
à la réalisation de l'objectif budgétaire à moyen
terme"
.
Les méthodes budgétaires de la France sont aujourd'hui loin de
correspondre à ces critères. Le projet de loi de finances est
comparé à une loi de finances initiale dont l'exécution,
quasiment achevée au moment du débat budgétaire, est en
général très éloignée. La construction du
projet de loi de finances repose sur la certitude que les hypothèses
économiques qui le sous-tendent se réaliseront, alors que l'on
sait que les aléas sont nombreux et les erreurs de prévision plus
fréquentes que les prévisions exactes. Le débat
budgétaire ne porte jamais sur les moyens que le gouvernement entend
mettre en oeuvre pour garantir l'exécution fidèle de la loi de
finances, et l'on tient pour certaines des dépenses ou des recettes qui
ne seront en grande partie pas exécutées.
Il est bien évident que l'euro va remettre en cause le caractère
quelque peu irréel de cet exercice.
Quelques préconisations simples, qui méritent un débat,
peuvent être avancées :
rendre la loi de finances moins sensible aux aléas
conjoncturels
. La seule solution pour cela consiste à réduire
la part des dépenses de structure, qui sont les plus rigides, afin de
pouvoir ajuster les baisses de dépenses aux éventuelles baisses
de recettes (celles-ci ne peuvent, par nature, évoluer très
différemment de l'ensemble de l'économie). Cette solution,
proposée par votre commission pour le budget 1999, est
également proposée par le Conseil européen pour conduire
les Etats membres vers l'équilibre. A moyen terme, une politique
budgétaire est en effet crédible si elle prévoit
d'éviter l'augmentation des charges d'endettement ;
construire le budget sur une hypothèse de croissance nominale
inférieure (d'un point, par exemple) au consensus des
prévisionnistes.
C'était la méthode appliquée
aux Pays-Bas jusqu'en 1999 sous le nom de "norme Zalm".
La "norme Zalm" aux Pays-Bas
Jusqu'aux dernières élections
législatives, le
ministre des finances avait défini les normes de rigueur qui
s'appliquent théoriquement à la politique budgétaire
connues communément sous le nom de "norme Zalm". Selon celle-ci, si le
déficit budgétaire est supérieur à 0,75 % du
PIB selon la définition de l'UEM, les trois-quarts des recettes
budgétaires complémentaires seront affectées à la
réduction du déficit budgétaire et le solde à un
allégement de charges. Si le déficit est inférieur
à 0,75 % du PIB, alors les recettes supplémentaires seront
affectées pour moitié à la réduction du
déficit et pour moitié à un allégement de charges.
L'application de ce principe était associée dans le
précédent gouvernement à une grande prudence qui
consistait à faire des prévisions de croissance conservatoires
susceptibles de dégager des recettes complémentaires en cours
d'année. En outre, les recettes et les dépenses étant
strictement séparées, toute économie
réalisée dans un département ministériel revenait
au budget général, tandis que toute dépense
supplémentaire devrait être financée par des
économies au sein du ministère dépensier.
Pour l'élaboration de son projet de budget pour l'année (n+1) et
pour son cadrage budgétaire pluriannuel (jusqu'à n+4), le
gouvernement néerlandais demande au Bureau central de la
prévision néerlandais (BCPB, équivalent néerlandais
de la Direction de la prévision) d'élaborer deux
scénarios : l'un reposant sur une conjonction de faits favorables
(ex. : reprise du commerce mondial, tenue du dollar, etc...) et l'autre
dit "prudent". C'est ce dernier qui sert de cadre de référence au
budget de l'année suivante.
Lors des quatre derniers projets de budget (premier gouvernement de coalition
à direction sociale-démocrate), l'hypothèse de progression
du PIB a ainsi toujours été fixée à 2 % l'an.
Sur la période 1994-1997, le PIB a progressé en moyenne de
3,1 % l'an. Le surcroît de recettes ainsi dégagé a
été alloué au remboursement de la dette (qui approchait
les 80 % du PIB en début de législature et qui atteint
68 % en 1998) et a permis de nouvelles baisses d'impôts au
bénéfice des entreprises (majoritairement) et des ménages.
Bien qu'elle paraisse comme une méthode efficace de réduction du
déficit, la "norme Zalm" a toutefois été abandonnée
par la nouvelle coalition au pouvoir.
Les difficultés d'application de la "norme Zalm" sont apparues dans la
programmation budgétaire quadriennale 1999-2002, qui accompagne le
budget 1999. Celle-ci laisse en effet apparaître un excédent
des dépenses sur les recettes. Cet accroissement représente
1,6 milliard de florins, soit un accroissement prévisionnel du
déficit de 0,49 % du total des dépenses budgétaires
en fin de période. Cette projection est en totale opposition avec la
pratique précédente : au cours des quatre budgets
précédents, le déficit exprimé par rapport au total
de la dépense publique avait régulièrement baissé.
L'ambition affichée de réduction du déficit paraît
dans conditions difficilement réalisable.
L'abandon de la "norme Zalm" n'est peut-être pas définitif.
Prévoir des lignes de réserve pour dépenses
éventuelles
Votre commission des finances a déjà débattu de cette
possibilité, que le précédent gouvernement s'était
engagé à étudier.
Ainsi, lors du débat d'orientation budgétaire pour 1997, le
ministre délégué au budget, M. Alain Lamassoure, avait
déclaré :
"
De la même manière, nous avons pris bonne note, Monsieur le
Rapporteur général, de votre suggestion. Vous souhaitez que l'on
introduise dans la loi de finances initiale une forme de "dotation pour charges
imprévues" ou que l'on trouve une autre méthode pour
éviter d'avoir à recourir à des gels de crédits en
début d'année, procédés qui compliquent la gestion
pour les ministres concernés et qui, en réalité,
représentent une atteinte aux droits du Parlement".
Force est de reconnaître que des systèmes analogues avaient
été mis en place par le passé, comme les "fonds d'action
conjoncturelle" (1969-1974, 1977 et 1981) ou les "fonds de régulation
budgétaire" (1978-1983) ; ces derniers constitués hors loi de
finances, et ne se sont guère révélés probants.
L'actuel gouvernement ne parait pas convaincu par l'utilisation d'une
réserve de cette nature, ainsi qu'en atteste une réponse à
une question posée par votre commission sur la loi de règlement
1995 au sujet d'une "dotation de réserve" éventuelle :
La Cour des Comptes envisage de constituer une dotation de réserve par
prélèvements sur des crédits limitatifs, dont le montant
et les modalités d'utilisation seraient examinés par le Parlement
à l'occasion de la discussion budgétaire.
Cette proposition conduirait à fixer dès le stade du PLF le
quantum de la régulation, alors que la Cour elle-même insiste
particulièrement sur le souhait que la régulation soit
strictement proportionnée à la dégradation
prévisible des conditions d'exécution par rapport aux
prévisions.
En outre, sauf à dégrader le solde du PLF, ce schéma
conduirait à restreindre ab initio le montant des crédits
limitatifs affectés aux lignes de dépenses des différents
ministères, renvoyant à une éventuelle répartition
en exécution, par ailleurs souvent critiquée par la Cour,
l'utilisation de ces crédits si les conditions de l'exécution
budgétaire le permettaient.
Enfin, les expériences étrangères en ce sens attestent que
l'existence d'une telle provision ne constitue pas, en elle-même, une
incitation à une meilleure gestion responsabilisante, chacun ayant la
tentation de s'en remettre à cette provision plutôt que de
prévenir à son niveau les dérapages de dépenses.
S'agissant des crédits reportables de droit, la date de leur mise
à disposition des ministères a été
considérablement avancée depuis 1995. Ainsi l'ensemble des
mouvements de reports de 1996 sur 1997 ont été achevés
à la fin du mois de mai 1997, trois mois plus tôt que pour les
reports de 1995 sur 1996. La Cour des Comptes "accueille avec satisfaction" les
progrès accomplis (p. 319 du rapport sur l'exécution des lois de
finances pour 1996).
Tenir des débats réguliers sur l'exécution
budgétaire
Depuis quelques années, l'information du Parlement s'est nettement
améliorée sur l'exécution budgétaire.
Le gouvernement publie un état mensuel de la situation
budgétaire. Il s'était également engagé,
vis-à-vis de votre commission, à l'informer préalablement
des mouvements de crédits qu'il serait amené à
décider.
Il a tenu cet engagement sur le décret d'avance et l'arrêté
d'annulation du 21 août dernier.
Ce n'est toutefois pas suffisant, car
la crédibilité
budgétaire exige non seulement que le gouvernement informe le Parlement
sur l'exécution de la loi de finances, mais aussi qu'il débatte
avec lui des moyens de garantir cette exécution.
Ainsi, dès le stade du débat budgétaire, il pourrait
être envisagé que le gouvernement annonce ce qu'il proposerait en
cas d'exécution non conforme à la loi de finances.
S'il y a excédent de recettes sur la prévision, entend-il les
dépenser, les affecter au déficit, ou réduire les
prélèvements ?
Si l'exécution se révèle au contraire difficile,
proposera-t-il de relever les impôts ? Lesquels ? Procédera-t-il
à des annulations de crédits ? Lesquels seraient
touchés en priorité ? Si certaines dépenses tendent
à déraper, a-t-il déjà prévu des mesures de
redressement utilisables ? Etc...
Pour qu'un projet de loi de finances soit vraiment crédible, ces
orientations devraient être soumises au Parlement.
Après le débat budgétaire, il serait nécessaire de
tenir régulièrement des débats sur le déroulement
de l'exécution, au moins en commission des finances.
Votre rapporteur général rappelle que l'article 3 du
règlement européen de juillet 1997 précité
prévoit notamment que le programme de stabilité annuel
notifié par les Etats membres doit contenir :
"
c) une description des mesures budgétaires et des autres mesures de
politique économique qui sont mises en oeuvre et/ou envisagées
pour réaliser les objectifs du programme et, dans le cas des principales
mesures budgétaires, une évaluation de leurs effets quantitatifs
sur le budget ;
d) une analyse de l'incidence que tout changement des principales
hypothèses économiques aurait sur la situation budgétaire
et la dette."
Il ne serait pas normal que de telles décisions, législatives par
nature, soient soumises à la Commission européenne sans que le
Parlement national en ait débattu.
EXAMEN EN COMMISSION
Au
cours d'une séance tenue dans la matinée du mercredi 4 novembre
1998, sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la
commission a procédé, sur le rapport de
M. Philippe
Marini, rapporteur général
, à
l'examen
des
principaux éléments
de
l'équilibre
du
projet
de
loi
de
finances
pour
1999
.
A titre liminaire,
M. Alain Lambert, président,
a
souligné l'intérêt que présentait pour la commission
l'innovation qu'il avait introduite cette année consistant à
délivrer un "message d'ensemble" sur le projet de loi de finances et le
projet de loi de financement de la sécurité sociale et cela
compte tenu des liens existant entre ces deux textes.
De façon plus générale, il s'est déclaré
favorable à ce qu'un panorama de la situation financière des
collectivités locales puisse également être
présenté ainsi qu'une communication sur l'état financier
de l'Union européenne.
A ce titre, il a fait part de l'accord du ministre de l'économie quant
à l'organisation au Sénat d'un débat annuel sur l'Euro.
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a tout d'abord
présenté les principales hypothèses économiques en
matière de croissance, d'inflation et de capacité de financement
des administrations publiques pour 1999. Il a souligné l'écart
existant entre les prévisions du Gouvernement et celles issues notamment
de la Caisse des dépôts et consignations. Il a rappelé le
" volontarisme " de la prévision gouvernementale en
matière de croissance ainsi que le décalage existant entre le
niveau escompté des prix pour 1999 et le niveau actuel de l'inflation,
ce décalage contribuant mécaniquement à surestimer les
prévisions de recettes.
De même, il a rappelé que le cours du dollar était
estimé à 6 francs par le Gouvernement alors que la plupart
des économistes tablaient sur un montant compris entre 5,40 francs
et 5,60 francs. Par ailleurs, il a tenu à préciser que les
hypothèses sous-jacentes au cadrage d'ensemble du budget avaient
été fixées en juin 1998 et n'intégraient donc pas
les effets de la crise asiatique où les aléas politiques russes.
Ces hypothèses reposent en effet sur une demande intérieure
dynamique, c'est-à-dire sur un sentiment éminemment fragile : la
confiance des ménages, ce qui conduit le Gouvernement à des
prévisions optimistes en matière de recettes pour l'Etat, qu'il
s'agisse de la TVA ou de l'impôt sur les sociétés.
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a
indiqué qu'il ne souhaitait pas contester les prévisions faites
par le Gouvernement mais simplement en relever les limites : les recettes
sont basées sur une croissance volontariste tandis que les
dépenses présentent un caractère pérenne et une
forte rigidité.
Il a donc estimé que la réduction du déficit
proposé pour 1999 par le Gouvernement était insuffisante. Puis il
a présenté les principaux éléments du projet de loi
de finances pour 1999.
Il a tout d'abord indiqué que les recettes, compte tenu des
dégrèvements, s'élèveraient à
1.601 milliards de francs et souligné l'importance du montant des
intérêts de la dette qui est égal à celui du
déficit budgétaire.
Il a rappelé à ce titre que le budget de l'Etat ne prend en
compte que les intérêts de cette dette et non les annuités,
ce qui induit une présentation comptable plus "optimiste" que celle
s'appliquant aux collectivités locales. Il a également
relevé la faiblesse du montant des investissements civils qui
s'élèveront à 78 milliards de francs dont
6 milliards de francs de dépenses rebudgétisées.
S'agissant de l'appréciation du niveau du déficit
budgétaire qui s'établirait à 236,5 milliards de
francs en 1999, soit un besoin de financement total des administrations
publiques de 2,3 % du PIB, il a indiqué que la France aurait, parmi
les pays de l'Union européenne en 1999, le plus mauvais solde des
finances publiques avec l'Italie puisque la moyenne des pays de l'Union
européenne s'établissait à 1,4 % du PIB et celle des
pays de la zone Euro à 1,9 % du PIB.
Il a également tenu à rappeler que les collectivités
locales dégageaient un excédent et que le solde des
régimes sociaux était en voie d'amélioration. Dans ce
contexte, la France serait le seul pays de l'Union européenne à
ne pas stabiliser le poids de sa dette publique dans le PIB, avec le Luxembourg
qui connaît cependant un très faible niveau d'endettement public,
estimé à 7,7 % du PIB contre 58,7 % pour la France. Il
serait donc nécessaire, afin de stabiliser le poids relatif de cette
dette, de réduire le déficit public de 2,3 % à
2,2 % du PIB soit un effort supplémentaire de 12 à
15 milliards de francs.
Commentant l'évolution de l'encours de la dette publique,
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a
rappelé qu'une dette publique en augmentation constitue un fardeau pour
les générations futures.
Il a par ailleurs tenu à relativiser quelque peu l'effort de
réduction du déficit compte tenu des résultats
prévisibles de l'exécution du budget en 1998. Le déficit
pourrait en effet être inférieur à celui prévu,
voire également inférieur à celui de 1999. En ce cas, cela
poserait un problème de cohérence avec la présentation
faite par le Gouvernement qui le conduit à insister sur la poursuite de
la réduction du déficit budgétaire en 1999 par rapport
à 1998.
M. Philippe Marini, rapporteur général,
est convenu
de ce que le budget pour 1999 traduit, de la part du Gouvernement, un effort
relatif de maîtrise des dépenses mais que cet effort reste
cependant insuffisant et incertain, puisque le gouvernement a choisi
d'augmenter des dépenses de structure, lourdes et récurrentes, en
les finançant par des recettes volatiles, en progression totale de
74,5 milliards de francs notamment au titre de la TVA et de l'impôt
sur le revenu.
S'agissant des dépenses,
M. Philippe Marini, rapporteur
général,
a relevé qu'en raison notamment de l'accord
salarial du 10 février 1998 dans la fonction publique, les
dépenses de rémunérations augmenteraient de
20,1 milliards de francs et semblaient de ce fait constituer la
véritable priorité du Gouvernement, avant la défense de
l'emploi ou la lutte contre l'exclusion.
Il a également précisé que les emplois jeunes, qui
coûteraient 14,3 milliards de francs en 1999 et plus de
30 milliards de francs d'ici 2001, constituent une lourde charge de
fonctionnement qu'il sera impossible de comprimer dans les cinq ans à
venir. Au total, il a rappelé que les charges de personnels civils
augmenteraient de 3,6 %, celles d'intervention de 3,7 % tandis que
les dépenses d'équipement civil baisseraient à nouveau de
0,3 %.
Il a noté que l'augmentation des dépenses d'équipement
militaire de 6,2 % ne résultait que du strict respect de la loi de
programmation mais qu'il était possible de douter de leur emploi
effectif compte tenu de la sous-estimation des besoins de fonctionnement des
armées. Ainsi, 3,8 milliards de francs de crédits
d'équipement militaire ont été annulés le
21 août 1998 afin de financer ces besoins de fonctionnement.
Puis, présentant les recettes,
M. Philippe Marini, rapporteur
général,
a tenu a rappeler que face à des
augmentations de charges de structure,
le Gouvernement tablait sur des
augmentations de recettes très sensibles à l'évolution de
la conjoncture, qu'il s'agisse de la TVA, de l'impôt sur les
sociétés ou de la TIPP.
En outre, il a relevé que, malgré un affichage flatteur, le
Gouvernement ne réalisait qu'une réduction limitée des
prélèvements obligatoires : sur les 16 milliards de francs
annoncés, 6 milliards de francs proviennent en
réalité d'allégements décidés
antérieurement. Par ailleurs, l'essentiel des réductions se
concentre sur les impôts locaux et semble être des
réductions que le Gouvernement n'a pas l'intention de rendre
réellement avantageuses ni pour les contribuables ni pour les
collectivités locales.
Il a donc estimé que la réduction du déficit s'appuyait
plus sur la conjoncture que sur de véritables réformes de
structure.
A ce titre, il a présenté l'affectation des montants
résultant des emprunts prévisibles de l'Etat en 1999 : sur
les 518,8 milliards de francs ainsi collectés, 282,2 milliards
seraient consacrés au remboursement d'emprunts antérieurs,
167,9 milliards aux dépenses d'investissement et
68,7 milliards aux dépenses de fonctionnement. Cela revient donc
à faire financer des dépenses courantes par l'emprunt, situation
interdite aux collectivités locales et qui pourrait placer l'Etat en
situation périlleuse.
Il a également souligné que l'effort de l'Etat en matière
de réduction du déficit était inférieur à
celui des autres administrations publiques et constituait donc un pari
risqué. En effet, afin d'améliorer le niveau des déficits
publics au sens du traité de Maastricht, l'Etat s'appuie depuis 1997 sur
les excédents des collectivités locales et les efforts de la
sécurité sociale.
Si en 1999, le déficit de l'Etat serait de 2,7 % du PIB, les
autres administrations publiques seraient elles en excédent de
0,4 % du PIB. De ce fait,
M. Philippe Marini, rapporteur
général,
a tenu à souligner que, si le solde des
autres administrations publiques au lieu d'être positif devenait
légèrement négatif, la France se situerait en situation de
déficit excessif au regard du traité sur l'Union
européenne. Dans ce contexte, il a rappelé que c'était au
budget de l'Etat de procéder à des adaptations structurelles.
Aussi, a-t-il tenu à émettre des propositions afin de mettre en
place "un budget de responsabilité et de prudence" qui s'inscrirait dans
le cadre des orientations définies par la commission des finances
notamment, lors de l'examen du dernier projet de loi de finances ou à
l'occasion du débat d'orientation budgétaire de juin 1998.
Il a tout d'abord indiqué que le choix avait été fait,
dans un souci de responsabilité, de ne pas rejeter l'ensemble de ce
budget mais de le discuter, et que ce choix impliquait de reconstruire un
nouvel équilibre budgétaire, tout en respectant une stricte
discipline qui interdisait de dégrader fortement le niveau des recettes
ou de modifier fortement le montant des dépenses.
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a ensuite
présenté les objectifs que s'est assignés la commission et
qui ont été présentés par son rapporteur
général lors du débat d'orientation budgétaire de
juin 1998.
Il s'agit tout d'abord de stabiliser le poids de la dette publique dans le
PIB, ce qui implique de réduire le déficit budgétaire
proposé par le gouvernement de 14 milliards de francs
supplémentaires, et ce qui permettrait par ailleurs, si la croissance
nominale du PIB était inférieure d'un point à ce que
prévoit le Gouvernement, de tenir son objectif de déficit
budgétaire.
Ainsi, l'objectif de 236,5 milliards de francs de déficit pourrait
être "sanctuarisé" même dans l'hypothèse d'une
conjoncture économique défavorable.
Il a rappelé que la réduction du déficit constitue un
exercice difficile puisqu'elle implique de réduire les recettes en
première partie du projet de loi de finances de façon
modérée, même si la réduction des
prélèvements obligatoires demeure l'objectif de la commission.
A ce titre, il a développé quelques unes des
préoccupations de la commission, que ce soit la lutte contre
l'alourdissement du poids de l'impôt sur les sociétés, le
plafonnement des effets du quotient familial ou le prélèvement de
5 milliards de francs sur les Caisses d'épargne qu'entend
réaliser le Gouvernement, alors que le Parlement n'a pas encore
été saisi du projet de loi sur lesdites Caisses d'épargne.
Il a, à ce titre, indiqué que certains dossiers fiscaux, tels
que la diminution de l'impôt sur le revenu, la réforme de la taxe
professionnelle de France Télécom ou la baisse de la TVA sur le
traitement des déchets, pourraient être examinés en seconde
partie du projet de loi de finances. En effet, si l'Etat était
géré comme la commission des finances le préconise, ces
réformes, qui supposent au préalable un effort de meilleure
gestion des finances publiques, deviendraient possibles compte tenu des
nouvelles marges de manoeuvre budgétaires ainsi dégagées.
S'agissant enfin de la répartition des fruits de la croissance, il a
rappelé que l'assainissement des finances publiques passait
nécessairement par une réduction des dépenses.
S'inspirant de la démarche suivie l'année dernière par la
commission,
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a
proposé un certain nombre de diminutions de dépenses au moyen,
d'une part, de réductions ciblées témoignant du rejet de
certaines politiques gouvernementales (tels la généralisation des
35 heures ou l'accroissement du volume des rémunérations
publiques) ou de la nécessité de financer les priorités
gouvernementales (emplois jeunes), à crédits constants. D'autre
part, il a souhaité que soient réalisées des
économies forfaitaires témoignant de la volonté de la
commission de voir aboutir la réforme de l'Etat. Cette dernière
impliquerait notamment de réorganiser les administrations publiques dans
le sens d'une meilleure productivité tout en ayant le courage de traiter
la question des retraites des fonctionnaires, afin de limiter le poids de ce
fardeau pour les générations futures.
Dans ce cadre, il a préconisé un effort de réduction des
dépenses qui épargnerait les ministères de
souveraineté, ceux dont les crédits étaient en baisse
à structure constante ainsi que l'investissement public. Cette
réduction s'élèverait à 5 % des crédits
du train de vie de l'Etat et à 1 % des autres crédits de
fonctionnement et d'intervention. Il a chiffré l'effort
d'économie ainsi proposé sur l'ensemble du budget à
environ 26 milliards de francs soit 1,5 % de l'ensemble des
dépenses.
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a conclu
qu'il s'agissait ainsi pour la commission de proposer une autre
répartition des fruits de la croissance et qu'il était donc
possible d'avoir une approche différente de celle du Gouvernement. Cela
permettrait de confronter dans la clarté, au cours du débat
budgétaire, des convictions différentes de celles du Gouvernement.
M. Alain Lambert, président,
a tenu à
féliciter M. Philippe Marini pour la maîtrise et la
pédagogie dont il avait fait preuve lors de la présentation des
principaux éléments du projet de loi de finances pour 1999.
M. René Ballayer
s'est inquiété de la
poursuite de l'accroissement de la charge de la dette malgré la
croissance économique et le faible niveau des taux
d'intérêt.
M. Maurice Blin
a insisté sur le poids des
rémunérations publiques au sein du budget général,
qui s'établit à près de 40 %, et s'est
inquiété, à ce titre, du niveau du déficit de
fonctionnement de l'Etat.
S'agissant du besoin de financement des administrations publiques
M. Jacques Oudin
a fait part de ses craintes quant à la
situation financière réelle des régimes de
sécurité sociale eu égard aux aléas financiers
existant en ce domaine. Il s'est interrogé sur les modalités de
remboursement de la dette de l'Etat. Il a par ailleurs relevé la baisse
tendancielle du niveau des investissements civils de l'Etat et souligné
le rôle croissant joué par les collectivités locales en ce
domaine ainsi que l'importance des investissements réalisés dans
les secteurs financés par des redevances, tels que l'eau ou les
autoroutes.
M. Philippe Adnot
a souhaité obtenir des précisions
sur le niveau réel de l'investissement et sur son mode de financement.
M. Claude Belot
a fait part de ses craintes quant à
l'augmentation permanente du niveau de la dette publique et aux risques d'une
éventuelle augmentation des taux d'intérêt dans la mesure
où ceux-ci se situaient à un niveau historiquement bas.
M. Bernard Angels
, après avoir relevé la
qualité pédagogique de la présentation du rapporteur
général, a souligné qu'il existe, en matière
budgétaire, deux politiques : une de gauche, une de droite. Il a
fait remarquer qu'à ses yeux les tableaux présentés par le
rapporteur général traduisaient l'échec des politiques
menées par les gouvernements soutenus par la majorité
sénatoriale et il a insisté sur la nécessité de
conforter la confiance des ménages. Il a regretté, à ce
titre, que l'on puisse envisager de réduire leurs revenus.
M. Jean-Philippe Lachenaud
a constaté la grande
continuité des positions exprimées par la commission, notamment
au regard de celles exposées lors du débat d'orientation
budgétaire, et a regretté l'absence de courage du gouvernement
pour réduire suffisamment la dette ainsi que le déficit public.
Il a expliqué cette situation par la volonté du gouvernement de
donner des gages à son électorat et à ses alliés
politiques. Evoquant la réforme fiscale, il s'est demandé si
celle-ci était "amorcée ou avortée" et a estimé en
tout état cause que le projet de loi de finances ne contenait pas de
dispositif fiscal favorable aux entreprises. Il a enfin fait part de sa totale
adhésion à la stratégie proposée par le rapporteur
général, tout en souhaitant que les propositions dynamiques et
courageuses de celui-ci soient encore mieux mises en évidence.
M. Paul Loridant
a tout d'abord tenu à faire part de ses
interrogations quant au caractère réaliste des hypothèses
économiques avancées par le Gouvernement et s'est
étonné que l'on puisse croire la France à l'abri de la
"bulle financière". Il s'est inquiété de l'écart
grandissant existant entre l'économie réelle et l'économie
financière.
Il a également souhaité faire part de son désaccord quant
aux analyses faites par le rapporteur général, estimant
nécessaire de relancer la production pour retrouver le chemin de la
croissance. Dans ce cadre, il a déclaré que la priorité
devrait être la relance de la consommation par l'augmentation des
salaires et la création d'emplois. Il a par ailleurs
considéré que le parallèle fait entre la
comptabilité de l'Etat et celle des collectivités locales n'est
pas pertinent, dans la mesure où l'Etat joue, par nature, à la
différence des collectivités locales, un rôle
contracyclique en matière économique. Il a également
indiqué qu'en matière de dette publique sa répartition
entre taux fixe et taux variable ou sa durée importent tout autant que
son montant, et qu'il est donc indispensable de "travailler la dette". Enfin,
à propos du mouvement d'économies proposé par le
rapporteur général, il a indiqué que la contribution
française au budget de l'Union européenne constitue certainement
un gisement potentiel d'économies budgétaires.
M. Alain Joyandet
s'est interrogé sur la nature et le montant
des actifs détenus par l'Etat et sur les modalités en fonction
desquelles ces actifs pourraient venir en compensation du passif
constitué par la dette publique. Il a par ailleurs proposé, eu
égard au poids croissant de l'endettement public, d'amplifier l'effort
d'économies préconisé par la commission.
M. Jean Clouet
s'est inquiété du montant des dettes
garanties par l'Etat et a souhaité connaître les montants des
sinistres éventuels ainsi que les chapitres budgétaires sur
lesquels ils étaient, le cas échéant, imputés.
M. Marc Massion
a souhaité obtenir des précisions
quant à la répartition faite par le rapporteur
général entre les différents types de diminution des
dépenses publiques.
Mme Marie-Claude Beaudeau
a enfin souhaité savoir si la
commission avait évalué complètement les
conséquences humaines, sociales et politiques des économies
ciblées qu'elle propose.
M. Philippe Marini
a tout d'abord remercié les commissaires
pour les contributions ainsi apportées à sa réflexion. Il
est convenu avec M. René Ballayer du caractère particulier
de la conjoncture qui entraîne un niveau exceptionnellement faible des
taux d'intérêt, tout en soulignant que cette baisse n'était
pas acquise de façon définitive.
En réponse à M. Maurice Blin, il a reconnu que la part de
l'emprunt affectée au financement des dépenses de fonctionnement
avait diminué, traduisant une amélioration relative de la
situation budgétaire de l'Etat qui s'explique par le niveau actuel de la
croissance et des recettes qu'elle engendre et par la qualité de
l'effort réalisé par les précédents gouvernements
en ce domaine.
Suite aux interventions de M. Jacques Oudin, il a indiqué qu'il
était nécessaire d'approfondir les modalités de
financement des budgets sociaux tout en soulignant la grande volatilité
du solde des régimes sociaux. Il a enfin souhaité que
l'évolution de l'investissement au cours de ces dernières
années soit mise en perspective. Il a également apporté
des précisions à M. Philippe Adnot quant au montant de
l'investissement public en 1999.
En réponse aux interventions de MM. Paul Loridant, Claude Belot et
de Mme Marie-Claude Beaudeau,
M. Philippe Marini, rapporteur
général,
a rappelé que la singularité
française en matière d'évolution de la dette publique
était de plus en plus difficile à justifier dans un monde
économique ouvert sur l'extérieur. A ce titre, il a convenu de
l'intérêt d'un débat sur cette question, notamment au
travers de l'examen du budget des charges communes. S'agissant des
interrogations de MM. Philippe Adnot, Claude Belot et Jean Clouet, quant
à la mise en place d'un bilan patrimonial de l'Etat, il a rappelé
l'intérêt de l'initiative prise par Jean Arthuis qui, lorsqu'il
était ministre de l'économie et des finances, avait mis en place
une commission sur ce sujet. Il a indiqué, dans l'attente des
résultats des travaux de cette commission, qu'il fallait obligatoirement
définir de nouveaux concepts, puis, procéder au recensement des
éléments de ce bilan, ce qui n'a encore jamais été
fait.
Evoquant le coût financier des pensions des fonctionnaires de France
Telecom, qu'il a fallu apprécier lors du changement de statut, il a
évoqué le problème des engagements de l'Etat figurant
"hors-bilan". En réponse à M. Bernard Angels, il a
indiqué qu'une des priorités actuelles du gouvernement de
M. Schröder en Allemagne consiste à baisser les impôts,
et notamment l'impôt sur le revenu. Après avoir indiqué
à M. Jean-Philippe Lachenaud qu'il tiendrait compte de ses
observations, il a reconnu, avec M. Paul Loridant, le caractère
potentiellement déstabilisateur des marchés financiers. Il a
souligné la nécessité de définir un niveau optimal
de régulation de ceux-ci et indiqué qu'il appartenait aux Etats
et aux organisations multilatérales de sécuriser ces
marchés financiers et d'en accroître la fluidité et la
transparence.
En réponse à M. Alain Joyandet, il a
précisé que l'exercice proposé par la commission pour 1999
n'était qu'une première étape consistant à
stabiliser le poids de la dette dans le PIB et qu'il serait donc
nécessaire d'inscrire une telle politique dans la durée. Il a
enfin rappelé à M. Marc Massion la répartition
proposée par la commission entre les économies ciblées et
les économies forfaitaires et souligné que l'ordonnance organique
du 2 janvier 1959 limitait de façon substantielle les
possibilités d'initiative et d'action du Parlement en matière
financière, ce dont il avait dû tenir compte lors de
l'élaboration de ses propositions.
M. Alain Lambert, président,
a confirmé la rigueur
des règles juridiques posées par l'ordonnance organique et
encadrant effectivement l'exercice de régulation budgétaire
proposé par la commission des finances. Il a rappelé
également la nécessité d'avoir une approche globale des
finances publiques et considéré que la commission des finances se
devait de conserver cette approche dans ses travaux sur l'Etat, la
sécurité sociale et les collectivités locales.
1
Voir infra. chapitre IV-IV-B-.
2
Le solde primaire résulte de la différence entre les
recettes et les dépenses, hors prise en compte de la charge de la dette
(en intérêts). Lorsque l'équilibre primaire est atteint,
l'Etat n'emprunte plus pour financer les intérêts de sa dette.
3
Voir infra chapitre III.
4
Selon la direction de la prévision, le déficit
nécessaire pour stabiliser la dette publique en 1999 est de 2,2 %
du PIB. Voir le rapport économique, social et financier (p. 144 et 145)
et " Le débat d'orientation budgétaire pour 1999 :
réduire les dépenses pour libérer l'avenir " Alain
Lambert - Sénat n° 506 1997-1998 (p 36 à 38).
5
Il s'agit des intérêts de toute la dette publique,
obtenus en rapprochant le coût moyen de cette dette (6,4 % - rapport DOB
pour 1999 p.43) à son niveau de 1998.
6
Il conviendra à cet égard de surveiller la
période complémentaire de 1998 et l'éventuelle mise
à la charge de l'exercice 1998 de dépenses à acquitter en
1999.
7
Le coût de l'accord salarial du
10 février 1998 est de 14,8 milliards de francs en 1999.
8
Exposé des motifs du code, page 16.
Traduction : Commission des finances du Sénat.
9
Cette méthode peut conduire à des soldes
conjoncturels équivalents pour des output gaps différents une
année donnée. Par exemple, on aboutit à des estimations de
solde conjoncturel très proches, de l'ordre de - 1 point de
PIB pour les années 1993 et 1998, alors que l'output gap de 1993
(- 2,5 %) est sensiblement plus dégradé que celui de
1998 (- 1,5 %).
Ce résultat, apparemment surprenant, s'explique par l'interaction des
"délais de perception" (par exemple de l'IR et de l'IS) et les positions
de l'économie dans le cycle : en 1993, l'économie
française se trouve sur une phase "descendante", l'écart de
production de dégrade. Les administrations publiques
bénéficient néanmoins de rentrées fiscales dues au
titre de l'année 1992, année pour laquelle l'écart de
production était moins dégradé. Sans aucun "délai
de perception", le solde conjoncturel en 1993 aurait été de
l'ordre de - 1,3 point de PIB.
En 1998, l'économie française se trouve sur une phase
"ascendante", l'écart de production s'améliore. Les APU
reçoivent néanmoins des rentrées fiscales "relativement
faibles" dues au titre de l'année 1997, année pour laquelle
l'écart de production était plus dégradé. Sans
aucun "délai de perception", le solde conjoncturel en 1998 aurait
été de l'ordre de - 0,8 point de PIB. Les
"délais de perception" introduisent ainsi de l'inertie au niveau de la
relation entre le solde conjoncturel et l'output gap.
10
Le chiffre était, lors de la présentation
initiale des grandes orientations en avril 1998, de 1,2 %.
11
Cette démonstration figure aux pages 101 à
107 du volume II du rapport général.
12
Charges définitives du budget de l'Etat + charge nette
temporaire
13
Ces propos ont été réitérés en
séance publique par le rapporteur général : " Il
faut raison garder et observer que l'évolution de la dépense est
maîtrisée ". JOAN 13 octobre 1998 page 6509
14
Ce mouvement résulte d'une part d'un excédent au
titre de la charge nette des opérations à caractère
définitif des comptes d'affectation spéciale (évolution de
la situation du Fonds pour le financement de l'accession à la
propriété) et d'autre part, de la diminution de la charge nette
des opérations temporaires qui approche l'équilibre
(réduction des dépenses du compte de prêt du Trésor
aux Etats étrangers, et équilibre du compte d'avances aux
collectivités locales).
15
Voir aussi la décision du 29 décembre 1994 sur la
loi de finances pour 1995
16
90,27 % contre 90,34 % dans la loi de finances pour 1998
17
Le bas niveau des taux d'intérêt et la tendance
actuelle sur cette charge peuvent laisser penser que l'estimation de
237,2 milliards de francs est assez large.
18
Lors du débat d'orientation budgétaire de juin
1998, leur nombre était de cinq...
19
Le gouvernement annonce un coût de 7,7 milliards de francs
qui inclut en réalité des cofinancements ainsi que des mesures
antérieures déjà annoncées
20
Il s'agit de la dépense "induite" de fonction publique qui
représente 717,4 milliards de francs en 1999 (+ 6,2 %).
Outre les rémunérations d'activité, les cotisations
sociales et les pensions, elle intègre les subventions à
l'enseignement privé, les pensions des anciens combattants ainsi que les
charges de personnels du budget de l'aviation civile.
21
150.000 emplois * 92.000 francs par an = 13,8 milliards
22
Lors de son audition par votre commission des finances le 14
octobre 1998, Mme le ministre de l'emploi a reconnu implicitement cet
état de fait :" Le ministre a précisé que la
dotation de 43 milliards de francs prévue pour le financement de la
ristourne dégressive sur les bas salaires en 1999 était
cohérente avec la prévision de dépenses de 41,5 milliards
de francs en 1998 ", in bulletin des commissions, n°2 page 138
23
in rapport n° 306 (1997-1998) de M. Louis Souvet sur le
projet de loi d'orientation et d'incitation à la réduction du
travail, pages 110-111
24
Elle est mesurée au travers de la RMPP (
rémunération moyenne des personnes en place) : c'est une
notion salariale qui permet d'apprécier une évolution moyenne de
la rémunération en francs constants
25
Hors fonds de concours
26
mais "seulement" 37,4 milliards de francs de mieux que
l'exécution de 1997, dont les recettes avaient été
manifestement sous-estimées. Il est possible de se demander, dès
lors, si les estimations révisées ne présentent pas une
certaine sous-évaluation des plus-values de recettes en 1998.
27
C'est-à-dire réintégration de recettes
affectées à d'autres organismes dans les recettes du budget de
l'Etat.
28
Ces 71,1 milliards de francs correspondent à
73,5 milliards de francs de suppléments de recettes dont il faut
retirer 2,4 milliards de francs d'aménagements de droits.
29
En grisé figurent les années où les
réalisations de recettes ont été supérieures aux
attentes, en blanc les années où l'on a constaté des
moins-values de recettes.
30
Cf exposé général des motifs II - Evolution
et prévision des recettes du budget général et Rapport
économique, social et financier (p 150)
31
Il faut rappeler en outre que la mise sous condition de
ressources des allocations familiales était une mesure très
récente.
32
281 voix contre 31.
33
Résolution n°120- Sénat 1997/1998
34
S'agissant du premier programme de stabilité, cette
situation peut s'expliquer. Par la suite, ce programme devenant annuel, il sera
nécessaire de faire en sorte que les débats parlementaires sur le
budget (lois de finances et débat d'orientation budgétaire) ne
soient pas en décalage -dans le temps comme sur le fond- avec la
notification du programme de stabilité.
35
EURO 1999-Rapport Sénat n°382 1997/1998. Alain
Lambert.
36
C'est-à-dire l'exigence de publications
supplémentaires avant l'émission de titres publics par l'Etat
concerné et l'invitation adressée à la BEI de revoir sa
politique de prêts à l'Etat en cause.
37
Le chiffre du poids de la dette publique française en 1999
varie selon les sources : 59,5 % pour l'OCDE ; 58,6 % pour la
Commission européenne ; 58,7 % selon le gouvernement. Ces
différences n'ont pas d'influence sur la place de la France par rapport
à ses partenaires.
38
A l'inverse, les collectivités locales dégagent un
besoin de financement lorsque leurs "ressources non financières" sont
inférieures à leurs "dépenses non financières" ou,
ce qui est équivalent, lorsque leurs "ressources financières"
sont supérieures à leurs "dépenses non financières".
39
Voir supra chapitre II, encadré p. 44.
40
Estimé schématiquement.
41
Recommandation du Conseil du 7 juillet 1997.
42
La commission des finances de l'Assemblée nationale
juge ce mouvement d'économies " inférieur à celui qui
avait prévalu lors de l'élaboration du projet de loi de finances
pour 1998 ".
43
in dossier de presse de présentation du PLF 1999, rubrique
" dépenses " page 19
44
in bulletin des commission de l'Assemblée nationale
n°19/1998 p.2431 ; le 9 septembre 1998
45
Cette préoccupation était déjà
présente lors de l'examen du projet de loi de finances pour
1998 : " les retraites de la fonction publique : une
explosion programmée ", page 54 rapport n° 85 (1997-1998)
46
Le budget de la Défense est, en raison de la programmation
militaire, intégralement "sanctuarisé"
47
Les premières indications obtenues font état d'un
taux de consommation inférieur à 15% soit moins de 450 millions
de francs au 1
er
octobre 1998
48
Les crédits concernant la partie financée par le
ministère de l'Intérieur au titre des adjoints de
sécurité seraient préservés, compte tenu du
caractère régalien de ce ministère
49
in rapport sur la Sécurité sociale, septembre 1998
50
Cf Rapport général n°85 sur le projet de loi
de finances pour 1998, tome I - M. Alain Lambert, rapporteur
général.
51 Il dénonce également le " discours construit "
généralement avancé pour justifier cette
exonération fiscale : à l'origine des prestations familiales,
l'objectif affiché par le législateur aurait été "
d'apporter aux familles un apport financier qui vise à compenser les
charges liées à l'entretien des enfants, indépendamment
des revenus dont disposent ces familles " .
Or cet argument ne tient pas pour le comité : " En
réalité, lorsque les allocations familiales ont été
exclues du champ de l'imposition, en 1927, c'est à un simple argument de
politique sociale que le législateur s'est soumis : il s'agissait de ne
pas peser financièrement sur les familles, notamment les plus modestes,
et non de respecter un principe doctrinal de définition de la notion de
ressources. En fait, les allocations familiales de base (qui
représentent 40 % des prestations familiales) ont toujours
été considérées, peut-être comme des
compensations de charges, mais avant tout comme un complément de revenu,
qualifié historiquement de sursalaire : il s'agissait bien d'un
revenu."
52
Adam Smith, Recherches sur la nature et les causes de la richesse
des nations.
53
cf. Jean-Pascal Beaufret, La fiscalité de l'assurance,
page 316.
54
Conseil d'Etat, Rapport public 1991. De la sécurité
juridique, page 31.
55
Il est à noter que parmi les pays de l'Union
européenne, seule la constitution espagnole dispose que l'un des
objectifs de la constitution est de garantir la sécurité
juridique (article 9-3 du titre préliminaire de la Constitution
espagnole du 27 décembre 1978).
56
Sauf en matière répressive en vertu de l'article 8
de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
57
Plusieurs propositions de lois constitutionnelles visent à
inscrire le principe de la non-rétroactivité des lois fiscales
dans la constitution.
58
Étant entendu qu'une loi fiscale plus favorable ne porte
pas atteinte à la sécurité juridique des contribuables.
59
Les dispositions relatives à l'impôt sur le revenu
contenues dans les lois de finances s'appliquent aux revenus de l'année,
c'est à dire aux revenus déjà perçus à la
date à laquelle la loi de finances entre en vigueur. Les dispositions
relatives à l'impôt sur les sociétés s'appliquent
aux résultats des exercices clos à compter du 31 décembre,
c'est à dire à des résultats déjà
réalisés, alors que l'entreprise ne peut plus adapter sa gestion
à la loi nouvelle.
60
Et ne privait donc pas de garanties légales une exigence
constitutionnelle. On rappelle en outre que la suppression d'une
exonération n'est pas considérée comme une sanction.
61
CJCE, 15 décembre 1987, Irlande c/Com.aff.325/85 Rec.5041
62
Conseil d'Etat, rapport public 1991, page 30
63
Le taux initialement envisagé par le gouvernement
était de 15%. Il a été porté à 20% en
première lecture à l'Assemblée nationale.
64
Joël Bourdin note dans son rapport que
"
l'année 1997 a vu la plus faible évolution globale des
taux d'imposition depuis le début des années quatre-vingt : +
1,3% en moyenne. La modération a été
générale pour tous les niveaux de collectivités.
"
65
Le montant des dotations sous enveloppe s'établissait
à 157,7 milliards de francs en 1997 et le gouvernement prévoit
163,8 milliards de francs en 1999. Sachant que l'évolution des prix (+
1,3%) conduit à une progression d'environ 2 milliards de francs, la
différence, soit 4,1 milliards, est due à la prise en compte de
la croissance.
66
Résumé publié dans le numéro de juin
1998 de
La revue du Trésor
, p. 322.
67
Il ajoute qu' "
on observe un effet stimulant analogue
de l'investissement des administrations locales sur la productivité et
l'emploi du secteur privé. Il y a là une manifestation
significative de ce qu'on appelle la `croissance endogène'
".
68
Dexia-Crédit local de France,
Les finances locales dans
les quinze pays de l'Union européenne
69
Viennent ensuite le Danemark (49%) et la Finlande (43%).
Toutefois, au Danemark, les collectivités sont totalement
maîtresses du niveau des taux, tandis qu'en Suède le taux moyen
d'imposition pour l'ensemble des collectivités locales ne doit pas
dépasser 31% et, en France, les collectivités locales sont
soumises à la règle de liaison des taux.
70
Décision n°91-298 DC du 24 juillet 1991.
71
En dépit de chiffrages gouvernementaux laissant entendre
que, sur la période 1992-1997, les ressources des collectivités
locales auraient été supérieures à ce qu'elles ont
été si la réforme s'était appliquée.
72
Groupe de travail n° 6 sur les politiques de
développement régional (DT/REG(97)10),
Les politiques
régionales dans les années 90 : réorientation vers une
recherche de la compétitivité et des partenariats avec les
niveaux infrarégionaux,
16-17 décembre 1997.
73
La présentation de ce tableau est peu orthodoxe car
elle mélange des estimations de recettes fiscales et des données
budgétaires
. Toutefois, elle ne remet pas en cause les ordres de
grandeur.
74
Le gouvernement, dans sa présentation des crédits
pour 1999, n'a pas choisi d'agréger la compensation au titre des mesures
fiscales de 1999 aux autres montants car les compensations de la réforme
de la taxe professionnelle et de la suppression de la part régionale des
droits de mutation à titre onéreux sont soit fondues, soit
appelées à l'être, dans des dotation budgétaires (la
DGF et la DGD). Toutefois, l'individualisation de ces montants dans le PLF 99
fournit une occasion de retracer le coût global des remboursements et
compensations par l'Etat aux collectivités locales.
75
Proposition de loi n° 95, annexée au
procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997, relative à
la taxe professionnelle de France Télécom,
présentée par MM. Jean-Paul DELEVOYE, Jean DELANEAU, Jean FAURE,
Paul GIROD, Gérard LARCHER, Louis ALTHAPÉ, Paul BLANC, Joël
BOURDIN, Henri COLLARD, Charles-Henri de COSSÉ-BRISSAC, Alain DUFAUT,
André DULAIT, Philippe FRANCOIS, François GERBAUD, Charles
GINÉSY, Jean-Marie GIRAULT, Georges GRUILLOT, Pierre HÉRISSON,
Daniel HOEFFEL, Jean-Paul HUGOT, Charles JOLIBOIS, Pierre LAFFITTE, Dominique
LECLERC, Marcel LESBROS, Maurice LOMBARD, Roland du LUART, René
MARQUÈS, Philippe MARINI, Georges MOULY, Jean PÉPIN, Jean PUECH,
Henri de RAINCOURT, Roger RIGAUDIÈRE, Louis-Ferdinand de ROCCA-SERRA,
Josselin de ROHAN, Jean-Pierre SCHOSTECK, Louis SOUVET et Alain VASSELLE.
76
Y compris les opérations temporaires et les
remboursements et dégrèvements d'impôts.
77
Articles 11 et 13 et article premier de l'ordonnance. A titre
d'exemple, l'arrêté du 10 juillet 1997 annule la quasi
totalité des crédits du fonds de gestion de l'espace rural alors
même que l'abondement de ce fonds avait fait l'objet de longs
débats au Parlement : l'Assemblée nationale et le Sénat
avaient "obtenu" une majoration de 150 millions de francs des
crédits correspondants.
78
L'ordonnance de 1959 dispose judicieusement, en son article 38,
que : "si aucun projet de loi de finances rectificative n'est
déposé avant le 1er juin, le Gouvernement adresse au
Parlement un rapport sur l'évolution de l'économie nationale et
des finances publiques
." Toutefois, et de pratique constante, ce
rapport est muet sur l'aspect finances publiques considérées
dans l'optique de l'exécution budgétaire.