E. AUDITION DE M. JACQUES PICHOT, DIRECTEUR GÉNÉRAL ADJOINT, CHARGÉ DES RESSOURCES HUMAINES, DU GROUPE AIR FRANCE
M.
Jacques PICHOT. - Pour introduire le sujet, il me faut dire un mot sur la
situation d'Air France aujourd'hui par rapport à la concurrence.
Ensuite, je voudrais rappeler quel est le statut et surtout celui des
personnels d'Air France, avant de venir à quelques
éléments de réflexion sur les principes et les conditions
de ce que pourrait être un service minimum ou les améliorations
que l'on pourrait apporter à un système de prévention des
conflits.
Concernant la situation concurrentielle, aujourd'hui nous sommes dans un
système qui a deux caractéristiques différentes, mais qui
conduisent un peu tous les deux à la même conclusion. Une
première caractéristique concerne le marché domestique
d'Air France, et je ne veux pas dire par là le marché national,
mais bien le marché européen, et puis on a un deuxième
marché qui a d'autres caractéristiques, mais qui est aussi
fortement concurrentiel, qui est le marché du transport aérien au
plan international. Au sein de l'union européenne, depuis avril 1997
toutes les liaisons aériennes sont ouvertes à tous les
transporteurs communautaires. La règle est là-dessus
appliquée et applicable.
Cela veut dire qu'aujourd'hui il n'y a plus de droit de trafic à
négocier et à obtenir pour les compagnies aériennes pour
effectivement se positionner sur une liaison ou une autre.
La seule restriction à ces principes, c'est celle qui a
été donnée aux autorités nationales d'imposer sur
certaines liaisons des obligations de service public pour obtenir ce qu'on
appelle un service adéquat et continu, et cela, pour des raisons
d'équilibre économique ou d'aménagement du territoire.
C'est le cas pour la desserte de la Corse et de Strasbourg. Mais ces
obligations sont étroitement encadrées dans le système
européen, elles sont sous le regard vigilant de la commission
européenne et elles ont une portée qui finalement limite fort peu
l'exercice de la concurrence au sein de l'union européenne. Voilà
pour le dispositif juridique au niveau européen.
Au plan international, nous restons sous le régime des droits de trafic
et de la négociation d'accords bilatéraux.
Ce qui est nouveau, c'est la constitution d'alliances qui ont pour principe
d'associer un transporteur européen, ou un transporteur de la zone
Amérique et un transporteur de la zone asiatique, et c'est par la
confrontation de ces différentes alliances que s'exerce plus fortement
la concurrence vis-à-vis de la clientèle. Aujourd'hui, au niveau
du dispositif juridique, nous sommes dans des conditions de concurrence tout
à fait fortes, et qui plus est, le droit de la concurrence a un gardien
vigilant en la personne de la commission européenne. Cela veut dire
qu'au-delà de ces principes juridiques, nous sommes attentifs à
des questions plus techniques qui sont la gestion des flottes, l'assistance en
escale et les problèmes posés à travers les
systèmes de réservation.
Nous sommes donc dans un contexte juridique où la concurrence se traduit
pleinement pour Air France, et cela se traduit au plan économique avec
une concurrence que l'on sent de plus en plus forte avec le transport
aérien intra communautaire. C'est vrai pour le marché domestique
français, qui était l'un des plus importants, mais c'est vrai sur
l'ensemble des liaisons européennes.
La concurrence s'exerce aussi pour l'ensemble de la communauté
européenne, pour le transport intra communautaire et aussi
international, par la constitution de grandes plates-formes de correspondance
qui sont bien sûr Francfort, Amsterdam, Londres et Roissy, où se
trouve Air France.
Donc, à la fois en termes juridiques et économiques, nous sommes
dans une situation concurrentielle qui bien entendu modifie un peu les
éléments de la réflexion qu'on peut avoir sur le principe
des conflits et du service minimum qu'on peut imposer.
Aujourd'hui, Air France vis-à-vis de ses clients est dans la situation
non pas d'avoir l'obligation de fournir à ses clients français un
accès à l'ensemble des points du globe, parce que c'est dans son
statut, mais elle est dans l'obligation d'offrir à l'ensemble de ses
clients, qu'ils soient français ou étrangers, une offre plus
diversifiée que celle de ses concurrents, une offre qui ait une
meilleure qualité de service et une meilleure ponctualité. Ce
n'est pas forcément facile à faire, mais c'est en tout cas
l'enjeu qui est devant nous, c'est par cela que se réalise la mission
d'Air France.
On a la plate-forme de correspondance de Roissy qui va monter en puissance avec
la montée en puissance et la mise en place des troisième et
quatrième pistes. Nous avons un marché qui est l'héritage
de l'histoire d'Air France, qui est le réseau point à point
à partir de la plate-forme d'Orly, et il faudra sans doute consolider
dans une alliance plus globale les alliances que nous avons déjà
avec des transporteurs aériens américains ou asiatiques.
Un mot sur le statut : Air France est aujourd'hui une société
anonyme, elle est à la veille de l'ouverture de son capital et de
l'introduction du titre en bourse, mais il est vrai que ses personnels
aujourd'hui sont sous un statut parce qu'en effet nous sommes une entreprise
publique et nous avons un statut des personnels dont les dispositions sont
rattachées au code de l'aviation civile. Ces dispositions peuvent
être bien entendu complétées par des accords contractuels
avec les organisations syndicales, comme le prévoit le code du travail
pour les entreprises publiques.
Sur ce sujet, si les membres de la commission souhaitent avoir des
éléments complémentaires, le directeur du travail à
Air France pourra apporter des compléments, mais il faut garder à
l'esprit cette dimension qui est présente au sein d'Air France.
Quelques éléments sur le service minimum parce que je n'ai pas
là-dessus des idées toutes cadrées et des propositions
toutes bouclées à faire.
Ce qui est difficile, c'est de dire aujourd'hui ce qu'attend le client du
service minimum. Et si je me réfère à ce que je disais par
rapport à la situation de concurrence dans laquelle nous nous trouvons,
je dirais que le client d'Air France aujourd'hui souhaite plutôt un
service maximum, c'est-à-dire qu'il souhaite voir exécuté
la totalité du contrat passé avec lui et il nous fait sentir que
si nous ne sommes pas capables de lui assurer le contrat dans les conditions
correctes, il a la possibilité de trouver une offre ailleurs et une
prestation meilleure.
C'est un point que nous devons prendre en compte. C'est un enseignement de la
grève du mois de juin. Il est clair qu'au niveau du transport
aérien sur le territoire national et le territoire communautaire,
d'autres compagnies ont offert des offres qui ont permis aux clients de trouver
le produit qu'ils recherchaient et sur le transport international, le client
français aujourd'hui peut tout à fait par liaison avoir
accès aux plates-formes de correspondance de Francfort ou Londres.
Il y a là une petite difficulté. En fait, comment le client
percevrait-il l'idée de service minimum appliqué à une
entreprise qui est dans un monde totalement concurrentiel ?
Autre point : la difficulté de définir un service minimum
efficace, c'est qu'il s'agit de concilier deux droits constitutionnels et,
partant de là, le service minimum est ciblé sur certaines
catégories de personnel, en général celles qui sont
plutôt dans les missions de temps réel, c'est-à-dire des
gens qui sont capables de bloquer un système dès qu'il
s'arrête. Toutes les catégories de personnel d'Air France à
l'évidence ne relèveraient pas du service minimum. Il est
difficile de l'appliquer à des catégories qui ne sont pas en
contact direct avec la clientèle.
En clair, on voit bien que le service minimum, on aurait plutôt tendance
à l'appliquer aux pilotes, et c'est plus compliqué de l'appliquer
aux services commerciaux ou au service de l'entretien ou de l'escale.
Ce qu'il est important de noter, c'est que finalement, quand un préavis
est déposé, le transporteur (Air France le fait et d'autres
transporteurs aussi) se trouve devant une double obligation : d'abord
prévenir ses clients, et, compte tenu de cette intention
déclarée de conflit, reconstituer le programme de vols ou de
transports réalisables et donc de faire un choix compte tenu de ce que
la direction pense être le niveau du conflit et dire quels sont les
programmes de vols qui vont être exécutés.
Derrière cela, l'interrogation est : le service minimum ne va-t-il pas
obliger le transporteur à faire un programme plus réduit que ce
qu'il aurait fait sans le service minimum ? C'est un argument auquel il
n'est pas forcément simple de répondre. Mais il n'est pas simple
de répondre non plus quand il y a conflit sur le niveau du programme
qu'on maintient en fonction de l'intention déclarée du conflit.
Bien sûr, par rapport à des situations qu'Air France a pu
connaître dans un passé récent, nous avons cherché
à voir comment remédier à la question ainsi posée.
Et nous avons dans des accords récents, et en particulier dans l'accord
global pluriannuel passé avec le principal syndicat de pilotes,
contractualisé un engagement de prévention des conflits.
Nous l'avons fait également dans l'accord que nous avons passé
sur l'aménagement du temps de travail, l'emploi et la politique
salariale, avec les personnels au sol. Les clauses sont différentes
concernant le sol et les personnels navigants.
Sans doute aussi parce que la composition syndicale n'est pas la même
dans le cas des personnels navigants techniques ; nous avions en face de nous
un syndicat très largement représentatif et plus que majoritaire
dans la profession, et nous pourrions considérer que dès lors que
nous avons un dispositif de prévention de conflit contractualisé,
l'ensemble de la profession était engagé, et en même temps
nous avions un signataire capable de tenir son engagement.
Dans le cas des personnels au sol, la représentation syndicale est
beaucoup plus diversifiée et il est un peu plus difficile dans ce
cas-là d'arriver à avoir des clauses de prévention
contractuelle plus élaborées et surtout qui puissent
répondre à l'objectif de prévention assigné.
Sur les personnels navigants techniques, nous avons établi un dispositif
qui nous permet de disposer de trois mois pour, après l'identification
du conflit, mettre en place un dispositif, pour rechercher une solution au
problème identifié et pour l'adopter ensemble au bout de ces
trois mois. Evidemment, quel que soit le système de prévention,
si au bout des trois mois les problèmes n'ont pas été
résolus, on se retrouve dans le cadre légal que chacun
connaît, soit dans un contentieux devant les instances juridiques, soit
dans une situation de conflit. Mais on voit bien que le temps qui est devant
nous et le cadre dans lequel se situe cet instrument de prévention nous
donnent quand même une petite chance d'arriver à résoudre
ces problèmes avant d'en arriver à une situation conflictuelle.
Sur le sol, la clause est plus faible puisqu'il s'agit d'un engagement de
recourir à la concertation pour rechercher les solutions propres
à éliminer les conflits, et ce dans l'objectif
réaffirmé, mais qui celui-là est commun aux deux cas,
d'éviter tous les effets préjudiciables à la fois à
la continuité du service rendu au client et à l'image de
l'entreprise.
Il faut trouver sans doute le bon curseur concernant la prévention des
conflits.
M. Claude HURIET, rapporteur. - En écoutant l'exposé de M.
Pichot, je me demande si vous pouvez entrer encore dans le champ de la
réflexion de la commission des affaires sociales. Non seulement le
statut juridique d'Air France a changé, mais en outre la situation de
monopole n'existe plus, et depuis longtemps. La question fondamentale que je me
pose concernant la continuité du service, elle peut être
résolue dans le contexte concurrentiel que vous avez
évoqué. Alors, au fond, je me demande si j'ai eu tort ou raison
de vous demander de participer à ces auditions publiques.
Vous avez parlé au début de votre intervention en évoquant
le service minimum que l'on peut imposer. J'aimerais que vous reveniez sur
cette phrase.
Et enfin le délai de trois mois a une durée assez exceptionnelle.
Mais je ne vois pas bien comment il se situe dans les dispositions de
prévention des conflits. Je ne sais pas si on est dans le domaine de la
prévention se rapprochant du dispositif type RATP ou si cela correspond
à un préavis prolongé. A quelle phase du dialogue se
réfère cette période de trois mois ?
M. Jacques PICHOT. - Je comprends votre interrogation sur un premier point et
cela ne me choque pas. A partir du moment où on est dans une situation
très concurrentielle, l'exercice du service minimum n'a pas tout
à fait la même signification et, à la limite, il peut
être rendu par les concurrents. Je m'en remets à la sagesse de la
commission sur ce point. Il est évident que c'est une question qu'il
faut se poser par rapport au champ des travaux que vous menez.
Sur le service minimum imposé, il faut savoir quel cadre on donne au
service minimum. Par définition, la loi est une obligation. Il peut y
avoir des dispositifs complémentaires en matière de service
minimum, qui eux peuvent être négociés au sein des
entreprises ou des organismes concernés. Il est quelquefois difficile de
définir la totalité des modalités d'exercice du service
minimum au niveau de la loi. Il y a sûrement un partage à faire et
le mot imposé doit sans doute faire l'objet d'une réflexion. Je
ne suis pas forcément très habile sur le sujet parce que je ne
connais pas toute la dimension des complexités juridiques.
M. Claude HURIET, rapporteur. - En matière de transport terrestre, j'ai
acquis rapidement la conviction que si la RATP avait un service minimum, ce
serait conduire à l'embolie du réseau, en caricaturant. En
revanche, pour le transport aérien, est-ce que la
référence à un service minimum peut éviter le
risque que si on fait rouler deux trains sur trois, c'est une pagaille qui
risque de mettre en cause la qualité du service, mais aussi la
sécurité des usagers. Pour vous, le service minimum peut
être conçu autrement et n'est pas assimilable au transport
terrestre ?
M. Jacques PICHOT. - Je vais rester dans l'aérien, mais je vais sortir
d'Air France. Nous avons un prestataire de service, qui n'est pas tout à
fait dans le même cas que nous, et qui sont les services de la navigation
aérienne, qui sont soumis à une obligation de service minimum.
Il est clair qu'aujourd'hui le fait de s'en tenir au service minimum tel qu'il
est défini limite extrêmement les possibilités
d'organisation de vols. En fait, on privilégie la continuité
territoriale et un certain nombre de liaisons obligatoires. Mais une
application stricte de ce que définit la loi à partir du service
minimum doit ramener le nombre de vols à 10 % à peine.
L'application stricte du service minimum légal est une perte pour Air
France d'environ 100 millions de francs par jour. Pour le coup, le service
minimum n'apporte pas la réponse économique au problème
qui est posé.
Je suis un peu plus mal à l'aise pour faire la comparaison avec les
transports terrestres parce que bien entendu on voit bien que dans le cadre de
la RATP, on a des problèmes de pointe de trafic avec des allers et
retours, et si le service n'est pas maximum aux heures de pointe, on est dans
une situation difficile. Le parallèle est sans doute plus difficile
à faire avec la navigation aérienne, mais cela reste très
pénalisant.
Le troisième point évoqué concerne notre accord global
pluriannuel et la clause de prévention à trois mois. Il est vrai
que nous avons un délai qui peut paraître important et je me
garderais bien de dire qu'il est généralisable. En
réalité, cet accord est un accord triennal. Nous nous sommes
engagés sur l'ensemble des sujets qui concernent la profession à
prendre un certain nombre de dispositions qui sont datées au cours de
ces trois ans, ou à étudier un certain nombre de choses qui
pouvaient poser problème pour les faire progresser. Et nous nous situons
dans le cadre d'un accord pluriannuel, avec une capacité à dire
que s'il y a problème, nous voyons.
Nous en sommes arrivés aux trois ans parce qu'il existe un comité
de suivi qui est prévu se réunir tous les deux mois. Nous avons
considéré que quand une difficulté surgissait, le mieux
était de l'identifier de part et d'autre et d'en parler à un
premier comité de suivi et ensuite, à la séance suivante,
trancher et prendre une décision d'un commun accord entre les parties.
Nous en sommes arrivés à ce délai de trois mois, mais
c'est une construction tout à fait pragmatique. Je ne dirais pas que
cela a valeur d'exemple en la matière.
Les problèmes qui se posent en termes de sécurité de la
profession des pilotes sont suffisamment compliqués pour qu'on puisse
les étudier un peu plus que 48 heures avant de prendre une
décision. C'est sans doute pour cela que nous avons fini par nous
accorder sur ce terme.
M. André JOURDAIN. - Pendant cette période de trois mois, il
n'est pas fait éventuellement appel à un médiateur ?
M. Jacques PICHOT. - C'est quelque chose qu'on a envisagé et que nous
avons écarté parce qu'il nous a semblé que si nous
définissions a priori qu'il y aurait recours à médiateur,
c'était une invitation à y recourir systématiquement. Le
médiateur fait partie dans notre esprit des moyens qui peuvent nous
permettre de résoudre la difficulté dans le délai imparti,
mais ce n'est pas un moyen automatique ni systématique.
M. Philippe NOGRIX. - Dans le passé, vous avez connu un
médiateur, pensez-vous qu'il pouvait intervenir avant la grève,
entre le préavis et le déclenchement de la grève ? Et
maintenant que vous êtes bénéficiaires d'une prestation de
service public à travers les aiguilleurs du ciel notamment, estimez-vous
qu'une entreprise peut revendiquer le droit d'intervenir avant le conflit,
c'est-à-dire en tant qu'intervenant dans la discussion et la
négociation ou doit-elle être complètement absente de cette
négociation ?
M. Jacques PICHOT. - Sur le service public ?
M. Philippe NOGRIX. - Oui.
M. Jacques PICHOT. - C'est toujours délicat d'intervenir dans la gestion
d'un organisme extérieur. Bien entendu, quand nous sommes en face de
cette difficulté, en général nous essayons de faire valoir
les inconvénients que peuvent poser un conflit et nous essayons
d'attirer l'attention sur les risques économiques que cela fait encourir
à l'entreprise.
M. Philippe NOGRIX. - Et cela vous arrangerait que ce soit légal ?
M. Jacques PICHOT. - Cela fait partie de la pression naturelle des choses. Mais
pour ne pas être désagréable à l'égard du
service public de la navigation aérienne, il est parfaitement normal que
nos clients fassent savoir que les interruptions de service ou défauts
de ponctualité ou toutes formes de mouvement social qui perturbent le
service rendu sont inadmissibles. C'est le droit du client de le faire savoir.
Ces choses-là, il ne les vit pas bien et il faut que l'entreprise et ses
responsables, mais aussi ses personnels à travers les organisations
syndicales trouvent le moyen d'apporter des solutions sans recourir à
des conflits répétitifs ou larvés.
M. Philippe NOGRIX. - Vous avez vécu les deux situations, celle d'un
service public et maintenant vous vivez celle d'une entreprise commerciale.
Pensez-vous qu'on peut imposer légalement la présence du client
dans la négociation ?
M. Jacques PICHOT. - Je pense que cela n'est pas nécessaire. Le client
est évidemment une pression qui doit être identifiée par
les parties, mais je ne pense pas qu'il faille l'introduire dans la discussion.
En tout cas, ce n'est pas la demande que ferait Air France si la question lui
était posée.
Dans le système de la navigation aérienne, il y a le service
minimum, mais il y a aussi des accords triennaux passés avec la
profession, notamment des contrôleurs aériens.
M. Martial TAUGOURDEAU. - Jusqu'ici personne n'a répondu aux questions
sur le service minimum. Vous, c'est la concurrence qui est le frein au service
minimum. Les autres organisations syndicales nous ont fait des propositions
avant d'en arriver au service minimum pour empêcher d'avoir recours au
service minimum. Je pense qu'on n'aura pas de solution venant des organismes
syndicaux quant au service minimum. Nous n'avons eu aucune proposition.
Un seul service minimum existe, c'est dans le domaine de la santé parce
que tout le monde est intéressé, même ceux qui font la
grève, parce que s'ils sont malades, ils veulent quand même qu'on
s'occupe d'eux. On n'admet pas la grève pour ceux qui soignent, mais eux
l'admettent seulement parce qu'ils estiment que la vie des clients n'est pas en
danger. C'est la grande différence.
Chez vous, c'est la concurrence, et le dispositif de trois mois vous permettra
j'espère d'éviter les grèves et la grande pagaille qui
s'ensuit, mais qui n'est jamais mortelle cependant.
M. Jacques PICHOT. - Nous ne sommes pas passés loin quand même.
M. Martial TAUGOURDEAU. - Oui, cela peut être mortel pour l'entreprise,
mais pas pour l'individu, alors que dans les services de santé, la vie
de l'individu est en danger. Et je pense qu'il est plus facile que tout le
monde admette un service minimum à l'hôpital, alors qu'à la
SNCF, personne ne l'admet.
M. Claude HURIET, rapporteur. - Le service minimum est inscrit dans la loi pour
les contrôleurs aériens et la télévision.
M. Martial TAUGOURDEAU. - Le défaut de la cuirasse, ce sont les
aiguilleurs. C'est un organisme à côté qui vous
empêchera de faire jouer la concurrence jusqu'au bout parce que lui n'a
pas de concurrent. Et vos concurrents sont à la merci des aiguilleurs.
M. Jacques PICHOT. - Nous sommes aussi à la merci des aiguilleurs des
autres pays. Par contre, il est vrai qu'il y a des motifs d'obligation forte, y
compris d'ailleurs dans les services de la navigation aérienne, et les
vols sanitaires font partie du service minimum et l'exécution des vols
sanitaires n'a jamais posé de problème.
M. Philippe NOGRIX. - Le service minimum dans le service de santé n'est
pas un service minimum. Toute personne se présentant à
l'hôpital, on l'accepte. Par contre, à la SNCF, en cas de
régime minimum on n'acceptera pas toute personne se présentant
à la gare.
M. Jean DELANEAU, président. - Le directeur d'un centre hospitalier a un
droit de réquisition sur le personnel aussi parce que c'est lui qui est
responsable finalement.
M. Claude HURIET, rapporteur. - Les obligations de service public d'Air France
dans son statut actuel concernent toujours la Corse et Strasbourg ?
M. Jacques PICHOT. - Oui.
M. Jean DELANEAU, président. - Merci.