B. L'OUVERTURE DU MARCHÉ À LA CONCURRENCE EUROPÉENNE
•
En application du principe de la
libre prestation de services
, le projet
de loi ouvre aux ressortissants européens (personnes physiques ou
personnes morales) qui exercent à titre permanent l'activité de
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques dans leur pays
d'origine, la possibilité d'accomplir cette activité
professionnelle en France
à titre occasionnel
, sous
réserve d'une déclaration préalable au conseil des ventes.
Celui-ci sera chargé de vérifier que les intéressés
remplissent les conditions requises pour cette activité occasionnelle,
à savoir une condition de qualification identique à celle
exigée des sociétés de ventes (diplôme de
commissaire-priseur ou titre équivalent), ainsi que la justification
d'un établissement dans le pays d'origine et de
" garanties de
moralité professionnelle et personnelle "
(
article 23
).
Les ressortissants européens devront respecter l'ensemble de la
réglementation française à l'occasion de leur
activité occasionnelle en France (
article 24
). Le conseil des
ventes aura à leur égard un pouvoir de sanction disciplinaire
allant jusqu'à l'interdiction définitive d'exercer leur
activité en France (
article 25
).
• D'autre part, un ressortissant européen pourra également
s'installer en France pour pratiquer l'activité de ventes volontaires de
meubles aux enchères publiques à titre permanent, au titre de la
liberté d'établissement
, mais il devra alors, comme un
ressortissant français, constituer une société de ventes
remplissant les conditions prévues par le projet de loi.
• Il convient cependant de souligner que " l'ouverture " du
marché au titre de la libre prestation de services ne concernera que les
seuls ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne
ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique
européen, et non l'ensemble des ressortissants étrangers.
C. LA SUPPRESSION DU MONOPOLE DES COMMISSAIRES-PRISEURS EN MATIÈRE DE VENTES VOLONTAIRES ET LEUR INDEMNISATION
1. Un monopole désormais réduit aux seules ventes judiciaires
L'exercice de l'activité de ventes volontaires par des
sociétés de forme commerciale et l'ouverture à la
concurrence européenne entraînent la suppression du monopole des
commissaires-priseurs et de leur statut d'officier ministériel pour
cette activité.
En revanche, pour ce qui concerne les
ventes judiciaires
,
définies comme "
les ventes de meubles aux enchères
publiques prescrites par la loi ou par décision de justice
",
les commissaires-priseurs conserveront leur monopole et leur statut d'officier
ministériel dans les conditions définies par les textes actuels
(
article 26
). L'activité de leurs offices étant
désormais réduite au seul secteur judiciaire, leurs titulaires
prendront le nouveau titre de "
commissaires-priseurs
judiciaires
"
27(
*
)
.
Cependant, la portée de leur
droit de présentation
sera
également réduite à la seule part judiciaire de leur
activité et sa valeur patrimoniale subira donc une importante
dépréciation.
2. L'indemnisation prévue
Le
projet de loi prévoit l'indemnisation des commissaires-priseurs en
raison du préjudice subi du fait de cette dépréciation de
leur droit de présentation (
article 35
).
Il fixe le montant de ce préjudice à
50 % de la valeur de
l'office limitée à l'activité de ventes volontaires
(éventuellement modulable de plus ou moins 15 % en fonction de la
situation particulière de chaque office) (
article 37
).
La fixation d'un abattement sur la valeur de l'office peut être
justifiée par le fait que les commissaires-priseurs, s'ils le
souhaitent, pourront continuer à exercer leur activité de ventes
volontaires dans le cadre d'une société constituée
à cet effet et conserveront donc dans ce domaine un
"
fonds
de commerce
"
qui n'est pas sans valeur.
Cependant, force est de constater qu'aucune justification précise n'est
apportée quant au choix du quantum retenu pour cet abattement.
L'article 36
prévoit des modalités de calcul (assez
complexes) pour évaluer la valeur des offices, à partir des
critères de la recette nette moyenne et du solde moyen d'exploitation et
non plus à partir du critère traditionnel du produit demi-net
retenu par le projet de loi présenté par
M. Jacques Toubon, qui tendait pour sa part à l'indemnisation
de l'intégralité de la valeur de l'office.
Sur la base d'une indemnisation de 50 % de la valeur des offices
déterminée selon les modalités prévues à
l'article 36, le montant global de l'indemnisation des
commissaires-priseurs est évalué à 443 millions de
francs par l'étude d'impact réalisée par le
Gouvernement
28(
*
)
.
Une commission nationale sera chargée de déterminer au cas par
cas le montant des indemnités allouées (
article 43
).
Leur financement sera assuré par la perception pendant 5 ans d'une
nouvelle
taxe
de 1 % sur le prix des adjudications, acquittée par
les acheteurs (
article 40
) et destinée à alimenter le
fonds d'indemnisation
institué par l'
article 39
.
Pour leur part, les huissiers de justice et les notaires ne seront
indemnisés que s'ils apportent la preuve d'avoir subi "
un
préjudice anormal et spécial
" du fait de la loi
(
article 38
), le montant global de cette indemnisation étant
évalué à 7 millions de francs par l'étude
d'impact.
Enfin, le projet de loi comporte un certain nombre de
dispositions diverses
et transitoires
concernant notamment la situation des
personnels des
études
de commissaires-priseurs (
articles 44 et 45
), les
possibilités de reconversion offertes aux commissaires-priseurs qui
souhaitent quitter la profession (
article 49
), le
maintien des
régimes particuliers
concernant les ventes en gros, les ventes
domaniales et les ventes des douanes (
article 52
), l'exercice par l'Etat
de son
droit de préemption
(
articles 53 et 54
), ainsi que
la
compétence des juridictions civiles
en matière de
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques (
article
55
). Une
période transitoire de deux ans
est prévue
pour laisser aux commissaires-priseurs le temps de s'adapter à la
réforme (
article 48
).