III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS
A. CONSTATER LE CARACTÈRE PARTIEL DE LA RÉFORME
Le
projet de loi renforçant la protection de la présomption
d'innocence et les droits des victimes tend une nouvelle fois à
réformer notre procédure pénale, en ajoutant de nouvelles
procédures, en renforçant des droits. Cette sédimentation
progressive ne pourra se poursuivre indéfiniment.
La procédure pénale française tend ainsi à devenir
plus complexe, plus lourde, sans qu'une réflexion globale soit
entreprise, qui pourrait permettre de redéfinir
l'intégralité de notre système au moment d'entrer dans le
vingt-et-unième siècle. Le législateur, il y a quelques
années, a su mettre en oeuvre une réforme intégrale du
code pénal. Assemblée nationale et Sénat sont parvenus
à un consensus sur ce sujet et l'on s'accorde à penser que le
résultat obtenu n'est pas médiocre.
N'est-il pas temps d'entreprendre la même démarche en
matière de procédure pénale, le code actuel datant de
1958 ?
Les réformes récentes, qui ont eu le plus souvent pour objet
-à juste titre- de renforcer les droits de la défense, ont en
même temps affaibli la cohérence de notre système faute
d'une réflexion sur l'ensemble de la matière. Le présent
projet de loi n'échappe pas à cette critique.
Il est par exemple possible de s'interroger sur la signification de la
création d'un juge de la détention provisoire. S'agit-il d'un
juge dont on espère qu'il se verra progressivement confier un nombre
croissant de fonctions juridictionnelles qui le conduiraient à devenir
le "
juge de l'instruction
" ? S'agit-il simplement, de
manière isolée, de séparer l'instruction de la mise en
détention provisoire, compte tenu du caractère gravement
attentatoire à la liberté individuelle de cette mesure ?
Par ailleurs, il convient de noter que l'essentiel de ce projet de loi ne
concerne que les affaires pénales donnant lieu à une information
judiciaire, soit 7 % des affaires environ. 93 % des affaires donnent lieu
à des procédures rapides telles que la comparution
immédiate.
En définitive, votre commission considère que l'on
n'échappera pas à une réflexion globale sur la
procédure pénale qui devrait être celle de la France au
vingt-et-unième siècle. Le Sénat et sa commission des Lois
sont disponibles pour engager ce travail et y consacrer le temps qui sera
nécessaire, afin de redonner à la procédure pénale
une cohérence nécessaire à son fonctionnement
.