Projet de loi sur l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires

LEGRAND (Jean-François)

RAPPORT 430 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES

Table des matières




N° 430

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 16 juin 1999

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi, MODIFIÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, portant création de l' Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires ,

Par M. Jean-François LE GRAND,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Xavier Dugoin, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Bernard Murat, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Henri Weber.

Voir les numéros :

Sénat
: Première lecture : 8, 204 , et T.A. 71 (1998-1999).

Deuxième lecture : 358 (1998-1999).

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1399, 1502 et T.A. 309 .


Environnement.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi qui nous est soumis en deuxième lecture résulte d'un engagement pris par le ministre chargé de l'aviation civile lors de l'annonce, le 23 septembre 1997, du lancement des travaux pour la construction des deux nouvelles pistes sur l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle. Le Gouvernement s'engageait à cette date dans la voie tracée par la mission Douffiagues, à laquelle votre rapporteur a eu l'honneur d'appartenir : celle de la création d'une autorité indépendante pour contrôler les nuisances sonores, préalable apparu comme nécessaire au développement du trafic aérien.

Le texte présenté par le Gouvernement avait été corrigé et enrichi par votre Haute Assemblée lors de la première lecture : l'indépendance et les pouvoirs de l'Autorité avaient été renforcés, son action coordonnée avec celle des acteurs déjà en place -notamment les commissions consultatives de l'environnement- et un volet urbanistique avait été inséré, sur proposition de votre rapporteur, pour améliorer l'information des riverains potentiels des aéroports et doter l'administration d'outils préventifs en cas d'extension ou de création de plans d'exposition au bruit, pour éviter que ne s'accroisse le nombre de personnes susceptibles d'être exposées aux nuisances sonores.

Tout en rendant hommage au travail du Sénat, l'Assemblée nationale, si elle a conservé de nombreux apports de votre Haute Assemblée -et notamment le principe d'un volet urbanistique-, a sensiblement modifié le texte aujourd'hui à nouveau soumis à l'examen de votre commission. En particulier, le mode de nomination des membres de l'autorité a été revu, ses pouvoirs ont été renforcés, le rôle et la composition des commissions consultatives changées. De plus, les articles intéressant le droit de l'urbanisme ont été modifiés.

Votre rapporteur, après avoir rappelé succinctement les positions respectives des deux assemblées en première lecture, vous proposera ensuite, dans le cadre d'un dialogue qui se veut constructif avec l'Assemblée nationale, d'adopter le texte du projet de loi avec un certain nombre de modifications.

I. RAPPEL DE LA POSITION DU SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

Un accord de principe

En première lecture, le Sénat avait estimé que la création de cette nouvelle autorité indépendante, attendue par l'ensemble des parties concernées depuis que la mission Douffiagues l'avait proposée en 1996, était nécessaire à la pérennité et à la qualité de la concertation autour des aéroports, en vue de mieux maîtriser les nuisances sonores. La Haute Assemblée avait donc manifesté son accord sur le principe du texte qui lui était soumis.

Une volonté d'instituer une autorité morale plus qu'un organisme coercitif

Le Sénat était conscient du fait que les pouvoirs qui seraient conférés à la nouvelle autorité seraient moins étendus que ceux d'autres autorités administratives indépendantes (le CSA, la COB, l'ART, ou la future Commission de la régulation de l'électricité 1( * ) ...) qui disposent d'un éventail de pouvoirs allant d'un pouvoir réglementaire d'application à la délivrance d'autorisations individuelles pour l'attribution de licences, à l'arbitrage ou à la sanction administrative.

En effet, les missions dévolues en première lecture par le Sénat à la nouvelle autorité (information, conciliation, garantie de la fiabilité des mesures du bruit...), semblaient répondre aux attentes des différents acteurs de voir mis en place un tiers objectif, à l'autorité morale incontestable.

Pour autant, le Sénat avait renforcé, dans le cadre des pouvoirs de médiation qu'il lui avait dévolus, les compétences de cet organisme, en adoptant des amendements accroissant ses missions :

- d'information des riverains ;

- de recommandation aux pouvoirs publics ;

- de conciliation entre les parties en cas de désaccord sur l'application d'engagements définis dans les " chartes de maîtrise de l'environnement sonore ".

Afin d'insister sur le renforcement de ce rôle de médiation et de conciliation, le Sénat avait supprimé les termes, trop restrictifs, de " contrôle technique " dans le nom de l'autorité, pour faire de cette dernière " l'Autorité de régulation et de contrôle de l'environnement sonore aéroportuaire " (ARCESA).

Un souci d'améliorer le fonctionnement de l'autorité et d'accroître ses garanties d'indépendance

Le Sénat avait clarifié le mode de nomination des membres de l'Autorité. Pour renforcer les garanties d'indépendance de celle-ci, il avait adopté des amendements inscrivant dans le texte de loi des dispositions qui existent pour certaines autres autorités indépendantes comme le CSA, l'ART ou la CNIL :

- une incompatibilité du statut de membre de l'autorité avec la détention d'intérêts dans une entreprise aéronautique ;

- une limite d'âge (65 ans) pour être nommé ;

- des dispositions précisant le montant du traitement des membres, comme c'est le cas pour les autres autorités ;

- un statut et une obligation de confidentialité pour le personnel.

Le Sénat avait voulu une autorité forte, incontestée, impartiale, disposant des moyens de son indépendance et constituée de membres exerçant leur activité à plein temps.

Dans un souci d'efficacité, le Sénat avait adopté des amendements pour mieux coordonner les actions respectives de l'autorité et des commissions consultatives de l'environnement, ce qui lui paraissait d'autant plus important que ces dernières avaient vu leur rôle et leurs moyens renforcés par le Sénat, à l'article 2 du projet de loi, dans le respect, toutefois, des prérogatives dévolues à l'autorité. En particulier, le Sénat avait imposé que les commissions se réunissent au moins une fois par an.

Un impératif : la prise en compte des problèmes de santé humaine.

Le Sénat avait introduit, au sein de l'autorité, une personne qualifiée en matière de santé humaine , à côté des experts en matière acoustique et aéronautique.

Une volonté : maîtriser l'urbanisme et mieux informer les riverains.

Sur proposition de votre commission, le Sénat avait adopté en première lecture trois articles additionnels dont deux reprenaient les dispositions d'une proposition de loi 2( * ) déposée par votre rapporteur, tendant à :

- informer clairement les riverains potentiels, à peine de nullité du contrat de vente ou de location, lorsqu'un bien immobilier qu'ils s'apprêtent à louer ou à acheter est situé dans un plan d'exposition au bruit ;

- étendre cette obligation d'information au-delà du plan d'exposition au bruit (jusqu'à la courbe isopsophique 69) , sous peine de s'exposer au versement de dommages et intérêts ;

- instaurer une procédure conservatoire en matière de droit de l'urbanisme, pour éviter que ne soient construites les zones susceptibles d'être incluses, à court terme, à l'intérieur du périmètre d'un plan d'exposition au bruit en cours de révision ou d'élaboration.

Les principaux amendements de première lecture de votre Haute Assemblée sont résumés dans l'encadré ci-dessous :

AMENDEMENTS DE PREMIÈRE LECTURE DU SÉNAT

- le titre du projet de loi a été modifié pour tenir compte du nouveau nom de l'autorité (Autorité de régulation et de contrôle de l'environnement sonore aéroportuaire) ;

- la mission générale de l'autorité a été définie dès le premier article, créant cet organe, et un délai de six mois après la promulgation de la loi a été imposé pour la mise en place de l'autorité ;

- le mode de nomination des membres de l'autorité a été précisé, en confiant au Parlement la nomination de deux membres et à un décret du Président de la République celle des cinq autres membres, dont le Président et les quatre experts. Concernant la qualification de ces membres, le Sénat a introduit, parmi les experts, un expert en santé humaine. Pour renforcer l'indépendance de l'autorité, le Sénat a introduit une incompatibilité supplémentaire liée à la détention, directe ou indirecte, d'intérêts dans une entreprise de secteur de l'aéronautique, une limite d'âge de 65 ans pour la nomination des membres, la précision du montant du traitement de ses membres et une obligation de confidentialité incombant au personnel.

- le pouvoir de recommandation concernant les mesures du bruit sur tous les aéroports a été étendu à la mesure des nuisances sonores occasionnées par l'ensemble des activités aéroportuaires et à la définition des indices de mesure ;

- la fonction de " contrôle du respect des engagements pris " sur les neuf principaux aéroports a été transformée en fonction " d'évaluation " d'engagements qui n'ont pas de valeur juridique (chartes de l'environnement sonore ), l'autorité devant rendre publics les résultats de l'évaluation ;

- la mission d'évaluation a été accompagnée, en cas de désaccord sur l'exécution des engagements, d'un pouvoir de médiation et de conciliation entre les parties, conféré à l'autorité ;

- la mission de diffusion des informations sur les données recueillies par les réseaux de mesure du bruit a été étendue et précisée.

- dans un but de coordination des rôles entre l'autorité et les commissions consultatives de l'environnement, le Sénat a précisé que, dans le cadre de sa mission de recommandation, l'autorité indépendante pouvait être saisie par ces commissions, d'autre part, que ces commissions doivent transmettre leurs propres recommandations à l'autorité. Le Sénat a, en outre, confié aux commissions consultatives de l'environnement une mission de coordination de la mise en oeuvre des chartes de l'environnement sonore ;

- pour les dispositions relatives au trafic d'hélicoptères , le ministre s'est vu confier, par décret, un pouvoir de limitation au cas par cas du trafic ;

- en matière de droit de l'urbanisme , trois articles additionnels, correspondant au texte d'une proposition de loi déposée par votre rapporteur, ont été introduits par le Sénat :

. L'article 5 (nouveau) obligeant le vendeur ou le bailleur d'un bien immobilier situé dans le périmètre d'un plan d'exposition au bruit à stipuler explicitement , dans le contrat de vente ou de location, la zone de bruit dans laquelle est situé le bien, sous peine de nullité de l'acte ;

. L'article 6 (nouveau) créant la même obligation pour les biens immobiliers situés dans un rayon élargi par rapport au plan d'exposition au bruit ;

. L'article 7 (nouveau) permettant d'anticiper une révision en cours de ce plan en prévoyant que le préfet puisse, pour une durée maximale de deux ans, étendre aux zones incluses dans le projet de plan, les prescriptions d'urbanisme applicables à la zone C.

II. LES MODIFICATIONS INTRODUITES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, le 12 mai dernier, l'Assemblée nationale a introduit les modifications suivantes :

A l'article 1 er (Autorité de contrôle de l'environnement sonore aéroportuaire)

- l'Assemblée nationale a modifié la dénomination de l'autorité, (devenue ACNUSA : Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires), en proposant un compromis entre la rédaction initiale, dont le Sénat avait souligné qu'elle était trop restrictive, et celle adoptée par la Haute-Assemblée en première lecture ;

- l'alinéa général de définition des missions de l'Autorité , introduit par le Sénat, a été supprimé, sauf la mention du délai de création de l'autorité (six mois), à compter de la promulgation de la loi ;

- le mode de désignation des membres a été modifié : si l'Assemblée nationale a souhaité conserver certains apports du Sénat (nomination par les présidents des assemblées sans " confirmation " ultérieure nécessaire par décret ; présence d'un expert en santé humaine ; limite d'âge de 65 ans pour la nomination), en revanche, elle a supprimé l'intervention du Président de la République pour prendre le décret de nomination et conditionné la nomination des experts à une proposition de chaque ministre compétent, confirmée par un décret du Premier ministre ; elle a ajouté un membre compétent en matière d'urbanisme et abaissé de deux à un le nombre d'experts aéronautiques ; elle a indiqué que seul le Président exercerait ses fonctions à plein temps ;

- les dispositions introduites par le Sénat sur la démission éventuelle des membres ont été complétées ;

- les règles de quorum introduites par le Sénat ont été précisées ;

- la définition de la rémunération des membres a été remplacée par une simple indemnisation, renvoyée à un arrêté, compte tenu du fait qu'hormis le Président, l'Assemblée nationale a souhaité des membres à temps partiel indemnisés à la vacation et non rémunérés pour une activité à plein temps ;

- la saisine de l'autorité a été ouverte au ministre chargé de l'urbanisme et du logement, ainsi qu'aux associations de protection de l'environnement ;

- le pouvoir de définition de l'autorité a été étendu aux indicateurs de mesure du bruit et aux prescriptions applicables aux dispositifs de mesure du bruit ;

- les conditions d'exercice du pouvoir de faire respecter les prescriptions techniques qu'elle édicte pour la mesure du bruit ont été renforcées ;

- l'autorité a été chargée de diffuser une " synthèse des plaintes comportant une information relative à l'auteur de l'infraction, la date, l'heure, le lieu, le descriptif du traitement et la sanction éventuelle " ;

- l'autorité s'est vu attribuer la mission de s'assurer de l'accès aux informations relatives aux PEB et aux plans de gêne sonore ;

- des amendements ont indiqué que l'autorité " veille " à la révision des plans d'exposition au bruit, qu'elle est consultée sur les " valeurs maximales de bruit à ne pas dépasser " ;

- l'Assemblée a rétabli le terme de " contrôle " par l'autorité du respect des engagements des chartes de l'environnement sonore ;

- un amendement a transformé le pouvoir de conciliation proposé par le Sénat pour l'autorité en " arbitrage " ;

- le pouvoir de sanction des manquements aux limitations sonores a été transféré du ministre à l'autorité (sur proposition de la Commission nationale de prévention des nuisances) et le montant des amendes a été relevé ;

- un amendement a confié à l'autorité la faculté de confier des études à des associations ;

- la transmission du rapport annuel de l'autorité aux commissions consultatives de l'environnement a été supprimée ;

- un amendement a précisé que les fonctionnaires placés auprès de l'autorité devaient être en position de détachement.

A l'article 2 (Commissions consultatives de l'environnement)

- l'Assemblée nationale a prévu que les CCE seraient consultées sur toute question d'importance relative à l'aménagement ou à l'exploitation de l'aérodrome qui pourrait avoir une incidence sur les zones affectées par le bruit ;

- les CCE se sont vues attribuer un rôle de suivi des chartes de qualité de l'environnement sonore et de saisine de l'autorité sur cette question ;

- l'Assemblée nationale a prévu que les avis des commissions sont motivés et publics, que les CCE des neuf principaux aéroports établissent un rapport annuel, que le tiers des membres de la CCE ou son comité permanent peuvent provoquer sa réunion ;

- la création d'un comité permanent a été rendue de droit pour les neuf principaux aéroports ;

- les commissions consultatives d'aide aux riverains (CCAR) ont été intégrées au sein des comités permanents ;

- la composition des CCE a été modifiée, les associations, les collectivités locales et les " professions aéronautiques " représentant désormais chacune un tiers de ces commissions.

A l'article 3 (trafic d'hélicoptères), l'Assemblée nationale a rétabli le texte du projet initial en matière d'interdiction de certains mouvements d'hélicoptères, auquel elle a ajouté le pouvoir, pour le ministre, de limiter au cas par cas le trafic héliportuaire.

A l'article 4 (consultation de l'autorité sur le plan d'exposition au bruit), l'Assemblée nationale n'a adopté qu'un amendement de coordination.

A l'article 4 bis nouveau (construction dans la zone C du plan d'exposition au bruit), l'Assemblée nationale a adopté un amendement élargissant les possibilités de construction au sein de la zone C des plans d'exposition au bruit (PEB), aux immeubles collectifs à usage d'habitation.

A l'article 4 ter (nouveau), elle a introduit par amendement une nouvelle zone D dans les PEB, dans laquelle les constructions devront être insonorisées.

A l'article 4 quater (nouveau), l'Assemblée nationale a introduit un article additionnel qui reprend une proposition de première lecture de votre Haute Assemblée, en la modifiant, quant à l'application anticipée , en cas d'extension ou de création des PEB, des prescriptions applicables aux zones C et D.

Les articles 5, 6 et 7 introduits par le Sénat ont, en conséquence, été supprimés par l'Assemblée nationale.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Le texte adopté par l'Assemblée semble au total plus contraignant que celui adopté par le Sénat en première lecture. Votre commission vous propose donc, même si une majorité des modifications de nos collègues députés ont été acceptées par elle, d'y apporter, dans l'optique d'un dialogue constructif, plusieurs amendements.

Pour la composition de l'autorité , il semble nécessaire d'aboutir à une représentation plus équilibrée du monde aéronautique, tout en reconnaissant la spécificité de la problématique de la " gêne sonore ", qui se distingue de l'acoustique et de la santé humaine. Votre commission considère en outre qu'il est utile, pour asseoir l'autorité morale de cet organisme, de revenir à une plus grande collégialité dans le mode de nomination et de renforcer le statut de ses membres, qui a été quelque peu fragilisé par l'Assemblée nationale.

Pour les pouvoirs de l'autorité , que l'Assemblée nationale a accrus, en lui conférant, notamment, la possibilité de sanctionner les infractions à la réglementation en matière de bruit à la place du ministre, votre commission vous proposera de préciser la rédaction et d'atténuer le caractère parfois trop répressif du texte (montant des sanctions, pouvoir " d'arbitrage " mal défini en droit).

Pour les commissions consultatives de l'environnement , dont l'Assemblée a renforcé le rôle et modifié la composition par rapport à ce que prévoyait la législation en vigueur, votre commission vous propose de préciser que les associations qui y siègent, et qui constitueront désormais le tiers de l'effectif, sont celles qui sont concernées par l'environnement aéroportuaire, la rédaction actuelle étant trop extensive en la matière. En outre, lorsque le comité permanent de ces commissions exerce les attributions dévolues, par la loi relative à la lutte contre le bruit de 1992, aux commissions consultatives d'aide aux riverains (CCAR), qui donnent un avis sur la distribution des aides publiques à l'insonorisation des logements, votre commission considère qu'il est indispensable qu'y siègent les représentants de l'Etat et du gestionnaire d'aéroport, alors que l'Assemblée nationale les a, en conséquence d'un amendement ayant un autre objet, de facto exclus des comités permanents des commissions consultatives de l'environnement.

En matière d'urbanisme , votre commission vous propose d'accepter les propositions que l'Assemblée nationale a formulées à partir de la rédaction de première lecture du Sénat. Il s'agit de la création d'une nouvelle zone D dans les plans d'exposition au bruit, qui aura non seulement, comme l'avait souhaité la Haute Assemblée, une vocation d'information des riverains, mais qui obligera également à l'insonorisation des constructions nouvelles dans cette zone. L'Assemblée nationale a repris, même si elle l'a formulée différemment, la mesure préventive que le Sénat avait introduite permettant l'application anticipée des plans d'exposition au bruit, quand ils sont en cours de révision ou d'extension, afin que des " réserves foncières " puissent être temporairement constituées pour ne pas hypothéquer l'extension éventuelle d'infrastructures aéroportuaires.

Votre commission a souhaité atténuer la portée de l'article 4 bis introduit par l'Assemblée nationale, qui lève l'interdiction, posée par le loi de 1985, de construction des immeubles collectifs à usage d'habitation dans la zone C des plans d'exposition au bruit, pour ne pas risquer d'exposer de nouvelles populations aux nuisances sonores. Votre commission a prévu, dans ce but, que cette possibilité de construction nouvelle s'accompagne d'une diminution simultanée et équivalente des capacités d'accueil existantes dans d'autres constructions situées dans les mêmes zones.

Votre rapporteur tient également à souligner que plusieurs personnes l'ont, depuis la première lecture du texte au Sénat, sollicité pour connaître les intentions du Gouvernement en matière de limitation des nuisances sonores aériennes d'origine militaire. En conséquence, comme le lui a demandé votre commission, il se propose d'interroger le ministre sur cette question lors de la discussion en séance publique du présent projet de loi.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er -

Autorité de contrôle
des nuisances sonores aéroportuaires


Chapitre VII du titre II du livre II de la première partie

du code de l'aviation civile : " Environnement des aérodromes "

Cet article insère dans le code de l'aviation civile un nouveau chapitre, composé de huit articles, créant une nouvelle autorité administrative indépendante compétente en matière de bruit aux abords des aéroports.

L'article 1 er propose d'insérer les articles L.227-1 à L.227-8 au code de l'aviation civile.

Article L.227-1 du code de l'aviation civile -

Création et composition de l'autorité

Cet article instaure la nouvelle autorité indépendante et fixe le mode de désignation et la durée du mandat de ses membres.

La rédaction du projet initial s'inspirait des dispositions en vigueur pour les autres autorités administratives indépendantes, relatives à l'existence et au mode de désignation de leurs membres, qu'il s'agisse par exemple des lois relative sa la création du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), de la Commission nationale informatique et liberté (CNIL) ou de l'Autorité de régulation des télécommunications (ART), sans toutefois reprendre l'ensemble de leurs dispositions.

Les modifications du Sénat en première lecture

La Haute Assemblée avait, cela a déjà été dit, modifié l'appellation de l'autorité qui, d' " Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire " (ACTESA) était devenue " Autorité de régulation et de contrôle de l'environnement sonore aéroportuaire " (ARCESA), et ce afin de refléter l'accroissement de son rôle proposé par la Haute Assemblée.

Une définition générale des missions de l'autorité avait été insérée au début du présent article, par analogie avec les divers textes de loi instaurant des autorités administratives indépendantes.

La Haute Assemblée avait clarifié le mode de nomination des membres en prévoyant que deux membres seraient nommés respectivement par le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat et que cinq membres, dont le président et les quatre experts, seraient nommés par décret du Président de la République.

S'inspirant des dispositions en vigueur pour les autres autorités, le Sénat avait ajouté une condition de compétence générale pour les membres de l'autorité, afin d'accroître leur légitimité et leur autorité, notamment pour les membres " non experts " comme le président et les deux membres nommés par les Présidents des assemblées parlementaires.

En outre, un expert en santé humaine avait été introduit au collège de l'autorité et une limitation d'âge (65 ans) avait été fixée pour la nomination.

Enfin, le Sénat avait, sur le modèle des dispositions applicables à la CNIL, et afin de renforcer les garanties d'indépendances, précisé que, sauf démission, il ne peut être mis fin aux fonctions de membre de l'autorité qu'en cas d'empêchement constaté par elle dans des conditions qu'elle définit.

Les amendements de l'Assemblée nationale en première lecture

L'Assemblée nationale a dénommé l'autorité : " Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires " (ACNUSA), reconnaissant la validité de l'observation du Sénat sur le caractère restrictif du titre originellement prévu dans le projet de loi initial, mais jugeant impropre le terme de " régulation " proposé par la Haute Assemblée.

La phrase sur la mission générale de l'autorité a été supprimée, car jugée " peu normative " par le rapporteur. Elle permettrait pourtant d'obtenir une symétrie entre l'autorité et les autres autorités administratives indépendantes. L'Assemblée nationale a toutefois gardé la mention du délai de six mois pour la création de l'autorité à compter de la promulgation du texte, introduite par le Sénat, ainsi que la phrase sur les compétences requises des membres de l'autorité.

La composition de l'autorité a été modifiée puisqu'un expert en matière d'urbanisme a été introduit en son sein et qu'en conséquence, les deux experts prévus par le Sénat en matière, respectivement, de transport aérien et de navigation aérienne ont été remplacés par un seul expert compétent en matière " d'aéronautique et de navigation aérienne ".

En outre, le mode de nomination a été modifié : au lieu d'un décret du Président de la République, l'Assemblée a prévu, pour la nomination du Président, l'intervention d'un " décret en Conseil des ministres ".

L'Assemblée nationale a aussi souhaité que les experts soient nommés par le premier ministre, sur proposition des ministres compétents (ministres chargés de l'environnement ; de l'équipement ; de l'aviation civile ; de la santé), ce qui pourrait nuire à la nécessaire collégialité de l'autorité, qui se trouve déjà affectée par le fait que, dans le texte adopté par l'Assemblée nationale, seul le Président est membre " à plein temps ", ce qui signifie, par a contrario, que les autres membres ne sont présents qu'à temps partiel .

Dès le présent article apparaît donc la différence d'appréciation entre votre Haute Assemblée et les députés, quant à la nature de l'autorité , le Sénat souhaitant initialement lui conférer la même continuité que celle du CSA, de l'ART ou de la COB, l'Assemblée et le Gouvernement souhaitant que le Président soit l'élément de permanence de cette autorité. D'ailleurs, l'Assemblée nationale a remplacé la disposition introduite par le Sénat, alignant la rémunération des membres sur celle des autres autorités indépendantes, et laissé à un arrêté le soin de définir leur " indemnisation ", les propos tenus en séance montrant qu'il pourrait s'agir de simples vacations.

Enfin, l'Assemblée nationale a précisé qu'en cas de non respect des dispositions sur les incompatibilités (voir article L.227-2 ci-dessous), le membre concerné est déclaré démissionnaire d'office . En outre, il a été indiqué qu'un membre cessant d'exercer ses fonctions doit être remplacé dans un délai de deux mois et que si l'autorité s'est trouvée dans l'impossibilité de délibérer faute de quorum, une réunion doit se tenir dans le délai d'un mois.

La position de votre commission

Votre commission vous propose une nouvelle composition de l'Autorité, qui serait constituée de 8 membres :

- 3 membres " généralistes " : le Président et les 2 membres nommés par les Présidents des assemblées parlementaires ;

- 5 membres " experts " nommés en Conseil des ministres sur proposition des ministres compétents, qualifiés respectivement en :

. aéronautique

. navigation aérienne

. acoustique

. gêne sonore

. santé humaine

Un amendement au présent article a été adopté à cet effet par votre commission, ainsi que plusieurs amendements de coordination.

Outre un amendement rédactionnel, votre commission vous propose de préciser qu'exerçant ses fonctions à plein temps, il est nécessaire que le Président soit rémunéré, et non pas seulement indemnisé comme les autres membres.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-1 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-2 du code de l'aviation civile -

Régime d'incompatibilités des membres de l'autorité

Cet article pose les incompatibilités attachées à la fonction de membre de l'autorité, en vue d'assurer l'indépendance de l'institution.

Cet article comporte un autre volet traditionnel du statut des membres d'une autorité administrative indépendante, destiné à assurer leur indépendance, celui des incompatibilités électives et professionnelles .

Le projet de loi initial

A l'origine, le texte disposait que la fonction de membre de l'autorité était incompatible avec :

- un mandat électif. Rappelons, à cet égard, que le Conseil constitutionnel estime, s'agissant des membres du Parlement, dont le régime d'incompatibilités est régi par la loi organique, que l'appartenance à une autorité administrative indépendante s'assimile à une fonction publique non élective, incompatible, en vertu de l'article L.O.142 du code électoral, avec le mandat parlementaire ;

- une activité professionnelle publique ou privée ;

- une responsabilité associative conférant un intérêt direct ou indirect à l'activité des aéroports.

La rédaction adoptée par le Sénat en première lecture

Le Sénat avait ajouté une incompatibilité avec la détention directe ou indirecte d'intérêts dans une entreprise du secteur de l'aéronautique sur le modèle des incompatibilités applicables aux autres autorités du même type. En outre, la Haute assemblée avait clarifié la rédaction, afin de lever une éventuelle ambiguïté quant à l'incompatibilité avec tout mandat électif et toute activité professionnelle.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a restreint le champ des incompatibilités électives, professionnelles et associatives aux activités donnant un intérêt direct ou indirect à l'activité des aéroports.

Bien que la rédaction ne le précise pas explicitement, le rapporteur de l'Assemblée nationale a toutefois souhaité 3( * ) que l'exercice d'un mandat électif soit, dans l'interprétation de la loi, entendu comme une incompatibilité d'ordre général avec la fonction de membre de l'autorité.

La position de votre commission

Votre commission vous propose un amendement qui rend explicite le caractère général de l'incompatibilité élective pour les membres de l'autorité.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L. 227-2 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-3 du code de l'aviation civile -

Compétences générales de l'autorité

Cet article confère des compétences générales à l'autorité, en matière de recommandation sur le contrôle des nuisances sonores et de saisine de l'administration en cas d'infraction à la réglementation sur le bruit aéroportuaire.

La position du Sénat en première lecture

En première lecture, le Sénat avait ouvert la saisine de l'autorité aux commissions consultatives de l'environnement. La Haute Assemblée avait aussi étendu le pouvoir de recommandation de l'autorité, au-delà des seules nuisances sonores du transport aérien, à celles, plus largement, de l'activité aéroportuaire dans son ensemble .

En outre, compte tenu d'une certaine remise en cause actuelle des indices de bruits retenus et de la nécessité de définir de nouveaux indices de mesure, le Sénat avait proposé de préciser que ce pouvoir de recommandation de l'autorité concernant la mesure du bruit s'étendait à la définition des indices de mesure.

Les modifications introduites par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a ouvert la saisine de l'autorité, dans sa compétence de recommandation générale, au ministre chargé de l'urbanisme et du logement, ainsi qu'aux associations agréées de protection de l'environnement définies à l'article L. 252-1 du code rural.

En outre, elle a précisé que les recommandations de l'autorité pourraient porter sur " la définition d'indicateurs de mesure adéquats ", " l'évaluation de la gêne sonore " et " les procédures de moindre bruit pour le décollage et l'atterrissage ".

La position de votre commission

Compte tenu de la liste impressionnante des associations agréées en vertu du code rural, et de leur objet souvent sans rapport avec les nuisances sonores aéroportuaires, votre commission estime qu'il convient de réserver la saisine de l'autorité aux associations concernées par l'environnement sonore aéroportuaire. Elle a adopté un amendement à cet effet.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-3 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-4 du code de l'aviation civile -

Compétences pour le contrôle du bruit au voisinage des neuf aérodromes les plus importants

Cet article détaille les compétences de l'autorité pour la mesure et la maîtrise du bruit au voisinage des aérodromes français ayant le trafic le plus important.

Le projet de loi initial

Pour les 9 aérodromes les plus importants en termes de mouvements, l'autorité dispose de pouvoirs plus étendus que pour le reste des plates-formes.

Ces pouvoirs peuvent être résumés ainsi :

Pouvoir de prescription technique et de mise en oeuvre pour la mesure du bruit aéroportuaire ;

Droit à être consultée sur les textes réglementaires relatifs à l'environnement sonore aéroportuaire, aux procédures de départ, d'attente et d'approche aux instruments, ainsi que sur les projets de plan de gêne sonore (PSG) et de plans d'exposition au bruit (PEB) ;

Mission de diffusion des informations et données recueillies par les réseaux de mesure du bruit ;

Fonction de vérification du respect des engagements pris par les parties intéressées pour la maîtrise des nuisances sonores dans des " chartes ", qui n'ont -soulignons-le- pas de valeur juridique contraignante, mais sont de simples engagements moraux.

La position du Sénat en première lecture

La Haute assemblée avait, d'une part, s'agissant de la fonction de vérification citée ci-dessus, remplacé le terme -peu adapté à son sens s'agissant de documents sans valeur juridique- de " contrôle " par celui d'" évaluation ", et d'autre part prévu que les résultats de ces évaluations seraient rendus publics, afin d'accroître leur impact.

De plus, le Sénat avait confié à l'autorité un pouvoir de conciliation entre les parties en cas de désaccord quant au respect de ces engagements.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

a) Des pouvoirs accrus


L'Assemblée nationale a sensiblement renforcé les pouvoirs de l'autorité sur les neuf principaux aéroports, puisque cette dernière y est désormais chargée :

- de définir les indicateurs de mesure du bruit et de la gêne sonore , en sus de son pouvoir général de recommandation en la matière en vertu de l'article L.227-2 ;

- de définir les prescriptions applicables " aux dispositifs de mesure du bruit et de suivi des trajectoires " ;

- en cas de manquement à ces prescriptions, la faculté pour l'autorité de mettre en demeure le contrevenant puis de faire procéder, aux frais de l'exploitant, aux travaux nécessaires, a été remplacée par une obligation ;

- l'autorité a vu son rôle consultatif étendu aux projets de textes réglementaires fixant les valeurs maximales de bruit à ne pas dépasser ;

- le terme d'" évaluation " du respect des engagements pris dans les " chartes " précitées a été remplacé par celui de leur " contrôle ".

En outre, l'autorité s'est vu attribuer, contre l'avis de la commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale, le Gouvernement s'en remettant à la sagesse des députés, la mission d'établir une synthèse des plaintes déposées comportant les informations relatives notamment à " l'infraction " ainsi que la suite réservée à ces plaintes. On ne peut que s'étonner du principe, pour le moins contraire à notre tradition juridique, de " présomption de culpabilité " qui sous-tend cette rédaction, les plaintes devant être publiées, alors même qu'elles seront vraisemblablement encore en cours d'instruction, accompagnées de l'identification de l'auteur -présumé- de l'infraction !

Il a aussi été ajouté que l'autorité " veille " à la révision, quand cela est nécessaire, des plans d'exposition au bruit, bien qu'elle ne soit juridiquement chargée ni de leur élaboration, ni de leur révision .

En effet, en vertu de l'article L.147-3 du code de l'urbanisme, c'est l'autorité administrative qui est chargée de l'établissement et de la révision du plan d'exposition au bruit.

b) Un pouvoir " d'arbitrage " à définir.

Un amendement a transformé le rôle de conciliation et de médiation de l'autorité, qui visait à élaborer, d'un commun accord et sur la base du volontariat, une solution acceptée par l'ensemble des parties, qui ne pouvait en aucun cas être imposée, par un rôle " d'arbitrage ", sans que ce dernier soit pour autant précisé.

Cet amendement soulève des difficultés particulières et nécessite donc des développements plus approfondis.

- L'objet de l'" arbitrage " de l'autorité n'a pas d'existence juridique

Première difficulté, l'objet du pouvoir d'arbitrage de l'autorité concerne les " chartes de l'environnement sonore " qui, bien quelles reçoivent implicitement une consécration législative par le 7° du présent article, qui mentionne les " engagements pris par les différentes parties ", ne sont pas obligatoires, n'ont ni de définition précise ni de caractère contraignant en droit. Il s'agit de simples engagements moraux qui n'ont pas la valeur d'un engagement contractuel.

Les exemples d'autorités administratives qui disposent d'un pouvoir d'" arbitrage " -en réalité dénommé pouvoir de règlement des différends - montrent que le législateur a toujours pris soin de définir préalablement la forme, le contenu et la portée normative de l'objet de l'arbitrage .

Ainsi en est-il des conventions d'interconnexions et de co-localisation d'équipements ou des contrats liant les câblo-opérateurs au propriétaire d'une infrastructure de télécommunications, pour le pouvoir d'" arbitrage " de l'ART 4( * ) ; ainsi en est-il des contrats d'accès au réseau public de transport d'électricité pour la future Commission de régulation de l'électricité 5( * ) .

- Le pouvoir d'" arbitrage " conféré à l'autorité n'est pas défini et ne garantit pas le respect des droits de la défense, principe à valeur constitutionnelle

Donner à une autorité administrative un pouvoir d'ordre juridictionnel soulève des difficultés au regard de la séparation des pouvoirs et requiert donc des garanties de nature à assurer le respect des droits de la défense, que votre rapporteur rappellera car ils concernent également le pouvoir de sanction des autorités administratives indépendantes (voir ci-dessous).

Le Conseil constitutionnel a déjà reconnu conforme à la Constitution la possibilité donnée par la loi à une autorité administrative indépendante de détenir des pouvoirs d'arbitrage, ou de règlement des différends , dans ses décisions relatives au Conseil de la concurrence, en vertu de l'ordonnance précitée du 1 er décembre 1986, ou à l'ART, lors de sa saisine de la loi précitée du 26 juillet 1996.

La jurisprudence constitutionnelle a posé des conditions qui tiennent à la nécessité de respecter le principe à valeur constitutionnelle du respect des droits de la défense.

Pour le Conseil de la concurrence , par exemple, le Conseil constitutionnel a, dans sa décision n° 86-224 DC du 23 janvier 1987, déclaré non conforme à la Constitution la loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence, en raison d'un insuffisant respect des droits de la défense , car n'était pas ouverte la possibilité d'un sursis à exécution, devant le juge judiciaire, des décisions de cette autorité .

Le raisonnement du Conseil constitutionnel était le suivant :

" Considérant que l'ordonnance du 1 er décembre 1986 crée un Conseil de la concurrence ; qu'au nombre des attributions dudit conseil figure le pouvoir de prendre deux sortes de mesures à l'encontre des entreprises ou des personnes auxquelles seraient reprochées des pratiques anticoncurrentielles ; (...)

" Mais considérant que la loi déférée au Conseil constitutionnel a pour effet de priver les justiciables d'une des garanties essentielles à leur défense ;

" Considérant en effet que le troisième alinéa de l'article 15 de l'ordonnance du 1 er décembre 1986 dispose que le recours formé contre une décision du Conseil de la concurrence " n'est pas suspensif " ; (...)

" Considérant que, compte tenu de la nature non juridictionnelle du Conseil de la concurrence, de l'étendue des injonctions et de la gravité des sanctions pécuniaires qu'il peut prononcer, le droit pour le justiciable formant un recours contre une décision de cet organisme de demander et d'obtenir, le cas échéant, un sursis à l'exécution de la décision attaquée constitue une garantie essentielle des droits de la défense ;

" Considérant dès lors que les dispositions de l'article 2 de la loi présentement examinée ne sont pas conformes à la Constitution ; que, les dispositions de l'article 1 er n'en étant pas séparables, la loi doit, dans son ensemble, être regardée comme non conforme à la Constitution ;
"

S'agissant de l'ART, dont le pouvoir d'arbitrage est proche de celui dont il est proposé de doter la CRÉ, le Conseil constitutionnel a validé les dispositions de la loi précitée du 26 juillet 1996, tout en relevant les garanties apportées par sa rédaction, dans sa décision n° 96-378 DC du 23 juillet 1996 :

- une procédure contradictoire ;

- un contrôle juridictionnel des décisions rendues, le recours présentant un caractère suspensif.


" Considérant qu'en vertu du I de l'article L.36-8 du code des postes et télécommunications, dans sa rédaction issue de l'article 8 de la loi déférée, l'Autorité de régulation des télécommunications peut être saisie des différends qui interviennent en cas de refus d'interconnexion, d'échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès à un réseau de télécommunications ; qu'à l'issue d'une procédure contradictoire, elle prend une décision motivée, laquelle précise les conditions équitables, d'ordre technique et financier, dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès doivent être assurés ; qu'en cas d'atteinte grave aux règles régissant le secteur des télécommunications, elle est habilitée après avoir entendu les parties en cause, à prendre des mesures conservatoires destinées à assurer la continuité du fonctionnement des réseaux, qu'en vertu du II du même article, l'Autorité peut également être saisie de différends concernant soit les conditions de mise en conformité des conventions comportant des clauses excluant ou restreignant la fourniture des services de télécommunications sur les réseaux mentionnés à l'article L.34-4 du code des postes et télécommunications, soit les possibilités et les conditions d'une utilisation partagée entre opérateurs d'installations existantes ; (...).

Ni l'une ni l'autre de ces deux conditions minimales ne sont respectées en l'espèce.

c) Un pouvoir de sanction partagé


Lors de la première lecture, votre rapporteur s'était interrogé sur l'opportunité de conférer à l'autorité le pouvoir, actuellement exercé par le ministre, après avis de la Commission nationale de prévention des nuisances sonores (CNPN), de sanctionner les manquements à la réglementation sur les restrictions d'usage des plates-formes aéroportuaires. Les auditions des différentes parties concernées ayant fait apparaître un relatif consensus à laisser subsister le système actuel, le Sénat n'avait pas modifié ce point.

L'Assemblée nationale a, quant à elle, souhaité confier à l'autorité ce pouvoir de sanction, sans toutefois supprimer la procédure d'instruction par la CNPN.

Les conditions de la constitutionnalité du pouvoir de sanction d'une autorité administrative indépendante

Plusieurs autorités administratives indépendantes disposent de pouvoirs de sanction, comme le détaille l'encadré ci-dessous :

POUVOIRS DE SANCTION DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES

La COB dispose, en vertu de l'article 9-2 6( * ) de l'ordonnance n° 67-833 du 21 septembre 1967 instituant une Commission des opérations de bourse et relative à l'information des porteurs de valeurs mobilières et à la publicité de certaines opérations de bourse, du pouvoir d'infliger, lorsqu'elle constate des pratiques contraires à ses règlements , une sanction pécuniaire limitée à 10 millions de francs ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés.

Le CSA peut, quant à lui, prononcer, sur le fondement de l'article 42-1 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, à l'encontre d'un exploitant de service de communication audiovisuelle qui ne respecterait pas ses obligations , une des sanctions suivantes :

- suspension de l'autorisation ou d'une partie de programme pour au plus un moi ;

- réduction de la durée de l'autorisation dans la limite d'une année ;

- sanction pécuniaire, limitée en vertu de l'article 42-2, à 3 % du chiffre d'affaires annuel hors taxes, mais dont le montant peut être porté à 5 % en cas de récidive, et éventuellement assortie d'une suspension de l'autorisation ;

- retrait de l'autorisation d'exploiter.

Le Conseil de la concurrence peut, en vertu de l'article 13 de l'ordonnance précitée du 1 er septembre 1986, infliger, en cas de pratique anti concurrentielle , une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions du Conseil pour les faire cesser. Le montant maximal de cette sanction est de 5 % du chiffre d'affaires pour une entreprise et de 10 millions de francs dans les autres cas.

L'ART peut, quant à elle, en vertu de l'article L.36-11 du code des postes et télécommunications inséré par la loi précitée du 26 juillet 1996, sanctionner les manquements qu'elle constate, de la part des opérateurs de télécommunications, aux dispositions législatives et réglementaires afférentes à leurs activités, qu'il s'agisse d'une infraction aux règles en vigueur ou d'un non respect d'une décision d'arbitrage.

Les sanctions sont les suivantes :

- soit la suppression totale ou partielle pour au plus un mois, la réduction de la durée d'un mois au plus ou le retrait de l'autorisation ;

- soit une sanction pécuniaire, qui ne peut excéder 3 % du chiffre d'affaires annuel hors taxes, montant porté à 5 % en cas de récidive (à défaut d'activité l'année antérieure, le plafond est d'un million de francs, pouvant être porté à 2,5 millions de francs en cas de récidive).

La future Commission de régulation de l'électricité devrait se voir dotée de pouvoirs de sanction similaires à ceux de l'ART.

Tout comme leur pouvoir d'arbitrage, le Conseil constitutionnel a expressément reconnu la constitutionnalité du pouvoir de sanction des autorités indépendantes 7( * ) .

Ces pouvoirs sont exercés sous le contrôle du juge, et doivent être assortis de garanties permettant de respecter les droits constitutionnellement protégés.

Un tel pouvoir aurait pu contrevenir, notamment, au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs , qui aurait pu exclure qu'une autorité administrative exerce un pouvoir en principe confié au juge, et que les pouvoirs de réglementation et de sanction soient ainsi réunis en une même main.

Le Conseil constitutionnel a estimé 8( * ) " que le principe de séparation des pouvoirs, non plus qu'aucun principe ou règle à valeur constitutionnelle ne fait pas obstacle à ce qu'une autorité administrative , agissant dans le cadre de prérogatives de puissance publique , puisse exercer un pouvoir de sanction dès lors, d'une part, que la sanction infligée est exclusive de toute privation de liberté et, d'autre part, que l'exercice de ce pouvoir de sanction est assorti par la loi de mesures destinées à sauvegarder les droits et libertés constitutionnelles garantis ".

Plusieurs principes constitutionnels doivent toutefois être garantis par la loi :

- respect des droits de la défense par des garanties de procédure et l'existence de voies de recours devant une juridiction, déjà mentionnées ci-dessus ;

- principe de proportionnalité , déduit de l'article 8 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui implique une modulation des sanctions en fonction de la gravité des manquements commis et des avantages procurés par ces manquements ;

- principe de légalité et de nécessité des peines , ainsi que de non rétroactivité de la loi d'incrimination plus sévère, applicables au droit pénal, et transposés aux sanctions administratives par le juge constitutionnel ;

- principe du " non bis in idem " 9( * ) qui, sans exclure complètement que les sanctions administratives soient cumulables avec les sanctions pénales, implique que, si elles le sont, le montant global des sanctions ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues.

La solution retenue par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a pas retenu la solution traditionnelle qui prévaut pour les autorités administratives indépendantes dotées d'un pouvoir de sanction. En effet, le pouvoir de sanction qu'elle exerce intervient " sur proposition de la Commission nationale de prévention des nuisances ", qui est chargée de l'instruction du dossier et qui propose à l'ACNUSA les suites à donner aux manquements constatés.

La rédaction proposée pour cette procédure de sanction reprend intégralement, quant aux personnes concernées, à la qualification des manquements, aux délais d'instruction et à la procédure suivie, les dispositions des articles R.226-1 à R.226-4 du code de l'aviation civile, qui régissent le système actuel de sanctions, moyennant deux exceptions :

- l'amende maximale a été portée de 50.000 à 100.000 francs pour une personne morale ;

- l'ACNUSA remplace purement et simplement le ministre dans le prononcé des sanctions.


Le choix a donc été fait de laisser subsister la CNPN, dont on trouvera ci-après la composition :

COMMISSION NATIONALE DE PRÉVENTION DES NUISANCES SONORES

Article R.226-5 du code de l'aviation civile

(Décret n° 97-534 du 27 mai 1997, art. 1 er )

Les membres de la Commission nationale de prévention des nuisances, ainsi que leurs suppléants, sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'aviation civile pour une période de trois ans renouvelable.

La commission est présidée par un inspecteur général de l'aviation civile et de la météorologie et comprend en outre :

1° Quatre représentants de l'Etat, dont un proposé par le ministre chargé de l'environnement et un proposé par le ministre chargé de la défense ;

2° Quatre personnalités qualifiées dans le domaine de l'aéronautique, dont au moins un exploitant et un gestionnaire d'aérodrome ;

3° Quatre personnalités qualifiées dans le domaine de l'environnement, proposées par le ministre chargé de l'environnement, dont une au moins au titre des associations de riverains.

La position de votre commission

Votre commission a remplacé la mission de diffusion des " plaintes " de l'autorité par celle d'une information sur les sanctions infligées par l'autorité.

Votre commission considère comme excessif le montant maximal de 100.000 francs d'amende contre les personnes morales, le montant moyen actuel des sanctions prononcées étant de 30.000 francs. Elle vous propose donc de le ramener à 80.000 francs.

Elle a adopté un amendement précisant que l'autorité " recommande la révision des documents d'urbanisme ". Enfin, elle a transformé le pouvoir " d'arbitrage " de l'autorité en " médiation ".

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-4 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-5 du code de l'aviation civile -

Pouvoir d'investigation des agents de l'autorité

Cet article confie aux membres et agents de l'autorité et aux experts qu'elle désigne le pouvoir de faire des vérifications sur place et de se faire communiquer des informations.

Le projet de loi initial

Cet article propose de donner à l'autorité la possibilité, dans l'exercice des missions qui viennent d'être décrites, de charger un de ses membres ou un de ses agents, ou un expert mandaté par elle, de procéder à des vérifications sur place ou de se faire communiquer des renseignements utiles à ses missions.

La position du Sénat en première lecture

Le Sénat avait, en première lecture, clarifié la rédaction de cet article en précisant que le pouvoir d'investigation des agents de l'autorité ne s'étend qu'aux compétences du premier alinéa de l'article L.227-3, et non à celles visées au deuxième alinéa, afin d'éviter un éventuel chevauchement de compétences avec les agents habilités à rechercher les infractions. En outre, au deuxième alinéa qui dispose que les intéressés (autorités publiques, agents publics, exploitants d'aérodromes et transporteurs aériens) ne peuvent s'opposer à l'action de l'autorité, le Sénat avait précisé que cette obligation s'applique en particulier aux services de la navigation aérienne.

Les modifications introduites par l'Assemblée nationale

Un amendement introduit par l'Assemblée nationale a donné à l'autorité la possibilité de confier des études à des associations de protection de l'environnement.

La position de votre commission

Votre commission considère qu'en matière de commande publique, les dispositions du code des marchés publics sont seuls fondés à s'appliquer. Aussi vous demande-t-elle de supprimer la mention expresse de la possibilité pour l'autorité de confier à une association une demande d'étude ou d'expertise.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-5 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-6 du code de l'aviation civile -

Rapport annuel de l'autorité

Cet article instaure l'obligation de publication d'un rapport annuel de l'autorité.

Cet article prévoit que le rapport annuel public de l'autorité est remis au Gouvernement et au Parlement.

Rappel des travaux du Sénat en première lecture

Afin de coordonner leurs actions respectives, le Sénat avait précisé que le rapport de l'autorité était transmis aux commissions consultatives de l'environnement. En outre, pour renforcer la transparence et pour asseoir le pouvoir de recommandation de l'autorité, le Sénat avait proposé d'indiquer que le rapport d'activité peut être l'occasion pour l'autorité de suggérer toutes modifications législative ou réglementaire qu'elle estime souhaitables 10( * ) .

Les modifications introduites par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a supprimé la transmission du rapport de l'autorité aux CCE.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-6 du code de l'aviation civile sans modification.

Article L.227-7 du code de l'aviation civile -

Ressources de l'autorité

Cet article précise le statut des crédits de l'autorité et les modalités de contrôle budgétaire qui s'appliquent à elle.

Le dispositif de contrôle budgétaire proposé par cet article pour l'autorité est calqué sur celui qui s'applique pour les autres autorités administratives indépendantes, comme le CSA ou l'ART. Il revient à supprimer le contrôle financier a priori de l'Etat, cet organisme étant soumis au contrôle a posteriori de la Cour des comptes.

Il n'appelle pas de commentaire particulier.

Le Sénat ni l'Assemblée nationale n'y ont apporté de modification en première lecture.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-7 du code de l'aviation civile sans modification.

Article L.227-8 du code de l'aviation civile -

Services de l'autorité

Cet article traite de la gestion interne de l'autorité : services et règlement intérieur.

Le projet de loi initial

Cet article dispose d'une part que les services de l'autorité sont placés sous l'autorité de son Président et, d'autre part, que l'autorité établit son règlement intérieur. On retrouve des dispositions identiques pour les autres autorités indépendantes.

La position du Sénat en première lecture

En première lecture, le Sénat avait précisé, comme il est fréquent pour ce type d'institutions, que :

- ses agents sont soumis au secret professionnel ;

- l'autorité peut employer des contractuels ou des fonctionnaires en activité dans les mêmes conditions (traitements, primes...) que le ministère chargé de l'aviation civile.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale, sur proposition de son rapporteur, a précisé que les fonctionnaires employés par l'autorité devraient être en position de détachement .

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-8 du code de l'aviation civile sans modification et l'article 1 du projet de loi, tel que modifié par les amendements qu'elle vous demande d'adopter.

Article 2 -

Commissions consultatives de l'environnement

Cet article modifie le rôle, les moyens et la composition des commissions consultatives de l'environnement.

Cet article vise à renforcer les commissions consultatives de l'environnement (CCE).

La position du Sénat en première lecture

Dans un souci de cohérence, mais aussi de dialogue entre l'ensemble des parties prenantes de l'activité aéroportuaire, le Sénat avait, en première lecture, proposé d'accompagner ce renforcement des CCE, souhaité par les associations de riverains, d'une meilleure coordination des actions respectives de ces commissions et de la nouvelle autorité.

Les amendements adoptés tendaient à :

- assurer la réalité de la concertation

Les commissions consultatives de l'environnement (CCE) 11( * ) ont été instituées par l'article 2 de la loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 relative à la maîtrise de l'urbanisme au voisinage des aérodromes, qui prévoit que l'autorité administrative peut mettre en place une CCE . Cette création est de droit lorsque la demande en est faite par une commune dont une partie du territoire est couverte par le plan d'exposition au bruit de l'aérodrome.

Cette loi prévoit que les CCE sont consultées sur toute question d'importance relative aux incidences de l'exploitation de l'aéroport sur les zones affectées par les nuisances de bruit et, le cas échéant, sur le plan de gêne sonore. Elles doivent en outre se prononcer en vertu de l'article L.147-3 du code l'urbanisme 12( * ) , sur les projets de plan d'exposition au bruit (PEB). Les CCE sont créées et présidées par le Préfet du département sur lequel est situé l'aéroport (dans le cas des aéroports de Paris-Orly, Paris-Le Bourget et Paris-Charles de Gaulle, les CCE sont présidées par le Préfet de la région Ile-de-France). Sont en outre représentés dans les CCE : les associations de riverains, les usagers de la plate-forme, son gestionnaire, les collectivités locales et les administrations concernées.

D'après les chiffres fournis à votre rapporteur par l'administration, 80 aérodromes sont dotés d'une CCE . Toutefois, l'activité de ces commissions est très variable. Celle de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle est particulièrement active depuis, notamment, l'annonce de la décision d'extension de cet aérodrome et l'élaboration corrélative d'un document formalisant les engagements respectifs des parties pour la maîtrise des nuisances sonores (la Charte). Ainsi, de février à juillet 1998, 14 réunions du comité de rédaction de la Charte de qualité de l'environnement sonore ont eu lieu, ainsi que 15 réunions des sous-groupes de la CCE, 56 personnes ayant au total participé à ses réunions.

Mais, votre rapporteur avait souligné, lors de la première lecture, que la CCE de l'aéroport Paris-Orly ne s'était, à l'époque, pas réunie depuis presque 9 ans et que celle du Bourget était également en sommeil. En conséquence, votre Haute assemblée avait imposé que les CCE se réunissent au moins une fois par an.

- renforcer les CCE tout en préservant la spécificité de leurs missions par rapport à l'ARCESA

Le projet de loi prévoit de renforcer le rôle de ces commissions, notamment en les dotant d'une instance permanente de travail et de moyens de fonctionnement. En outre, pour les principaux sites aéroportuaires, il est proposé de rendre de droit la création d'une CCE.

Le Sénat avait confié à cette dernière un pouvoir de saisine de l'autorité indépendante pour contrôler le respect des engagements pris par les différentes parties intéressées à l'exploitation de l'aéroport en vue d'assurer la maîtrise des nuisances sonores. En outre, le Sénat avait adopté un amendement consacrant le rôle des CCE pour coordonner, le cas échéant, la rédaction des " chartes de l'environnement sonore ".

Soucieux d'organiser le dialogue entre ces instances, le Sénat avait indiqué, dans le texte de loi, que les recommandations des CCE étaient transmises à l'autorité.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Le texte de cet article a été sensiblement modifié par les députés, qui ont accru les missions des CCE, ont renforcé leurs comités permanents, dont le présent projet de loi prévoit la création, et ont modifié leur composition.

L'Assemblée nationale a ainsi prévu que :

- les CCE sont consultées sur toute question d'importance relative à " l'aménagement " ou à l'exploitation de l'aérodrome qui pourrait avoir une incidence sur les zones affectées par le bruit, alors que dans la rédaction actuelle de la loi de 1985 seules les " incidences de l'exploitation sur les zones affectées par les nuisances " doivent faire l'objet d'une consultation ;

- les CCE assurent le " suivi " de la mise en oeuvre des chartes de qualité de l'environnement sonore et peuvent à cet effet saisir l'autorité ;

- les avis des CCE sont motivés, publics et détaillent la position de chacun des membres (ce qui est déjà le cas des comptes-rendus, par nature exhaustifs, actuellement établis à l'issue des réunions de ces commissions) ;

- les CCE des aérodromes les plus importants établissent un rapport annuel public ;

- la réunion des CCE est de droit lorsque le tiers (au lieu de la moitié) ou son comité permanent en fait la demande ;

- la composition des CCE est ainsi modifiée : au lieu de comprendre des représentants des associations de riverains, des usagers et personnels de l'aérodrome, du gestionnaire de l'aérodrome, des communes concernées par le bruit de l'aérodrome, des administrations concernées et éventuellement des représentants des conseils généraux et régionaux, l'Assemblée nationale propose un tripartisme : professions aéronautiques (1/3) ; collectivités locales (1/3) ; associations (1/3) ;

- le comité permanent est représentatif de la composition des CCE ; sa création est de droit pour les principaux aéroports ;

- les commissions consultatives d'aide aux riverains sont intégrées au comité permanent des CCE. Rappelons que s'agissant de commissions chargées de donner un avis sur l'allocation de fonds publics en faveur de l'insonorisation, l'absence de représentants de l'administration, que consacre cette rédaction, n'est pas sans soulever de difficultés ;

- enfin, l'Assemblée nationale a prévu l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat pour l'application du présent article.

La position de votre commission

Votre commission a adopté deux amendements à cet article :

- un amendement qui remédie à l'incohérence entre l'article 19 de le loi relative à la lutte contre le bruit de 1992 et la rédaction de cet article issue de l'Assemblée nationale, en prévoyant la présence des représentants de l'Etat et du gestionnaire d'aéroport au comité permanent lorsqu'il siège en tant que CCAR . En outre, il est prévu que les CCAR en exercice termineront leurs mandats et que ce n'est que lors du prochain renouvellement qu'elles seront intégrées aux comités permanents des commissions consultatives de l'environnement ;

- un amendement qui restreint aux associations concernées par l'environnement aéroportuaire la possibilité d'être représentées au sein des CCE.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ainsi modifié.

Article 3 -

Limitation des nuisances sonores liées au trafic d'hélicoptères

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article 7 de la loi " bruit " du 31 décembre 1992, relatif à la limitation des nuisances sonores liées au trafic d'hélicoptères.

A l'initiative du Sénat, un article limitant le trafic d'hélicoptères avait été introduit lors de la discussion de la loi relative à la lutte contre le bruit de 1992, devenu l'article 7 dans la version définitivement adoptée.

Toutefois, le texte de l'article 7 tel qu'il est paru au Journal Officiel comportait une " coquille " par rapport au texte adopté par les assemblées parlementaires : un membre de phrase du 1er alinéa avait été omis par erreur.

La disposition interdisant les " vols circulaires avec passagers sans escale ou avec escale touristique de moins d'une heure " a été par erreur retranscrite en interdiction des " vols circulaires avec passagers sans escale touristique de moins d'une heure " .

Le texte promulgué avait ainsi un sens opposé à celui qu'avait voulu lui donner le législateur. Aussi, cette disposition n'a pu être correctement appliquée par l'administration, faute de base légale appropriée. C'est pourquoi le présent projet de loi propose à nouveau son adoption.

La position du Sénat en première lecture

Au lieu de se contenter de " confirmer " la rédaction de 1992 le Sénat avait, en première lecture, adopté une rédaction mieux à même de favoriser la concertation pour régler au cas par cas le problème des nuisances liées aux hélicoptères, un décret en Conseil d'Etat donnant au ministre un pouvoir de limitation du trafic, des types d'appareils et des manoeuvres d'approche et de départ, qui pourrait être adapté en fonction des besoins de chaque plate-forme, ouverte ou non à la circulation publique. L'amendement du Sénat codifiait en outre ces disposition dans le code de l'aviation civile.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a apporté deux modifications :

- d'une part, sur proposition du rapporteur, elle est revenue à l'interdiction posée par le texte initial du projet de loi de certains types de vol, qu'elle a étendue au survol des zones densément peuplées ;

- d'autre part, elle a conféré au ministre le pouvoir de limitation du trafic héliportuaire qu'envisageait de lui donner le Sénat, en l'élargissant à tous les types de vols et non à certains d'entre eux seulement et en l'étendant aux " zones densément peuplées ".

Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 sans modification.

Article 4 -

Consultation de l'autorité indépendante pour le plan d'exposition au bruit. Coordination.

Par coordination avec l'article 1 er , cet article insère au code de l'urbanisme une disposition relative à la consultation de l'autorité indépendante pour l'élaboration des plans d'exposition au bruit.

Le présent article vise à insérer, à l'article L.147-3 du code de l'urbanisme 13( * ) , relatif au mode d'élaboration des plans d'exposition au bruit, une obligation de consultation de l'autorité indépendante , pour les aérodromes où elle dispose de compétences particulières en la matière, par coordination avec les dispositions du 5° de l'article L.227-4 du code de l'aviation civile, dans sa rédaction proposée par l'article 1er du présent projet de loi.

En première lecture, le Sénat , afin de mieux coordonner leurs actions respectives, avait précisé que l'autorité prend connaissance au préalable de l'avis de la CCE concernée, avant d'émettre le sien, pour les neuf plus grands aérodromes. L'Assemblée nationale n'a adopté à cet article qu'un amendement de coodination.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 sans modification.

Article 4 bis (nouveau) -

Extension des possibilités de construction dans la zone C des plans d'exposition au bruit

Cet article additionnel introduit par l'Assemblée nationale vise à permettre des constructions d'immeubles collectifs à usage d'habitation dans la zone C des plans d'exposition au bruit.

Cet article, introduit par amendement, modifie les restrictions d'urbanisme imposées dans les zones C des plans d'exposition au bruit.

Votre rapporteur rappellera tout d'abord brièvement les dispositions de l'article L.147-5 du code de l'urbanisme relatives aux PEB, introduit par la loi précitée de 1985 relative à l'urbanisme au voisinage des aérodromes.

Les plans d'exposition au bruit

D'après cette loi, la maîtrise de l'urbanisation autour des aérodromes est directement liée à l'existence d'un plan d'exposition au bruit (PEB) et repose sur un principe général défini à l'article L.147-5 du code de l'urbanisme " Dans les zones définies par le plan d'exposition au bruit, l'extension de l'urbanisation et la création ou l'extension d'équipements publics sont interdites lorsqu'elles conduisent à exposer immédiatement ou à terme de nouvelles populations aux nuisances de bruit ".

Le PEB est un document graphique à l'échelle 1/25.000 e , qui délimite trois zones (A, B, C) d'exposition au bruit, définies par des valeurs d'indice psophique 14( * ) . La zone A correspond à une gêne moyenne ressentie très forte, la zone B à une gêne moyenne ressentie forte et la zone C à une zone moyenne ressentie modérée.

Dans ces zones, l'utilisation des sols est réglementée en vue d'y interdire ou d'y limiter la construction de logements, dans l'intérêt même des populations, ainsi que d'y prescrire des types d'activités peu sensibles au bruit, compatibles avec le voisinage d'un aérodrome.

Pour chaque type d'opération, différentes prescriptions d'urbanisme sont applicables, comme le détaille le tableau suivant :

PRESCRIPTIONS D'URBANISMES APPLICABLES
DANS LES ZONES DE BRUIT DES AÉRODROMES

CONSTRUCTIONS NOUVELLES

ZONE A

ZONE B

ZONE C

Logements nécessaires à l'activité de l'aérodrome, hôtels de voyageurs en transit

autorisés

autorisés

autorisés

Logements de fonction nécessaires aux activités industrielles ou commerciales

autorisés dans les secteurs déjà urbanisés

autorisés

autorisés

Immeubles d'habitation directement liés ou nécessaires à l'activité agricole

autorisés dans les secteurs déjà urbanisés

autorisés

autorisés

Equipements de superstructures nécessaires à l'activité aéronautique

autorisés s'ils ne peuvent être localisés ailleurs

autorisés

Constructions à usage industriel, commercial et agricole

autorisées si elles ne risquent pas d'entraîner l'implantation de population permanente

Equipements publics

autorisés s'ils sont indispensables aux populations existantes et s'ils ne peuvent être localisés ailleurs

Maisons d'habitation individuelles non groupées

INTERDITES

autorisées si secteur d'accueil déjà urbanisé et desservi par équipements publics sous réserve d'un faible accroissement de la capacité d'accueil

Immeubles collectifs, habitats groupés (lotissements ...) parcs résidentiels de loisirs

INTERDITS

 
 
 
 

OPERATIONS DE RENOVATION DES QUARTIERS OU DE REHABILITATION DE L'HABITAT EXISTANT

autorisées sous réserve de ne pas accroître la capacité d'accueil

autorisées sous réserve de ne pas accroître la capacité d'accueil et si secteur d'accueil déjà urbanisé et desservi par équipements publics sous réserve d'un faible accroissement de la capacité d'accueil

 
 
 
 

AMELIORATION ET EXTENSION MESUREE OU RECONTRRUCTION DES CONSTRUCTIONS EXISTANTES

autorisées s'il n'y a pas d'accroissement assimilable à la construction d'un nouveau logement

autorisées s'il n'y a pas d'accroissement assimilable à la construction d'un nouveau logement et si secteur d'accueil déjà urbanisé et desservi par équipements publics sous réserve d'un faible accroissement de la capacité d'accueil

En droit de l'urbanisme, l'existence d'un PEB a donc des effets sur les documents d'urbanisme et sur les autorisations d'utilisation du sol : les schémas directeurs, les schémas de secteurs ainsi que les plans d'aménagement de zones doivent être compatibles avec ses prescriptions. Mais c'est par l'intermédiaire des plans d'occupation des sols (POS) que sont transcrites les prescriptions réglementaires relatives à l'urbanisation dans les zones du PEB.

Dans la pratique, les POS doivent :

- présenter le problème des nuisances sonores et leurs conséquences sur les parties d'aménagement communal (rapport de présentation) ;

- proposer un zonage et un règlement compatibles avec le PEB, l'échelle du PEB (échelle 1/25.000 e ) laissant toutefois une marge d'appréciation quant à la transcription de ses limites sur les plans de zonages des POS (échelle 1/2000 e ) ;

- présenter en annexe le PEB (art. L.147-3 et R.123-24 du code de l'urbanisme).

Pour l'instruction des demandes d'utilisation du sol, et en particulier des permis de construire, deux démarches peuvent s'appliquer :

- lorsqu'il existe un POS rendu public ou approuvé et un PEB approuvé, l'instruction se déroule sur la base des dispositions du POS, sous réserve de sa compatibilité avec les prescriptions de l'article L.147-5 du code de l'urbanisme ;

- lorsqu'il n'existe pas de POS opposable mais uniquement un PEB approuvé, les dispositions de l'article L.147-5 du code de l'urbanisme sont directement opposables.

La plus grande partie des aéroports français sont concernés par la réglementation relative aux plans d'exposition au bruit. A ce jour, environ 180 PEB sont en vigueur.

L'effet du présent article

Le présent article vise à étendre les possibilités de construction, dans cette zone C du plan d'exposition au bruit, à tous les types d'habitation, au delà du seul cas actuellement prévu (maisons d'habitation individuelles non groupées). Ces constructions devront toutefois respecter les impératifs suivants : être situées dans des secteurs déjà urbanisés, être desservies par des équipements publics et n'entraîner qu'un " faible accroissement " de la capacité d'accueil d'habitants exposés aux nuisances. Cette notion peut être interprétée dans des sens différents.

La position de votre commission

Votre commission vous propose un amendement qui limite la possibilité de construction d'immeubles collectifs en zone C aux cas où elle s'accompagne d'une disparition simultanée et équivalente, dans la même zone, d'une capacité identique d'accueil d'habitants.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié

Article 4 ter (nouveau) -
(Article L.147-5 du code de l'urbanisme)

Nouvelle zone D des plans d'exposition au bruit

Cet article additionnel introduit par l'Assemblée nationale crée une nouvelle zone dans les plans d'exposition au bruit, dans laquelle les constructions devront faire l'objet d'une isolation acoustique.

L'origine de l'amendement de l'Assemblée nationale : l'article 6 du projet de loi introduit par le Sénat

Votre rapporteur estime que s'il est vrai qu'un certain nombre de riverains des aéroports ont consciemment choisi de vivre dans ces zones et ont le plus souvent acheté ou loué leur logement à des prix avantageux, en raison de sujétions présentes ou futures, d'autres ont choisi leur lieu de résidence sans être nécessairement informés des perspectives de développement de l'aéroport ou du plan d'exposition au bruit.

C'est pourquoi l'idée de construire à Roissy une cinquième piste ayant été abandonnée et celle de construire une troisième et une quatrième pistes ayant été prise, il apparaît nécessaire de prendre les moyens d'informer pleinement les riverains de Roissy et des autres aérodromes d'importance des risques de nuisances sonores qu'ils encourent, à l'instar des politiques suivies en la matière dans certains pays étrangers (aux Etats-Unis, par exemple).

Le fait de se soumettre à ces risques en toute connaissance de cause rendrait d'ailleurs beaucoup moins compréhensible l'opposition éventuelle de riverains à une situation ou à un projet connu d'eux.

C'est pourquoi votre rapporteur avait déposé une proposition de loi 15( * ) qui, s'inspirant de règles existantes en droit de la consommation, avait pour double objet :

- d'obliger contractuellement le vendeur ou le bailleur d'un bien immobilier situé dans le périmètre d'un plan d'exposition au bruit, à stipuler explicitement dans le contrat de vente ou de location que le bien se trouve exposé à des nuisances sonores d'origine aérienne et à préciser la nature de cette exposition en indiquant le type de zone -tel que défini à l'article L.147-4 du code de l'urbanisme- où il se trouve localisé ;

- d'obliger contractuellement le vendeur ou le bailleur d'un bien immobilier situé dans un rayon élargi par rapport au plan d'exposition au bruit, pour les 9 principaux aérodromes, à stipuler explicitement dans le contrat de vente ou de location que le bien se trouve localisé dans un tel périmètre, sous peine de s'exposer au versement de dommages et intérêts.

En première lecture, le Sénat avait intégré ces dispositions sous forme d'articles additionnels (articles 5 et 6) au présent projet de loi.

L'amendement adopté à l'Assemblée nationale

Le rapporteur de l'Assemblée nationale a considéré 16( * ) que les dispositions introduites par le Sénat tendaient à créer, dans les faits, une quatrième zone de plan d'exposition au bruit, mais à objet strictement informatif.

C'est pourquoi il a proposé aux députés, qui ont adopté cette solution, de créer une quatrième zone, la zone D, dans les plans d'exposition au bruit, à l'intérieur de laquelle les constructions sont autorisées mais doivent faire l'objet d'isolation acoustique, et de supprimer en conséquence les articles 5 et 6 introduits par le Sénat.

Un amendement a toutefois rendu obligatoire, et non facultatif, l'élaboration de cette zone D, ce qui impose, dans la rédaction actuelle, sa constitution autour de l'ensemble des aérodromes dotés d'un PEB.

La position de votre commission

Sur le principe, votre rapporteur tient tout d'abord à souligner la différence d'approche entre les dispositions du Sénat et celles de l'Assemblée nationale, ces dernières ayant pourtant été présentées comme reprenant et parachevant les premières.

Les articles 5 et 6 (voir ci-dessous) introduits par le Sénat visaient à protéger les riverains potentiels en leur assurant une claire information sur la proximité du bien immobilier considéré de l'aéroport, ou en leur permettant, à défaut, d'intenter une action en nullité de l'acte, ou en dommages et intérêts. La seule obligation était donc une obligation de claire et préalable information dont la sanction pouvait certes être, dans certains cas, de remettre en cause la transaction elle-même.

Le présent article vise, au contraire, à imposer que les nouvelles constructions comprises dans l'emprise de la nouvelle zone D soient insonorisées.

Votre commission estime toutefois que l'objectif d'information que souhaitait instaurer votre Haute Assemblée est satisfait par la rédaction de l'Assemblée nationale 17( * ) . Votre commission a donc adopté au présent article deux amendements tendant à ne rendre obligatoire la délimitation d'une zone D que pour les aérodromes les plus importants.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 ter ainsi modifié.

Article 4 quater (nouveau) -
(Articles L.147-7 et L.147-8 nouveaux du code de l'urbanisme) -

Application anticipée des dispositions d'un plan d'exposition au bruit

Cet article additionnel introduit par l'Assemblée nationale insère deux nouveaux articles au code de l'urbanisme, dont l'un reprend les dispositions de l'article 7 introduit par le Sénat en première lecture sur l'application anticipée d'un plan d'exposition au bruit.

L'origine de l'amendement : l'article 7 introduit par le Sénat en première lecture

Déplorant l'absence d'outil préventif concernant d'éventuelles prescriptions urbanistiques dans les zones limitrophes des PEB susceptibles d'être incluses, en vertu d'une révision en cours, dans le futur périmètre de la zone C, le Sénat avait voulu que le représentant de l'Etat puisse, temporairement, étendre à ces zones les dispositions applicables aux zones C. Cette disposition s'appliquait également en cas de création d'un PEB.

L'article additionnel qui insérait un article L.147-9 au code de l'urbanisme est devenu l'article 7 du projet de loi adopté par le Sénat en première lecture.

L'amendement de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a souhaité inclure cette disposition sous forme d'article additionnel après l'article 4, insérant un nouvel article L.147-7 au code de l'urbanisme, devenu l'article 4 quater du présent projet de loi. Elle a donc en conséquence supprimé l'article 7. En outre, elle a adopté un article L.147-8 nouveau du code de l'urbanisme prévoyant l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat pour définir, en tant que de besoin, les modalités d'application du chapitre du code de l'urbanisme consacré aux aéroports.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 quater sans modification.

Article 5 -
(Article L.147-7 du code de l'urbanisme) -

Protection et information préalable des riverains potentiels des aérodromes

Cet article tendait à instaurer une obligation d'information des riverains potentiels des aéroports. Il a été supprimé par l'Assemblée nationale

Cet article, comme les deux suivants, résultait, cela a déjà été dit, de l'adoption en première lecture par le Sénat d'amendements issus de la proposition de loi n° 198 de votre rapporteur tendant à améliorer l'information des riverains des aéroports.

Il avait pour objet d'insérer dans le code de l'urbanisme l'article L.147-7 imposant au vendeur ou au bailleur d'un bien immobilier situé dans le périmètre d'un plan d'exposition au bruit, de stipuler de manière explicite dans le contrat de vente ou de location que le bien se trouve exposé à des nuisances sonores d'origine aérienne. La clause, ainsi insérée dans le contrat, doit préciser la zone où se trouve localisé le bien. A défaut d'une clause, l'acquéreur ou le locataire peut intenter une action en nullité de l'acte. Les mesures d'application de cet article sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat.

L'Assemblée nationale a supprimé cet article au motif que l'adoption de l'article 4 ter créant une zone D dans les plans d'exposition au bruit satisfaisant l'objectif poursuivi par le Sénat.

Votre commission vous propose de maintenir la suppression de cet article.

Article 6 -
(Article L.147-8 du code de l'urbanisme) -

Protection et information préalable des riverains potentiels des aérodromes les plus importants

Cet article avait un objectif similaire à celui qui le précède, mais il s'appliquait dans un périmètre élargi. Il a été supprimé par l'Assemblée nationale.

L'article L.147-8 que créait cet article dans le code de l'urbanisme s'applique spécifiquement aux biens immobiliers situés au voisinage des aérodromes visés au 3 de l'article 266 septies du code des douanes, à savoir les neuf plus importants en termes de mouvements d'aéronefs. La procédure d'information établie par l'article 5 ci-dessus était étendue par le présent article aux biens immobiliers situés au-delà de la limite extérieure du plan d'exposition au bruit. Toutefois, la sanction de la non présence de la clause d'information n'était pas la nullité de l'acte, mais une action possible en dommages et intérêts.

La limite extérieure des PEB est généralement définie par une valeur d'indice psophique, fixée au terme d'une enquête publique par le préfet, comprise entre 84 et 72 (article R.147-2 du code de l'urbanisme). L'article R.147-3 du même code prévoit cependant qu'une modulation de l'indice psophique déterminant la limite extérieure du plan d'exposition au bruit est possible, à l'intérieur d'une plage allant de la valeur 72 à la valeur 69. C'est au sein de ce périmètre maximal que s'appliquerait cette obligation d'information.

Sur le fondement de la même argumentation, l'Assemblée nationale a supprimé cet article.

Votre commission vous propose de maintenir la suppression de cet article.

Article 7 -
(Article L.147-9 du code de l'urbanisme) -

Extension des prescriptions urbanistiques dans les zones limitrophes d'un plan d'exposition au bruit et susceptibles d'y être incluses

Cet article visait à étendre de manière temporaire (pour une durée maximum de deux ans) les prescriptions contenues dans un plan d'exposition au bruit, lorsqu'il est en cours d'élaboration ou de révision, aux zones limitrophes mais qui sont incluses dans le projet de plan. Il a été supprimé par l'Assemblée nationale.

Cet article avait été introduit par le Sénat en première lecture. Il visait à doter l'administration d'un outil préventif pour éviter que ne se produisent des situations d'exposition aux nuisances sonores. C'est le préfet du département concerné qui aurait décidé de cette extension provisoire. Cette disposition permettait en fait d'anticiper la mise en oeuvre éventuelle au sein du périmètres d'étude, des contraintes urbanistiques s'exerçant en zone C d'un plan d'exposition au bruit (inconstructibilité partielle).

L'Assemblée nationale a considéré que cet article avait une visée préventive qu'il convenait de promouvoir, car il prend en compte la relative longueur de la procédure de révision d'un plan (au moins un an). Aussi ces dispositions ont-elles été introduites à l'article 4 quater ci-dessus, l'Assemblée nationale supprimant en conséquence le présent article.

Votre commission vous propose de maintenir la suppression de cet article.

* *

*

Votre commission vous demande d'adopter le présent projet de loi, modifié par les amendements qu'elle vous propose .



1 Dont la création est proposée par le projet de loi sur la modernisation et le développement du service public de l'électricité.

2 Proposition de loi n° 198 de M. Jean-François Le Grand, tendant à améliorer l'information des riverains d'aéroport, Sénat, 1999.

3 Page 32 de son rapport.

4 Article L.36-8 du code des postes et télécommunications introduit par la loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications.

5 Projet de loi " Modernisation et développement du service public de l'électricité ".

6 Inséré par la loi n° 89-531 du 2 août 1989 relative à la sécurité et à la transparence du marché financier.

7 Notamment dans ses décisions 88-248 DC du 17 janvier 1989 Conseil Supérieur de l'Audiovisuel ; 89-260 DC du 28 juillet 1989 Commission des Opérations de Bourse ; 96-378 DC du 23 juillet 1996 Loi de réglementation des télécommunications.

8 Décision 89-280DC du 28 juillet 1989.

9 Dont le Conseil n'a toutefois pas explicitement affirmé, dans sa décision 89-260, qu'il ait valeur constitutionnelle.

10 Comme c'est le cas pour l'ART.

11 A ne pas confondre avec les commissions consultatives économiques des aérodromes.

12 Issu de la loi précitée du 11 juillet 1985.

13 Issu de la loi précitée de 1985

14 Indice de mesure du bruit.

15 Proposition de loi précitée n° 198 de M. Jean-François LE GRAND, Sénat 1999.

16 Voir page 55 de son rapport.

17 Puisqu'en vertu du code de l'urbanisme, l'existence d'une zone de bruit est mentionnée au certificat d'urbanisme.



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