B. L'ORDONNANCE N° 98-731 DU 20 AOÛT 1998
1. Des dispositions diverses
Cette ordonnance comporte trois types de dispositions bien spécifiques.
a) Les conditions de remboursement des médicaments
Les
articles premier à 4 de cette ordonnance donnent une nouvelle base
légale dans les départements d'outre-mer et à
Saint-Pierre-et-Miquelon à une majoration de la tarification applicable
aux produits sanguins labiles et aux médicaments remboursables pour
tenir compte des coûts d'éloignement.
S'agissant de la tarification des produits sanguins labiles, les
dérogations tarifaires accordées dans les départements
d'outre-mer reposent sur des bases légales incertaines et disparates.
L'article premier de l'ordonnance prévoit alors que ces majorations sont
fixées par un arrêté conjoint des ministres chargés
de la santé, de la sécurité sociale et de l'outre-mer.
S'agissant de la tarification des médicaments remboursables, les
dérogations tarifaires prises par les préfets ont vu leur
légalité contestée par le Conseil d'Etat. Les articles 2
et 3 prévoient donc que ces majorations sont fixées par un
arrêté pris par les ministres chargés de la
sécurité sociale, de la santé, de l'économie et de
l'outre-mer. L'article 4 est un simple article de cohérence.
Votre commission s'interroge sur l'opportunité d'un tel
dispositif
. Elle observe d'abord qu'une majoration -qui pourrait être
substantielle- du prix des médicaments remboursables n'est pas
forcément souhaitable dans des départements où le
coût de la vie est déjà supérieur à celui de
la métropole et où la situation sanitaire reste souvent
précaire. Il est à craindre qu'une telle majoration restreigne
l'accès aux soins. Votre commission observe en outre que les majorations
seront décidées au niveau national alors qu'il serait sans doute
préférable de privilégier une décision locale afin
de mieux prendre en compte les spécificités de chaque
département.
Toutefois, une telle disposition n'a pas, à notre connaissance,
soulevé d'opposition dans les départements d'outre-mer, votre
commission n'assortira pas ses réserves d'un amendement de
suppression
.
b) La coordination en matière de sécurité sociale en Nouvelle-Calédonie
La
Nouvelle-Calédonie, compétente en matière de protection
sociale en application de la loi statutaire du 9 novembre 1988, a
élaboré ses propres règles autonomes dans ce domaine.
Afin d'assurer le maintien d'une couverture sociale, sans interruption ou perte
de droit, pour les assurés se déplaçant de la
métropole et des départements d'outre-mer vers la
Nouvelle-Calédonie et réciproquement, un accord de coordination a
été conclu par le passé. Cet accord beaucoup trop
succinct, car concernant principalement l'assurance vieillesse et les soins de
santé aux pensionnés, semble devoir être
réexaminé.
L'article 5 de l'ordonnance prévoit en conséquence que
l'Etat concluera avec le territoire de la Nouvelle-Calédonie un accord
pour coordonner les régimes de protection sociale et ce pour l'ensemble
des risques et des personnes assurées, comme il l'a fait en 1994 avec le
territoire de la Polynésie.
Votre commission ne peut que partager l'économie de cette disposition
qui permettrait d'assurer dans de bonnes conditions une continuité de la
protection sociale. Elle observe toutefois qu'une telle disposition aura un
coût non négligeable tant pour l'Etat
12(
*
)
du fait de la prise en compte de la
protection sociale des fonctionnaires que pour la sécurité
sociale
13(
*
)
.
c) La protection complémentaire vieillesse des travailleurs non salariés à Saint-Pierre-et-Miquelon
La loi
n° 87-563 du 17 juillet 1987 a modifié le régime
d'assurance vieillesse applicable aux salariés et non-salariés
résidant dans la collectivité territoriale de
Saint-Pierre-et-Miquelon. Toutefois, elle ne prévoit pas l'obligation
pour les non-salariés d'adhérer à un régime
complémentaire d'assurance vieillesse existant en métropole. Elle
n'institue qu'une simple faculté d'adhésion.
Pour répondre à la demande des travailleurs non salariés
de Saint-Pierre-et-Miquelon, l'article 6 de l'ordonnance prévoit
une affiliation obligatoire et organise le transfert des affiliés non
salariés à un régime de retraite complémentaire de
la métropole, qu'il s'agisse de la CANCAVA, de la caisse nationale
d'assurance vieillesse des professions libérales ou de la caisse
nationale des barreaux français.
Votre commission ne peut que s'associer à une telle mesure.
2. Une application retardée
Votre
commission observe que cette ordonnance reste pour l'instant lettre morte plus
d'un an après sa publication.
S'agissant de la tarification des produits sanguins labiles et des
médicaments remboursables, aucun arrêté
interministériel de majoration n'a encore été pris.
S'agissant de la coordination des régimes de protection sociale
métropolitain et néo-calédonien, l'accord prévu
à l'article 5 de l'ordonnance n'a toujours pas été
signé. En outre, il semble que la signature de l'accord soit
subordonnée à une unification préalable des
différents organismes de protection sociale
néo-calédonien. Or, le dispositif se caractérise
aujourd'hui pas son éparpillement (il existe 7 organismes de
gestion). En outre, une unification des régimes impliquerait
l'affiliation des fonctionnaires à ce régime. Cela rend alors
nécessaire le recours à une loi organique. Il est donc à
craindre que l'application de cet article soit durablement
différée.
S'agissant enfin de la protection complémentaire vieillesse des
travailleurs non salariés à Saint-Pierre-et-Miquelon,
l'application de l'accord passe par la signature de trois conventions avec les
organismes de retraite complémentaire. Or, si la convention avec la
CANCAVA est en cours d'être négociée, il semblerait que les
négociations avec les deux autres organismes soient au point mort. Ce
retard est d'autant plus regrettable que l'article 6 de l'ordonnance
était censé être applicable à compter du
1
er
janvier 1999.