III. UNE POLITIQUE DES DÉPENSES PUBLIQUES MARQUÉE PAR LA PASSIVITÉ
Le gouvernement semble, en matière de dépenses publiques se parer des attributs de la vertu en affichant pour 2000 un objectif de progression limité à 0,9 % soit une stabilisation en volume. L'examen attentif des différents postes de dépenses conduit néanmoins à s'interroger sur la soutenabilité et les modalités de réalisation d'un tel objectif.
A. 15 MILLIARDS DE FRANCS DE DÉPENSES SUPPLÉMENTAIRES EN 2000
1. Des dépenses stabilisées en volume
Le
gouvernement souligne dans son exposé des motifs que l'exercice 2000 est
marqué notamment, par
" une progression des dépenses
(+ 15 milliards de francs) égale à l'augmentation
prévisionnelle des prix hors tabac (+0,9 %) ".
Par conséquent, l'objectif du gouvernement est de stabiliser les
dépenses publiques en volume.
Votre commission ne peut que se réjouir d'être, enfin, entendue
par le gouvernement. Dans son rapport relatif au débat d'orientation
budgétaire pour 2000
20(
*
)
, votre rapporteur
général écrivait à ce propos :
" il
convient impérativement d'encadrer la progression de la dépense
publique en la stabilisant en volume, c'est-à-dire en francs
constants ".
Elle constate ainsi que
la stabilisation des dépenses publiques est
ainsi tout à fait possible
, ainsi qu'elle l'affirme depuis trois ans.
Il convient toutefois de préciser que cette stabilisation est
facilitée par la bonne conjoncture économique et par
l'allégement du poids des charges de la dette, qui induisent autant
d'économies de constatation mais également par la
réduction arbitraire des crédits d'investissement militaire.
En fait, un tel contexte aurait dû permettre, non pas seulement de
stabiliser le niveau des dépenses publiques en volume, mais
également d'envisager leur réduction en volume, comme cela avait
été réalisé en 1997.
Source : Cour des Comptes
2. L'évolution des dépenses dans le projet de loi de finances
a) 17,5 milliards de francs de dépenses supplémentaires hors dette
À
structure constante,
les dépenses du budget général
vont passer de 1.670,56 milliards de francs en 1999 à
1.685,53 milliards de francs en 2000
. Cette progression de
15 milliards de francs correspond, en effet, à une hausse de
0,9 %, soit le taux d'inflation prévue pour 2000. Elle est
même de 17,5 milliards de francs hors dette.
Après prise en compte du solde des comptes spéciaux du
Trésor, qui était de - 3,11 milliards de francs en 1999 et qui
devrait s'établir à - 3 milliards de francs en 2000,
les charges budgétaires s'élèveront à
1.682,53 milliards de francs en 2000, contre 1.667,45 milliards de francs
en 1999, soit une progression de 0,9 %.
Le tableau ci-dessous retrace l'évolution, à structure constante,
des dépenses entre 1999 et 2000 :
Il apparaît que l'évolution des dépenses par titre, présentée dans le tableau ci-après, reflète avant tout une augmentation des dépenses de fonctionnement très supérieure à la hausse moyenne des dépenses du budget général (+ 2,8 % pour les dépenses civiles du titre III), tandis que les dépenses d'investissement sont stables en francs courants, voire en diminution s'agissant des dépenses d'investissement militaires (- 3,6 % pour les dépenses militaires des titres V et VI).
Dépenses du budget général
Source : Ministère de l'Economie
b) Des modifications importantes du périmètre du budget de l'Etat
Le projet de loi de finances pour 2000 modifie de manière considérable le périmètre du budget de l'Etat, comme le montre le tableau ci-après 21( * ) :
Présentation des modifications de périmètres en PLF 2000 par ministère
(en millions de francs)
Ces modifications engendrent une réduction nette de 24,9 milliards de
francs des dépenses prises en charge par le budget de l'Etat.
Elles résultent de
quatre opérations
de nature
différente :
•
La budgétisation, à hauteur de 8,58 milliards de
francs, de dépenses de rémunérations et de pensions
assurées, jusqu'à présent, par des fonds de concours.
Cette réintégration de crédits au sein du budget de l'Etat
est consécutive à deux décisions
22(
*
)
du Conseil constitutionnel.
Le projet de loi de finances pour 2000 réalise ainsi la
budgétisation de 39 nouveaux fonds de concours, les crédits
correspondants étant inscrits aux budgets suivants : 2.017 millions
de francs sur le budget de l'économie, des finances et de l'industrie,
26 millions de francs sur le budget de la recherche et technologie, 60 millions
de francs sur le budget de l'intérieur, et 21 millions de francs sur le
budget de l'agriculture.
En outre, le présent projet de loi prévoit la suppression du
fonds de concours finançant les pensions que l'Etat verse aux agents de
divers établissements publics, tels que le CNRS
23(
*
)
, l'INSERM
24(
*
)
, l'INRA
25(
*
)
... Le budget des charges communes se
trouve ainsi abondé à hauteur de 5.026 millions de francs.
Sont également réintégrés au sein du budget de
l'Etat les crédits liés aux activités d'ingénierie
publique des agents des services déconcentrés du ministère
de l'équipement d'une part, à hauteur de 948 millions de francs,
et de celui de l'agriculture d'autre part, pour 481 millions de francs.
•
La suppression de quatre comptes d'affectation spéciale
à compter du 31 décembre 1999, pour des crédits
s'établissant à 1.104 millions de francs.
Il s'agit des comptes d'affectation spéciale n° 902-01 " Fonds
forestier national ", n° 902-13 " Fonds de secours aux victimes
de sinistres et calamités ", n° 902-16 " Fonds national
du livre ", et n° 902-22 " Fonds pour l'aménagement de
l'Ile de France ".
•
La compensation, sous forme de dotations budgétaires, de
mesures de suppression ou d'abaissement de taxes, à hauteur de
4.858 millions de francs.
Les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) feront l'objet
d'une nouvelle réduction, qui sera compensée par l'Etat aux
collectivités territoriales sous forme de dotation budgétaire
d'un montant de 4.604 millions de francs.
En outre, l'Etat compensera la suppression de taxes parafiscales auxquelles
étaient assujetties diverses filières professionnelles et qui
étaient destinées à financer des centres techniques
industriels ou des instituts de recherche. Le coût de cette compensation
sera de 254 millions de francs.
•
Des transferts budgétaires massifs entre l'Etat et la
sécurité sociale, pour un montant de 39,5 milliards de francs.
Afin de financer les allégements de charges sociales existants, ainsi
que ceux prévus par la seconde loi sur les " 35 heures ",
l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2000 prévoit la création d'un fonds de financement
de la réforme des cotisations patronales de sécurité
sociale.
Le présent projet de loi de finances se propose ainsi de
transférer à ce fonds les crédits correspondant au
financement de la " ristourne dégressive " à hauteur de
39,5 milliards de francs.