III. LE FRAGILE EXCÉDENT DES COLLECTIVITÉS LOCALES
Les
collectivités locales ont " qualifié " la France pour
l'euro. La formule est sans doute réductrice mais,
sur le plan
comptable notre pays n'aurait pas été admis à participer
à la monnaie unique sans le solde budgétaire excédentaire
dégagé, depuis 1997, par les administrations publiques
locales.
La capacité de financement des collectivités locales a même
été réévaluée par le changement de base
opéré en comptabilité nationale. Pour 1997 et 1998, cet
excédent s'établit à 0,3 % du PIB. Pour 1999 et 2000,
les prévisions du gouvernement l'estiment en légère
baisse, à 0,2 % du PIB.
Cet excédent est la conséquence de la stratégie
adoptée par les collectivités locales depuis le milieu des
années 90. Confrontées à un endettement croissant, rendu
intenable en raison de la mauvaise conjoncture économique et de la
réduction des dotations de l'Etat qui en a résulté, les
collectivités locales ont entrepris de maîtriser leurs
dépenses de fonctionnement et de se désendetter.
Cette stratégie a eu un coût : la réduction de
l'effort d'investissement. Mais elle s'est révélée payante
puisque les collectés locales dégagent à présent
une capacité de financement, qui leur permet :
- d'autofinancer une partie leurs nouveaux investissements. L'épargne
brute des collectivités locales s'établirait à environ
5 milliards de francs, soit 3 % des recettes courantes des
collectivités, et financerait 14 % des
investissements
38(
*
)
;
- de pratiquement stabiliser le niveau des taux des impôts directs
locaux, qui ont augmenté en 1999 de seulement 0,5 % par rapport à
1998. En effet, "
depuis 1997, les collectivités locales ont
dans leur ensemble décidé d'infléchir la croissance de
leurs taux d'imposition. Cette tendance s'affirme plus nettement encore en
1999
", si bien que "
dans 20 % des communes, les taux globaux
toutes collectivités ont diminué
"
39(
*
)
.
Le " cercle vertueux " enclenché au milieu des années
90, qui contraste avec les orientations budgétaires du gouvernement,
produit encore ses effets aujourd'hui. Néanmoins, les orientations du
gouvernement en matière de finances locales contribuent à mettre
en péril le redressement des collectivités locales.
A. LES DÉTERMINANTS DE L'EXCÉDENT DES COLLECTIVITÉS LOCALES
1. La diminution des frais financiers
Le
redressement de la situation financière des collectivités locales
n'aurait pas été possible sans la baisse des taux
d'intérêt, dont elles ont su tirer le meilleur parti en se livrant
à une politique dynamique de gestion de leur dette et de
réaménagement de son montant. Dans son rapport sur l'état
des finances locales en 1999, notre collègue Joël Bourdin souligne
que, grâce à la qualité de leur gestion, les
collectivités locales bénéficient dorénavant de
prêts dans des conditions plus favorables qu'auparavant
40(
*
)
.
En 1999, pour la sixième année consécutive, les
collectivités locales bénéficieront d'un repli de leurs
frais financiers, que le Crédit local de France estime à 7,3 %.
Ce repli est également la conséquence de la baisse du volume de
la dette. Alors que l'encours augmentait de 20 à 40 milliards de francs
par an depuis 1983, il est négatif depuis 1997 et devrait diminuer de
12,5 milliards de francs en 1999.
2. La maîtrise des dépenses de gestion
Les
collectivités locales ne peuvent guère agir sur le montant de
leurs dépenses de personnel puisque les décisions en
matière d'évolution des rémunérations sont prises
par l'Etat. En ce domaine, leur unique marge de manoeuvre réside dans
les recrutements.
Par conséquent, les collectivités locales ont agi sur les autres
dépenses de fonctionnement, en particulier les " achats et charges
externes " qui connaissent une progression réduite depuis 1997. Le
Crédit local de France souligne que "
les économies
effectuées par les collectivités sur les postes dont elles ont la
maîtrise contribuent à cette
décélération
".
Les " autres dépenses de gestion ", qui correspondent surtout
à l'exercice des compétences transférées,
connaissent une légère augmentation depuis 1998, qui est due
à la mise en place de la prestation spéciale dépendance en
1997 et au rôle joué par les départements.
3. L'évolution des recettes
Les
collectivités locales ont bénéficié en 1999 d'une
évolution favorable de leurs recettes fiscales mais également des
dotations de l'Etat.
L'augmentation des recettes fiscales en 1999 devrait, selon le ministère
de l'intérieur, s'élever à 4,2 %. Elle n'est pas due
à une augmentation des taux mais à la croissance des bases, qui
provient de la croissance économique. L'augmentation des bases provient
également de la réintégration dans l'assiette imposable de
la taxe professionnelle des bases anciennement exonérées au titre
de la réduction pour embauche et investissement (REI), donc d'un
accroissement de la fiscalité des entreprises.
L'année 1999 a également été favorable en
matière de concours financiers de l'Etat, en raison du taux de
croissance du PIB élevé en 1998. Le taux de croissance de 1998
(3,2 %) a en effet servi de base pour le calcul du taux de progression de
l'enveloppe normée des concours de l'Etat, ainsi que pour celui de la
dotation globale de fonctionnement (DGF), qui a augmenté de 2,75 %. Le
bon taux de progression de la DGF était également dû au
montant limité de la " régularisation négative "
au titre de 1997, qui s'élevait à 256 millions de francs.
En 2000, la taux de progression des concours de l'Etat n'est pas aussi
favorable car, d'une part, le taux de croissance du PIB en 1999 est moins
élevé qu'en 1998 (2,3 %) et, d'autre part, le montant de la
régularisation négative au titre de 1998 est très
important (680 millions de francs).